Fiche d`accompagnement - La bonne âme du Se
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Fiche d`accompagnement - La bonne âme du Se
Fiche d’accompagnement culturel et pédagogique Le théâtre a plusieurs rôles à remplir : didactique, métaphysique, mais aussi pourquoi pas léger et divertissant. J’aime ces spectacles où l’on rit, où l’on pleure et l’on réfléchit dans la même soirée. Je crois qu’on vient au théâtre pour être touché. Pour regarder et écouter « l’humain ». Parce que c’est là où les Hommes parlent aux Hommes, parce que le temps y prend une autre valeur, la présence humaine une autre dimension et qu’à certains instants, si rares soient-ils, on peut sentir de manière presque concrète ce lien invisible qui nous relie tous : la Vie. Jean Bellorini, juin 2012. Texte et contexte En 1935, suite à l'arrivée au pouvoir d'Hitler en 1933, Bertolt Brecht est déchu de la nationalité allemande, il se réfugie en Scandinavie. Il commence à écrire La Bonne Âme du Sé-Tchouan (Der gute Mensch von Sezuan) en 1938 au Danemark ; il l’achèvera en Suède, en 1940, avec l’aide de sa collaboratrice Margarete Steffin. Le théâtre-critique de Brecht culmine ici, dans cet appel pathétique, angoissé au public. Le monde s’engage dans la Seconde Guerre mondiale. Le nazisme contamine toute l’Europe, ou presque. Il faut inventer cette solution : une solution qui soit à l’opposé de celle de Shen Té. Ce n’est pas l’homme qu’il faut changer, par soi-même, c’est le monde : il faut nier, recréer un monde où il soit possible d’être soi-même, de l’être pleinement, avec les autres, et non contre eux. Bernard Dort. Lecture de Brecht. Paris: Seuil, 1960, p. 161 Dans le Se-Tchouan, une province reculée de la Chine, les dieux voyagent. Ils cherchent une bonne âme et, avec l’aide de Wang, le porteur d’eau, n’en trouvent qu’une, qui accepte de les loger pour la nuit : Shen Té, la prostituée. Pour la remercier, ils lui donnent de l’argent ; elle quitte son métier et s’achète un petit débit de tabac. Les ennuis commencent alors : passer de l’autre côté de la misère, c’est aussi devoir l’affronter. Misère physique, sociale. Mais aussi misère morale. Shent Té découvre aussi l’amour, et sa passion se heurte ici encore à l’appât du gain. La fresque épique des aventures de Shen Té est ponctuée d’appels désespérés à la bonté et d’explosions de colère devant la médiocrité et la passivité des humains. La pièce a été représentée pour la première fois à Zurich en 1943, en plein cœur de la seconde guerre mondiale. Une mise en scène de Roger Planchon a eu lieu en 1958 au Théâtre de la Cité de Villeurbanne. Une version en français a été filmée en 1990 par Bernard Sobel, avec Sandrine Bonnaire dans le rôle de Shen Té. Elle a été jouée au Théâtre de Gennevilliers Jean Bellorini et sa compagnie Cette Bonne âme vient prolonger notre travail sur Hugo et sur Rabelais. Chez Hugo, il y avait la problématique sociale, et chez Rabelais, l'appel du voyage. Rabelais, comme La Bonne âme, c'était déjà une quête, une recherche : une dive bouteille qui n'existe pas, de l'autre côté d'une mer qui n'existe pas non plus. Ici aussi, à l'horizon de ce Se-Tchouan si violent, il y a l'utopie d'un monde harmonieux, stable, apaisé...1 La compagnie est née en 2001 de la collaboration de Marie Ballet et Jean Bellorini sur Inconnu à cette adresse de Kressmann Taylor. Cette rencontre définit la spécificité de la compagnie : une interrogation sur les rapports de la musique et du théâtre. Jean Bellorini a réalisé trois de ses dernières créations avec le TNT de Toulouse : • Tempête sous un crâne d’après Les Misérables de Victor Hugo (créé au TGP-CDN de Saint-Denis/Théâtre du Soleil/TNT de Toulouse) en 2010, en tournée jusqu’en 2015 • Paroles Gelées d’après le Quart Livre de François Rabelais (créé au TNT de Toulouse/TGP-CDN de SaintDenis) en 2012, en tournée jusqu’en 2015 1 Ibid. • La Bonne âme du Se-Tchouan de Bertolt