Opticiens, comment analyser votre compte de résultat
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Opticiens, comment analyser votre compte de résultat
Article 2 : analyse du compte de résultat article destiné à l'opticien lunetier 18 août 1997 LES DOCUMENTS COMPTABLES : UN ATOUT POUR RÉUSSIR INTRODUCTION GÉNÉRALE Aimez-vous la comptabilité ? L'opticien lunetier établit chaque année un compte de résultat et un bilan comptable. Cette obligation légale est généralement perçue comme une contrainte, et il n'est pas rare d'entendre dire : "Il faut le faire mais ça ne sert à rien". Les opticiens méconnaissent en effet trop souvent la signification des documents comptables. Notre objectif est de proposer une méthode simple et efficace d'analyse financière, afin de réconcilier l’opticien avec la comptabilité. Le mois dernier, nous avons proposé des outils simples pour comprendre et exploiter le bilan comptable. Ce dossier vous avait intéressé ? Ce mois ci, nous poursuivons en vous livrant les clefs d’analyse du second des deux documents annuels : le compte de résultat. L'opticien lunetier peut trouver dans ce document des informations très utiles : c’est à partir du compte de résultat que sera déterminé le montant de l’impôt sur les bénéfices à payer, et que l’on peut analyser et améliorer la rentabilité de son magasin, tout en répondant toujours mieux aux attentes de ses clients. Ayez sous les yeux vos documents comptables Comme le mois dernier, nous mettons en garde l’opticien peu habitué à utiliser le vocabulaire et les concepts comptables contre un risque de découragement à la première lecture superficielle de ce dossier. Suivez nos conseils et nos exemples de calculs en ayant sous les yeux les comptes du magasin de la dernière année. Beaucoup de mots abstraits ou barbares comme "charges externes", "produits financiers", "résultat net" etc. trouveront alors immédiatement une signification concrète. Nous ne présentons aucune formule qui ne soit possible à un opticien de calculer à partir des documents comptables que lui fournit son expert comptable ou son centre de gestion, ou encore des exemplaires préparés chaque année pour l'administration fiscale. Par ailleurs, certains comptables fournissent directement à l’opticien le tableau des Soldes Intermédiaires de Gestion dont nous donnons dans ce dossier l’interprétation. Nous permettons à ceux qui n’ont pas la chance de l’obtenir, de le réaliser par eux même. Olivier Vidal, 08/01/2010, 1 L'ANALYSE DU COMPTE DE RÉSULTAT L’analyse du compte de résultat permet de mesurer la performance commerciale du magasin, et d’en expliquer l’évolution Le compte de résultat permet de calculer (comme son nom l'indique) le résultat annuel du magasin (profit ou perte) en faisant une soustraction entre l'ensemble des produits (pour un opticien, essentiellement les ventes) et des charges (de natures beaucoup plus diverses, mais pour simplifier, essentiellement les achats) de l’année. Le compte de résultat se présente donc sous forme de tableau en deux colonnes : une colonne liste les produits, une autre les charges. La question essentielle que doit se poser l’opticien face à son compte de résultat est : comment expliquer l’évolution du résultat d'une année sur l'autre. Par exemple, si le résultat augmente, à quoi cela est-il dû ? Est-ce dû à une augmentation des ventes ? A la cession d'une machine ? Au licenciement d'un salarié ? A une meilleure gestion des stocks ? etc. Parfois, l’évolution est inévitable. Elle peut être liée à une augmentation des taxes décidée par l'état, une augmentation des charges salariales suite à l'embauche d'un salarié, une augmentation du loyer suite à un agrandissement... D'autres fois, elle résulte de dérapages dont on ne prend pas conscience au quotidien mais qu’une analyse pointilleuse permet de mettre en évidence : une augmentation des achats plus rapide que des ventes, une augmentation