voix de Corse et de Sardaigne

Transcription

voix de Corse et de Sardaigne
Brigitte Marger
directeur général
titre de cycle
Les voix de Corse et de Sardaigne cultivent, autour de la Méditerrannée, des
caractéristiques fondamentalement différentes, telles qu’en témoignent les chœurs
invités pour ce concert : le chœur corse de Sartène dirigé par Jean-Paul Poletti,
et le chœur sarde de Pozzomaggiore dirigé par Pier Giorgio Masia.
Le premier est originaire de la ville de Sartène où s’est perpétuée une tradition religieuse établie depuis l’établissement au XIIIe siècle des congrégations franciscaines (couvent St Come & Damien, couvent St Joseph, couvent de Paccialleda,
grand couvent Tallanu). D’origine italienne, cette tradition religieuse se distingue
des autres pratiques de l’île par une élaboration savante et contrapuntique qu’ont
préservée quelque 3000 manuscrits, conservés depuis le XVIIe siècle jusqu’à nos
jours. Ce sont précisément quelques exemples tirés de ce répertoire qu’a choisi
de faire revivre Jean-Paul Poletti avec l’aide du chœur d’hommes de Sartène.
L’exigence de cette musique qui réintègre la plupart des signes distinctifs de la polyphonie corse traditionnelle, comme les jeux de tierces et de quartes - implique une
formation professionnelle que les choristes suivent au Centre d’Art Polyphonique.
C’est aussi la virtuosité de ces 6 voix masculines qui a suscité la création de plusieurs œuvres composées par Jean-Paul Poletti : des pièces « nourries par le
passé mais d’inspiration contemporaine » et qui cherchent à démontrer que « le
rêve d’inscrire la polyphonie méditerranéenne dans l’histoire de la musique classique n’est plus une utopie ».
Le chœur sarde est d’un tout autre profil : ses chanteurs, sans formation professionnelle particulière, font partie du village de Pozzomaggiore et cultivent un
répertoire profane typique de la région de Sassari. La taille de ce chœur reste
cependant exceptionnelle : son répertoire, inspiré par le poète Antonio Maria
Pina, se partage entre les musiques profanes et religieuses écrites à 7 ou 8 voix
(les plus aiguës réalisant la voix de falsetto) alors que les chœurs de Sardaigne s’en
tiennent, pour la plupart, à l’écriture à 3 ou 4 parties.
2 | cité de la musique
mercredi
20 janvier 1999 - 18h
amphithéâtre du musée
rencontre
les polyphonies corses
avec :
Philippe-Jean Catinchi, journaliste au Monde,
auteur de Polyphonies Corses (co-édition cité de la
musique/ Actes Sud, à paraître)
Jean-Paul Poletti, chef de chœur
Pierre Guelfucci, chanteur
mercredi
20 janvier 1999 - 20h
salle des concerts
concert
Ghjustra à deux chœurs
Pier Giorgio Masia, direction
Chœur de Pozzomaggiore
Jean-Paul Poletti, direction
Chœur d’hommes de Sartène
traditionnel Notte de Chelu
Giorgiu Scodinu Su ninnidu (texte de Polo
sassu di mores)
traditionnel Non mi giamedas maria
Giorgiu Scodinu Sette ispadas de dolore
Giampaolo mele di nuoro Perdonu
Giorgiu Scodinu Ave Maria (texte de A. M. Pinna)
Mariano Cazzari Solu pedras (texte de A. M. Pinna)
traditionnel Cunservet Deus su re
Pier Giorgio Masia Sas campanas sun sonende
(texte de Billia Fara)
Tonino Pudou Nanneddu meu (texte de P. Mopeu)
Mariano Cazzari Non morit s’ammentu tou (texte
de Antonio Maria Pinna)
Pier Giorgio Masia Muttos (texte de Billia Fara)
Pier Giorgio Masia, direction
Chœur de Pozzomaggiore
durée : 45 minutes
entracte
Pietro Battista Farinelli da Falconara
