Présidents et anciens présidents d`université Chroniques du blog

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Présidents et anciens présidents d`université Chroniques du blog
Présidents et anciens présidents d’université
Chroniques du blog Histoires d’universités. Année 2010
12 janvier 2010
Président Beretz
Alain Beretz, 55 ans et professeur de pharmacologie depuis 1990, est président de l’Université de
Strasbourg depuis le 1er janvier 2009, date de la fusion des 3 universités strasbourgeoises créées en
1971 (Louis Pasteur, Marc Bloch, Robert Schuman). Il a été élu à cette fonction le 18 décembre 2008
par 17 des 21 membres élus du Conseil d’administration de l’université unique. Election sans surprise
puisque les listes qui soutenaient sa candidature et son programme dans les différents collèges
(”Rassembler, agir, réussir pour l’UDS“) avaient obtenu une nette majorité lors des élections aux
différents conseils (11 décembre 2008), remportant 12 des 14 sièges enseignants au conseil
d’administration.
Qui est Alain Beretz ? CV à la date de l’élection à la présidence. Découvrons-le, ému et
heureux, aussitôt après son élection, sur une vidéo des Dernières Nouvelles d’Alsace : il répond
clairement, posément, précisément aux questions qui lui sont posées. Découvrons-le dans son bureau
présidentiel le 11 janvier 2010 (photos de la présidence et du président de l’UdS). Il est parfaitement à
l’aise, souriant, et commente son lieu de travail : ”le bureau du Président doit avant tout être
fonctionnel, suffisamment spatieux pour pouvoir réunir plusieurs personnes, tout proche des services
centraux ; il ne doit pas être d’un luxe ostentatoire (”voyez : pas de toiles de maître sur les murs”),
mais, à l’inverse, il ne doit pas faire honte au président quand il accueille des personnalités extérieures.
Dans les six mois, la présidence quittera l’immeuble de l’Institut Lebel (ex université Louis Pasteur)
pour rejoindre un nouveau bâtiment prévu à l’origine pour l’ex université Marc Bloch. Ce transfert,
dans l’ordre du symbolique, est tout à fait important : la fusion des 3 universités ne doit pas être la
domination d’une université disparue sur deux autres, tout aussi défuntes. La fusion ne réussira que si
elle s’appuie sur une identité culturelle nouvelle, sur le sentiment de tous d’appartenir à l’université
unique de Strasbourg.
Il est toujours difficile, juste après la rencontre avec un président, de qualifier celui-ci par quelques
mots. Tentons l’exercice ! Le premier qualificatif qui m’est venu est “serein“. Alain Beretz est un
homme “serein”. Il sait très bien que l’université de Strasbourg doit répondre à un double défi difficile
(celui spécifique de la fusion et celui auquel sont confrontées toutes les universités françaises), mais ça
ne l’inquiète pas du tout. Il fait son métier de président, métier prenant, aux longues journées de
travail, fatigant quelquefois, mais il le fait “sereinement” et de manière déterminée car il sait pouvoir
s’appuyer sur une équipe, sur des équipes à tous les niveaux. Il joue “collectif” !
“Jouer collectif”. Il rejette, ainsi et bien évidemment, les critiques contre les pouvoirs excessifs des
présidents. ”Leurs pouvoirs sont encadrés par tout un fonctionnement universitaire. On ne peut pas
faire fonctionner une université en restant sourd au dialogue et à la concertation”… “Présidents, nous
sommes avant tout des enseignants-chercheurs, qui, pour la plupart, aspirons à retourner un jour à
notre métier, notre passion. Nous sommes élus par nos pairs selon les principes d’un système
parfaitement démocratique” (6 février 2009, VousNousIls). Question : “les personnalités extérieures,
membres du CA, devraient-elles élire le président” ? “Non ! ce serait anormal car c’est le président élu
qui les a fait nommer” ! ”Sincère” est un autre adjectif qui peut qualifier Alain Beretz. A plusieurs
reprises dans l’entretien du 11 janvier 2010, il dit que, sur tel ou tel dossier, il n’a pas les dernières
informations et données statistiques en tête ou même qu’il ne suit pas directement l’affaire. Il invite
alors à prendre contact avec tel ou tel membre de son équipe. “Président, retournerez-vous un jour au
métier ou candidaterez-vous à un second mandat en 2013″ ? Sourire. “Je serai peut-être lassé
ou fatigué ! Aucun problème pour retourner faire le professeur. Mais vous le savez : il n’y a jamais
foule pour faire le président !”.
L’Université de Strasbourg a voté des statuts qui permettent un fonctionnement plus collégial que
celui auquel “pousse” la loi LRU (statuts de l’UdS) ; “il faut recréer du parlementarisme dans d’autres
instances que le CA”, dit Alain Beretz. Trois articles, au moins, des statuts vont dans ce sens. Article
38. Le Congrès. “La réunion des trois conseils centraux de l’université et des représentants des
personnels au Comité technique paritaire constitue le Congrès. Il peut être consulté chaque fois que le
Président l’estime utile, à son initiative ou à la demande de la moitié au moins de ses membres. Il est
réuni au moins une fois par an à l’occasion de la présentation du rapport d’activité du Président, du
débat d’orientations budgétaires et lors de la préparation du projet d’établissement”… C’est le
Congrès, restreint aux membres des 3 conseils centraux qui élit les vice-présidents, vice-président par
vice-président, proposés par le président. Article 50. Les Collégiums. “Le collégium est un organe de
coordination entre la Présidence et les composantes. A cette fin, il donne ses avis sur les dossiers
relatifs à l’offre de formation, aux programmes de recherche et aux moyens associés. Il anime et
renforce le lien entre la formation et la recherche, et suscite l’émergence de formations et de
thématiques innovantes fondées sur la complémentarité des disciplines”… “Chaque collégium est doté
d’une instance consultative, le directoire”. Article 54. Comité d’orientation stratégique. “Le
Président, avec l’accord du Conseil d’administration, peut décider de réunir un Comité d’orientation
stratégique, composé de personnalités extérieures à l’université et appartenant au monde académique
et socioprofessionnel, chargé de proposer des orientations stratégiques sur l’ensemble des missions de
l’université”.
On n’est pas élu par hasard Président d’une université qui a, aujourd’hui en France, le plus grand
nombre d’étudiants. Il faut avoir fait ses preuves. Alain Beretz a pris des responsabilités de plus en
plus importantes dans l’université Louis Pasteur, les premières remontant à son élection en tant que
professeur en 1990. Les étapes : 1993 (membre de la commission des études doctorales),
1999 (membre du conseil scientifique), 2001 (vice-président en charge des relations avec les
entreprises et de la valorisation), juin 2007 (président de l’université, en remplacement de Bernard
Carrière, président depuis 2002). Belle élection : Alain Beretz est élu par 82 voix sur 127 exprimés,
44 voix s’étant portées sur Catherine Mongenet, directrice de l’UFR de mathématiques et
d’informatique.
A peine élu en juin 2007, Alain Beretz n’a pas le temps de respirer. Août 2007, c’est la loi LRU et
son lot de réformes. Février 2008, les Conseils des 3 universités strasbourgeoises votent le principe de
la création d’une université unique. Faire face à un double défi : réussir la fusion et réussir l’autonomie
de l’UdS dans le cadre la loi LRU. Passage aux responsablités et compétences élargies dès le début
2009, accord manifesté avec 3 autres présidents (Le Monde du 29 janvier 2009) pour réformer le statut
des enseignants-chercheurs et donner à l’université tout la responsabilité en matière de
promotions, réflexions en cours sur la dévolution du patrimoine (chronique de ce blog “Patrimoine :
dévolution“). Faire face à un double défi, sereinement et avec détermination : courage, Président
Beretz !
04 février 2010
Président Messina
Richard Messina est président de l’université Evry Val-d’Essonne depuis juin 2006. Dans
l’entretien du 15 janvier 2010 (photos), synthétisé dans la chronique d’hier, il a exposé les ondes de
choc auxquelles son université a dû et doit faire face : “Evry déPRESsée“. La chronique d’aujourd’hui
retrace sa trajectoire. Tenter de le qualifier par un seul adjectif, comme je tente de le faire dans mes
chroniques : le Président Beretz est “serein” ; le Président Messina est “bouillonnant” d’idées et de
projets, énoncés dans un flux de paroles ininterrompues. L’entretien a duré près d’une heure trente
sans que j’aie eu à poser 3 questions. Impressionnant ! Le Président est capable de tenir des meetings
politiques !
Richard Messina est né en 1947 (CV sur EducPros). A 23 ans (1970), il obtient un diplôme
d’ingénieur à l’INSA de Lyon (option “chimie industrielle”). A 26 ans (1973), il devient docteur
ingénieur de l’université de Paris 6. Il commence alors sa carrière universitaire à l’université de Paris
12 Val-de-Marne, en tant qu’enseignant chercheur en chimie.
A 32 ans (1979), il obtient son doctorat d’Etat dans cette même université. 32 ans, c’est très jeune, eu
égard à l’âge d’obtention du doctorat d’Etat en sciences humaines et sociales. Mais il lui faut attendre
8 ans pour devenir professeur en 1987 (à 40 ans). Richard Messina s’est déjà alors lancé dans une
seconde trajectoire, parallèle et croisée avec la trajectoire universitaire : la politique. Il est élu maire
de Boussy Saint-Antoine à l’âge de 36 ans ; 27 ans plus tard, en 2010, il en est toujours le maire.
Vient une bifurcation-clé dans la trajectoire professionnelle, la quarantaine atteinte. Richard
Messina quitte Paris 12 Val-de-Marne et rejoint la nouvelle université d’Evry Val d’Essonne. A
45 ans (1992), il prend la direction de l’IUP Génie des matériaux ; il en demeurera le directeur
jusqu’en 2005 (58 ans). IUP et Génie des matériaux : on comprend mieux les deux chocs décrits par
Richard Messina dans la chronique d’hier : intégration des IUP dans le LMD, changement de la
thématique de recherche de l’université. Il est confronté personnellement à ces deux chocs.
La carrière politique de Richard Messina prend de l’ampleur. Il est élu conseiller général de
l’Essonne en 1998 (51 ans), dans le groupe Parti socialiste et apparentés ; il l’est encore aujourd’hui.
Il en devient le vice-président en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche, de la jeunesse,
de l’accès au savoir. En 2007, il appelle avec d’autres présidents à voter pour Ségolène Royal.
La prise de responsabilités au sein de l’université s’accroît également. Il devient en effet premier
vice-président de l’université en charge du Conseil d’administration, sous le mandat de son
prédécesseur président, Daniel André (chronique à venir). Ce dernier ayant démissionné, une
élection à la présidence de l’université est organisée en juin 2006. Richard Messina est candidat et
est élu dès le 1er tour de scrutin avec une large majorité : 65 voix sur 98 votants (15 et 17 voix
s’étant portées sur deux autres candidats, 1 abstention). Il a 59 ans. En 2007, le nouveau président de
l’UEVE est confronté à deux grèves, en juin et en octobre, organisées par le Collectif contre la
précarité et dues aussi à un mécontement pour le retard dans le paiement des enseignements payés à
l’heure. Les marges de manoeuvre du président sont faibles : l’université a des difficultés budgétaires ;
mais, faute de mieux, une indemnité compensatrice de précarité est instituée.
Août 2007. La loi LRU oblige à refondre les statuts, à diminuer la taille du Conseil d’administration, à
organiser des nouvelles élections. Les listes ”Ensemble pour relever les défis de l’autonomie“, listes
soutenues par le SNESUP et favorables au Président Messina, l’emportent largement lors des élections
de la fin 2007, élections qui connaissent une forte hausse de la participation : 9 sièges sur 12 au conseil
d’administration dans les collèges des professeurs et des maîtres de conférences. C’est donc sans
surprise que Richard Messina est confirmé dans ses fonctions de président (19 voix pour, 3
contre, 3 abstentions). Il a 60 ans et est élu pour 4 ans.
2008 et 2009, l’onde de choc du Campus du plateau de Saclay. L’UEVE n’en devient pas membre,
malgré les protestations de Richard Messina auprès de Valérie Pécresse et bien que l’université ait
plutôt joué les bons élèves pour la mise en oeuvre de la loi LRU, pour la réforme de la mastérisation
de la formation des enseignants, pour le maintien des dotations aux IUT.
Juin 2011, le mandat du président Messina - il aura alors 64 ans - est arrivé à son terme. J’avoue
ignorer si un président de cet âge peut postuler, dans le cadre de la loi LRU, à un second mandat de 4
ans. Avant la LRU, ne pouvait candidater à la présidence d’une université que les enseignants qui
pouvaient faire un mandat de 5 ans avant d’atteindre 65 ans.
Qu’en pense le président Messina ? Rappelons sa qualité : “il est bouillonnant” ; je n’ai donc pas pu
lui poser la question ! Sa secrétaire est intervenue courtoisement pour annoncer que le rendez-vous
suivant attendait depuis un moment. Pas une seule fois au cours de l’entretien, le président Messina
n’a évoqué ses mandats politiques (maire, conseiller général, vice-président d’une communauté
d’agglomération). Est-ce vraiment possible de remplir pleinement deux fonctions : un mandat dans
l’université et plusieurs mandats politiques ?
J’avoue que cela me laisse rêveur car, dans le contexte politique actuel, tous les boomerangs sont
possibles. Etre président de gauche sous un gouvernement de droite : c’est courir le risque
d’être pénalisé ou à l’inverse d’être favorisé parce que vous êtes une proie à chasser dans le camp
adverse. Etre président de gauche sous un gouvernement de gauche : c’est attendre d’être favorisé ou à
l’inverse d’être pénalisé parce que le pouvoir ne veut pas servir en priorité son propre camp,
déontologie oblige. J’estime donc pour ma part que les présidents d’université ne doivent pas
avoir de mandats politiques, libertés universitaires obligent. Désolé, Richard Messina ! Et pourtant,
j’admire vraiment votre caractère “bouillonnant”.
05 février 2010
Président André
Daniel André a été président de l’université d’Evry Val d’Essonne de 2002 à 2006. Richard
Messina lui a succédé. J’ai interviewé le président André en juillet 2004, lors de la recherche sur le
gouvernement des universités en France et en Italie (lire le compte-rendu de l’entretien).
