I. La Nouvelle

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I. La Nouvelle
I. La Nouvelle
Au programme…
Le récit au XIXe siècle
Le professeur fait lire au moins une nouvelle réaliste et/ou une nouvelle fantastique,
intégralement.
Les œuvres sont choisies parmi celles d’auteurs français ou étrangers : Prosper Mérimée,
Théophile Gautier, Guy de Maupassant, Edgar
Allan Poe, Nicolas Gogol.
●
Présentation du pôle
Le premier pôle du manuel est consacré au genre
narratif bref de la nouvelle, dont la lecture est
accessible à tous les élèves de 4e dès le début de
l’année : elle répond à leur goût pour les récits
simples et courts, et rassurera les lecteurs hésitants. Elle établit également une transition avec
la classe de 5e, au cours de laquelle des analyses
de récits ont été effectuées, et permettra de s’assurer que les notions vues l’année précédente
sont acquises.
Le corpus
Les deux séquences et le dossier thématique
rassemblent de nombreux extraits d’auteurs
français (Maupassant, Mérimée, Villiers de L’IsleAdam, Gautier) ou étrangers (Poe, Gogol). Conformément au programme, le corpus contient deux
nouvelles intégrales : Pierrot de Maupassant et
1 La nouvelle réaliste
La Cafetière de Gautier. On trouvera également
la lecture intégrale du Petit Fût de Maupassant
sur le CD-Rom.
Axées sur la peur et l’étrange, les pages thématiques contiennent aussi une double page pour
accompagner la lecture d’un recueil de nouvelles
et se terminent sur une problématique artistique
sur le thème du visage de la Mort.
La progression
Cette étude sera abordée au choix par les séquences ou par le dossier thématique.
Les deux séquences proposent une progression
qui explore dans la séquence 1 les caractéristiques de la nouvelle réaliste, puis analyse dans
la séquence 2 des nouvelles empruntées au registre fantastique.
Le dossier thématique porte sur le registre fantastique et rassemble un large choix de textes
pour introduire ou conclure les séquences, à proposer en lecture cursive ou en analyse.
Le cahier activités et méthodes
La partie vocabulaire explore le mot « écrire » et
le mot « nouvelle » ; une fiche « Oral » propose
une méthode pour présenter une nouvelle, et
une fiche « Écrit » permet de s’entraîner au résumé d’une nouvelle. Une double page de « Clés
pour l’analyse » contient une mise au point et des
exercices sur la place du narrateur.
I. LA NOUVELLE
Problématique
Comment raconter une histoire courte ?
Présentation de la séquence
Elle rappelle la notion de genre littéraire en définissant la nouvelle et elle permet de caractériser le
réalisme, à travers les textes et l’iconographie.
Le corpus
Le corpus rassemble des textes de deux nouvellistes fameux que sont Mérimée et Maupassant. Les
textes ont été choisis pour leurs thématiques fortes, susceptibles de toucher de jeunes lecteurs et de
les inciter à réagir. Le genre permet, dès la troisième séquence, d’aborder une nouvelle complète et de
se familiariser avec la lecture intégrale d’une œuvre.
La progression
Après avoir étudié l’incipit (texte 1) et la chute (texte 2) d’une même nouvelle, on abordera la lecture intégrale d’une nouvelle complète (texte 3) pour analyser le fonctionnement et les spécificités du genre.
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I – LA NOUVELLE
Étude de la langue dans la séquence 1
Grammaire
Les mots
Les déterminants (> FICHE 3)
Les pronoms (> FICHE 4)
L’adjectif qualificatif (> FICHE 5)
Les compléments circonstanciels (> FICHE 10)
Texte 1
Texte 1
Texte 2
Texte 3 – Langue et écriture (ex. 6 et 7) –
Texte complémentaire n° 1
Texte 3
Les compléments d’objet (> FICHE 11)
La phrase et le texte
Les propositions (> FICHE 13)
Discours direct et discours indirect (> FICHE 16)
Le verbe
Le mode indicatif (> FICHE 18)
Le passé simple (> FICHE 20)
Les temps du récit (> FICHE 21)
La conjugaison passive (> FICHE 25)
Participe présent, gérondif et adjectif verbal
Texte complémentaire n° 1
Texte 3
Texte 1 – Texte complémentaire n° 1
Langue et écriture (ex. 8)
Texte complémentaire n° 1
Texte 3
Texte 2
(> FICHE 27)
Orthographe
Les familles de mots (> FICHE 36)
Vocabulaire
Évolution et formation des mots (> FICHE 37)
Synonymes, antonymes et paronymes (> FICHE 38)
Les niveaux de langue (> FICHE 40)
L’amplification et l’opposition (> FICHE 43)
Texte 1 – Langue et écriture (ex. 1)
Langue et écriture (ex. 4)
Langue et écriture (ex. 1)
Texte 3
Texte complémentaire n° 2
Compétences du socle commun travaillées et évaluées dans la séquence n° 1
Compétence 1 :
La maîtrise de
la langue française
Lire
> Repérer des informa-
tions dans un texte
Lecture de texte/Étude
de la langue
p. 30
Écriture et langue p. 29
Lecture de texte/Étude
de la langue
p. 30
Compétence 1 :
La maîtrise de
la langue française
Lire
Compétence 1 :
La maîtrise de
la langue française
Écrire
> Écrire lisiblement
un texte sous la dictée
Orthographe p. 31
Compétence 1 :
La maîtrise de
la langue française
Dire
> Participer à un débat
Expression orale p. 19
Compétence 5 :
La culture
humaniste
Avoir des connaissances et des repères
> Avoir des connaissances et des repères
littéraires
Connaissance des
auteurs et des œuvres
p. 31
Compétence 5 :
La culture
humaniste
Situer dans
le temps, l’espace,
les civilisations
> Situer des événements
et des œuvres littéraires
Et si les auteurs nous
parlaient ? p. 14
Compétence 5 :
La culture
humaniste
Situer dans
le temps, l’espace,
les civilisations
> Établir des liens entre
des œuvres littéraires et
artistiques
Le texte et l’art p. 23
Toujours d’actualité
p. 27
> Utiliser ses connais-
sances sur la langue
13
LIRE L’IMAGE D’OUVERTURE
p. 12
Louis Adolphe Humbert de Molard, Scène paysanne : la lessive, vers 1852.
1. Cette scène semble être prise sur le vif parce que les personnages, un couple de paysans, donnent
l’impression d’être surpris à un instant donné de leur vie ordinaire et quotidienne : la femme est en
train de faire sa lessive pendant que l’homme fume sa pipe devant leur maison.
2. Au XIXe siècle, le temps de pose était très long parce que l’image devait s’imprimer sur des plaques
photographiques sensibles à la lumière, à l’intérieur de l’appareil ; or, ces plaques n'étaient pas aussi
performantes que les pellicules du XXe siècle, et la pose prenait du temps.
Parcours textes et images
1
Analyser un incipit réaliste
LIRE LE TEXTE
p. 16-17
Mateo Falcone (extrait 1)
1 La région décrite par le narrateur est la Corse, cette île qui se trouve tout au sud de la France, juste
en dessous de Marseille (voir la carte p. 16 du manuel).
Un témoignage précis
2. Le texte indique le point géographique où se trouve le maquis en Corse : au nord-ouest, à la sortie de
Porto-Vecchio, l’une des principales villes de l’île : « En sortant de Porto-Vecchio et en se dirigeant au
nord-ouest, vers l’intérieur de l’île » (l. 1-2).
3. [L. 6 à 14] Ce passage explique la formation des maquis : une coutume corse consiste à mettre le feu
à un champ au lieu d’y répandre du fumier, pour rendre la terre plus fertile grâce aux cendres obtenues.
Les racines des arbres calcinés donnent des jeunes pousses qui forment une végétation touffue et
dense composée d’arbustes et d’arbrisseaux.
4. [L. 1 à 6] a. Les verbes sont conjugués au présent de l’indicatif, qui exprime ici une vérité générale.
b. D’autres indices dans le texte expriment cette valeur de vérité générale : l’explication de la formation du maquis, la réputation de ce lieu, connu des bergers corses, qui sert de refuge et de cachette aux
criminels.
5. a. Il s’agit de la proposition subordonnée conjonctive circonstancielle de temps : « quand j’étais en
Corse en 18.. » (l. 24).
b. Le narrateur se présente ici comme un témoin de l’histoire qu’il va raconter ; cela donne plus de crédibilité et d’authenticité à son récit, qu’il présente comme une histoire dont il est le témoin indirect.
Une entrée en matière vivante
6. [L. 18 à 23] a. Les marques de 2e personne sont : le pronom personnel « vous » (l. 18, 19, 21, 22, 23) ; le
déterminant possessif « vos » (l. 23).
b. Le narrateur s’adresse directement au lecteur.
c. Il lui conseille de se cacher dans le maquis s’il s’est rendu coupable d’un crime et que la justice le
recherche.
7. [L. 24] a. Le narrateur attend le 3e paragraphe de son incipit pour présenter le héros de la nouvelle
qui porte son nom : Mateo Falcone. Le lecteur est d’autant plus intrigué par l’apparition tardive de ce
héros qui, dès le début du récit, lui paraît ainsi plus mystérieux.
b. La principale particularité de ce personnage est son habileté au maniement du fusil : il passe pour
être l’un des meilleurs tireurs de Corse. Cette particularité rend plus inquiétant le personnage.
8 Le narrateur établit un lien entre le maquis et Mateo Falcone à travers plusieurs points de similitudes physiques : Mateo Falcone est « petit mais robuste » (l. 29-30) comme le sont les « cépées très
épaisses » (l. 12) ; ses « cheveux crépus » (l. 30) rappellent les maquis « si épais et si touffus » (l. 16-17).
Cette ressemblance laisse présager que le maquis servira de décor à un évènement dramatique pour le
héros : c’est grâce aux caractéristiques physiques que l’on peut inférer la valeur morale du personnage ;
ainsi, la dureté (la violence n’est pas encore sensible, elle ne sera révélée que par le meurtre de son fils)
perçue dans les traits de Falcone est confirmée par l’aspect inhospitalier et énigmatique du maquis.
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I – LA NOUVELLE
VOCABULAIRE
> FICHE 36
Tous ces mots viennent du latin insula, qui signifie « île ».
a. La presqu’île de Quiberon se trouve en Bretagne. b. Les Corses sont des insulaires. c. L’Espagne
forme une péninsule. d. La Polynésie est composée de multiples îlots.
LIRE L’IMAGE
• Le document de gauche pourrait apparaître dans un manuel de géographie : c’est la photographie
d’un paysage de maquis tel qu’on peut le voir en Corse.
• Le document de droite est « réaliste », parce que l’artiste a peint cette route corse telle qu’il la voyait,
en cherchant à être le plus fidèle possible à la réalité.
2
Étudier l’art de la chute
LIRE LE TEXTE
p. 18-19
Mateo Falcone (extrait 2)
1 Mateo Falcone décide de tuer son fils, Fortunato, parce que celui-ci a dénoncé et donc trahi le bandit Gianetto : « Mateo fit feu » (l. 23).
Un père implacable
2. a. Les adjectifs qui qualifient la voix de Mateo Falcone sont : « terrible » (l. 9) et « forte » (l. 11).
b. Ils soulignent toute la violence et la dureté du personnage, qui reste insensible aux supplications et
aux larmes de son fils.
3. Plusieurs détails montrent la détermination de Mateo Falcone :
– il connaît dès le départ le lieu dans le maquis où il va tuer son fils : un petit ravin (l. 1-2) ;
– il choisit un endroit où la terre est molle donc « facile à creuser » (l. 4) pour enterrer le cadavre ;
– il n’hésite pas un seul instant pour armer son fusil et tirer sur l’enfant (l. 20) ;
– il ne jette même pas un coup d’œil au cadavre (l. 24).
Un enfant pathétique
4. a. [L. 10] Les deux gérondifs sont : « en balbutiant » et « en sanglotant ». Ils soulignent la peur de
l’enfant face à la détermination de son père.
b. Contrairement à Mateo Falcone, le lecteur est ému par les pleurs et les supplications de l’enfant,
pour lequel il ressent de la pitié.
5. a. Fortunato emploie des phrases exclamatives pour supplier son père de l’épargner : « Mon père,
mon père, ne me tuez pas ! » (l. 8) et « Oh ! mon père, grâce ! pardonnez-moi ! Je ne le ferai plus ! » (l. 18).
b. [L. 20 à 27] La froideur du père est particulièrement soulignée dans la phrase suivante : « Sans jeter
un coup d’œil sur le cadavre, Mateo reprit le chemin de sa maison… » (l. 24-25).
6 Mateo Falcone est un véritable barbare parce qu’il ne fait preuve d’aucune émotion, d’aucune sensibilité, d’aucune humanité. Brutal, violent et sans pitié, il n’hésite pas à tuer son fils comme il le ferait
d’un vulgaire gibier. Il fait feu au moment même où l’enfant, dans un geste d’affection désespérée et
de panique, tente d’embrasser les genoux de son père. On pourra insister sur le nom du personnage :
falcone, le « faucon » en italien, donc un prédateur cruel et impitoyable, et « Mateo », qui rappelle
étrangement le verbe espagnol mato, « je tue ».
[L. 1 à 4] Cependant Falcone a marché quelque deux cents pas dans le sentier et ne s’est arrêté que
dans un petit ravin où il est descendu. Il a sondé la terre avec la crosse de son fusil et l’a trouvée molle
et facile à creuser. L’endroit lui a paru convenable pour son dessein.
LIRE L’IMAGE
• Les éléments qui soulignent la diagonale descendante de l’image sont :
– le canon du fusil pointé vers l’enfant agenouillé ;
– la position des bras de l’homme qui s’apprête à tirer ;
– le geste de l’enfant qui lève les bras en signe de supplication vers son bourreau.
C’est naturellement le fusil qui est ici mis en valeur.
• En arrière-plan de cette scène apparaît le maquis.
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3
Lire une nouvelle intégrale
p. 20-25
LE TEXTE ET L’ART p. 23
SOCLE
COMMUN
5
Cette activité permet de travailler la compétence 5, et plus particulièrement « Établir des
liens entre des œuvres littéraires et artistiques », du socle commun de connaissances et de compétences.
> CARNETS ARTS N° 3 ET N° 4
• Les indices du texte qui renvoient au monde rural sont : le statut social des personnages (Mme Lefèvre est une « dame de campagne […] une de ces demi-paysannes », l. 1-2, et Rose, sa servante est « une
brave campagnarde », l. 6), leur façon de parler avec l’emploi d’expressions locales comme « piquer du
mas » (l. 68), et le cadre de la nouvelle, la campagne normande. Dans le tableau de Gustave Courbet,
le monde rural est représenté par certains personnages qui assistent à l’enterrement, notamment le
groupe de femmes coiffées de bonnets blancs à l’extrême droite du tableau et les quatre hommes coiffés d’un chapeau noir qui portent le cercueil à l’extrême gauche. Le paysage qui occupe l’arrière-plan
du tableau nous montre une vue panoramique sur la campagne d’Ornans.
• L’écrivain comme le peintre cherchent à être fidèles à la réalité, qu’ils ne vont pas modifier pour la
rendre moins laide, plus attrayante. C’est pourquoi Maupassant insiste sur l’avarice et l’égoïsme de
Mme Lefèvre et que Courbet ne gomme pas les rides, les traits plus marqués des personnages qu’il a
peints ; ils sont représentés tels qu’ils sont dans la réalité.
• Les protagonistes de la nouvelle de Maupassant sont des personnes ordinaires et modestes (une
veuve demi-paysanne et sa servante dévouée) ; Gustave Courbet, lui, détourne le grand format rectangulaire (habituellement réservé aux scènes historiques célèbres) pour offrir une vue panoramique sur
la cérémonie d’enterrement et souligner ainsi le réalisme de ce moment banal qui réunit des personnages ordinaires : le prêtre et ses enfants de chœur, la famille et les proches (au milieu du tableau, avec
en particulier la femme essuyant ses larmes avec un mouchoir), les voisins et familiers du défunt qui
viennent lui rendre un dernier hommage avant la mise en terre du corps.
• Guy de Maupassant et Gustave Courbet ont vécu au XIXe siècle ; le mouvement artistique qui les relie
est le réalisme.
LIRE LE TEXTE
Pierrot
p. 25
1 Le titre de la nouvelle, Pierrot, correspond au nom du chien adopté par Mme Lefèvre ; c’est en
quelque sorte l’un des trois personnages principaux du récit.
Une histoire courte et réaliste
2. Les deux personnages principaux sont :
– Mme Lefèvre : une demi-paysanne veuve (l. 1), coquette (l. 2), peu cultivée (l. 2-3), qui prend des grands
airs en société et se révèle en fait sans cœur, égoïste et très avare (l. 26-27), qui cherche à cacher son
origine modeste en dissimulant ses « grosses mains rouges sous des gants de soie écrue » (l. 5) ;
– Rose, sa servante, une brave fille de la campagne qui a bon cœur et est dévouée à sa maîtresse (l. 6) ;
3. [L. 7 et 8] a. Les groupes nominaux compléments du verbe « habitaient » sont :
– un complément d’objet direct : « une petite maison à volets verts » ;
– trois compléments circonstanciels de lieu : « le long d’une route », « en Normandie », « au centre du
pays de Caux ».
b. Le récit se déroule en Normandie.
4. Les paroles des deux femmes reflètent avec réalisme le milieu paysan :
– elles commettent des fautes de conjugaison en employant le mauvais auxiliaire : « ils ont passé par
là » (l. 17) au lieu de « ils sont passés par là » ;
– elles prononcent le mot « chien », « quin » (l. 40) ;
– elles emploient des expressions locales comme « piquer du mas » (l. 68).
Un texte critique
5. Une nuit, Mme Lefèvre s’est fait dérober une douzaine d’oignons dans son potager (l. 11). Un voisin
fermier lui conseille de prendre un chien pour dissuader les voleurs (l. 24).
6. a. [L. 49 à 55] Les verbes à la voix active sont : « on lui offrit » (l. 49), « Il but » (l. 50), « On lui présenta »
(l. 50), « Il mangea » (l. 50), « Mme Lefèvre eut une idée » (l. 51), « il sera bien accoutumé » (l. 51), « on le laissera » (l. 52), « Il trouvera » (l. 52), « On le laissa » (l. 53), « ce qui ne l’empêcha point » (l. 53), « il ne jappait »
(l. 54), « il jappait » (l. 55). Il n’y a qu’un seul verbe conjugué à la voix passive : « Il fut installé » (l. 49).
16
I – LA NOUVELLE
b. Mme Lefèvre fait tout pour que ce chien, qu’elle n’a même pas acheté puisque c’est le boulanger qui
le lui a offert, lui coûte le moins possible. Ce « roquet immonde » (l. 46) plaît avant tout à sa nouvelle
maîtresse parce qu’il est petit, donc il ne coûtera pas trop cher en nourriture. Elle ne lui donne pas à
manger et laisse l’animal rôder dans le village pour se trouver lui-même sa maigre pitance (l. 52). La
veuve s’habitue cependant à la présence de Pierrot et lui témoigne même parfois des marques d’affection, du moment qu’elle peut éviter de dépenser de l’argent pour l’entretenir (l. 58-60).
