Le divorce

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Le divorce
Fiche technique du CNIDFF
MAJ mai 2016
Le divorce
Le divorce est la dissolution du mariage du vivant des deux époux à la suite d’une décision judiciaire. Il
met fin au lien conjugal, organise la vie future du couple dissous et des enfants, fait disparaître les droits et
devoirs nés du mariage et en crée d’autres. Comme pour la séparation de corps, le divorce est régi par la loi
française si les deux époux sont de nationalité française ou s’ils sont domiciliés l’un et l’autre en France, ou si
aucune loi étrangère ne reconnaît sa compétence alors que les tribunaux français sont compétents (art 309 Code
civil)
Le juge compétent en matière de divorce est le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance du
lieu de résidence de la famille ou du parent avec lequel résident habituellement les enfants mineurs, ou du lieu de
résidence de l’époux n’ayant pas pris l’initiative du divorce si les deux époux habitent avec un ou des enfants (art
228 Code civil). Ce juge peut renvoyer l’affaire à une audience collégiale. Ce renvoi est de droit à la demande
d’une partie.
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L’assistance d’avocat est obligatoire .
Les cas de divorce (art 229 Code civil)
Le divorce par consentement mutuel
Textes applicables : articles 230 et 232 du Code civil
Ce divorce s’adresse aux époux qui sont d’accord sur le principe du divorce et sur toutes ses conséquences
pratiques pour eux et pour leur(s) éventuel (s) enfant(s).
Le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage
Textes applicables : articles 233 et 234 du Code civil ; articles 1123 à 1125 du Code de procédure civile
Ce divorce s’adresse aux époux qui sont d’accord sur le principe du divorce mais pas sur ses
conséquences financières ou patrimoniales ou sur les conséquences relatives aux enfants.
Il peut être demandé par un époux ou par les deux simultanément, chacun devant être assisté par un avocat.
Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
Textes applicables : articles 237 et 238 du Code civil ; articles 1126 et 1127 du Code de procédure civile
Ce divorce peut être demandé par un époux sans que l’autre ne puisse s’y opposer dès lors qu’ils vivent séparés
depuis deux ans, la preuve se faisant par tous moyens (factures, baux justifiant des domiciles distincts,
attestations, main courante lors du départ du domicile…).
Le délai des deux ans s’apprécie à la date d’assignation (moment de la procédure de divorce après l’audience de
conciliation correspondant à l’introduction de l’instance).
Des dommages et intérêts peuvent être demandés sur la base de l’article 266 du code civil en réparation des
conséquences subies du fait de la dissolution du mariage à la condition que l’époux défendeur à l’action en
divorce qui réclame ces dommages et intérêts n’ait formé aucune demande en divorce.
Le divorce pour faute
Textes applicables : articles 242 à 246 du Code civil ; article 1128 du Code de procédure civile
Ce divorce peut être demandé par un époux lorsque des faits imputables à l’autre conjoint constituent une
violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la
vie commune.
Dès lors qu’ils ont été obtenus sans violence, ni fraude ou atteinte à la vie privée, l’époux demandeur peut
prouver la faute par tout moyen (aveu, témoignages sous forme d’attestations écrites ou orales,
correspondances, constats d’huissier, certificats médicaux, communications téléphoniques non secrètement
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enregistrées, photographies…). La Cour de cassation a jugé que la faute pouvait même être prouvée par SMS .
Depuis le 1er janvier 2013, l’avocat doit conclure avec son client une convention d’honoraires pour les procédures de divorce, selon des
barêmes indicatifs précisé par arrêté, ces barêmes devant être révisés au moins tous les 2 ans (loi n° 2011-1882 du 13 décembre 2011
relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles)
2 Cour cass. 1re civ. 17 juin 2009, arrêt n°692 pourvoi n°07-21.796
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1
Si les tribunaux ont admis que la faute puisse être démontrée au moyen de pages Facebook qui auraient été
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publiées par le conjoint, encore faut-il que la production de la page Facebook ne soit pas la conséquence d’une
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fraude, voire d’un piratage du compte .
Mais les descendants et leurs conjoints (sauf s’ils sont concubins) ne peuvent attester ; seuls les autres membres
de la famille (ascendants, frères et sœurs, cousins…) peuvent témoigner.