Daniel André, aujourd’hui en retraite, est une figure historique de la création de l’université au
début des années 90. Il y a toujours exercé des responsabilités (il était vice-président avant de devenir
président). Sans langue de bois, il analyse les points forts d’une jeune université, mais surtout ses
points faibles. Il faut sans cesse les attaquer de front, les corriger, faire mieux et cela exige un travail
harassant. Les points qu’il faut redresser : les finances de l’université, l’explosion de l’offre de
formation, la gouvernance (l’équipe de direction, le fonctionnement du Conseil d’administration, le
rapport entre la présidence et les composantes, les tensions entre les disciplines, le Conseil
d’orientation stratégique).
Trois ans avant la LRU, Daniel André se pose en visionnaire : il en appelle à une réforme profonde
et urgente du système universitaire, mais en gardant absolument un enseignement supérieur public. ll
faut que le président et son équipe aient un pouvoir beaucoup plus fort ; il faut un Conseil
d’administration de taille réduite ; il faut que les universités se regroupent, mais le Campus du
plateau de Saclay cause déjà bien des soucis à l’université d’Evry…
08 février 2010
Président Belloc
L’occasion de faire enfin une chronique sur Bernard Belloc m’est donnée par une nouvelle chronique
cinglante de Gilbert Béréziat sur son blog : “Autonomie des universités : illusion, mensonge
politique ou rébellion des apparatchiks“. A lire absolument. On connaît les positions affirmées de
l’ancien président de l’université Paris 6 Pierre et Marie Curie : toute l’autonomie, rien que
l’autonomie pour les universités et en particulier les universités de recherche, celles qui apparaissent
dans les classements mondiaux. Gilbert Béréziat est unique car il connaît parfaitement l’histoire des
universités, ses personnages clés (il les aime ou les déteste), toutes les entourloupes faites par l’Etat
pour empêcher la vraie autonomie.
Et il n’a pas la langue de bois : ”en début d’année, Nicolas Sarkozy a déclaré péremptoirement : nous
avons mis fin à la gouvernance dépassée, par la loi LRU. Ce n’est pas la vérité, si en matière de
gestion des “emmerdements ” les 18 universités passées aux responsabilité élargies ont été servies, il
n’en est rien en ce qui concerne les libertés qui ont au contraire été restreintes alors que le contenu du
rapport Aghion montre bien, même s’il n’en dit mot, qu’avec cette loi on est loin du compte en
particulier dans la liberté que devraient avoir les universités de choisir leur propre organisation interne
et leur propre gouvernance. La liberté c’est pour les banquiers et pour les capitaines d’industrie, pas
pour les universités”.
Bernard Belloc, président d’université en même temps que Gilbert Béréziat au tournant des années
2000, est un fidèle commentateur du blog de son collègue. Il parle aussi de l’autonomie des
universités ; il s’en dit un fervent partisan depuis toujours. “J’étais bien naïf et tous les gouvernements
qui se sont ensuite succédés depuis le début des années 2000 ont soigneusement évacué la question,
jusqu’à ce que Nicolas Sarkozy s’engage complètement pour faire enfin changer en profondeur
le paysage et mettre des moyens comme les universités n’en ont jamais vu depuis… je ne sais quand,
quoiqu’en disent certains, qui eux, il faut le rappeler, ont soutenu des gouvernements de gauche qui
nous ont fait faire le passage au LMD à budget constant… et ils en étaient fiers! Je suis d’accord avec
toi sur les pesanteurs de l’administration et surtout les réticences et les freins mis à tout bout de
champ par ce que tu nommes la noblesse d’Etat. Mais là aussi, les choses bougent et une partie de
ladite noblesse est en train de changer de camp. Je peux en attester”.
Rappelons que Bernard Belloc est actuellement conseiller au cabinet du président de la
République pour l’enseignement supérieur et la recherche. A quoi sert donc un conseiller s’il ne
peut venir à bout des pesanteurs, des réticences, des freins ? Dire que “les choses bougent et qu’une
partie de la noblesse d’Etat est en train de changer de camp”, c’est aller vite en besogne ou faire de la
méthode Coué. Des noms, des noms ! Bernard Belloc pourrait-il nous dire ce qu’il a conseillé et
conseille à Nicolas Sarkozy et si le Président l’a écouté et l’écoute ?
J’ai en fait l’impression que Bernard Belloc s’ennuie sérieusement au cabinet du Président. Ce
serait intéressant de connaître son agenda ! Il prend en effet le temps de lire et de commenter le blog
de Gilbert Béréziat. Il va dans des colloques pour communiquer la bonne parole présidentielle (il était
par exemple au colloque de Besançon “Université, universités“). Regrette-t-il d’avoir accepté de
devenir “Conseiller” après une carrière fort riche (CV sur EducPros) : professeur agrégé d’économie,
président de Toulouse 1 de 1998 à 2003, 1er vice-président de la CPU de 2000 à 2002, puis, “à partir
des années 2000, il multiplie les missions à l’international aux Etats-Unis et surtout en Asie. Avant
d’être nommé à l’Elysée, Bernard Belloc était d’ailleurs conseiller pour la science et la technologie
près l’ambassade de France en Chine (2005-2007)”.
A 61 ans et demi, il est certain que Bernard Belloc s’interroge : que puis-je faire de plus et mieux
que conseiller à l’Elysée ? Ouvrir un blog ?
15 février 2010
Jean- Robert Pitte, dernier de liste
Jean-Robert Pitte est candidat UMP aux régionales à Paris. Il est 44ème de la liste et… bon
dernier (cliquer ici). Pourquoi donc l’ancien président de Paris IV Sorbonne figure-t-il sur une liste
UMP dans une position inéligible ? Croit-il que son seul nom peut apporter quelques voix et/ou en
attend-il (enfin ?) une reconnaissance de Valérie Pécresse ? J’avoue que je ne sais pas. A 60 ans, il me
semble qu’il est trop tard pour espérer un poste de recteur d’Académie. Pourquoi le président
Pitte va-t-il perdre du temps dans cette galère, alors qu’il se disait “non encarté” politiquement quand
je l’ai interviewé en juin 2004 ? Cliquer ici pour lire le compte-rendu de cet entretien.
Jean-Robert Pitte, enseignant-chercheur à Paris IV depuis… 1974 (exemple de non-mobilité), est
professeur de géographie, spécialiste de la production des paysages au cours de l’histoire, en
particulier de ceux du vignoble. C’est un personnage médiatique : il a son franc-parler, est un bon
débatteur voire provocateur, adore parler du vin (c’est un plaisir de l’entendre conter le sujet !). Il
fréquente souvent les plateaux de télévision et il est, peut-être parmi les présidents ou anciens
présidents d’université, le recordman du nombre de vidéos qu’on peut écouter et regarder sur la toile
(lire la note). Mais il en fait quelquefois trop : quand il était à la tête de Paris IV entre 2003 et 2008,
il se présentait comme le président de la Sorbonne, ce qui m’agaçait et devait stupéfier les présidents
des universités portant aussi le nom de Sorbonne.
En juin 2004 lors de l’entretien (la gauche n’est plus au pouvoir depuis 2002), Jean-Robert Pitte
était président de Paris IV depuis un an. Il avait été élu contre 3 autres candidats par 70 voix sur
120. Il insistait sur la situation financière fort difficile de son université, due en particulier à une nonmaîtrise du volume d’heures complémentaires. Il lui fallait resserrer les boulons, redéployer les postes
devenus vacants. De solides inimitiés devaient en découler. La fonction de président est délicate
et Jean-Robert Pitte se disait fort satisfait de la non-réégibilité du président après un 1er mandat. Il
changera d’avis.
2004 lors de l’entretien : Jean-Robert Pitte espère une réforme forte de l’université, plus d’autonomie.
2006 : publication d’un premier pamphlet, “Jeunes, on vous ment ! Reconstruire l’université”.
2007, second pamphlet : “Stop à l’arnaque du bac“. 2007, la loi LRU. Déception du président en
fonction : la loi Pécresse interdit ce qu’il souhaite, la sélection à l’entrée de l’université et
l’augmentation, voire la liberté, des droits d’inscription. Attaquer deux sujets “tabous” : le
président Pitte est irrémédiablement classé “à droite” ; c’est un “réac”. C’est en fait plus compliqué
que cela : le lecteur attentif de ce blog sait que je suis favorable à l’augmentation des droits
d’inscription et, pourtant, je vote depuis toujours à gauche.
2008, la fin du mandat de cinq ans. Suite à la loi LRU, les présidents sont devenus rééligibles.
L’élection à Paris IV est tout à fait inédite dans l’histoire des universités. Elle oppose le président
sortant (il a donc changé d’avis depuis 2004) et Georges Molinié qui avait été président de Paris IV de
1998 à 2003 et ne pouvait demander sa réélection en 2003. Inédit également le résultat du
vote final par le Conseil d’administration, seul conseil qui élit le président depuis l’entrée en vigueur
de la loi LRU : Georges Molinié, assuré de la majorité des votes des maîtres de
conférences, l’emporte par 11 voix contre 8 à Jean-Robert Pitte, assuré de la majorité des votes des
professeurs ; ce sont les étudiants et les personnels techniques et administratifs qui ont fait l’élection.
La loi LRU, je le dis et je redis, rend les présidents d’université peu légitimes : 11 voix ! Et
situation inédite à Paris IV, le président Molinié, 66 ans en 2010, n’est pas l’élu des professeurs.
2009, le mouvement de longue durée dans les universités. Jean-Robert Pitte monte souvent au
créneau, dans les médias, pour défendre ses positions contre le mouvement. Il est ainsi poussé, encore
plus et définitivement, dans le camp de la “droite”. Celle-ci aurait dû peut-être le récompenser en le
mettant en position d’éligibilité dans la liste UMP pour les régionales à Paris. Va savoir ! Je crois que
Jean-Robert Pitte est, définitivement, un “électron libre”, un “trublion”. 44ème et dernier de liste
: “c’est quand même… bizarre !”, comme le dit mon petit-fils Arthur (2 ans).
CV détaillé de Jean-Robert Pitte, actualisé en février 2009 : cliquer ici.
Jean-Robert Pitte en vidéo sur la toile. Sur Canal Académie (l’ancien président de Paris IV est
membre de l’Académie des Sciences morales et politiques). 1. La nécessaire réforme des universités
(juillet 2009, 37 minutes) : cliquer ici. 2. Géographe, écrivain, auteur de pamphlets (juillet 2007, 41
minutes) : cliquer ici.
Interviewé par l’UNI (et non par l’UNEF !). 1. En mars 2009 lors du mouvement du printemps
dernier : cliquer ici. 2. Au printemps 2006, lors du mouvement contre le CPE (Contrat Première
Embauche) : cliquer ici.
10 mars 2010
Président Saint-Girons
Bernard Saint-Girons est délégué interministériel à l’orientation. Né à Blaye les Mines (Tarn), il a
65 ans depuis le 11 janvier 2010. Il ne semble pas qu’avoir franchi ce cap symbolique le menace
d’être évincé de sa fonction. Plusieurs poids, plusieurs mesures pour les responsables
universitaires de cet âge ? Daniel Vitry a dû quitter la direction de la DEPP et se trouver une mission
à la Caisse des Dépôts et Consignations ; Christian Forestier a eu besoin d’un décret ministériel pour
poursuivre sa mission à la tête du CNAM ; le président du PRES Paris-Est doit en quitter la présidence
en avril 2010 et n’a pas encore rebondi sur une autre fonction.
A vrai dire, Bernard Saint-Girons s’est vu proposer en 2008 la fonction de délégué interministériel à
l’orientation comme porte de sortie après la Direction générale des enseignements supérieurs (lire
infra). La fonction n’est pas déplaisante et le délégué la prend très au sérieux, même s’il sait
pertinemment qu’il n’est pas le seul à se pencher sur le ”serpent de mer“ de l’orientation. Il se déplace
partout en France pour écouter et s’informer, est auditionné ici et là, communique, recherche les
bonnes pratiques et rédige un rapport annuel fort documenté et étoffé de nombreuses
recommandations. Son dernier rapport a cependant fait l’objet d’analyses critiques sur ce blog :
“L’orientation. Le cru 2010” “Réformer le BTS“.
Avant de retracer sa longue carrière de responsable de et dans l’enseignement supérieur,
récompensée par les insignes des Palmes académiques, du Mérite national et de la Légion
d’honneur (CV sur EducPros), le mieux est de l’écouter et de le regarder durant 40 minutes, lors
de son audition, en mai 2009, par la commission du Sénat sur la politique en faveur des jeunes et
plus spécifiquement sur l’orientation. J’aime beaucoup la phrase : “je parlerais un langage “boisé” si je
vous disais que le paysage de l’orientation était parfaitement lisible”… ; “8.500 points d’information
pilotés par 22 réseaux différents”. J’ai pris l’habitude de qualifier d’un terme les présidents ou anciens
présidents d’université : Bernard Saint-Girons est “pondéré”. Ecouter en particulier ce qu’il dit des
Conseillers d’orientation psychologues (COP)… Il se retient d’être trop critique… Mais le chantier de
la réforme des COP n’est pas encore ouvert à ce jour.
39 ans (1984), Bernard Saint-Girons enseigne le droit public (évolution des entreprises publiques,
droit de la concurrence, relations internationales en particulier avec l’Afrique) à l’université de
Toulouse 1. Il devient responsable du service universitaire d’information et d’orientation (SUIO)
et le restera pendant 5 ans. Déjà concerné par la question de l’orientation ! Il semble que ce soit sa 1ère
responsabilité “administrative” dans l’université (CV sur le site de l’académie de Clermont-Ferrand).
Ce CV liste les publications de 1970 à 1994 et indique ”Professeur de droit public (1990)”. Agrégé du
supérieur à 45 ans ? A vérifier.
44 ans (1989). Bernard Saint-Girons prend une deuxième responsabilité dans la suite logique de la
direction du SUIO : il devient, durant 4 ans, vice-président en charge du CEVU (Conseil des études
et de la vie universitaire).
48 ans (1993), le vice-président du CEVU est élu président de l’université pour un mandat de 5
ans, devient 3ème vice-président de la CPU (1996), puis 1er vice-président (1998). 1er vice-président
et non Président de la CPU ; c’est le Ministre, Claude Allègre à l’époque, qui préside la CPU et le fait
sentir (chronique : “Allègre : 3 souvenirs” dont celui de l’assemblée générale annuelle de la CPU à
Limoges en mars 1998, consacrée à l’évaluation). Mai 1998 : le rapport Attali qui propose
d’organiser le supérieur en 3, 5 et 8 ans : le 1er vice-président de la CPU a des réactions prudentes ;
mais il est favorable au renforcement des aides à la mobilité des enseignants et des étudiants en
Europe. Dans cette période, Bernard Saint-Girons est également président du Pôle universitaire
européen de Toulouse, vice-président du Conseil économique et social de Midi-Pyrénées,
administrateur de l’AMUE.
