Michel-Ange 5 : Des tombeaux pour l`éternité par Anne Embs

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Michel-Ange 5 : Des tombeaux pour l`éternité par Anne Embs
Michel-Ange 5 : Des tombeaux pour l’éternité par Anne Embs
Michel-Ange introduit une rupture dans la tradition occidentale des monuments funéraires. En effet, depuis le Moyen-âge, il est de tradition de consacrer des
monuments de plus en plus importants aux grands personnages, laïcs ou religieux. Deux traditions coexistent, la tradition française et l’italienne. Michel-Ange y
puisera son inspiration et révolutionnera la tradition.
Une tradition séculière
La nécropole dynastique a pour but de perpétuer la mémoire et de l’inscrire dans une continuité plus vaste. C’est le cas de la nécropole des rois de France en
l’abbaye de Saint Denis, à partir du XIIe siècle souverains et souveraines de France y sont inhumés. La volonté de regrouper les corps et d’élever un tombeau
pour matérialiser la gloire et la mémoire d’une personne se met en place avec Louis IX. Un modèle formel va être créé. Il sera soit isolé soit pariétal ou adossé.
Tombeau de Louis de France, fils de Saint Louis, dessin de la collection Gaignières François-Roger de Gaignières (XVIIe) était un érudit,
passionné d’histoire de la monarchie française, qui a amassé sur près d’un demi-siècle une documentation textuelle et graphique considérable sur des
monuments en grande partie détruits aujourd’hui des époques médiévale et moderne.
Le monument se présente sous une forme architecturée, sorte de chapelle au vocabulaire gothique (arc bridé, trilobé, voûte d’ogives, pinacles, gable,
crochets…). Le monument repose sur un soubassement doté d’un décor en relief. Le cortège funéraire est transcrit dans la pierre. Le gisant repose sur une
table. Il est représenté en « juste », dans l’attente de la résurrection (yeux ouverts et mains jointes). En Italie, le gisant est un mort aux yeux fermés. Les
monuments étaient polychromes, ce qui facilitait la lecture.
Tombeau du roi Dagobert, Saint-Denis, vers 1260 pariétal, il adapte la structure précédente. Il se présente alors sous la forme d’un portail d’église
dont le tympan présente trois registres. Le défunt est allongé, accompagné de son épouse et de son fils. Le Christ et deux figures somment le monument. Cette
structure est reprise en Italie rapidement avec quelques modifications
Tino da Camaino, tombeau de Marie de Hongrie, Naples, 1324-25, Santa Maria Donna Regina le cortège est remplacé par la
représentation de la famille (Marie de Hongrie est la mère de Robert et de Louis d’Anjou, roi de Naples). Ici, le sarcophage ne touche pas le sol, il est porté par
des figures de cariatides, des anges porteurs. On théâtralise la veillée funéraire, avec les personnages retenant les rideaux et dévoilant le gisant. Les tombeaux
italiens sont en règle générale en marbre.
Tino da Camaino, Tombeau du cardinal Petroni, 1317, Sienne on gagne en ampleur, en autonomie.
Donatello, tombeau de l’antipape, Jean XXIII, Florence, Baptistère, vers 1422-28 au XVe siècle, apparait le « tombeau humaniste » qui
mélange savamment les connaissances de l’Antiquité et les principes chrétiens. Dans une synthèse des modèles précédents, le tombeau se présente le défunt à
la vue de tous. Un baldaquin vient unifier la chambre funéraire. Issus de l’Antiquité, on voit apparaitre l’épitaphe (comme celles existantes sur les
sarcophages), des génies funéraires (spiritelli) qui vont accompagner le défunt et des guirlandes en partie basse. Différents marbres colorés, l’utilisation du
bronze amènent la polychromie.
Donatello et Michelozzo, chapelle Brancacci, 1426-28, Naples, Sant’Angelo a Nilo
Rossellino, tombeau de Léonardo Bruni, Florence, Santa Croce, 1444-47 l’architecture antique devient plus cohérente.
Les modèles font des émules et les tombeaux prennent de plus en plus d’ampleur.
