LES NOUVELLES METHODES THERAPEUTIQUES DU CANCER
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LES NOUVELLES METHODES THERAPEUTIQUES DU CANCER
J Maroc Urol 2010 ; 17 : 5-11 MISE AU POINT LES NOUVELLES METHODES THERAPEUTIQUES DU CANCER DE PROSTATE HORMONORESISTANT M. EL BAGHOULI, M. EL MOUZDAHIR, R. RABII, A. HEDDAT, F. MEZIANE Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc RESUME ABSTRACT Le cancer de la prostate hormonorésistant correspond au stade avancé de la maladie métastatique. Les mécanismes de transition vers l’hormonorésistance sont intimement intriqués. La compréhension des rôles et mécanismes des voies biologiques impliquées dans la progression du cancer de prostate devrait permettre de nouvelles approches thérapeutiques rationnelles. L’urologue, par sa connaissance globale de la maladie, reste le maître d’oeuvre du traitement du malade hormonoindépendant. Toutefois, un traitement efficace des différentes complications nécessite à l’évidence une équipe multidisciplinaire incluant les oncologues, radiothérapeutes, algologues et autres spécialités, qui peut donner au malade ses meilleures chances de survie avec la meilleure qualité de vie. NEW APPROACHES IN HORMONE REFRACTORY PROSTATE CANCER The hormone refractory prostate cancer corresponds at the advanced stage of the metastatic disease. The mechanisms of transition towards hormone refractory are closely intricate. The understanding of the roles and mechanisms of the biological ways implied in the progression of the cancer of prostate should allow rational therapeutic new approaches. The urologist by his total knowledge of the disease remains the project superintendent of the treatment of the hormonoindependent patient. However, an effective cure of the various complications requires a multidisciplinary team obviously including the oncologists, radiotherapists, algologists and other specialities, which can give to the patient his best chances of survival with best quality of life. Mots clés : cancer de la prostate ; hormonorésistance ; nouvelles approches thérapeutiques Key words : prostate cancer ; hormone refractory ; new approaches of treatment Correspondance : Dr. M. EL BAGHOULI. 173, rue saint laurent, Appt n°13, 09000 Casablanca, Maroc. E-mail : [email protected] L’HORMONORESISTANCE OU L’ECHAPEMENT HORMONAL DU CANCER DE LA PROSTATE INTRODUCTION Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme, 80% des malades présentant un cancer disséminé répondent au traitement hormonal. Cette réponse est limitée dans le temps et la reprise de la progression a généralement lieu entre 18 et 36 mois après le début du traitement hormonal. A. DEFINITION L’hormonorésistance est définie par une augmentation du taux de PSA, à deux ou trois reprises sur des dosages successifs espacés d’au moins 15 jours, alors que le taux de testostéronémie est à un taux de castration [1]. Les progrès en biologie moléculaire ont permis d’améliorer la connaissance des mécanismes de l’échappement hormonal dans l’adénocarcinome prostatique. La découverte des systèmes des oncogènes et des antioncogènes est en plein développement ainsi que l’étude de l’équilibre prolifération/apoptose. Une maladie évolutive est définie comme la progression des lésions quantifiables, l'apparition d'au moins une nouvelle lésion à la scintigraphie osseuse ou progression biochimique associée à une augmentation du PSA, en présence de taux plasmatiques de testostérone à des niveaux de castration (< 50 ng/ml), d'au moins 25%. L'évolution de la maladie doit se produire malgré un arrêt du traitement par les bloqueurs des récepteurs aux androgènes pendant quatre à six semaines [1]. Le but de ce travail est de faire une revue bibliographique sur les nouvelles méthodes thérapeutiques du cancer de prostate hormonorésistant. -5- Les nouvelles méthodes thérapeutiques du cancer de prostate hormonorésistant M. EL BAGHOULI et coll. PRISE EN CHARGE DU CANCER DE PROSTATE HORMONORESISTANT B. MECANISMES DE L’HORMONORESISTANCE 1. Mécanismes cellulaires L’hormonothérapie ne détruit que les cellules androgénodépendantes. Elle n’a pas d’action sur d’éventuels clones hormonorésistants pré-existants ni sur les cellules souches ni sur les cellules neuroendocrines. L’hormonothérapie crée donc une pression de sélection sur ces cellules androgéno-indépendantes [2]. A ce jour, il n’existe pas de traitement curatif du cancer de prostate hormonorésistant (fig. 1, 2). 