54 ans (1999), poursuite de la carrière ascensionnelle mais avec un changement de cap. Bernard
Saint-Girons est nommé Recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, en juin 1999. Octobre
1999, “le Ministre Claude Allègre lui remet l’insigne de Chevalier de la Légion d’Honneur pour son
très brillant parcours universitaire” (cliquer ici pour les photos). Le directeur de cabinet du rectorat dit
“combien tous, dans l’Académie, apprécient la grande qualité des relations professionnelles qu’il a su
instaurer”.
En 2000 (55 ans), le recteur change d’académie : il part d’abord à Nice, puis à Créteil en 2003
(58 ans). Il rend visite à l’université de Marne-la-Vallée ; je l’étonne quelque peu en lui exposant le
problème de l’immobilier universitaire : pénurie de locaux du début octobre à fin décembre et faible
utilisation pendant les 9 autres mois de l’année, et parce que les filières professionnelles avec stages
longs ou en alternance se développent. L’ancien 1er vice-président de la CPU restera recteur de
l’académie de Créteil jusqu’en 2007. Il faut donc remarquer qu’il a été nommé une première fois
recteur par un gouvernement de gauche et qu’il l’est resté après le retour de la droite au pouvoir
en 2002.
62 ans (2007). Le Président Saint-Girons est au pic de ses responsabilités. Le 21 mars (et donc
avant l’élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la république), il est nommé Directeur général
des enseignements supérieurs (DGES) : il a donc atteint, comme de son côté le Directeur de la
recherche, le sommet de l’administration centrale du Ministère de l’enseignement supérieur. La DGES
répartit les moyens entre les universités ; le directeur Saint-Girons sait de quoi il s’agit : il a été
président d’un groupe de réflexion sur la critérisation de l’affectation de ces moyens. Il devient aussi,
par la nécessité du calendrier de l’été 2007, l’homme de la mise en oeuvre de la LRU. Il est par
ailleurs membre de la commission multipartite pour la réforme de la formation professionnelle. Mais
le 21 août 2008, après seulement un peu plus d’un an à la tête de la DGES, il est remplacé par
Patrick Hetzel. Changement de génération !
Le poste de délégué interministériel est vacant depuis la démission de Bernard Thomas. Bernard
Saint-Girons accepte ce “placard” confortable : il a 63 ans et demi. Mars 2010 : depuis 1993,
Bernard Saint-Girons n’exerce plus sa mission d’enseignement en tant que professeur de droit public.
Il n’est pas le seul dans cette situation. Pour Christian Forestier, c’est le cas depuis 1979 (date de son
élection à la présidence de l’université de Saint-Etienne) ! Et si Bernard Saint-Girons décidait de
prendre prochainement sa retraite ? On attendrait bien sûr de lui qu’il publie un livre ou ouvre un
blog…
06 avril 2010
Président Condé
Claude Condé est président de l’université de Franche-Comté depuis février 2006. Je l’ai
interviewé à Besançon le 16 mars 2010. Né en 1951, il aura 59 ans en juin prochain. Sa carrière
professionnelle et ses responsabilités dans l’UFC sont montées en puissance en parallèle. Il est nommé
maître de conférences en linguistique et informatique en 1984 au sein de l’UFR de Sciences du
langage, de l’homme et de la société (photos du site de SHLS), et est élu au conseil de gestion dès
1986. En 1989, il devient codirecteur d’un des départements de l’UFR. En 1991, il est nommé à la
7ème section du CNU. Son champ de recherche : l’analyse des textes par le biais de logiciels de
plus en plus élaborés, en coopération avec des informaticiens et des statisticiens ; pour Claude
Condé, la recherche appliquée découlant de la recherche fondamentale va de soi ; il est fier de
l’existence du Centre de linguistique appliquée de l’UFC (CLA) : 5.000 stagiaires par an.
1992. A 41 ans, Claude Condé est nommé professeur en Sémiotique et informatique des textes.
Après s’être interrogé sur une mobilité vers une autre université, il décide de rester à Besançon car il
s’y plaît, mais il n’est pas franc-comtois (il est né à Kehl en Allemagne). Les responsabilités dans
l’université continuent de progresser : directeur d’un centre de recherche en 1996 (il a au départ la
mission de le restructurer et y parvient), directeur-adjoint de l’UFR en 1998, puis directeur en 2001,
président de la commission de spécialistes en 1999, élu au conseil d’administration de l’UFC en 2001
également. En 2003, il est élu au CNU, dans la 7ème section. Dans les années 2000, il développe des
relations internationales avec le Québec, l’Algérie, le Liban, la Guinée, le Pérou. Il devient
administrateur de l’association des universités francophones.
5 janvier 2006. Claude Condé est élu président de l’UFC à l’issue du second tour de scrutin. Il
remplace Françoise Bévalot et s’inscrit dans la continuité. Il a affronté trois autres candidats au
premier tour. Une règle non écrite guide l’élection à la présidence : le tour de rôle ; un littéraire
succède à un médecin ou pharmacien qui lui-même succède à un scientifique ; les juristes et
économistes n’ont jamais participé à ce tour de rôle. Littéraire, Claude Condé doit cependant se
confronter à un sociologue au 1er tour, Francis Farrugia, professeur de sociologie. Il se dit l’élu des
composantes, en faveur du renforcement de leur rôle ; une conférence des directeurs de
composantes est créée. Par ailleurs, “il faut ouvrir l’université ; j’ai pris des contacts avec le
MEDEF, la chambre de commerce et d’industrie, la ville de Besançon ; j’ai été plutôt déçu de leur
absence de projets”. Dès la publication de la loi Goulard sur la recherche en août 2006, Claude Condé,
en accord avec l’université de Bourgogne, prône un PRES (chronique du blog : “PRES DijonBesançon“).
Eté 2007, la loi LRU : ”ça a beaucoup secoué ici”. Claude Condé est syndiqué au SNESUP depuis
toujours, même si aujourd’hui il observe que ce sont les professeurs détachés du
secondaire qui orientent la ligne du syndicat ; “le SNESUP me sert de référence en “pour” ou en
“contre”. SNESUP, mais cela ne l’a pas empêché d’avoir un comportement très pragmatique vis-àvis de la loi (vote des nouveaux statuts). Il gère à l’automne 2007, sans problème grave, l’opposition à
la LRU des étudiants de l’UFR dont il a été le doyen. ”On ne peut faire de procès d’intention à la loi
LRU et dire qu’elle procède de la pensée libérale. Pour comprendre, je me suis plongé dans l’histoire
de l’Université. “Faire revenir les Grandes écoles dans les universités, on ne peut dire que Valérie
Pécresse a tort”.
Avril 2008, la liste “Ensemble pour l’université de Franche-Comté”, qui soutient le président en
fonction, obtient 12 des 14 sièges enseignants au Conseil d’administration (30 membres en tout selon
les nouveaux statuts LRU). Conclusion logique : Claude Condé est confirmé, en mai, dans ses
fonctions par le CA nouvellement élu et en dépit de la présence d’un autre candidat. “Le CA de type
LRU n’est guère intéressant sur le fond des discussions car le scrutin avec prime majoritaire limite le
nombre d’opposants. Il a donc fallu créer des structures intermédiaires, des commissions pour
recueillir les avis ; mais on court ainsi le risque de la “réunionnite”. Lire la suite.
07 avril 2010
Président Daumard
Pierre Daumard est décédé le 31 mars 2010. Il a été président de l’université de Paris 5 Descartes
de 1999 à 2004. L’université, sur son site, lui rend un hommage mérité : cliquer ici. Une plaque
commémorant le mandat de Pierre Daumard sera apposée un jour dans un des bâtiments de
l’université : photos du siège de l’université (ici), de la faculté de pharmacie (ici).
17 avril 2010
Président Berland
Marseille, présidence de l’université de la Méditerranée (Aix-Marseille II), jardin du Pharo, 30 mars
2010. “Président Berland, fin 2011, serez-vous candidat à la présidence d’Aix-Marseille
Université ?“. “Oui, sûrement ! Depuis 2004, depuis que je suis président de l’université, j’ai la
certitude qu’il faut fusionner les trois universités d’Aix-Marseille. J’ai des idées !”. Ma question était
“pour la forme” ; j’attendais une réponse du type : “Je verrai”. J’ai donc été surpris par cette totale
franchise. Yvon Berland sait ce qu’il veut ! Il avait inscrit la “fusion” dans sa profession de foi de
2004 !
Vidéo du président et de vice-présidents en page d’accueil du site en haut à droite de la page d’accueil
: “Le 1er janvier 2012, Aix-Marseille Université sera la plus grande université de France“.
Le 1er janvier 2012, le président Berland n’aura pas encore 61 ans (il est né le 6 février 1951) : s’il
est, à cette date, élu président d’Aix-Marseille Université (ou de l’Université d’Aix-Marseille), il
pourra faire un mandat de 4 ans. Yvon Berland est un homme d’expérience. Il est professeur des
universités praticien hospitalier de néphrologie et chef du Centre éponyme au CHU de Marseille. Il
a le parcours classique d’un président d’université : avant d’être élu au 1er tour en 2004 (seul
candidat à la succession de Michel Laurent, devenu aujourd’hui Directeur général de l’IRD), il a été
doyen de la Faculté de médecine à 47 ans (de 1998 à 2004) et vice-président en charge du Conseil
d’administration entre 1999 et 2004.
Moins classiques pour un président sont les responsabilités dans le champ médical. Depuis 2003,
Yvon Berland est président de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé
(ONDPS). Il a publié plusieurs rapports à ce titre, dont Démographie des professions de santé (2002),
5 expérimentations de coopération et de délégation de tâches entre professions de santé (2006) et
Rapport de la mission “Démographie médicale hospitalière” (2006). Ses responsabilités
professionnelles et universitaires lui ont valu des nominations dans l’ordre de la Légion d’honneur, du
Mérite national, des Palmes académiques, de la Jeunesse et des sports.
Quelques dates. 21 mars 2007, décret portant création du PRES Aix-Marseille Université sous
forme d’EPCS (cliquer ici) ; la fusion n’est pas explicitement mentionnée dans les missions du PRES.
Novembre 2007, rapport de l’AERES sur l’université (cliquer ici). 26 février 2008, Yvon Berland est
confirmé dans ses fonctions de Président pour la durée du mandat commencé en 2004. 1 janvier 2009,
l’université passe aux responsabilités et compétences élargies. 29 janvier 2009, le Président Berland
et 3 autres présidents publient une tribune dans le Monde pour défendre la nouvelle version du décret
de 1984 : “le texte propose de sortir de l’arbitraire et du non-dit en autorisant la modulation du service
d’enseignement en fonction d’une évaluation de l’ensemble des activités d’un enseignant-chercheur”.
7 juillet 2009, Yvon Berland, seul candidat à sa succession, est réélu pour un second mandat de
président (”il va falloir passer à la vitesse supérieure pour préparer la fusion”). 24 novembre 2009,
Statuts de l’université modifiés (cliquer ici). Décembre 2009, les Conseils d’administration des 3
universités votent le texte des “Principes fondateurs d’une université unique” (le texte). Janvier
2010, l’université le la Méditerranée a pris, dans le cadre des RCE, la responsabilité d’affecter ellemême les Primes d’excellence scientifique (sans demander l’avis d’experts nationaux). 1 janvier
2012. L’université d’Aix-Marseille est redevenue unique.
La fusion des 3 universités. Yvon Berland : “personne n’en voulait en 2004 quand j’ai été élu
président, alors que je l’inscrivais comme une priorité dans ma profession de foi”. La loi LRU et les
responsabilités et compétences élargies ont changé la donne ; les RCE exigent des compétences à tous
les niveaux”. “Le passage aux RCE sans fusion des 3 universités nous aurait irrémédiablement
éloignés. Les 2 autres présidents ont accepté qu’on organise un colloque de 48 heures sur la fusion. La
visibilité universitaire des sites d’Aix-Marseille était faible : “personne ne savait ce qu’on faisait, ni les
étudiants, ni les politiques, ni les entreprises. La fusion, c’est la rationalisation de l’offre de formation,
c’est créer de la coopération”.
Tous les obstacles sont-ils levés ? “Chacun a encore son étendard, son costume. Le prochain contrat
quadriennal (2012-2015) sera un contrat unique mais chacun défend encore sa maison : “qu’est-ce
que je vais perdre ?”. Les projets pour le contrat devront être remis en octobre 2010, dans moins de six
mois. ”Pour la partie “Recherche” du contrat, ce n’est pas trop compliqué car la coopération est déjà
une réalité”. Pour la partie “Formations“, “ce n’est pas encore totalement stabilisé : les réunions
englobent la totalité du site. Pour les Lettres, la Santé et le Droit, secteurs qui ne sont pas partagés
entre les 3 universités, il n’y aura pas de grands bouleversements ; il faut faire confiance à chacune des
3 universités pour qu’elle rationalise son offre”. Secteur Santé d’Aix-Marseille II : cliquer ici.
A l’inverse, l’économie et la gestion sont partagées entre U2 et U3, et les sciences, elles, se
partagent entre les 3 universités. Secteurs Sciences et Economie et Gestion d’Aix-Marseille II :
cliquer ici. “Les enseignants verrouillent le pré-carré de leur discipline. En Licence, on a tout à
reconstruire ; les 3 années de licence doivent apporter un socle de connaissances sans particularisme
précoce. On a fixé des critères par une lettre de cadrage détaillée : il faut, par licence, un nombre
d’étudiants suffisant, un intitulé simple et lisible par les étudiants, un souci de progression d’une année
à l’autre, un coût acceptable (il faut limiter absolument le nombre d’heures complémentaires). En
économie et gestion, c’est compliqué car il faut rappeler que ceux qui ont poussé, pour des raisons
idéologiques, à la scission dans les années 1970 sont encore là. Il ne faut donc pas d’emblée être trop
ambitieux”.