Brecht (créé au Théâtre National de Toulouse Midi Pyrénées/l’Odéon-Théâtre de l’Europe en 2013), en tournée jusqu’en 2016. Scénographie et lumière Jean Bellorini | costumes Macha Makeïeff | création musicale Jean Bellorini, Michalis Boliakis, Hugo Sablic | son Joan Cambon | maquillage Laurence Aué L’Arche est agent et éditeur du texte représenté. Avec Danielle Ajoret, Michalis Boliakis, Xavier Brière, François Deblock, Karyll Elgrichi, Claude Évrard, Jules Garreau, Jacques Hadjaje, Camille de La Guillonnière, Blanche Leleu, Clara Mayer, Teddy Melis, Marie Perrin, Marc Plas, Geoffroy Rondeau, Hugo Sablic, Damien Zanoly et un enfant. Intentions de mise en scène Il nous faut rêver à un spectacle simple, drôle, et aussi terrible. Le rythme ne sera pas un rythme militaire mais plutôt comme le rythme d’une danse, d’un bal, conscient d’une grâce légère et d’une force violente en même temps. Entre la fable et le réel, du rêve au cauchemar, de l’espoir à la peur... ou plutôt l’inverse. La musique d’un monde onirique et le bruit de la réalité. Des chansons originales et populaires. Des comédiensmusiciens-chanteurs-ouvriers du plateau... au service de la fable. La présence d’un pianiste fou et grandiose, virtuose. Accordéons, cordes, percussions. Des chansons et un esprit de fanfare porté par la troupe de 18 comédiens et un pianiste virtuose. Jean Bellorini, juin 2012. Une mise en scène paradoxale Bellorini, en cherchant sans doute à se rapprocher de ce que voulait Brecht lui-même, propose ici une mise en scène qui peut déconcerter le spectateur en ceci qu’elle peut paraître populaire, festive, presque « ordinaire », mais qu’elle revêt en même temps un caractère lyrique et humaniste, en mettant en lumière la tonalité et le sens profond de la pièce. Le spectateur a dès lors une place active dans la construction du sens ; il garde l’esprit en éveil, et ses émotions sont fortement sollicitées. La musique, qui est indissociable de la mise en scène, joue un rôle important dans la révélation de l’aspect poétique de ce théâtre, et dans l’ouverture de l’imaginaire. Une écriture musicale, une mise en scène orchestrée « Il faut avoir un côté chef d'orchestre. Je crois que c'est une position nécessaire. Mais tout naît de propositions, d'accidents, d'essais, d'erreurs. à moi d'attraper au vol ce qui ne serait pas arrivé si je l'avais proposé avant. Chez nous, la recherche est beaucoup liée à la musique, au chant, à la rencontre chorale. »2 La musique est une musique originale, composée sur les paroles des chansons de Brecht. Bellorini a choisi un pianiste virtuose et des percussions – qui sont un peu comme le battement de cœur du spectacle. Le metteur en scène fait appel à des univers musicaux très contrastés, à l’image de sa mise en scène elle-même : il choisit par exemple un arrangement d'une berceuse pour 18 xylophones, et La Tempête de Beethoven. Les instruments utilisés sont eux aussi très divers : piano, accordéons, percussions, xylophones, et même un instrument fabriqué de toutes pièces... Les chants (chansons entières ou bribes de vers chantés au beau milieu d’une scène) ne sont pas sans rappeler les interventions du chœur antique, qui s’adresse directement au public, et s’associe à Shen té pour véhiculer l’histoire. Féminin et masculin Certains rôles féminins (la propriétaire Mi Tsu ou la veuve Shin) sont interprétés par des acteurs masculins ; Shen Té, personnage féminin, joue face aux autres personnages le rôle d’un homme, Shui Ta (son cousin imaginaire) et va ainsi se retrouver face à des femmes jouées par des hommes. Etrange mise en abîme, mélange des sexes et des identités, qui bouscule les codes, et ne cesse d’interroger le spectateur. Pour que toutes ces prétendues données puissent devenir objet de doute, il faudrait cultiver cette manière de regarder les choses en étranger, comme le grand Galilée considérant les oscillations d’un lustre. Galilée était stupéfait de ces balancements, comme s’il ne s’y attendait pas et n’y comprenait rien ; c’est de cette façon qu’il découvrit ensuite leurs lois. Voilà le regard, aussi inconfortable que productif, que doit provoquer le théâtre par les représentations qu’il donne de la vie en société. Il doit forcer son public à s’étonner, et ce sera le cas grâce à une technique qui distancie et rend étrange ce qui était familier. Bertolt Brecht. Petit organon pour le théâtre. Trad. par B. Lortholary. Paris : Gallimard, 2000, p. 368-369. 