Réduire les dégâts de gibier dans les plantations
Transcription
Réduire les dégâts de gibier dans les plantations
Réduire les dégâts de gibier dans les plantations Technique - Septembre 2016 Cerfs élaphes, chevreuils, sangliers, lapins, parfois lièvres font partie intégrante des espaces forestiers. La cohabitation entre animaux et végétaux s'équilibre plus ou moins, mais il est des périodes dans la vie d'une parcelle de forêt ou celle-ci est plus sensible à leurs appétits. Lors des boisements ou reboisements, une pression du gibier jusque là compatible avec la capacité d'accueil de la forêt peut causer des dégâts remettant en cause l'avenir de ces jeunes arbres. Pour limiter ces dégâts et permettre le bon développement des plants forestiers, de nombreux moyens sont disponibles, techniques et cynégétiques. Pourquoi des dégâts sur les jeunes plantations ? Devant une plantation ou une régénération dévastée par le gibier, la première réaction du forestier est, bien sûr, de mettre en avant le déséquilibre entre la faune et la flore. S'il y a des dégâts, c'est parce qu'il y a trop de gibier. Le forestier a raison. Mais une des causes de ce déséquilibre est, au moins en partie, due à la modification du milieu qu'il a réalisée en exploitant le peuplement mûr et en le remplaçant par de jeunes arbres. L'apport de lumière, l'introduction de jeunes plants conduisent au développement d'une végétation abondante et appétante pour les herbivores. Les entretiens indispensables accentuent encore le phénomène en créant des zones où les déplacements sont aisés et les plants, facilement accessibles, à la bonne hauteur, à portée de dent. Si les conséquences d'une coupe sur la végétation sont connues, par contre la capacité de la végétation à résister à la pression du gibier est plus difficile à apprécier. En effet, celle-ci va dépendre de la densité de cervidés présents sur la forêt. Que ce soit pour des raisons alimentaires ou comportementales, pour connaître le niveau de risque de dégâts sur des renouvellements forestiers, il faut, avant la mise en régénération, connaître le mieux possible le niveau de pression exercé par le gibier sur la forêt. Il faut donc anticiper et agir avant de commencer à renouveler. . Anticiper pour mieux adapter sa gestion Pour pouvoir bien anticiper, il faut bien connaître la situation de sa forêt en matière d'équilibre forêt gibier. Les méthodes d'observation habituelles peuvent être complétées par l'installation de petits enclos (voir Bois et Forêts n°114 Décembre 2014). Plus les différences de végétation entre l'intérieur et l'extérieur de l'enclos apparaissent rapidement, plus le risque de dégâts est fort. Mais il faut que ceux-ci soient installés suffisamment en avance. Un minimum de 3 saisons de végétation est nécessaire pour avoir une information pertinente. Si les différences de végétation sont peu marquées, notamment en terme de diversité, le risque est faible. Seuls sont à craindre quelques abroutissements ou des frottis à un niveau supportable si les reboisements sont réalisés aux densités recommandées. Attention néanmoins aux mauvaises surprises toujours possibles. Le propriétaire doit vérifier régulièrement les premières années que le pronostic initial reste valide. Les populations de cervidés peuvent évoluer rapidement, notamment par des arrivées en provenance d'autres massifs. Dans le cas contraire, le risque de dégâts sur les jeunes plants est très élevé. Les conséquences sont alors l'abroutissement d'un nombre important de plants et, dans les cas les plus critiques, leur abroutissement généralisé et répété. Les jeunes arbres, broutés au fur et à mesure de leur développement ne peuvent pas grandir et restent vulnérables face aux cervidés. Au final, le plant meurt et la plantation disparaît petit à petit. A ces dégâts « alimentaires » s'ajoutent des dégâts comportementaux, les frottis. Le cervidé marque ainsi son territoire et se débarrasse du « velours » sur ses bois ou lors de leur perte. Plus la population augmente, plus ces phénomènes qui dégradent la qualité et la vitalité des jeunes arbres par l'arrachement de l'écorce, sont accentués. Aujourd'hui, le plan simple de gestion, avec son programme de coupes et travaux établi pour 10 à 20 ans permet d'anticiper les moments où la forêt présentera des zones sensibles. Cela laisse donc le temps de bien connaître l'intensité de la pression du gibier pour prévoir les moyens adaptés à la solution qu'il faudra mettre en ?uvre. Choisir le mode d'action le mieux adapté à sa forêt Ici encore, plus la question est anticipée, plus les solutions possibles sont nombreuses, toutes avec des avantages et des inconvénients (cf. encart). Ce qui est sûr par contre, c'est que moins le risque a été pris en compte en amont, plus la solution sera coûteuse. Et elle le sera d'autant plus que les mesures de protections seront prises après l'apparition des dégâts car il faudra non seulement protéger, mais en plus regarnir, voire recommencer la plantation ou la régénération. La première solution consiste à maintenir une population de cervidés compatible avec l'état de la forêt. Encore une fois, le plan simple de gestion est un atout. Les renouvellements prévus et la partie analyse de l'équilibre forêt gibier sont autant d'éléments qui permettent d'appuyer une demande d'augmentation (ou de réduction) du plan de chasse en fonction de l'évolution de la sensibilité de la forêt. Lorsque « l'équilibre » n'est pas possible, soit par choix, soit par contrainte spécifique, il faut passer de la défense passive à la défense active, en installant des protections. Celles-ci peuvent être individuelles, pour les plantations de faible surface, ce qui présente l'avantage de maintenir la surface ouverte disponible pour l'alimentation du gibier. Pour les plantations de surfaces importantes, l'engrillagement global s'impose. Il existe de nombreuses variantes pour chacune de ces techniques. Le propriétaire optera pour le meilleur rapport efficacité-coût. Une bonne connaissance du territoire, un programme de gestion qui offre une vision à long terme de sa gestion et quelques enclos pour apprécier la réalité de la pression du gibier, sont autant de moyens à ne pas négliger pour mieux prévoir et choisir une solution qui puisse concilier, sylviculture et cynégétique. Clémence BESNARD Technicienne CRPF