Organiser la licence dans des Collèges de l’université ? “Pour l’heure, ce n’est pas
d’actualité. La majorité des présidents de la CPU ne le souhaite pas : pour eux, l’université va du L1
au doctorat ! Il faudrait également qu’une insertion professionnelle existe en sortie de licence. En
Santé, il n’y aurait pas de difficultés”. Le blogueur pense que ce serait souhaitable de mettre ensemble
masters recherche et doctorats (chroniques : “PRES fusionnels et Ecoles doctorales“, “Insertion des
docteurs“) et de créer des Instituts d’enseignement supérieur IES organisant le cycle licence (14
chroniques sur les IES).
La préparation de la fusion des services centraux ? ”Mon université a établi un retro-planning de ce
qu’il faut faire. Un dossier de 50 pages est prêt. Mais il faut y aller doucement pour faire discuter
les propositions“.
L’organisation générale ? ”Il y aura cinq campus dont feront partie les 11 sites et les différentes
UFR / FAcultés. Les missions de l’Université seront exercées à différents niveaux. Sur les 5 campus,
il y aura une gestion de proximité : chacun aura un service de scolarité et des services
administratifs”.
La gouvernance de l’université unique ? ”Il faudra une gouvernance partagée, à l’écoute de tous.
Elle ne peut être exercée par les seuls conseils de la LRU. Il pourrait y avoir un Conseil
académique d’environ 150 personnes comprenant les élus aux 3 conseils; en feraient partie les
doyens des Facultés, les vice-présidents… Il pourrait être interrogé sur tel ou tel thème, avant que le
CA ne se tienne et décide. Chaque semaine, les doyens se réuniraient”. Le siège de l’université
nouvelle, Marseille ou Aix ? “Il faudra un siège prédominant masi partagé !”.
Et l’université d’Avignon ? ”Il faudra créer un nouveau PRES pour accueillir l’université
d’Avignon, Centrale, l’IEP, le CHU”… Le grand emprunt ? “Une gouvernance renforcée, qu’estce que ce sera ?”. Le Plan Campus (mai 2009) : 500 millions d’euros ? (cliquer ici). Une Fondation
? Première fondation, créée en octobre 2008, la Fondation Santé, sport et développement durable
(cliquer ici) ; deuxième Fondation : la Fondation Méditerranée Traumatisme, consacrée aux accidents
de la moëlle épinière et traumatisés crâniens, parrainée par Luc Alphand.
27 avril 2010
Présidente Béjean
Sophie Béjean est présidente de l’université de Bourgogne depuis le 1 juin 2007. Elle m’accueille
dans son université lundi 19 et mardi 20 avril 2010 ; j’y mène plusieurs entretiens et y réalise quelques
centaines de photos ; ces entretiens sont la suite logique de ceux menés à Besançon (Chroniques :
“Président Condé“, “Université de Franche-Comté“). Chronique d’aujourd’hui : “La trajectoire de
la présidente“. Chroniques à venir : “L’université fédérale et le Pôle de recherche et d’enseignement
supérieur” ; “Le contrat quadriennal 2012-2015 et l’offre de formation” ; “Les écoles doctorales et
l’AERES”, “La qualité de vie sur le campus et l’insertion professionnelle”. L’université fédérale,
qui comprend l’université de Bourgogne, l’université de Franche-Comté, l’ENSMM et AgroSup
Dijon, est une forme de fusion (à terme) des 2 universités.
Bureau de la Présidente, un bureau fonctionnel et sobre. Une des fenêtres donne sur la prairie,
jonchée en cette saison de pissenlits. Sur les murs, le sceau de l’université (1722), quelques
oeuvres d’art contemporain (dont la sculpture aux grappes de raisin). Un miroir et dans son coin droit
en bas, une phrase dont le sens n’est pas donné : “Le futur doit être dangereux“. Un défi pour
l’université, pour sa Présidente ? Album de 17 photos.
La présidente Béjean (CV sur le site de l’université ”Un engagement au service de l’université de
Bourgogne“, CV sur EducPros) fait partie de la nouvelle génération de président(e)s, celle des
quarantenaires (Emmanuel Ethis, Philippe Augé, Pascal Binczak…). Nés dans les années 60, ils
n’ont pas connu “mai 1968″ mais ils ne peuvent pas ne pas se souvenir de “mai 1981″, de la première
élection de François Mitterrand. Ils sont arrivés sur le marché du travail de l’enseignement
supérieur dans la 1ère moitié des années 90, quand les effectifs des universités explosaient. Ils ont été
élus à la tête de leur université dans la fleur de l’âge adulte et dans une période marquée par de
profondes transformations de l’enseignement supérieur et de la recherche, le LMD, la diminution
des effectifs des universités, les PRES, la loi LRU, le Plan Campus… Ils savent aussi qu’il y a une vie
après avoir été président(e) d’université.
En juin 2010, Sophie Béjean aura 46 ans. Son parcours. Née à Grenoble, elle devient très vite
dijonnaise ; elle y mène ses études en économie. Génération Campus (portail d’information des
étudiants de l’université) lui pose une question en 2010 : “Qui étiez-vous à 20 ans, en 1986 ?”
(cliquer ici) : “j’entrais en troisième année de sciences économiques, à Dijon, mais je n’avais pas
encore d’objectif professionnel précis. Au lycée, j’avais envie de travailler sur le fonctionnement de la
société ; je découvrais vraiment ce qu’était l’économie sociale, de la santé, de l’éducation, bref, mes
centres d’intérêt, avec l’envie de réussir mes études, dans lesquelles j’étais plongée pleinement”…
“Un souvenir politique de cette période” ? “Oui, 1981 ! À 17 ans, nous étions tous heureux du
changement de gouvernement qui, nous en étions sûrs, allait changer la société. Cela a été en partie
vrai. Mais, quand on vise un idéal, on est toujours un peu déçu”…
25 ans en 1989 avec en poche une maîtrise et un DEA de sciences économiques (page personnelle
sur le site du Laboratoire d’économie et de gestion). Le parcours s’accélère : doctorat préparé avec
une allocation de recherche et obtenu en 1992, à 28 ans (prix de la thèse attribué par la Faculté, prix
également de l’économie sociale), habilitation à diriger des recherches en 1993, à 29 ans ! Mais ce
qui est possible dans les disciplines à agrégation du supérieur (économie, droit, gestion) - passer l’HdR
dans la foulée de la thèse - ne l’est pas dans les autres disciplines. La thèse de 1992 (Fonctionnement
et régulation du système de santé. De l’entreprise à l’organisation) est publiée en 1994 chez
Economica, Economie du système de santé. Du marché à l’organisation (Amazon, critique élogieuse
d’Alternatives économiques). Depuis 18 ans, Sophie Béjean demeure fidèle à la thématique choisie en
doctorat ; au sein de l’équipe “Economie de la santé”, ses spécialités sont : “comportement des acteurs
et régulation des systèmes de santé, évaluation des actions et des organisations de soins, justice
sociale, santé et développement”.
La carrière d’enseignant-chercheur se présente tout à fait bien pour Sophie Béjean. Dès la thèse,
elle commence à enseigner (monitorat de travaux dirigés). Elle devient ensuite ATER puis est recrutée
comme maître de conférences en 1993, à 29 ans (l’âge moyen de recrutement des MCF est aujourd’hui
de 33 ans 7 mois). La présidente de l’université de Bourgogne n’est cependant nommée professeur
qu’en 2003, à 39 ans, ce qui est fort bien mais non exceptionnel en économie. J’avoue ne pas lui
avoir posé la question : “vous êtes-vous présentée à l’agrégation ? Si non, pourquoi ? Parce que vous
n’êtes pas une économiste néo-classique” ?
Et c’est la prise de responsabilités qui commence. Elle s’exerce d’abord dans la Faculté de
sciences économiques : Sophie Béjean en est la responsable de la communication de 1995 à
2000, responsable de l’équipe de recherche en économie de la santé. Elle crée en 1999 un DESS
(devenu master professionnel) “Management et évaluation des organisations de santé et d’éducation et
le dirige jusqu’en 2007″ (cliquer ici). “Rapidement, je me suis impliquée dans la vie institutionnelle de
l’université” (Génération Campus).
Le parcours de responsabilités monte en puissance. Pour accéder à la présidence, il faut avoir déjà
exercé des responsabilités au niveau de l’université. Le mieux est de commencer par être élu dans un
conseil central : Sophie Béjean est élue au CA dès 1998 (à 34 ans), puis elle le sera au CEVU en
2006. Dans l’équipe de son prédécesseur, Jean-Claude Fortier, président de l’université de 2003 à
2007, Sophie Béjean est d’abord conseillère pour les relations avec le monde économique (20032005), puis vice-présidente déléguée aux enseignements (2006-2007). A 43 ans, en 2007, elle
décide de candidater à la présidence de l’université. L’élection n’a pas été facile : elle est élue au
second tour du scrutin par 71 voix (il en fallait 69) contre deux autres candidats, un troisième s’étant
retiré après le 1er tour (les 3 autres candidats n’étaient pas membres de l’équipe précédente). La
confirmation du mandat (en mai 2008, dans le cadre des nouveaux statuts LRU) est tout aussi difficile
: 15 voix pour la confirmation et 14 voix défavorables ; le CA s’oppose à plusieurs reprises à
la cooptation des personnalités extérieures. “Mais tout cela est aujourd’hui derrière nous” ; “je n’ai
pas l’habitude de regarder en arrière“, déclare-t-elle aux étudiants de Génération-Campus.
Il y a enfin des responsabilités nationales. La présidente de l’université de Bourgogne est membre
du Conseil d’administration de la CPU (CP2U), élue par l’Assemblée générale de la CPU. Elle est
également responsable, début 2009, du groupe de travail CPU sur le modèle d’allocation des moyens
aux universités, modèle dit SYMPA. La CPU, hostile à Sympa, fait des contre-propositions en mai
2009, centrées sur l’efficience des universités. Le groupe de travail semble ensuite s’être perdu dans
les sables des “responsabilités et compétences élargies” (RCE)
Mais il y a une vie professionnelle et personnelle, pendant et après la présidence d’une
université. Sophie Béjean ne veut surtout pas se couper de son milieu d’enseignement et de recherche.
Elle garde symboliquement quelques heures d’enseignement, un bureau dans son laboratoire, publie
encore de temps en temps. Ainsi en 2009 : “Les fondements de la microéconomie de la santé : le
marché de la médecine libérale”, in Traité d’économie de la santé ; avant-propos de la Revue
Economique “Le marché de la santé : efficience, équité et gouvernance“, en collaboration avec
Thomas Barnay ; “Capital humain et coûts de friction : quels critères de choix pour l’évaluation des
pertes de production ?”, en collaboration avec Hélène Sultan-Taïeb et Philippe Tessier, Revue
Economique. Sophie Béjean est vice-présidente du Collège des économistes de la santé et, depuis
2006, coordinatrice du Comité scientifique des Journées des économistes français de la santé”. Les
prochaines journées auront lieu à Lyon en décembre 2010.
Un second mandat en 2012 ? “Mon mandat se termine en même temps que celui des administrateurs.
Ce qui est bien. Ce sera donc un autre CA qui élira la ou le prochain président(e). L’université est en
développement et j’en suis fière, les projets sont stimulants. Je verrai. Mais ce qui est sûr, c’est que je
préserverai toujours et d’abord ma famille” (Sophie Béjean a un fils de 11 ans).
Pour aller plus loin. Sur le site du Grand Dijon, “L’université ouverte” (cliquer ici). Photos sur
Google : cliquer ici. Deux vidéos Dailymotion : janvier 2008, mai 2009.
17 juin 2010
Béréziat la Tour
Université Pierre et Marie Curie. Autour, dans et du haut de la Tour Zamanski. 32 photos en hommage
à Gilbert Béréziat qui part cette semaine en retraite mais continuera à oeuvrer pour le succès du PRES
“Sorbonne Universités“. Le professeur de médecine luttera toujours pour l’autonomie des universités,
toute l’autonomie, rien que l’autonomie. Du haut de la Tour, il voit loin, très loin pour l’avenir des
universités françaises de recherche.
Ancien président de l’université, Gilbert Béréziat était jusqu’à hier vice-président en charge des
relations internationales et délégué général de Paris Universitas. Il tient régulièrement un blog aux
chroniques libres de ton, drôles et caustiques : le blog. A lire, relire et méditer. Bienvenue,
Gilbert, au club des retraités actifs !
21 aout 2010
Eric Martin, président puis recteur
Eric Martin, recteur de l’académie de Besançon depuis mars 2010, a été décoré “chevalier de la
légion d’honneur” le 14 juillet dernier. Un poste de recteur pour un ancien président d’université, ce
n’est pas inhabituel. Mais, en novembre 2009, Eric Martin, encore président de l’université de
Bretagne Sud (site de l’UBS), déclarait au Télégramme de Brest : “Quel est votre avenir ? Un
départ vers un ministère ? Une autre université” ? “Un ministère, je n’ai pas cette prétention ! Une
autre université… Je pense que la charge ne dépend que de la quantité de projets que l’on met sur le
feu et pas de la taille de l’université. En tant que président sortant, j’ai droit à un an de congé
sabbatique. Ce qui va me permettre de me ressourcer pour la recherche et mes cours. Et ensuite, je
retrouverai ma paillasse. Entre nous, être chercheur est beaucoup plus gratifiant que n’importe
quelle autre fonction” (quiz du 10 août). Evidemment, un président qui espère devenir recteur
d’académie ne va pas le crier sur les toits ! Mais il ne dit pas dans ce cas que rien n’est plus gratifiant
que la fonction de chercheur.
Qui est Eric Martin ? Doit-il sa nomination comme recteur à ses affinités politiques et/ou à d’autres
réseaux et/ou aux compétences, à l’efficience et à l’efficacité qu’il a démontrées comme président
d’université ? CV sur EducPros, CV sur le site de l’université, CV sur le site de l’académie de
Besançon.
1961, naissance à Quimper : René Martin est donc breton. 49 ans en 2010. Retraçons sa
trajectoire. 1984 (23 ans) : élève de l’ENS Cachan, il obtient l’agrégation de génie électrique en 1984
(l’ENS Cachan est hégémonique pour les agrégations techniques : chronique “Agrégation en péril”).
1986 : thèse en électronique à Paris Sud ; agrégé docteur à 25 ans, pas mal du tout. Le profil
professionnel s’affiche : celui des sciences de l’ingénieur.
