tude gnrale - Bibliothèque du Parlement

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tude gnrale - Bibliothèque du Parlement
Étude générale
LA CONCENTRATION DE LA
PROPRIÉTÉ DES JOURNAUX
Daniel Shaw
Terrence J. Thomas
Division de l’économie
Janvier 1994
Bibliothèque
du Parlement
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Parliament
Service de
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TABLE DES MATIÈRES
Page
INTRODUCTION ........................................................................................................................... 1
QUESTIONS SOULEVÉES........................................................................................................... 1
RAPPORTS PRÉCÉDENTS .......................................................................................................... 4
A. Le rapport Davey (1970)......................................................................................................... 4
B. Le rapport de la Commission Kent (1981)............................................................................. 5
L'INDUSTRIE DES JOURNAUX AU CANADA ....................................................................... 7
A. Tirage ....................................................................................................................................... 7
B. Recettes provenant de la publicité et des ventes .................................................................... 9
C. Concentration de la propriété.................................................................................................. 9
LA PRISE DE CONTRÔLE DE JOURNAUX COMMUNAUTAIRES
PAR SOUTHAM ........................................................................................................................... 12
A. La position du directeur .......................................................................................................... 13
1. Le Vancouver Courier et le North Shore News ................................................................... 13
2. Le Real Estate Weekly........................................................................................................... 15
B. La position de Southam........................................................................................................... 16
1. Le Vancouver Courier et le North Shore News ................................................................... 16
2. Le Real Estate Weekly........................................................................................................... 18
C. Les fusions et la Loi sur la concurrence (1986) .................................................................... 18
D. La décision du Tribunal de la concurrence ............................................................................ 20
CONCLUSIONS.............................................................................................................................. 22
LA CONCENTRATION DE LA
PROPRIÉTÉ DES JOURNAUX
INTRODUCTION
Les décideurs ont toujours craint la concentration de la propriété dans l'industrie et
ses répercussions possibles, à savoir la diminution de la production, la hausse des prix et
l'affaiblissement de la compétitivité. Au Canada, les décideurs craignent particulièrement que la
concentration de la propriété au sein des industries culturelles diminue la qualité et les
caractéristiques du produit — y compris la teneur canadienne. Dans le présent document, nous
examinons ces préoccupations de façon détaillée, particulièrement dans l'industrie des journaux.
L'industrie canadienne des journaux a déjà été examinée, une fois dans une étude
distincte et un autre fois dans le cadre d'une étude générale sur les médias. Nous traitons de ces
deux études plus loin, mais notre document porte avant tout sur l'acquisition de 13 journaux
communautaires, d'une publication sur l'immobilier et de trois entreprises de distribution de
prospectus dans la vallée du bas Fraser, en Colombie-Britannique, par le groupe Southam Inc., le
géant de l'industrie des journaux, installé à Toronto. Au moment de l'acquisition, soit en mai 1990,
le groupe Southam contrôlait déjà deux quotidiens dans la vallée du bas Fraser : le Vancouver Sun et
The Province.
QUESTIONS SOULEVÉES
L'acquisition d'un journal par un autre soulève deux questions : celle du monopole
et celle de la liberté d'expression. La première question se pose lorsque la concentration de la
propriété par une société s'accroît, et elle intéresse particulièrement le Bureau de la politique de
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concurrence. La deuxième question ne touche en fait vraiment que les médias. Ces deux
aspects, particulièrement le deuxième, ont été abordés par des comités parlementaires et des
commissions royales.
Le problème du monopole semble assez simple. Chacun sait pourquoi le monopole
est une mauvaise chose : il fait grimper les prix et diminuer l'offre, c'est-à-dire que les monopolistes
peuvent restreindre l'offre pour obtenir un prix plus élevé que celui qui aurait cours dans un marché
concurrentiel. Comme certains journaux communautaires (des journaux à diffusion restreinte) sont
distribués gratuitement, le prix pertinent est le tarif demandé aux annonceurs. L'existence d'un
pouvoir de monopole et la possibilité de l'exercer dépendent de l'existence d'autres sources de
publicité dans la région desservie par le journal. (Un « oligopole », soit une situation où il n'existe
qu'un petit nombre de vendeurs sur le marché, peut également exercer un certain pouvoir de
monopole.)
Lorsqu'on parle de véhicules publicitaires de substitution, il faut distinguer trois
types d'annonceurs (nationaux, régionaux et locaux) et trois types de médias (l'imprimé, la radio et
la télévision). L'imprimé permet de transmettre des messages visuels et durables; la radio, elle,
transmet des messages parlés qui sont plutôt éphémères, tandis que la télévision transmet des
messages visuels et parlés qui sont généralement éphémères, mais peuvent devenir durables s'ils
sont enregistrés sur magnétoscope.
Les journaux communautaires dépendent des annonceurs
locaux, dont ils se disputent la clientèle en faisant concurrence à d'autres journaux communautaires
et à des prospectus publicitaires. Dans certains cas, d'autres médias, tels que la radio, la télévision et
les quotidiens, peuvent également se livrer concurrence pour obtenir de la publicité locale. Même
lorsqu'il n'existe ni quotidien ni prospectus publicitaire qui puisse lui faire concurrence, le journal
communautaire est souvent incapable d'établir des tarifs publicitaires de monopole parce que les
annonceurs éventuels (par exemple, le gouvernement local ou l'entreprise locale dominante) peuvent
détenir un pouvoir économique suffisant pour influer sur les tarifs.
La deuxième question, soit celle de la « liberté d'expression », englobe la notion de
« diversité des points de vue ». Dans le contexte de la concentration des journaux, ces deux
expressions débordent la notion traditionnelle du droit à l'expression et laissent supposer l'existence
du droit d'exprimer de multiples opinions, sur un sujet, quel qu'il soit.
Malheureusement, la notion en apparence anodine, de « droit à la diversité des
points de vue » masque de nombreux problèmes, entre autres lorsqu'il s'agit de déterminer le
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nombre de points de vue qui constitue une « diversité ». Il existe, par exemple, plusieurs partis
politiques au Canada, mais il peut exister plusieurs points de vue au sein de chaque caucus. La
position officielle du parti peut se situer à mi-chemin de ces vues ou traduire un point de vue
unique, prédominant. Les citoyens ont-ils le droit de connaître l'éventail des points de vue ou
uniquement le point de vue officiel? Qu'advient-il des opinions des partis marginaux qui, par
définition, diffèrent de celles des partis établis? Même si l'on pouvait déterminer, par exemple, que
la diversité suppose l'existence de trois points de vue, la présence de trois journaux n'est pas une
garantie que ces trois points de vue seront présentés. Deux de ces trois journaux, ou même les trois,
pourraient partager le même point de vue. Par conséquent, le lecteur ignorerait l'opinion d'au moins
un parti. Le lancement de nouveaux journaux ne règlerait pas forcément le problème.