des stocks invendus, une augmentation des frais de publicité disproportionnée par rapport à l'augmentation des ventes qu'ils suscitent, etc. Dans tous ces cas, l'interprétation de cette évolution conduit à la prise des futures décisions de gestion. Si le résultat augmente grâce à une augmentation des ventes, c'est bon signe, la clientèle augmente. Cela se reproduira-t-il dans le futur ? Si le résultat augmente parce que l’opticien a vendu une machine sans en racheter une autre, ce n'est pas nécessairement une bonne information pour le long terme. Non seulement c'est un événement exceptionnel (je ne revendrai pas tous les ans mes machines), mais en plus, je diminue mon capital productif (avec une machine en moins, je travaille moins, ou moins bien, ou moins vite). L’analyse du compte de résultat permet donc de répondre à des questions très diverses comme par exemple : Comment évoluent les ventes ? Quelle est la part, et comment évoluent les différents postes de dépenses par rapport au total des charges ? Quelles sont les incidences fiscales de mes choix de gestion ? Ma trésorerie génère-t-elle des intérêts ? Combien me coûtent mes emprunts ? La variation des stocks influence-t-elle mon résultat ? Des décisions de gestion me permettent-elles de diminuer mes impôts ? Des événements exceptionnels influencent-ils mon résultat ? Comment se situe ma marge commerciale par rapport à la concurrence ? DÉMARCHE D'ANALYSE DU COMPTE DE RÉSULTAT La liste des comptes est longue, et il est pratique de calculer des soldes synthétiques : les Soldes Intermédiaires de Gestion L'analyse du compte de résultat consiste donc essentiellement à, premièrement, comparer sur plusieurs années l'évolution des produits et charges, et deuxièmement, interpréter les évolutions. Une première analyse, fastidieuse et peu pertinente, consiste à regarder l'évolution compte par compte d'une année sur l'autre. Analyse fastidieuse, car le détail des comptes prend un minimum de quatre ou cinq pages. Analyse peu pertinente car elle ne permet pas de dégager des opinions synthétiques. Il est plus intéressant de regrouper les produits ou les charges en fonction de leur nature. Par exemple, pour se faire une idée sur la gestion du magasin, l’opticien regardera d’une Olivier Vidal, 08/01/2010, 2 année sur l’autre l’évolution de la somme de tous les salaires, plutôt que le salaire individuel de chaque salarié. Ce n’est que s'il y a une variation importante que l’on ira chercher plus de détails. Comment regrouper les comptes de manière parlante ? Les financiers ont déterminé des soldes intermédiaires (que l'on appelle SIG : Soldes Intermédiaires de Gestion) qui peuvent guider l’opticien dans son analyse. Nous proposons donc concrètement de réaliser un tableau de ces principaux soldes, tableau à remplir chaque année afin de permettre un suivi efficace de leur évolution. DÉTERMINATION DES SOLDES INTERMÉDIAIRES DE GESTION Les comptes sont regroupés en trois catégories. Ils permettent de distinguer la performance de l’activité commerciale réelle du magasin, des résultats liés aux aspects financiers et exceptionnels. Le compte de résultat est structuré de manière logique. On distingue trois grandes catégories de charges et de produits : ceux qui concernent l'exploitation proprement dite du magasin (les ventes, les achats de lunettes...), ceux qui concernent la gestion purement financière de l’entreprise (placements, emprunts), et ceux qui sont de nature plus exceptionnelle (vente d’une machine...). L’intérêt de cette distinction est facilement compréhensible : une mauvaise gestion financière de l’entreprise ne signifie pas pour autant que l’opticien ne soit pas performant au niveau commercial, au niveau du contact avec ses clients, au niveau des relations avec ses fournisseurs... On comprend dès lors le soucis du comptable qui calcule trois « sous-résultats » distincts : le résultat d'exploitation, le