Les techniques de gestion de trésorerie au jour le jour (PDF, 188 Ko)

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Les techniques de gestion de trésorerie au jour le jour (PDF, 188 Ko)
Les techniques de gestion de trésorerie au jour le jour
Auteur : Jean-François GUEUGNON
Trois familles de modèles de trésorerie co-existent aujourd’hui dans la littérature financière :
-
les techniques d’arbitrage (arbitrage placement-découvert ; arbitrage crédit-découvert)
assises sur des prévisions de trésorerie
les techniques de gestion « optimale » de la trésorerie en univers certain ou en univers
incertain
les techniques de gestion « satisfaisante » de la trésorerie intégrant les prévisions de
trésorerie réalisées par l’entreprise.
Après une analyse détaillée, ces trois types de modèles se révèlent à la fois différents et
complémentaires.
-
Conçues en univers déterministe, les techniques d’arbitrage de placement (arbitrages
placement-découvert) et de financement (arbitrages crédit-découvert) utilisent les
prévisions de trésorerie au jour le jour élaborées par l’entreprise mais sans prendre en
considération les éventuelles erreurs de prévision.
-
Conçus en univers totalement incertain, les modèles de gestion optimale de la
trésorerie conduisent à la fixation de bornes optimales de gestion de l’encaisse nette de
l’entreprise. Malgré l’apport potentiel des prévisions de trésorerie, les constructions
évoluant en univers totalement incertain se révèlent, par définition, incapables
d’utiliser ces informations dans le processus de décision financière à court terme.
-
Enfin, les modèles de gestion « satisfaisante » de la trésorerie intègrent bien les
techniques d’arbitrage traditionnelles (notamment, en cas de besoin de liquidité en
arbitrant les ventes de titres avec les crédits bancaires à court terme), mais ont du mal
à fixer les bornes optimales de liberté de l’encaisse nette contrairement aux modèles
de gestion optimale de la trésorerie.
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Section 1 : Un préalable, le calcul du coût effectif des crédits à court terme
A] La fixation du taux corrigé
Trois éléments de correction du taux d'intérêt nominal interviennent dans le calcul du coût du
crédit : les jours de banque, le net escompte et l'année bancaire.
1) Le calcul du coefficient correcteur attaché aux jours de banque
Avec E :
C:
x:
k:
l'échéance du crédit utilisé (par exemple, le 30 avril)
la date de valeur associée à l'utilisation du crédit (par exemple, le 1er avril)
le nombre de jours de banque associés au crédit (par exemple, 1)
la date de remboursement vis à vis de l'échéance E du crédit (k=-1 en
cas de crédit par billet non renouvellé; k=0 en cas de crédit renouvelable;
k=+4 en cas d'escompte du billet sous condition de bonnes présentation).
la durée du crédit est égale à
D = E−C
la durée de facturation des agios est égale à Dx =D+ x =(E−C)+ x soit 30 jours en ici.
et la durée effective de crédit porte
Dk =D+k =(E−C)+ k , soit 29 jours si k=-1
soit 30 jours si k= 0
soit 33 jours si k=+4
Dans ces conditions, le coefficient correcteur s’élève à C 1 =
D x D + x ( E − C) + x
=
=
D k D + k ( E − C) + k
soit 31/29=1,0689 en cas de billet non renouvellé (supérieur à 1), 31/30=1,0333 en cas de
billet renouvellé (supérieur à 1) et 31/33=0,9394 en cas d'escompte (inférieur à 1).
2) Le calcul du coefficient correcteur attaché au net escompte
Pour les crédits à intérêts précomptés, les agios sont par définition immédiatement retenus.
On a : Montant net du crédit (M')= Montant brut du crédit (M) – Agios. Vis à vis des crédits
postcomptés dont le coefficient correcteur est neutre (C2=1), le coefficient correcteur attaché
au net escompte se monte donc à :
NJAB
M=
M
=
C2= M
' M −[M.(D+ x).Tc /360] NJAB−[(D+ x).Tc]
3) Le calcul du coefficient correcteur attaché à l'année bancaire
C3 = NJAC / NJAB
avec : NJAC le nombre de jours dans l’année civile (365 ou 366)
NJAB le nombre de jours dans l’année bancaire (360)
4) Dans ce cadre, le taux nominal annuel corrigé du crédit s’élève à :
TCC = C1 . C2 . C3 . TC
3
B ] La détermination du taux actuariel
Même s'il tient compte des trois éléments correcteurs précédents, le taux actuariel se calcule
différemment selon que les intérêts sont comptés en début ou en fin de période.
1) Le calcul du taux actuariel des crédits à intérêts précomptés
Le taux actuariel Te du crédit rend, par définition, équivalent le montant net M' du crédit
précompté (M'=M-Agios) et le montant M actualisé du crédit au dit taux.