Pietro Lombardo, tombeau du doge Mocenigo, Venise, église santi Giovanni e Paolo, 1476-81 il peut ainsi prendre la forme d’un arc de
triomphe. L’idée de registre terrestre et de registre céleste disparait au profit d’une laïcisation de l’ensemble. L’exaltation de la gloire terrestre est le plus
important : le doge se présente en armure, des soldats portent le sarcophage et cinq autres s’abritent dans les niches. !
Giovanni Cristoforo Romano, Tombeau de Gian Galeazzo Visconti, Pavie, Chartreuse. 1497 Le vocabulaire architectural chargé de ce
monument quasi isolé, mais aussi pariétal fascine les Français à Naples. Le catafalque, en partie basse, appartient donc au registre terrestre (celui de la mort),
la Vierge à l’enfant, en partie haute au registre céleste.
Tombeau du roi Charles VIII, dessin de la collection Gaignières. La composition du tombeau évolue sous la mode italienne. Les soubassements
présentent des figures en médaille et est surmonté par le défunt en prière (vivant donc) avec des angelots.
Antonio del Pollaiolo, tombeau de Sixte IV, 1484-1493 Contemporain de Michel-Ange, Pollaiolo est un spécialiste de l’art du bronze et un élève de
Bertoldo, le maître de Michel-Ange. Ce tombeau est une commande de Jules II en hommage à son oncle Sixte IV pour être placé dans la basilique St Pierre de
Rome. Jules II, est aussi le commanditaire de Michel-Ange. Sixte IV, grand pape théologien et grand mécène est accompagné des arts libéraux et des vertus
théologales.
Cristoforo Solari, tombeau de Ludovic le More, Pavie, Chartreuse, 1497 les gisant va apparaître aussi allongé et isolé.
Antonio del Pollaiolo, Innocent VIII, 1492- 1498, Rome, St Pierre Dans cette structure pariétale, le pape apparaît deux fois : mort comme gisant,
vivant et trônant. Il est accompagné des vertus trois théologales (foi, espérance et charité) et quatre vertus cardinales (prudence, tempérance, force et justice).
Le montage des registres a pu être inversé au remontage du XVIIè s
Andrea Bregno, tombeau de Christoforo della Rovere, Rome, Santa Maria del Popolo, 1479.
La Tragédie du tombeau
Michel-Ange obtient la commande du monument funéraire de Jules II qui va l’occuper 42 ans, entre 1505 et 1547.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, Rome, St Pierre-aux-Liens, 1505-1545 C’est le projet de plus ambitieux de l’artiste. La complexité de
l’œuvre sera source de désillusion, sa réalisation placée à St Pierre aux liens deviendra une sorte de bricolage !
Michel-Ange, tombeau de Jules II, premier projet En 1505, Jules II nouvellement pape, appelle Michel-Ange à Rome et lui demande la réalisation de
son monument funéraire. Ce monument devait prendre place dans la basilique Saint-Pierre, alors encore ancienne basilique paléochrétienne de Constantin. Jules
II pense déjà à reconstruire le chœur. Le premier projet qui rencontre l’adhésion du pape, n’est connu que par des descriptions écrites dues à Vasari (Vite) et à
Condivi (biographe de Michel-Ange), Michel-Ange ayant certainement fourni un maquette en bois.
Le tombeau, isolé, est de dimension impressionnante : 7m de long, 10, 5 de large et 10 à 12 m haut… 30 à 40 sculptures habitaient le monument à différents
niveaux. Le soubassement présentait au niveau 1 des figures de victoires, entre les niches, des captifs (ou esclaves) et des termes assuraient la liaison au
registre 2. Venaient ensuite les figures de Saint Paul, Moïse, les allégories de la vie active et de la vie contemplatives. C’était le niveau des intercesseurs entre
terrestre et céleste.
Le défunt et un sarcophage devaient sans doute être placés en hauteur (mais c’est peu clair !!!).
