Jean-Louis Trintignant lit Apollinaire
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Jean-Louis Trintignant lit Apollinaire
DOSSIER DE PRESSE Jean-Louis Trintignant lit Apollinaire Poèmes à Lou - Alcool du 21 au 24 mai 2007 Musique Daniel Mille et Erik Satie Accordéon, arrangements et direction musicale Daniel Mille Violoncelle Grégoire Korniluk Mise en scène Marie-Hélène Sarrazin Lumières Alain Poisson HORAIRES lundi, mardi à 20h mercredi, jeudi à 19h Production : Les Visiteurs du soir Co-accueil en collaboration avec le Pour-cent culturel Migros Genève. CONTACT Eva Kiraly 00 41 / (0)22 809 60 83 [email protected] www.comedie.ch Stéphanie Chassot 00 41 / (0)22 809 60 73 [email protected] Le spectacle Le pré est vénéneux mais joli en automne. La poésie d'Apollinaire est évidence, musique et langueur. Les mots vibrent et s'étirent dans un vers qu'aucune ponctuation ne bride. Dans une quasi-pénombre, sans autre appui qu'une petite table à l'abri de laquelle il semble se retrancher, Jean-Louis Trintignant fait comme s'il lisait les mots du poète. Mais il les sait depuis longtemps et de sa voix grave, sourde et chaude en rehausse les nuances et les tons. Absolue simplicité, délicate pudeur d'un grand interprète qui sait faire entendre la douleur de l'être absent, les tumultes de la guerre ou le temps qui fuit. Rarement mots auront été plus concrets, ni silences plus audibles, trouvant en chacun un écho. Aux côtés de Jean-Louis Trintignant, les compositions d'Erik Satie et de Daniel Mille donnent une couleur encore plus émouvante à une très belle soirée. Le spectacle s'appuie sur des textes de Guillaume Apollinaire (1880-1918), essentiellement les Poèmes à Lou écrits dans les tranchées de la guerre de 14-18 et des vers extraits de Zone, poèmes qui ouvrent le recueil Alcools. Poèmes à Lou est édité chez Gallimard / Collection Poésie Zone est édité chez Gallimard / Collection Blanche Poésie Alcools - Lecture accompagnée par Henri Scepi / Collection La Bibliothèque Gallimard Liste des poèmes Dans Alcools 1/ Les colchiques 2/ Rosemonde 3/ ZONE 4/ Le pont Mirabeau 5/ Lettre à André Dupont 6/ Marizibill 7/ La chanson du mal aimé 8/ L’adieu Alcools 1/ 2/ 3/ 4/ 5/ 6/ 7/ 8/ 9/ 10/ 11/ 12/ 13/ Dans Poèmes à Lou Rêverie sur ta venue Il y a Jolie bizarre enfant chérie C’était, t’en souviens-tu Train militaire Et quand te reverrai-je ? Si je mourais là là-bas Agent de liaison L’attente La hutte en roseaux Mourmelon Les attentives Guy chante pour Lou Quand le volume d'Alcools parut, en 1913, il fut comparé à l'arrière-boutique d'un receleur. On pouvait y découvrir de tout, du périmé et de l'incompréhensible. Sur épreuves, Apollinaire substituera au titre Cri celui de Zone. L'organisation d'Alcools n'étant pas chronologique, Apollinaire le retint pour ouvrir symboliquement le recueil. Poème bilan et poème confession, Zone place Alcools sous le signe de ce qui sera nommé dans Calligrammes, la tradition et l'aventure. Le changement de titre qui s'opère de Cri (le tableau d'Edward Munch est de 1893) à Zone porte à modifier la lecture du poème : il n'est plus à considérer comme un cri de désespoir personnel, mais comme le parcours d'une zone de douleurs ; l'individu se dissémine et se réfléchit dans ce qu'il voit autour de lui, ce qu'il regarde au ciel. Guillaume Apollinaire (1880-1918) Guillaume Apollinaire, de son vrai nom Wilhelm Apollinaris de Kostrowitsky, serait le fils naturel d'un prince italien. Il passe les premières années de sa vie dans différentes villes de la Côte d'Azur, avec sa mère, pour venir à Paris en 1899. Il y mène une vie de bohème avant d'être engagé comme précepteur par une famille allemande avec laquelle il part Outre-Rhin. Il voyage, de 1901 à 1903, de la Rhénanie à la Hollande et l'Autriche, régions qui lui inspireront de nombreux poèmes. Il revient à Paris où il collabore à des revues littéraires. Son premier recueil, l'Enchanteur pourrissant, paraîtra en 1908. Il fréquente les milieux artistiques d'avant-garde, rencontre Marie Laurencin et devient l'ami de Derain, Vlaminck et Picasso. Ses publications se succèdent jusqu'en 1914 où il s'engage dans l'armée. Il est affecté à l'artillerie, puis à l'infanterie. Il écrit dans les tranchées de nombreux poèmes pour Lou. Il est grièvement blessé par un éclat d'obus en 1916. Il sera emporté quelques jours avant l'armistice par une épidémie de grippe espagnole. Jean-Louis Trintignant - biographie Neveu du coureur automobile Maurice Trintignant, qui lui a transmis sa passion, le jeune Jean-Louis