Par contre, un journal ne se limite pas automatiquement à un seul point de vue. Son
orientation rédactionnelle peut être ferme et cohérente (et peut-être se rattacher aux points de vue
d'un parti politique), mais ses journalistes et ses chroniqueurs ne sont pas forcément d'accord avec le
point de vue officiel et peuvent être libres de le dire. Au cours du débat sur le libre-échange en
1988, par exemple, les éditoriaux de certains journaux étaient nettement en faveur de l'accord, tandis
que les chroniqueurs de ces mêmes journaux profitaient de chaque occasion pour le critiquer
sévèrement. Manifestement, le nombre de journaux ne correspond pas nécessairement au nombre
d'opinions qui y sont exprimées.
Comme dans le cas de monopoles, l'existence de produits de substitution est
importante dans l'expression d'une diversité d'opinions. Les commentateurs dans différents médias
peuvent exprimer des opinions diverses sur une question. Plus une question ou un événement local
est important, plus on constate l'émergence de moyens autres que les journaux locaux, comme, par
exemple, des émissions de radio ligne ouverte, ou des avis affichés dans les magasins. Il importe de
souligner que ces autres moyens d'information et d'expression d'opinions ne sont pas nécessairement
les mêmes que les véhicules publicitaires autres que les journaux.
Il est difficile de prouver qu'une concentration accrue de la propriété des journaux ou
que l'acquisition de journaux par une chaîne a nui aux lecteurs d'un journal communautaire, surtout
d'un journal à diffusion restreinte. Un journal est un ensemble de caractéristiques, entre autres, la
diversité ou l'équilibre des points de vue, la portée et l'exactitude de ses reportages ainsi que sa
valeur de divertissement. La qualité d'ensemble d'un journal dépend de la combinaison et du degré
de ces caractéristiques, et il est difficile de les évaluer. Si toutefois on décide de s'attarder à la
diversité des points de vue, il faut alors examiner la qualité des journaux.
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RAPPORTS PRÉCÉDENTS
Le Parlement s'inquiète depuis longtemps des problèmes que la concentration des
médias est susceptible d'entraîner. En 1970, le Sénat a rendu public un rapport préparé par le
Comité spécial du Sénat sur les moyens de communications de masse (le rapport Davey)(1 ), et en
1981, la Commission royale sur les quotidiens a publié le rapport de la Commission Kent( 2 ). Le
Comité et la Commission ont cherché à déterminer si la concentration accrue au sein de l'industrie
des journaux restreint de façon déraisonnable l'accès à des points de vue divers sur une question,
quelle qu'elle soit.
A. Le rapport Davey (1970)
L'une des principales recommandations du Rapport Davey a été la création d'un
Conseil de surveillance de la propriété possédant le pouvoir d'approuver ou de désapprouver les
fusions ou les acquisitions de journaux et de périodiques. Ce Conseil devait avoir un principe de
base : « toutes les transactions qui augmentent la concentration de la propriété des moyens
d'information sont indésirables et contraires à l'intérêt public — à moins de preuve du contraire »
(vol. I, p. 78).
Le Comité présidé par M. Davey a reconnu trois types de concentration de propriété
: les chaînes de journaux, la propriété de différents médias et des conglomérats de participation à
certains médias. Le pouvoir du Conseil de surveillance de la propriété dont il proposait la création
se serait limité aux transactions concernant la presse écrite. Par conséquent, bien que ce Conseil
aurait pu examiner la concentration de différents médias, c.-à-d. une concentration comprenant des
revues et des journaux, le Comité s'est surtout penché sur la concentration de la propriété par des
groupes de journaux. Il a expressément inclus les hebdomadaires inclus dans sa proposition de
création du Conseil de surveillance de la propriété : « En d'autres termes, la concentration en
matière de presse hebdomadaire serait limitée aux cas où sa réalisation irait de pair avec l'intérêt
public [...] » (vol. I, p. 167).
(1)
Sénat, Comité spécial sur les moyens de communications de masse, Rapport (« Le rapport Davey »),
1970.
(2)
Commission royale sur les quotidiens (la « Commission Kent »), Rapport, 1981.
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Le Comité a reconnu que les critères utilisés par le Conseil seraient « de nature assez
subjective » (vol. I, p. 80), mais estimé que sa proposition serait réalisable. Il a donné les conseils
suivants :
Au-delà des directives générales que nous proposons, il incomberait au
Conseil de définir ses propres critères en matière d'intérêt public. Mais
nous recommandons que les définitions tiennent compte des question
suivantes : (a) la fusion proposée accroîtrait-elle les chances de survie
d'un journal qui pourrait autrement disparaître? et (b) à quel avenir le
contenu du journal en cause semblerait-il promis, compte tenu de ce qui
se fait dans les journaux que l'acheteur possède déjà, et des profits que
rapportent ces journaux? Autrement dit, c'est à l'acheteur qu'il devrait
incomber de démontrer qu'il est aussi ou mieux placé pour servir
l'intérêt public que le propriétaire du moment. (p. 80, passage souligné,
en italiques dans l'original anglais)
Le 9 mai 1990, soit 20 ans après le dépôt du Rapport du Comité spécial du Sénat sur
les moyens de communications de masse, l'honorable Keith Davey a pris la parole devant le Sénat
sur l'état des médias au Canada. Il a souligné que le Comité avait mis l'accent sur trois grands
aspects : la concentration de la propriété, la qualité des médias et la survie de la culture canadienne.
« Notre première et principale préoccupation, [...] résidait dans la cartellisation des médias et,
notamment de la presse écrite. Je dois malheureusement dire que la situation a empiré à cet égard
au cours des vingt dernières années [...] »( 3 ). Pour appuyer ses propos, le sénateur Davey a comparé
la propriété de quotidiens par des groupes en 1970, en 1980 et en 1989; il n'a toutefois pas donné de
chiffres concernant la concentration de la propriété de journaux communautaires. Faisant le bilan
des vingt dernières années, il a reconnu l'influence grandissante de la télévision, mais soutenu que
« c'est encore la presse écrite qui règle le programme de notre société. Il est vrai que c'est la
télévision qui gouverne notre réaction à ce programme, mais c'est la presse écrite qui ordonne les
événements ».
B. Le rapport de la Commission Kent (1981)
La Commission royale sur les quotidiens a été formée peu de temps après la
disparition simultanée de deux quotidiens à Ottawa et à Winnipeg. Son mandat était toutefois loin
de se limiter à l'examen des événements survenus dans ces deux villes; la Commission s'est en effet
vu confier la tâche d'examiner l'ensemble de l'industrie des journaux au Canada, y compris les liens
(3)
Débats du Sénat, 9 mai 1990, p. 1591.
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qu'entretiennent cette industrie et les autres médias et les changements que les progrès de
l'informatique sont susceptibles d'entraîner au sein de l'industrie. Sans doute en raison de l'ampleur
du sujet, la situation des hebdomadaires ou des journaux communautaires a été à peine abordée dans
le rapport. Seulement neuf paragraphes sur 283 pages de texte y ont été consacrés.