Trou dans le CV de 1986 à 1993. On sait seulement qu’il a participé à la création de l’école
d’ingénieurs de Monastir en Tunisie. Est-il alors en coopération dans ce pays ? Il mène certainement
des recherches puisqu’il est habilité à en diriger des recherches en traitement du signal. HdR à
Rennes 1 en 1993, à 32 ans : une étoile filante en recherche.
1994. Eric Martin est nommé professeur à 33 ans (33 ans, c’est l’âge moyen aujourd’hui d’accès à
un poste de maître de conférences). L’université de nomination : Bretagne Sud, qui sera officiellement
créée en janvier 1995 sur deux sites, Lorient et Vannes. Eric Martin va y déployer une activité
intensive et créatrice durant 15 ans. Ses recherches portent sur la “conception des systèmes
électroniques dédiés”. Il publie en 1996 Ingénierie des systèmes à microprocesseurs (collection
technique et scientifique des télécommunications, édition Masson). En 1998 (37 ans), il participe à la
création de l’ENSSAT, école d’ingénieurs de Lannion (université de Rennes 1).
Le temps des responsabilités commence dès la nomination comme professeur. Eric Martin n’est pas
un homme qui fuit les responsabilités ; sans doute les recherche-t-il ! Ce n’est pas un défaut.
Responsabilités internes à l’université, pédagogiques et de recherche. “Il crée et dirige durant dix
ans le laboratoire de recherche LESTER, intégré en 2008 dans l’UMR Laboratoire des sciences et
techniques de l’information, de la communication et de la connaissance” (Lab-STICC)… “Il créé et
assure la direction de l’IUP Génie des systèmes industriels (GSI), du DESS Gestion et pilotage de la
production de 1995 à 2000 ; ces formations sont intégrées en 2010 à l’ENSIBS. Il crée et dirige de
2000 à 2004 la première école doctorale pluridisciplinaire de l’Université de Bretagne Sud”. Pour sa
part, “il a formé près de trente docteurs dont la moitié est actuellement recrutée en entreprises, l’autre
ayant rejoint la recherche publique”.
Ce n’est vraisemblablement pas de gaité de coeur qu’Eric Martin, président, devra accepter, dans le
cadre du processus de fusion d’écoles doctorales, l’intégration de cette école dans quatre écoles coaccréditées avec les autres universités bretonnes. Insertion professionnelle des docteurs bretons ? Lire
l’enquête du PRES.
Responsabilités dites “administratives” au sein de l’université UBS. Dès 1995 (34 ans), “il a en
charge le développement du secteur des sciences pour l’ingénieur”. Puis, “il assure, en 2003, la viceprésidence aux nouveaux apprentissages, domaine comprenant à la fois les technologies de
l’information et de la communication pour l’éducation (TICE) et la formation tout au long de la vie”.
Éric Martin, seul candidat en lice, est élu président de l’Université Bretagne Sud le 3 décembre
2004, par 80 voix sur 106 électeurs. Il prend la succession de Gilles Prado, premier président de
l’université ; celui-ci est nommé recteur de Corse en 2006. Eric Martin a 43 ans ; c’est un fort jeune
président. Son programme : développer la recherche (niches d’excellence et réseaux de recherche), la
vie étudiante, ouvrir l’université à l’international et entreprendre une démarche qualité.
La LRU l’obligeant, Eric Martin doit faire confirmer son mandat par le CA nouvellement élu :
c’est chose faite en mars 2008. L’élection est moins “confortable” qu’en 2005 : 16 voix “pour”, 8
“contre” et 3 “blanc”. Après les élections du CA LRU, Eric Martin demeure l’élu des professeurs ; il
n’est plus celui des maîtres de conférences (la liste qui le soutenait est battue dans ce collège). Est-ce
ce demi-échec qui l’amènera à ne pas demander un renouvellement de son mandat au début 2010
? Olivier Sire devient le 3ème président de l’université de Bretagne Sud.
“Durant son mandat, Eric Martin a développé les partenariats avec les entreprises, les collectivités et
les autres établissements de formation” (CV sur le site du rectorat). Premières années de mandat. En
2006, vote d’une motion d’opposition au Contrat première embauche. 2006 et 2007 : “Eric Martin est
président du réseau des universités de l’ouest atlantique (RUOA) et des associations Ouest Recherche
et Université de Bretagne, cette dernière ayant été préconfigurative” du PRES Université
Européenne de Bretagne (UEB)”, créé dès mars 2007 ; il s’agit d’un PRES non fusionnel. Et aussi
en 2007 : l’université expérimente le Dossier Diagnostic Universitaire, une orientation active avant
la lettre.
L’année 2009, dernière année du mandat et après le semi-échec de la confirmation à la présidence en
2008, est contrastée. Opposition au ministère : les 3 conseils votent en février une motion décidant
de ne pas remonter au ministère les maquettes de masters “Education et formation” et une motion
demandant le retrait du décret sur les enseignants-chercheurs. Soutien aux initiatives de la ministre
: ouverture d’une Classe préparatoire économique et commerciale au sein de l’université (CPGE
ouverte aux bacheliers professionnels), création de la Fondation universitaire de Bretagne Sud,
rapport favorable de l’IGAENR qui permet le passage de l’université aux responsabilités et
compétences élargies de la LRU au 1er janvier 2010.
Responsabilités nationales enfin. Au sein de la Conférence des présidents d’université (CPU) tout
d’abord : “Membre actif de la conférence des présidents d’universités (CPU), il a été élu à son conseil
d’administration de 2006 à 2010. Il a piloté au nom de la CPU le comité de pilotage des systèmes
d’informations et participé au S3IT, schéma stratégique des systèmes d’information et des
télécommunications”. Par ailleurs, “Éric Martin est expert scientifique auprès de l’Agence de
l’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche (AERES) ; il a été président du comité de
programme “architectures du futur” de l’agence nationale de la recherche (ANR)”. Les
responsabilités nationales créent le réseau.
En résumé. Une fort belle carrière professionnelle, des réalisations conséquentes en sciences de
l’ingénieur, une montée cohérente vers la présidence de l’université grâce à de multiples initiatives
pédagogiques et de recherche, grâce à la prise de responsabilités dans l’université. Mais quand même
une bizarrerie dans la trajectoire : ne pas solliciter un second mandat alors qu’on a seulement 49
ans. En novembre 2009, quand il parlait de retourner à la paillasse de son labo, Eric Martin savait-il
qu’il pourrait être nommé recteur ? Le souhaitait-il ? Avait-il des assurances de l’être ?
L’ancien président de Bretagne Sud n’affiche pas d’affinités politiques (ou tout au moins, je n’en
ai pas trouvées sur la toile). Mais parce que c’est un fonceur qui veut changer les choses, il a procuré
du bon pain blanc à la droite. Il s’est en effet comporté en bon soldat pour la création du PRES,
d’une Fondation, d’une classe prépa en université, pour le passage aux RCE… Etre toujours parmi
les premiers. Valérie Pécresse doit l’apprécier et a dû apporter son soutien pour sa nomination dans
l’académie de Franche-Comté. Eric Martin a accepté la nomination dans une terre fort lointaine
de son Quimper natal. Son CV sur le site de l’université dit qu’il est marié et père de trois enfants.
Comment sa famille apprécie-t-elle la vie à Besançon ?
Que veut faire le recteur dans son académie ? Son programme me plaît bien, même si je sais
qu’un recteur n’a aucune autonomie pour développer une politique personnelle. En voici quelques
extraits sur le site du rectorat. “La réussite et l’accompagnement des élèves et des étudiants tout au
long de leur cursus d’études est le but vers lequel doivent converger toutes les énergies”… “Assurer la
réussite de tous et de chacun, c’est tout d’abord prendre fortement en compte les périodes de
fragilisation des élèves. Je veux parler des périodes de transitions qui existent à chaque niveau de la
scolarité : passage… du lycée et du lycée professionnel aux études supérieures ou au monde du
travail”… “À tous les niveaux de la scolarité, jusqu’aux premiers pas dans l’enseignement supérieur se
mettent en place des dispositifs d’aide personnalisée, en complément des enseignements
obligatoires”… “Le temps des études, c’est aussi celui de l’ouverture culturelle, de la pratique du
sport, de l’éducation à la santé et à la citoyenneté”… “Une orientation plus fluide, mieux accompagnée
permettra à nos élèves d’éviter les points de blocages parfois irréversibles, afin d’aller toujours de
l’avant dans leurs projets d’études et de vie”. Des projets totalement pertinents, mais tout de suite
confrontés à la vie quotidienne, beaucoup plus prosaïque : de visites d’établissements en visite de
ceci ou cela, de prises de parole en début de colloque en inaugurations de ceci ou cela, de réunions en
réunions. Seul un conflit dans son académie révèlera réellement Eric Martin.
Une question. Eric Martin s’est-il rendu dans l’université de Franche-Comté pour y rencontrer le
président Condé ? Pas de trace sur Google, sur le site de l’université, sur le site du rectorat (cliquer
pour la liste des visites faites par le recteur). L’absence de rencontres dans l’université ne
contredirait-elle pas le programme annoncé par le recteur ?
23 août 2010
Olivier Audeoud, recteur
Olivier Audeoud, président de l’université de Paris 10 Nanterre de 2003 à 2008, a été nommé
recteur de l’académie de Grenoble en juillet 2010, 4 mois après qu’Eric Martin, ancien président de
l’université de Bretagne-Sud, ait été nommé recteur de l’académie de Besançon (chronique : “Eric
Martin, président puis recteur“). La nomination d’un ancien président d’université à la tête d’une
académie n’est pas inhabituelle (chronique : “Président et après ?“).
Olivier Audoud est né en 1948 ; il a donc 62 ans. Agrégé de droit public, le professeur commence
sa carrière à Paris 1 en 1970 (assistant à 22 ans ?). Premières responsabilités administratives dans
cette université : directeur de cabinet du président de 1981 (33 ans) à 1989 et directeur du centre de
formation permanente de 1986 à 1993. Il reste fidèle à Panthéon Sorbonne jusqu’en 1991 (43 ans).
Pourquoi décide-t-il alors de partir à la faculté de droit, d’économie et gestion de Nancy 2 et ce
jusqu’en 1997 (49 ans) (photos de la faculté) ? Dans cette université, il devient vice-président en
charge des relations internationales. La charge n’est pas anodine : Audeoud va s’investir plus encore
dans les relations extérieures.
La mobilité professionnelle se poursuit. Elle est peu traditionnelle pour un professeur : après de
longues années à Paris, il ”descend” en province à Nancy pour remonter six ans après à Paris, à Paris
10 Nanterre, qui possède une faculté de droit certes, mais non “La” faculté de droit. 1998 : Olivier
Audeoud a 50 ans.
1998. Nanterre n’est pas une université facile à piloter, on le sait. Olivier Audeoud, pour ses
compétences en droit public sans doute, est d’abord appelé à présider la commission des statuts. Elu
au CA durant cette période, j’ai le souvenir d’un homme de dossier, assez peu charismatique. En 1999,
je “mute” vers l’université de Marne-la-Vallée et ne peux entendre les interventions d’Olivier
Audeoud à l’oeuvre quand il est lui-même élu au CA en 2002.
2002. Elections municipales (cliquer ici). “Passionné par le patrimoine lorrain et tout particulièrement
par le patrimoine de Saint-Mihiel, berceau de ses ancêtres, cet universitaire de renom s’est laissé tenté
par la politique. Aux dernières municipales, il a conduit une liste de sensibilité de gauche qui s’est
placée en seconde position”. Olivier Audeoud devient conseiller municipal…. alors qu’il n’est plus
à Nancy, mais à Nanterre. Assez curieux.
2002, décembre. Arrive l’élection du successeur du président André Legrand, professeur de droit
public. Alors que l’ancien Directeur des lycées et collèges était seul candidat à la présidence
de Nanterre cinq ans plus tôt, c’est la bousculade. Six candidats. Olivier Audeoud l’emporte au
4ème tour de scrutin, par 79 voix (140 électeurs). Président à 54 ans. Son score est plus faible que
celui obtenu par André Legrand (127 voix).
2004, juin. Menant une recherche sur les présidents des universités en France et en Italie, j’interviewe
Olivier Audeoud : lire cette interview. “Pourquoi avoir fait le président” ? Celui-ci me répond
: ”pourquoi pas ? J’ai toujours fait de l’administration, dans la recherche ou dans les relations
internationales”… “Il y avait une part d’inconscience dans ma candidature… Je perds de l’argent en
étant président”… “Les préoccupations sont fort nombreuses ; j’ai même reçu des menaces
physiques”… “Mais c’est un travail passionnant”. L’interview s’est plutôt mal passé : le président ne
s’est pas livré. J’avoue que je n’ai pas une grande sympathie pour lui.
2006, mars. Le président Audeoud demande solennellement au premier ministre de suspendre le
Contrat première embauche. 2006, décembre. Il est élu président de la commission des relations
internationales et européennes de la CPU. 2007, novembre, Mouvement contre la LRU. Il fait appel
aux forces de l’ordre (cliquer ici) : “ce blocage est totalement illégal et antidémocratique… Ce matin,
j’ai dû envoyer du personnel administratif pour tentet de calmer la situation, mais la tension montait et
nous avons dû faire intervenir la police”.
2008, avril. Olivier Audeoud n’est pas candidat à sa propre succession. Encore président de la
commission des relations internationales et européennes de la CPU, il est interviewé par EducPros
(cliquer ici). Il n’est pas particulièrement tendre à l’égard de l’implantation de Paris Sorbonne à Abu
Dhabi et de Dauphine à Tunis. “Les universités françaises ne peuvent pas faire n’importe quoi à
l’étranger”… “Avec la Sorbonne Abu Dhabi, les postes diplomatiques français au Moyen-Orient se
retrouvent à devoir chercher des étudiants pour aller étudier là-bas. Et du coup, cela crée aussi une
concurrence avec les autres formations francophones préexistantes dans cette région. Quant au projet
de Dauphine à Tunis, s’il est soutenu par les autorités locales…, son lien avec le monde universitaire
tunisien n’est pas démontré”. Ecouter et voir l’intervention d’Olivier Audeoud au colloque annuel de
la CPU “Les universités européennes : nouvelles frontières, nouvelles perspectives“ ; son thème :
la mobilité.