Trintignant suit des études de droit à la faculté d'Aix-en-Provence. Mais il assiste le jour de ses 19 ans à une représentation théâtrale qui changera sa vie : l'Avare, mis en scène par Charles Dullin, dont il décide de suivre les cours à Paris. Jeune premier qui débute sur les planches en 1951 avec la pièce A chacun selon sa faim, le comédien se fait rapidement remarquer, grâce notamment à Responsabilité limitée, un texte de Robert Hossein, en 1953. Il fait à cette époque un bref passage par l'IDHEC, avec pour ambition de devenir réalisateur - un désir qui ne se concrétisera que vingt ans plus tard. Après quelques figurations, le premier film dans lequel apparaît Jean-Louis Trintignant est Si tous les gars du monde en 1955, mais celui qui le révèle est Et Dieu créa la femme de Vadim, drame au parfum de scandale qui lance le mythe Bardot. Très marqué par ses deux ans de service militaire en Algérie, il trouve un de ses premiers grands rôles en 1961 dans Le Combat dans l'ile, oeuvre engagée de Cavalier. Son goût pour les personnages ambigus lui fera d'ailleurs tourner plusieurs grands films politiques, de Z de Costa-Gavras (sa composition de juge lui vaut le Prix d'interprétation à Cannes en 1969) au Conformiste de Bertolucci - un des sommets de sa carrière italienne, qui compte aussi Le Fanfaron de Risi ou La Terrasse de Scola. C'est avec Un homme et une femme de Lelouch que Jean-Louis Trintignant accède au statut de vedette en 1966. Catholique tenté par l'infidélité dans Ma nuit chez Maud de Rohmer, séducteur manipulé dans Le Mouton enragé de Deville, agent immobilier soupçonné de meurtre dans Vivement dimanche ! de Truffaut, il navigue entre le cinéma d'auteur le plus novateur et les films grand public. Prix d'interprétation à Berlin pour L' Homme qui ment de Robbe-Grillet, l'acteur prend part au polar de Deray Flic story et au Bon Plaisir de Girod, dans lequel il incarne un Président de la République inspiré par François Mitterrand. Avec son jeu tout en nuances, à la profondeur teintée d'ironie, Jean-Louis Trintignant, dont la voix de velours constitue un précieux atout, s'impose comme l'un des plus grands comédiens de sa génération. Marié à Stéphane Audran puis à Nadine Marquand, Jean-Louis Trintignant tourne plusieurs films sous la direction de cette dernière, le plus souvent aux côtés de leur fille Marie, qui deviendra également sa partenaire privilégiée au théâtre. Depuis la fin des années 80, le comédien, retiré dans sa maison d'Uzès, se dit lassé par le cinéma, et se fait plus rare sur les écrans. Ses prestations de vieil homme misanthrope dans Trois couleurs - Rouge de Kieslowski ou Ceux qui m'aiment prendront le train de Chéreau, n'en sont que plus troublantes. Daniel Mille - biographie Daniel Mille est né en 1958 à Grenoble. A l’âge de 11ans, il commence à pratiquer l’accordéon, abandonne deux ans plus tard mais reprend au sortir d’un concert de Claude Nougaro avec Richard Galliano. Une amitié et une fidélité sont nées. Daniel Mille s’installe à Paris en 1985, joue dans le métro, revient de temps à autre à Grenoble jusqu’à ce que Richard Galliano lui propose de participer au spectacle de Barbara. En 1993, alors qu’il joue dans la rue, à Tulle, Pierre Barouh le filme, comme il filme tous les musiciens du festival. De retour à Paris, Barouh lui propose de faire un disque. En 1995 paraît Les heures tranquilles et il reçoit le Django d’or du meilleur espoir puis Le Funambule en 1999. Daniel Mille se produit dans de nombreux festivals : le Festival de Montauban, le Festival International d'accordéon à Tulle, le Paris Jazz Festival, au Parc Floral de Paris, le Festival du Vent à Calvi, la Nuit de l'Accordéon à Mulhouse, le Nice jazz festival, Jazz à La Défense, Jazz sous les pommiers à Coutances et en juillet 2001 au Festival International de jazz de Montréal. Les Francofolies de La Rochelle lui offre une "carte blanche". Il joue également dans de nombreux concerts à travers le monde. Parallèlement à son le travail personnel, on le retrouve en concert ou sur les albums de Peter Kingsbery, Jean Guidoni, Anne Sylvestre, Clémentine Célarié, Georges Moustaki, Bia, Sarclo, I Muvrini, Pierre Barouh, Didier Sustrac, Jacques Higelin, Maxime Le Forestier, en duo avec Maurane sur l' album de Sol en Si. Il se produit avec Baden Powel, dans le quartet de Daniel Goyone avec David Linx et Marc Bertaux, dans le trio du violoncelliste Eric Longsworth, dans le trio de Helen Merril avec Georges Mraz et Terry Clarke. Il compose et interprète sur scène la