Etats-Unis, la fin des WASP
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Etats-Unis, la fin des WASP
Etats-Unis, la fin des WASP ? Recherches et écriture: LEPAC / Jean-Christophe Victor Réalisation : Didier Ozil Graphisme : Anne Criou Diffusion sur Arte le 15.09.2009 Edité le : 11-09-09 Dernière mise à jour le : 11-09-09 En 2008, les américains ont porté un afro-américain à la Maison Blanche, en 2028, un hispanique sera élu. Pourquoi ? 1. Evolution de la fécondité aux Etats-Unis Voici une carte mesurant la fécondité aux EtatsUnis, par Etat fédéré. Le seuil de renouvellement de la population, soit 2,1 enfants par femme, en moyenne, a été à nouveau atteint en 2006. Il avait chuté dans les années 60 passant, en 1972, sous la barre des 2 enfants par femme, sous l’effet de plusieurs facteurs : accès aux études supérieures pour plus de femmes, accès aux moyens contraceptifs, traumatisme de la guerre du Vietnam…. 2. Une démographie dynamique La remontée de la fécondité au cours de la dernière génération, marque une rupture avec la quasitotalité des autres pays développés, où la fécondité a chuté sous le seuil de remplacement des générations : on est à 1,3 enfant par femme au Japon, à 1,5 en moyenne dans l’Union Européenne. Le graphique permet de comparer l'évolution de la démographie des Etats-Unis avec celle de l’Union Européenne : Le dessous des cartes : Etats-Unis, la fin des WASP ? - La courbe du haut nous montre le plafonnement de la population de l’Union Européenne à 27 Etats à partir de 2015. Puis sa baisse relative. - Tandis que la courbe américaine poursuit sa montée. 3. Des disparités démographiques importantes Ce dynamisme de la démographie américaine abrite de grandes variations à l’intérieur même du pays : de 1,6 dans le Vermont, ce qui est peu, à 2,5 dans l’Utah, ce qui est beaucoup. - Le taux de fécondité est plutôt faible au nord-est des États-Unis, où la population blanche est majoritaire, dans une bande allant du Maine à la Virginie occidentale. - Il a chuté énormément en Louisiane, à la suite des répercussions sociales et économiques pour les habitants de cet Etat, après le cyclone Katrina de 2005. 4. La fécondité élevée des états « hispaniques » Le taux de fécondité est nettement plus élevé à proximité de la frontière mexicaine, du fait de la présence des Hispaniques : il s’agit des Etats du Nevada, de l'Arizona, du Texas, de la Californie et 1 du Nouveau Mexique. Sur l’ensemble des États-Unis, l’indice de fécondité des Hispaniques s’élève en moyenne à 2,9 enfants par femme, contre 1,9 chez les non Hispaniques en moyenne. Donc, on comprend bien que le dynamisme de la démographie américaine est essentiellement porté par le taux de fécondité des Hispaniques, qui forment aujourd’hui la majorité des immigrés arrivant sur le territoire américain. 5. L’apport démographique des migrations qu’à Washington, du fait de leur faible croissance démographique dans la capitale des États-Unis. Le deuxième grand curseur de l’évolution démographique de ce pays est la politique migratoire nationale, qui vient compléter le solde naturel. L’immigration représente aujourd’hui 40 % de la croissance démographique américaine. Ou bien, pour le dire autrement, sur cent nouveaux habitants aux Etats-Unis, 60 naissent sur le territoire et 40 sont des immigrés réguliers ou irréguliers. Et si l’on ajoute les descendants d’immigrés nés sur le territoire américain, l’immigration comptera pour 82% de la croissance démographique entre 2005 et 2050 dans ce pays 6. L’involution de la majorité blanche Le tableau, comparatif et prospectif, permet d’observer l’évolution de la population. Aux Etats-Unis, aujourd’hui, les Blancs sont majoritaires, ils représentent 66% de la population, mais on voit bien que la tendance est à la diminution. Ils sont déjà minoritaires dans quatre États : Hawaï, Californie, Nouveau-Mexique, Texas , ainsi Le dessous des cartes : Etats-Unis, la fin des WASP ? 2 7. La croissance rapide de la communauté hispannique Ce sont les Hispaniques qui connaîtront la croissance la plus rapide : leur nombre devrait tripler, passant de 47 millions en 2008, à 133 millions en 2050. 8. La perte de vitesse de la communauté noire Une autre tendance forte qu’il convient de repérer dans ce pays est la nouvelle démographie de la communauté noire. Les Noirs formaient jusqu’en 2003 la première minorité raciale du pays. Ils sont maintenant dépassés par les Hispaniques, car ils ont tout à la fois un taux de fécondité moyen par femme bien plus faible que les Hispaniques (2,1 contre 2,9) et ils ne bénéficient plus d’un apport migratoire massif. Leur place dans la population américaine restera donc relativement stable : 13% en 2009, 15% en 2050. Ce qui veut dire que cette communauté va passer de 41 millions de personnes en 2008 à 66 millions en 2050, sa croissance étant désormais plus faible que celle des autres groupes ethniques du pays. Le dessous des cartes : Etats-Unis, la fin des WASP ? 