2010, janvier. Olivier Audeoud est coopté membre du conseil d’administration du Pôle
universitaire privé Léonard de Vinci (PULV ou Fac Pasqua) : cliquer ici. “Une démarche commune
de travail du PULV avec le monde universitaire n’est pas nouvelle. La première fois que j’ai rencontré
Nicolas Sarkozy, alors président du conseil général, nous avons passé trois quarts d’heure sur le
sujet… Des regroupements sont devenus possibles avec la loi. Le pôle vient d’accueillir cette année
plusieurs formations de Dauphine et doit faire de même avec Nanterre à la rentrée prochaine”…
“Olivier Audéoud rejoint les instances de Léonard-de-Vinci pour y apporter son expertise tant sur
les aspects de relations internationales que sur ses stratégies d’alliance dans la perspective de donner à
l’Ouest parisien la place qu’il mérite dans le paysage de l’enseignement supérieur de la recherche”.
Paris 10 Ouest Nanterre La Défense dans une alliance ?
2010, avril. Olivier Audeoud participe aux 10 ans du Fonds France Canada pour la
recherche (cliquer ici). Ses titres d’alors : conseiller pour la science et la technologie auprès de
l’ambassade de France à Ottawa au Canada, président de l’université franco-italienne (cliquer ici).
2010, juillet. L’ancien président de Paris 10 est nommé recteur de l’académie de Grenoble. Il est
âgé de 62 ans. Jamais, je ne me serais attendu à ce que mon ancien collègue de Nanterre soit nommé
recteur. Il devrait être fort à l’aise dans les fonctions de représentation du ministre. Fera-t-il davantage
? La rubrique “Recteur” du site de l’académie n’a pas encore été actualisée !
Président Georges Molinié
Georges Molinié est président de l’université Paris Sorbonne depuis le printemps 2008 (site de
Paris IV). Il m’a accordé un entretien en Sorbonne, le 15 septembre à 9 heures 30. Appariteur qui
filtre les entrées, files d’étudiants en attente devant les secrétariats pour les inscriptions
pédagogiques, panneaux annonçant des désagréments durant la période de travaux, ascenceur
ancestral, quelques minutes d’attente dans le hall de la présidence, excellent café pour patienter,
président jovial qui vient m’accueillir, passage par la salle à manger, prête pour le déjeuner
(”j’accueille une vingtaine de délégués de Chine”), bureau de président digne de la fonction. La
responsable de la communication assiste à l’entretien.
Trajectoire de Georges Molinié. CV en ligne sur le site de l’université. 66 ans en décembre
prochain : le président est mon cadet de 2 mois et devra donc partir en retraite en fin de mandat.
Retraite : ne pas confondre avec inactitivé ! J’en témoigne !
Le parcours est classique pour un enseignant de cette génération ; aujourd’hui, il serait qualifié de
carrière fort brillante. Agrégé de lettres à 23 ans, Georges Molinié, natif de Cahors dans le Lot, est
aussitôt nommé professeur en lycée à la rentrée de 1968… au Havre. 24 ans : parenthèse d’une année
comme chargé de mission auprès d’un secrétaire d’Etat.
26 ans (1970) : la carrière universitaire commence. 9 ans comme assistant en Sorbonne. 35 ans
(1979) : après l’obtention d’un doctorat d’Etat Es Lettres (langue et littérature française, philologie), le
spécialiste de la littérature française du 17ème siècle, professeur de stylistique française, est nommé
professeur à Toulouse Le Mirail ; retour en Midi-Pyrénées ! 44 ans (1988) : nomination à Paris
Sorbonne.
Parcours de “responsabilités administratives” également classique et qui finit par conduire à la
candidature à la présidence de Paris Sorbonne en 1998. Responsabilités exercées d’abord au sein
de la discipline, au niveau local (directeur de DEA, de centre de recherche, de l’UFR de Langue
française) et au niveau national (membre du CNU, section “Langue et littérature française”, membre
du Comité national du CNRS en “Sciences du langage”, directeur de la “Revue XVIIème siècle).
Responsabilités au sein de l’université : vice-président en charge du Conseil scientifique en mars
1997.
53 ans et demi (mai 1998) : Georges Molinié est élu président de son université, Lionel jospin est
premier ministre. Le nouveau président de Paris IV succède à Jean-Pierre Poussou, agrégé d’histoire.
Pour le nouveau président, le contexte du travail en Sorbonne pose problème. Les professeurs, sur
qui repose le rayonnement de l’université, manquent de moyens et ont des charges pédagogiques
et administratives importantes. La situation se dégrade d’année en année. Il faut s’attaquer à cette
question pour pouvoir mener des recherches plus nombreuses et de grande qualité.
Au cours de son mandat, Georges Molinié se mobilise au sein de conférences de présidents :
président de la commission des relations extérieures de la CPU, vice-président de la CPU, président de
l’association des présidents des universités de Paris intra-muros, président de l’association des
présidents des universités d’Ile-de-France. Le mandat terminé en 2003, Georges Molinié retourne “à
ses chères études”.
58 ans et demi (mai 2003) : le mandat de Georges Molinié est terminé. Les présidents d’université
ne pouvant être réélus, le congrès de l’université (les trois conseils) élit à la présidence de
l’université, Jean-Robert Pitte, directeur de la formation continue et vice-président du Conseil
d’administration au début du mandat de Georges Molinié. Face à 3 autres candidats, le futur DIO est
élu au 1er tour de scrutin par 70 voix sur 120 membres du Congrès.
63 ans et demi (mars 2008) : le retour. La LRU permet la réélection des présidents d’université.
Jean-Robert Pitte est candidat à sa succession. C’est la 1ère fois, à ma connaissance, que deux anciens
présidents s’affrontent au cours de la même élection. L’entretien avec Georges Molinié débute par
une première question : “pourquoi ce retour” ? “Redevenir président n’était pas dans mes intentions
; après mon premier mandat, j’avais recommencé cours et conférences et cela me satisfaisait. Des
collègues sont venus me chercher. Face à ces pressions amicales, j’ai beaucoup hésité, ne serait-ce
parce que je risquais d’être battu”. L’élection a en effet été difficile. Février 2008, élection au Conseil
d’administration : dans le collège des enseignants, la liste soutenant Georges Molinié (”Avenir de la
Sorbonne”) obtient 7 sièges ; celle soutenant Jean-Robert Pitte (”Excellence des humanités”) obtient
également 7 sièges ; ce dernier l’emporte nettement dans le collège des professeurs et c’est l’inverse
dans le collège des maîtres de conférences. Mars 2008, le CA procède à l’élection du président :
Georges Molinié obtient 11 voix, Jean-Robert Pitte 8 voix ; il y a une abstention. Lire aussi la
chronique : “Pitte, l’orienteur“.
Points inédits de cette élection : un affrontement entre deux anciens présidents, une réélection après
un 1er mandat, terminé 5 ans auparavant (ce cas se compte sur les doigts d’une main) ; une élection
serrée ; une élection par 11 conseillers seulement ; un président réélu qui pourrait faire valoir ses droits
à la retraite (aucun président d’université n’avait été élu jusqu’ici, à l’âge de 63 ans et demi).
L’entretien avec Georges Molinié se poursuit. La charge de travail. “Je ne pouvais imaginer, début
2008, ce à quoi je devrais faire face durant mon mandat : trois mois de pertubations au printemps 2009
avec le mouvement des enseignants-chercheurs, les grands travaux commencés en Sorbonne, les
négociations pour la création du PRES “Sorbonne Universités”, le passage aux responsabilités et
compétences élargies (RCE) au 1er janvier 2011″.
Les RCE ? “Passer aux RCE est obligatoire. J’ai combattu la LRU mais je suis républicain :
j’applique la loi. Il était important de n’être pas dans les derniers à passer, début 2012, aux RCE. Il
n’était pas possible d’y passer avant début 2011. Il a en effet fallu faire un travail colossal (en
particulier dans le champ des ressources humaines), recruter des compétences que nous n’avions pas.
Je n’attends pas grand’chose du passage aux RCE, à peine un peu plus de marge de manoeuvre
en matière de recrutement et d’affectation des emplois. Ce que j’observe, c’est non pas plus de
responsabilités et de compétences, mais un contrôle croissant du ministère et du rectorat. A la
limite, nous nous trouvons seulement libres de gérer la pénurie”.
L’élection du Président ? ”J’ai été élu une première fois par un collège électoral de 120 conseillers ;
j’ai été réélu par un CA de 20 conseillers (dont 3 étudiants seulement). Les CA LRU donnent moins
de légitimité aux présidents élus. Je n’apprécie pas non plus le scrutin de liste avec bonus pour la
liste majoritaire, ne serait-ce que de quelques voix : ce type de scrutin politise l’élection du
président”… “Dans la situation actuelle, c’est mieux que les personnalités extérieures ne participent
pas à l’élection du président, car elles sont cooptées par le CA sur proposition… du président. Ce
pourrait être différent si le collège électoral élisant le président était plus large”.
Le pouvoir de veto du président ? “A l’usage, je me demande : ai-je plus de pouvoirs que durant
mon premier mandat ? Ce n’est pas si sûr ! J’ai combattu la loi LRU sur ce point. Au cours de mon
premier mandat, j’ai demandé une seule fois au CA de casser la proposition de recrutement faite par
une commission de spécialistes ; le CA m’a suivi. Depuis l’instauration des comités de sélection, je
n’ai jamais exercé de droit de veto sur les recrutements“. Un président sur-puissant ? “Encore
aujourd’hui, ce n’est pas difficile pour un conseil d’administration de mettre en difficulté un président
; il suffit que le CA ne vote pas le budget” ! Seriez-vous partisan de la possibilité pour le CA et/ou
les 3 conseils de voter une motion de censure amenant le président à démissionner ? “Je n’ai pas
pensé à cette possibilité”. Le décret de juin 2010 sur la prime des présidents ? (chronique : “La
CPU, chronique d’une mort annoncée“). “Les primes de président ont toujours été d’un niveau
ridicule. Nous exerçons une responsabilité colossale dans tous les champs de l’activité universitaire et
nous sommes pénalement responsables. L’augmentation des primes est justifiée. Bien entendu, la
partie de la prime liée aux objectifs fixés par le ministre est stupide. Nous n’avons pas à être sous la
dépendance du ministre ; nous sommes élus et non nommés. Je tiens à défendre la fonction de
président et son autonomie, même, si, bien évidemment, le président doit mettre en oeuvre les lois
votées”.
La performance, les indicateurs de performance ? (chroniques sur le “financement selon la
performance“). “Mesurer la performance est une bonne idée en soi. D’accord également avec la
perspective d’un financement selon la performance certifiée. La répartition des dotations entre les
universités s’est toujours faite jusqu’ici selon des critères opaques. Avoir des indicateurs est un
progrès mais il faut bien sûr - je suis professeur de rhétorique - discuter de l’idéologie qui est
derrière la mise en avant de la performance”.
“Qu’est-ce par exemple que la performance d’un hôpital ? Il faut garder l’esprit critique !… Les
indicateurs, c’est aussi de la cuisine pour la négociation du contrat quadriennal. Selon les modes de
calcul ministériels, nous sommes au-dessus des niveaux attendus ! Mais qui fixe les niveaux de
performance attendus ? Prenons un exemple, celui de la préparation aux CAPES. Avant, on
mesurait la performance en fonction du nombre d’admissibles ; si on garde le même indicateur alors
que le nombre de postes mis au concours diminue fortement, on pourrait conclure que nous sommes
devenus moins performants. Il est clair dans les temps qui viennent que des reçus-collés aux
CAPES seront recrutés pour effectuer des remplacements. Observant ceci, un indicateur de
performance pourrait conclure à la fort faible performance de nos préparations aux CAPES” !
4 octobre 2010
Président Jean-François Méla
Jean-François Méla est blogueur (JFM’s Blog) depuis 2007. J’avais, depuis un moment, envie de le
rencontrer et de discuter avec lui de l’avenir des universités. Rendez-vous est pris le 16 septembre
2010 : nous déjeunons rue Soufflot à Paris.
JFM blogue sur l’université, la recherche depuis 2007, i.e. depuis qu’il est en retraite (il est né en
1939). Son parcours exceptionnel serait impossible aujourd’hui (son CV) : polytechnicien à 21 ans,
attaché de recherche au CNRS à 23 ans, docteur d’Etat en mathématiques à 28 ans, professeur des
universités également à 28 ans en 1967. C’est la Faculté des sciences de l’université de Paris qui
l’accueille (nous sommes avant 1968). Après 3 ans à l’université de Paris XI Orsay, Jean-François
Méla part en 1970 à Paris 13 Villetaneuse (dit aussi “Paris Nord“), qui vient d’être créée ; il se définit
alors lui-même comme “gauchiste”. Fidélité exceptionnelle à une seule université : il y exercera 37
ans, de 1970 à 2007.
Il y prend les responsabilités “normales” pour un professeur, dans sa discipline tout d’abord, au
plan local puis au plan national : président du département de mathématiques (1981-1984), directeur
d’une unité de recherche CNRS en “analyses et applications” (1985-1991), président de la société
mathématique de France (1985-1988), membre du groupe de réflexion ministériel sur l’enseignement
des mathématiques (1988-1989), président du groupe de réflexion sur l’enseignement scientifique des
sociétés savantes et associations (1988-1992) (JFM : “grand colloque, énorme préparation, important
soutien officiel, édition des Actes, beaucoup de choses intéressantes, mais… peu de conséquences
pratiques comme bien souvent en matière d’éducation”). JFM est passionné par la pédagogie des
sciences.
22 ans après son arrivée dans l’université, JFM en est élu président en 1992. Si je ne me trompe
pas, il a exercé son mandat quinquennal sous deux présidents de la république (François Mitterrand,
Jacques Chirac) et quatre ministres en charge de l’enseignement supérieur et/ou de la recherche, et non
des moindres : Jacques Lang, François Fillon, François Bayrou, Claude Allègre. Est-ce un cas unique
?
L’immédiate après-présidence de l’université se déroule sous les années Jospin (1997-2002).