musique de La valse des adieux de Louis Aragon aux côtés de Jean-Louis Trintignant, en tournée dans toute la France et à l'étranger de septembre 1999 à mai 2001 donc le CD est paru en octobre 2003. On a pu l’écouter ces dernières années en ouverture du concert de Christophe et en première partie du concert de Zazie. Discographie Sur les quais (1993 – Saravah) Les heures tranquilles (1995 – Saravah) Le Funambule (1999 – Saravah) Entre chien et loup (2001 – Abacaba/Universal Music Jazz) La Valse des adieux de Louis Aragon avec Jean-Louis Trintignant (2003 – Abacaba/Universal Music Jazz Grégoire Korniluk - biographie Né en 1981à Douai (France), Grégoire Korniluk commence ses études musicales à l'âge de cinq ans au piano et prend ses premières leçons de violoncelle à l'âge de sept ans au Conservatoire National de Région de Douai. Il y obtient une médaille d'or à l'unanimité de violoncelle en 1995. Poursuivant ses études musicales, il rentre à l'ENM d'Aulnay sous bois dans la classe de Jean-Marie Gamard et y est recompensé d'un 1er prix à l'unanimité en classes de violoncelle et de musique de chambre. En 1997 il rentre 1er nommé au CNSM de Paris dans la classe de Philippe Muller et y ressort 4 ans plus tard avec un 1er prix à l'unanimité. En 2001, il rentre en cycle de perfectionnement dans les classes de Roland Pidoux et Alain Meunier; l'année suivante il obtient un 1er prix à l'unanimité de musique de chambre. Dès 1993, il devient lauréat de plusieurs concours nationaux et internationaux (Wattrelos en 1993 et 1996, Mâcon en 1998, Perpignan en 1999, Varsovie en 2001).Il a suivi diverses master-classes avec Alexander Boyarski à Londres, Peter Whispelwey, à Bruxelles, Natalia Chakovskaya et Xavier Gagnepain à Paris, Norman Fischer et Timothy Eddy à Boston et New-York, Arto Noras et Raphael Sommer à Prades. Grégoire Korniluk s'est produit en soliste dans de nombreux concerts en France, Belgique, République Tchèque, Pologne et USA, ainsi que dans divers festivals tels que Cobham, South Hadley, Cordes sur ciel (avec Augustin Dumay et Laurent Verney). Il multiplie les expériences en travaillant régulièrement à l'Opéra de Paris et en tant que violoncelle solo à l'orchestre de Bordeaux. En 2003 il est remarqué par le chef d'orchestre Christoph Von Dohnanyi qui l'invite à occuper le poste de violoncelle solo à l'orchestre de la NDR de Hambourg. Grégoire Korniluk est régulièrement demandé en soliste pour divers enregistrements, aussi bien avec le groupe Apocalyptica que pour de nombreuses musiques de film (A.Téchiné, Kosta-Gavras, C.Klapisch, R.Mihaileanu). Il travaille également dans le théâtre aux côtés d'Anouk Grinberg et Joëlle Léandre et actuellement avec Jean-Louis Trintignant et Daniel Mille dans le spectacle d'Apollinaire. Dans la presse LE POINT Jeudi 13 mai 2004 Mon pauvre cœur, mon pauvre amour… Jean-Louis Trintignant dit Apollinaire Las, vaincu, mélancolique, Jean-Louis Trintignant dit Apollinaire d’une voix lente et grisée de songes, et l’on dirait qu’il souffle sur le poème comme sur des braises, et que son chagrin si vif attise un feu mal éteint. Auprès de lui, deux musiciens : Daniel Mille et Grégoire Korniluk. Le violoncelle gémit, l’accordéon grelotte. Ce qui éclate, dans « Poèmes à Lou », outre le désir et les sentiments d’un ogre amoureux, c’est le miraculeux don d’enfance de Guillaume. Il y a le ménestrel fagoté en soldat, la tête brûlée, l’œil morne, qui soupire et qui cuve son chagrin quand son amour s’éloigne. Tartempion en Iliade. Il y a aussi le rhapsode gaulois, enclin à pincer sa muse dans le gras de la cuisse, et qui s’érige et qui s’enfle comme un cerf en rut et qui profère sciemment des énormités : « Je voudrais être un obus boche… Je voudrais que la guerre recommencât pour que tu m’aimes… » ! Ici ou là, une phrase se brise et tinte comme un aveu trop intime, comme une chose irréparable et tendre qu’on guette malgré soi : « L’angoisse de l’amour te serre le gosier comme si tu ne devais plus être aimé… Nous ne nous verrons plus sur terre… Comment voulez-vous que j’oublie ?… Souviens-toi que je t’attends !… » Et quand Apollinaire invoque Lou, « Ô ma colombe ! ma rose ! mon giroflier ! », Jean-Louis songe à celle qu’il a le plus aimée. N’y a-t-il pas un soupçon de voyeurisme devant ce travail de deuil et dans la curiosité émue qu’il suscite, ce père orphelin ? Sans doute. Et l’on applaudit plus fort le comédien, si recueilli et si sobre, faute de pouvoir consoler l’homme. On l’admire. Lui, c’est elle qu’il admirait. Frédéric Ferney