La recherche faite pour la Commission Kent a permis d'obtenir certains faits sur le
nombre, la taille et la propriété de journaux communautaires hebdomadaires( 4 ). Nous discutons de
ces faits plus loin. La principale recommandation de la Commission Kent a porté sur l'adoption
d'une Loi sur les journaux du Canada qui prévoirait des restrictions concernant la propriété des
journaux, le dessaisissement de certains journaux appartenant à des groupes existants et la création
d'un Comité des droits de la presse chargé de surveiller l'application de la loi. Voici les paragraphes
pertinents concernant la propriété et le dessaisissement d'hebdomadaires :
Les problèmes de concentration que suscite la propriété de journaux
hebdomadaires par des quotidiens sont plus compliqués. Il se peut que
leur exploitation conjointe soit véritablement plus rentable. Néanmoins,
il est évident qu'il y a trop de concentration des pouvoirs quand, par
exemple, le Toronto Star appartient aux mêmes propriétaires que la
plupart des principaux hebdomadaires de la région métropolitaine de
Toronto, situation qui s'est établie pendant les travaux de la
Commission. Nous proposons que la Loi sur les journaux du Canada
stipule que le propriétaire d'un quotidien ne peut posséder ou contrôler
un journal publié moins fréquemment (un hebdomadaire ou un
bihebdomadaire), qui, dans la totalité ou une partie importante de la
région où le quotidien est distribué, est soit le seul hebdomadaire ou un
hebdomadaire important ayant très peu de concurrence. S'il survenait
un doute quant à l'application de ce principe, ou parce qu'un concurrent
fermerait ses portes, le Comité des droits de la presse devrait avoir
pleins pouvoirs pour trancher chaque cas en toute objectivité. Il
tiendrait compte de l'étendue de toute concurrence entre aussi bien les
hebdomadaires que les quotidiens de la région.
La Commission a eu du mal à décider si elle devrait recommander un
dessaisissement obligatoire dans les situations actuelles qui dérogent
clairement au principe que nous proposons pour l'avenir. Les journaux
hebdomadaires diffèrent toutefois considérablement des stations de
radio-télédiffusion. Dans certains cas, leurs rapports avec les quotidiens
sont beaucoup plus étroits et établis de longue date. Ils sont davantage
axés sur les régions; ils exigent moins de capitaux; dans les centres
urbains du moins, ils apparaissent et disparaissent beaucoup plus
facilement. Nous ne croyons pas que le besoin soit aussi impérieux, en
(4)
E. Hallman, et al., Le journal comme entreprise, Commission royale sur les quotidiens, Études sur
l'industrie des quotidiens, Vol. 4.
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principe ou en pratique, d'exiger le dessaisissement d'hebdomadaires
que dans le cas de la propriété concomitante de journaux et de médias
électroniques. Dans des situations comme celle du Star de Toronto, il
est préférable d'attendre que des hebdomadaires viennent lui faire
concurrence, ce qui pourrait fort bien se produire. Les principes que
nous avons proposés devraient s'appliquer aux changements de propriété
qui surviendront après la date de publication du présent rapport. (p. 266,
267)
En 1982, le gouvernement a enjoint le CRTC de ne pas émettre, ni de renouveler de
licences de radiodiffusion à l'intention des propriétaires de quotidiens lorsque la région principale du
tirage du quotidien englobe sensiblement le principal secteur du marché desservi ou qui sera
desservi par l'entreprise de radiodiffusion.
Un ouvrage récent sur les médias d'information
canadiens traite de cette directive :
Le seul résultat a été la décision, prise par le CRTC en 1983, de ne pas
renouveler la licence d'exploitation d'Irving Television au NouveauBrunswick, bien que le groupe Irving se soit vu accorder un
renouvellement temporaire pour qu'il ait le temps de s'adapter à la
décision.
Ce répit est devenu un sursis en 1985 lorsque le
gouvernement conservateur a abrogé la directive émise par le
gouvernement libéral à l'intention du CRTC( 5 ).
L'INDUSTRIE DES JOURNAUX AU CANADA
A. Tirage
En 1988, le Canada comptait 107 quotidiens dont le tirage combiné atteignait en
moyenne un peu moins de six millions d'exemplaires. C'était 20 quotidiens de moins qu'en 1978;
cependant, le tirage quotidien combiné de tous les journaux a augmenté de 8,3 p. 100 au cours de la
même période.
Le tableau 1 indique qu'un seul quotidien francophone a fermé ses portes au cours de
la décennie, mais qu'en général, le nombre de lecteurs des quotidiens francophones a diminué.
D'autre part, bien que 12 quotidiens anglophones aient disparu, le nombre total de lecteurs de
quotidiens anglophones a nettement augmenté. Le tirage quotidien moyen combiné de ces journaux
s'est en effet accru de 13,8 p. 100, soit un peu moins de cinq millions d'exemplaires.
(5)
Peter Desbarats, Guide to Canadian News Media, Toronto, Harcourt Brace Jovanovich, 1990, p. 66
(traduction).
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La demande de journaux non quotidiens a connu une hausse phénoménale; entre
1978 et 1998, leur nombre est passé de 1 135 à 1 425, soit une augmentation de 25,6 p. 100.
Parallèlement, le tirage moyen par numéro est passé de 10 632 à 13 838, soit une augmentation
de 30,2 p. 100. Le tirage total a augmenté de 38,9 p. 100, se situant tout juste sous la barre des
20 millions d'exemplaires.
Tableau 1
Statistiques choisies sur le tirage
Nombre et tirage
Anglais
Nbre
1978
1983
1988
108
106
96
Français
Tirage
quotidien
moyen
(en milliers)
4 351
4 580
4 951
Tirage
quotidien
moyen
(en milliers)
1 092
964
1 042
Nbre
12
10
11
Autres
Total
Tirage
quotidien
moyen
(en milliers)
91
15
-
Nbre
7
2
-
Nbre
127
118
107
Tirage
quotidien
moyen
(en milliers)
5 534
5 559
5 993
Source: Statistique Canada, Annuaire du Canada, 1992.
Les journaux communautaires ont été dans le peloton de tête. Leur nombre a atteint
1 207, soit une augmentation de 9,2 p. 100 entre 1978 et 1988; leur tirage moyen par numéro s'est
élevé à 13 352, soit une augmentation de 40,6 p. 100, et leur tirage total combiné est passé à 16,4
millions, soit une hausse de 56,2 p. 100.
