PULP FICTION Un restaurant décemment rempli, à
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PULP FICTION Un restaurant décemment rempli, à
PULP FICTION Un restaurant décemment rempli, à Los Angeles. Il est environ 9 heures du matin. LE JEUNE HOMME Non, laisse tomber, c’est trop risqué. Je fais plus ce genre de connerie. LA JEUNE FEMME Toujours la même chanson, à chaque fois la même chose: plus jamais, j’arrête, trop dangereux. LE JEUNE HOMME Je sais que je dis toujours ça. J’ai toujours raison aussi, mais -LA JEUNE FEMME -- mais tu perds toujours la mémoire quelques jours plus tard -LE JEUNE HOMME -- Ouais, bah, le temps de l’oubli est passé, et le temps du souvenir vient de commencer. LA JEUNE FEMME Quand t’es comme ça, tu sais de quoi tu as l’air? LE JEUNE HOMME J’ai l’air d’un putain d’homme sensé, voilà de quoi j’ai l’air. LA JEUNE FEMME Tu as l’air d’un perroquet. (Elle imite un perroquet) Coco coco coco coco coco coco coco coco... LE JEUNE HOMME Bah retiens bien ce que j’ai dit, parce que c’est la dernière fois que tu l’entends. Parce que vu que je ferai plus jamais ces conneries, tu ne m’entendras plus jamais répéter que je ne les ferai plus. LA JEUNE FEMME Après ce soir. Ils rient. LE JEUNE HOMME (Avec un sourire) Exact. J’ai toute la soirée pour radoter. 1 Une serveuse vient proposer du café. LA SERVEUSE Encore un peu de café? LA JEUNE FEMME Ah oui, merci. La serveuse verse le café à la jeune femme. Le jeune homme allume une cigarette. LE JEUNE HOMME Je vais très bien. Sortie de la serveuse. LE JEUNE HOMME Je veux dire, au train où vont les choses, on prend les mêmes putains de risques que si on braque une banque. On prend plus de risques même. Les banques, c’est plus facile! De toute façon, les banques fédéraleS ne sont pas censées t’arrêter pendant un braquage. Elles sont assurées, qu’est-ce qu’elles en ont à faire? Même pas besoin de flingue dans une banque fédérale. J’ai entendu parler de ce type qui est entré dans une banque fédérale avec un téléphone portable. Il a tendu le téléphone au réceptionniste, le type à l’autre bout du fil a dit: “On a la petite fille de ce gars en otage, et si tu ne lui donnes pas tout ton fric, on la tue.” LA JEUNE FEMME Ça a marché? LE JEUNE HOMME Tu penses que ça a marché! Voilà ce que je veux dire!! Un pauvre type entre dans une banque avec un téléphone, pas un flingue, pas un fusil, mais un putain de téléphone, nettoie la baraque, et personne ne lève le petit doigt. LA JEUNE FEMME Il ont touché à la petite fille? LE JEUNE HOMME J’sais pas. Il n’y a probablement jamais eu de petite fille — L’intérêt de l’histoire, c’est pas la petite fille. L’intérêt de l’histoire, c’est qu’ils ont braqué une banque avec un téléphone. LA JEUNE FEMME Tu veux braquer une banque? LE JEUNE HOMME 2 J’ai pas dit que je voulais braquer une banque, je dis juste que si on en braquait une, ce serait plus facile que ce qu’on fait. LA JEUNE FEMME Alors tu ne veux pas braquer une banque? LE JEUNE HOMME Nan, tous ces types finissent de la même façon, soit morts, soit avec 20 ans de tôle. LA JEUNE FEMME Et les magasins d’alcool? LE JEUNE HOMME Qu’est-ce qu’on a dit? Non, plus de magasins d’alcool. En plus, c’est plus la rigolade que c’était avant. Il y a trop d’étrangers qui ont un magasin d’alcool. Des Vietnamiens, des Coréens, ils parlent même pas anglais. On leur dit: “vide la caisse," et il savent pas de quoi tu parles. Ils en font une histoire personnelle. Si on continue, l’un de ces enfoirés de Viets va nous forcer à le tuer. LA JEUNE FEMME Je ne veux tuer personne. LE JEUNE HOMME Moi non plus je ne veux tuer personne. Mais ils nous mettrons dans une situation où ce sera eux ou nous. Et si c’est pas les Viets, ce sera ces vieux Juifs qui tiennent la boutique depuis quinze putains de générations, avec Papi Irving assis derrière le comptoir avec un putain de Magnum. Essaie d’entrer dans l’un de ces magasins avec juste un téléphone, on verra où ça te mène. Non, oublions ça. C’est du passé. LA JEUNE FEMME Bon, qu’est-ce qu’il y a d’autre? Un vrai boulot? LE JEUNE HOMME (Riant) Tu rigoles? LA JEUNE FEMME Quoi alors? Il appelle la serveuse. Garçon! LE JEUNE HOMME Café! Il regarde la jeune femme. LE JEUNE HOMME Ici. 3 La serveuse vient servir le café. LA SERVEUSE (Vexée) Je ne suis pas un garçon. Elle sort. Ici? LA JEUNE FEMME C’est un restaurant. LE JEUNE HOMME Et alors? Personne ne braque les restaurants, pourquoi pas? Des bars, des magasins d’alcool, des stations service, tu te fais sauter la tête si tu vas t’y frotter. Mais les restaurants tu les prends par surprise. Ils ne s’attendent pas à être braqués, ou pas autant. LA JEUNE FEMME (Qui se prend au jeu.) Je parie que dans ce genre d’endroit, tu risque moins de tomber sur un type qui veut jouer les héros. LE JEUNE HOMME Exact. Comme les banques, ils sont assurés. Les patrons s’en foutent, ils veulent juste te mettre dehors avant que tu ne commences à planter les clients. Les serveuses, laisse tomber, elles vont pas se prendre une balle pour le tiroir caisse. Les garçons de table, des paumés qui se font un dollar cinquante de l’heure, ça leur fera une belle jambe que tu dévalises le proprio. Les clients sont assis avec de la bouffe plein la gueule, ils comprennent rien à ce qui se passe. D’abord ils sont en train de manger une omelette, ensuite quelqu’un leur met un pistolet à la face. La jeune femme s’enthousiasme de plus en plus à cette idée. LE JEUNE HOMME Tu vois, j’ai eu l’idée lors de notre dernier braquage de magasin d’alcool. Tu te souviens, tous ces clients qui continuaient d’entrer? LA JEUNE FEMME Ouais. LE JEUNE HOMME Tu avais eu l’idée de prendre tous les portefeuilles. LA JEUNE FEMME Uh-huh. LE JEUNE HOMME 4 Bonne idée. LA JEUNE FEMME Merci. LE JEUNE HOMME On s’est fait plus avec les portefeuilles qu’avec la caisse. LA JEUNE FEMME C’est vrai. LE JEUNE HOMME Plein de gens vont au resto. LA JEUNE FEMME Plein de portefeuilles. LE JEUNE HOMME Malin, hein? La jeune femme scrute le restaurant. Elle voit les clients manger, absorbés dans leur conversation, la serveuse prendre les commandes, les garçons de table débarrasser les assiettes, le patron s’énerver contre le cuisinier. La jeune femme sourit. LA JEUNE FEMME Malin. (motivée) Je suis prête, on y va, ici, maintenant. LE JEUNE HOMME N’oublie pas, comme d’hab’, tu contrôles la foule, je m’occupe des employés. LA JEUNE FEMME Compris. Ils sortent chacun leur pistolet et le pose sur la table. Ils se regardent. LA JEUNE FEMME Je t’aime, mon chou. LE JEUNE HOMME Je t’aime, ma puce. Ils se lèvent. PUMPKIN (Criant) Tout le monde se calme, ceci est un braquage! 5 HONEY BUNNY Si j’en vois un qui bouge, je zigouille tout le monde, bande d’enfoirés! Pigé? 6