7. Mme Lefèvre préfère l’argent : horrifiée par le montant de la taxe exigée par les impôts (l. 64), elle préfère se débarrasser de son chien (l. 65). Elle refuse même de payer les services du cantonnier et de l’apprenti du voisin parce qu’elle trouve les sommes demandées bien trop exagérées et préfère s’acquitter
de la tâche toute seule, accompagnée de la fidèle Rose (l. 91-97). Saisie de remords, elle court chez le
puisatier afin qu’il puisse ressortir Pierrot du puits (l. 131) ; mais, refusant de payer les quatre francs demandés (on notera que la somme pour sauver le chien ne cesse de diminuer), elle préfère le laisser là et
venir le nourrir chaque jour d’un morceau de pain (l. 150-151). À la fin de la nouvelle, lorsqu’elle découvre
qu’il y a un autre chien, bien plus gros que Pierrot, dans le puit, elle panique à l’idée de devoir nourrir
tous les chiens abandonnés et retourne chez elle en mangeant le morceau de pain destiné à son chien
(on ne manquera pas de faire relever aux élèves dans ce geste toute l’ironie cruelle de l’auteur vis-à-vis
de Mme Lefèvre, que la mesquinerie finit par rendre ici ridicule et pitoyable).
8. La chute confirme la pingrerie de Mme Lefèvre : elle préfère se passer des services d’un chien plutôt
que de dépenser le moindre sou pour l’entretenir. Cette femme se révèle être un monstre d’avarice et
de mesquinerie qui n’hésite pas à abandonner et à violenter son chien ; elle a donc bien « une âme de
brute prétentieuse » (l. 3-4).
9 Les différentes étapes du déroulement de ce récit sont les suivantes :
– Situation initiale > Mme Lefèvre, une demi-paysanne veuve, vit seule à la campagne avec Rose, sa
fidèle servante.
– Élément perturbateur > Une nuit, on lui vole une douzaine d’oignons dans son potager.
– Péripéties > Après avoir consulté son entourage, et sur le conseil d’un fermier voisin, Mme Lefèvre
décide d’adopter un petit roquet prénommé « Pierrot » que le boulanger lui cède gratuitement. La
veuve s’habitue à la présence de son tout nouveau compagnon, pour lequel elle ne dépense rien en
nourriture. Un jour, les impôts lui réclament une taxe de huit francs prélevée pour les animaux. Horrifiée, Mme Lefèvre refuse de payer et décide de se débarrasser de Pierrot en le jetant dans le puits d’une
carrière où sont abandonnés tous les chiens non désirés. Hantée par d’effroyables cauchemars, elle
retourne au puits et constate que Pierrot est toujours en vie et ne cesse de japper. Refusant une fois
encore de payer les services d’un puisatier pour libérer l’animal, prise de remords, elle se propose de lui
jeter chaque jour un morceau de pain beurré.
– Élément de résolution > Un matin, Mme Lefèvre et Rose découvrent qu’un autre chien, plus fort et
plus gros que Pierrot, a été abandonné dans le puits.
– Situation finale > Prise de panique à l’idée de devoir nourrir tous les chiens abandonnés, elle repart
chez elle en mangeant le morceau de pain qu’elle destinait à Pierrot, suivie de Rose les larmes aux yeux.
> FICHE 16
[L. 40 et 41] Elle déclara : « Je veux bien nourrir un quin, mais je n’en achèterai pas. »
VOCABULAIRE
> FICHE 40
Langage familier : un cabot, un clébard, un toutou. – Langage courant : un chien. – Langage soutenu :
un mâtin.
LIRE L’IMAGE
p. 25
• Le texte précise le nom du chien et de la fillette pour montrer qu’ils sont liés l’un à l’autre et entretiennent une relation complice.
• La photo nous montre Léa en train de sourire, ravie de partir en vacances et ignorant tout de ce qui
se prépare, tenant son chien Benji dans ses bras, contre son cœur. C’est une image de bonheur que le
texte du slogan vient contredire.
• Cette affiche publicitaire, réalisée par la Fondation 30 millions d’amis, cherche à convaincre les propriétaires d’animaux domestiques de ne pas les abandonner l’été lorsqu’ils partent en vacances.
17
 Construire le bilan
LIRE LE TEXTE
p. 26
Le petit fût
1. Cette nouvelle de Maupassant a été publiée dans le journal Le Gaulois le 7 avril 1884, donc au XIXe siècle.
2. Les personnages principaux de ce récit sont : la mère Magloire, une vieille femme encore en bonne
santé, et maître Chicot, un aubergiste qui doit hériter de la ferme de la vieille dame.
Le sujet de l’action est l’argent et l’appât du gain : l’aubergiste pousse la mère Magloire à boire pour la
faire mourir plus vite et hériter ainsi de sa ferme.
3. Les différentes étapes de l’action sont :
– Un matin, l’aubergiste, maître Chicot, apporte chez la mère Magloire un petit tonneau d’alcool : il le
lui fait goûter puis lui laisse le tonneau.
– La vieille femme se met à boire toute seule et devient alcoolique. Sa santé ne cesse de décliner.
– L’hiver suivant, vers Noël, suite à une mauvaise chute dans la neige, la mère Magloire, complètement
ivre, meurt.
– Maître Chicot hérite de la ferme de la vieille femme tout en déplorant que, sans l’alcool, elle aurait
encore pu vivre dix ans de plus.
4. Les détails réalistes qui caractérisent le langage des paysans sont :
– des tournures négatives incorrectes : « quand n’y en aura pu, y en a encore » (l. 6) ;
– des syllabes avalées : « n’vous gênez point. Je n’suis pas regardant » (l. 7), « Pûtôt » (l. 7) ; « pu que je
serai content » (l. 8) ;
– une syntaxe malmenée avec une concordance des temps non respectée : « Pûtôt que ce sera fini, pu
que je serai content » (l. 7-8) ;
– un néologisme : « boissonnée » (l. 21), verbe construit à partir du substantif « boisson »
5. « Le petit fût » provoque la mort de la mère Magloire : tel un poison, il est l’arme secrète de l’aubergiste pour abréger les jours de cette vieille femme qui, en bonne santé au début de la nouvelle, semblait encore avoir de longues années de vie devant elle.
Toujours d’actualité
p. 27
Du nouveau sur la nouvelle
SOCLE
COMMUN
5
Cette activité permet de travailler la compétence 5, et plus particulièrement « Établir des
liens entre des œuvres littéraires et artistiques », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. Il s’agit de la vieille mère Magloire et de l’aubergiste, maître Chicot : ce dernier vient d’apporter le
petit fût d’alcool à la vieille femme et ils sont en train de le goûter.
2. Le champ désigne la portion de l’espace visible à travers l’objectif d’une caméra et limité par le cadre.
Le contre-champ est l’espace frontal et opposé à l’espace du champ. Un raccord en champ/contrechamp consiste à montrer en alternance les deux axes d’une scène : le personnage qui parle puis celui
qui lui répond, dans une scène de dialogue entre deux personnages se faisant face, comme c’est le cas
dans cette scène de discussion entre la mère Magloire et maître Chicot.
3. Le générique de ce film d’animation est un ticket de caisse avec les prix des articles achetés qui sont
des produits d’alimentation : des yaourts, des haricots. Le lien avec la nouvelle Pierrot est donc le coût
de la nourriture qui révolte tant Mme Lefèvre, si économe et si avare surtout quand il s’agit de nourrir
son chien. Par ailleurs, le thème principal de la nouvelle, l’argent, est ici transposé de manière moderne
et contemporaine sous l’aspect d’un ticket de caisse de supermarché.
18
I – LA NOUVELLE
S’exercer
Langue et écriture
p. 28
VOCABULAIRE DE LA RÉALITÉ ET DE LA FICTION
1. Synonymes du nom « réalité » > l’authenticité, la certitude, la vérité.
Antonymes du nom « réalité » > la fausseté, la fiction, l’imagination, l’illusion, l’utopie.
2. a. champêtre : à remettre dans la liste e. b. unique : à remettre dans la liste d. c. tangible : à remettre
dans la liste a. d. chimérique : à remettre dans la liste b. e. quotidien : à remettre dans la liste c.
3. a. Il a mis en scène un film célèbre b. Comprends-tu ce que tu dis ? c. Son métier lui a permis de
s’épanouir. d. La fée peut combler vos vœux. e. Cette statue a été fabriquée en terre cuite f. À force de
travail, nous avons atteint notre idéal.
4. réelle/ment, mot dérivé suffixé : adjectif féminin + suffixe -ment. > Maupassant a réellement vécu
en Normandie.
la télé-réalité, mot composé de deux radicaux et reliés par un tiret, abréviation de « télévision » + nom
commun. > Cette émission de télé-réalité ne passionne pas les foules.
une réalis/ation, mot dérivé suffixé : radical + suffixe féminin -ation. > La réalisation de cette recette
de cuisine est très difficile.
un réalis/ateur, mot dérivé suffixé : radical + suffixe masculin -ateur. > C’est la deuxième fois que James
Cameron est cité pour l’oscar du meilleur réalisateur.
réalis/er, mot dérivé suffixé : radical + suffixe verbal -er. > Cet été, je vais enfin réaliser l’un de mes
rêves : visiter le temple d’Angkor au Cambodge.
ir/réel, mot dérivé préfixé : préfixe privatif in- + adjectif masculin. > Un lutin est un être irréel.
le sur/réalisme, mot dérivé préfixé : préfixe sur- + nom commun. > En 1924, l’écrivain André Breton a
fondé un mouvement artistique appelé le « surréalisme ».
ir/réalis/able, mot dérivé préfixé et suffixé : préfixe privatif in- + radical + suffixe -able. > Ce projet architectural s’est révélé irréalisable.
5. a. vérifier b. véridique c. véritablement d. la véracité e. avérer f. vérifiable
GRAMMAIRE
6. a/b. – « toujours avant qu’on se fût aperçu de sa présence » : proposition subordonnée conjonctive
circonstancielle de temps du verbe « déguerpissait » ;
– « parfois » : adverbe de temps, complément circonstanciel de temps du verbe « demeurait » ;
– « quatre ou cinq jours » : groupe nominal, complément circonstanciel de temps du verbe « demeurait » ;
– « quand il avait recueilli dans sa tournée des provisions suffisantes » : proposition subordonnée
conjonctive circonstancielle de temps du verbe « demeurait ».
7. – « au bord de l’eau bleue » : groupe nominal précédé d’une préposition, complément circonstanciel
de lieu du verbe « s’arrondit » ;
– « Là-bas » : locution adverbiale, complément circonstanciel de lieu du verbe « s’avance » ;
– « à droite » : locution adverbiale, complément circonstanciel de lieu du verbe « s’avance » ;
– « au loin » : locution adverbiale, complément circonstanciel de lieu du verbe « s’avance » ;
– « dans la mer » : groupe nominal précédé d’une préposition, complément circonstanciel de lieu du
verbe « s’avance » ;
– « À gauche » : locution adverbiale, complément circonstanciel de lieu du verbe « montrent ».
VERBE
8. Il s’étrangla, toussa, éternua, cracha, et, hurlant, empoigna à pleine main son verre qu’il lança contre
la bonne. Elle le reçut en plein ventre. Alors, exaspérée, elle prit sous son bras la tête du moutard, et commença à lui entonner coup sur coup des cuillerées de soupe dans le gosier. (Guy de Maupassant, Le Petit.)
9. a. Une église se dresse à l’horizon. b. Un manoir s’étend sur la colline. c. Un lac se situe près du village. d. Un sentier s’enfonce dans la forêt. e. Une grotte se cache au milieu de la montagne. f. Une ferme
se trouve en haut de la route.
19
Évaluation
Lecture de texte/Étude de la langue Le petit fût (extrait 2)
p. 30-31
SOCLE
COMMUN
1 Cette activité permet d’évaluer la compétence 1, et plus particulièrement « Repérer
des informations dans un texte » et « Utiliser ses connaissances sur la langue », du socle commun de
connaissances et de compétences.
1. Les personnages principaux de ce récit sont la mère Magloire, une vieille femme encore en bonne
santé, et maître Chicot, un aubergiste ; tous deux cherchent à passer un accord : en échange d’une
rente versée par l’aubergiste chaque mois, la mère Magloire s’engage à lui léguer sa ferme.
2. Les expressions réalistes dans le texte sont :
– « Je n’en ai pas pour pu de cinq à six ans pour sûr. Me v’la sur mes soixante-treize ans, et pas vaillante
avec ça. L’aut’e soir, je crûmes que j’allais passer. Il me semblait qu’on me vidait l’corps, qu’il a fallu me
porter à mon lit » (l. 3-6) ;
– « vieille pratique » (l. 8), « comme l’clocher d’l’église » (l. 8-9), « pour sûr » (l. 10) ;
– « Tu ne crèveras donc point, carcasse ! » (l. 25).
3. [L. 16 et 17] a/b. Les verbes sont les suivants :
– « s’écoulèrent » : passé simple de l’indicatif, action bien achevée et ponctuelle ;
– « se portait » : imparfait de l’indicatif, action qui dure ;
– « paraissait » : imparfait de l’indicatif, description.
4. a. La mère Magloire désire obtenir une rente de cinquante écus par mois au lieu des trente écus
proposés par l’aubergiste.
b. Elle parvient à convaincre maître Chicot en affirmant qu’à soixante-treize ans il ne lui reste pas plus
de cinq, six ans à vivre, car elle est en mauvaise santé (l. 3-6). Au bout d’une journée de discussions, l’aubergiste cède aux exigences de la vieille paysanne, qui obtient en plus dix écus de pot-de-vin (l. 14-15).
5. Le champ lexical de l’argent : « les cinquante écus » (l. 12-13), « dix écus de pot-de-vin » (l. 14-15), « il
payait » (l. 18), « cette rente » (l. 18), « ruiné » (l. 19), « paysan volé » (l. 27).
6. Maître Chicot se met à haïr la vieille paysanne parce qu’elle ne semble pas décidée à mourir : cela fait
déjà trois ans qu’il lui verse une rente de cinquante écus par mois, et la mère Magloire ne vieillit pas ;
elle donne même l’impression de se réjouir du tour qu’elle lui a joué ; l’aubergiste s’estime donc volé et
trompé par la paysanne.
7. a. « le lendemain » (l. 14) est un groupe nominal, complément circonstanciel de temps du verbe « signèrent » ; « trois ans » (l. 16) est un groupe nominal, sujet du verbe « s’écoulèrent ».
b. Les indices temporels sont importants car le temps devient un ennemi pour maître Chicot : l’ellipse de trois années depuis la signature de l’acte justifie toute la haine et le désespoir de l’aubergiste, qui constate que le temps ne semble avoir aucune prise sur la mère Magloire, toujours en
bonne santé.
8. On retrouve dans cet extrait les caractéristiques d’une nouvelle réaliste : l’histoire racontée donne
l’impression d’être vraie grâce aux détails réalistes sur lesquels l’auteur s’appuie pour mener son récit, comme l’origine sociale et modeste des protagonistes (des paysans), la manière particulière dont
s’expriment ces personnages avec l’emploi du discours direct, le décor de la ferme et les habitudes de
vie des paysans normands (l’évocation des moissons en juillet, la présence du tilbury), le déroulement
resserré du temps qui met bien en valeur la forte intensité dramatique de l’histoire.
Un auteur de nouvelles réalistes cherche à rendre compte du réel de la manière la plus fidèle qui soit :
ainsi, pour créer ses personnages, l’écrivain observe la réalité, les êtres humains pour les dépeindre
tels qu’ils sont ; et même si le personnage et le milieu dépeints restent fictionnels, le lecteur peut à son
tour les enrichir en projetant sur eux sa propre expérience du monde réel.
20
I – LA NOUVELLE
Orthographe
SOCLE
COMMUN
1 Cette activité permet d’évaluer la compétence 1, et plus particulièrement « Écrire un
texte sous la dictée », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. « désordonnés » s’accorde avec le nom « gestes » ; « injectés » s’accorde avec le nom « yeux » ; « ouverte » s’accorde avec le nom « bouche » ; « devenu » s’accorde avec le nom « visage » ; « submergé »
s’accorde avec le nom « esprit ».
Connaissance des auteurs et des œuvres
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet d’évaluer la compétence 1, et plus particulièrement « Avoir des compétences et des repères littéraires », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. a/B ; b/A ; c/B ; d/B ; e/A
2. 1631 : Publication de la première feuille d’information.
1789 : Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
1812 : Invention de la presse cylindrique.
1826 : Fondation du journal Le Figaro.
VARIANTES ET OUVERTURES
On pourra compléter cette première séquence par deux extraits de nouvelles réalistes : Un million de
Guy de Maupassant, texte qui apparaît dans le recueil de Quatre Nouvelles réalistes sur l’argent proposé en lectures personnelles de la séquence (p. 49) et qui permet d’approfondir à la fois les thèmes
de l’argent et de l’avarice déjà abordés dans les nouvelles Pierrot et Le Petit Fût, ainsi que la tonalité
comique et grinçante des récits réalistes de Maupassant ; la lecture de l’incipit d’Un cœur simple de
Flaubert sera proposée comme un prolongement possible pour des élèves d’un bon niveau. L’analyse
de ce premier chapitre de la nouvelle cherchera à sensibiliser les élèves à la présentation du cadre
spatio-temporel et du héros d’un récit complexe, tout en approfondissant un couple de personnages
récurrent du récit réaliste et déjà abordé avec Mme Lefèvre et Rose dans Pierrot : la maîtresse irascible et égoïste, et sa servante soumise et dévouée.
Texte complémentaire n° 1
La guerre était déclarée
Objectifs
– mettre en valeur le traitement du temps dans un récit réaliste ;
– comprendre les relations entre les personnages ;
– repérer le ton satirique d’un texte.
Léopold Bonnin, petit fonctionnaire, a épousé la fille d’un collègue pauvre mais dont la tante, très
riche et sans enfant, doit lui léguer toute sa fortune, qui s’élève à un million de francs. Le couple ne
désire pas avoir d’enfants mais, à l’ouverture du testament, ils apprennent avec stupéfaction qu’ils ne
toucheront l’argent que s’ils ont un héritier dans un délai de trois ans ; sinon, le million sera reversé
aux pauvres.
5
Mais Léopold était malheureux dans son ménage. Sa femme le harcelait d’allusions désobligeantes1,
le martyrisait de sous-entendus. Et le temps passait ; un an déjà s’était écoulé depuis la mort de la
tante. L’héritage semblait perdu.
Mme Bonnin, en se mettant à table, disait :
« Nous avons peu de choses pour le dîner ; il en serait autrement si nous étions riches. »
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Quand Léopold partait pour le bureau, Mme Bonnin, en lui donnant sa canne, disait :
« Si nous avions cinquante mille livres de rente, tu n’aurais pas besoin d’aller trimer2 là-bas, monsieur le gratte-papier3. »
Quand Mme Bonnin allait sortir par les jours de pluie, elle murmurait :
« Si on avait une voiture, on ne serait pas forcé de se crotter4 par des temps pareils. »
Enfin, à toute heure, en toute occasion, elle semblait reprocher à son mari quelque chose de honteux, le rendant seul coupable, seul responsable de la perte de cette fortune.
Exaspéré5, il finit par l’emmener chez un grand médecin qui, après une longue consultation, ne se
prononça pas ; déclarant qu’il ne voyait rien ; que le cas se présentait assez fréquemment ; qu’il en
est des corps comme des esprits ; qu’après avoir vu tant de ménages disjoints6 par incompatibilité
d’humeur, il n’était pas étonnant d’en voir d’autres stériles par incompatibilité physique. Cela
coûta quarante francs.