résultat financier, et le résultat exceptionnel. Regardez vos comptes : cette classification des charges et des produits apparaît très clairement. RÉSULTAT D'EXPLOITATION + RÉSULTAT FINANCIER + RÉSULTAT EXCEPTIONNEL RÉSULTAT AVANT IMPÔT (bénéfice ou perte) - impôt sur les sociétés RÉSULTAT NET Des trois « sous-résultats » ainsi déterminés, lequel intéresse le plus l’opticien ? Bien sur, chacun a son importance et concourt à la détermination du résultat global. Mais l’opticien portera une attention particulière à l’évolution de son résultat d’exploitation. Nous allons donc à nouveau le décomposer afin de préciser son analyse. ANALYSE DU RÉSULTAT D’EXPLOITATION En décomposant le résultat à partir des regroupements de charges tels qu’ils apparaissent dans le compte de résultat, on détermine 5 soldes intermédiaires dont nous donnons la signification Le résultat d’exploitation découle de l'activité proprement dite du magasin. Nous allons donc chercher à identifier quels sont les facteurs qui jouent un rôle prépondérant dans sa formation. Nous avons vu que le résultat se calcule en retranchant les « charges d’exploitation » aux « produits d’exploitation ». Pour un opticien, les produits sont constitués des ventes. On parle aussi de Chiffre d’Affaires. Les charges, elles, sont de nature plus diverses : achats de montures, de verres, factures d’eau, d’électricité, amortissement des machines, du mobilier, salaires, taxes diverses etc. Olivier Vidal, 08/01/2010, 3 De manière synthétique et logique, le comptable distingue généralement 5 grandes catégories de charges : • les achats de marchandises (On appelle marchandises les produits achetés destinés à être revendus, éventuellement après façonnage ou montage : montures, verres, lentilles, produits d’entretien, accessoires...) • les autres biens ou de services achetés à des fournisseurs ou prestataires extérieurs à l’entreprise. On parle aussi de consommations intermédiaires, ou des « autres charges externes » : eau, électricité, loyer, honoraires, publicité, assurance... • les impôts et taxes autres que l’impôt sur le bénéfice (taxe d’apprentissage, taxe professionnelle...) • les charges salariales : salaires et charges sociales qui y sont liées • les amortissements du matériel. Les charges d’amortissement ont un caractère particulier que nous ne voulons pas développer ici, par soucis de concision. On aboutit ainsi, après quelques soustractions, à la détermination des principaux soldes intermédiaires de gestion dont nous détaillerons ensuite la signification : CHIFFRE D'AFFAIRES (1) - Achats de marchandises MARGE COMMERCIALE (2) - Consommations intermédiaires VALEUR AJOUTÉE (3) - Impôts et taxes - Salaires EXCÉDENT BRUT D’EXPLOITATION (4) - amortissements RÉSULTAT D'EXPLOITATION (5) LE CHIFFRE D'AFFAIRES L’évolution des ventes est le premier des indicateurs : il mesure le dynamisme commercial du magasin (CA = ventes de l’année) On dit que le chiffre d’affaires (CA) est un indicateur d’activité. Le CA est le total des ventes sur une période donnée. Une augmentation du CA est donc à priori un bon signe ; elle représente une augmentation de la clientèle. On peut cependant distinguer deux types d'évolution : l'évolution en valeur et l'évolution en volume. Une augmentation en valeur, c'est, pour un nombre identique de clients, une augmentation du prix moyen d'un équipement. Une telle évolution peut être due à l'inflation, et n'est donc pas un signe particulièrement positif. Cela peut encore signifier que l'opticien monte en gamme, c'est à dire qu'il vend de plus en plus cher ses produits, par exemple de plus en plus de produits de marque, ou de meilleure qualité. Il est alors intéressant de faire une étude de marché pour mieux comprendre l'évolution des goûts de la clientèle. Est-ce le quartier ou la ville qui se métamorphose ? Est-ce un phénomène de société ? Que se passe-t-il chez les concurrents ? etc. Une