Jules II donne carte blanche à Michel-Ange et ce dernier quitte Rome pour Carrare, à la recherche des blocs de marbre durant une année. Revenu à Rome en
1506, avec le matériau qu’il entrepose dans une avant cour de la basilique, il se voit chassé par jules II qui a d’autres projets et notamment celui de
reconstruire une basilique St pierre, projet qu’il confie à Bramante. Vexé, il quitte nuitamment Rome et s’installe à Florence. Un compromis entre le pape et
l’artiste sera trouvé, Michel-Ange se voyant confié la décoration du plafond de la Sixtine… projet qui l’occupe jusqu’en 1512. Il est alors question de nouveau
du tombeau, mais Jules II meurt en 1513, et Francesco della Rovere, exécuteur testamentaire, trouvant le premier projet trop ambitieux demande à Michel Ange
une autre solution.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, deuxième projet toujours prévu pour St Pierre de Rome, le tombeau se présente maintenant comme un monument
adossé, toujours très ambitieux. Très développé en largeur, le contrat stipule l’exécution de 24 sculptures : Victoires et captifs, St Paul et Moïse, Vie active et Vie
contemplative, le défunt, le sarcophage, des anges porteurs et une Vierge à l’enfant. Le projet est connu par des copies d’après Michel-Ange.
Entre 1513 et 1516, Michel-Ange commence à sculpter le tombeau : les deux Esclaves du Louvre et la figure du Moïse.
D’après Michel-Ange, tombeau de Jules II, deuxième projet, New York, MET
D’après Michel-Ange, tombeau de Jules II, deuxième projet, 1513, Florence, Offices
Mais Léon X (Médicis) se fâche avec la famille della Rovere et les déchoit de leurs droits et confie à Michel-Ange la mise en place de la façade de san Lorenzo à
Florence (église paroissiale de la famille Médicis). Après ce projet avorté, Michel-Ange va œuvrer à la sacristie neuve, aux tombeaux des Médicis et à la
Bibliothèque laurentienne jusqu’en 1534.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, troisième projet Un troisième projet beaucoup moins ambitieux, présente un tombeau de simple façade, sans
retour latéraux mais avec un développement des niches. Il y a toujours les captifs, les niches, le défunt, Saint Paul et Moïse, la Vierge à l’enfant. Deux ou trois
autres projets (variations) seront présentés jusqu’à la version finale de St Pierre aux Liens. Pour une raison inconnue, les captifs et victoire sont retirés de la
mise en place.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, Rome, St Pierre-aux-Liens, 1505-1545 Il revient au projet en 1534 et obtient la permission de travailler avec
des collaborateurs en 1535 pour la réalisation de la Vierge, du gisant, des allégories. Il place en partie basse le Moïse, dans les niches Léa et Rachel (figures
antagonistes représentant la vie active et la vie contemplative). Il garde les termes qui assurent la transition entre le bas et le haut. C’est un monument
décevant, d’une grande maladresse dans l’inachèvement. Le registre inférieur est très chargé (volutes, termes, héraldisme) et le niveau supérieur peu
terminé… Il y a des différences d’échelle extravagante (le gisant est ridiculement petit). Le tout donne l’impression d’un bricolage maladroit et laisse un artiste
déçu et frustré.
Iconographie : le premier projet reste le plus intéressant pour le sens à donner. On note que jusqu’au bout, les esclaves étaient en place, en alternance avec
des Victoires. Ce sont des statues plus grandes que nature (2,60 à 2,70 m), des effigies masculines, nues, ligotées… ce qui peut sembler étrange sur le
tombeau d’un pape, même dans un courant néoplatonicien. L’appellation Esclave/Captif est un terme moderne.
-­‐ Vasari parle de la représentation des provinces reconquises par le pape… mais ces figures existent déjà avant les conquêtes
-­‐ Ces figures seraient des symboles des arts libéraux mis en esclavage avec la mort du pontife.
Michel-Ange, Esclave dit « rebelle», Paris, musée du Louvre, 1515 Ainsi l’esclave rebelle posant le pied sur un bloc de pierre correspondant à la
représentation d’un chapiteau renversé symboliserait l’architecture et l’esclave mourant qui est accompagné d’un singe, la peinture (la peinture est le singe
de la nature). La série des esclaves florentins n’apporte aucun élément…
-­‐ Une des sources des esclaves est à rechercher à Sienne, où Michel-Ange a travaillé de 1501 à 1505, notamment au Duomo
Antonio Federighi, bénitier, Sienne, cathédrale, 1467 où on retrouve les mêmes figures, qui sont considérées comme des représentations des
âmes pécheresses, prisonnières du mal, exclues du salut.