Jean-François Méla n’est pas nommé recteur d’académie. Il assume néanmoins deux types de
responsabilités importantes. Il est chef de la Mission scientifique universitaire (MSU) au MENR de
2000 à 2002. Il s’investit dans le développement universitaire dans le Nord francilien : membre de
la mission ministérielle “Seine Saint-Denis” (1998-1999), chargé de mission pour la mise en place du
plan U3M sur le pôle “La Villette- Aubervilleurs- Plaine-Saint-Denis” (2000-2001), chargé de mission
académique pour le suivi du CPER sur le pôle “Plaine Saint-Denis” depuis 2002. 2002, la droite gagne
l’élection présidentielle et les élections législatives. La retraite approche pour le président Méla mais il
continue de s’investir dans son université : depuis 2002, il est membre du Conseil scientifique de la
Maison des sciences de l’homme de Paris-Nord (MSHPN), structure fédérative de recherche, créée
en 2001, sous son mandat. Une MSH qui est un peu la fille d’un mathématicien ! “La MSH n’est pas
un hôtel d’unités de recherche, plutôt un Institut à thèmes dont les programmes fédèrent pendant un
temps variable des équipes de recherche (ce qui est assez nouveau et original en SHS et en France”.
Logée dans des locaux provisoires depuis sa création, la MSH est concernée par un projet immobilier
de taille : l’installation dans le quartier Diderot de la plaine Saint-Denis.
Et que pense Jean-François Méla de l’évolution des universités, de la recherche, de Paris 13
depuis 2007, date de création de son blog ? Ses chroniques sont toujours pertinentes, sans langue de
bois, volontiers iconoclastes mais toujours fort documentées historiquement ; privilège d’avoir
commencé à travailler en 1962 et d’avoir été président d’université de 1992 à 1997. Jean-François
Méla est partisan de l’autonomie réelle d’universités plurisdisciplinaires, autonomie
particulièrement nécessaire en matière financière, autonomie mais ”avec un équilibre des pouvoirs qui
n’existe pas actuellement et qu’il s’agit de construire” (chronique de JFM de janvier 2008 : “La
gouvernance partagée : ça peut marcher“). Il n’est pas favorable à la concentration à outrance des
universités ; il veille à des universités actrices de l’aménagement du territoire en particulier en Ile-deFrance et de la démocratisation de l’enseignement supérieur. Pour donner l’envie d’aller lire le
blog : 7 chroniques et quelques extraits.
Refonder l’université : une utopie française ! (1 juin 2009). A propos du manifeste des
“Refondateurs”. “On pourrait avoir le sentiment, aujourd’hui, que l’histoire se répète. En tout cas le
scénario est le même : on se tourne vers l’Etat pour qu’il règle une bonne fois pour toutes les
problèmes de “l’université française” (dont certains plongent leurs racines dans la réalité sociale la
plus profonde) et l’on s’étonnera ensuite de voir l’Etat impuissant. Ainsi, par exemple, le récent
manifeste des “refondateurs” voit dans la dualité des formations universitaires et des formations
sélectives la cause première de tous nos maux et avance comme solution… la création d’un “super
ministère” de l’enseignement supérieur, comme si ce pouvoir ministériel avait quelque chance
d’échapper à l’influence de “la noblesse d’Etat” qui défend bec et ongles le système hyper-sélectif
dont elle est issue”.
Autonomie. Quelques propositions (20 novembre 2009). “Une première proposition est de sortir de
la réserve et du double langage, pour adopter une position plus claire et plus offensive : accepter le
principe de l’autonomie et faire pression sur l’Etat pour qu’il joue pleinement le jeu ; aménager
le fonctionnement interne de l’université de façon que cette autonomie s’exerce dans des conditions
acceptables ; la mettre à profit pour lancer des opérations innovantes”.
L’autonomie ou la planification ? (24 février 2010). Analyse critique du rapport Larrouturou.
“Au fond, la situation est tellement compliquée et dégradée que Bernard Larrouturou a du mal à croire
que l’autonomie produira autre chose que du “gâchis”. Il faut quand même remarquer que le
désordre actuel n’est pas le résultat de l’autonomie, mais de longues années de centralisme. et on
a encore plus de mal à croire que c’est par une coordination et un pilotage centralisé qu’on s’en sortira.
Le véritable drame c’est que le système étatique a largement déresponsabilisé les acteurs académiques
vis-à-vis du devenir des universités… A Paris, encore plus qu’ailleurs, le salut ne viendra pas d’un
retour de l’Etat, mais d’un plus grand investissement collectif de la communauté universitaire dans le
devenir de ses universités”.
Paris 13 : 40 ans d’aventure (25 mars 2010). “A la suite des évènements de 68 et sous la pression
démographique, l’ancienne Sorbonne a explosé en 13 morceaux. Mais l’université Paris 13 n’a pas
seulement été un débris de cette explosion ; elle représentait une innovation audacieuse. Avec
l’université Paris 12, elle était l’une des deux universités françaises réellement pluridisciplinaires.
Mais surtout cette implantation signifiait la présence, dans une banlieue populaire, d’une
université à part entière qui contribuerait à la promotion supérieure des populations locales et au
développement économique de leur territoire, dans un contexte de recherche de niveau international”.
Paris 13 ne s’est-elle pas trompée de PRES (31 mai 2010) ? Ouverture du blog à une libre opinion.
“Il faut un vrai projet pour Paris 13 lié au territoire et au développement d’une logique de
promotion sociale et non à la promotion de quelques-uns (façon Sciences Po) qui ne remet nullement
en question l’inégalité sociale et culturelle dont les populations de notre territoire sont les premières
victimes. Ce projet doit être articulé à celui d’une excellence scientifique située (et non pensée de
façon abstraite, vue de loin, c’est-à-dire de Shanghaï), qui ne se dissolve pas dans Paris centre qui
absorberait masters, doctorats et la recherche alors que Paris 13 serait confinée aux licences, aux
IUT”…
L’avenir de l’autonomie des universités (30 juillet 2010). ”Certains aspects de la LRU relatifs à la
gouvernance devront certainement être amendés. Mais tout ne se résume pas à la loi. A l’intérieur du
cadre législatif, la communauté universitaire dispose de marges de liberté et peut imposer de
saines pratiques. L’autonomie a l’avantage de clarifier le rôle des universitaires dans la politique de
leur établissement. Le plus important est de sortir d’une position de passivité et de résignation pour
aménager le fonctionnement interne de l’université de façon que l’autonomie s’exerce dans des
conditions acceptables et prenne une valeur positive. Le pilotage centralisé par l’Etat n’est pas une
garantie d’égalité ; c’est plutôt l’instrument de la reproduction sociale. L’autonomie peut donner des
marges de liberté pour agir dans un sens démocratique, si elle ne se résume pas à la loi de la jungle, et
si les acteurs en ont la volonté”.
Les classements des universités et l’excellence (21 septembre 2010). “… Reste une explication
totalement iconoclaste : tout ceci serait la preuve que l’important n’est pas tant la quantité de ce que
les étudiants apprennent, mais le fait de passer 3 ou 4 ans dans telle ou telle institution, après une
éventuelle sélection à l’entrée”… “La démocratisation de l’accès aux études est un paramètre
inexistant dans les classements internationaux“… “Dans le cas du “Grand emprunt”, il s’agit de
concentrer les moyens sur un petit nombre d’établissements et de projets “excellents”. Cette logique
bureaucratique risque d’écraser la logique scientifique (l’excellence n’est pas toujours concentrée :
penser aux mathématiques), la logique économique (penser à l’aménagement du territoire) et la
logique démocratique (penser à la ségrégation croissante dans la société française)”.
Le président Batsch et les PRES
Laurent Batsch est président de Dauphine Paris Université depuis mai 2007. Il succède à Bernard
de Montmorillon (président de 1999 à 2007), après l’avoir emporté sur deux autres candidats, dont
Michel Kalika, aujourd’hui directeur de l’Ecole de Management de Strasbourg et blogueur sur
EducPros. J’interviewe Laurent Batsch, samedi 12 juin 2010 au siège de la présidence. Il avait
apprécié les chroniques que j’avais écrites sur la progression des droits d’inscription dans certains
des masters de l’université, devenue Grand établissement : “Dauphine et les droits d’inscription” (3
février 2010), “La CPU contre Dauphine” (5 février 2010), “Dauphine contre-attaque” (19 février
2010). L’entretien de juin a porté sur Dauphine et les PRES franciliens, l’autonomie de l’université, sa
gouvernance, les indicateurs de performance. La chronique d’aujourd’hui porte seulement sur
Dauphine et les PRES franciliens : la situation est fort compliquée en ile-de-France , même si elle
s’est décantée dans les 6 derniers mois (chronique : “Universités de Paris“).
La trajectoire professionnelle du président de Dauphine n’est pas classique (CV sur son ex-blog).
Après avoir été élève de l’ENS Cachan, il est devenu professeur de lycée dans le Val-de-Marne. La
carrière universitaire ne commence donc que tardivement. “Docteur en sciences de gestion en 1992 [à
l'âge de 38 ans], pour une thèse sur le recentrage stratégique des groupes industriels, je suis devenu
maître de conférences à Dauphine en 1993. Après l’agrégation de sciences de gestion en 1997 [à 43
ans], j’ai été professeur à l’Université de Cergy-Pontoise avant de rejoindre Paris-Dauphine. J’y
enseigne la finance d’entreprise et ai créé le Master 246 de management de l’immobilier”. Laurent
Batsch est élu membre du conseil d’administration de Dauphine en 2001 et il a accédé à la
présidence à 53 ans, en 2007.
Un militantisme d’extrême gauche dans les jeunes années, une carrière professionnelle peu
classique (professeur de lycée puis des universités), un âge déjà avancé pour le passage de l’agrégation
de gestion, une appartenance à une université semblable à aucune autre ne serait-ce que par son
histoire, tous ces traits expliquent peut-être que Laurent Batsch est un président à part parmi ses
collègues de la CPU. Son franc-parler (l’interview en témoigne) ne doit pas lui attirer que
des amitiés. N’empêche, le principal n’est-il pas d’avoir des idées, des projets et d’être capable de les
mettre en oeuvre ?
Dauphine Paris Université et les Pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Début
2009, Laurent Batsch affirme vouloir transformer l’alliance Paris Universitas en PRES et s’orienter
vers une fusion de ses membres (Paris 2, 3, 4, 6, 9 Dauphine, ENS Ulm, EHESS), en une université de
type confédéral, respectant les particularités de chacun. Le président Batsch : “je voulais que Paris
Universitas puisse être porteur du Plan Campus”. Les choses ne sont pas allées ainsi : ”Paris 4 a chassé
Paris 3, Paris 2 a chassé Paris 9″. Paris 2, 4, 6 ont créé le PRES FCS “Sorbonne Universités” et Paris
Universitas a été dissout en juin 2010.
Même impasse avec les fondateurs du PRES HESAM (chronique du 14 février 2010). Le
Président Batsch : “J’ai discuté avec le président Colliard de Paris 1 ; il a préféré s’allier avec l’ESCP
plutôt qu’avec Dauphine ; il a peut-être eu peur qu’on polarise l’Ecole d’économie de Paris” (PRES
FCS créé en décembre 2006 et non adossé à une université). “Mon diagnostic : “on a une
“marque” ; mais paradoxalement, on est rejeté plutôt que dragué ; les autres n’aiment pas notre
différence ; ils envient notre statut de grand établissement, la sélection à l’entrée des formations, les
relations que nous avons avec les entreprises ; on n’est pas une école de commerce mais une université
métissée et qui réussit”. En novembre 2009, Dauphine est accréditée EQUIS ; c’est la première
université à obtenir ce label international de qualité en management.
Et la coopération avec l’IAE de Paris 1 ? “Cet IAE n’a pas réussi à obtenir l’accréditation EQUIS.
Pour nous, son intégration est de l’ordre de la fusion-acquisition. C’est un dégât collatéral des PRES”
(impossible de faire cohabiter l’IAE et l’ESCP au sein du PRES HESAM).
Isolement de Dauphine ? “Non ! Nous n’avons aucun sentiment d’isolement ; nous ne tenons pas à
nous marier absolument” ! Se rapprocher de Paris 10 Nanterre ? “Nous avons dit “non” au PRES
Grand Ouest. Nanterre ne passera aux responsabilités et compétences élargies qu’en 2012. Pas envie
non plus d’un PRES avec Léonard de Vinci” [dite Fac Pasqua]. “L’implantation de Dauphine à La
Défense (plus de 1000 étudiants seront concernés à la rentrée 2010) rapprochera nos étudiants des
grands groupes mondiaux installés dans cette place d’affaires internationale”.
Pas d’isolement donc. Laurent Batsch mentionne trois autres atouts de Dauphine. L’implantation
à Tunis (Institut Tunis Dauphine). La Fondation (cliquer ici) : celle-ci dévoilera ses
ambitions demain mercredi 6 octobre ; lire le dossier fort complet qu’EducPros consacre à cette
Fondation qui vise à ”lever” 30 millions d’euros de fonds en 5 ans. Le bon rang de Dauphine dans
les classements internationaux, en management certes, mais aussi en mathématiques (chronique :
“Shanghaï 2010 et les PRES“).
Et coopérer avec les cinq Grandes Ecoles du Quartier Latin qui forment, depuis juillet 2010, le
PRES PSL, Paris Sciences et Lettres ? Le président Batsch : “Ils n’ont pas d’économie et de gestion.
Pour les diverses opérations de l’emprunt national, ils ont besoin d’une université. Qui est disponible ?
Nous”. Le président confirme dans le dossier d’EducPros : “nous allons ensemble au grand emprunt
sur plusieurs briques : Equipex et l’Institut de recherche technologique. En vue également : les Labex.
Enfin le couronnement : “Il est clair que la logique de ces projets est de déposer ensemble une
initiative d’excellence“… “Remettre au cœur des regroupements les projets académiques”… “Nous
apportons à PSL nos disciplines, notamment en économie et gestion, mais aussi un cycle intégré de la
L1 au doctorat. Il se trouve en plus que nous sommes une université sélective, à l’image des écoles.
Rappelons d’ailleurs que ces “écoles” sont en fait de véritables universités de recherche“.
Retour à l’entretien du 12 juin. Laurent Batsch. “Si Dauphine est associée à PSL pour le Grand
emprunt, c’est fort bon. On - “le petit Sud ou le grand Ouest” - la laissera tranquille pour 20 ans. Un
des LABEX pourrait porter sur le RISQUE, projet de laboratoire d’excellence en gestion et
modélisation porté par Dauphine dans un contexte de post-crise. Ce serait un des labex du PRES, une
des briques de la maison commune PSL“.