2 Ibid. Notre classe en parle… : expériences de jeunes spectateurs, journal du spectateur (à transmettre par e-mail à [email protected], pour diffusion sur le site de la DAAC) Réactions des élèves à l’issue de la représentation : un mot, une phrase, un paragraphe… Mise en forme d’un article critique au sujet de la représentation Journal du spectateur : mettre par écrit, comme dans une sorte de journal intime, les émotions, réactions, réflexions engendrées par ce spectacle ; cela peut aussi prendre la forme d’une écriture d’invention (forme dialoguée, écriture poétique…) agrémenté ou non ou d’un dessin, d’une image. Extraits de presse : pour amorcer un échange critique avec les élèves Article dans le journal La Croix : Créée à Zurich en 1943, La Bonne Ame du Se-Tchouan, appartient au cycle des grandes pièces écrites par Brecht en exil – Mère Courage, Maître Puntila, La Résistible ascension d'Arturo Ui. [...] Il suffit qu'un jeune metteur en scène de 30 ans – Jean Bellorini – la revisite pour qu'elle retrouve ses couleurs de fable épique et lyrique, magnifique et bouleversante, désespérée et joyeuse. Voire de conte tragique et merveilleux. Le spectacle dure plus de trois heures. On ne les voit pas passer, incapable de résister à ce même bonheur déjà éprouvé lors des précédents spectacles de Jean Bellorini. Le bonheur de vivre des belles et grandes histoires racontées sur le mode naïf, riches d'images poétiques et de pure émotion. Ce qui n'interdit pas la réflexion. La définition du théâtre populaire ? Article dans Le Monde : « Une "Bonne Ame" un peu trop boy-scout » Le Monde.fr | 08.11.2013 à 18h37 • Mis à jour le 11.11.2013 à 11h49 | Par Fabienne Darge Bertolt Brecht n'a jamais été naïf, mais quand il commence à écrire La Bonne Ame du Se-Tchouan, en 1938, il l'est moins que jamais. Harcelé par les nazis depuis 1930, l'auteur de L'Opéra de quat'sous est en exil en Scandinavie. Il écrit coup sur coup, excusez du peu, La Vie de Galilée, Mère courage et ses enfants, La Résistible Ascension d'Arturo Ui et cette Bonne Ame, qui n'est plus si fréquemment jouée, de nos jours, et que l'on se réjouissait de retrouver, mise en scène par Jean Bellorini aux Ateliers Berthier du Théâtre de l'Odéon (avant de partir en tournée en France). On se réjouissait, car La Bonne Ame a beaucoup à nous dire, aujourd'hui. En imaginant l'histoire de Shen Té, la petite prostituée récompensée par les dieux pour sa générosité et qui fait l'expérience de l'exploitation et de l'impossibilité de changer le monde à un niveau strictement individuel, Brecht a créé une parabole d'une ironie mordante sur la manière dont la société capitaliste broie les individus, les corrode intimement, jusqu'au cœur de leurs sentiments les plus profonds. Comment faire le bien dans un monde pourri jusqu'à la moelle ? Voilà la question que pose Bertolt Brecht. On se réjouissait, aussi, que la pièce soit mise en scène par Jean Bellorini, un garçon de 32 ans qui, depuis quelques années, fait un joli bout de chemin avec son théâtre généreux et humaniste, porté par un bel esprit de troupe. Il se murmure d'ailleurs beaucoup que le ministère de la culture le verrait bien prendre la tête du Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Sur le papier, tout cela aurait dû amener cette Bonne Ame vers le paradis du théâtre, mais hélas, ce n'est pas le cas. Tout semble bien lourd et bien