augmentation en volume signifie que le prix moyen d'un équipement reste stable, mais que le nombre de clients augmente. C'est à priori un signe très positif. Le magasin a bonne réputation, la publicité, ou le bouche à oreille fonctionne... Les clients sont les garants de l'avenir du magasin. Nous mettons quand même en garde (mais est-il utile de le faire ?) l’opticien de ne pas confondre chiffre d’affaires et bénéfice. Une augmentation des ventes peut très bien, du fait d’erreurs de gestion, coïncider avec une diminution du bénéfice, voire même avec un agravement des pertes. Olivier Vidal, 08/01/2010, 4 Enfin, nous conseillons à l’opticien de mesurer trois ratios simples et intéressants, permettant de relativiser l’analyse de l’activité du magasin : • CA / surface (en m²) • CA / nombre d’employés • CA / nombre de jours ouvrables Ces ratios doivent être comparés si possibles avec les performances des concurrents les plus proches. On découvrira ainsi que certains petits magasins par la taille, ou le nombre d’employés, réalisent des ventes relativement supérieures à de grands magasins trop ambitieux. Ils sont donc sur ce critère beaucoup plus performants. Indiquons de manière très générale que l’opticien moyen en France réalise approximativement 30 à 35 000 F de CA par m², et de l’ordre d’1 million de F par employé. LA MARGE COMMERCIALE Vendre ne suffit pas ; il faut chercher à maintenir ou améliorer la marge réalisée sur le produit des ventes (marge commerciale = CA - achats de marchandises) La marge commerciale (ou marge brute) est un indicateur fondamental de la performance du magasin. Car il ne suffit pas de vendre, encore faut-il être capable de dégager une marge suffisante pour couvrir les frais du magasin, et d’améliorer cette marge. On peut la calculer de manière globale sur l’année (à partir du compte de résultat), mais on peut aussi la calculer unitairement pour chaque produit vendu (ce qui devrait être facile lorsque l’opticien est informatisé) afin de mesurer la performance du produit, décider de l’ordre des commandes, et donc améliorer la gestion de ses stocks. Les calculs sous forme de taux sont sans doute plus courants et facilitent les comparaisons. Par convention, on appelle : Taux de marque : Marge Commerciale / CA Taux de marge : Marge Commerciale / prix des marchandises vendues Par exemple, un opticien a vendu pour 1 million de F de marchandises, qu’il a acheté 400 000 F. La marge est de 600 000 F. Le taux de marque est de 60%, et le taux de marge de 150%. Remarquons pour les puristes que ces calculs doivent normalement s’effectuer toujours Hors Taxe, puisque la T.V.A. est neutre pour l’opticien. C’est le client qui paye la T.V.A., et l’opticien se fait par ailleurs rembourser la T.V.A. sur ses achats. LA VALEUR AJOUTÉE La valeur ajoutée mesure la performance générale du magasin avant les salaires et les taxes (valeur ajoutée = marge commerciale - autres achats) La valeur ajoutée (VA) est une notion qui peu paraître un peu abstraite à l’opticien. C’est ce qui reste du produit des ventes après avoir déduit tous les achats, mais avant d’avoir retiré les salaires et les taxes. On dit que, pour une entreprise, la VA est la richesse que le commerçant ajoute au produit qu'il achète avant de le vendre. Cette richesse peut être réelle (le montage, le façonnage... sont des transformations réelles qui ajoutent de la valeur à la matière brute). Elle peut aussi être immatérielle (service rendu, image de marque, satisfaction...). Les économistes disent que la VA permet de rémunérer les différents acteurs qui ont participé à l’activité : le propriétaire du magasin d’une part, les salariés d’autre part, et enfin l’état qui participe (théoriquement) indirectement à toute activité (en assurant la sécurité, la formation...). Olivier Vidal, 08/01/2010, 5 Plus concrètement, une augmentation de la VA signifie que le magasin améliore sa performance