Les notions d’excès, sévices et injures graves définissent selon la jurisprudence la violation des devoirs nés du
mariage. Les fautes pouvant être invoquées sont ainsi principalement le non respect du devoir de loyauté (devoir
de fidélité mêlé au devoir de respect mutuel), l’adultère, l’abandon du domicile conjugal et le refus de
cohabitation, la non contribution aux charges du mariage, les comportements violents ou injurieux, l’abus de
pratique de la religion. L’existence de la faute est laissée à l’appréciation du juge. Ainsi, la Cour d’appel de
Limoges a jugé que l’acceptation par le mari de l’infidélité de son épouse durant la minorité de leurs enfants ne
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saurait constituer une circonstance dépouillant cette infidélité de son caractère fautif . Autres exemples : la Cour
d’appel d’Aix-en-Provence a prononcé le divorce aux torts exclusifs du mari et octroyé des dommages et intérêts
au profit de son épouse sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, la faute étant l’abstinence sexuelle subie
par la femme et imputable à son mari qui ne justifiait d’aucun problème de santé le mettant dans l’incapacité
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totale d’avoir des relations intimes avec son épouse . De même, la Cour d’appel de Paris qui a prononcé le
divorce aux torts exclusifs du mari et octroyé également des dommages et intérêts à l’épouse, la faute étant
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l’homosexualité du mari .
Le juge peut rendre soit un jugement de divorce soit un jugement de rejet si les faits ne sont pas établis ou ne
sont pas suffisamment graves.
Le jugement de divorce peut être prononcé aux torts exclusifs de l’un des époux qui peut alors être condamné à
verser des dommages et intérêts à son conjoint sur la base de l’article 266 du code civil si la dissolution du
mariage entraine pour ce conjoint des conséquences d’une particulière gravité. La Cour de cassation a jugé
cependant que quitter son épouse après 39 ans de mariage dans des conditions difficiles ne suffit pas à
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caractériser les conséquences d’une particulière gravité .
Le jugement de divorce peut être prononcé aux torts partagés en cas de comportement fautif des deux époux.
La procédure de divorce
 Relative au divorce par consentement mutuel
Textes applicables : article 1088 à 1105 du Code de procédure civile
C’est une procédure simplifiée, aux délais raccourcis vu son caractère consensuel relevant de la matière
gracieuse. Elle peut ne comporter qu’une seule audience devant le juge aux affaires familiales.
Les époux doivent joindre à leur requête conjointe en divorce une convention qu’ils ont rédigée ensemble en
collaboration avec leur avocat unique choisi d’un commun accord ou avec leurs avocats respectifs. Cette
convention, qui règle toutes les conséquences pratiques du divorce (liquidation du régime matrimonial, partage
des biens, sort du logement et du mobilier familial, autorité parentale, pension alimentaire, prestation
compensatoire), est soumise à l’approbation du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de la
résidence de l’un ou de l’autre des époux.
Le juge entend les époux séparément puis ensemble afin de vérifier leur volonté de divorcer et leur
consentement libre et éclairé, conditions indispensables pour homologuer la convention et donc prononcer le
divorce.
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La Cour de cassation a rappelé qu’après son homologation par le jugement prononçant le divorce des époux par
consentement mutuel, la convention définitive revêt la même force exécutoire qu’une décision de justice et ne
peut être remise en cause que dans des cas limitativement énumérés prévus par la loi dans lesquels n’entre pas
l’action en inopposabilité fondée sur la fraude. La seule voie offerte aux tiers pour attaquer une convention
définitive homologuée est donc celle de la tierce opposition dans le délai d’un an.
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CA Versailles, 19 janvier 2012, n°11/00727 : Jurisdata n°2012-000637 (responsabilité d’un mari faisant état sur Facebook, de
nombreuses liaisons) ; CA Montpellier, 10 octobre 2012, n° 11/04810 : Jurisdata 2012-028559 (comportement injurieux de la femme ayant
publié des photos d’elle à moitié dénudée et de son amant)
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CA Douai, 14mars 2013, n°12/02493 : Jurisdata n° 2013-004573
5 CA Limoges, 28 novembre 2011, n° 10/01701; Jurisdata n° 2011-026545
6 CA Aix-en Provence, 15 septembre 2011, n° 09/20000, n° 2011/358 : Jurisdata n° 2011-019166
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CA Paris, 10 avril 2013, n° 12/07515 : Jurisdata n° 2013-007125
8 Cour cass. 1re civ. 1er juillet 2009 n°08-17.825 : Jurisdata n°2009-048910
9 Cour cass.1ère civ. 23 novembre 2011, n° 10-26.802
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En cas de refus d’homologation, il peut homologuer des mesures provisoires prises d’un commun accord par
les époux conformément à l’intérêt des enfants. Ces mesures provisoires concernent notamment les modalités de
la résidence séparée des époux, la fixation d’une pension alimentaire, l’attribution du logement familial à l’un des
époux. Elles sont applicables jusqu’à ce que le jugement de divorce soit définitif. Les époux ont alors un délai
maximum de 6 mois pour présenter une nouvelle convention.