surligné, dans cette mise en scène qui fait des pauvres des créatures folkloriques manière Deschiens. C'est d'ailleurs Macha Makeïeff qui signe les costumes de cette production. Et les acteurs y sont d'un niveau bien inégal, prisonniers d'une forme de jeu appuyé, sans finesse. C'est dommage, parce que Karyll Elgrichi, qui joue Shen Té, ou François Deblock, qui incarne Wang, le porteur d'eau, ont indéniablement du talent et une belle présence. L'humanisme de Jean Bellorini est tout à fait respectable, surtout par les temps qui courent, empreints de cynisme. Mais il est marqué par une forme de naïveté assez éloignée de l'esprit de Brecht, qui savait que changer le monde est un vrai combat, qui se gagne aussi par l'invention de formes artistiques fortes et nouvelles. C'est ce mordant, cette dimension politique profonde, qui manquent à cette mise en scène où l'ambiguïté de la fable et du double personnage de Shen Té-Shui Ta est quand même fortement lissée. Si on voulait être un peu méchante, on se laisserait aller à dire que cette Bonne Ame est un peu boy-scout. Et donc pas très brechtienne. Reportage télévisuel disponible sur le site : http://www.teletoulouse.fr/Mstr.php?lk=468gLi4788z020&Em=11&Vd=3165 Emissions à écouter sur franceinter.fr : le Masque et la plume http://www.franceinter.fr/emission-le-masque-et-la-plumepour-la-1e-fois-un-masque-pluridisciplinaire - et l’Humeur vagabonde : http://www.franceinter.fr/emission-lhumeurvagabonde-jean-bellorini Images 1. Créations de Jean Bellorini : Tempête sous un crâne Paroles Gelées 2. La Bonne Âme du Se-Tchouan Chansons, chœurs et musique : « Le trouble des sexes » 3. Pedro Almodovar (« C'est sans doute en se référant à certaines impressions qu'on peut avoir dans l'œuvre cinématographique d'Almodovar que j'ai envie de jouer sur le vrai trouble des sexes. ») Talons aiguilles, 1991. Tout sur ma mère, 1999. Vie et œuvre de Bertolt Brecht : bref aperçu 1898 1913 1914-1916 1916 1917 1918 Événements 10 février : naissance à Augsbourg, en Souabe bavaroise, dans une famille bourgeoise (son père exerce une fonction dirigeante dans une fabrique de papier). Père catholique, mère protestante. Il sera élevé dans la religion protestante. A 15 ans, écrit une pièce en un acte, La Bible, où il évoque la guerre de Trente ans (1618-1648). La Bible sera La Bible une référence majeure de son oeuvre. Quelques œuvres Brecht écrit des poèmes patriotiques, publiés à Augsbourg et Munich, qui font l'éloge de l'héroïsme militaire. A partir de 1916, sa vision de la guerre change. Il rejette l'idéalisme au profit du matérialisme. Juin. Dans une dissertation, "Dulce et decorum est pro patria mori", il critique la notion de mort héroïque et s'en prend à la propagande. Désormais, la guerre sera le thème majeur de son oeuvre. Compose les premiers Sermons domestiques. A l'automne, Brecht entreprend des études de philosophie, puis de médecine (mars 1918), à l'Université de Munich. Il met tout en oeuvre pour échapper au front. A Munich. Ne s'intéresse pas à la guerre. Enthousiasmé par le théâtre de Frank Wedekind. Baal. Rédaction de Tambours dans la nuit, Dans la jungle des villes. Octobre. Mobilisé, il échappe au front. Garde-malades dans un hôpital militaire d'Augsbourg, il bénéficie d'un traitement privilégié. 1919 Nombreux textes écrits entre 1918 et 1923. 15 Janvier : assassinat de Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg. Brecht s'intéresse de très près au La noce chez les petits-bourgeois et autres pièces en un acte. mouvement spartakiste. Celui-ci sera violemment réprimé, notamment à Munich et Augsbourg, avec l'aide des corps francs (unités de volontaires). L'actualité fournit à Brecht les matériaux pour une pièce politique : Spartakus (Tambours dans la nuit). Toutes les oeuvres de cette époque cherchent à réfléchir la situation nouvelle de l'individu et de la civilisation après la sauvagerie de la première guerre mondiale. 