générale puisque les ventes augmentent plus vite que les achats. Mais cela ne signifie pas nécessairement que ce soit le propriétaire qui en bénéficie. Tout dépend de l’évolution des salaires et des taxes. L’EXCÉDENT BRUT D’EXPLOITATION L’excédent brut d’exploitation mesure mieux que le résultat l’argent généré par l’activité (EBE = valeur ajoutée - salaires et taxes) Après avoir payés les taxes et les salaires, le magasin génère ce que l’on appelle Excédent Brut d’Exploitation (EBE). Il mesure donc l’argent disponible pour le propriétaire du magasin. (On comprend alors que les salariés et leurs syndicats soient sensibles aux augmentations de la VA, alors que les « patrons » se focalisent sur l’EBE). Très proche du résultat définitif, l’EBE est un indicateur intéressant dans la mesure où il ne tient pas compte des amortissements. Pour un opticien qui ne réalise pas de gros investissements chaque année, on peut considérer que l'EBE mesure, mieux que le bénéfice, l’argent réellement disponible dans le magasin. Par exemple, si la VA ajoutée est stable, mais l'EBE augmente, c'est que l'opticien travaille avec des machines et du mobilier presque entièrement amortis, et qu’il profite au maximum d'un matériel un peu désuet mais encore utilisable. Si cela n'est pas synonyme de pannes, de temps perdu, de mauvaise image auprès de la clientèle, c'est tant mieux. On se méfiera tout de même d’une telle performance en se posant la question de savoir si une prochaine modernisation ne s'impose pas. LE RÉSULTAT D'EXPLOITATION Le résultat d’exploitation est l’indicateur de synthèse de performance. On le compare souvent au CA Enfin, le résultat d’exploitation est le solde ultime, qui mesure ce qui reste au propriétaire après avoir prudemment estimé l'usure du matériel par des « dotations aux amortissements ». Les amortissements sont des charges particulières car elles ne donnent pas lieu à une « dépense » l’année même où elles sont comptabilisées. Elles correspondent à un étalement (purement comptable) d’un investissement important (machines, mobilier, magasin...) sur une durée arbitraire (généralement 4 ou 5 ans). En conclusion, le résultat mesuré par le comptable, qui a certaines vertus techniques et conceptuelles, s’éloigne des flux monétaires réels. L’opticien doit en être conscient. Il est intéressant de comparer le résultat d’exploitation au chiffre d’affaires. Du point de vue du propriétaire, ce taux résume la performance économique de son magasin : Taux de résultat : Résultat / CA LE RÉSULTAT FINANCIER Nous ne saurions trop conseiller à l'opticien d'être attentif à l'évolution du résultat financier Dans le compte de résultat, les charges financières (intérêts sur emprunts, agios sur découverts...) et les produits financiers (intérêts sur placement de trésorerie, escomptes accordés par les fournisseurs lorsque l’opticien paye ses factures dès réception...) occupent une place Olivier Vidal, 08/01/2010, 6 distincte. Elles ne dépendent pas de l’activité d’optique lunetterie habituelle du magasin. Il est préférable de les traiter à part lorsque l’on analyse la performance du magasin. Il ne faut pas pour autant négliger l’aspect financier de la gestion du magasin. Trop d’opticiens perdent de l’argent en conservant sur des comptes non rémunérés des montants très importants, dépassant souvent les 100 000 ou 200 000 F. En effet, la plupart des clients de l’opticien paye leurs équipements lors de la livraison, alors que l’opticien paye ses fournisseurs à crédit. Les capacités financières potentielles de l’opticien sont donc importantes, à moins qu’elles ne soient avalées (comme c’est trop souvent le cas) par des stocks pléthoriques. Une bon opticien devrait générer des produits financiers. Par ailleurs, les frais générés par des découverts fréquents peuvent très lourdement peser sur le résultat final du magasin. L’opticien doit chercher à prévoir ses variations de