L’absence de nouvelle convention ou le refus par le juge d’homologuer cette nouvelle convention entraîne la
caducité de la demande en divorce.
Seul un pourvoi en cassation formé dans le délai de 15 jours est possible, son recours étant suspensif sauf pour
les mesures concernant les enfants.
 Commune aux divorces contentieux
Textes applicables : articles 251 à 259 du code civil ; article 267 du code civil ; articles 1106 et 1116 du code de
procédure civile
Les divorces contentieux sont le divorce pour acceptation du principe de la rupture, le divorce pour
altération définitive du lien conjugal et le divorce pour faute.
Le tronc commun aux trois est la requête initiale au juge, présentée par l’avocat, qui ne comporte pas l’indication
des motifs, les cas de divorce n’étant pas encore déterminés. S’ensuit la tentative de conciliation où il n’est pas
encore fait mention du cas de divorce (qui peut être suspendue pendant 8 jours ou plus pour délais de réflexion)
et qui permettra de mettre en place des mesures provisoires (résidence des enfants, pension alimentaire,
désignation d’un notaire en vue d’élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial…art 255 Code civil).
A défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge statue sur leurs demandes de maintien dans
l'indivision, d'attribution préférentielle et d'avance sur part de communauté ou de biens indivis.
Il statue sur les demandes de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux, dans les conditions fixées aux
articles 1361 à 1378 du code de procédure civile, s'il est justifié par tous moyens des désaccords subsistant entre
les parties, notamment en produisant :
-une déclaration commune d'acceptation d'un partage judiciaire, indiquant les points de désaccord entre les
époux ;
-le projet établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255.
Il peut, même d'office, statuer sur la détermination du régime matrimonial applicable aux époux.
Les mesures urgentes
L’article 220-1 du code civil prévoit que le juge peut prescrire toutes mesures urgentes que requièrent les
intérêts de la famille lorsqu’un des époux manque gravement à ses devoirs et met en péril ces intérêts. Le juge
peut ainsi lui interdire de faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition sur ses propres biens ou
sur ceux de la communauté, la durée de ces mesures d’interdiction ne pouvant dépasser 3 ans.
Lorsque les violences exercées par l’un des époux mettent en danger son conjoint et/ou un ou plusieurs
enfants, le juge aux affaires familiales, peut délivrer, dans les meilleurs délais, à la victime des violences, une
ordonnance de protection dès lors qu’il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement
débattus, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des violences
alléguées et le danger auquel la victime et ou un ou plusieurs enfants sont exposés. A l’occasion de la délivrance
de cette ordonnance, il peut notamment statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux
continuera à résider dans le logement familial. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est
attribuée au conjoint qui n’est pas auteur des violences, même s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence. Il se
prononce aussi sur les modalités d’exercice d’autorité parentale et sur la contribution aux charges du mariage. Il
est compétent pour autoriser la victime à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile pour les
besoins de la vie courant chez une personne morale qualifiée. Il peut prononcer l’admission provisoire à l’aide
juridictionnelle à la victime. Ces mesures sont prises pour une durée de six mois à compter de la notification
de l’ordonnance pouvant être prolongée si durant ce délai une requête en divorce ou en séparation de corps est
déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d’une requête relative à l’exercice de l’autorité parentale
(articles 515-9 et suivants du code civil).
La requête initiale
L’époux qui demande le divorce adresse au juge par l’intermédiaire de son avocat une requête qui n’a pas à
indiquer le fondement juridique et les motifs du divorce mais qui doit contenir les mentions relatives à
l’identité des époux, la date et le lieu de leur mariage, leur régime matrimonial, les mesures provisoires prévues
jusqu’au prononcé du divorce et les éventuelles mesures d’urgence de l’époux demandeur.