Tableau 2
Hebdomadaires canadiens
Nombre et tirage
Journaux communautaires
Nombre
1978
1983
1988
1 105
844
1 207
Tirage
combiné
(en milliers)
10 495
7 615
16 394
Tous les journaux non quotidiens
Tirage
moyen
Nombre
9 498
9 023
13 352
1 135
1 154
1 425
Source: Statistique Canada, Annuaire du Canada, 1988, 1990 et 1992
Tirage
Combiné
(en milliers)
14 194
12 348
19 719
Tirage
moyen
10 632
12 306
13 838
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B. Recettes provenant de la publicité et des ventes
L'industrie des journaux a connu une période faste entre 1978 et 1988. En 1978,
l'industrie a touché des recettes totales de l'ordre de 977 millions de dollars, dont 757,5 millions
provenaient de la publicité et 206,3 millions, des ventes. En 1988, les recettes publicitaires de
l'industrie des journaux s'élevaient à 2,4 millions de dollars, soit une augmentation de 216 p. 100 par
rapport à 1978. En 1988, le total des recettes provenant des ventes s'élevait à 651 millions de
dollars, soit, ici encore, une hausse de 216 p. 100 par rapport à 1978.
Les pourcentages relatifs des catégories de publicité qui constituent le total de ces
recettes ont peu changé. En 1988, les annonces locales représentaient 57,6 p. 100 de la totalité des
recettes publicitaires; les petites annonces en représentaient 23,0 p. 100 et les annonces nationales,
19,4 p. 100.
En 1978, ces pourcentages étaient respectivement de 52,8 p. 100, 28,5 p. 100 et
18,7 p. 100.
Il y a un contraste entre les recettes des quotidiens et celles des hebdomadaires.
Tout d'abord, les quotidiens affichent des recettes publicitaires dix fois plus élevées que celles
des journaux communautaires, et leurs recettes provenant des ventes sont 300 fois plus élevées.
En 1988, les journaux communautaires dépendaient presqu'exclusivement des annonces locales,
qui représentaient 87 p. 100 de l'ensemble de leurs recettes et 94 p. 100 du total des recettes
publicitaires. Le reste des recettes était réparti de façon relativement égale entre les annonces
nationales et les ventes. Les quotidiens, par contre, tiraient 40 p. 100 de leurs recettes des
annonces locales, 22 p. 100 des petites annonces, 17 p. 100 des annonces nationales et 21 p. 100
des ventes.
C. Concentration de la propriété
En 1981, 111 quotidiens étaient publiés au Canada, tous contrôlés, à l'exception de
27 d'entre eux, par des chaînes de journaux. Les cinq plus grandes chaînes possédaient 67
quotidiens, soit 60 p. 100 du total. Depuis, Hollinger Inc. a fait l'acquisition de Sterling Newspapers
et d'UniMédia, et Toronto Sun Publishing Ltd. a fait l'acquisition de Bowes Publishing. En 1991,
les cinq plus grandes chaînes, qui comprennent le groupe Thomson, le groupe Southam, Hollinger,
le Toronto Sun et Quebecor, possédaient 78 quotidiens sur 96, soit 81 p. 100 de l'industrie. Le
nombre de quotidiens indépendants a diminué, passant de 27 à 17, soit une baisse de 37 p. 100, au
cours de la dernière décennie.
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Tableau 3
Recettes des journaux tirées de la publicité et des ventes — 1988
RECETTES PUBLICITAIRES
Publicité
locale
Petites
annonces
Total
Recettes
provenant
des ventes
426 663
1 998 436
523 393
Publicité
nationale
(en milliers de dollars)
Quotidiens
1 021 276
550 497
Journaux
communautaires
198 641
-
13 103
211 564
17 370
Autres
160 517
-
26 867
187 384
110 031
Total
1 380 434
466 633
2 397 384
650 794
550 497
Source: Statistique Canada, Catalogue 36-251, Imprimerie, édition et industries connexes, 1988.
La concentration des hebdomadaires ou journaux communautaires est nettement
moindre que celle des quotidiens. En 1981, la Commission Kent a indiqué que 527 journaux sur
1 044 appartenaient à des chaînes. La Canadian Community Newspaper Association (CCNA)
indique qu'en 1990, elle a inclus dans son sondage 670 journaux de langue anglaise, dont 391
appartenaient à 133 chaînes de médias(6 ). Les chaînes d'hebdomadaires détiennent maintenant
58 p. 100 des journaux communautaires, comparativement à 50 p. 100 en 1981. Bien que le nombre
et la taille des chaînes augmentent, les cinq plus importantes chaînes de l'industrie possèdent
environ le même pourcentage d'hebdomadaires qu'il y a dix ans. En 1981, les cinq plus grandes
chaînes d'hebdomadaires possédaient 96 journaux communautaires, soit 9 p. 100 de l'industrie. En
1991, les cinq plus grandes chaînes d'hebdomadaires, soit Quebecor, Thomson, Torstar, Toronto
Sun et Southam, détenaient 142 hebdomadaires, soit un peu moins de 10 p. 100 de l'industrie.
(6)
Entretien téléphonique avec les responsables de la Canadian Community Newspaper Association.
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11
Tableau 4
Propriété de quotidiens et d'hebdomadaires, 1991
Quotidiens
Thomson Newspapers Corp.
Quebecor Inc.
Southam Inc.(1)
Hollinger Inc.
Sterling
UniMédia
Toronto Sun
Toronto Sun
Bowes Pub.
Torstar Corporation
Total partiel
Autres chaînes de
quotidiens/d'hebdomadaires
Total des chaînes de
quotidiens/d'hebdomadaires(2)
Autres journaux
Total des journaux
Hebdomadaires
Total des journaux
1981
1991
1981
1991
1981
1991
38
2
14
40
4
17
12
15
28
0
30
41
21
19
53
30
14
70
45
38
31
11
2
3
8
12
2
5
3
1
74
19
14
5
24
1
79
7
31
103
25
..
99
12
111
..
..
96
29
26
161
10
32
177
27
240
52
..
77
..
155
889
1 044
..
..
1 425e
254
901
1 155
..
..
1 521e
(1)
Comprend les acquisitions en 1990-1991 de 15 journaux communautaires dans la région de Vancouver et de la
vallée du bas Fraser, en Colombie-Britannique, dont il est question dans le présent document.
(2)
26 chaînes de quotidiens/d'hebdomadaires: e - chiffre estimatif obtenu en utilisant les chiffres de 1978; .. - inconnu.
Source: E. Hallman et al., Le journal comme entreprise, Commission royale sur les quotidiens, Études sur l'industrie des
quotidiens, vol. 4, p. 47: The Financial Post, Survey of Industrials 1991.
La rentabilité accrue de ces journaux communautaires a attiré d'autres chaînes de
journaux. En 1981, les huit plus importants quotidiens possédant au moins un hebdomadaire en
détenaient 177. En 1991, les six plus importants quotidiens possédant au moins un hebdomadaire
en détenaient 240.
L'essor de l'industrie de l'hebdomadaire peut être en partie attribué au
mouvement de la population et des détaillants vers la banlieue. La dispersion de la vente au détail
dans les principaux centres urbains au Canada a donné lieu à une stratégie publicitaire davantage
axée sur la pénétration du marché local par l'intermédiaire des journaux communautaires plutôt que
sur la vaste diffusion assurée par les quotidiens. Un autre facteur est la diminution du coût d'accès à
l'industrie de l'imprimé. Les progrès technologiques des années 60, tels que les ordinateurs et la
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12
composition « froide » ou l'impression offset ont révolutionné l'ensemble de l'industrie des
journaux.