Un an s’écoula, la guerre était déclarée, une guerre incessante, acharnée, entre les deux époux, une
sorte de haine épouvantable. Et Mme Bonnin ne cessait de répéter :
« Est-ce malheureux, de perdre une fortune parce qu’on a épousé un imbécile ! » ou bien :
« Dire que si j’étais tombée sur un autre homme, j’aurais aujourd’hui cinquante mille livres de
rente ! » ou bien :
« Il y a des gens qui sont toujours gênants dans la vie. Ils gâtent tout. »
Les dîners, les soirées surtout, devenaient intolérables. Ne sachant plus que faire, Léopold, un soir,
craignant une scène horrible au logis, amena son ami Frédéric Morel, avec qui il avait failli se
battre en duel. Morel fut bientôt l’ami de la maison, le conseiller écouté des deux époux.
Il ne restait plus que six mois avant l’expiration du dernier délai donnant aux pauvres le million ;
et peu à peu Léopold changeait d’allures vis-à-vis de sa femme, devenait lui-même agressif, la
piquait souvent par des insinuations7 obscures, parlait d’une façon mystérieuse de femmes d’employés qui avaient su faire la situation de leur mari.
Guy de Maupassant, Un million, 1882.
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
désobligeantes : vexantes.
trimer : peiner.
un gratte-papier : mot péjoratif pour désigner un employé de bureau.
se crotter : se salir.
exaspéré : rendu furieux, à bout de nerfs.
disjoints : séparés.
insinuations : sous-entendus.
qui avaient su faire la situation de leur mari : qui avaient su contribuer à l’avancement professionnel de la carrière
de leur mari.
LIRE LE TEXTE
1 Léopold Bonnin et sa femme donnent-ils une image heureuse de couple marié ? Justifiez votre
réponse.
Une guerre ouverte
2. Relevez toutes les indications de temps concernant le délai imposé aux époux Bonnin : à la fin de
l’extrait, combien de temps s’est écoulé depuis la mort de la tante ?
3. Relevez le champ lexical de l’argent.
4. [L. 4 à 12] a. Relevez les trois compléments circonstanciels de temps en précisant leur classe grammaticale et le verbe que chacun d’eux complète. > GRAMMAIRE, FICHE 10
b. Quels sont les différents reproches formulés par Mme Bonnin à son mari ?
5. Par quels mots Mme Bonnin désigne-t-elle son mari ? Quel sentiment traduisent-ils chez elle ?
6. [L. 27 à 30] Relevez les verbes conjugués à l’imparfait de l’indicatif. Quelle est la valeur de ce temps
ici ? > GRAMMAIRE, FICHE 21
Un texte satirique
7. Où Léopold Bonnin emmène-t-il sa femme ? Dans quel dessein ?
8. [L. 13 à 17] a. Combien y a-t-il de phrases dans ce passage ? Relevez les différents verbes conjugués
dans la première phrase et indiquez le nombre de propositions : comment sont-elles reliées entre
elles ? > GRAMMAIRE, FICHE 13
22
I – LA NOUVELLE
b. D’après vous, que cherche à suggérer le narrateur par la longueur de cette phrase ? Qu’en concluezvous sur la brièveté de la phrase suivante ?
c. En quoi ce passage est-il comique ?
9. [L. 24 à 26] Quel personnage apparaît dans la vie quotidienne du couple à la fin de l’extrait ? Qui introduit ce personnage dans la vie du couple ? Par quels termes est-il désigné ?
10 Après avoir relu la dernière phrase, quel va être selon vous le rôle joué par ce personnage dans le
récit ?
> FICHE 18
[L. 27 à 30] Transposez ce passage au présent de l’indicatif.
Corrigé du texte complémentaire n° 1
1 Léopold Bonnin et sa femme ne donnent pas l’image d’un couple comblé et uni : dès la ligne 1, le
narrateur nous précise que Léopold est « malheureux dans son ménage » car son épouse ne cesse de le
harceler. À la fin du texte, ils n’arrêtent pas de se disputer et ne se supportent plus (l. 24-25).
Une guerre ouverte
2. Les indications de temps concernant le délai sont : « un an déjà s’était écoulé depuis la mort de la
tante » (l. 2-3), « Un an s’écoula » (l. 18), « Il ne restait plus que six mois avant l’expiration du dernier
délai » (l. 27). À la fin de l’extrait, il s’est donc écoulé environ deux ans et demi depuis le décès de la
tante.
3. Le champ lexical de l’argent est : « L’héritage » (l. 3), « riches » (l. 5), « cinquante mille livres de rente »
(l. 7), « la perte de cette fortune » (l. 12), « Cela coûta quarante francs » (l. 16-17), « perdre une fortune »
(l. 20), « cinquante mille livres de rente » (l. 21-22), « donnant aux pauvres le million » (l. 27).
4. [L. 4 à 12] a. Les trois compléments circonstanciels de temps sont : en « se mettant à table », gérondif
complément circonstanciel de temps du verbe « disait » ; « Quand Léopold partait pour le bureau », proposition subordonnée conjonctive complément circonstanciel de temps du verbe « disait » ; « Quand
Mme Bonnin allait sortir par les jours de pluie », proposition subordonnée conjonctive complément
circonstanciel de temps du verbe « murmurait ».
b. Les différents reproches adressés par Mme Bonnin à son mari portent sur leur situation financière
et leur statut social : s’ils avaient hérité de la fortune de la tante, autrement dit, s’ils avaient conçu un
héritier, tous deux feraient de meilleurs repas (l. 5) ; lui n’aurait plus besoin de travailler et de conserver
cette place modeste de petit fonctionnaire (l. 7-8) ; ils auraient leur propre voiture et éviteraient ainsi
de « se crotter » en marchant sous la pluie (l. 10). L’héritage de la tante pourrait lui permettre d’être
rentier sans plus jamais se « salir les mains » à travailler, ce qui au XIXe siècle est considéré comme un
idéal pour la bourgeoisie.
5. Mme Bonnin désigne son mari par les termes « monsieur le gratte-papier » (l. 7-8), « un imbécile »
(l. 20) ; ce sont des termes péjoratifs qui traduisent tout le mépris, puis la haine et la colère que la jeune
femme ressent à l’égard de son époux.
6. [L. 27 à 30] Les verbes conjugués à l’imparfait de l’indicatif sont : « restait », « changeait », « devenait », « piquait », « parlait ». La valeur de ce temps ici est celle d’une action itérative, habituelle.
Un texte satirique
7. Léopold emmène sa femme consulter un médecin pour trouver une explication et sans doute une
solution au fait qu’elle ne parvienne pas à être enceinte ; c’est une manière aussi pour lui de lui
rappeler qu’ils sont tous les deux « responsables » de cette situation et qu’il n’est donc pas le seul à
blâmer.
8. [L. 13 à 17] a. Ce passage est composé d’une phrase complexe suivie d’une phrase simple. La première comporte cinq propositions, qui sont toutes reliées entre elles par un mot subordonnant – elles
sont donc subordonnées : « [Exaspéré, il finit par l’emmener chez un grand médecin] [qui, après une
23
longue consultation, ne se prononça pas] ; [déclarant qu’il ne voyait rien] ; [que le cas se présentait
assez fréquemment] ; [qu’il en est des corps comme des esprits] ; [qu’après avoir vu tant de ménages
disjoints par incompatibilité d’humeur, il n’était pas étonnant d’en voir d’autres stériles par incompatibilité physique]. »
b. La longueur de cette phrase suggère le long discours du médecin qui, finalement, avoue son impuissance à régler médicalement le problème des Bonnin, qui semble selon lui être davantage lié à une incompatibilité physique entre les deux époux. La brièveté de la phrase suivante, « Cela coûta quarante
francs », apparaît d’autant plus ironique pour le couple désargenté qui doit en plus payer à un prix
exorbitant un discours creux qui ne leur apporte aucune solution.
c. Les deux personnages sont tournés en ridicule par cette dernière tentative pour résoudre leur problème d’héritage : non seulement la médecine ne peut rien pour eux, mais ils doivent en plus verser
une somme importante pour s’entendre confirmer une réalité qu’ils savaient déjà : ils ne se supportent
plus.
9. [L. 24 à 26] Le personnage qui apparaît dans la vie quotidienne du couple est le collègue de bureau
de Léopold : Frédéric Morel. C’est d’ailleurs Léopold qui, ne supportant plus de passer ses soirées en
tête à tête avec une épouse qui ne cesse de le harceler et de lui faire des scènes, invite un soir le jeune
homme à dîner. Il devient ainsi un familier, désigné par les termes : « l’ami de la maison », « le conseiller
écouté des deux époux » (l. 26).
10 Le jeune homme deviendra bien malgré lui l’instrument des époux Bonnin pour toucher l’héritage :
la dernière phrase de Léopold suggère de façon insidieuse à sa femme que les épouses de certains de
ses collègues n’ont pas hésité à user de leurs charmes pour obtenir l’avancement de leur mari (l. 30).
Devant l’urgence de la situation avec le rappel des six derniers mois de délai (l. 27), le lecteur comprend
que Morel aura une liaison avec Mme Bonnin, qui tombera ainsi enfin enceinte, et le couple pourra
hériter du million de francs.
> FICHE 18
[L. 27 à 30] Il ne reste plus que six mois avant l’expiration du dernier délai donnant aux pauvres le million ; et peu à peu Léopold change d’allures vis-à-vis de sa femme, devient lui-même agressif, la pique
souvent par des insinuations obscures, parle d’une façon mystérieuse de femmes d’employés qui ont
su faire la situation de leur mari.
Texte complémentaire n° 2
Un cœur simple
Objectifs
– réinvestir ses connaissances sur l’analyse d’un incipit réaliste ;
– analyser le portrait d’un personnage typique du récit réaliste : la servante.
5
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Pendant un demi-siècle, les bourgeoises de Pont-l’Évêque envièrent à Mme Aubain sa servante
Félicité.
Pour cent francs par an, elle faisait la cuisine et le ménage, cousait, lavait, repassait, savait brider1
un cheval, engraisser les volailles, battre2 le beurre, et resta fidèle à sa maîtresse, – qui cependant
n’était pas une personne agréable.
Elle avait épousé un beau garçon sans fortune, mort au commencement de 1809, en lui laissant
deux enfants très jeunes avec une quantité de dettes. Alors elle vendit ses immeubles, sauf la ferme
de Toucques et la ferme de Geffosses, dont les rentes montaient à 5 000 francs tout au plus, et elle
quitta sa maison de Saint-Melaine pour en habiter une autre moins dispendieuse3, ayant appartenu à ses ancêtres et placée derrière les halles4.
Cette maison revêtue d’ardoises, se trouvait entre un passage et une ruelle aboutissant à la rivière.
Elle avait intérieurement des différences de niveau qui faisaient trébucher. Un vestibule étroit séparait la cuisine de la salle où Mme Aubain se tenait tout le long du jour, assise près de la croisée
I – LA NOUVELLE
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dans un fauteuil de paille. Contre le lambris5, peint en blanc, s’alignaient huit chaises d’acajou.
Un vieux piano supportait, sous un baromètre, un tas pyramidal de boîtes et de cartons. Deux
bergères6 de tapisserie flanquaient7 la cheminée en marbre jaune et de style Louis XV. La pendule,
au milieu, représentait un temple de Vesta8, – et tout l’appartement sentait un peu le moisi, car le
plancher était plus bas que le jardin.
Au premier étage, il y avait d’abord la chambre de « Madame », très grande, tendue d’un papier à
fleurs pâles, et contenant le portrait de « Monsieur » en costume de muscadin9. Elle communiquait
avec une chambre plus petite, où l’on voyait deux couchettes d’enfants, sans matelas. Puis venait le
salon, toujours fermé, et rempli de meubles recouverts d’un drap. Ensuite un corridor menait à un
cabinet d’études ; des livres et des paperasses garnissaient les rayons d’une bibliothèque entourant
de ses trois côtés un large bureau de bois noir. Les deux panneaux en retour disparaissaient sous
des dessins à la plume, des paysages à la gouache et des gravures d’Audran10, souvenirs d’un temps
meilleur et d’un luxe évanoui. Une lucarne au second étage éclairait la chambre de Félicité, ayant
vue sur les prairies.
Elle se levait dès l’aube, pour ne pas manquer la messe, et travaillait jusqu’au soir sans interruption ; puis, le dîner étant fini, la vaisselle en ordre et la porte bien close, elle enfouissait la bûche
sous les cendres et s’endormait devant l’âtre, son rosaire11 à la main. Personne, dans les marchandages, ne montrait plus d’entêtement. Quant à la propreté, le poli de ses casseroles faisait le désespoir des autres servantes. Économe, elle mangeait avec lenteur, et recueillait du doigt sur la table
les miettes de son pain, – un pain de douze livres, cuit exprès pour elle, et qui durait vingt jours.
En toute saison elle portait un mouchoir d’indienne12 fixé sur le dos par une épingle, un bonnet lui
cachant les cheveux, des bas gris, un jupon rouge, et par-dessus sa camisole13 un tablier à bavette,
comme les infirmières d’hôpital.
Son visage était maigre et sa voie aiguë. À vingt-cinq ans, on lui en donnait quarante. Dès la cinquantaine, elle ne marqua plus aucun âge ; – et, toujours silencieuse, la taille droite et les gestes
mesurés, semblait une femme en bois, fonctionnant d’une manière automatique.
Gustave Flaubert, Un cœur simple, chapitre I, 1877.
1. brider un cheval : lui passer la bride, pièce du harnais qui sert à le conduire.
2. battre le beurre : battre la crème pour obtenir du beurre.
3. dispendieuse : coûteuse.
4. les halles : marché couvert.
5. lambris : revêtement en bois sur les murs intérieurs d’une pièce.
6. bergère : fauteuil large et profond.
7. flanquer : encadrer.
8. Vesta : déesse du Feu et du Foyer chez les Romains.
9. muscadin : au XVIIIe siècle, nom donné à des hommes élégants qui se parfumaient de musc.
10. Audran : célèbre graveur du XVIIe siècle.
11. rosaire : grand chapelet dont on égraine les grains lorsque l’on récite sa prière.
12. indienne : tissu de coton coloré par impression.
13. camisole : chemise.
LIRE LE TEXTE
1 Quel est le premier personnage présenté dans l’incipit ? Sur quel personnage se referme ce premier
chapitre ? Qu’en concluez-vous sur la place de ce personnage dans la nouvelle ?
Un récit réaliste
2. En vous appuyant sur les paragraphes, délimitez les différentes parties de cet incipit puis proposez
un titre pour chacune d’elles.
3. [L. 1 à 11] Relevez les indices qui montrent que cette nouvelle appartient au genre de récit réaliste.
Un couple bien assorti : la maîtresse désargentée et sa servante dévouée
4. [L. 11 à 27] Dans quel ordre est décrite la maison de Mme Aubain ? Quelle est la dernière pièce présentée ? Pourquoi ?
25
5. Quels éléments dans la maison de Mme Aubain reflètent le niveau social modeste de sa propriétaire ?
6. [L. 3 à 5] a. Quel est le procédé d’amplification utilisé dans cette phrase ? b. Quel en est l’effet sur le
récit ? > VOCABULAIRE, FICHE 43
7. [L. 28 à 33] a. À quel temps sont conjugués les verbes ? Précisez la valeur d’emploi de ce temps dans
l’extrait.
b. À quoi ressemble une journée de la vie de Félicité ? À quoi la servante est-elle comparée à la fin du texte ?
8 Après avoir précisé le sens du mot « félicité », expliquez en quoi la servante porte un nom prédestiné pour sa maîtresse, Mme Aubain.
Corrigé du texte complémentaire n° 2
1 Le premier personnage présenté est Félicité, la servante de Mme Aubain, et c’est sur elle que se
referme le premier chapitre : Félicité sera ce « cœur simple », c’est-à-dire l’héroïne de la nouvelle.
Un récit réaliste
2. Le texte peut être divisé en quatre parties :
– [L. 1 à 5] la présentation des deux personnages principaux et du cadre spatio-temporel de la nouvelle ;
– [L. 6 à 10] le passé de Mme Aubain ;
– [L. 11 à 27] la description de la maison de Mme Aubain ;
– [L. 28 à 39] le portrait de Félicité.
3. [L. 1 à 11] Ce texte est un extrait de récit réaliste parce qu’il se déroule dans un cadre réaliste (la
campagne normande autour de la ville de Pont-l’Évêque, l. 1) ; les personnages sont issus d’un milieu
modeste et ordinaire, et l’histoire se concentre sur la vie simple d’une servante dévouée corps et âme
à sa maîtresse (l. 3-5), veuve et mère de deux enfants (l. 6-7).
Un couple bien assorti : la maîtresse désargentée et sa servante dévouée
4. [L. 11 à 27] Après avoir précisé l’emplacement de la maison de Mme Aubain dans le village (l. 12-13),
l’auteur commence par décrire le « vestibule » (l’entrée) qui donne sur deux pièces du rez-de-chaussée :
la cuisine d’un côté et la « salle où Mme Aubain se tenait tout le long du jour », une espèce de petit salon
(on peut relever le mot « salle » en italique, l. 13) de lambris blancs simplement meublé. Dans le paragraphe suivant, le narrateur présente les deux étages de la maison : au premier, d’abord la « chambre
de Madame » puis celle, plus petite, des enfants, et un salon toujours fermé, ainsi qu’un petit couloir
menant à un cabinet d’études (un bureau) ; au second étage se trouve la chambre de Félicité qui est
sous le toit, comme le suggère le détail de la lucarne (l. 26). C’est donc la chambre de la servante située
sous les combles qui clôt en une brève phrase (l. 26-27) la description de la maison, confirmant le statut
social inférieur de Félicité.
5. Mme Aubain, dont le mari a dilapidé toute la fortune (l. 7-8), est une veuve qui n’a pas beaucoup d’argent, comme le confirment certains détails dans la maison : sa situation d’abord (la maison est coincée
« entre un passage et une ruelle », ce qui suppose un endroit sombre) ; elle comporte plusieurs niveaux,
ce qui n’est pas pratique, voire dangereux puisqu’on trébuche facilement (l. 12) ; enfin, la décoration et
l’ameublement plus que sommaires témoignent d’« un luxe évanoui » (l. 26), à l’image de ces gravures
d’Audran dans le cabinet d’études. Par ailleurs, le détail du salon toujours fermé et dont les meubles
sont recouverts de draps blancs prouvent que Mme Aubain ne reçoit plus et a donc une vie sociale
inexistante. Le détail de la pendule ornée d’un temple de Vesta, la déesse romaine du Foyer, semble
aussi condamner les femmes vivant sous ce toit au célibat et à la chasteté, à l’image des prêtresses
vestales qui entretenaient le feu sacrée de la déesse.
6. [L. 3 à 5] L’auteur accumule une série de verbes d’action d’abord conjugués à l’imparfait puis sous
leur forme infinitive : « elle faisait la cuisine et le ménage, cousait, lavait, repassait, savait brider un
cheval, engraisser les volailles, battre le beurre ». Cette énumération a pour effet d’insister d’une part
sur les qualités de Félicité qui en font une servante convoitée par toutes les bourgeoises de Pontl’Évêque et, d’autre part, sur la multitude de tâches domestiques abattues par la servante pour un
salaire aussi misérable que cent francs par an.