La tentative de conciliation
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Le juge aux affaires familiales convoque les époux à une audience obligatoire de conciliation par lettre
recommandée avec accusé de réception 15 jours au moins avant la date prévue. Lors de cette audience, il
entend les époux séparément puis ensemble et cherche à les concilier sur le principe du divorce et sur ses
conséquences.
Si l’époux qui n’a pas demandé le divorce ne se présente pas ou est hors d’état de manifester sa volonté le juge
invite l’autre conjoint à la réflexion.
Si le juge constate, une fois les époux entendus, que le demandeur maintient sa demande, il rend une
ordonnance de non conciliation qui statue sur les mesures provisoires nécessaires à la vie des époux et des
enfants jusqu’au jugement définitif. Ces mesures provisoires peuvent notamment concerner la médiation familiale,
les enfants, les résidences séparées des époux, la contribution aux charges du ménage, les dettes, l’indemnité
d’occupation…
A noter : L’indemnité d’occupation du domicile conjugal n’est pas disponible avant que ne soit prise l’ordonnance
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de non conciliation .
Ces mesures provisoires susceptibles d’appel dans les 15 jours de la notification de l’ordonnance de nonconciliation, sont modifiables par le juge aux affaires familiales sur demande d’un ou des époux si un fait nouveau
apparaît.
Le demandeur d’un logement social en procédure de divorce doit attester de cette procédure par la présentation
de l’ordonnance de non conciliation ; les ressources prises en compte pour l’attribution du logement sont celles de
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l’avant dernière année précédant celle de la signature du contrat (ce sont donc les ressources du couple) .
Dans cette ordonnance, le juge soit renvoie les époux à une autre tentative de conciliation dans un délai minimum
de 8 jours et maximum de 6 mois si les époux ont besoin d’un temps de réflexion, soit les autorise à introduire
l’instance en divorce.
 L’assignation et l’introduction de l’instance
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La 2 phase du divorce est l’instance, assignée par l’époux qui a fait la requête initiale dans un délai de 3 mois
après l’ordonnance de non conciliation. Elle précise le cas de divorce, et propose le règlement des intérêts
pécuniaires et patrimoniaux.
Seul l’époux qui a présenté la requête peut assigner en divorce dans les 3 mois du prononcé de l’ordonnance de
non conciliation. Si les époux se sont réconciliés ou si l’instance n’a été introduite par aucun des conjoints dans
les 30 mois du prononcé de cette ordonnance, toutes ces dispositions (mesures provisoires et autorisation
d’assigner) sont caduques. L’époux demandant le divorce peut lui substituer une séparation de corps, même en
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appel .
L’époux qui prend l’initiative d’introduire l’instance doit assigner son conjoint par voie d’huissier en choisissant l’un
des trois cas de divorce contentieux. L’autre époux peut former une demande reconventionnelle sur l’un de ces
trois cas. Mais les époux lors de l’audience de conciliation ont pu accepter le principe de la rupture du mariage. Il
résulte de la combinaison des articles 233 et 234 du code civil que, sauf vice du consentement démontré à
l’occasion du prononcé du divorce, cette acceptation, constatée dans un procès-verbal ou dans une
déclaration écrite, n'est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l'appel, et l’instance ne peut
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être engagée que sur ce fondement.
A peine d'irrecevabilité, l'assignation contient une proposition de règlement des intérêts pécuniaires des époux
(descriptif sommaire du patrimoine des époux, intentions du demandeur quant à la liquidation de la communauté
ou de l'indivision, et, le cas échéant, quant à la répartition des biens).
Le demandeur a la charge de la preuve des griefs qu’il invoque, ainsi que le défendeur s’il fait une demande
reconventionnelle. Tous les moyens de preuve et toutes les mesures d’instruction sont acceptés, le juge ayant un
pouvoir souverain d’appréciation.
A tout moment de la procédure, les époux peuvent demander au juge de constater leur accord sur le principe et
les conséquences du divorce et ainsi passer de n’importe quel cas de divorce (divorce pour acceptation du
principe de la rupture, divorce pour altération définitive du lien conjugal, divorce pour faute) à un divorce par
consentement mutuel. C’est le système des passerelles. Ils doivent présenter en accompagnement de leur
demande une convention réglant les conséquences du divorce. Si un époux forme une demande en divorce pour
altération du lien conjugal et son conjoint une demande reconventionnelle aux torts exclusifs, le divorce aux torts
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partagés à la demande du premier époux pourra être prononcé à titre principal .