Laurent Batsch ne serait pas mécontent du succès de PSL et de Dauphine aux appels d’offres du grand
emprunt. Ce serait une juste revanche l’histoire récente : “on a traité grossièrement Dauphine, sur
le fond et sur la forme ; les compteurs ne seront pas remis à zéro ; si on réussit, on pourra dire merci
de nous avoir renvoyé à nos différences“. Chronique à suivre sur l’autonomie de l’université, sa
gouvernance, ses indicateurs de performance.
Luc Johann, président de Metz
Luc Johann est président de l’université Paul Verlaine Metz depuis 2008, université qui fête ses 40
ans en ce moment (programme des festivités). Il m’a accordé un entretien vendredi 8 octobre 2010,
au siège de la présidence sur le campus de l’île de Saulcy (photo). L’Homme et ses priorités à la tête
de l’établissement sur le site de l’université. Deux thèmes ont été retenus à ma demande : le bilan de
la LRU et du passage aux responsabilités et compétences élargies au 1er janvier 2010 et la fusion des 4
universités de Lorraine prévue pour le 1er janvier 2012.
Le président Johann (photo), partisan de la LRU, fait un bilan fort positif du passage aux RCE et
est enthousiaste de voir naître bientôt l’université de Lorraine (site). Ce blog étant critique quant à la
réelle autonomie des universités sous la loi LRU (chroniques : “Valérie encline à prescrire” et “Pour
une gouvernance autonome“), j’estime important d’entendre les arguments du président messin.
Depuis le 1er janvier 2010, le budget de l’université est globalisé ; il inclut désormais la masse
salariale des fonctionnaires : “nous avons négocié fort finement cette masse ; elle inclut bien entendu
les “glissements viellesse technicité “(GVT) ; nous avons obtenu la somme qu’on nous devait”.
Le passage aux RCE a nécessité un énorme travail en amont en particulier dans les services
financiers et dans les ressources humaines : “c’est pourquoi nous ne nous sommes pas précipités pour
passer aux RCE dans les premiers” ; ”de plus, nous avons changé de logiciel de paie également au 1er
janvier”. Lourdes charges pour les personnels. Le bilan est positif à deux niveaux, au niveau
politique et au niveau de la marge de manoeuvre financière. Luc Johann est à même d’évaluer les
changements positifs : avant d’être élu président, il était vice-président du conseil d’administration en
charge des moyens. ”Le passage aux RCE a été l’occasion de penser la modernisation, d’identifier
des priorités, de faire des choix stratégiques, de progresser en transparence, de se responsabiliser, de
piloter mieux l’université”. Question : n’y avait-il pas déjà des marges de manoeuvre en ressources
humaines avant la LRU ? “Oui et non. Le CA, après consultations, établissait une liste de demandes de
postes classées par ordre prioritaire. La négociation s’engageait alors avec le ministère ; on ne
connaissait que tardivement le nombre de postes accordés par le ministère et notre classement n’était
pas forcément respecté. Maintenant, nous décidons nous-mêmes des postes et de leur affectation.
C’est notre choix”. Au vu des départs en retraite, des mutations, des besoins en enseignement et
recherche, plusieurs choix, non exclusifs les uns des autres, existent : repyramider des postes
(changements de grade), redéployer d’une discipline à l’autre, geler temporairement des supports,
inviter des professeurs étrangers, améliorer le régime des indemnités, renforcer le financement de telle
ou telle équipe de recherche. Parallèlement, nous veillons à réduire le volume des heures
complémentaires… Quand nous avons décidé, nous ne revenons pas en arrière, nous assumons nos
choix”. Il ne s’agit donc plus par exemple de taxer en fin d’année les centres de recherche qui ont des
reliquats de crédits.
Je suis assez convaincu par l’argumentaire du président, mais, quelques heures plus tard, je me
demande. “Qui régule désormais au niveau national ? Si toutes les universités font le même choix de
recruter des enseignants prioritairement dans une discipline parce qu’elle a une offre de formation
attractive pour le marché, des débouchés professionnels pour les diplômés et/ou des créneaux de
R&D, le risque serait d’avoir très vite une pléthore d’enseignants si les marchés en question se
retournaient. La logique voudrait donc qu’on ne recrute ces enseignants-chercheurs que sur des
contrats à durée limitée, cinq ans par exemple, cinq ans renouvelables”… Réflexions à poursuivre.
La création de l’Université de Lorraine (sept chroniques précédentes). Le “projet a germé au 1er
semestre 2008 lorque les 4 universités lorraines ont déposé une candidature commune à l’opération
Campus”. Texte mis en large discussion en février 2010 : document de 7 pages. Etat présent du projet
: conférence de presse du 27 septembre 2010 : document de 25 pages. Les conseils d’administration
des 4 universités ont acté récemment la poursuite du processus de fusion (texte soumis au vote). Le
CA de Paul Verlaine s’y est pris à plusieurs reprises et a finalement pris la décision à l’unanimité. Le
président précise : “Les élus de l’UNEF étant présents”. “Le vote a été assorti d’une motion également
adoptée à l’unanimité, visant à apporter un cadrage et des garanties sur certains points pour la
poursuite de la démarche”.
Le statut de Grand établissement ayant été retenu pour l’université de Lorraine, on peut penser que
les garanties concernent le droit d’accès à l’université (absence de sélection) et le montant des droits
d’inscription ; les présidents se sont d’ailleurs engagés, en juin 2010, à respecter sur ces points la
réglementation nationale en vigueur (lettre des présidents). Le statut de Grand établissement
permettra plus facilement la délégation de compétences aux Collegiums et aux Pôles scientifiques,
bases de la structuration de la nouvelle université. Le président : “Les collegiums seront le vrai lieu de
la délégation de compétences. Pour les emplois, la négociation se fera avec eux ; il s’avérerait
impossible de la faire avec 45 composantes et des dizaines de labos ; elle se conclura par des contrats
d’objectifs et de moyens“. Le cadrage concerne aussi le calendrier.
La gouvernance de la nouvelle université. Questions sur son architecture, l’élection du président,
les personnalités extérieures. Difficile (impossible ?) d’éviter un nombre plus important d’instances
que celles existant dans chacune des universités. Le conseil d’administration ne comporterait pas
plus de 30 membres dont peut-être 10 personnalités extérieures ; il continuera d’élire le président. Il
n’est pas prévu de conseil d’orientation stratégique composé majoritairement de personnalités
extérieures. Une instance nouvelle sera créée : le Sénat. Il pourrait comporter 120 membres
(enseignants-chercheurs, chercheurs, BIATOSS, étudiants) ; il serait consulté sur la stratégie proposée
par l’équipe de direction (dénommée directoire ?), amené à donner un avis sur le rapport d’activité du
président, la politique des emplois. Il ne serait pas appelé à voter. Le président Johann aborde la
question du fonctionnement du CA dans son université : “il faut passer beaucoup de temps à
rechercher le consensus ; il faut faire adhérer ; si on se met à faire voter sans arrêt pour compter
précisément les voix, on ne tient pas 4 ans ; le plus souvent, les décisions sont prises à l’unanimité.
D’autres intérêts de la fusion. 1. Une offre de formation régionale. Le président : “depuis le LMD,
les 4 universités ont déjà fait deux contrats quadriennaux ensemble. Les licences doivent demeurer
de proximité et resteront donc organisées sur Metz et Nancy, mais deux licences de même nom auront
désormais le même contenu” (ce qui n’était pas forcément le cas jusqu’ici). Pour les Masters, il y a
déjà des cohabilitations ; il ne pourra être question de dupliquer le même master sur deux sites, tout en
prenant en compte le fait que le but n’est pas de faire se déplacer les enseignants et les étudiants d’une
ville à l’autre”. Un principe : “qu’est-ce qu’on pourra faire de mieux, de plus original au bénéfice
du territoire ? Le service du territoire est un affichage fort” et cela comprend des initiatives
transfrontalières avec l’Allemagne, le Luxembourg et la Belgique. Les décisions définitives pour
l’offre de masters ne sont pas encore arrêtées.
2. Les partenariats avec les écoles qui ne participent pas à la fusion. “Nous garderons un PRES
pour travailler ensemble. L’université de Lorraine ne se coupera pas des autres établissements du
supérieur comme les écoles des Beaux-arts, d’Architecture, de soudure (Thionville)… 3. Les
coopérations internationales : “les pays frontaliers, la Chine et plus largement l’Asie, le Maghreb,
les pays d’Europe centrale et orientale”… 4. La création d’un bureau régional de la vie étudiante
décidée le 27 septembre 2010 (cliquer ici). 5. Dans l’ordre du symbolique et de la création d’une
identité commune, j’aime beaucoup : la cérémonie de rentrée commune aux 4 universités, organisée
le 4 octobre à l’Arsenal de Metz (cliquer ici).
J’aimerais personnellement, en tant qu’ancien directeur de l’IFIPE de Marne-la-Vallée, que soit créé
rapidement un Observatoire commun aux 4 universités pour élaborer les indicateurs de performance
(chronique “Cibles de performance“), pour analyser les parcours de formation et les devenirs
professionnels des diplômés (chronique “Observatoires nancéiens“).
13 novembre 2010
Jean-Marc Monteil, vous méritez mieux !
Jean-Marc Monteil, chargé de mission auprès du Premier ministre, quittera ses fonctions le 15
novembre. Pour aller où ? Au Conservatoire National des Arts et Métiers. Sans que les
médias n’y prêtent attention, il a en effet été “nommé et titularisé en qualité de professeur, à compter
de la date de son installation, sur la chaire “Sciences du comportement et applications” (site Acteurs
Publics). A quelle date cette nomination ? Il y a quelques mois, comme le révèle le blog Actualité
Politique.
Qui a arrangé cette nomination et la création d’une chaire ad hoc ? Fort vraisemblablement,
Christian Forestier, administrateur du CNAM, né en décembre 1944 (CV sur EducPros). Qui a en
effet fait appel à Christian Forestier pour prendre, en 2008, la tête du CNAM ? Jean-Marc Monteil,
chargé de mission de François Fillon, selon le blog de veille du jour, dans une chronique datée du 10
octobre 2010 intitulée : “le CNAM se réorganise”. La nomination de JMM sur une chaire du
CNAM ressemble donc fort à un renvoi d’ascenseur, à la création d’une chaire ad hominem. Dans
les universités, des présidents auraient usé de leur pouvoir de veto pour empêcher une telle
nomination, même proposée à l’unanimité par un comité de sélection. Questions. La chaire, comme il
se doit, a-t-elle fait l’objet d’un appel à candidatures ? Combien de candidats s’y sont présentés ?
Combien ont été auditionnés ? Quel a été le résultat du vote ?
Mais que va donc faire Jean-Marc Monteil au CNAM ? A part une conférence inaugurale le 12
janvier 2011 sur les Sciences du Comportement (cliquer ici). Surprise à peine croyable et délicieuse :
la chaire Sciences du comportement est “logée” dans l’Ecole de Management et Société. Jean-Marc
Monteil est-il un gestionnaire, expert des sciences du comportement dans les organisations ? Certes, il
a une très grande expérience de la gestion des universités, mais ses travaux de recherche, sa thèse et
son doctorat d’Etat, ses nombreuses publications ne se situent pas dans les sciences de gestion, comme
l’indique fort bien son CV sur EducPros : “ancien directeur d’un laboratoire de recherche mixte
(UMR avec le CNRS), ses domaines de recherche sont la mémoire et les contextes dans les
régulations des comportements et des performances cognitives“. La manoeuvre est superbe :
certainement au nom de la pluridisciplinarité, un spécialiste des sciences psychologiques et sociales
expérimentales est nommé sur une chaire dans un centre de recherche en management. Chapeau !
Jean-Marc Monteil est-il encore un spécialiste du champ de recherche qui l’ont conduit à devenir,
fort légitimement, professeur des universités à Clermont-Ferrand à la fin des années 70 ou au début
des années 80. J’espère que non car il a eu, entre temps et depuis presque 20 ans, d’autres “chats à
fouetter”. La preuve. Une carrière longue et continue dans des responsabilités importantes :
président de l’université de Clermont-Ferrand de 1992 à 1997 (il est premier vice-président de la CPU
pour un mandat de deux ans en 1996 et 1997), recteur sous la Gauche, d’abord à Bordeaux (19972000) puis à Aix-en-Provence (2000-2002). Sa carrière de pilote de l’enseignement supérieur se
poursuit sous la Droite : il est nommé au poste-clé de Directeur général des enseignements supérieurs
et y demeure 5 ans ; il y fait un “boulot” globalement apprécié par tous. En 2007, il est nommé
Président de l’AERES avant de rejoindre, presque aussitôt, le cabinet de François Fillon.
Jean-Marc Monteil est né 18 juin 1947. Il a donc 63 ans et demi. A cet âge, les gens de sa génération
ont suffisamment d’années de cotisations pour prendre fort agréablement leur retraite ; j’en suis
témoin. Le professeur, titulaire désormais de la chaire du CNAM, a fait un autre choix tout à fait
légitime et légal : les professeurs des universités de son grade peuvent travailler jusqu’à 68 ans…
Alors pourquoi le CNAM ? Pour gagner quelques trimestres avec “bonus” (loi Fillon 2003 sur les
retraites) ? Pour grappiller un échelon de plus, la retraite des fonctionnaires étant calculée sur le
dernier salaire, pourvu que la dernière promotion date d’au moins 6 mois ?
Personne n’est dupe. Jean-Marc Monteil n’assumera pas les charges d’enseignement d’un titulaire de
chaire recruté dans des conditions “normales”. Il faut donc arrêter cette farce grotesque, celle d’un
recrutement sur une chaire ad hoc. Il ne peut apparaître que comme un arrangement entre “petits
copains”. Il tue la crédibilité de tous les recrutements dans l’enseignement supérieur. Sus au
copinage, au clientélisme voire au népotisme ! Egalité de traitement !
Quand on a assumé pendant près de 20 ans des responsabilités comme celles de Jean-Marc Monteil,
on mérite mieux, on mérite de ne pas faire l’objet de ce genre de chronique. Pourquoi ne pas
créer, comme pour les préfets, une position de professeur des universités hors-cadre, en
remerciement de bons et loyaux services pour l’Etat ? Aux fins de permettre au bénéficiaire du horscadre de faire profiter les personnels des universités, les étudiants, les françaises et les français de son
expérience unique. Jean-Marc Monteil, au lieu de devoir faire semblant de faire le professeur du
CNAM, osez écrire et publier rapidement vos mémoires d’un grand commis de l’Etat. Chacune et
chacun les attend !