7. [L. 28 à 33] a. Il s’agit de l’imparfait de l’indicatif qui a ici une valeur d’habitude : toutes les journées
de Félicité respectent le même rituel immuable et monotone.
26
I – LA NOUVELLE
b. Tous les matins, Félicité se lève à l’aube pour se rendre à la messe, puis elle ne cesse de travailler
jusqu’au soir ; après avoir fini la vaisselle, elle s’installe devant la cheminée et, « son rosaire à la main »
(l. 30), récite ses prières. C’est donc une femme pieuse. On pourra par ailleurs faire remarquer aux
élèves que le geste de Félicité enfouissant « la bûche sous les cendres » avant de dire son rosaire n’est
pas sans rappeler le rôle sacré des prêtresses du temple de Vesta (voir le décor de la pendule, l. 17),
chargées d’entretenir le feu sacré de la déesse du Foyer. Ses qualités sont sa détermination et sa volonté (« Personne, dans les marchandages, ne montrait plus d’entêtement », l. 30-31) ; elle est économe,
propre et excellente ménagère (« le poli de ses casseroles faisait le désespoir des autres servantes »,
l. 31-32), et elle ne gaspille pas la nourriture (elle « recueillait du doigt sur la table les miettes de son
pain », l. 32-33). Elle s’habille toujours de la même manière avec par-dessus sa chemise « un tablier à
bavette » (l. 35), les cheveux dissimulés sous un bonnet. Félicité est comparée à « une femme en bois »
(l. 39), un automate sans émotion, qui ne fait que remplir des fonctions, sans avoir de vie à elle. Félicité
semble n’avoir jamais été jeune. Le narrateur insiste d’une part sur la maigreur du visage de la servante
(l. 37) et d’autre part sur le fait qu’elle a toujours paru plus âgée (l. 37-38).
8 Le mot « félicité » signifie « bonheur suprême ». La servante porte bien son nom puisqu’elle est effectivement pour Mme Aubain une véritable « perle » (une « aubaine » ?) que lui envient les bourgeoises
de Pont-l’Évêque et qui ferait le bonheur domestique de toute bonne maîtresse de maison.
27
2 La nouvelle fantastique
I. LA NOUVELLE
Problématique
Comment installer suspense et frisson ?
Présentation de la séquence
Elle définit le registre fantastique, par contraste avec le réalisme étudié dans la séquence 1, en donnant aux élèves des outils d’analyse rigoureux et en établissant des liens d’un extrait à l’autre.
Le corpus
Présentant des extraits de quatre auteurs différents, Poe, Gautier, Maupassant et Villiers de L’IsleAdam, il offre la vision la plus complète possible des ressources et des thèmes fantastiques : la mort,
la peur, le rêve ou l’hallucination.
La progression
Pour circonscrire la notion de fantastique, on commencera par étudier l’atmosphère étrange installée
par l’auteur (texte 1), puis la manière dont un phénomène mystérieux est mis en scène (texte 2). On
analysera ensuite le point de vue adopté (texte 3) et on terminera par le doute qui s’installe, quand le
lecteur hésite entre rationnel et irrationnel (texte 4).
28
2 – LA NOUVELLE
Étude de la langue dans la séquence 2
Grammaire
Les mots
Les classes et les fonctions
Les déterminants (> FICHE 3)
Les pronoms (> FICHE 4)
L’adjectif qualificatif (> FICHE 5)
Les mots exclamatifs (> FICHE 7)
La phrase et le texte
Les propositions (> FICHE 13)
Discours direct et discours indirect (> FICHE 16)
Le verbe
Le passé simple (> FICHE 20)
La forme pronominale (> FICHE 23)
La conjugaison passive (> FICHE 25)
Bilan sur le verbe (> FICHE 28)
Orthographe
La ponctuation (> FICHE 29)
Les mots numéraux (> FICHE 31)
Vocabulaire
Évolution et formation des mots (> FICHE 37)
Synonymes, antonymes et paronymes (> FICHE 38)
Champ lexical et mots spécifiques (> FICHE 39)
La comparaison (> FICHE 41)
La métaphore (> FICHE 42)
Textes complémentaires n° 1 et n° 2
Textes 1, 3 – Texte d’évaluation
Texte 3 – Texte d’évaluation
Texte 1
Langue et écriture (ex. 7)
Texte 2
Texte 3 – Texte complémentaire n° 1
Texte 4
Texte 3
Texte 1
Texte 2
Texte 2
Texte 2
Texte 4 – Texte complémentaire n° 2
Langue et écriture (ex. 1)
Texte complémentaire n° 2
Écriture et langue (sujet 1) – Texte
complémentaire n° 1
Textes 3 et 4
Compétences du socle commun travaillées et évaluées dans la séquence n° 2
Compétence 1 :
La maîtrise de la langue
française
Compétence 1 :
La maîtrise de la langue
française
Compétence 1 :
La maîtrise de la langue
française
Compétence 1 :
La maîtrise de la langue
française
Compétence 4 : La
maîtrise des techniques
usuelles de l’information
et de la communication
Compétence 5 :
La culture humaniste
Compétence 5 :
La culture humaniste
Compétence 5 :
La culture humaniste
> Adapter son mode de
Lire
Lire
Lire
Écrire
S’informer,
se documenter
Avoir
des connaissances
et des repères
Situer dans le
temps, l’espace,
les civilisations
Situer dans
le temps, l’espace,
les civilisations
lecture à la nature du
texte.
Expression orale p. 43
> Repérer des informa-
Lecture de texte/Étude
de la langue p. 48
tions dans un texte.
> Utiliser ses connais-
sances sur la langue.
> Rédiger un texte à par-
tir de consignes données.
Écriture et langue p. 47
Lecture de texte/Étude
de la langue p. 48
Toujours d’actualité
p. 45
> Chercher et sélec-
tionner l’information
demandée
B2i p. 49
> Avoir des connais-
Connaissance des
auteurs et des œuvres
p. 48
sances et des repères
littéraires
> Situer des événements
et des œuvres littéraires.
Et si les auteurs nous
parlaient ? p. 34
> Établir des liens entre
des œuvres littéraires et
artistiques.
Le texte et l’art p. 37
29
LIRE L’IMAGE D’OUVERTURE p. 32-33
1. Le corps de la jeune femme est mis particulièrement en valeur parce qu’il est l’élément le plus clair du
tableau : la blancheur de sa chemise de nuit, l’extrême pâleur de sa peau et de son teint contrastent avec
l’arrière-plan plongé dans la pénombre, de laquelle se détachent deux créatures effrayantes et menaçantes.
Les couleurs claires et brillantes de cette femme s’opposent aux rouges foncés, aux jaunes et ocre du fond.
Le peintre a utilisé la technique du clair-obscur pour créer des contrastes forts entre la lumière et l’ombre.
2. Le tableau représente une chambre à coucher sombre, avec au premier plan un lit et une table de
toilette, avec l’amorce d’un miroir au second plan. Sur le lit est étendue une jeune femme qui paraît
anéantie, complètement abandonnée et d’une pâleur morbide ; sa tête penche vers le bas, exposant
son long cou. Au second plan, dans un clair-obscur extrêmement goudronneux, apparaît dans les courtines du lit une tête de cheval avec des yeux blancs énormes, globuleux, saillants, brillants et argentés
comme des opales. Sur la poitrine de la jeune femme est assise en tailleur une créature velue difficilement identifiable : à la fois singe et gnome démoniaque, des oreilles pointues de chauve-souris
surplombant sa tête grimaçante dont les yeux noirs fixent la jeune femme… En fait, nous sommes devant le cauchemar : la dormeuse semble sans vie, allongée dans une position qui paraît encourager les
mauvais rêves, représentée comme une victime offerte, épuisée, vidée de tout souffle de vie par ces
monstres, ces espèces de vampires, qui la contemplent, comme nés de son propre sommeil.
Parcours textes et images
1
Découvrir une atmosphère étrange
LIRE LE TEXTE
p. 36-37
Le masque de la Mort rouge
1 Le texte décrit le palais du prince Prospero où va se tenir un bal masqué : sept grandes salles en
enfilade ont ainsi été décorées pour l’occasion et nous sont tour à tour décrites.
Le décor
2. Les six premières salles sont toutes tendues d’une couleur différente : bleu, pourpre, vert, orange,
blanc et violet. Les fenêtres de chacune de ces salles sont faites de verres colorés en harmonie avec le
ton dominant de la décoration.
3. La dernière salle est différente des six premières parce qu’elle est la seule à être tendue de noir et
que les carreaux de ses fenêtres ne sont pas en harmonie avec le ton de la décoration : ils sont écarlates, « d’une couleur intense de sang » (l. 19).
4. a. [L. 14 à 17] Il s’agit de la phrase suivante : « La septième salle était rigoureusement ensevelie de
tentures de velours noir ».
b. Cette chambre est entièrement noire, recouverte de velours sombre du sol au plafond : elle ressemble à un grand cercueil tendu de velours noir ; le détail des carreaux de fenêtres écarlates, « d’une
couleur intense de sang » (l. 19), rend cette pièce d’autant plus sinistre et morbide.
L’ambiance
5. a. [L. 19 à 22] Les marques de négation sont : « aucune des sept salles » (l. 19), « on ne voyait de lampe
ni de candélabre » (l. 21), « Ni lampes, ni bougies ; aucune lumière de cette sorte » (21-22).
b. Ces marques de négation soulignent l’absence totale d’éclairage direct dans la chambre, ce qui souligne encore davantage son aspect sinistre. Même l’énorme brasier situé dans le corridor projette des
ombres menaçantes sur les tentures de la pièce.
6. a. [L. 25 à 31] La métaphore qui exprime une image surnaturelle est : « la lumière du brasier qui ruisselait
sous les tentures noires à travers les carreaux sanglants était épouvantablement sinistre » (l. 27-29) ; les
trois adjectifs exprimant le surnaturel sont : « fantastiques » (l. 26), « étrange » (l. 30) et « magique » (l. 31).
b. Cette ambiance surnaturelle provoque chez le lecteur un sentiment d’angoisse, de peur : la pièce,
déjà sinistre et inhospitalière par sa couleur noire et son absence de lumière, est aussi étrange, comme
si une menace invisible et mystérieuse y planait.
7 Le lecteur peut s’attendre à ce que cette septième salle soit le décor lugubre et funèbre d’un évènement tragique dans la suite de la nouvelle.
30
2 – LA NOUVELLE
> FICHE 5
Une salle bleu profond, rouge, orangée, des fenêtres vert émeraude, blanches, violettes.
LE TEXTE ET L’ART p 37
SOCLE
COMMUN
5
Cette activité permet de travailler la compétence 5, et plus particulièrement « Établir des liens entre des œuvres littéraires et artistiques », du socle commun de connaissances et de
compétences.
> CARNETS ARTS N° 2 ET N° 3
• Dans ce tableau de Delacroix, les couleurs dominent, rendues d’autant plus vives par une luminosité
éclatante. Le peintre joue des contrastes d’ombre et de lumière, du rouge et du blanc, pour suggérer
cet épisode dramatique de la mort du roi Sardanapale. Les contrastes de couleurs concernent d’abord
les corps blancs des favorites et des esclaves du roi, en particulier celle qui se trouve au premier plan et
qu’un garde s’apprête à poignarder, et l’arrière-plan plus sombre, derrière le grand lit de Sardanapale,
où l’on devine l’incendie qui ravage la cité. On relèvera aussi un contraste entre des couleurs plutôt
chaudes telles que le rouge, l’orange, le rose nacré (le couvre-lit), l’or (qui souligne tout le faste et le
luxe du roi, notamment à travers les étoffes, les bijoux et les pièces d’orfèvrerie, le lit monumental) et
des teintes plus froides comme le blanc presque cadavérique des corps ou du drap dans lequel Sardanapale s’est enveloppé.
• Il serait intéressant d’expliquer aux élèves le point commun entre la situation du prince Prospero
et celle du roi Sardanapale. Dans la nouvelle d’Edgar Poe, le prince s’est enfermé avec ses amis pour
échapper à la peste qui ravage son pays. Pour oublier ce fléau, il décide d’organiser un bal masqué dans
son luxueux palais. La scène représentée par Delacroix raconte l’épisode dramatique de la mort de Sardanapale, dont la capitale est assiégée. Refusant de capituler, le souverain décide de se donner la mort
et de sacrifier avec lui, sur un énorme bûcher, ses trésors et tout ce qui servait ses plaisirs, pour éviter qu’ils ne tombent aux mains de ses ennemis : ses favorites, ses esclaves, ses chevaux, ses chiens…
À demi allongé sur son lit somptueux décoré de têtes d’éléphant dorées, il contemple, fier et impassible, le massacre de ses favorites. Dans la nouvelle comme dans le tableau, les deux héros sont donc
des personnages qui incarnent le luxe, les plaisirs et le pouvoir. Prospero comme Sardanapale décident
de tenir tête à leurs ennemis dans un ultime et tragique geste de provocation qui entraînera aussi leur
mort. L’atmosphère tourmentée de cet épisode tragique est soulignée par ce mouvement de désordre,
de chaos qui règne autour de Sardanapale, le seul personnage à être spectateur passif et immobile du
carnage. Dans le texte de Poe, c’est cette enfilade luxueuse de salles colorées qui aboutit à la dernière
chambre, « la chambre noire », qui donne l’atmosphère tourmentée au décor où va se jouer une mascarade forcément tragique.
• La lumière et les lignes à la fois verticales, horizontales et courbes du tableau de Delacroix accentuent ce mouvement de désordre et de panique qui se concentre tout autour du lit majestueux du
souverain, placide et implacable.
• Edgar Poe et Eugène Delacroix appartiennent à la première moitié du XIXe siècle ; le peintre se rattache au courant artistique appelé le romantisme.
2
Observer un phénomène mystérieux
LIRE LE TEXTE
p. 38-39
Le pied de la momie
1 L’étrangeté du serre-papier tient au fait qu’il est le pied d’une momie, celle de la princesse Hermonthis ; il est assez curieux et plutôt morbide de se servir du pied d’un cadavre momifié comme d’un objet
usuel.
Un sommeil troublé
2. [L. 1 à 5] a. Le narrateur se trouve dans sa chambre à coucher, il est allongé dans son lit.
b. La chambre du narrateur est une chambre ordinaire avec une cheminée, et simplement meublée d’une
petite table et d’un lit ; des aquarelles sont accrochées aux murs et des rideaux pendent aux fenêtres ; la
pièce est éclairée par une lampe à huile posée sur la table et surmontée d’un globe de cristal.
31
3. a. Les verbes de perception sont : « je regardais » (l. 1), « je vis » (l. 19), « j’entendis » (l. 19),
« je vis » (l. 24).
b. C’est le narrateur qui est le sujet de ces verbes de perception ; le lecteur vit cette étrange apparition
à travers son regard, il peut donc plus facilement s’identifier à lui et ressentir d’autant plus ce sentiment de frayeur. Il s’agit d’un point de vue interne.
4. [L. 20 à 23] a. Le verbe « dois avouer » est complété par trois propositions subordonnées conjonctives complétives : « que j’eus chaud et froid alternativement, / que je sentis un vent inconnu me souffler dans le dos, / et que mes cheveux firent sauter, en se redressant, ma coiffure de nuit à deux ou trois
pas. »
b. Le narrateur est en proie à un sentiment de peur de plus en plus fort : il commence à avoir des suées,
il a des frissons et ses cheveux se dressent sur sa tête. Ce sont les manifestations physiques de la peur
qui s’emparent ici du corps du narrateur quand il voit s’entrouvrir l’un de ses rideaux et entend le piétinement particulier d’une personne qui s’avance à cloche-pied.
5. [L. 6 à 15] Le phénomène étrange commence par se manifester à travers des perceptions sonores : le
narrateur entend les boiseries craquer, puis la bûche dans la cheminée émet un jet de gaz bleu, et ce
sont ensuite des perceptions visuelles qui troublent la quiétude de la pièce : les disques des patères
paraissent soudain dotés d’une paire d’yeux qui observent la scène ; enfin, sur la petite table, le pied de
la momie se met à s’agiter de plus en plus jusqu’à sautiller telle une grenouille en produisant un petit
bruit sec sur le bois.
Une jeune fille mystérieuse
6. La scène à laquelle assiste le narrateur est surnaturelle : les rideaux se mettent à bouger, le narrateur entend le piétinement d’une personne marchant à cloche-pied et, soudain, les tentures s’entrouvrent pour faire apparaître une très belle jeune fille vêtue d’un costume égyptien qui s’avance sur un
pied vers le narrateur.
7. [L. 26 à 34] a. La jeune fille est sans nul doute la princesse Hermonthis : elle porte un costume égyptien avec un pagne de bandelettes décorées de hiéroglyphes et alourdies de bitume comme si elle
venait de quitter à l’instant son sarcophage dans lequel elle était emmaillotée. Sa beauté parfaite
montre qu’elle appartient à une grande dynastie égyptienne et, surtout, elle n’a qu’un seul pied.
b. La princesse a certainement quitté son sarcophage afin de récupérer ce qu’on lui avait volé : son pied
transformé en presse-papier par le narrateur.
8. L’explication rationnelle qui pourrait justifier cette apparition serait que le narrateur, couché dans
son lit, en pleine nuit, est en proie à un cauchemar : tout ce qu’il voit et entend n’est que le fruit de son
imagination pendant son sommeil.
9 Cette scène est inquiétante parce que le narrateur est victime d’un phénomène surnaturel qui peu
à peu le terrifie : l’apparition de cette jeune fille égyptienne échappée de son sarcophage telle une
morte-vivante et s’avançant sur un seul pied suscite chez lui, comme chez le lecteur, un sentiment
d’épouvante. Cependant, c’est aussi une scène amusante, notamment à travers la comparaison du pied
à une grenouille sautillant sur les papiers de la table et les commentaires du narrateur sur ce qu’il est
en droit d’attendre de son presse-papier : « J’étais assez mécontent de mon acquisition, aimant les
serre-papiers sédentaires et trouvant peu naturel de voir les pieds se promener sans jambes » (l. 16-17).
> FICHE 31
Gautier vivait au dix-neuvième siècle, il y a cent cinquante ans. Il naquit en mille huit cent onze et
mourut en mille huit cent soixante-douze. Sa nouvelle fut publiée en mille huit cent quarante.
LIRE L’IMAGE
• On reconnaît qu’il s’agit d’un sarcophage, donc un cercueil égyptien, grâce à plusieurs indices :
– le costume, les coiffes et la pose de profil des personnages représentés ;
– les hiéroglyphes qui décorent le sarcophage ;
– la présence de dieux importants de la mythologie égyptienne : Anubis, le dieu à la tête de chacal,
chargé de protéger le défunt et de l’accompagner dans l’autre monde, et Thot, ici représenté avec une
tête d’Ibis, dieu des scribes.
32
2 – LA NOUVELLE
Comme le représente ici la scène peinte sur le sarcophage, Thot préside à l’audition des morts au tribunal d’Osiris pendant qu’Anubis pèse le cœur du défunt en le comparant au poids d’une plume (symbole
de la justice), afin de décider si le mort doit être condamné et livré à la Grande Dévoreuse ou s’il est
digne d’accéder aux Champs d’Ialou, sorte de paradis éternel.
• Comme la jeune fille dans le texte (l. 30-34), les personnages représentés portent un pagne de bandelettes, ils ont le même regard noir en amande et le teint foncé. Les hiéroglyphes noirs et rouges qui
apparaissent sur le pagne de la jeune fille décorent ici la paroi du sarcophage.