Si aucune des parties n’agit pendant deux ans, l’instance est périmée.
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Cour cass., 1ère civ. , 23 octobre 2013, n°12-21.556
Art L441-1 Code de la construction et de l’habitation
12 Cour cass, 1ère civ, 25 septembre 2013, n°12-22.362
13 CA Douai, 17 février 2011, n° 10/05527 : Jurisdata n° 2011-002934
14 Cour cass, 1ère civ, 11 septembre 2013, n°11-26.751
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 Le jugement
L’audience de jugement n’est pas publique. Soit le juge rejette la demande en divorce et dans ce cas organise la
vie familiale (résidence des époux et des enfants, exercice de l’autorité parentale, contribution financière aux
charges du mariage), soit il prononce le divorce qui ne devient définitif qu’une fois les délais de recours écoulés.
A noter : La Cour de cassation considère que venir prendre ses repas au domicile conjugal, en pleine procédure
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de divorce, ne constitue pas la poursuite de la cohabitation entre époux .
 Les voies de recours
Les époux ont un mois pour faire appel du jugement à compter de sa notification (ou de son acquiescement ou du
désistement par l’un des époux). L’appel est suspensif. Les époux demeurent donc mariés et les mesures
provisoires prises par le juge restent applicables jusqu’à décision de la cour d’appel.
L’arrêt de la cour d’appel peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans un délai de 2 mois à compter de sa
signification. Le recours est suspensif sauf pour les mesures relatives aux enfants (pension alimentaire et
exercice de l’autorité parentale).
Une fois les délais de recours écoulés, le divorce devient définitif. Il acquiert force de chose jugée. Il est
opposable aux tiers dès lors que les formalités de publicité ont été accomplies et par la simple production d’un
extrait de la décision accompagnée de la justification de son caractère exécutoire.
Les effets du divorce
Textes applicables : articles 264, 265, 267, 267-1, 270 et suivants du Code civil
Le divorce produit des effets personnels et matériels à l’égard des époux (disparition des devoirs résultant du
mariage, perte en principe de l’usage du nom du conjoint, liquidation du régime matrimonial, sort des donations et
avantages matrimoniaux, sort du logement familial, fixation d’une prestation compensatoire, fixation éventuelle de
dommages et intérêts fondés sur l’article 1382 du code civil).
En revanche, le divorce n’a aucune conséquence dans les relations des époux avec leurs enfants. En
effet, la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale pose pour principe que la séparation des parents ne doit
pas avoir d’incidence sur les règles de dévolution de l’autorité parentale et que chacun des parents doit maintenir
des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent. Devront cependant
être réglées les modalités d’exercice de l’autorité parentale (pension alimentaire pour contribuer à l’éducation et à
l’entretien de l’enfant, résidence de l’enfant, droit de visite et d’hébergement).
Questions
 Quelles sont les différences entre le divorce, la séparation de corps et la séparation de fait ?
La séparation de corps ne dissout pas le mariage. Par décision de justice, elle dispense seulement les époux de
cohabiter et entraîne la séparation de biens. Elle maintient les devoirs de fidélité et de secours. Elle est
prononcée à la demande des époux ou de l’un d’entre eux dans les mêmes cas et aux mêmes conditions que le
divorce. Deux ans après le jugement de séparation de corps, chaque époux peut demander la conversion en
divorce ; elle est automatiquement accordée mais doit être demandée en justice et faire l’objet d’un jugement de
divorce.
La séparation de fait est la situation de deux époux vivant séparément sans y avoir été autorisés par un jugement
de divorce ou de séparation de corps. Ils sont toujours légalement mariés.
 En réponse à une demande en divorce pour faute, un époux demande un divorce pour altération
définitive du lien conjugal. Le divorce pour faute ayant été rejeté, le prononcé du divorce pour
altération définitive du lien conjugal est-il conditionné au respect du délai de deux ans ?
Si après examen de la demande pour faute, le juge rejette la demande, il retient la demande reconventionnelle et
prononce le divorce pour altération définitive du lien conjugal et ce même si le délai de deux ans n’est pas
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atteint .