1920 1922 Juillet : naissance de son fils Frank (Paula Banholzer). Entre Augsbourg, Munich et Berlin. A Munich, il anime des cabarets et fréquente l'humoriste Karl Valentin. 13 novembre : reçoit le Prix Kleist pour ses pièces Tambours dans la nuit (Spartakus), Baal et Dans la jungle des villes. Première à Munich de Dans la jungle des villes 1923 "Mahagonny ("acajou" - les chemises brunes) arrive, je pars." Brecht quitte Munich. 1924 Naissance de sa fille Hanne (Marianne Zoff). Installation définitive à Berlin (dramaturge au Deutsches Theater). Il vit avec Hélène Weigel, qu'il épousera Homme pour homme (achevé en 1925). en 1929, et dont il a un enfant, Stefan. 1925 1926 Novembre : rencontre Elisabeth Hauptmann. Rencontre avec le dessinateur et peintre Georges Grosz Commence à lire Marx. Première d' Homme pour homme (25 septembre). 1927 Printemps : rencontre le compositeur Kurt Weill (1900-1950), avec qui il travaille sur les Chants de Songspiel Mahagonny (avec Kurt Weill, à partir des Sermons domestiques), Mahagonny ("Songspiel Mahagonny"). oeuvre créée à Baden-Baden le 17 juillet 1927. Début de la collaboration avec le metteur en scène Erwin Piscator (notamment à partir des Aventures du brave soldat Chveïk). 1928-1929 1930 1932 1933-1939 1935 Brecht met en place un "comité de rédaction" composé d'Elisabeth Hauptmann, Margarete Steffin, Emil Burri et Slatan Dudow. La plupart de ses oeuvres seront écrites en collaboration. Encouragé par le philosophe Walter Benjamin, Brecht approfondit l'œuvre de Marx. Élaboration progressive L'opéra de quat'sous (31 août 1928), sur une musique de Kurt Weill. de la théorie du théâtre épique. Naissance de sa fille Barbara (Helene Weigel). (9 mars) Création à Leipzig de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny (musique de Kurt Weill). Scandale. Amitié avec Margarete Steffin Création à Berlin de La mère 30 janvier : Hitler devenu chancelier. Brecht décide, comme Weill, Eisler, et tant d'autres, de s'exiler.Il quitte Berlin le 28 février (lendemain de l'incendie du Reichstag). Ses oeuvres sont interdites et brûlées (le 10 mai 1933) par les nazis. Déchu de la nationalité allemande, il vivra successivement à Prague, Vienne, Paris, Zurich, s'installe à Copenhague (1933-1939), puis (1939) en Suède. Au retour de Moscou, il écrit Cinq difficultés pour écrire la vérité. 1937 Ecrit Le cercle de craie caucasien, Grand-peur et misère du Troisième Reich (représenté partiellement en 1938). 1939 Séjour en Suède (Lidingö), jusqu'en avril 1940, puis en Finlande. Sainte Jeanne des Abattoirs Le Roman de quat'sous (1934) La vie de Galilée (première version) La Bonne Âme du Se-Tchouan Achève Mère Courage et ses enfants 1940 1940-1945 En Finlande. (1940) Maître Puntila et son valet Matti (écrit en Finlande) (1941) La résistible ascension d'Arturo Ui (écrit avec Margarete Steffin) (1943) Schweyk dans la deuxième guerre mondiale (musique de Hanns Eisler, première représentation en 1958) (1943) Première de La bonne âme de Se-Tchouan, à Zurich. De La vie de Galilée, à Zurich également. (1944) Le Cercle de craie caucasien, première représentation en allemand en 1954 (mise en scène de Brecht). Brecht, sa famille, Ruth Berlau et Margarete Steffin quittent la Finlande (mai 1941) pour les Etats-Unis. Margarete Steffin meurt en route, à Moscou (juin). Brecht s'installe aux États-Unis (à Santa Monica, près de Hollywood). Rencontre, entre autres, Charlie Chaplin. Rencontre d'autres émigrés allemands (Fritz Lang, Schönberg, Thomas Mann, Adorno, Piscator, Grosz, etc.). 1947 1948 1949 1949 1943 (13 novembre) : Mort de son fils Frank sur le front russe. 31 juillet : première de La vie de Galilée à Beverley Hills. 