3
Suivre les pensées du narrateur
LIRE LE TEXTE
p. 40-41
Qui sait ?
1 Dans cette scène, le narrateur, rentré en pleine nuit chez lui après une soirée à l’Opéra, assiste,
impuissant et terrorisé, au défilé de ses meubles qui quittent d’eux-mêmes sa maison dans un vacarme
assourdissant.
Une découverte progressive
2. [L. 1 à 4] a. Les marques de la première personne sont : les pronoms personnels « Je » et « m’ » (l. 1), et
les adjectifs possessifs « mes » (l. 1), « mes » (l. 2) et « ma » (l. 4).
b. Cette scène est perçue à travers les sens du narrateur, qui est aussi le héros de la nouvelle. C’est donc
un point de vue interne, qui permet au lecteur de s’identifier plus facilement au héros et de partager
ses pensées et ses émotions.
3. Les sensations auditives décrites sont les suivantes : « ces rumeurs » (l. 2), « un bruit très particulier,
très confus » (l. 2-3), qui, au début du deuxième paragraphe, devient un bruit qui s’amplifie : un « bruit
continu, plutôt une agitation qu’un bruit, un remuement vague d’un tas de choses, comme si on eût
secoué, déplacé, traîné tous mes meubles » (l. 5-7). Dans le quatrième paragraphe, le niveau sonore
augmente encore : « le bruit qui grandissait, qui prenait, par moments, une intensité violente, qui
semblait devenir un grondement d’impatience, de colère, d’émeute mystérieuse » (l. 15-17). Le fracas
de la porte violemment ouverte par le héros provoque un « coup » qui « sonna comme une détonation de fusil » (l. 21), et « ce bruit d’explosion » (l. 21-22) provoque alors « un formidable tumulte » (l.
22) dans toute la demeure. Terrorisé par ce bruit « si assourdissant » (l. 23), le narrateur dégaine son
revolver et n’ose plus bouger tandis qu’« un extraordinaire piétinement […] de béquilles de bois et de
béquilles de fer qui vibraient comme des cymbales » (l. 27-28) retentit sur les marches de l’escalier et
les parquets.
Plusieurs mots dans le texte désignent spécifiquement un bruit : « un remuement » (l. 6), « un grondement » (l. 17), « une détonation de fusil » (l. 21), un « bruit d’explosion » (l. 21-22), « un tumulte » (l. 22),
« un piétinement » (l. 27).
On fera remarquer aux élèves que plus le bruit s’amplifie, plus l’angoisse, puis la peur du narrateur
augmentent pour devenir, à la fin de l’extrait, de la terreur.
4. Les deux comparaisons qui traduisent des sensations visuelles sont « les canapés bas et se traînant
comme des crocodiles sur leurs courtes pattes » (l. 31-32) et « les petits tabourets qui trottaient comme
des lapins » (l. 33). Le point commun entre les comparés et les comparants est la taille et la forme des
meubles évoqués.
Une inquiétude grandissante
5. Les interjections « Oh ! je doutai » (l. 8), « oh ! peu de temps » (l. 25), « Oh ! quelle émotion » (l. 34) traduisent la montée d’angoisse du narrateur qui assiste, impuissant, à cette scène surnaturelle.
6. Les quatre synonymes de l’adjectif « bizarre » sont : « étrange » (l. 10), « anormal » (l. 11), « incompréhensible » (l. 11), « mystérieuse » (l. 17).
7. a. [L. 1] Le verbe pronominal qui indique les hésitations du narrateur est « se tromper ».
b. [L. 1 à 13] Le narrateur exprime aussi ce sentiment de doute par :
– le lexique : « la sûreté de mon oreille » (l. 8-9), « trouble étrange » (l. 9-10), « émeute mystérieuse » (l. 17),
le verbe « je doutai » (l. 8) ;
– des modalisateurs qui relativisent son jugement : « cependant » (l. 3), « plutôt » (l. 5), « comme si » (l. 6),
« comment » (l. 12) ;
33
– la ponctuation, avec en particulier l’emploi fréquent des trois points de suspension qui traduisent sa
difficulté à employer les mots justes : « Je n’avais pas peur, mais j’étais… comment exprimer cela… effaré
d’étonnement » (l. 11-12) ;
– l’emploi du pronom indéfini « on » (« on eût secoué », l. 6-7) qui accentue cette idée de doute sur l’identité exacte des bruits, notamment lorsque le narrateur a l’impression d’entendre ses meubles remuer
à l’intérieur de la maison.
8 Le lecteur sachant bien que des meubles ne peuvent se déplacer tout seuls, il peut croire que le
narrateur, dont l’esprit ne cesse d’être assailli par le doute et l’angoisse, est en proie à une hallucination, à une crise de folie. L’explication rationnelle que le lecteur pourra apporter à la « disparition » des
meubles du héros sera alors le cambriolage de la demeure.
VOCABULAIRE
> FICHE 42
Ces expressions ont un sens figuré.
– Mettre la puce à l’oreille : avertir. > Ce bruit étrange dans le moteur m’a mis la puce à l’oreille : la
batterie de ma voiture était déchargée.
– Casser les oreilles : faire trop de bruit ou répéter toujours la même chose de manière à harceler
quelqu’un. > Tu me casses les oreilles avec tes reproches !
– Faire la sourde oreille : rester insensible à une demande, refuser d’entendre. > Chaque fois que sa
mère lui demande de ranger sa chambre, Jeanne fait la sourde oreille.
– Se faire tirer l’oreille : se faire prier, rappeler à l’ordre. > Sacha s’est fait tirer l’oreille par le surveillant
pour avoir doublé ses camarades à la cantine.
LIRE L’IMAGE
• Le spectateur découvre, en même temps que Mélanie, l’héroïne du film Les Oiseaux d’Hitchcock, une
centaine de corbeaux menaçants qui se sont perchés sur un jeu d’enfants (structure métallique qui
rappelle justement ici une cage à oiseaux avec perchoirs) dans une cour d’école et qui semblent prêts
à s’envoler pour attaquer le personnage.
• Dans le photogramme C, le visage de la jeune femme, cadré en gros plan et en plongée, traduit un
sentiment de terreur : les yeux écarquillés, la bouche entrouverte, le mouvement du bras qui tente de
repousser une mouette agressive qui, située de dos au premier plan de l’image, s’apprête à lui crever
un œil.
4
Hésiter entre rationnel et surnaturel
LIRE LE TEXTE
p. 42-43
Véra
1 La présence de la comtesse Véra dans la chambre est étrange, puisque la jeune femme est morte et
enterrée dans un tombeau.
Les retrouvailles
2. [L. 1 à 5] Les mots ou expressions qui rappellent que Véra est une femme morte sont : « faite de volonté et de souvenir » (l. 2) et « belle à en mourir » (l. 5).
3. a. Ce participe passé est formé du préfixe en- (à l’intérieur de) et du nom commun « paradis » ; le
verbe « emparadiser » signifie littéralement « mettre en paradis », en un état de délices ; dans le texte,
le participe passé de ce verbe, qui a aujourd’hui disparu, précise que la jeune femme affiche un sourire
de plaisir, de bonheur.
b. Dans ce paragraphe, le champ lexical du bonheur est : « un frais éclat de rire musical » (l. 1), « joie »
(l. 1), « un sourire tout emparadisé de voluptés » (l. 4).
4. L’union du couple se traduit par le long baiser qu’ils s’échangent : « Leurs lèvres s’unirent dans une
joie divine » (l. 7).
5. [L. 10 et 11] La métaphore qui montre qu’ils sont hors du temps est : « Les heures effleurèrent d’un vol
étranger cette extase » (l. 10).
34
2 – LA NOUVELLE
La séparation
6. [L. 12] a. Le verbe « tressaillit » est conjugué à la 3e personne du singulier du passé simple.
b. Ce temps exprime ici une action soudaine et ponctuelle : tout à coup, le comte se souvient que sa
femme est morte, ce qui provoque aussitôt la disparition de la jeune femme.
7. [L. 15 à 28] La veilleuse, c’est-à-dire une petite lampe qui éclaire faiblement et reste généralement allumée en permanence dans la chambre à coucher, s’éteint et replonge ainsi brutalement le comte dans
la pénombre de la pièce, dans toute l’horreur de la réalité : sa femme est morte, il l’a définitivement
perdue.
8. [L. 29 à 31] a. Il s’agit de phrases exclamatives (« Oh ! […] c’est donc fini ! Perdue !… Toute seule ! […]
Indique-moi le chemin qui peut me conduire vers toi ! » (l. 29-31) et interrogatives (« Quelle est la route,
maintenant, pour parvenir jusqu’à toi ? », l. 29-30).
b. Elles traduisent à la fois l’amour et le désespoir d’un homme passionné qui a perdu celle qu’il aimait
et qui ne peut se résoudre à vivre sans elle.
9. a. La clé tombe du lit nuptial comme si la morte répondait de l’au-delà à la question posée par son
époux (« Quelle est la route, maintenant, pour parvenir jusqu’à toi ? », l. 29-30) en lui jetant la clé de son
tombeau.
b. Le comte s’est allongé sur le lit puisqu’il a cru rejoindre son épouse qui l’appelait ; la clé, qu’il conservait peut-être précieusement dans sa poche, a pu glisser, et il aperçoit à présent l’objet brillant sur le
couvre-lit de fourrure noire.
10 Ce texte nous montre un homme désespéré d’avoir perdu celle qu’il aimait et qui est incapable de
l’oublier et de vivre sans elle ; son esprit en est troublé, ses sens en sont altérés : il a l’impression de
la voir apparaître, de la toucher, de l’embrasser… La décision qu’il prend à la fin de l’extrait laisse présager qu’il va descendre dans le tombeau de la morte pour la rejoindre à son tour et s’unir ainsi à elle
pour l’éternité. (On pourra brièvement évoquer avec les élèves d’autres couples célèbres qui vivent un
amour plus fort que la mort : Tristan et Iseult, Roméo et Juliette, Heathcliff et Cathy dans Les Hauts de
Hurle-Vent d’Emily Brontë, dont un extrait est proposé dans le chapitre 6, p. 140-141 du manuel).
[L. 1] De frais éclats de rires musicaux éclairèrent de leur joie le lit nuptial.
VOCABULAIRE
> FICHE 37
un spectre > spectral / un fantôme > fantomatique / une illusion > illusoire / une chimère > chimérique / une hallucination > hallucinant
LIRE L’IMAGE
• Le photogramme, extrait du film de Rohmer, est un clin d’œil cinématographique au tableau de Füssli
Le Cauchemar (dont une des nombreuses variantes ouvre ce chapitre sur le fantastique, p. 32) ; les deux
images partagent donc :
– les mêmes couleurs (le rouge, le jaune et l’ocre pour la tenture jetée sur le lit, le blanc de la longue
robe portée par les deux jeunes femmes, l’arrière-plan plongé dans le noir avec à droite les plis d’un
lourd rideau rougeâtre) ;
– un effet de clair-obscur qui met en valeur la luminosité diaphane du corps du personnage ;
– le même sujet : l’assoupissement d’une jeune femme alanguie sur un lit, les bras pendus, le cou offert,
en train de rêver. Dans le photogramme, la dimension cauchemardesque et fantastique du tableau
original avec les deux créatures monstrueuses n’est pas explicite.
• Les deux jeunes femmes évoquent la comtesse Véra puisque celle-ci, dans l’extrait de la nouvelle de
Villiers de L’Isle-Adam, apparaît dans sa chambre, assoupie sur son lit, la main passée sous sa longue
chevelure noire et la bouche entrouverte (l. 4) : ces trois personnages féminins offrent la même image
de beauté et de sensualité au regard du spectateur.
• Il s’agit du tableau p. 32 qui ouvre ce chapitre sur la nouvelle fantastique et qui est une autre version
du Cauchemar par Füssli lui-même (on pourra faire remarquer aux élèves que dans cette seconde version, plus connue de l’œuvre, les personnages sont inversés dans leur disposition et que la créature démoniaque assise sur le torse de la dormeuse fixe de son regard menaçant le spectateur lui-même.).
35
 Construire le bilan
LIRE LE TEXTE
p. 44
L’intersigne
1. La scène se déroule dans la chambre du narrateur, mais aussi dans le corridor sur lequel ouvre la
porte de sa chambre. Le héros a entendu quelqu’un frapper à sa porte et, alors qu’il s’avance pour ouvrir, il aperçoit une lueur étrange qui éclaire le trou de la serrure. Il demande qui a frappé ; aussitôt la
lumière s’éteint et la porte s’ouvre lentement ; apparaît au bout du couloir le spectre d’un prêtre coiffé
d’un tricorne.
2. Plusieurs indices annoncent cette apparition surnaturelle :
– le moment : il est plus de minuit (l. 1) ;
– l’état d’esprit du héros narrateur : il a des « idées […] morbides » (l. 2) ;
– la particularité du faisceau lumineux qui passe par le trou de la serrure et touche la main du narrateur, avec la comparaison au regard du hibou, un oiseau de proie nocturne (l. 13) ;
– l’absence brutale et totale de lumière et l’apparition de la silhouette haute et noire au fond du couloir
(l. 17 et 19-20).
3. Le sujet principal des verbes est le pronom personnel « je », donc le narrateur. Le récit est mené selon
le point de vue interne : la scène est perçue à travers les sens du héros narrateur.
4. L’explication rationnelle de ces faits étranges pourrait être que le narrateur a fait un cauchemar :
comme il le précise à la ligne 24, il s’éveille brutalement après cette étrange apparition. Le texte laisse
planer une ambiguïté : le narrateur décrit la scène qu’il vit concrètement, à travers ses sensations et
ses émotions, comme une situation surnaturelle qu’il est le seul à percevoir, mais souligne aussi le
doute qui s’empare de lui. À la fin, il préfère privilégier une explication rationnelle qui le rassure, plutôt
que de croire en la réalité d’un évènement surnaturel et inquiétant. Le récit fantastique ne résout pas
cette hésitation et laisse ainsi au lecteur le soin de trancher entre le rationnel et le surnaturel.
Toujours d’actualité
p. 45
Dracula, es-tu encore là ?
SOCLE
COMMUN
1 Cette activité permet de travailler la compétence 1, et plus particulièrement « Rédiger un
texte à partir de consignes données », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. [Doc. 2 à 4] Les détails fidèles à la description du texte sont différents selon le document choisi.
– Pour le document 2, un photogramme extrait du film Nosferatu le Vampire, de Murnau, le personnage
est cadré en plan moyen et en contre-plongée (ce qui le fait paraître plus grand et menaçant) : on retrouve le nez aquilin, le front haut et bombé, les sourcils épais, l’expression cruelle de la bouche aux
dents blanches et aiguisées et aux lèvres entrouvertes, les oreilles en pointes, l’extraordinaire pâleur
du visage ainsi que les larges mains terminées par des ongles longs et pointus.
– Pour le document 3, un photogramme extrait du film Dracula, de Browning, le personnage étant cadré en plan d’ensemble, on ne peut voir distinctement ses traits ; seule la pâleur du teint est fidèle au
texte de Bram Stocker.
– Pour le document 4, un photogramme extrait du film Dracula, de Coppola, le personnage est cadré en
plan rapproché au niveau de la poitrine ; les détails évoqués sont différents, hormis le teint très pâle :
même si le personnage porte un chapeau haut de forme, on peut deviner un front haut, des cheveux
clairsemés aux tempes mais longs et abondants ailleurs, les sourcils broussailleux, et l’épaisse moustache qui laisse toutefois apparaître les lèvres de Dracula mais sans le détail des dents.
2. Dans le texte, plusieurs détails rendent Dracula inquiétant : il semble doué d’une très grande force, il
paraît cruel – comme le suggèrent l’expression de la bouche et la forme du nez, qui évoque le bec d’un
aigle, donc un prédateur particulièrement menaçant –, la pâleur extrême de son teint évoque la mort,
le détail de la couleur rouge vif des lèvres rappelle que le vampire se nourrit du sang de ses victimes.
Enfin, plusieurs caractéristiques physiques évoquent l’animal, et plus particulièrement le loup : les
dents pointues, les oreilles en pointes, les mains larges aux doigts épais terminés par de longs ongles
fins et pointus comme des griffes.
36
2 – LA NOUVELLE
3. – Dans le document 2, le décor suggère que Nosferatu se trouve à bord d’un bateau : à l’arrière-plan,
on aperçoit des cordages qui évoquent la toile d’une araignée (que l’on retrouve aussi dans la forme et
la position des mains), Nosferatu lui-même guettant sa proie prête à tomber dans sa toile.
– Dans le document 3, le décor est beaucoup plus suggestif : il s’agit d’une cave, d’une pièce souterraine
sombre, froide et humide, à laquelle conduit un escalier pentu ; la position du comte Dracula avec sa
cape évoquant la chauve-souris prête à fondre sur sa victime.
– Dans le document 4, il n’y a pas à proprement parler de décor : au second plan de l’image, derrière
Dracula, on devine une jeune femme (Mina) allongée, visiblement évanouie ; elle est présentée comme
la victime du prédateur, dont les yeux injectés de sang laissent supposer qu’il est en train de se nourrir
du sang de la jeune femme.
4. [Doc. 5] Ce personnage du film Twilight est bien un « héritier » du comte Dracula dans la mesure où
l’on retrouve certaines similitudes physiques entre les deux vampires : l’extrême pâleur du teint, le
front haut et les lèvres rouges. Comme pour le document 3, le détail des canines pointues est ici remplacé par celui des yeux injectés de sang.
S’exercer
Langue et écriture
p. 46
VOCABULAIRE DU FANTASTIQUE
1. Synonymes de l’expression « avoir peur » : redouter – frémir – trembler – craindre
Antonymes de l’expression « avoir peur » : effrayer – terroriser – épouvanter – terrifier
2. l’anxiété > anxieux / la crainte > craintif / l’inquiétude > inquiet / l’effroi > effroyable, effaré / l’épouvante > épouvantable / la panique > paniqué / la terreur > terrorisé, terrifié
3. extraordinaire – surnaturel – irrationnel – illogique – impossible – paranormal/anormal
4. a. Il portait un costume étrange. b. Son regard saugrenu m’oppressait, ainsi que son insolite chapeau.
c. Comment fuir ce personnage inaccoutumé ? d. Quelle rencontre curieuse ! e. Tout cela me paraissait
inouï.
5. a. le terreau b. céleste c. majestueux d. une réalité e. le festival
GRAMMAIRE
6. a. Quelle angoisse la pénombre leur inspirait-elle ! b. Combien cette statue paraît-elle épouvantable !
c. Comme elle regrettait amèrement d’être venue ! d. Quelle terreur tu as semée ! e. Comme les ombres
se profilaient sur le mur ! f. Que de cris et de larmes !
7. a. Comment te sens-tu ? b. Qu’a-t-il vu ? c. Où s’est-il caché ? d. Pourquoi refusez-vous ? e. Comment
paraissait/était son visage ? d. Pourquoi transpirait-il ?
VERBE
8. Sous nos pieds, le sol craquait et on entendait au loin la cloche d’une église qui tintait et résonnait
sinistrement dans la nuit. Arrivés devant le château, nous ouvrîmes avec difficulté la grille qui grinça
lugubrement, et nous nous engageâmes dans l’allée bordée de cyprès dont les cimes claquaient au
vent qui tapait avec violence contre les volets abîmés des fenêtres du château.