trésorerie, et négocier avec sa banque des conditions optimales lors des semaines ou des mois à risque. RÉSULTAT EXCEPTIONNEL Le résultat exceptionnel est peu intéressant Le résultat exceptionnel tient compte de tout ce qui n'a pas de rapport direct ni avec l'exploitation commerciale du magasin, ni avec son financement. C’est par exemple la vente d'un local, d’une machine... Par définition, le résultat exceptionnel n'est pas un indicateur significatif de la bonne santé du commerce. Il peut ponctuellement avoir une bonne (ou mauvaise) incidence sur le résultat annuel. RÉSULTAT AVANT IMPÔT Le montant des impôts payés par l’opticien dépend du compte de résultat Le compte de résultat permet de calculer le résultat avant impôt. C’est sur cette base que le FISC détermine le montant de l’impôt payé par l’opticien. Il n’est pas rare qu’il effectue certains retraitements, mais il n’en demeure pas moins que résultat comptable et résultat fiscal sont similaires. L'impôt sur les bénéfices des sociétés (IS) est payé par les opticiens qui ont opté pour une structure juridique de type S.A. ou S.A.R.L. (plus de la moitié des opticiens en France). Il est de 36% du bénéfice. Mais pour les opticiens commerçants en nom propre (ou parfois encore artisans), le résultat sera intégré dans les revenus du foyer et imposé au titre de l'impôt sur le revenu (IR). Celui-ci est calculé selon un barème progressif. Il n’est donc pas innocent de souligner qu’une décision de gestion qui influence le compte de résultat influence inévitablement le montant des impôts payés par l’opticien. Il est possible de tenter des optimisations fiscales : l’opticien peut avoir intérêt à décaler dans le temps certains achats, ou surveiller la valeur de ses stocks... afin d’agir sur le résultat avant impôt et profiter en toute légalité des opportunités fiscales. RÉSULTAT NET Pour le propriétaire du commerce, le résultat net mesure la rentabilité de son investissement commercial. Olivier Vidal, 08/01/2010, 7 Après déduction de l'impôt, le résultat net est le montant qui revient définitivement au propriétaire du commerce. C’est sa rémunération. Cette somme pourra, ou être réinvestie dans le magasin (nouveau matériel, agrandissement, réaménagement, remboursement d’emprunts...), ou être distribuée. Lorsque l’opticien, gérant d’un point de vente, n’est pas en même temps propriétaire (ou associé) du commerce, il peut y avoir des divergences d’opinion quant à l’analyse de la performance du magasin ; le propriétaire ne voit que le résultat net, alors que l’opticien gérant est plus sensible à des indicateurs de performance commerciale comme la VA, ou l’EBE. Le propriétaire mesure la rentabilité de son commerce en calculant le rapport résultat sur capitaux investis, c’est à dire : Rentabilité = résultat net / capitaux propres On trouve la valeur des capitaux propres au bilan. Dans le secteur de l’optique lunetterie, la rentabilité moyenne est de l’ordre de 14%. CONCLUSION Les différents calculs que nous vous proposons d'effectuer sont faciles à effectuer chaque année à partir du compte de résultat fourni pas l'expert comptable ou le centre agréé de gestion, voire même à partir de la liasse fiscale qui reprend en page 3 et 4 ces tableaux. Dans de nombreux cas, le comptable fournit à l’opticien un tableau des soldes intermédiaires de gestion qu’il suffit alors de savoir interpréter. Nous vous conseillons de disposer les différents soldes ou ratios dans un tableau récapitulatif qu’il est aisé d’actualiser chaque année, et dans lequel les évolutions sautent aux yeux. Nous proposons ci dessous un modèle de tableau récapitulatif que tout opticien peut établir afin de transformer les obligations comptables en outil efficace de gestion du magasin. Olivier Vidal est professeur agrégé d’économie-gestion. Il enseigne au lycée Fresnel en section BTS Optique Lunetterie depuis 1993, et anime le module « analyse financière » de la formation « cadre de magasin d’optique » du GEPS. Olivier Vidal, 08/01/2010, 8 ENCARTS LES SOLDES INTERMÉDIAIRES DE GESTION : TABLEAU RÉCAPITULATIF CHIFFRE D'AFFAIRES (1) - Achats de marchandises MARGE COMMERCIALE (2) - Consommations intermédiaires VALEUR AJOUTÉE (3) - Impôts et taxes - Salaires EXCÉDENT BRUT D’EXPLOITATION (4) - amortissements RÉSULTAT D'EXPLOITATION (5) + RÉSULTAT FINANCIER (6) + RÉSULTAT EXCEPTIONNEL (7) RÉSULTAT AVANT IMPÔT (bénéfice ou perte) (8) - impôt sur les sociétés RÉSULTAT NET (9) PEUT ON UTILISER LES DOCUMENTS COMPTABLES DANS LA GESTION QUOTIDIENNE DU MAGASIN ? Un bilan et un compte de résultat annuels ne sont pas des outils de gestion au quotidien du magasin. Ce sont des documents de synthèse qui permettent de représenter une fois par an au moins l'entreprise et son activité. Ils sont avant tout utiles pour présenter le magasin à un acteur extérieur (banquier, créancier, état...). Mais la comptabilité ne se limite pas à l'établissement de ces deux tableaux annuels. Des informations comptables plus spécifiques, établies régulièrement, peuvent être utiles à l'opticien au quotidien. On distingue en fait deux grands pans de la comptabilité : la comptabilité interne et la comptabilité externe. On appelle comptabilité interne, ou comptabilité analytique, les informations comptables qui permettent à l'entrepreneur d'analyser l'efficacité de son organisation interne. On appelle comptabilité externe, ou comptabilité générale, les informations comptables qui permettent d'élaborer des documents de synthèse. C'est la comptabilité générale qui est imposée à l'opticien et qui conduit à l'édition du bilan et du compte de résultat. Ces documents étant identiques quelle que soit l'entreprise, il a nécessairement fallu élaborer une présentation, un "langage" standardisé. La comptabilité analytique est facultative, elle est propre à chaque entreprise et ne fait pas l'objet d'une codification poussée. En pratique, c'est un ensemble d'informations confidentielles concernant des délais, des coûts de revient, des rendements... L'opticien peut ainsi se construire un tableau de bord personnalisé qu'il utilisera quotidiennement, hebdomadairement, mensuellement... La comptabilité analytique n'est pas l'objet de cet article. Le lecteur intéressé trouvera des éléments de réflexion dans l'ouvrage de Gislaine Attal, "les coûts de revient en optique lunetterie", aux éditions Médiacom-vision. STRUCTURE DU COMPTE DE RÉSULTAT Olivier Vidal, 08/01/2010, 9 Que ce soit dans la déclaration fiscale, ou dans le dossier fourni par l’expert comptable ou le centre agréé de gestion, le compte de résultat fait toujours apparaître les rubriques ci-dessous. C’est à partir de ces données que l’on calcule les soldes intermédiaires de gestion présentés dans notre dossier. CHARGES CHARGES D'EXPLOITATION Achats de marchandises Autres charges externes Salaires Impôts et taxes Dotations aux amortissements CHARGES FINANCIÈRES Intérêts des emprunts et découverts CHARGES EXCEPTIONNELLES RÉSULTAT (si bénéfice) TOTAL PRODUITS PRODUITS D'EXPLOITATION Ventes de marchandises PRODUITS FINANCIERS Intérêts des placements PRODUITS EXCEPTIONNELS RÉSULTAT (si perte) TOTAL En fin de compte, la présentation est très simple : deux colonnes, une pour les « entrées » (produits), une pour les « sorties » (charges). En faisant la différence entre le total des charges et des produits, on obtient le résultat (bénéfice si positif, perte si négatif). Une particularité de présentation est à souligner : le résultat est « remonté » dans la colonne qui permet d’équilibrer les deux totaux. C’est une convention de présentation qui fait plaisir aux comptables. TABLEAU RÉCAPITULATIF DE L'ANALYSE DU COMPTE DE RÉSULTAT L’intérêt de l’analyse du compte de résultat est d’autant plus grand que l’opticien peut mesurer l’évolution d’année en année des performances du magasin. Ce tableau est un outil précieux pour une gestion efficace. 