-­‐ Les esclaves sont des représentations de la condition de l’homme pêcheur, esclave de sa condition matérielle (le corps est le tombeau de l’âme), conception
issues des théories néoplatoniciennes.
-­‐ Les esclaves ont aussi une fonction plastique, elles unifient, comme les ignudi du tondo Doni et du Plafond de la Sixtine .
Si l’iconographie est difficile à saisir, elle est en relation et sur le même plan que les œuvres contemporaines du maître et ces esclaves sont d’une étonnante
beauté.
Les premières sculptures travaillées par Michel-Ange sont le Moïse et les deux esclaves du Louvre.
Michel-Ange, Esclave dit « rebelle », Esclave dit « mourant», Paris, musée du Louvre, 1515
Conçus pour le premier projet du tombeau, en 1505, ces Esclaves furent entrepris en 1513, lorsque s’élabore ce second projet. Les deux grands marbres,
inachevés, étaient déjà considérés comme des œuvres dignes d’admiration. Michel-Ange les donna à l’exilé florentin Roberto Strozzi, qui en fit hommage au roi
de France. Les Esclaves gagnèrent Lyon du vivant du sculpteur et ont successivement été placés en 1550 dans deux niches de la nouvelle façade du château
d’Écouen, construit par le connétable Anne de Montmorency. Lors de la disgrâce de la famille, en 1633, ils seront prélevés par le cardinal de Richelieu pour son
château en Poitou. Et enfin ils aboutiront au Museum central au XIXe.
Ils sont plus petits que ceux de Florence, et plus aboutis. La musculature est très étudiée, la naturalisme poussé, l’hypertrophie des muscles en tension joue de
la dynamique. La silhouette serpentine, s’enroulant autour d’un axe, donne ce corps en vrille à la tête rejetée. A cette torsion, s’ajoute les liens qui entravent. Le
contraste, l’opposition entre le poli, lisse et impeccable du corps de l’Esclave mourant, et le grossier du marbre brut est-il voulu ? Michel-Ange laisse ainsi bien
visibles les marques des outils, pics et pointes, râpes, gradines et trépans, ces marques vivantes de son combat inlassable avec la matière, qu’il creuse avec
acharnement, pour en tirer l’idée emprisonnée. Le fil du marbre sur le visage de l’Esclave rebelle, ou la terrasse trop mince sous leur pied le plus bas, explique
sans doute l’abandon des pièces…
Michel-Ange, Esclave dit «le jeune», Esclave dit «le barbu», Esclave dit « l’Atlas », Esclave dit « l’éveil», Florence, Academia, 1515
Michel-Ange, Esclave dit « rebelle», Paris, musée du Louvre, 1515 La série de Florence peut-être la suite, réalisée dans la continuité en 1515,
ou bien une nouvelle série réalisée à partir de 1534 et laissée inachevée.
Les canons sont plus massifs, la figure plus tordue, torturée, dans des poses de plus en plus improbables.
D’un point de vue formel, la source est à rechercher dans les représentations du Christ à la colonne ou dans les Saint Sébastien. Benedetto da Maiano, St
Sébastien, Florence, fraternité de la miséricorde, 1497 Ce sont des représentations d’hommes nus, aux mains nouées dans le dos… mais la
différence de travail de réflexion est incroyable !
Son travail est révolutionnaire, il rompt le schéma de frontalité, introduit le caractère dramatique et la vitalité dans la sculpture.
Michel-Ange, Esclave dit « mourant», Paris, musée du Louvre, 1515 est aussi à rapprocher du Laocoon, Rome, musées du Vatican
On sait que Michel-Ange a assisté à l’exhumation en janvier 1506, près des thermes de Trajan de cet antique acheté immédiatement de haute lutte par Jules II.
Francesco Buontalenti, grotte, jardin de Boboli, Florence. Les esclaves florentins seront mis en place dans la grotte du palais Pitti.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, Moise c’est une des œuvres les plus abouties, deux fois plus grande que nature.