9. Les voisins auraient vu une étrange scène. Un monstre aurait enfoncé la porte, serait entré dans la
maison, aurait saccagé les lieux, serait sorti par le toit. D’après eux, il ne reviendrait pas. Il se cacherait
à présent dans la forêt.
10. Ayant pris peur, je me fis donner de l’eau et, avec une serviette, me frottai les yeux : eh bien, oui, je
n’avais pas de nez ! Je commençai à tâtonner de la main, pour m’assurer que je ne dormais pas. […] Je
me fis apporter mes vêtements et me précipitai chez le directeur de la police.
37
Évaluation
Lecture de texte/Étude de la langue Omphale ou la Tapisserie amoureuse
p. 48
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet d’évaluer la compétence 1, et plus particulièrement « Repérer
des informations dans un texte » et « Utiliser ses connaissances sur la langue », du socle commun de
connaissances et de compétences.
1. La scène se déroule dans la chambre à coucher d’un pavillon isolé, la nuit : le narrateur, qui est aussi
le héros de ce récit, se prépare pour aller dormir.
2. a. Les marques de la première personne sont : les pronoms personnels « Je » (l. 1), « je me » (l. 1), « j’ »
(l. 1), et les déterminants possessifs « mon » (l. 1) et « ma » (l. 2).
b. Le point de vue adopté par le narrateur est le point de vue interne : la scène est perçue et racontée à
travers les yeux du héros narrateur.
3. L’évènement étrange : le personnage d’une tapisserie représentant Omphale, une reine de la mythologie antique, se met à bouger les yeux, la tête, et finit un soir par se détacher du mur de la chambre
pour rejoindre le héros.
4. [L. 16] a. Le premier adverbe est « là », dans le GN « cette nuit-là », qui est complément circonstanciel
de temps du verbe « je fis » ; le second est « toutefois » (l. 16), complément circonstanciel de concession
du verbe « c’était ».
b. Les indices annonçant qu’il va se passer quelque chose : juste avant de s’endormir, le narrateur a osé
jeter un coup d’œil à la tapisserie : son regard a croisé celui d’Omphale qui le fixe « de l’air le plus triste
et le plus langoureux du monde » (l. 13-14).
5. [L. 3 à 7] a. Les deux verbes qui traduisent le doute du narrateur sont : « il me sembla » (l. 3) et « je crus » (l. 7).
b. L’explication rationnelle que l’on pourrait donner à ces faits bizarres est que, la chambre étant très
grande (l. 5) et le narrateur s’éclairant avec une seule bougie (l. 6), celui-ci peut avoir l’impression de
voir la tapisserie bouger à cause des ombres qui jouent sur le mur et du peu de clarté dans la pièce. Par
ailleurs, le narrateur, en proie à la peur, semble avoir du mal à s’endormir puisqu’il est obligé de se tourner du côté du mur et de se cacher sous les draps (l. 9-10, l. 15) ; son sommeil n’est donc pas tranquille. Il
peut avoir tout simplement fait un cauchemar et rêvé qu’Omphale se décrochait de la tapisserie pour
venir le rejoindre.
6. a. Les deux synonymes de « crainte » sont : « frayeur » (l. 5) et « peur » (l. 8).
b. Le narrateur a peur de voir la tapisserie, il fait tout pour éviter de la regarder : il éteint sa bougie pour
être dans l’obscurité complète (l. 8), il se retourne contre le mur, remonte le drap par-dessus sa tête (l. 9),
enfonce son bonnet de nuit jusqu’à son menton (l. 10), puis jusqu’à ses épaules (l. 14-15), il met sa tête
sous le traversin (l. 15).
7. Cet extrait est fantastique du fait que le héros, seul, la nuit, dans une grande pièce sombre, est
confronté à une scène surnaturelle qu’il ne peut expliquer et qui le plonge dans un état d’angoisse et
de stupéfaction.
Connaissance des auteurs et des œuvres
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet d’évaluer la compétence 1, et plus particulièrement « Avoir des compétences et des repères littéraires », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. a. Edgar Allan Poe
b. Théophile Gautier
c. Auguste de Villiers de L’Isle-Adam
2. A. Qui sait ? pour la clef de la porte d’entrée de la maison / Véra pour la clef du tombeau. B. Le Masque
de la Mort rouge. C. Le Pied de momie.
38
2 – LA NOUVELLE
VARIANTES ET OUVERTURES
Deux extraits de nouvelles sont proposés en textes complémentaires en guise d’évaluation finale ou
pour remplacer l’un des textes du chapitre. Le premier est un extrait de Qui sait ? de Guy de Maupassant (dont un autre passage est donné à étudier p. 40-41, et dont le texte intégral figure dans l’anthologie de nouvelles fantastiques d’Alain Grousset proposée p. 62-63 en lecture d’œuvre intégrale), qui
permet d’approfondir le portrait d’un être inquiétant et surnaturel. Le second, plutôt destiné à des
classes de bon niveau, est extrait de L’Auberge du Larzac, de Claude Seignolle. Les deux textes portent sur la présence d’abord invisible mais perceptible d’un être étrange qui semble menacer le héros
narrateur. Enfin, une lecture d’image sur une œuvre célèbre de Goya (Le Grand Bouc) est proposée
afin d’amener les élèves à rédiger une scène fantastique en adoptant le point de vue interne de l’un
des personnages du tableau et en mettant en valeur les sensations et les sentiments de ce dernier.
Texte complémentaire n° 1
Une inquiétante apparition
Objectifs
– étudier le portrait d’un personnage étrange ;
– analyser une comparaison et son effet sur le récit ;
– rédiger la description fantastique d’un lieu.
Un soir, en rentrant chez lui, le narrateur assiste au départ inexpliqué de ses meubles et de ses bibelots.
Traumatisé et nerveusement ébranlé par ce phénomène étrange, sur les conseils de ses médecins, il
décide de voyager. Un an plus tard, de retour en France, en se promenant dans Rouen, il retrouve par
hasard tous ses meubles dans un magasin d’antiquités.
5
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La nuit vint, et je dus m’asseoir, dans les ténèbres, sur une de mes chaises, car je ne voulais point
m’en aller. De temps en temps je criais : « Holà ! holà ! quelqu’un ! »
J’étais là, certes, depuis plus d’une heure quand j’entendis des pas, des pas légers, lents, je ne sais
où. Je faillis me sauver, me raidissant, j’appelai de nouveau, et j’aperçus une lueur dans la chambre
voisine.
« Qui est là ? » dit une voix.
Je répondis :
« Un acheteur. »
On répliqua :
« Il est bien tard pour entrer ainsi dans les boutiques. »
Je repris :
« Je vous attends depuis plus d’une heure.
– Vous pouviez revenir demain.
– Demain, j’aurai quitté Rouen. »
Je n’osais point avancer, et il ne venait pas. Je voyais toujours la lueur de sa lumière éclairant une
tapisserie où deux anges volaient au-dessus des morts d’un champ de bataille. Elle m’appartenait
aussi. Je dis :
« Eh bien ! Venez-vous ? »
Il répondit :
« Je vous attends. »
Je me levai et j’allai vers lui.
Au milieu d’une grande pièce était un tout petit homme, tout petit et très gros, gros comme un
phénomène1, un hideux phénomène.
Il avait une barbe rare, aux poils jaunâtres et inégaux, et pas un cheveu sur la tête ! Pas un cheveu ?
Comme il tenait sa bougie élevée à bout de bras pour m’apercevoir, son crâne m’apparut comme
une petite lune dans cette vaste chambre encombrée de vieux meubles. La figure était ridée et
bouffie2, les yeux imperceptibles3.
Guy de Maupassant, Qui sait ? 1890.
1. un phénomène : ici, un monstre.
2. bouffie : enflée.
3. imperceptibles : à peine visibles.
39
LIRE LE TEXTE
1 À quel phénomène étrange est confronté le héros dans ce texte ?
Un héros apeuré
2. a. À quel moment de la journée se déroule la scène ?
b. Depuis combien de temps le héros attend-il dans le noir ?
3. Dans quel état d’esprit se trouve-t-il ?
4. Quel est le point de vue adopté dans ce texte ? Justifiez votre réponse.
5. a. Précisez la classe grammaticale des mots soulignés dans « une voix » (l. 5), « On répliqua » (l. 8).
> GRAMMAIRE, FICHE 1
b. Quel est l’effet produit dans le dialogue par ces indications « une voix », « on répliqua », et par la
brièveté des réponses ?
Une sinistre apparition
6. Quels détails annoncent l’arrivée de l’antiquaire ? En quoi ces détails rendent-ils cette apparition
particulièrement angoissante ?
7. a. Quelles sont les caractéristiques physiques du portrait de l’antiquaire ?
b. Où se tient-il précisément ?
8. [L. 23 à 25] a. Relevez une comparaison et précisez le comparé, le comparant, le mot-outil de comparaison et le point commun entre les deux éléments rapprochés. > VOCABULAIRE, FICHE 41
b. Quel est l’effet produit par cette comparaison ?
9 À votre avis, le narrateur va-t-il pouvoir récupérer ses meubles ? Justifiez votre réponse.
> FICHE 16
[L. 5 à 9] Transposez les paroles au discours indirect et faites toutes les modifications nécessaires. Vous
commencerez par « Une voix demanda… »
EXPRESSION ÉCRITE
Décrivez une pièce qui vous est familière en la métamorphosant pour en faire un lieu hostile et angoissant dans lequel vous vous sentez menacé.
Critères de réussite
• Inventez au moins trois comparaisons qui souligneront l’aspect inquiétant du lieu.
• Appuyez-vous sur les sensations.
• Utilisez une ponctuation expressive avec des phrases exclamatives et interrogatives pour montrer
votre peur et vos doutes.
Corrigé du texte complémentaire n° 1
1 Le héros, qui vient de retrouver ses meubles par hasard, rencontre un homme au physique étrange
dont la présence et le comportement mystérieux et menaçant ne font qu’accroître son angoisse.
Un héros apeuré
2. La scène se passe pendant la nuit et le héros est assis dans l’obscurité depuis environ une heure
quand il remarque la présence d’une lueur dans la pièce voisine (l. 3-4).
3. Le héros, déjà bouleversé par la découverte de ses meubles retrouvés à Rouen dans ce magasin d’antiquités, est en proie à une anxiété grandissante : il se raidit, il manque de se sauver en entendant les
pas dans la pièce voisine (l. 4), il n’ose pas avancer quand l’antiquaire l’invite à le rejoindre…
4. Il s’agit d’un point de vue interne : le narrateur est aussi le personnage principal du récit et il nous
raconte son expérience en utilisant la 1re personne.
5. a. « une » (l. 5) est article indéfini, « on » (l. 8) est ici pronom indéfini.
b. Ces indications mettent l’accent sur le fait que le héros ne peut bien distinguer son interlocuteur, ce
qui rend ce dernier d’autant plus inquiétant. Les répliques, très brèves, ne peuvent rien révéler de la
personne à laquelle appartient cette voix, si ce n’est un accent d’hostilité. La sécheresse des réponses
de l’antiquaire et le ton quelque peu hostile et menaçant qui résonne comme une mise en garde (« Il
est bien tard pour entrer ainsi dans les boutiques », l. 9) finissent par rendre cette conversation apparemment banale plutôt inquiétante.
40
2 – LA NOUVELLE
Une sinistre apparition
6. Les détails annonçant l’arrivée de l’antiquaire sont essentiellement des sensations visuelles, puis
auditives, perçues par le héros narrateur :
– l’antiquaire se fait d’abord attendre pendant une heure, ce qui crée un effet de suspense et contribue
à accentuer l’aspect inquiétant du personnage, maître des lieux ;
– puis c’est par ses pas que le narrateur prend conscience de son arrivée, ce qui accentue l’aspect irréel
de sa présence ;
– ensuite le héros aperçoit une « lueur » (l. 4), dans la pièce voisine : cette lumière constitue aussi un
élément propre à souligner le caractère fantastique de l’apparition de l’antiquaire et éclaire le détail
symbolique d’une scène fantastique contenue dans une tapisserie ayant appartenu au héros : deux
anges volant au-dessus des morts d’un champ de bataille (l. 15) ;
– enfin, l’écho de la voix achève cette apparition fantastique de l’antiquaire et permet à l’auteur de
nous présenter son personnage de manière originale : il est d’abord une voix sans corps et sans visage,
et suscite ainsi chez le héros, comme chez le lecteur, une montée de l’angoisse.
7. Le portrait de l’antiquaire rappelle une caricature : les traits sont simples et appuyés, grossis. Par deux
fois, le narrateur précise que cet homme est petit et gros (l. 20 et 23), chauve. Cette caractérisation est
péjorative vis-à-vis du personnage, décrit comme un phénomène assez repoussant et inquiétant : « hideux phénomène » (l. 21), « barbe […] aux poils […] jaunâtres » (l. 22), « figure […] ridée et bouffie » (l. 24-25).
Son visage évoque un masque, une espèce de grosse tête toute en rondeur, jaune et ridée. La position
de l’antiquaire juste au milieu de la pièce est emblématique : il est le maître de ces lieux étranges. Les
traits du visage soulignent par ailleurs des contrastes étonnants : la barbe fournie contraste avec l’absence totale de cheveux, la figure ridée est aussi bouffie, les yeux « imperceptibles » (l. 25) semblent disparaître dans les rides et les boursouflures des traits. Le fait de terminer le portrait de ce personnage
bizarre sur son regard accentue l’aspect malsain et hostile de cette étrange apparition.
8. [L. 24 à 26] a. La comparaison est : « son crâne (comparé) m’apparut comme (mot-outil de comparaison) une petite lune (comparant) dans cette vaste chambre encombrée de vieux meubles ».
b. On pourra préciser aux élèves, dans le cas où ils n’auront pas lu la nouvelle intégralement, que la
comparaison du crâne de l’antiquaire avec la lune rappelle déjà la présence du dernier quartier de
lune, associé au sabbat, donc à la sorcellerie, qui éclairait tristement le chemin du héros jusque chez
lui le soir de la fameuse fuite de ses meubles (p. 62-63 de l’anthologie de Dix Nouvelles fantastiques
présentées par A. Grousset). Le fait de comparer l’antiquaire à l’astre de la nuit, précédemment présenté comme un élément fantastique et négatif pour le héros, contribue à en faire un être maléfique et
sombre. Ce portrait est le prolongement du cadre et renforce l’effet produit par la description du lieu
et par le dialogue : il contribue à la montée de la peur et au sentiment d’étrangeté.
9 Même si les élèves connaissent la suite de la nouvelle, il leur faut justifier leur réponse : l’antiquaire
ne semble ni très engageant ni coopératif, et le narrateur paraît si angoissé qu’il préférera sans doute
quitter au plus vite cet endroit sinistre pour revenir le lendemain en plein jour et cette fois-ci accompagné. Les meubles l’auront-ils attendu ? La figure inquiétante du maître des lieux laisse présager le
contraire…
[L. 5 à 9] Une voix demanda qui était là. Je répondis que j’étais un acheteur. On me répliqua qu’il était
bien tard pour entrer ainsi dans les boutiques.
Texte complémentaire n° 2
L’Auberge du Larzac
Objectifs
– découvrir l’atmosphère inquiétante d’un lieu ;
– prendre en compte les sensations et les sentiments du narrateur ;
– rédiger le portrait d’une créature fantastique.
Les Cévennes, automne 1828. Le narrateur, un officier, est surpris par la nuit et l’orage. Une menace
étrange fait s’enfuir sa jument, et lui-même se précipite vers le premier refuge venu…
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C’était une auberge. J’entrai. Personne ne s’y trouvait. Seule l’odeur du temps pourrissait là, tenace
et pernicieuse.
J’appelai et tapai du poing sur une table bancale qui faillit s’effondrer sous mes coups. L’aubergiste
devait être allé au cellier ou dans une des chambres de l’étage. Mais, malgré mon tapage1, on ne se
montra pas. J’étais seul, tressaillant d’attente, devant un âtre vide inutilisé depuis bien longtemps,
à en juger par les toiles d’araignées qui bouchaient la cheminée. Quant à la longue chandelle,
allumée depuis peu et soudée à une étagère, sa présence, au lieu de me rassurer, me remplit plus
d’inquiétude que si je n’avais trouvé en cet endroit que la nuit et l’abandon.
Je cherchai un flacon d’eau-de-vie2 afin de me réconforter et chasser la crainte qui me retenait
d’aller visiter les autres pièces de cette étrange auberge. Mais les bouteilles qui gisaient là, poussiéreuses, avaient depuis longtemps rendu l’âme. Toutes, de formes anciennes, étaient vides, les
années assoiffées ayant effacé jusqu’aux traces des boissons qu’elles avaient contenues.
Tout était si singulier qu’attentif au moindre bruit, je me questionnai sur l’étrangeté des lieux. Du
bois sec traînait. Je le rassemblai dans le foyer, sur un lit d’herbes sèches trouvées sans peine, et,
frottant mon briquet épargné par la pluie, j’en tirai des flammes rassurantes.
Rencogné3 près de la cheminée, je me tendis à la chaleur, bien décidé à brûler le mobilier pour garder jusqu’à l’aube cette réconfortante compagnie. Les bouffées de résine4 me furent aussi revigorantes que des goulées5 d’alcool pur, mais, pensant à la perte de ma jument, je fus pris de tristesse,
ne comptant plus que sur son instinct de bête pour qu’elle me revînt.
Tout à coup un insidieux frisson me traversa, semblable à celui ressenti dehors et qui m’avait
chassé jusqu’ici. « On » se trouvait à nouveau là, tout proche !
Les murs avaient beau me protéger de trois côtés ; éclairés par le foyer craquant, j’étais visible et
vulnérable. On pouvait m’atteindre de face, en tirant de loin, à plomb. Je me dressai, les muscles
prêts à une nouvelle fuite.
Mais mon anxiété fit place à une vive angoisse qui m’oppressa jusqu’à m’étouffer. Maintenant
« on » entourait l’auberge et, impitoyables dans leurs mystérieux desseins, d’invisibles regards, que
je percevais, me fixaient par la fenêtre sans volets. « On » était attentif à ma personne et cela avec
une telle violence que je suais, subitement terrifié.
Claude Seignolle, L’Auberge du Larzac, Phébus, coll. « Libretto », 1967.
1.
2.
3.
4.
5.
tapage : bruit, accompagné de cris.
eau-de-vie : liqueur alcoolisée.
rencogné : recroquevillé dans le coin de la cheminée.
résine : substance visqueuse à forte odeur produite par les pins.
goulée : grande gorgée.
LIRE LE TEXTE
1 Dans quelle situation se trouve le héros dans ce texte ?
Un lieu déserté
2. [L. 9 à 17] a. Relevez deux adjectifs qui caractérisent l’auberge.
b. Quelle impression se dégage de ce lieu ?
3. a. Quelle est l’unique trace de vie présente dans l’auberge ?
b. Cette trace de vie rassure-t-elle le narrateur ? Pourquoi ?
4. [L. 10 et 11] « Mais les bouteilles qui gisaient là, poussiéreuses, avaient depuis longtemps rendu
l’âme. » a. Quelle est la figure de style employée dans cette phrase ?
b. Que traduit-elle de l’atmosphère qui se dégage de l’auberge ?
c. Relevez dans le même paragraphe un autre emploi de cette figure de style.