2. Mécanismes moléculaires La plupart des mécanismes moléculaires impliquent l’activation paradoxale du récepteur androgénique (RA) en l’absence de concentrations physiologiques d’androgènes sériques. Les autres court-circuitent la voie du RA [2]. a. Mécanismes moléculaires impliquant l’activation du RA * Maintien de concentrations intracellulaires efficaces de dihydrotestostérone (DHT). Ces concentrations sont suffisantes pour activer le RA. Les raisons du maintien de concentrations intracellulaires efficaces de DHT sont la persistance de la sécrétion cortico-surrénalienne et surtout l’augmentation de la production intracrine par la tumeur [2]. Fig. 1. Démarche thérapeutique vis-à-vis de la progression biologique du cancer de la prostate [3] AA : anti-androgène ; BA : blocage androgénique ; LHRH : luteinising hormone-releasing hormone ; BAC : blocage androgénique complet * Augmentation de la sensibilité du RA aux androgènes résiduels. Les tumeurs hormono-résistantes nécessitent pour leur croissance 80% d’androgènes en moins que les tumeurs hormonodépendantes. Orchidectomie b. Mécanismes moléculaires court-circuitant la voie du RA Analogue LH-RH Associer un anti-androgène BAC * Activation des voies apoptotiques L’apoptose est une mort cellulaire programmée, sous l’influence de stimuli telles que la sénescence, les altérations de l’ADN ou la diminution des facteurs de croissance. Certaines molécules de la machinerie apoptotique semblent impliquées dans la transition vers l’hormono-résistance du cancer de la prostate. Arrêt de l’anti-androgène Diethylstilbestrol 1 mg ou Bicalutamide (150 mg) Chimiothérapie Estramustine ± corticoïdes * Différenciation neuro-endocrine Les cellules neuro-endocrines (NE) sont minoritaires dans la prostate normale. Leur densité est en revanche augmentée dans le cancer de la prostate hormonorésistant. Ces cellules sont insensibles à la radiothérapie et aux traitements systémiques. La différenciation NE du cancer de la prostate est un facteur de mauvais pronostic [2]. Fig. 2. Modifications du traitement médical devant une reprise évolutive biologique et/ou clinique [3] BAC : bloc androgénique complet -6- J Maroc Urol 2010 ; 17 : 5-11 A. HORMONOTHERAPIE PREMIERE LIGNE Les options thérapeutiques pour le traitement de première ligne sont : la castration chirurgicale, les agonistes de la LH-RH, les anti-androgènes seuls, les œstrogènes. Première ligne d’hormonothérapie en échec (augmentation du PSA) Contrôle de la testostéronémie Arrêt de l’anti-androgène En cas d’hormonorésistance, continuer ou pas le traitement hormonal de première ligne ? Poursuite de l’augmentation du PSA Devant une reprise évolutive biologique et/ou clinique [3, 4] : Asymptomatique - Vérifier la bonne observance du traitement hormonal et si nécessaire faire un dosage de la testostéronémie pour s’assurer du taux de castration. Symptomatique Essai thérapeutique - Modifications du traitement hormonal. Envisager : • Mitoxantrone + Hydrocortisone • Radiothérapie métabolique • Traitements locaux (radiothérapie externe, chirurgie si risque de fracture ou de compression) Hormonothérapie de 2ème ligne 1. Maintien de l’analogue de LH-RH En l’absence d’étude prospective, il est recommandé de poursuivre la castration par analogue de LH-RH, le gain sur la survie semble cependant modeste. En revanche, si la castration initiale était chirurgicale avec une testostéronémie effondrée il n’y a pas lieu de prescrire un analogue de LH-RH. Fig. 3. Attitude pratique en phase d’hormonorésistance [5] Tableau I. Taux de réponse thérapeutiques observés en deuxième ligne avec les différentes molécules utilisés [4] 2. Arrêt temporaire de l’ant-iandrogène Deuxième ligne thérapeutique Il apporte un bénéfice chez 30 à 40% des patients. En effet, il a été observé qu’environ 20% des patients ont une diminution du PSA, après arrêt de l’administration des anti-androgènes (withdrawal syndrom : syndrome de retrait des anti-androgènes). La durée moyenne de réponse est de 4 mois. Traitement antérieur Réponse sur le taux (en plus de la castration) de PSA [IC 95%] Bicalutamide 200 mg/j B. HORMONOTHERAPIE DEUXIEME LIGNE Après l’échec d’une première hormonothérapie, il n’existe pas de recommandation concernant l’attitude thérapeutique (fig. 3). Cependant, une deuxième ligne d’hormonothérapie est généralement proposée si le patient est asymptomatique, âgé et/ou présente des comorbidités importantes associées. La deuxième ligne d’hormonothérapie cible les 10% d’androgènes circulants liés à la sécrétion surrénalienne, par blocage du récepteur ou par inhibition directe de la sécrétion. Elle peut agir uniquement chez les patients devenus hormono-indépendants et non résistants. Il est nécessaire à ce stade de poursuivre la castration chimique. flutamide 38% [20-59%] Flutamide 250 mg/j néant 23% [np] Prednisone 10 mg/j AAP 12% [6-22%] Hydrocortisone 40 mg/j AAP 20% [7-39%] Kétoconazole 600 à 1200 mg/j AAP 60%* [47-76%] Diéthylstilbestrol 3 mg/j AAP 42% Fosfestrol 100 mg/j AAP 79% [66-92%] Phosphate d'estramustine AAP 19% [np] AAP : antiandrogènes périphériques ; IC : intervalle de confiance ; np : non précisé * La baisse du taux de prostate specific antigen (PSA) est plus importante sans pour autant de répercussion sur la durée de réponse ou la survie. C. CHIMIOTHERAPIE Durant ces dernières années, l’utilisation de protocoles moins toxiques ainsi que l’apparition de critères d’évaluation plus pertinents ont modifié la place de la chimiothérapie dans les cancers de la prostate hormonorésistants (CPHR). 1. Les principaux agents cytoxiques Le tableau I indique les taux de réponse observés en deuxième ligne avec les molécules inhibant la production d’androgènes surrénaliens (prednisone, kétoconazole), bloquant les récepteurs aux androgènes (bicalutamide, flutamide) ou ayant une action antagoniste des androgènes (diéthylstilbestrol). Leur action est résumée ci-après. En cas d’échec de l’hormonothérapie, si l’état général du patient le permet, on pourra proposer une chimiothérapie. La première drogue ayant montré une efficacité supérieure aux corticoïdes seuls est la mitoxantrone. a. La mitoxantrone (Novantrone®) Est un composé de synthèse appartenant à la famille des anthracénédiones, moins cardiotoxique que la -7- Les nouvelles méthodes thérapeutiques du cancer de prostate hormonorésistant M. EL BAGHOULI et coll. randomisée de l’E.O.R.T.C. (European Organization for Research and Treatment of Cancer) rapportée par Fossa en 2001 mettait en évidence une amélioration de la qualité de vie et des douleurs pour les patients sous corticothérapie à faible dose (prédnisone 5 mg) par rapport au traitement par agoniste de la LHRH seuls. Une diminution du PSA était également notée dans 20 à 70% des cas [6]. doxorubicine. Les deux indications retenues en oncologie sont le traitement de la leucémie aiguë myéloïde et le cancer de prostate hormonorésistant. Le traitement est globalement bien toléré, avec une toxicité hématologique minime et une toxicité cardiaque d'environ 4%. Ce traitement était resté jusqu'à présent le traitement standard en cas d'atteinte métastatique hormonorésistante. Cette étude a permis l'approbation en 1996 par la Food and Drug Administration (FDA) de l'utilisation de la mitoxantrone 12 mg/m2 toutes les 3 semaines en association avec la prednisone [5, 6]. E. THERAPEUTIQUES CIBLEES Ces traitements sont en cours d'évaluation et aucun n’a obtenu d'AMM dans le traitement du CPHR [8, 9]. b. L’estramustine de phosphate Administré en monothérapie, des taux de réponse (PSA) de 14 à 48% ont été rapportés. Une amélioration des symptômes ainsi que de l’état général a également été observée. 