actualite jurisprudence et doctrine - ajd

Transcription

actualite jurisprudence et doctrine - ajd
N° 26 - MARCHES n°5
En ligne sur le site www.fntp.fr / extranet le 20 janvier 2012
ISSN 1769 - 4000
ACTUALITE
JURISPRUDENCE ET DOCTRINE
- AJD L’essentiel
La présente AJD commente :
- des décisions de justice concernant :
 Les conditions de recours à un critère environnemental
 Les conséquences de la modification du dossier de consultation
 Les sanctions susceptibles d’être prononcées par le juge saisi d’un déféré préfectoral
 L’obligation de conseil de l’assureur
 La notion d’ouverture de chantier et assurance décennale
 La prise illégale d’intérêt.
- la réglementation relative à la passation des Baux Emphytéotiques Administratifs (BEA)
- une note d’information de la DGCCRF relative aux factures récapitulatives et au mode de
computation du délai de paiement dans le secteur des transports
Contacts : [email protected]
1) Conditions de recours
à un critère
environnemental pour la
prise en compte
d’objectifs de
développement durable
MARCHES PUBLICS
A la suite de l’annulation de la procédure de passation d’un marché
d’évacuation et de traitement des déchets par le juge des référés, le
Conseil d’Etat apporte les précisions suivantes :
- le recours au critère environnemental n’est pas obligatoire dans
un tel marché, même si l’article 5 du code des marchés publics
relatif à la détermination des besoins vise des objectifs de
développement durable. En effet, les critères choisis par le maître de
l’ouvrage pour l’attribution de ce marché de traitement des déchets
(prix et valeur technique) étaient suffisamment objectifs pour
sélectionner l’offre économiquement la plus avantageuse,
- l’irrégularité d’une offre s’apprécie au regard des exigences du
règlement de la consultation et non des références de l’entreprise.
En effet, l’entreprise attributaire était autorisée par arrêté préfectoral à
exercer l’activité de traitement de déchets dangereux même si elle ne
l’exerçait pas effectivement.
(Conseil d’Etat – 23 novembre 2011 – Société Communauté Urbaine de
Nice-Côte d’Azur – n° 351570).
2) Les conséquences de
la modification du
dossier de consultation
sur le délai de remise des
offres de l’information
des candidats
A la suite du recours d’un groupement dont l’offre avait été rejetée, la
Cour administrative d’appel de Nantes fournit d’intéressantes précisions :
MARCHES PUBLICS
La procédure d’attribution du marché est donc déclarée irrégulière et le
groupement indemnisé du manque à gagner.
- lorsque la modification du dossier de consultation (DCE) présente
« un caractère substantiel » le maître d’ouvrage doit laisser un
nouveau délai de 52 jours aux candidats pour remettre une offre,
- les sous-critères initialement prévus ayant été modifiés, les
entreprises auraient dû en être informées.
(Cour Administrative d’Appel de Nantes – 1er juillet 2011 – Ministre de la
Défense – n° 10NT00987).
3) Le juge administratif
dispose désormais d’un
large choix de sanctions
en cas de déféré
préfectoral
MARCHES PUBLICS
Le déféré préfectoral qui autorise le Préfet à saisir le juge administratif
d’une demande d’annulation des marchés des collectivités territoriales
relevait du recours pour excès de pouvoir. Le juge ne pouvait jusqu’à
maintenant qu’annuler ou refuser l’annulation de ces marchés.
Le Conseil d’Etat juge que ce déféré est un recours de plein contentieux.
Désormais, le juge administratif peut prononcer d’autres sanctions
notamment la résiliation du contrat, la modification de certaines clauses,
la poursuite de son exécution.
(Conseil d’Etat – 23 décembre 2011 – Ministre de l’Intérieur –
n° 348647).