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16
Cour cass 1ère civ, 27 février 2013, n°12-135.008
Cour cass, 1ère civ. 5 janvier 2012, n° 10-16.359
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 En cas d'acceptation par les époux du principe du divorce et d'appel de la décision de divorce, le
devoir de secours continue-t-il à s'appliquer ?
L'appel d'un jugement prononçant un divorce sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil ne met pas
fin au devoir de secours, la décision n'acquérant force de chose jugée qu'après épuisement des voies de recours.
Sauf vice du consentement, ceci vaut même si l'acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut plus
être remise en cause.
 À quel moment les relations entre les époux sur le plan financier ne sont-elles plus gérées par leur
régime matrimonial ?
Dans les relations entre les époux, à défaut de décision contraire du JAF, c’est la date de l’ordonnance de non
conciliation qui est prise en compte avec possibilité de faire rétroagir la date de cette liquidation au moment où les
époux ont cessé de cohabiter si la demande a été formulée durant la procédure de divorce. Mais si la preuve est
apportée, le maintien d’une collaboration des époux postérieurement à la date de leur séparation de fait peut
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reporter judiciairement la date des effets patrimoniaux du divorce entre époux.
 Une clause de non-divorce stipulée à l’acte de donation est-elle licite ?
Par acte notarié, un époux avait fait donation à son épouse d’un droit viager d’usage et d’habitation portant sur un
appartement, une cave et un parking lui appartenant en propre, l’acte comportant une clause de non-divorce
selon laquelle en cas de divorce, séparation de corps, cette donation serait résolue de plein droit. L’époux ayant
assigné son épouse en divorce demanda la constatation de la résolution de plein droit de la donation. La Cour de
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cassation, dans un arrêt du 14 mars 2012 , a décidé qu’une clause de non-divorce dans une donation de biens
er
présents n’était pas valable. Elle a rappelé que les dispositions impératives de l’article 265 alinéa 1 du Code civil
font obstacle à l’insertion, dans une donation de biens présents prenant effet au cours du mariage, d’une clause
résolutoire liée au prononcé du divorce ou à une demande en divorce.
 Quelles sont les conséquences fiscales de l’attribution de la jouissance du domicile conjugal ?
La jouissance gratuite du domicile conjugal est attribuée à l’un des époux dans l’ordonnance de non conciliation
soit comme modalité de l’exercice du devoir de secours entre époux soit comme contribution aux charges du
mariage. Par conséquent, l’époux qui ne réside plus au domicile conjugal peut déclarer fiscalement cette
jouissance gratuite au même titre qu’une pension alimentaire qu’il verserait, l’époux bénéficiant de ce droit de
jouissance devant alors le déclarer dans ses revenus.
 Qu’en est-il du divorce des majeurs protégés ?
Si l’un des époux se trouve sous tutelle, aucune demande en divorce par consentement mutuel ou sur
acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut être présentée (art 249-4 Code civil). Si l’un des époux
se trouve en curatelle, aucune demande en divorce par consentement mutuel ne peut être présentée. Pour les
autres procédures de divorce, si l’époux est sous tutelle, la demande doit être présentée par le tuteur avec
l’autorisation du conseil de famille et si l’époux est sous curatelle, il exercera l’action lui-même mais assisté par le
curateur. Ces principes s’appliquent également en cas d’acquiescement au divorce ou de désistement des voies
de recours.
 Quel époux a la charge des dépens de la procédure ?
Dans le cas du divorce pour altération définitive du lien conjugal, les dépens de l'instance sont à la charge de
l'époux qui en a pris l'initiative à moins que le juge n'en dispose autrement. Dans le divorce par consentement
mutuel, les époux règlent le sort des dépens dans la convention définitive soumise à homologation. Dans le
divorce accepté et dans le divorce pour faute, en l'absence de disposition spéciale le droit commun des articles
695 et suivants du Code de procédure civile s'applique : le juge peut condamner "la partie perdante", ou par
décision motivée, procéder à une autre répartition.
 En cas de divorce, à compter de quelle date chaque époux peut-il réclamer les fruits et revenus
perçus par l’autre au cours de l’indivision post-communautaire ?