Assis, monumental, il devait être placé en hauteur (2e registre), et l’effet en est maintenant gommé par sa mis en place au sol. Il tient les Tables de la Loi, sa
main se glissant dans sa barbe quasi liquide. Michel-Ange s'est sans doute inspiré de la conception médiévale qui voit l'homme comme un microcosme de
l'univers. La barbe fleurie suggère l'eau, les cheveux défaits, le feu et le lourd drapé, la terre. Il faut le rapprocher du Donatello, St Jean, 1410-1415 . La
filiation est saisissante.
A ces éléments allégoriques Michel Ange rajoute une représentation de l'artiste et du pape, deux personnalités qui avaient en commun cette "terribilità" que
possède aussi Moïse. Il est ici redescendu sur terre et, constatant la cérémonie du veau d'or, "il tremblait d'indignation, après avoir maîtrisé l'explosion de sa
colère" selon les mots de Tolnay.
Michel-Ange, tombeau de Jules II, Léa et Rachel elles représentent la Vie active et la Vie contemplative. La signification de leur présence tient à la
réflexion qui doit exister lors de chaque action. Elles prennent la place des esclaves.
Michel-Ange, Victoire, Florence, 1530-34 A la mort de Michel-Ange, l'œuvre resta dans un atelier florentin de la via Mozza. Daniele de Volterra
proposa que cette sculpture fut utilisée pour la sépulture de l'artiste. Le neveu de Michel-Ange, sur suggestion de Vasari, la donna au duc Cosimo 1re. Elle fut
placée dans le prestigieux salon du Cinquecento où elle resta jusqu'en 1868, date où elle fut transférée au Musée national du Bargello. Cette Victoire est
incarnée par un éphèbe athlétique glabre terrassant un vieillard ramassé, barbu ; l’élongation, la torsion du corps, le côté effilé vont avoir un grand avenir.
La célébration d’une dynastie
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo La chapelle Médicis de san Lorenzo peut être qualifiée d’œuvre totale. Elle prend le terme de
Sagrestia Nuova , mais il s’agit d’une chapelle funéraire à l’instar de la Sagrestia vecchia, sacristie neuve, réalisée au Quattrocento pour les tombeaux de Cosimo
et de Piero. Il y a travaillé de 1520 à 1527 (suspension pendant le sac de Rome) et de 1530 à 1534 (arrêt du chantier par le pape). Architecture et sculpture y
sont intimement liées.
Florence, San Lorenzo, plan général - Florence, San Lorenzo, vue de la nef
Brunelleschi et Luca della Robbia, chapelle des Pazzi
Brunelleschi et Donatello, Florence, San Lorenzo, sacristie vieille
Andrea del Verrocchio, tombe des Médicis, Florence, San Lorenzo, sacristie vieille, 1469-72
En 1519, le maître est chargé de construire la Nouvelle Sacristie de San Lorenzo, qui doit abriter la chapelle funéraire des Médicis. Ce projet lui donne l'occasion
d'associer les trois arts et de concevoir un programme iconographique mêlant la foi chrétienne et les idées néoplatoniciennes sur l'immortalité de l'âme.
L'architecture utilise des effets de contrastes de couleurs (marbre blanc et pierre grise), de lignes verticales et horizontales, et de lumière (zone inférieure
laissée dans l'ombre et coupole très éclairée)
Les statues des ducs Julien et Laurent surmontent les sarcophages sur lesquels sont couchées des figures dont la forme est inspirée des représentations de
fleuves antiques: le Jour et la Nuit, l'Aurore et le Crépuscule suggèrent l'écoulement du temps qui mène à la mort. Les ducs tournent leurs visages méditatifs
vers une Vierge à l'Enfant pleine de mélancolie. Des statues et des fresques prévues pour compléter le décor n'ont pas été réalisées.