4) L’assureur doit
reproduire in extenso les
articles du code des
assurances sur le délai
de prescription de deux
ans
Une société chargée de poser des pavés pour une commune est
condamnée à lui verser des indemnités, suite à des désordres survenus
quelques années plus tard. La société sollicite alors la garantie de son
assureur, qui la lui refuse pour cause de prescription. La société saisit le
juge.
2
ASSURANCES
La Cour d'appel de Paris rejette sa demande pour cause de prescription,
relevant que les conditions générales du contrat d'assurance
mentionnent que « toutes actions dérivant du contrat d'assurance sont
prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance
(L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances) ». Pour les juges, cette
mention est suffisante pour informer l'assuré sur la prescription biennale.
La Cour censure l'arrêt, considérant que le contrat précité « qui fait
mention du délai biennal et des articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des
assurances relatif au mode d'interruption de la prescription, donne une
information insuffisante à l'assuré ».
La Cour de cassation rappelle ici que l'assureur doit reproduire in
extenso dans le contrat d’assurance les articles du code des
assurances relatifs à la prescription pour pouvoir opposer cette
prescription à son assuré.
(Cour de cassation – 3ème civ – 16 novembre 2011 n° 10-25246)
Rappel
Article L114-1 du code des assurances
« Toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par
deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.
Toutefois, ce délai ne court :
1° En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le
risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance ;
2° En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu
connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque-là.
Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un
tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé
une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce
dernier… »
Article L114-2 du code des assurances
« La prescription est interrompue par une des causes ordinaires
d'interruption de la prescription et par la désignation d'experts à la suite
d'un sinistre. L'interruption de la prescription de l'action peut, en outre,
résulter de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception
adressée par l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en
paiement de la prime et par l'assuré à l'assureur en ce qui concerne le
règlement de l'indemnité ».
5) La notion
« d’ouverture de
chantier » s’entend
comme le
commencement effectif
des travaux
Les contrats d’assurance des constructeurs pour les ouvrages soumis à
assurance décennale obligatoire sont soumis à des clauses types
prévues par le code des assurances.
ASSURANCES
La Cour d’appel en avait déduit que la garantie devait prendre effet en
référence à la date de la DROC, sans qu’il puisse être fait référence à la
date de commencement des travaux ou à la date de formation du
contrat.
Un arrêt de de la Cour de cassation vient de se prononcer sur les
conditions de prise d’effet de l’assurance. Dans cette affaire, la police du
maître d’œuvre stipulait que les travaux couverts étaient ceux qui
auraient « fait l’objet d’une déclaration règlementaire d’ouverture de
chantier (DROC) pendant la période de validité du contrat ».
La Cour de cassation a réformé cette décision aux motifs que les
dispositions des articles L. 241 et A. 243 du code des assurances et les
clauses types applicables au contrat d'assurance figurant à l'annexe 1 de
cet article sont d'ordre public.
3
Elle a jugé que l'assurance de responsabilité couvre les travaux ayant
fait l'objet d'une « ouverture de chantier » pendant la période de validité
du contrat d'assurance, et que cette notion s'entend comme le
commencement effectif des travaux confiés à l'assuré.
(Cour de cassation – 3ème civ – 16 novembre 2011 n° 10-24517).
6) La prise illégale
d’intérêt et la notion
d’intérêt indirect et moral
MARCHES PUBLICS
Le délit de prise illégale d’intérêt est défini à l’article L. 432-12 du code
pénal :
« Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée
d'une mission de service public ou par une personne investie d'un
mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou
indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une
opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge
d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement,
est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende ».
La chambre criminelle de la Cour de cassation a adopté une
interprétation extensive de la notion d’intérêt, considérant qu’il pouvait
n’être que moral, direct ou indirect, conforme ou non à l’intérêt de la
collectivité.