L’article 815-10 alinéa 2 du Code civil interdit toute recherche relative aux fruits et revenus des biens indivis plus
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de cinq ans après leur perception. La Cour de cassation a précisé que ce délai de 5 ans court à compter du
jour où le jugement de divorce est passé en force de chose jugée. Elle souligne qu’en cas de jugement de divorce
Cour cass.1ère civ. 17 novembre 2010, n° 09-68292 AJ famille 2011.55, obs. P. HILT
Cour cass, 1ère civ, 14 mars 2012, n°11-13.791
19 Cour ass.1ère civ. 23 mai 2012, n° 11-12.813
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frappé d’appel principal et incident limités aux conséquences du divorce, le jugement de divorce passe en force
de chose jugée à la date de l’appel incident.
 Le juge aux affaires familiales peut-il désigner un notaire pour procéder à la liquidation du régime
matrimonial ?
Une circulaire du ministère de la Justice du 16 juin 2010 rappelait qu’en l’absence d’accord entre les parties, le
juge n’a pas au stade du prononcé du divorce, la faculté "de désigner un notaire aux fins de procéder aux
opérations de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux ou de commettre un juge". Elle précisait qu’en
cas d’accord des parties pour voir désigner un notaire, le juge du divorce peut seulement constater que les époux
divorcés souhaitent confier la liquidation de leur régime matrimonial à tel notaire. En aucun cas, il ne peut
procéder à sa désignation.
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Mais, dans un arrêt du 12 avril 2012, la Cour de cassation casse, pour violation des articles 267 et 267-1 du
Code civil, l’arrêt de la cour d’appel ayant retenu que si le prononcé du divorce entraîne l’ouverture des
opérations de liquidation du régime matrimonial des époux, il n’appartient pas en revanche au juge du divorce de
désigner un notaire pour procéder aux opérations de partage. La Cour de cassation juge qu’en refusant ainsi de
désigner un notaire, ce qui rendait impossible la mise en œuvre des opérations de liquidation et de partage des
intérêts patrimoniaux des époux, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs.
Ainsi, les époux sont habilités à demander au juge du divorce qu’il ordonne la liquidation et le partage du régime
matrimonial, qu’il nomme un notaire liquidateur et qu’il commette un juge pour la surveillance des opérations.
 Quelle est la loi applicable en matière de divorce et de séparation de corps en cas de conflit de
lois ?
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Depuis le 21 juin 2012, date d’entrée en vigueur du règlement Rome III , les époux ont la possibilité de choisir la
loi applicable au divorce ou à la séparation de corps. Ils doivent choisir soit la loi de la résidence habituelle des
époux au moment de la conclusion de la convention, soit la loi de la dernière résidence habituelle des époux
pourvu que l’un d’eux y réside encore au moment de la conclusion de la convention, soit la loi nationale de l’un
des époux au moment de la conclusion de la convention, soit la loi du for. A défaut de choix, le divorce et la
séparation de corps sont soumis à la loi de l’Etat de la résidence habituelle des époux au moment de la saisine
de la juridiction, ou à défaut, à la loi de la dernière résidence habituelle des époux, pour autant que cette
résidence n’ait pas pris fin plus d’un an avant la saisine de la juridiction et que l’un des époux réside encore dans
cet Etat au moment de la saisine de la juridiction, ou à défaut, à la loi de la nationalité des époux au moment la
saisine de la juridiction, ou à défaut, à la loi dont la juridiction est saisie.
La Cour de Cassation a considéré dans deux arrêts qu’il n’y avait pas de reconnaissance de jugements étrangers
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s’ils sont contraires « au principe d’égalité entre époux lors de la dissolution du mariage » .
Le juge du fond (et non de l’exequatur) peut se prononcer sur les intérêts patrimoniaux des ex-époux ayant des
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biens en France quand la décision étrangère de divorce est exécutoire .
 Comment s’articulent le règlement Bruxelles II bis et le règlement Rome III?
Le règlement ROME III détermine la loi applicable au divorce et à la séparation de corps alors que le règlement
de Bruxelles II bis détermine la compétence juridictionnelle.
Cour cass.1ère civ.12 avril 2012, n° 11-20.195
Règlement (UE) n° 1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi
applicable au divorce et à la séparation de corps
22 Cour cass, 1ère civ, 23 octobre 2013, n°12-25.802 et n°12-31.344
23 Cour cass 1ère civ, 28 mars 2013, n°11-19.279
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