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo : on peut ici parler de tombeaux pariétaux, mais d’un vocabulaire nouveau. La structure est
inédite dans l’espace, il n’y a plus de gisant, mais des défunts assis, cantonnés de niches (inachevées). Le sarcophage est en partie basse, antiquisant mais
Michel-Ange ne suit pas la règle, il rompt la tradition, introduit une licence (dessin interrompu de la ligne). Les dieux fleuves (Tibre et Arno, signifiant la
puissance de la famille Médicis sur Rome et Florence) n’ont pas été réalisés. Il s’agissait de donner l’idée de la toute puissance, sur le temps et l’espace
Tombeau de Laurent, duc d'Urbin Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, tombeau de Laurent
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, L’Aurore et le crépuscule
Sous la statue figurée de Laurent assis et pensif, le coude reposant sur une chauve-souris, deux allégories, celles du Crépuscule et l'Aurore sont posées sur le
sarcophage. Les allégories sont massives et leur musculature lourde, la poitrine étonnante. L'Aurore porte le voile, symbole de deuil, et en travers de la poitrine,
le bandeau des esclaves et les membres du Crépuscule sont imprécis, inachevés. Toutes les statues ont les yeux vides, sans pupille ni iris, aveugles symbolisant
le sommeil et l'oubli, l'impuissance face à la destinée. Sous la direction de Vasari, les assistants de Michel-Ange, Niccolo Tribolo et Raffaello da Montelupo, ont
installé les statues sur les tombeaux. Les autres allégories figuratives (des fleuves) resteront en suspens, tout comme les fresques des lunettes.
Tombeau de Julien, duc de Nemours : la vie active Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, tombe de Julien
Sous la statue figurée de Julien assis en empereur romain, le bâton de la Sainte-Église sur les genoux (puissance et capacité à agir), se tiennent deux allégories,
le Jour et la Nuit, posées sur le sarcophage. Elles devaient être complétées dans les niches latérales de nus. Le Jour, en vieillard fatigué, a son visage à demi
discernable, à moitié dégagé de la pierre. Mais cela est sans doute voulu par Michel Ange. La Nuit, les yeux clos, est accompagnée de ses figures
emblématiques : un croissant de lune et une étoile en bandeau, un silex (qui donne le feu), un hibou, un masque tragique (de satyre ?), une guirlande de
pavots sous le pied gauche.
On ressent une idée de glissement… mais aussi d’infinie mélancolie, douleur traduite dans la pierre et notamment dans les visages.
Les positions données aux allégories, les jambes croisées, improbables souvent, auront une grande postérité. On la retrouvera…
D’après Michel-Ange, Léda et le cygne, Londres, National Gallery
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, La Nuit et la le Jour
Les regards des Médicis se portent vers la Vierge à l'Enfant, sur le mur opposé à l'autel. Elle devait être surmontée d'une fresque représentant la Résurrection
(celle du Christ et aussi celles des Médicis dans la vie éternelle).
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, la Vierge, Sts Cosme et Damien La tombe de Laurent le Magnifique et de son frère
Julien de Médicis, distinctes des tombeaux de Laurent, duc d'Urbin et de Julien, duc de Nemours, est constitué d'un caisson de pierre (cassone), un simple
sarcophage de pierre placé en regard de l'autel, complété d'un seul décor en marbre (Vierge à l'Enfant) malgré ses 2,26 m et deux statues latérales
représentant les saints Côme et Damien, dues à ses assistants dont Giovanni Angelo Montorsoli. Laurent le Magnifique et Julien de Médicis étaient les pères des
commanditaires, les papes Léon X et Clément VII.
Michel-Ange, sacristie neuve, Florence, San Lorenzo, la Vierge le visage absent, mélancolique s’oppose à l’enfant vivant, dynamique, de dos
(comme dans la Madone à l’escalier). Son style a évolué vers la gravité, la mélancolie…
Michel-Ange, Vierge à l’enfant, Dessin conservé à la casa Buonarotti
La Pietà Bandini
La Piéta Opera del Duomo La Pietà Bandini représente Nicodème portant le corps de Jésus dans ses bras, aidé par la Vierge Marie à droite et MarieMadeleine à gauche. Avec Nicodème, Michel-Ange réalise un autoportrait, se représentant lui-même en vieillard encapuchonné. Selon la légende, Nicodème était
sculpteur, lui aussi. Cette Pietà devait être placée sur son propre tombeau. Mais Michel-Ange a mutilé l’œuvre, il a coupé la jambe gauche du Christ et ce de
façon extrêmement précise… comme pour épurer l’œuvre. La madeleine sera reprise par un de ses élèves.
Michel-Ange meurt le 18 février 1564 à Rome, il est enterré à Florence lors de funérailles grandioses. Déjà les Médicis rassemblent toutes les œuvres possibles.
Il est toujours considéré comme le plus grand sculpteur de tous les temps !!!