En l’espèce, un maire avait, à la demande d’un élu municipal dont le
frère venait d’acquérir un bateau à fort tirant d’eau, sollicité l’entreprise
attributaire du marché public des travaux de dragage de l’avant-port,
pour la réalisation, de nuit et hors marché initial, de travaux destinés à
supprimer un dépôt de sédiment dans le port, afin de permettre à ce
navire d’y accéder.
La Cour de cassation a jugé « qu’en ordonnant, à la demande d’un élu
municipal, en toute connaissance de cause, en dehors du marché et de
toute procédure légale, des travaux supplémentaires, la maire a favorisé
sciemment ce dernier… et a ainsi pris un intérêt indirect dans les
opérations visées… Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la Cour
d'appel, qui a souverainement constaté la prise d'un intérêt moral par
la prévenue, nécessairement distinct de l'intérêt général, a justifié sa
décision ».
(Cassation crim – pourvoi n° 10-87498 – 29 juin 2011).
7) Les mesures de
publicité en matière de
passation des baux
emphytéotiques
administratifs (BEA)
CONTRAT PUBLICS
Un bail emphytéotique administratif (BEA) est un outil contractuel qui
accorde des droits réels à l’occupant du domaine public (article L. 1311-2
du Code Général des Collectivités Territoriales – CGCT).
Le décret n° 2011-2065 du 30 décembre 2011 fixe les modalités de
passation des baux emphytéotiques administratifs (BEA) des collectivités
territoriales et de leurs établissements publics lorsque les BEA sont
accompagnés d’un contrat de la commande publique.
Dans ce cas, les règles de passation du BEA sont celles du contrat de la
commande publique (marché, concession de travaux, DSP, PPP) sur
lequel il s’adosse.
Ce texte prévoit également qu’au-delà d’un million d’euro de loyer
annuel, tout BEA portant sur une opération liée aux besoins de la justice,
la police ou la gendarmerie nationale devra faire l’objet d’une évaluation
préalable.
(Décret n° 2011 -2065 du 30 décembre relatif aux règles de passation
des baux emphytéotiques administratifs – JO 31 décembre 2011).
4
8) Le délai de paiement
de 30 jours dans le
secteur des transports
pourra être décompté à
partir de la date
d’émission de la facture
récapitulative
Afin de clarifier la situation sur les délais de paiement entre chargeurs et
transporteurs, la Direction Générale de la Concurrence de la
Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) a établi une
note d’information en date du 12 décembre 2011.
L’article L 441-6 du code de commerce fixe le délai de paiement pour le
transport routier de marchandises à 30 jours à compter de la date
d’émission de la facture.
L’article L 441-3 précise que la facture est émise dès la réalisation de la
vente ou de la prestation de service, sans toutefois opérer de distinction
selon le type de facture.
L’administration considérait jusqu’à présent que le délai de 30 jours
courait dès la réalisation de la première prestation quand bien même la
facture récapitulative était émise le 30 du mois.
Dans le cadre des Etats Généraux du transport routier de marchandises,
la DGCCRF s’est engagée à réexaminer sa doctrine concernant le mode
de computation de ce délai de 30 jours, qui apparaissait inadapté à la
réalité de la vie des affaires.
Désormais, il est permis de faire courir le délai de paiement à
compter de la date d’émission de la facture récapitulative, établie
une fois exécutées toutes les prestations du mois.
Cette facture récapitulative est prévue à l’article 289-I.3 du code général
des impôts : « la facture est, en principe, émise dès la réalisation de la
livraison ou de la prestation de services. Elle peut toutefois être établie
de manière périodique pour plusieurs livraisons de biens ou prestations
de services. Elle peut toutefois être établie de manière périodique pour
plusieurs livraisons de biens ou de prestations de services distinctes
réalisées entre l’assujetti et son client au titre du mois civil. Cette facture
est établie au plus tard à la fin de ce même mois ».
(Note d’information n° 2011-127 de la DGCCRF du 12 décembre 2011
concernant les factures récapitulatives et mode de computation du délai
de paiement de 30 jours dans le secteur des transports).
5