1. Inhibiteurs du récepteur de “l'epidermal growth factor” L’epidermal growth factor receptor (récepteur à l'EGF: EGFR) est impliqué dans la croissance cellulaire, la différenciation, la mobilité des cellules tumorales et l’angiogenèse. Ce récepteur transmembranaire subit une modification conformationnelle après fixation du ligand et dimérisation. Cependant, trois études randomisées évaluant l’estramustine dans le traitement du cancer de prostate hormonorésistant, la première contre placebo, une autre contre le flutamide, et la troisième contre l’association méthotrexate-cisplatine, n’ont montré aucun bénéfice de l’estramustine en termes de palliation ou de survie [1]. La surexpression d’EGFR dans le CPHR serait associée à un pronostic péjoratif. De plus, lors de la phase métastatique diffuse, il existe une modification de la sécrétion paracrine pour un mode autocrine du transforming growth factor (TGF) alpha, un des ligands d’EGFR, ayant pour conséquence une activation plus importante du récepteur. Donc, le blocage de ce récepteur semble être une thérapie ciblée de choix. c. Les Vinca-Alkaloïdes - La vinorelbine (Navelbine®), en monothérapie, a permis dans deux essais de phase II d’entraîner une réponse biologique dans 39% et 32% des cas [1, 2]. - La vinblastine : des taux de réponse modeste en terme de diminution du PSA ont été obtenus avec la vinblastine donnée en monothérapie. En association avec l’estramustine, les résultats semblent meilleurs puisque 40 à 54% des patients présentent une diminution significative du PSA [1]. 2. Inhibiteurs de l'angiogenèse L’angiogenèse est un processus complexe, étroitement régulé, nécessaire pour la croissance et le potentiel métastatique des tumeurs. Les petites tumeurs, de moins de 2 millimètres, sont généralement considérées capables de maintenir leurs besoins alimentaires par diffusion, toutefois toute autre croissance exige l'induction d’une néo-vascularisation et l'invasion des capillaires des vaisseaux environnants. d. Les Texanes - Le docetaxel, en monothérapie à la dose de 75 mg/m2, a donné des taux de réponse biologique de 38% et 46% dans deux essais. Les taux de réponse rapportés des associations docetaxel, estramustine et dexamethasone ont été globalement supérieurs. Cette supériorité en terme de réponse biologique de l’association avec le phosphate d’estramustine vient d’être confirmée dans une étude de phase II randomisée [6, 7]. Le VEGF est une glycoprotéine intervenant dans la stimulation de l’angiogenèse. Des travaux récents ont montré que le taux de VEGF circulant pourrait être un marqueur de progression du cancer de prostate, et un facteur pronostique indépendant de la survie. 3. Epothilones Constituent une nouvelle classe d’agents tubulinepolymérisant, qui suppriment la dynamique des microtubules semblable aux mécanismes des taxanes, mais sont moins susceptibles à la P-glycoprotéine qui induit l’efflux de la drogue (une des protéines principales impliquées dans le développement des phénotypes de MDR = drug-resistance mechanisms). - Le paclitaxel : comme docetaxel, le paclitaxel a été largement étudié comme agent cytotoxique seul et en association. Les toxicités associées au paclitaxel incluent la neutropénie, la neuropathie, et l’arthralgie/myalgie. D. PLACE DE LA CORTICOTHERAPIE Ils sont généralement 5-25 fois plus efficaces que le paclitaxel dans l’inhibition de la croissance des cellules en culture [9]. L’utilisation des corticoïdes dans le cancer de la prostate hormonorésistant est une pratique courante. L’étude -8- J Maroc Urol 2010 ; 17 : 5-11 4. Les petites molécules inhibitrices de la transduction du signal cytokines immunosuppressives ou incapacité des lymphocytes T à entraîner une réponse immunitaire efficace par exemple). L'utilisation d'un vaccin aurait pour but non pas de prévenir l'apparition d'un cancer mais de supprimer cette “tolérance”. Un essai de phase II étudiant l'APC8015 (utilisant des cellules présentatrices de l'antigène [CPA] activées d'un patient, mises en incubation avec une protéine de fusion entre la prostatic acid phosphatase [PAP] et une petite molécule se liant spécifiquement à la surface des CPA, a montré un bénéfice en termes de progression (+ 6 mois) et de qualité de vie (moins de douleurs) par rapport au groupe contrôle dans le sous-groupe des patients ayant un score de Gleason inférieur ou égal à 7, mais pas en cas de Gleason supérieur. De même, la réponse lymphocytaire T est sept fois plus importante dans le groupe “Gleason inférieur ou égal à 7”. Une étude de phase III (nommée D9902B) est actuellement en cours [11]. Peuvent bloquer spécifiquement des voies cellulaires de signalisation impliquées dans la croissance et l’apoptose. a. Antagonistes du récepteur A de l’endothéline I (ET-A) Les endothélines sont des peptides produits par les cellules endothéliales et épithéliales des tissus telle que la prostate. L’endothéline-1 se lie au récepteur A d’endothéline, et vraisemblablement la voie de signalisation endothéliale est prédominante dans le cancer de prostate. Les patients avec CPHR métastatique ont une plus grande expression d’endothéline-1 en comparaison avec l'épithélium prostatique normal et celui du cancer de prostate localisé. L’endothéline-1 a des effets sur les vaisseaux (constriction), sur la prolifération (stimulation in vitro de la prolifération des cellules tumorales prostatiques), sur la synthèse de la matrice ainsi qu’un effet anti-apoptotique. 7. Thérapie visant les nucléotides Les oligonucleotides Antisenses (ASOs) offrent une approche pour régler des gènes impliqués dans la progression du cancer, particulièrement ceux qui ne sont pas sensibles à la petite molécule d’inhibition ou d’anticorps. b. Inhibiteur de la tyrosine kinase Imatinib (Gleevec, Novartis Pharmaceuticals, East Hanover, NJ) : est un agent qui empêche l'activité de tyrosine kinase, du récepteur plaquette-dérivé de facteur de croissance (PDGF-R). Les ASOs sont des molécules ADN-like chimiquement modifiées, 17 à 22 nucléotides de longueur. Ils sont conçus être complémentaires à l’ARN messager d’un gène choisi, pour empêcher spécifiquement son expression [12]. 5. Réinduction de l'hormonosensibilité On estime que toute séquence d'au moins 13 bases dans l’ARN et 17 bases dans l’ADN est représentée seulement une fois dans le génome humain. Ainsi, la spécificité implicite mène théoriquement, dans la conception d’ASOs, à la réduction de la toxicité à distance de la cible. Les défis demeurent pour optimiser l'exposition de tissu, la prise cellulaire et la démonstration du mécanisme de l'activité antitumorale. Le manque de succès de l'ASOs de première génération G3139 et ISIS3521 dans des épreuves randomisées récentes de phase III dans le cancer de poumon, la leucémie, le myélome, et le mélanome a atténué l'enthousiasme pour la thérapeutique d’ASOs. Les cellules cancéreuses prostatiques produisent des facteurs de croissance stimulant les ostéoblastes et donc l’ostéoproduction. L’IGF1 (production systémique et locale) aurait un effet protecteur sur les cellules cancéreuses des métastases osseuses. Les ostéoblastes et osteoblast-derivated growth factors (ODGF) comme IGF1 inhibent l'apoptose chimio-induite et favorisent la production de tumeurs chimiorésistantes in vitro. La somatostatine et ses analogues peuvent supprimer la production d’IGF1 hépatique. Les glucocorticoïdes peuvent diminuer la production des ODGF comme IGF1 et TGFß, ainsi que leur biodisponibilité en réduisant l’expression de l’activateur du plasminogène urokinaselike dérivé des cellules cancéreuses prostatiques qui hydrolyse localement les IGF-BP. Ainsi, l’association d'analogues de la somatostatine et de corticoïdes pourrait réinduire l'hormonosensibilité [10]. F. TRAITEMENTS SYMPTOMATIQUES La qualité de vie est l’élément essentiel à prendre en compte et donc la prise en charge des symptômes non urologiques fait partie intégrante du traitement. Cela permet une prolongation de la survie. L’urologue s’associe aux autres spécialistes pour cette prise en charge typiquement multidisciplinaire. Lorsque le cancer de la prostate progresse, la localisation métastatique la plus fréquente est la localisation osseuse. Bien que les métastases osseuses du cancer de la prostate aient une forte activité ostéoblastique comme 6. Immunothérapie active (vaccinations) Le déficit de réponse immunitaire face à la présence d'une tumeur chez des patients en majorité immunocompétents, pourrait témoigner d'un certain degré de “tolérance immunitaire”, dépendant de différents mécanismes (sécrétion par la tumeur de -9- Les nouvelles méthodes thérapeutiques du cancer de prostate hormonorésistant M. EL BAGHOULI et coll. C. THERAPIE GENIQUE Cette