Aujourd'hui, grâce au marché florissant des ordinateurs usagés et de la location
d'ordinateurs, l'éditique électronique a considérablement réduit le coût de lancement d'un
hebdomadaire. Selon un journaliste d'un journal communautaire, quiconque dispose d'un modeste
compte d'épargne peut ajourd'hui mettre sur pied un journal. Un représentant de la CNNA soutient
qu'aujourd'hui, il suffit de 10 000 $ pour lancer un journal. Il y a 20 ans, il aurait fallu dix fois cette
somme.
LA PRISE DE CONTRÔLE DE JOURNAUX COMMUNAUTAIRES PAR SOUTHAM
En mai 1990, le groupe Southam Inc. a annoncé que par suite d'une série complexe
de transactions, il avait obtenu le contrôle d'un certain nombre de journaux communautaires dans la
vallée du bas Fraser, en Colombie-Britannique. Le 29 novembre 1990, le Directeur des enquêtes et
recherches du Bureau de la politique de concurrence (« le directeur ») a déposé une demande pour
contester l'acquisition par Southam Inc. et al. (« Southam ») de 13 journaux communautaires, d'une
publication sur l'immobilier, de trois entreprises de distribution de prospectus et de deux
imprimeries dans la vallée du bas Fraser, en Colombie-Britannique. Cette demande visait l'émission
d'une ordonnance par le Tribunal de la concurrence exigeant de Southam qu'il se départisse (ou ne
fasse pas l'acquisition) d'un intérêt dans les entreprises publiant le Real Estate Weekly, le Vancouver
Courier, et le North Shore News, ces deux derniers journaux affichant la plus grande diffusion des
40 journaux communautaires de la région.
Il y a longtemps que Southam possède un intérêt dans les quotidiens de la vallée du
bas Fraser puisqu'il est l'éditeur des deux seuls quotidiens de la région, le Vancouver Sun et The
Province. L'acquisition concerne des journaux communautaires desservant le même territoire que
ces deux quotidiens. Les journaux communautaires sont en général des publications à diffusion
restreinte, c'est-à-dire qu'elles sont distribuées gratuitement à un groupe cible précis de la
collectivité.
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13
A. La position du directeur
1. Le Vancouver Courier et le North Shore News
Le directeur a soutenu que l'acquisition du Vancouver Courier par le groupe
Southam avait sensiblement empêché ou diminué la concurrence, ou aurait vraisemblablement cet
effet, sur le marché de la prestation de services de publicité des détaillants dans les journaux dans la
ville de Vancouver. Le directeur a émis l'opinion selon laquelle le marché pertinent était le marché
de la publicité des détaillants dans les journaux de Vancouver. En 1990, Vancouver comptait
approximativement 470 000 habitants et 195 620 ménages.
Selon le directeur, l'acquisition permettrait aux journaux de Southam de contrôler
ensemble 86,5 p. 100 des recettes publicitaires du marché de la publicité des détaillants dans les
journaux de Vancouver, soit une somme totale de 26 millions de dollars. À son avis, le tirage et les
parts du marché des recettes publicitaires sur le marché pertinent étaient les suivants :
The Province
Vancouver Sun
Vancouver Courier
Combinaison du
West Ender
Metro Vancouver News
Vancouver Echo
Revue
Georgia Straight
Total
Tirage quotidien primaire
1989
Vancouver
Total
48 535
154 269
72 060
214 979
65 000
65 000
56 000
75 200
53 000
11 500
28 000
409 295
56 000
75 200
53 000
11 500
75 000
704 948
Part du marché des
recettes
publicitaires
19,7 %
52,7 %
14,1 %
13,5 %
100,0 %
Le directeur a de plus soutenu que l'acquisition du North Shore News par Southam
avait sensiblement empêché ou diminué la concurrence, ou aurait vraisemblablement cet effet,
sur le marché de la prestation de services de publicité des détaillants dans les journaux de la
région de la vallée du bas Fraser communément appelée le North Shore. À son avis, le marché
pertinent était le marché de la publicité des détaillants dans les journaux du North Shore. Le
North Shore se compose de la ville de North Vancouver, de la municipalité de North Vancouver
et de la municipalité de West Vancouver. En 1990, la population approximative du North Shore
était de 148 735 habitants et le nombre approximatif de ménages, de 58 400.
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14
Par suite de cette acquisition, les journaux de Southam contrôleraient ensemble,
de l'avis du directeur, 93,9 p. 100 des recettes publicitaires du marché de la publicité des
détaillants dans les journaux du North Shore. Selon lui, le tirage et les parts du marché des
recettes publicitaires sur le marché pertinent étaient les suivants:
The Province
Vancouver Sun
North Shore News
Georgia Straight
Total
Tirage quotidien primaire
1989
North Shore
Total
14 083
154 269
26 390
214 979
60 535
60 535
6 500
75 000
107 509
504 783
Part du marché des
recettes publicitaires
13,5 %
23,8 %
56,9 %
6,1 %
100,0 %
En ce qui concerne les autres véhicules publicitaires acceptables sur les deux
marchés, par exemple, la télévision, la radio, les revues, les panneaux-réclames et les prospectus
volants, la demande du directeur énonçait ce qui suit :
Ces autres véhicules publicitaires ne font pas partie des produits du
marché de la publicité des détaillants dans les journaux de Vancouver
parce qu'ils ne constituent pas des substituts acceptables aux services
de publicité des détaillants dans les journaux. Une hausse importante
du prix de ces services n'inciterait pas les détaillants à se tourner vers
ces produits.
La publicité à la télévision et à la radio, ainsi que sur les panneauxréclames n'a qu'une valeur restreinte sur le plan du contenu
informationnel et de l'assimilation de l'information. Les revues et les
annuaires ne peuvent servir à publier des messages publicitaires à
durée de vie critique. Les publications spécialisées et celles en
langues étrangères ont un nombre restreint de lecteurs. Les petites
annonces limitent le format dans lequel le message peut être transmis.
Les prospectus volants sont moins intéressants parce qu'il est de loin
préférable de les diffuser dans un journal( 7 ).
Le directeur a également soutenu qu'il existait d'importantes entraves à l'accès à ce marché :
(7)
The Director of Investigation and Research and Southam Inc., Lower Mainland Publishing Ltd., Rim
Publishing Inc., Yellow Cedar Properties Ltd., North Shore Free Press Ltd., Specialty Publishers Inc., Elty
Publications Ltd., CT-90/1, Amended Notice of Application, p. 33 (traduction).
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15
Quelle que soit la source d'accès éventuel, un nouveau venu sur le
marché aura beaucoup de difficulté à obtenir suffisamment de lecteurs
et de recettes publicitaires. [...]