Sachant que : M'=
[1+Te]
ou Te=[ M/M']
M
(Dk / NJAC)
[
(NJAC/Dk)
−1
]
et que le montant net du crédit M'=M− Dx.Tc.M , on a alors un taux actuariel :
NJAB
[
Te= 1− Dx.Tc
NJAB
]−(NJAC/D ) −1
k
2) Le calcul du taux actuariel des crédits à intérêts postcomptés
a) Cas général
Le taux actuariel Te du crédit rend ici équivalent le montant brut M du crédit utilisé et le
remboursement postcompté du crédit (M'=M+Agios) actualisé au dit taux.
Sachant que
M=
[1+Te ]
M'
(Dk /NJAC)
ou
(NJAC/Dk )
−1
Te=[ M'/M]
[
]
et que le montant du crédit à rembourser à la fin de la période M'=M + Dx.Tc.M , le taux
NJAB
actuariel du crédit à court terme postcompté s'écrit :
[
Te= 1+ Dx.Tc
NJAB
](NJAC/D ) −1
k
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b) un cas particulier, le calcul du taux actuariel du découvert
Le calcul du taux actuariel du découvert est plus complexe : il dépend du coût du plus fort
découvert, de la durée d'emploi et de la période d'utilisation du crédit dans le trimestre (voir le
schéma ci-dessous).
C (début de période)
E (fin de période)
Fin du trimestre
|<-------------->| <----------------- D ---------------------> | <------------------ L --------------------->|
avec
L
M
Dk
la période séparant le remboursement du découvert de la fin du trimestre
le montant du découvert (montant constant ou moyen)
la durée effective du crédit.
Le taux actuariel du découvert rend équivalent le montant du découvert et la somme
actualisée de son remboursement et des agios actualisés au dit taux.
On a:
M=
(Td / NJAB).Dk.M +3.TPFD.M
M
+
(1+Te)(Dk / NJAC)
(1+Te)(Dk +L)/ NJAC
Dans le cas du découvert où on a des dates de valeurs nulles (x=0 et k=0) et une période
d’utilisation effective Dk=D du crédit constante, on obtient alors des taux actuariels fonction
de la date initiale d’utilisation de la facilité de caisse. Par exemple, si Td=15% et D=30 jours,
on a alors Te=16,10% si L=30 jours, Te=15,85% si L=61 jours et Te=16,30% si L=0 jour.
CONCLUSION
. IL EST DONC IMPOSSIBLE DE CALCULER A PRIORI LE COUT EFFECTIF DU
DECOUVERT SI ON NE CONNAIT PAS SA DATE ET SA DUREE D’UTILISATION
EFFECTIVE.
. L’UTILISATION DES TAUX ACTUARIELS INDUIT D’ABORD DES DUREES DE
TIRAGE PLUS LONGUES QUE L’UTILISATION DES TAUX CORRIGES QUI
ABOUTIT A UNE SOUS-MOBILISATION DES CREDITS PAR BILLET.
.LA DURÉE OPTIMALE DE TIRAGE DU CRÉDIT DÉTERMINÉE SUR LA BASE
DES TAUX ACTURIELS EST ENSUITE BEAUCOUP PLUS SENSIBLE À LA
VARIATION DU TAUX NOMINAL QUE LA DURÉE OPTIMALE DE TIRAGE
DÉTERMINÉE SUR LA BASE DES TAUX NOMINAUX CORRIGES.
Taux nominal
Td
09,20%
10,05%
11,00%
12,00%
13,35%
13,85%
15,00%
Durée de tirage avec la
méthode des taux corrigés
87 jours
83 jours
79 jours
75 jours
71 jours
70 jours
67 jours
Durée de tirage optimale avec
la méthode des taux actuariels
122 jours
117 jours
112 jours
107 jours
101 jours
99 jours
95 jours
5
Section 2 : L’arbitrage placement-découvert
Deux types d’abitrage co-existent ici : la méthode analytique et la méthode itérative.
A] La méthode analytique
Le profit à retirer de l'arbitrage placement-découvert s'élève à
[
Np.Mp.Tp 
∏ = 
− NDS. Td + b.Mp
NJAB
 NJAB 
avec :
Np
Mp
Tp
NJAB
NDS
Td
Après avoir posé :
]
la durée du placement
le montant du placement
le taux annuel nominal (respectivement actuariel) du placement
le nombre de jours dans l’année bancaire
le nombre débiteur supplémentaire dû au placement Mp
le taux annuel nominal (respectivement actuariel) du découvert
NDS = Nd . Mp = ( Np − Nc ). Mp
le profit est maximum quand :
c'est-à-dire quand (1):
d∏ = Np.Tp −Np.Td+ Nc∗.Td−NJAB.b =0
dMp
NJAB
Nc∗=
(Td−Tp).Np+NJAB.b
Td
Ceci posé, il est possible de déterminer graphiquement le montant optimal Mp* à placer
comme le montre le cas Sheannan.