9. La croissance de la communauté asiatique Un autre grand groupe qui devrait croître presque aussi rapidement que la population hispanique est la communauté des Asiatiques. Ils vivent surtout dans l’ouest des Etats-Unis, ils sont 16 millions de personnes en 2008, ils seront 41 millions en 2050, leur nombre devrait donc quasiment tripler. Et la croissance de cette communauté vient surtout de l’immigration. Plus des 2/3 des Asiatiques vivant aux Etats-Unis sont nés au Japon, en Chine, au Vietnam. Il s’agit là de personnes immigrées souvent hautement qualifiées, ou hautement diplômées, et ce à la différence des Hispaniques. 10. Les « minorités » deviennent majoritaires L’inversion de la proportion entre les Blancs et les autres groupes ethniques du pays se repère au croisement des deux courbes, qui aura lieu en 2042… si les tendances actuelles bien sûr se poursuivent. Les minorités deviendront alors majoritaires aux Etats-Unis, formant 54% de la population du pays. 3 11. Une société de plus en plus diverse Donc, la population américaine devient de moins en moins blanche, et de plus en plus diverse : 34% de la population des États-Unis se réclame d'une minorité raciale, c’est un pourcentage en nette augmentation, 11% par rapport à l’année du dernier recensement aux Etats-Unis, l’an 2000. D’autre part, de plus en plus d’Américains se classent eux-mêmes dans la catégorie multiraciale : c’est-à-dire appartenant à deux « races » ou plus. C’est d’ailleurs une catégorie nouvelle créée lors du recensement de 2000. Il y a 5 millions de multiraciaux à l’heure actuelle, et leur nombre devrait atteindre 16 millions en 2050, preuve du métissage accru de la société américaine. Toutes ces évolutions de la population des Etats- Unis ont des effets sur le marché américain, à la fois en termes de main d’œuvre et d’habitudes de consommation. La main d’œuvre immigrée occupe une place de plus en plus grande dans le fonctionnement de l’économie américaine : la plupart des Hispaniques restent à des niveaux d'emploi moyens. Un très grand nombre – Mexicains pour la plupart – continuent de travailler clandestinement dans l’agriculture ou le bâtiment, des secteurs clés qui ne peuvent se passer de cette main d’œuvre bon marché. Les Asiatiques de leur côté connaissent une amélioration de leur situation sociale, ils sont mieux intégrés sur le marché du travail, ou dans les universités où ils arrivent facilement en haut de l’échelle des diplômes. Ces classes moyennes issues de l’immigration sont un marché pour les entreprises qui s’adaptent aux goûts de ces nouveaux consommateurs, en repérant les habitudes culturelles de chaque communauté. D’ailleurs, les immigrés eux-mêmes jouent un rôle actif, par la commercialisation de produits et de services venant de leur pays d’origine, créant ainsi un véritable business de la nostalgie. Démographie, économie, cultures, langues. Mais il y a aussi le domaine strictement politique, électoral. Les populations immigrées joueront à l’avenir un rôle croissant à la fois en tant qu’électeurs et en tant que personnalités politiques éligibles. Certains Etats à forte concentration d’immigrés, tel que la Californie, n’ont déjà plus une majorité d’électeurs blancs et deviennent donc des Etats clefs, notamment pour les élections présidentielles, car ils peuvent faire basculer les résultats dans un sens ou dans l’autre. Désormais, tous les candidats devront tenir compte de cette nouvelle carte électorale, pour capter ce nouvel électorat. A cet égard, l’élection présidentielle de 2008 a été un révélateur du poids politique croissant des minorités, à la fois en termes d’électeurs et d’élus, puisque pour la première fois de leur histoire, les Etats-Unis ont élu un président métis, fils d’un Kenyan noir et d’une Américaine blanche. En mai 2009, pour la première fois aussi une femme, juge, d’origine hispanique, a été nommée à la Cour Suprême des Etats Unis, c'est-à-dire juge à vie. Pour l’élection présidentielle de 2028, les minorités devraient pour la première fois former la majorité. Un Président hispanique pourrait être élu, et pourquoi pas une femme d’origine hispanique, devenant Présidente des Etats Unis. Et bien le 21ème siècle sera donc aux Etats Unis celui de la fin de la domination des WASP, les Protestants Anglo Saxons Blancs. Le dessous des cartes : Etats-Unis, la fin des WASP ? 4