Un narrateur sous tension
5. [L. 20 et 21] Quel mot marque un changement dans la situation du héros ? Précisez la classe et la
fonction grammaticales de ce mot. > GRAMMAIRE, FICHE 1
6. Relevez dans le texte quatre noms communs qui appartiennent au champ lexical de la peur. Que
remarquez-vous à propos de l’ordre dans lequel ces quatre noms apparaissent dans le texte ? Quel en
est l’effet sur le récit ? > VOCABULAIRE, FICHE 39
42
2 – LA NOUVELLE
7. Décomposez les mots « impitoyables » et « invisibles » (l. 26), puis donnez le sens de leurs préfixes.
> VOCABULAIRE, FICHE 37
8. Quelle est la classe grammaticale du mot « on » dans « on entourait » (l. 26) et « On était » (l. 27) ?
Pourquoi cette présence terrifie-t-elle le héros ?
9. [L. 25 à 28] Quels sont les effets physiques de la peur sur le héros ?
10 En vous appuyant sur le comportement du personnage, dites en quoi ce texte appartient bien au
genre fantastique.
[L. 20 à 24] Réécrivez ce passage à la 1re personne du pluriel et faites toutes les modifications nécessaires.
EXPRESSION ÉCRITE
Soudain, « on » frappe à la porte… Imaginez la suite de ce texte en faisant apparaître une créature fantastique et inquiétante dont vous insérerez le portrait dans votre récit.
Critères de réussite
• Inventez au moins trois comparaisons qui souligneront l’aspect inquiétant de la créature.
• Mettez bien en valeur les sensations et les sentiments du narrateur.
Corrigé du texte complémentaire n° 2
1 Le narrateur a été surpris par la tombée de la nuit et par l’orage, et son cheval s’est enfui, affolé
par une menace étrange. Il trouve refuge dans la première maison qu’il voit : une auberge visiblement
abandonnée ; très vite, il se sent observé et menacé par une présence invisible…
Un lieu déserté
2. Les deux adjectifs « étrange » (l. 10) et « singulier » (l. 13) caractérisent l’atmosphère de cette auberge.
Elle apparaît comme un lieu inquiétant, voire effrayant.
3. a. La seule trace de vie est la bougie allumée : « cette longue chandelle, allumée depuis peu et soudée
à une étagère » (l. 6-7).
b. Cette trace de vie ne rassure pas le héros parce qu’il ignore qui a pu allumer cette bougie. La chandelle semble plutôt signaler une présence invisible et menaçante.
4. a. La figure de style employée ici est une métaphore, sous forme de personnification : les bouteilles,
telles des personnes, sont couchées là comme des cadavres.
b. Cette image est angoissante d’une part parce qu’elle introduit le thème de la mort dans le texte, et
d’autre part parce que les objets semblent comme des humains, dotés d’un passé.
c. Dans le même paragraphe (l. 11-12), l’expression « les années assoiffées » est aussi une personnification.
Un narrateur sous tension
5. [L. 20 et 21] Le mot « Tout à coup » marque un changement dans la situation du héros. C’est un adverbe (ou locution adverbiale) qui est complément circonstanciel de temps du verbe « traversa ».
6. Les quatre noms communs appartenant au champ lexical de la peur sont : « inquiétude » (l. 8),
« crainte » (l. 9), « anxiété » (l. 25), « angoisse » (l. 25). L’ordre dans lequel ces quatre mots apparaissent
souligne une progression dans l’intensité de la peur: leur sens est de plus en plus fort. Cela crée un
effet de peur croissante qui culmine à la fin du passage jusqu’à la terreur.
7. Le préfixe utilisé est im-/in-, qui a un sens privatif : « im/pitoy/ables » (qui ne peut éprouver de pitié)
> préfixe + radical + suffixe ; « in/visi/bles » (qui ne peut être vu) > préfixe + radical + suffixe.
8. « On » est ici un pronom indéfini ; le lecteur, comme le narrateur, ignore l’identité de ce « on ». Cette
présence terrifie le héros parce qu’il la sent sans l’apercevoir, il la perçoit et sait qu’elle est là en train
de le regarder.
9. [L. 25 à 28] Le personnage frissonne, il se sent oppressé, il a une sensation d’étouffement et transpire, comme le montrent les termes « frisson » (l. 20), « m’oppressa » (l. 25), « m’étouffer » (l. 25) et « je
suais » (l. 28). Ce sont bien les manifestations physiques caractéristiques du sentiment grandissant de
peur qui s’empare du héros narrateur.
43
10 Ce texte appartient au genre fantastique du fait que le héros, seul, épuisé et inquiet, perdu en
pleine nuit dans un lieu sombre et désert, est confronté à une présence surnaturelle hostile qui reste
invisible. Le lecteur peut se demander si le narrateur, perturbé par ce qui lui est arrivé juste avant (la
fuite de son cheval, le mauvais temps, la fatigue) n’est pas en proie à quelque délire de son imagination…
[L. 20 à 24] Tout à coup un insidieux frisson nous traversa, semblable à celui ressenti dehors et qui nous
avait chassés jusqu’ici. « On » se trouvait à nouveau là, tout proche !
Les murs avaient beau nous protéger de trois côtés ; éclairés par le foyer craquant, nous étions visibles
et vulnérables. On pouvait nous atteindre de face, en tirant de loin, à plomb. Nous nous dressâmes, les
muscles prêts à une nouvelle fuite.
Activité complémentaire n° 3 Lecture d’image et expression écrite
La lecture d’image porte sur l’une des plus célèbres toiles de Goya : Le Grand Bouc, appelée aussi parfois Le Sabbat des sorcières (1821-1822, huile sur toile, 800 x 250 cm, Madrid, musée du Prado). Cette activité peut être menée en interdisciplinarité avec le professeur d’espagnol de la classe. Il est préférable
de mettre en place cette activité en fin de chapitre : elle permettra en effet aux élèves de réinvestir
leurs connaissances et leurs acquis sur le thème du fantastique dans la lecture d’une image qui facilitera et enrichira ensuite leurs productions écrites lors de la rédaction.
Dans un premier temps, les élèves observent et analysent la composition du tableau, les lignes de
forces, les couleurs en soulignant les parties plus sombres ou plus lumineuses. Cette première lecture
doit les amener à identifier le but recherché par le peintre en réalisant sa toile.
L’intérêt du choix de cette œuvre est qu’elle offre toute une galerie de personnages qui ont un rôle
bien différent dans le tableau : ainsi, leurs sensations, leur comportement, leurs sentiments, leur appréhension de la scène varient en fonction du personnage représenté (Satan, les sorcières, la musicienne accordéoniste ou l’enfant offert en sacrifice). Le sujet d’expression écrite proposé joue sur cette
variété de points de vue pour raconter une même scène. Ainsi, si un élève choisit le point de vue de l’enfant, il doit bien prendre en compte que ce dernier ne voit pas la scène puisque ses yeux sont cachés
par un drap qui lui recouvre la tête ; en revanche, il doit insister sur les sensations auditives et tactiles
du personnage…
(Il existe deux œuvres de Goya portant le même titre. Celle qui fait l’objet de cette étude peut se trouver sur le site idixa.net.)
LIRE L’IMAGE
1. Quel est le titre de cette œuvre ? Où se trouve ce personnage dans le tableau ? Quelle est son attitude ? En quoi ce personnage vous paraît-il fantastique ? Qui représente-t-il ?
2. Quel est l’autre personnage qui lui fait face au premier plan ? Décrivez-le. Que fait-il ?
3. Quel troisième personnage apparaît dans ce premier plan de l’image ? Décrivez-le. En quoi s’opposet-il au « Grand Bouc » ?
4. Que voyez-vous au second plan de l’image ? Comment sont disposés ces personnages par rapport au
« Grand Bouc » ? Qu’expriment les visages de ces femmes ? Pouvez-vous leur donner un âge approximatif ? Qui sont-elles ? Comment appelle-t-on ce genre de cérémonie ?
5. Quelle va être, selon vous, la fonction de l’enfant assis de dos à côté du « Grand Bouc » ?
6. En vous appuyant sur les couleurs dominantes et la lumière du tableau, précisez à quel moment de
la journée se déroule cette réunion.
7. Quels sentiments le peintre cherche-t-il à provoquer chez le spectateur en représentant une telle
scène ? En quoi ce tableau de Goya est-il une œuvre fantastique ?
EXPRESSION ÉCRITE
À partir de l’observation de ce tableau, vous écrirez un petit récit fantastique pour raconter la scène à
la 1re personne en choisissant et en respectant le point de vue d’un des personnages suivants :
44
2 – LA NOUVELLE
– celui du « Grand Bouc » ;
– celui d’une des sorcières ;
– celui de la musicienne accordéoniste ;
– celui de l’enfant offert en sacrifice.
Votre récit commencera par la phrase suivante : « Le sabbat venait de commencer, lorsque… »
Critères de réussite
• Respectez la place, le rôle, le comportement et l’attitude du personnage choisi.
• Insistez bien sur les sensations (vue/ouïe/toucher) et les sentiments éprouvés par le personnage
choisi.
• N’oubliez pas de prendre en compte le cadre spatio-temporel de la scène représentée.
Corrigé de la lecture de l’image (activité complémentaire n° 3)
1. Le titre de l’œuvre est Le Grand Bouc. Le Grand Bouc apparaît presque au centre de l’image, au premier plan. Il se tient assis, de profil. C’est une créature fantastique : sa tête est celle d’un bouc, avec
ses deux longues cornes noueuses et pointues et sa barbichette, mais son corps semble être celui d’un
humain. Il porte une longue tunique noire et donne l’impression de s’adresser au groupe de femmes
qui se trouve en face de lui au second plan. Cette créature qui apparaît en contre-jour fait songer à un
spectre et représente le diable.
2. En face du Grand Bouc, à l’extrême droite de l’image et aussi au premier plan, apparaît une musicienne assise de profil sur une chaise. Elle tient entre ses mains une sorte de petit accordéon. Comme le
Grand Bouc, elle est entièrement vêtue de noir et une mantille recouvre le haut de sa tête. En revanche,
on devine son visage qui paraît assez juvénile et exprime une certaine douceur. Elle ne semble nullement terrifiée par ce qu’elle voit. Son rôle est de jouer de la musique pour accompagner la cérémonie.
3. Le troisième personnage du premier plan est un enfant, juste au centre du tableau. Il est assis de
dos, légèrement de trois quarts. Il s’oppose au Grand Bouc, à la droite duquel il est assis, parce qu’il est
petit et entièrement vêtu de blanc : un drap semble le recouvrir entièrement, retombant sur ses yeux.
Il ne peut donc rien voir de la scène.
4. Au second plan, une assemblée de femmes assises en rond fait face au Grand Bouc. Leurs visages
paraissent déformés comme des masques grossiers, grimaçants, tordus, qui confèrent à certaines
un aspect quasi animal… Les unes écoutent avec ferveur et recueillement le maître de la cérémonie,
d’autres semblent indifférentes (comme la vieille dame à l’extrême gauche de la toile) ou au contraire
complètement terrifiées. Ces femmes, qui paraissent toutes assez âgées, sont des sorcières ; elles se
sont rassemblées pour invoquer Satan, qui vient d’apparaître devant elles. Ce genre de rituel s’appelle
un sabbat.
5. L’enfant recouvert d’un drap blanc va sans doute être offert en sacrifice au Grand Bouc ; il ne fait pas
partie du groupe de sorcières, auxquelles il fait face.
6. Les tons ocre, jaunâtres et orangeâtres du tableau confèrent une lumière presque surnaturelle à
cette scène qui doit se dérouler la nuit, comme le laisse supposer l’arrière-plan plus sombre de la toile.
S’agirait-il d’une nuit de pleine lune, qui reflète toujours une luminosité particulière ?
7. En représentant cette scène de sabbat, le peintre a voulu provoquer un sentiment de peur et de
malaise chez le spectateur, qui a l’impression de vivre un cauchemar. Ce tableau est bien une œuvre
fantastique, dans la mesure où il mélange des éléments réalistes (les femmes, la musicienne, l’enfant)
et des détails surnaturels (la présence du Grand Bouc), et plonge ainsi le spectateur dans une certaine
terreur et dans le doute : le diable est-il réellement apparu aux sorcières ou n’est-il qu’une ombre menaçante née de la nuit et de l’imagination morbide de ces femmes ?
45
Cahier activités et méthodes
Étude de la langue dans le Cahier activités et méthodes sur la nouvelle
Vocabulaire
Évolution et formation des mots (> FICHE 37)
Mieux connaître les mots p. 50
Compétences du socle commun travaillées et évaluées dans le Cahier activités et méthodes
sur la nouvelle
Compétence 1 : La maîtrise
Lire
de la langue française
> Dégager l’essentiel
d’un texte lu
Compétence 1 : La maîtrise
Lire
de la langue française
> Savoir faire appel à
Compétence 1 : La maîtrise
Écrire
de la langue française
> Savoir faire appel à des
Compétence 1 : La maîtrise
Dire
de la langue française
> Développer un propos sur
Mieux connaître les mots
ÉVOLUTION DU MOT
des outils appropriés pour lire
outils variés
un sujet déterminé.
Écrit p. 53
Clés pour l’analyse p. 54
Mieux connaître
les mots, « De A à Z » p. 51
Oral p. 52
p. 50-51
« ÉCRIRE »
I. Observer
1. La consonne latine b disparaît très vite.
2. La voyelle ajoutée est le é.
II. Comprendre
3. – inscrire : écrire quelque chose sur un registre, un cahier, une feuille…, graver quelque chose sur la
pierre, sur le métal… de manière à ce qu’il demeure ;
– transcrire : reproduire un texte ou des paroles selon un mode d’expression différent ;
– souscrire : écrire son nom au bas d’un acte pour l’approuver ;
– prescrire : marquer, donner un ordre précis à exécuter scrupuleusement ;
– proscrire : interdire formellement.
4. a. Il doit transcrire phonétiquement un texte. b. Elle souscrit une assurance pour ses enfants. c. Vous
inscrivez votre nom en toutes lettres. d. Le médecin peut prescrire un médicament. e. La loi proscrit
les cigarettes dans les lieux publics.
5. a. Un texte rédigé à la main est un manuscrit. b. Les scribes se trouvaient en Égypte. c. Maupassant est un écrivain du XIXe siècle. d. Lis bien les écriteaux pour te diriger. e. Cette écritoire ancienne
contient des plumes, de l’encre et du buvard.
III. Manipuler
6. une souscription – un scripteur – un scribe – un script – un écrivain – une inscription
7. un scribouill/ard, mot dérivé suffixé : « scribe » + préfixe péjoratif -ard. > Au commissariat, le scribouillard de service a enregistré ma déclaration de vol.
un post-scriptum, mot composé du préfixe post- (« après ») + le radical scriptum (« écriture »). > J’ai
ajouté un post-scriptum à ma lettre pour annoncer l’heure d’arrivée de mon train.
un écriv/aillon, mot dérivé du mot « écrivain » + suffixe -aillon. > Certains critiques littéraires n’apprécient pas le talent de cet auteur à succès de récits fantastiques et le considèrent comme un écrivaillon.
un tapu/scrit, néologisme formé avec le verbe « taper » (sur un clavier) et la racine « script » (« écrit ») sur le
46
LA NOUVELLE
modèle de « manuscrit ». > Lorsqu’on relit un tapuscrit, il faut aussi corriger les possibles erreurs de frappe.
une machine à écrire, mot composé d’un nom commun et d’un verbe à l’infinitif reliés par une préposition.
> Avant l’apparition du traitement de texte informatique, les secrétaires utilisaient des machines à écrire.
JOUONS AVEC LES MOTS
JOURNAL À ÉNIGMES
1. la rubrique 2. l’ours 3. le chapeau 4. la manchette 5. la une 6. l’article 7. la légende
DE A À Z
« N » COMME « NOUVELLE »
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet de travailler la compétence 1, et plus particulièrement « Savoir faire
appel à des outils variés », du socle commun de connaissances et de compétences.
Les caractéristiques
1. Il y a deux articles parce que le mot « nouvelle » peut avoir deux sens différents.
2. La transcription phonétique est [nuvel].
3. L’abréviation n. f. signifie « nom féminin ».
L’origine
4. Au pluriel, le mot « nouvelles », qui vient du latin populaire novella (XIe siècle), signifie à partir du
XIIIe siècle « choses récentes ».
Les différents sens
5. Les quatre sens différents répertoriés dans l’article sont :
– premier avis que l’on donne ou qu’on reçoit d’un évènement ;
– ce que l’on apprend par la rumeur publique, par la presse, les médias ;
– renseignements concernant l’état ou la situation de quelqu’un qu’on n’a pas vu depuis longtemps ;
– court récit présentant une unité d’action et peu de personnages.
6. 1) un scoop – 2) une rumeur, une information, un article de journal – 4) un conte
La famille du mot
7. nord – notice – nourrir – nous – nouveauté – nouvelle – novembre – novice – noyau
8. un nouveau-né, mot composé de deux radicaux reliés par un tiret : adjectif masculin + adjectif masculin. > Ce nouveau-né se porte très bien.
une nouveau/té, mot dérivé suffixé : adjectif masculin + suffixe -té. > Le salon de l’automobile présente chaque année toutes les nouveautés en matière d’innovation technologique.
un nouvell/iste, mot dérivé suffixé : adjectif féminin + suffixe -iste. > Maupassant a écrit des romans
mais c’est aussi un nouvelliste.
une rénov/ation, mot dérivé suffixé : radical du verbe « rénover » + suffixe -ation. > Les travaux de rénovation du Grand Palais à Paris ont duré plus de dix ans avant sa réouverture en 2005.
9. a. C’est un novice : il débute. b. Un mot récent est un néologisme. c. Le soleil fournit une énergie
renouvelable. d. Elle arrive, nouvellement nommée directrice. e. Cet architecte aime l’innovation.
f. Jacques-Louis David est un peintre néoclassique. g. Les bébés sont soignés dans le service néonatal.
h. Tout nouveau, tout beau.
10. a. Il a renouvelé sa carte de séjour. b. Nous cherchons à rénover notre vieille maison. c. Pour innover, cherchez des idées inédites.
11. un nouvel arrivant – le nouvel an – de nouveaux livres – un jour nouveau – une nouvelle robe – un
nouvel élève – un élève nouveau – des fleurs nouvelles – la nouvelle année
12. a. Voici un modèle dernier cri. b. Une voiture presque neuve qui semble très récente. c. Ce livre à
découvrir est inédit. d. As-tu des nouvelles toutes fraîches ? e. Quelle immeuble moderne !
Écrit
RÉSUMER UN TEXTE NARRATIF p. 53
SOCLE
COMMUN
1 Cette activité permet de travailler la compétence 1, et plus particulièrement « Déga-
ger l’essentiel d’un texte lu », du socle commun de connaissances et de compétences.
2. Le résumé qui correspond aux critères de réussite est le résumé 3.
47
Clés pour l’analyse
p. 54-55
LA PLACE DU NARRATEUR
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet de travailler la compétence 1, et plus particulièrement « Savoir faire
appel à des outils appropriés pour lire », du socle commun de connaissances et de compétences.