B] La méthode itérative
Le calcul par la méthode itérative s'effectue en posant au départ un niveau de dépôt MPk =0 à
l'étape k=0 correspondant à un niveau de profit de l'arbitrage ∏k =0
1. A chaque étape k=k+1, on calcule successivement :
le montant du dépôt MPk =MPk −1+PAS
le profit ∏k retiré de l'arbitrage avant de le comparer au profit précédent ∏k −1=0
2.
1
Si ∏k > ∏k −1 alors on retourne à l'étape 1. Si ∏k < ∏k −1 alors ARRET.
Le montant optimal du placement a été découvert à l'étape précédente : MP*= MPk −1
En l’absence de jours de banque et du net escompte, le dépôt bancaire et le découvert ne supportent qu’une
seul coefficien correcteur : le coefficient attaché à l’année bancaire. Mais, compte tenu que ce coefficient
correcteur concerne à la fois le dépôt et le découvert, il se révèle finalement sans impact sur le nombre de jours
créditeurs optimal. Celui-ci peut être obtenu en utilisant, au choix, uniquement des taux actuariels, uniquement
des taux nominaux corrigés ou uniquement des taux nominaux simples.
6
Section 3 : L’arbitrage crédit-découvert
En cas de besoin de financement, l’arbitrage placement-découvert peut à priori être
transposé sans difficulté en arbitrage crédit-découvert. Il suffit apparemment de remplacer le
placement à court terme par un crédit à court terme mobilisable ou par une avance en compte.
Car, l’entreprise en situation d’insuffisance d’encaisse nette a le choix entre le découvert (le
crédit à priori le plus cher, mais aussi le plus souple) et d’autres crédits à court terme (crédits
à priori moins cher, mais aussi moins souple).
Contrairement au découvert qui évite toute erreur de sur-mobilisation en s’adaptant
parfaitement aux besoins d’encaisse, toutes les autres formes de crédit à court terme
présentent une moindre flexibilité, une moindre adaptabilité. La mobilisation d’un de ces
crédits induit un certain nombre de jours créditeurs, c’est-à-dire un certain nombre de jours
d’excédent d’encaisse. Au coût de sous-mobilisation se substitue un coût de sur-mobilisation
dont le taux d’opportunité est en général bien supérieur au taux d’opportunité liée à la sousmobilisation.
La recherche du coût minimal de financement est donc le fruit d’un arbitrage entre, d’une
part, le crédit par découvert au taux nominal élevé mais sans coût de sur-mobilisation et,
d’autre part, le crédit au taux nominal moins élevé mais susceptible d’engendrer un coût de
sur-mobilisation non négligeable. Face à ce dilemme, l’objectif de l’arbitrage crédit-découvert
consiste à découvrir le nombre de jours créditeurs maximum Nci* correspondant au coût
minimal du financement à l’aide du crédit à court terme « i ».
En substituant le taux du crédit « i » au taux de placement dans la formule d’arbitrage
originale, on obtient alors un nombre de jours créditeurs optimal
Nc*i=
avec : T.ci
T.di
Di
b
(T.di −T.ci).Di +b.NJAB
T.di
le taux du crédit alternatif i
le taux du découvert
la durée du crédit alternatif (Di=Ei-Ci).
le taux de plus fort découvert
Si l’application de l’arbitrage placement-découvert ne présente aucune difficulté technique, il
n’en va pas de même dans le cas de l’arbitrage crédit-découvert. En effet, si l’effet lié à
l’année bancaire se trouve neutralisé en touchant de manière uniforme le taux du placement et
le taux du découvert en cas d’arbitrage placement-découvert, les trois effets liés aux jours de
banque, au net escompte et à l’année bancaire du crédit alternatif ne sont pas neutralisés par la
seul effet de l’année bancaire supporté par le découvert. Parallèlement, la période de
mobilisation Di considérée n’est pas constante mais est propre au crédit « i ».
Le choix entre les taux nominaux simples, les taux nominaux corrigés et les taux actuariels
dans l’arbitrage crédit-découvert n’est plus indifférent comme dans l’arbitrage placementdécouvert. Les différents effets mentionnés précédemment ont un impact certain sur le coût
des crédits. On ne peut plus les ignorer ou penser qu’ils se neutralisent. Dans ces conditions,
on ne peut plus retenir les taux d’intérêt nominaux pour rechercher le coût minimal du
financement à court terme. La technique de l’arbitrage crédit-découvert doit donc s’appuyer
soit sur les taux nominés corrigés, soit sur les taux actuariels.