technique consiste en l’introduction dans une cellule cible, d’un matériel génétique constitué d’un gène sous la dépendance d’une séquence de régulation. Le gène est introduit soit directement sous forme d’ADN nu, soit grâce à un vecteur dans le génome duquel il est généralement inséré. L’expression de ce gène modifiera les propriétés fonctionnelles de la cellule appelée alors cellules transduites. Cette expression, soit restaurera une fonction perdue ou altérée, soit lui fera acquérir une fonction nouvelle. Plusieurs voies d’administration in vivo ont été testées, la meilleure rentabilité étant obtenue par injection intra-prostatique directe [14]. en témoigne l'aspect radiologique hyperdense des lésions, il existe également une activité ostéoclastique importante. Les biphosphonates, analogues des pyrophosphates, empêchent la destruction osseuse dans près de 80% des patients ayant une forme avancée de la maladie. Il existe plusieurs biphosphonates disponibles comme le clodronate, le pamidronate ou l'acide zolédronique. L'acide zolédronique a démontré son efficacité dans la prévention des complications osseuses dans une étude randomisée de phase III. Les douleurs peuvent êtres calmées par divers moyens à savoir les antalgiques, la chirurgie et la radiothérapie externe ou métabolique. D’autres complications peuvent être rencontrées qu’il faut savoir les gérer en cas de cancer de la prostate hormonorésistant, essentiellement les troubles obstructives urinaires, les oedèmes des membres inférieurs et les différentes complications métaboliques et hématologiques. CONCLUSION Le cancer de prostate hormonorésistant correspond à une situation clinique grave où les symptômes sont souvent importants et la survie faible. Les mécanismes intimes du processus d’hormonorésistance sont toujours à l’étude. Le choix du traitement se fait essentiellement en fonction de l'état général du patient. En effet, cette maladie touche des patients âgés qui ne sont pas toujours capables de supporter un traitement agressif. Chez le sujet plus jeune, on n'hésitera pas à débuter rapidement une chimiothérapie et à privilégier l'inclusion dans les essais thérapeutiques. VOIES DE RECHERCHE A. THERAPIE D’INHIBITION DE LA PROLIFERATION ET DE METASTASE La régulation moléculaire qui contrôle le cycle cellulaire est le “cyclin-dependant-kinase” qui résulte de l’arrêt de cycle cellulaire avec prolifération de cellules tumorales qui font l’objet d’essais cliniques. L’un de ces inhibiteurs est « genestin », une substance naturelle se trouvant dans le soja qui a été la base de nutrition dans les essais, la plupart des données épidémiologiques et les résultats de laboratoires sont en faveur d’actions diététiques (régime non gras, prise de sopptréine, vitamine E, prise de sélénium) [13]. Une seconde phase essentielle par la régression tumorale est la capacité des cellules cancéreuses de casser la matrice extra-cellulaire avec des enzymes protéases qui envahissent le tissu et établissent de nouveaux vaisseaux sanguins. En plus, la néovascularisation, ou bien l’angiogenèse, est critique dans la croissance tumorale et sa métastase. Ceci généralement achève une production locale des molécules qui sont les proangiogéniques. Des perspectives nouvelles sont offertes avec les thérapies ciblées. Les résultats de nombreuses études de phases II et III en cours actuellement devraient apporter des résultats majeurs dans les prochaines années. REFERENCES B. INDUCTION DIRECTE ET SELECTIVE DE L’APOPTOSE Au niveau cellulaire, l’hormonorésistance traduit une incapacité d’enclencher le processus d’apoptose induit par la suppression androgénique. Les étapes clefs de l’apoptose varient suivant le type cellulaire et le stimulus inducteur, mais le processus comprend un stade commun terminal, irréversible, d’exécution létale. Le développement d’agents susceptibles d’induire spécifiquement l’activation de cette phase d’exécution dans les cellules prostatiques suscite un intérêt croissant parmi les chercheurs [13]. -10- 1. Schnadig ID, Beer TM. Optimal timing of chemotherapy in androgen independent prostate cancer. 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