I. L’énonciation
1. texte 1 > Olivier Bécaille – texte 2 > le vieux marquis de la Tour-Samuel – texte 3 > le narrateur
2. a. texte 1 > mars 1879 : date de publication – un samedi, à six heures du matin : date des faits racontés dans le récit
b. texte 2 > à la fin d’une soirée intime : date des faits racontés dans le récit – 4 avril 1883 : date de publication – en 1827, au mois de juillet : date des faits racontés dans le récit
c. texte 3 > aujourd’hui : date des faits racontés dans le récit – en 1862 ou 63 : date des faits racontés
dans le récit – 21 novembre 1882 : date de publication
d. Document A > après de la troisième : date des faits racontés dans le récit – 1982 : date de publication.
II. La voix du narrateur
3. Tableau à compléter
Le narrateur…
Nom du narrateur
Texte 1
se croit mort
Olivier Bécaille
Texte 2 (l. 1 à 7)
aucun indice
anonyme
Texte 2 (l. 8 à 21) est allé à Rouen
Texte 3 (l. 1 à 10)
est né à La
Rochelle
le vieux marquis
de la Tour-Samuel
anonyme
Texte 3 (l. 11 à
est député
24)
Labarbe
Document A
Tonton Paul
fume la pipe
Type de narrateur
narrateur personnage
principal
narrateur personnage
témoin
narrateur personnage
principal
narrateur personnage
témoin
narrateur personnage
témoin
narrateur personnage
témoin
L’auteur
Émile Zola
Guy de
Maupassant
Guy de
Maupassant
Guy de
Maupassant
Frank
Margerin
4. Il y a un changement de narrateur dans les textes 2 (Apparition) et 3 (Ce cochon de Morin).
5. On ignore le nom du narrateur au début des textes 2 et 3 : il est un personnage du récit mais n’en est
pas le héros ; un autre narrateur personnage de l’histoire, présenté comme l’une de ses connaissances,
lui raconte les faits (c’est un récit enchâssé).
48
LA NOUVELLE
UN THÈME
La peur et l'étrange
Compétences du socle commun travaillées et évaluées dans le Thème sur la nouvelle
> Adapter son mode
de lecture à la nature
du texte
Compétence 1 :
La maîtrise
de la langue française
Lire
Compétence 5 :
La culture humaniste
Situer dans
> Établir des liens
le temps, l’espace,
entre les œuvres
les civilisations
AU FIL D’UNE ŒUVRE
Au fil d’une œuvre p. 56-59
Enquêt’art p. 64-65
La Cafetière de Théophile Gautier (TEXTE INTÉGRAL) p. 56-59
LIRE LE TEXTE
SOCLE
COMMUN
1 Cette activité permet de travailler la compétence 1, et plus particulièrement « Adapter
son mode de lecture à la nature du texte », du socle commun de connaissances et de compétences.
1. L’ordre du récit : f – d – g – e – c – a – b
2. Le schéma narratif : situation initiale > f ; élément perturbateur > d ; péripéties > g, e, c ; élément
de résolution > a ; situation finale > b
3. Il s’agit du point de vue interne : le narrateur, qui raconte à la 1re personne du singulier, est aussi le
personnage principal de cette nouvelle ; toute l’histoire est vécue et perçue à travers le regard de ce
narrateur personnage.
4. L’explication rationnelle serait que le narrateur a été victime d’un excès de fièvre qui lui a donné des
hallucinations pendant son sommeil agité : comme il le précise dès le début de la nouvelle, il se sent
extrêmement fatigué (l. 14) et un peu fiévreux (l. 20) après cette longue marche difficile sous la pluie et
dans la boue. Une fois dans sa chambre, il se met à trembler comme une feuille en se couchant, et le feu
de la cheminée projette des reflets rougeâtres sur la tapisserie et les figures de portraits accrochés aux
murs (l. 45). Ses sens sont altérés et la perception qu’il a du monde qui l’entoure s’en trouve modifiée.
Enfin, la scène fantastique s’interrompt brutalement suite à la perte de connaissance du narrateur,
qui constate qu’il a été « le jouet de quelque illusion diabolique » (l. 250-251) en découvrant la cafetière
brisée en mille morceaux. Cet évanouissement, qui dure plus d’une heure, corrobore l’explication rationnelle d’une hallucination due à la fièvre et à la fatigue.
5. Cette nouvelle est caractéristique du fantastique parce que le héros, seul, la nuit, dans sa chambre,
fiévreux et épuisé, est confronté à une scène surnaturelle qu’il ne peut s’expliquer et qui le plonge dans
un état d’angoisse et de stupéfaction. La fin de la nouvelle laisse planer le doute : le portrait de la jeune
fille exécuté par le narrateur est celui d’Angéla, la jeune sœur de son hôte morte « d’une fluxion de poitrine à la suite d’un bal » (l. 300-301) deux ans auparavant. Cette révélation finale justifie toute la scène
surnaturelle du bal vécue par le narrateur dans sa chambre la nuit précédente, et sème le trouble dans
son esprit et dans son cœur. Le récit fantastique ne résout pas cette hésitation et laisse ainsi au lecteur
le soin de trancher entre le rationnel et le surnaturel.
MORCEAUX CHOISIS p. 60-61
LIRE LES EXTRAITS
1. Dans le texte 1, extrait de La Vénus d’Ille de Mérimée, c’est l’expression du beau visage de la statue de Vénus qui paraît étrange au narrateur parce que tous ses traits, légèrement contractés, la rendent vivante, humaine, en exprimant des sentiments plutôt négatifs : le dédain, la cruauté et l’ironie.
Comme le reconnaît le narrateur, « Quant à la figure, jamais je ne parviendrai à exprimer son caractère
étrange » (l. 9-10).
49
Dans le texte 2, extrait de la nouvelle de Gogol Le Portrait, c’est le portrait acheté par le peintre
Tchartkov qui est étrange, parce que le regard du modèle semble vivant et fixe le jeune homme, qui ne
peut le supporter et fait tout pour éviter de regarder la toile.
Dans le texte 3, extrait de La Main de Maupassant, la présence de cette main noire, desséchée, aux
ongles jaunes et tranchée au milieu de l’avant-bras, exposée comme un trophée au milieu du salon,
intrigue et peut provoquer un certain malaise. Le fait que cette main soit enchaînée et attachée au mur
rend cet objet encore plus énigmatique et menaçant, comme si elle était encore vivante.
Dans le texte 4, extrait de La Morte amoureuse de Théophile Gautier, l’étrangeté provient du comportement de Clarimonde, la jeune femme dont est amoureux le narrateur et qui semble très affaiblie au
début du texte : à la vue du sang qui coule du doigt entaillé du narrateur, la jeune femme se métamorphose et adopte un comportement presque animal. En effet, elle bondit sur le jeune homme pour lui
lécher la plaie, la pupille de ses yeux s’allonge comme celle d’un félin, elle se met à laper le sang comme
le ferait une chatte, et son visage exprime une « joie féroce et sauvage » (l. 7). Ce comportement bizarre
évoque aussitôt pour le lecteur le personnage du vampire qui se nourrit du sang de ses victimes. La
phrase prononcée par Clarimonde à la fin de l’extrait prend ainsi une tout autre signification pour le
lecteur…
Dans le texte 5, extrait de la nouvelle Ligeia d’Edgar Allan Poe, l’étrangeté réside dans cette présence
invisible, spectrale qui frôle d’abord le narrateur et laisse ensuite tomber quelques gouttes de sang
dans le verre de vin bu par l’épouse malade.
2. Dans le texte 1, le lecteur connaît les pensées du narrateur : « Ce qui me frappait… » (l. 2), « j’observais
avec surprise… » (l. 15), « plus on éprouvait le sentiment pénible… » (l. 21-22).
Dans le texte 2, le lecteur connaît les pensées du héros : « il s’aperçut avec effroi… » (l. 2), « il eut peur… »
(l. 13), « il n’aurait pas pu expliquer… » (l. 17-18), « il lui semblait… » (l. 19).
Dans le texte 3, le lecteur connaît les pensées du narrateur, le juge Bermutier : « une chose étrange me
tira l’œil » (l. 1-22), « Je crus qu’il plaisantait » (l. 19), « j’interrogeai son visage, me demandant… » (l. 25-26).
Dans le texte 4, le lecteur connaît peu les pensées du narrateur, mais toute cette scène est perçue à travers son regard et ses sens : « je me fis par hasard au doigt… » (l. 3-4), « sa physionomie prit une expression de joie féroce et sauvage que je ne lui avais jamais vue » (l. 6-8) ; contrairement aux autres extraits,
il y a peu de verbes de pensée et de perception dont le narrateur serait le sujet, parce qu’il rend compte
au lecteur du comportement étrange de Clarimonde.
Dans le texte 5, comme pour les extraits précédents, le lecteur connaît les pensées, les sentiments et
les sensations du narrateur (le verbe « voir » est employé au moins à trois reprises dans cet extrait) : « Je
me souvins… » (l. 1), « deux circonstances d’une nature saisissantes attirèrent mon attention » (l. 5-6),
« J’avais senti… » (l. 6), « je vis… » (l. 8), « j’étais en proie » (l. 12), « je puis l’avoir rêvé » (l. 23).
3. Dans le texte 1, il s’agit du point de vue interne rédigé à la 1re personne du singulier : le narrateur est
un personnage témoin du récit dont on ignore le nom.
Dans le texte 2, il s’agit d’un point de vue interne rédigé à la 3e personne du singulier : le narrateur
reste anonyme, mais il nous raconte l’histoire à travers le regard et les sens du héros, le jeune peintre
Tchartkov.
Dans le texte 3, il s’agit d’un point de vue interne rédigé à la 1re personne du singulier : le narrateur est
un personnage témoin du récit, le juge Bermutier, voisin du héros de ce récit, sir John Rowell.
Dans le texte 4, il s’agit d’un point de vue interne rédigé à la 1re personne du singulier : le narrateur est
le personnage principal du récit ; si on ignore son nom, on sait en revanche qu’il est amoureux de Clarimonde, une jeune femme étrange au comportement bizarre.
Dans le texte 5, comme pour l’extrait précédent, il s’agit d’un point de vue interne rédigé à la 1re personne du singulier : le narrateur est le personnage principal du récit ; on ignore son nom mais on apprend qu’il soigne sa femme Rowena, alitée et rongée par un mal mystérieux.
4. Dans le texte 1, le narrateur ressent de l’étonnement face à une statue à la fois si belle, si vivante et
si insensible : « j’observai avec surprise… » (l. 15).
Dans le texte 2, le héros ressent de la peur face à ce portrait qui semble vivant et ne cesse de le fixer ;
le jeune peintre a même l’impression de ne pouvoir échapper à ce regard : « il s’aperçut avec effroi… »
(l. 2), « il eut peur même de marcher… » (l. 13), « sa crainte involontaire » (l. 18).
50
LA NOUVELLE
Dans le texte 3, le narrateur est surpris, étonné et visiblement dérouté par cet objet pour le moins
curieux et morbide qui semble le mettre mal à l’aise, cette « chose étrange » (l. 2) qui attire son attention dès qu’il entre dans le salon : une main coupée desséchée, noire, aux ongles jaunes, retenue à une
chaîne accrochée à l’un des murs du salon.
Dans le texte 4, le narrateur paraît plutôt surpris par l’attitude de la jeune femme, le sentiment de peur
ne transparaît pas : « sa physionomie prit une expression de joie féroce et sauvage que je ne lui avais
jamais vue » (l. 6-8). La fin du texte confirme la surprise du narrateur : Clarimonde, après lui avoir sucé
sa plaie, a curieusement retrouvé toute sa santé, alors qu’elle semblait moribonde quelques minutes
auparavant…
Dans le texte 5, le narrateur est étonné et fasciné par cette apparition spectrale, cette ombre « d’un
aspect angélique » (l. 10) qui attire son attention et le surprend : « deux circonstances d’une nature
saisissante attirèrent mon attention » (l. 5-6).
5. Chacun de ces textes appartient au genre fantastique parce qu’ils présentent tous une scène surnaturelle qui, à la fin du texte, laisse planer un doute et amène le lecteur à hésiter entre une explication
rationnelle qui pourrait le rassurer et une interprétation surnaturelle qui reste inquiétante et perturbante. Ainsi, dans le texte 5, le narrateur reconnaît lui-même qu’il était sous l’emprise de la drogue,
qu’il a pu rêver lorsqu’il a perçu cette présence immatérielle le frôler et verser quelques gouttes de
sang dans le verre de vin de sa femme malade…
GUIDE POUR LIRE UNE ŒUVRE INTÉGRALE p. 62-63
I. 1. Antiquité : Pline le Jeune (61-vers 114) / Moyen-Âge : Marie de France (1154-1189) / XVIIIe siècle : Dom
Augustin Calmet (1672-1757) / début du XIXe siècle : Gérard de Nerval (1808-1855), Edgar Allan Poe (18091849) / fin du XIXe siècle : Guy de Maupassant (1850-1893) / début du XXe siècle : Guillaume Apollinaire
(1880-1918) / milieu du XXe siècle : Ray Bradbury (né en 1920) / fin du XXe siècle : Stephen King (né en 1947)
/ aujourd’hui : Pierre Bordage (né en 1955)
2. La Maison hantée (Ier siècle) : Pline le Jeune – Bisclavret (XIIe siècle) : Marie de France – Des nouvelles
de l’autre monde (1751) : Dom Augustin Calmet – Le Château du diable (1852) : Gérard de Nerval – Le
Masque de la Mort rouge (1857) : Edgar Allan Poe – Qui sait ? (1890) : Guy de Maupassant – La Disparition
d’Honoré Subrac (1910) : Guillaume Apollinaire – Le Coquillage (1944) : Ray Bradbury – Popsy (1987) :
Stephen King – Fonds d’écran (2005) : Pierre Bordage
II. 1. Des indices du surnaturel et de l’étrange apparaissent dans les titres suivants : La Maison hantée,
Des nouvelles de l’autre monde, Le Château du diable, Le Masque de la Mort rouge, La Disparition
d’Honoré Subrac.
2. On trouve : un téléphone maléfique dans la nouvelle Fonds d’écran ; un vampire dans la nouvelle
Popsy ; un loup-garou dans la nouvelle Bisclavret ; des meubles qui bougent tout seuls dans la nouvelle
Qui sait ?; un homme qui se fond dans la muraille dans la nouvelle La Disparition d’Honoré Subrac ; des
bouteilles de vin qui dansent dans la nouvelle Le Château du diable.
3. Les indices qui expriment la peur ou l’étrange sont :
– dans l’extrait de Qui sait ?, les mots « l’inexplicable », « le pressentiment mystérieux » et les interrogatives : « Qui était-ce ? », « Qui sait ? » ;
– dans l’extrait de Fonds d’écran : « sidéra », « pétrifia », « un visage horrifié, les yeux écarquillés par
l’épouvante, la bouche grande ouverte » et l’interrogative avec les points de suspension : « Comment…
comment cette image était-elle arrivée là ? » ;
– dans l’extrait de Popsy : « en lui plantant profondément ses serres dans les épaules », la comparaison
pour qualifier les yeux du vampire : « comme des roses rouge sang ».
III. 1. Dans l’extrait de La Maison hantée, le narrateur est extérieur au récit, il reste inconnu et raconte son récit à la 3e personne ; dans l’extrait de Bisclavret, le narrateur est un personnage témoin d’une histoire qu’il se propose de nous raconter en employant la 1re personne ; dans l’extrait
de Qui sait ?, le narrateur est le personnage principal du récit qui raconte sa propre histoire à la
1re personne.
51
2.
Personnages
Nouvelle où il apparaît
Caractéristique
Actions
Johnny Bishop
Le Coquillage
Un enfant
Il doit rester au lit.
Balthazar
Fonds d’écran
Un adolescent
Il utilise un téléphone avec
de multiples fonctions.
Athénodore
La Maison hantée
Un philosophe
Il loue une maison
à Athènes.
Prospero
Le Masque de la Mort rouge
Un prince
Il organise un bal masqué
dans son château.
M. Bezuel
Des Nouvelles de l’autre
monde
Un prêtre
Il reçoit la visite de son ami
mort.
Bisclavret
Bisclavret
Un chevalier
Il se transforme
en loup-garou.
Sheridan
Popsy
Un kidnappeur
Il conduit une camionnette.
3. Les points communs
1) un revenant
2) un personnage qui se métamorphose
3) un objet magique
4) la présence du sang
ENQUÊT’ART
LE VISAGE DE LA MORT
p. 64-65
SOCLE
COMMUN
1
Cette activité permet de travailler la compétence 5, et plus particulièrement « Établir des
liens entre les œuvres », du socle commun de connaissances et de compétences.
OUVRONS L’ENQUÊTE
[Doc. 1 et 2]
1. Dans ces deux tableaux, la Mort est représentée sous la forme d’une allégorie : elle a l’apparence
d’un squelette, même si, dans l’œuvre de Caron, elle ressemble plus à un cadavre en décomposition,
extrêmement maigre.
2. La Mort tient dans sa main une faux.
3. L’aspect universel de la mort est souligné dans le tableau de Caron par la position supérieure du
squelette qui, assis sur sa charrette tirée par des bœufs amaigris, domine et surplombe tout le reste
du tableau ; dans le second tableau, le pied gauche du squelette prend appui sur un globe terrestre qui
symbolise le monde.
COMPLÉMENT D’ENQUÊTE
Observez
1. [Doc. 3 et 4] Le spectateur identifie la Mort à son aspect physique : dans le tableau de Böcklin, elle a
l’apparence d’un cadavre squelettique monté sur une étrange créature ailée ; dans le ballet de Roland
Petit, la Mort prend les traits d’une jeune femme brune au teint pâle cadavérique, qui porte une robe
jaune. Dans les deux représentations, la Mort occupe la position centrale et/ou supérieure de l’image.
2. [Doc. 1 à 4] Toutes ces représentations montrent la Mort comme un être qui se place au-dessus des
hommes et exécute un geste terrible, inflexible et autoritaire.
52
LA NOUVELLE
3. La Mort possède le pouvoir de faucher les hommes, de les faire mourir quand elle le souhaite. Si, sur
la photographie du ballet de Roland Petit, la Mort ne tient pas de faux comme dans les autres œuvres,
la tension du bras ganté de noir, qui désigne du doigt au jeune homme un point situé juste en face,
suggère un geste fatal et irrémédiable qui remplace la faux.
Analysez
4. [Doc. 1 à 4] La couleur associée à la Mort est le noir, que l’on retrouve dans les quatre images, y compris dans la photographie du ballet avec le détail des cheveux noirs de la danseuse.
5. [Doc. 4] Dans ce ballet, la Mort ne ressemble pas aux représentations habituelles : elle a l’apparence
d’une femme jeune, belle, sensuelle et attirante qui séduit le jeune homme pour l’emmener avec elle.
Le jaune, qui est la couleur de la trahison, convient donc bien à cette image trompeuse de la Mort.
6. [Doc. 3 et 4] Dans le tableau de Böcklin, le visage de la Mort est effrayant et cauchemardesque : elle
a l’aspect d’un cadavre en décomposition, avec le teint verdâtre et la peau sur les os, et incarne les ravages causés par cette terrible maladie qu’est la peste, titre du tableau. En revanche, dans le ballet de
Roland Petit, la Mort est très séduisante.
Interprétez
7. [Doc. 1 à 4] Le pouvoir de la Mort est suggéré par sa position dominante par rapport aux hommes :
elle est celle qui décide quand ils doivent mourir, elle leur impose sa loi, les oblige à la suivre et frappe
toujours juste. Personne ne peut lui échapper.
53