Une partie importante des coûts d'accès, y compris le matériel, le
personnel, la production et la distribution, est irrécupérable et ne
pourra être recouvrée dans l'éventualité où l'initiative d'accès
s'avérerait un échec( 8 ).
Le directeur a également contesté l'effet conjugué de ces acquisitions par
Southam, soutenant qu'ensemble elles empêchaient ou diminuaient sensiblement la concurrence,
ou auraient vraisemblablement cet effet, sur le marché pour la prestation de services de publicité
des détaillants dans les journaux dans le secteur du marché de la vallée du bas Fraser.
2. Le Real Estate Weekly
Le directeur a contesté l'acquisition indirecte par Southam du Real Estate Weekly,
soutenant
qu'elle
empêchait
ou
diminuait
sensiblement
la
concurrence,
ou
aurait
vraisemblablement cet effet, sur le marché de la prestation de services de publicité imprimée
dans le domaine de l'immobilier dans la région de la vallée du bas Fraser autre que le North
Shore, et dans le North Shore. Le directeur a prétendu que Southam, en contrôlant le Real Estate
Weekly, The Province et le Vancouver Sun, deviendrait le plus important fournisseur de ces
services dans la vallée du bas Fraser. À son avis, dans le North Shore, le North Shore News et le
Real Estate Weekly accapareraient la majeure partie de la publicité.
Le directeur a soutenu que les annonces dans le domaine de l'immobilier à la
télévision par câble ont une capacité apparemment limitée et ne sont pas des substituts appropriés
à la publicité imprimée. Par conséquent, le marché pertinent a été étroitement défini en tant que
marché de la publicité imprimée dans le domaine de l'immobilier de la vallée du bas Fraser autre
que le North Shore, et le North Shore.
B. La position de Southam
(8)
Ibid., p. 34 (traduction).
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16
1. Le Vancouver Courier et le North Shore News
Southam a soutenu qu'aucune de ces acquisitions n'empêcherait, ni ne diminuerait
sensiblement la concurrence sur les marchés pertinents au Canada et que les services de publicité
des détaillants dans les journaux ne constituaient pas le marché pertinent. À son avis, le
directeur a omis de tenir compte de la concurrence du Globe and Mail et du Financial Post, dont
le tirage quotidien est respectivement de 30 190 et de 15 209. D'après Southam, The Province et
le Vancouver Sun servent des marchés nettement différents de ceux de chacun des journaux de la
Lower Mainland Publishing Ltd. (« LMPL »), qui sont des journaux communautaires. Selon la
société, ces deux types de publications répondent à des besoins différents tant chez les lecteurs
que chez les annonceurs et servent des marchés géographiques différents. De plus, le fait que de
nombreux médias dans la vallée du bas Fraser se livrent une concurrence très efficace auprès de
ce genre d'annonceurs laisse supposer que les quotidiens de Southam et les journaux de la LMPL
continueront à se livrer une concurrence efficace dans chacun de leurs marchés pertinents, une
fois les acquisitions faites.
Les quotidiens de Southam, comme la plupart des quotidiens qui desservent de
vastes régions urbaines, présentent un certain nombre de caractéristiques qui les distinguent des
journaux communautaires, y compris leur contenu, leur fréquence de publication, et leur tirage.
Les quotidiens de Southam attirent un lectorat général dans la vallée du bas Fraser en réunissant
un éventail unique de services dans un seul journal.
Ils publient des articles d'intérêt
communautaire uniquement dans la mesure où ceux-ci sont susceptibles d'intéresser l'ensemble
de leurs lecteurs. D'autre part, les informations et le contenu éditorial des journaux de la LMPL,
comme ceux des autres journaux communautaires, ne sont pas habituellement à durée de vie
critique et se limitent en majeure partie à des questions d'intérêt local.
Les niveaux de pénétration des quotidiens de Southam (c.-à-d. le pourcentage des
ménages atteints dans une région — un facteur très important pour les annonceurs) sont
nettement inférieurs à ceux des journaux de la LMPL. En 1989, le Vancouver Sun et The
Province affichaient des niveaux de pénétration d'environ 33 et 25 p. 100, respectivement. Les
journaux de la LMPL affichaient un taux de pénétration de pratiquement 100 p. 100 dans
chacune des régions circonscrites qu'ils servent.
Les quotidiens de Southam sont des moyens de communication de masse et
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17
pratiquement toute leur publicité par annonce provient d'annonceurs nationaux et de gros
détaillants qui visent une clientèle massive dans la région de Vancouver et au-delà.
Les
annonceurs nationaux font généralement de la publicité dans les quotidiens de Southam dont la
diffusion générale correspond de près à l'importante région où leurs produits et leurs services
sont offerts. Les journaux de la LMPL, par contre, attirent principalement des annonceurs parmi
les détaillants locaux, qui veulent transmettre leurs messages dans leurs localités.
En 1989, les quotidiens de la Southam tiraient 2 p. 100 ou moins de leurs recettes
de la publicité par annonce et des encarts publicitaires d'annonceurs locaux partout dans la région
de Vancouver. Par contre, près des deux tiers des recettes publicitaires de chacun des journaux
de la LMPL provenaient des détaillants locaux.
En 1989, plus de 50 p. 100 des recettes du Vancouver Sun et plus de 55 p. 100 de
celles de The Province provenaient de la publicité par annonce et des encarts publicitaires de
grands détaillants, alors que seulement un tiers environ des recettes du Vancouver Courier et du
North Shore News provenait de cette source. Dans une grande mesure, l'utilisation des journaux
de la LMPL par de grands détaillants complète plutôt qu'elle ne remplace la publicité venant des
détaillants dans les quotidiens de Southam.
La principale source de concurrence pour les quotidiens de Southam, en tant que
mass médias, sont les réseaux de télévision et de radio. La télévision en particulier est un
puissant concurrent parce qu'elle couvre une vaste étendue géographique et qu'elle transmet
simultanément des messages visuels et sonores.
La Société canadienne des postes restera un concurrent important des deux
journaux de la LMPL pour la diffusion de prospectus, parce qu'elle offre entre autres avantages
aux détaillants des horaires de livraison souples, des tarifs concurrentiels et un accès exclusif aux
boîtes postales individuelles dans les tours à appartements. Elle permet également de réduire les
coûts des annonceurs en offrant la possibilité de cibler des zones de diffusion aussi restreintes
qu'une portion d'un pâté de maisons.
Des innovations dans la typographie et l'impression informatisés ont
considérablement réduit le coût de l'édition, ce qui facilite l'accès à l'entreprise de la presse
communautaire. Le nombre de journaux communautaires fluctue donc constamment car de
nombreuses publications sont éphémères et de nouvelles publications font couramment leur
apparition sur le marché.