30 octobre : Brecht comparaît devant la Commission des activités anti-américaines (institution-clé du maccarthysme), à Washington. Le lendemain, il quitte les États-Unis pour la Suisse. En Suisse (Zurich). Envisage un moment de s'installer en Autriche, mais s'installe finalement à Berlin-Est Petit organon pour le théâtre (juin 1949). A Berlin-Est, fondation par Brecht et Hélène Weigel du Berliner Ensemble. Relations contradictoires avec le Première de Mère courage à Berlin (Deutsches Theatre). gouvernement est-allemand. Vitrine du régime, le Berliner Ensemble travaille suivant une esthétique à Ecrit Les jours de la Commune (première représentation en 1957) l'opposé du réalisme socialiste. Le bureau central du SED (Sozialistiche Einheit Partei) supprime les oeuvres de Brecht des ouvrages destinés à l'enseignement secondaire. 1953 Soulèvement populaire à Berlin-Est. Brecht envoie une lettre aux autorités. Elle sera publiée, mais partiellement, dans le journal du parti communiste. 1954 19 mars : inauguration du théâtre Am Schiffbauerdamm (avec Dom Juan de Molière). 1955 1956 Juin : Le Berliner Ensemble à Paris, au Festival International de Théâtre (Mère Courage et La cruche cassée de Kleist). Grand succès. Nombreux articles de Roland Barthes et Bernard Dort à son propos dans la revue Théâtre populaire. Nouvelle tournée à Paris du Berliner Ensemble (Le cercle de craie caucasien et Mère Courage). Le 14 août, à Berlin-Est, Brecht meurt d'un infarctus. Mise en voix : citations extraites de la pièce, à dire, écouter, faire circuler… « Il paraît que ça donne grand souci au Ciel, toutes ces plaintes qui s’élèvent jusqu’à lui. » p.9 « Plus personne ne craint les dieux, voilà la vérité, la vérité toute nue, et vous ne voulez pas la voir en face. » p.12 « Nous aimons bien regarder les gens. D’ailleurs c’est pour cela que nous sommes là. » p.15 « Vous ne savez pas du tout ce qui est grave, puisque pour vous tout va bien. » p.20 « Elle n’a aucun droit mais elle a faim : c’est encore plus important. » p.24 « Avant j’croyais qu’l’intelligence me servirait. Moi j’étais optimiste quand j’étais jeune. » p.29 « Ce n’est pas pareil, le temps, quand on est à l’intérieur au frais ou quand on est dehors dans la poussière. » p.37 « Je ne suis pas inhumaine, mais il faut bien que je prenne quelques précautions. » p.39 « L’un de nous, au moins, doit s’élever au dessus de toute cette misère. Un homme doit pouvoir s’élever au-dessus de nous tous. » p.63-64 « Et pourquoi les dieux ne feraient-ils pas une guerre, Avec des bombardiers, des tanks, des destroyers ? » p.64 « Les temps sont effrayants, cette ville est un enfer, mais avec nos griffes, nous nous hissons jusqu’en haut du mur lisse. » p.72 « Je veux aller avec celui que j’aime. Je ne veux pas compter ce que ça coûte. Je ne veux pas réfléchir pour savoir si c’est bien. Je ne veux pas savoir s’il m’aime. Je veux aller avec celui que j’aime. » p.79 « Ne laisser personne se perdre, et soi-même non plus. Faire le bonheur de chacun, et de soi-même aussi, tel est le bien. » p.80 « Plus grave est la situation, meilleure se montre la bonne âme. La souffrance purifie ! » p.92 « Du calme, maintenant, marchons lentement pour ne pas attirer l’attention, comme si de rien n’était… » p.96 « On n’oublie pas facilement une bonne âme. Il n’y en a pas beaucoup. » p.118 « Nous n’avons trouvé que peu de bonnes âmes et si nous en trouvions, elles vivaient dans des conditions indignes d’un être humain. » p.126 « Le monde est inhabitable, vous devez en convenir ! » p.126 « Je n’en peux plus. Je vais tout vous expliquer. Si l’on évacue la salle et qu’il ne reste que les juges, je ferai un aveu. » p.134 « Il y a quelque chose qui cloche dans votre monde. Pourquoi La méchanceté est-elle récompensée et pourquoi ceux qui font le bien Sont-ils sévèrement punis ? » p.135 « Nous-mêmes, tout dépités, nous voyons – quelle misère ! Le rideau refermé et les questions ouvertes. » p.138 Bertolt BRECHT, La Bonne Âme du Se-Tchouan, texte français de Marie-Paule Ramo , L’Arche éditeur, 1956. Emilie Jouanel, décembre 2014.
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