1996 CHIFFRE D'AFFAIRES MARGE COMMERCIALE (en % du CA) VALEUR AJOUTÉE EBE RÉSULTAT D'EXPLOITATION RÉSULTAT FINANCIER RÉSULTAT EXCEPTIONNEL RÉSULTAT AVANT IMPÔT RÉSULTAT NET RENTABILITÉ ACTIVITÉ par employé ACTIVITÉ par jour Olivier Vidal, 08/01/2010, 10 1997 1998 etc. UN EXEMPLE POUR MIEUX COMPRENDRE CHARGES année 1 année 2 PRODUITS année 1 année 2 CHARGES PRODUITS D'EXPLOITATION D'EXPLOITATION Achats de 600 800 Ventes 1 700 1 900 marchandises Autres charges 300 380 externes Salaires 350 380 Impôts et taxes 15 16 Dotations aux 30 30 amortissements 15 5 PRODUITS CHARGES FINANCIÈRES FINANCIERS CHARGES PRODUITS EXCEPTIONNELLES EXCEPTIONNELS 289 390 RÉSULTAT bénéfice 1700 1 900 TOTAL 1 700 1 900 TOTAL Tous les chiffres sont en Kilo Francs (KF). On sait par ailleurs que le magasin emploie deux salariés, et qu’il ouvre 285 jours par an. Le montant des capitaux propres est de 1 200 KF l’année 1, 1 300 KF l’année 2. On sait aussi que le magasin l’année 2 a financé une très importante campagne de publicité qui explique en grande partie l’augmentation des « autres charges externes ». On estime que le prix moyen de vente d’un équipement est de 1300F. Année 1 CHIFFRE D'AFFAIRES ACTIVITÉ par employé ACTIVITÉ par jour MARGE COMMERCIALE (en % du CA) VALEUR AJOUTÉE EBE RÉSULTAT D'EXPLOITATION RÉSULTAT FINANCIER RÉSULTAT EXCEPTIONNEL RÉSULTAT AVANT IMPÔT RÉSULTAT NET RENTABILITÉ 1 700 1700/2 = 850 1700/285 =6 1 100/1700 = 65% 1 100-300 = 800 800-350-15 = 435 435-30 = 405 -15 0 390 390-(390x36%) = 249 390/1200 = 33% année 2 1900/2 1900/285 1 100/1900 1 100-380 720-380-16 324-30 289/1300 1 900 = 950 = 6,7 = 58% = 720 = 324 = 294 -5 0 289 185 = 22% Brefs commentaires : L’activité augmente d’une année sur l’autre de 12% (200/1700). C’est une augmentation très forte des ventes qui semble indiquer un très bon dynamisme du magasin et des deux salariés. La campagne publicitaire semble avoir des retombées très positives. Remarquons que le magasin vend en moyenne entre 4 et 5modèles (6000/1300) par jour l’année 1, plus de 5 l’année 2. La marge commerciale par contre reste stable en valeur, diminue de 7% en pourcentage. Cette évolution est préoccupante. Les achats (donc les prix proposés par les fournisseurs) augmentent plus vites que les ventes. Il y a là un véritable problème de gestion. La valeur ajoutée diminue pour sa part de 10% (80/800). C’est en grande partie la conséquence de la baisse de la marge commerciale. Mais la baisse est plus importante encore (10% contre 7%) du fait de la forte progression des charges externes due à l’effort intense en publicité. Olivier Vidal, 08/01/2010, 11 L’EBE diminue de 26% (111/435), car en plus de la baisse de la marge commerciale et de la valeur ajoutée, les salaires ont fortement augmenté l’année 2. Le résultat d’exploitation est positif et se maintient à un niveau élevé. Il diminue cependant de 27% dans les mêmes proportions que l’EBE, et pour les mêmes raisons. Le résultat financier s’améliore nettement. Il passe de -15KF à -5KF. On peut supposer par exemple que l’opticien a finit de rembourser un emprunt et n’a donc plus de charges d’intérêt à payer. Cette évolution financière favorable contribue très légèrement à un redressement du résultat net (qui diminue de 26% seulement, contre 27% pour le résultat d’exploitation). En conclusion, on remarque que la campagne publicitaire a eu un effet important sur les ventes. Mais son coût diminue nettement ses effets positifs sur la rentabilité du magasin. On peut penser cependant que ses effets seront durables et que le coût élevé sera amorti sur plusieurs années. Beaucoup plus préoccupant est le problème des achats de verres et de montures qui augmentent de manière très inquiétante. On s’étonnera enfin du comportement du gérant qui augmente les salaires (et peut être le sien) alors que les marges commerciales diminuent. Olivier Vidal, 08/01/2010, 12