2. Le Real Estate Weekly
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18
Southam a nié que la publicité imprimée dans le domaine de l'immobilier
constitue le marché pertinent en raison de la concurrence minime qui existe entre les quotidiens
de Southam, qui sont des mass médias, et le Real Estate Weekly, qui est extrêmement sélectif
quant à sa zone de diffusion. Le Real Estate Weekly est un journal à diffusion restreinte,
spécialisé dans la publicité dans le domaine de l'immobilier, qui possède maintenant 14 éditions
distinctes, chacune centrée sur un secteur. En limitant la zone de tirage de chaque édition, et en
se spécialisant exclusivement dans les annonces d'agents immobiliers, ce journal est en mesure
d'offrir des renseignements détaillés sur l'emplacement et les caractéristiques physiques des
maisons à vendre, y compris des photos de pratiquement chaque propriété qui y est décrite. Les
agents immobiliers estiment que les quotidiens de Southam ne sont pas efficaces sur le plan de la
qualité, de la diffusion et des coûts. C'est pourquoi la majorité de la publicité dans le domaine de
l'immobilier qui paraît dans les quotidiens de Southam est placée par des promoteurs et des
particuliers désireux de vendre leurs propres propriétés.
Les coûts d'accès au marché du journal spécialisé sont minimes. Les agents
immobiliers du North Shore, par exemple, pourraient, comme bien d'autres agents immobiliers
un peu partout au Canada, diriger leur propre publication.
C. Les fusions et la Loi sur la concurrence (1986)
Comme nous l'avons indiqué plus haut, le directeur des enquêtes et recherches du
Bureau de la politique de concurrence a examiné les transactions de Southam en vertu des
dispositions sur les fusions de la Loi sur la concurrence, qui est entrée en vigueur en 1986. Il
importe de souligner que cette Loi ne vise pas une industrie en particulier; en d'autres mots, il
n'existe aucune disposition visant expressément l'industrie des journaux— ce que le Comité
Davey et la Commission Kent ont tous deux déploré à propos de la loi précédente, la Loi relative
aux enquêtes sur les coalitions. Les paragraphes qui suivent s'inspirent de deux publications du
Bureau de la politique de concurrence( 9 ).
Le directeur examine toutes les fusions et porte certaines questions devant le
(9)
Consommation et Corporations, Bureau de la politique de concurrence, Dispositions sur les
fusionnements, Bulletin d'information n° 1, juin 1988, ci-après appelé « Fusionnements ».
Consommation et Corporations, Bureau de la politique de concurrence, La politique de concurrence au
Canada : Les cent premières années, 1989, ci-après appelé « Politique de la concurrence ».
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19
Tribunal de la concurrence si une fusion ou un projet de fusion empêche ou diminue
sensiblement la concurrence ou aura vraisemblablement cet effet. Le directeur a trois ans à partir
du moment où un fusionnement est en substance réalisé pour porter l'affaire devant le Tribunal.
Après trois ans, tout agissement anticoncurrentiel (tel que l'établissement d'un prix abusif)
pourrait, dans certaines circonstances, être examiné par le directeur en tant qu'abus de position
dominante ou faire l'objet d'une poursuite criminelle.
Dans toute enquête sur des agissements anticoncurrentiels possibles, le directeur
doit établir avec précision le marché pertinent sur lequel ce genre d'agissements risque
d'empêcher ou de diminuer la concurrence. Cela n'est pas nécessairement simple; il faut tenir
compte de plusieurs facteurs importants, y compris en quoi consiste le produit, l'endroit où le
produit est vendu, les entreprises qui offrent ou pourraient offrir le même produit et les autres
produits qui sont ou qui pourraient être des produits de substitution au produit original.
Pour déterminer si la concurrence sur le marché pertinent a été empêchée ou
diminuée, le directeur tient compte de nombreux facteurs, dont les suivants, précisés par la Loi :
a)
b)
c)
d)
e)
f)
g)
h)
l'efficacité de la concurrence étrangère,
la déconfiture d'une entreprise,
la disponibilité de produits pouvant servir de substituts acceptables,
les entraves à l'accès,
la mesure dans laquelle une concurrence réelle subsiste,
la disparition d'un concurrent dynamique et efficace,
les changements et les innovations sur un marché pertinent, et
tout autre facteur rattaché à la concurrence (sur un marché qui serait touché par le
fusionnement).( 10 )
Il importe de souligner que la loi exclut la constatation selon laquelle la
concurrence sera diminuée ou empêchée « en raison seulement de la concentration ou de la part
du marché »( 11 ). C'est un élément très important en ce qui concerne l'industrie des journaux en
raison de la tendance marquée à une concentration accrue dans l'industrie, qui, pour de nombreux
observateurs (dont le Comité Davey et la Commission Kent), se traduit automatiquement par une
diminution de la concurrence. Les moyens utilisés pour évaluer la concentration tâchent de
réduire tous les facteurs qui reflètent l'étendue de la concurrence à un seul chiffre — par
(10)
Fusionnements, p. 4.
(11)
Ibid.
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BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
20
exemple, la proportion des ventes totales enregistrées par une ou plusieurs grandes entreprises
dans une industrie. Or, de telles mesures, aussi intéressantes soient-elles, sont trop simplistes.
De nombreux facteurs influent sur la compétitivité d'un marché, et la concentration des
entreprises n'en est qu'un.
La plus grande différence entre la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, qui
est demeurée en vigueur jusqu'en juin 1986, et la nouvelle Loi sur la concurrence réside peutêtre dans les dispositions relatives aux fusions. Auparavant, les fusions relevaient du droit pénal;
après que plusieurs causes ont été perdues, le gouvernement, certains avocats et universitaires, et
d'autres observateurs (tels que le Conseil économique du Canada), sont arrivés à la conclusion
que le droit pénal ne convenait pas à l'examen des fusionnements :
La règle de la preuve, le fardeau de la preuve et les implications de
faute que l'on y retrouve ne sont pas appropriés pour l'évaluation des
effets futurs d'un fusionnement sur la concurrence. Cette situation est
encore aggravée par l'exigence qui veut que la concurrence non
seulement diminue de façon sensible, mais également qu'il y ait des
preuves précises de détriment à l'intérêt public directement attribuable
au fusionnement( 12 ).
En vertu de la Loi de 1986, il est apparemment plus facile de prévenir tout aspect
anticoncurrentiel d'une fusion. Si le directeur est convaincu qu'une fusion empêche ou diminue
la concurrence, il « peut présenter au Tribunal de la concurrence une demande d'ordonnance
corrective à l'égard de la transaction, en tout ou en partie ».( 13 )
D. La décision du Tribunal de la concurrence
Le Tribunal de la concurrence a conclu que l'acquisition par Southam des
journaux communautaires, Vancouver Courier et North Shore News, n'était pas susceptible de
nuire à la concurrence que se livrent, auprès des annonceurs, les quotidiens appartenant à
Southam et les journaux communautaires de la région urbaine de Vancouver. Plus précisément,
le Tribunal a dit ne pas être convaincu que les quotidiens et les hebdomadaires visaient le même
marché; à son avis, bien que le marché géographique pertinent soit certainement le même, le
(12)
Politique de la concurrence, p. 20.
(13)
Fusionnements, p. 4.
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BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
21
marché pertinent du produit ne l'est pas. Le Tribunal a indiqué que par conséquent, les types
d'annonceurs recherchés par chaque type de journal sont nettement différents. De l'avis du
Tribunal :
En fait, le Tribunal ne dispose d'aucune preuve selon laquelle les
annonceurs sont hautement sensibles aux prix relatifs des quotidiens
et des journaux communautaires. [...] [L]es journaux communautaires
semblent être devenus le véhicule préféré de nombreux annonceurs
qui s'en remettaient auparavant uniquement aux quotidiens. La
preuve démontre que, pour les annonceurs, la possibilité d'obtenir un
taux très élevé de pénétration dans les régions d'où proviennent leurs
clients est un atout majeur des journaux communautaires. Il y a peu
de chances qu'ils laissent tomber cet avantage simplement parce que
les quotidiens baissent leurs tarifs publicitaires. Étant donné la
structure actuelle de leurs produits, les quotidiens et les journaux
communaitaires représentent au mieux pour certains annonceurs, de
faibles substituts.
Une grande partie des annonceurs de journaux communautaires ne
sont pas des clients potentiels des quotidiens, leur rayonnement étant
trop local( 14 ).
Par ailleurs, le Tribunal a déclaré ne pas être convaincu que le North Shore News puisse devenir
un quotidien :
[...] le directeur n'a réussi qu'à signaler la conversion d'un journal
communautaire en quotidien à Kamloops, et la transformation d'un
journal communautaire en quotidien, il y a plusieurs décennies, à
Long Island (New York). Aucun exemple n'a été donné d'un journal
communautaire qui aurait été converti en quotidien dans une grande
ville quelconque de l'Amérique du Nord. En revanche, il y a plusieurs
nouvelles entrées effectuées récemment par les quotidiens à Toronto,
à Edmonton et à Ottawa, et qui n'étaient en aucune façon rattachées
aux journaux communautaires( 15 ).
Par contre, le Tribunal a conclu que l'acquisition par Southam du Real Estate Weekly nuisait à la
(14)
Tribunal de la concurrence, Le directeur des recherches et enquêtes et Southam Inc. et al., CT-90/1,
Motifs et ordonnance, 1992, p. 257-258.
(15)
Ibid., p. 281.
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BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
22
concurrence. Il a conclu que :
Le Sun et les éditions de zone du Real Estate Weekly sont les plus
proches substituts disponibles pour la publicité des maisons neuves;
aucun autre véhicule publicitaire n'est aussi proche. Ils sont
probablement d'aussi proches substituts que l'on puisse espérer que le
soient des produits aussi différenciés. Même s'il n'y a pas de preuve
directe quant aux effets vraisemblables d'un changement de prix sur
les dépenses consacrées à l'un ou l'autre véhicule, la preuve indirecte
milite en faveur de cette conclusion( 16 ).
Le Tribunal a par conséquent conclu que l'acquisition du North Shore News et du Real Estate
Weekly a en fait entraîné l'élimination de toute la concurrence existante sur le marché de la
publicité dans le domaine de l'immobilier dans la région du North Shore de Vancouver. Il a
également conclu que la prime versée par Southam pour le Real Estate Weekly laisse supposer
que les entraves à l'accès au marché, lorsqu'elles sont conjuguées aux économies d'échelle de
l'industrie, étaient importantes. Dans une décision rendue le 10 décembre 1992, le Tribunal a
déclaré que Southam devrait vendre l'une des deux publications.
CONCLUSIONS
Le marché des idées (par exemple, les opinions politiques) n'est peut-être pas le même
que le marché des supports qui les véhiculent (par exemple, les journaux), mais le
chevauchement est considérable. En vertu de la Loi sur la concurrence, le gouvernement doit
déterminer si la concentration de la propriété des journaux empêche ou diminue sensiblement la
concurrence ou aura vraisemblablement cet effet. Le gouvernement s'est donc surtout intéressé
au monopole exercé sur le marché des produits plutôt qu'à la liberté d'expression sur le marché
des idées. L'affaire Southam, qui mettait en cause les journaux communautaires en ColombieBritannique, témoigne bien de la prépondérance forcée des aspects économiques. Comme nous
l'avons vu plus haut, le débat entre le directeur et le groupe Southam a surtout porté sur des
prospectus immobiliers qui ne contribuent guère à la diversité des points de vue.
Il s'est écoulé plus de deux ans et demi à partir du moment où Southam a pris le
(16)
Ibid., p. 305.
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BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
23
contrôle des hebdomadaires de banlieue jusqu'à la décision finale rendue par le Tribunal de la
concurrence. Au cours de cette période, l'industrie des journaux au Canada n'a cessé de se
transformer. Les pressions exercées par les autres types de médias et des annonceurs rivaux l'ont
obligée à se restructurer continuellement — prises de contrôle, échanges d'actions, vente d'actifs
autres que des journaux, sans compter la modernisation des imprimeries et des salles de
nouvelles. En fait, aujourd'hui le changement est devenu la règle dans cette industrie.
En novembre 1992, par exemple, soit un mois avant que la décision finale soit
rendue, Hollinger Inc., dont le principal actionnaire est Conrad Black, a conclu un accord en vue
d'acheter 22,6 p. 100 du bloc d'actions avec droit de vote de la Southam Inc., détenues par
Torstar Corporation, pour la somme de 259 millions de dollars. La transaction a été passée au
crible par les médias, surtout en raison de la participation de Conrad Black. Par l'entremise de
Hollinger, Black s'est bâti un empire mondial de la presse, et ce faisant, a acquis la réputation
d'un homme qui prend une part active à la gestion des journaux.
Des personnalités connues ont également fait les manchettes en mars 1993,
lorsque la société Power Corporation du Canada, dirigée par Paul Desmarais, a acquis
18,7 p. 100 des actions de la Southam Inc. Selon un article du Financial Post paru à l'époque,
Power Corp. et Hollinger ont annoncé avoir conclu une entente qui assure aux deux sociétés un
pourcentage égal des voix au sein du conseil d'administration de Southam et la capacité
d'acquérir chacune un maximum de 23,5 p. 100 des actions de Southam — et d'en détenir
ensemble 47 p. 100. L'article a alors cité Conrad Black qui aurait déclaré que si avec 47 p. 100
des actions, on n'arrive pas à contrôler une société, il serait préférable d'entrer dans un
monastère.
La Loi sur la concurrence a évidemment pour objet de veiller au contrôle efficace
des sociétés canadiennes. Par conséquent, le Bureau surveille les transactions qui portent sur des
blocs d'actions dans les journaux.
Toute transaction récente pourrait être examinée selon
l'analyse, faite dans le présent document, de la prise de contrôle par Southam d'hebdomadaires
des banlieues de Vancouver.
Dans chaque analyse, la définition du marché serait d'une
importance capitale pour déterminer si la transaction a influé sur la concurrence.