In Monte olivetti
Messa a l’Immacolata (extrait)
Kyrie
Girolamo Bartoli
Tantum ergo
Requiem de Sartène
Libera me
Miseremini mei
Jean-Paul Poletti
Terra mea, A rota, Notte, Alivu
Pietro Battista Farinelli da Falconara
Transitus de Saint François d’Assise, manuscrit franciscain du XIXe siècle
O Sanctissima anima
Salve sancte pater
Voce meam ad dominum clamavi
Jean-Paul Poletti, direction
Chœur d’hommes de Sartène
Jean-Paul Poletti
Sanctus
Jean-Paul Poletti, direction
Chœur de Pozzomaggiore
Chœur d’hommes de Sartène
durée : 50 minutes
voix de Corse et de Sardaigne
Pietro Battista
Composée à la fin du XIXe siècle, cette pièce se chante
Farinelli da Falconara le matin de la messe des Rameaux, juste après l’ofIn Monte olivetti
fertoire. Comme dans le Transitus du même auteur, les
trois voix réelles (ténor, baryton, basse) sont utilisées
à travers une forme segmentaire et des chromatismes
remarquables. Le manuscrit a été retrouvé au couvent St Côme et Damien (Sartène).
Girolamo Bartoli
Messa a l’Immacolata
Originaire de Balagna (au nord-ouest de la Corse,
près de Calvi), le Père Girolamo Bartoli s’est installé au
couvent de Sartène au milieu du XIXe siècle. Il a alors
senti que le répertoire chanté manquait pour la messe
du 8 décembre dédiée à l’Immaculée Conception.
C’est donc pour cette circonstance qu’il a composé
en 1859 une messe complète qui servira ensuite, par
extension, à la célébration mariale du 15 août. Cette
œuvre continuera a être chantée par la population
jusqu'à la Première Guerre mondiale. Le style du Kyrie
ressemble de près à l’écriture solennelle qu’on utilise
habituellement pour les cuivres (écriture verticale,
invocations martiales). A l’origine, cette partition était
écrite pour deux voix chantées et orgue. C’est par la
suite qu’elle deviendra a capella et que la base sera
rajoutée.
Girolamo Bartoli
Tantum Ergo
Le Tantum Ergo fait partie des dernières pièces composées par le Père Bartoli, un compositeur particulièrement sollicité à Sartène ainsi que dans d’autres
localités corses. Ecrit en ré majeur pour la célébration de Noël, le Tantum Ergo développe une écriture
homorythmique permettant à la partie de ténor de
s’exprimer librement et de guider l’ensemble. Cette
pièce a dû certainement être ensuite chantée par l’assistance à l’occasion des messes ; ce qui expliquerait
la présence d’une doublure supérieure de la partie
de ténor correspondant à la tessiture des voix féminines autorisées, au début du XXe siècle, à chanter
avec les hommes dans les églises.
6 | cité de la musique
voix de Corse et de Sardaigne
anonyme
Requiem de Sartène
Le Requiem de Sartène est une pièce très ancienne
- actuellement indatable - issue du plain-chant grégorien pour l’adapter au style traditionnel corse. Les
trois voix en présence sont les suivantes : la voix de
seconde (a seconda) qui introduit les incipits, la voix
de basse (bassu ou bordu, en référence au « bourdon ») qui entre en seconde position, et enfin la voix
supérieure de tierce (terza) dont l’entrée se situe en
dernière position. A ces trois parties se trouve ajoutée
(sur « Quando caeli movendi sunt ») une partie vocale
supplémentaire (la cuntralta) dont la fonction semble
être de développer des mélismes. Le Miserere intervient quant à lui au moment de la communion. Ses
quatre voix réelles entretiennent un style homophonique à mi-chemin entre la grande polyphonie franciscaine et la polyphonie traditionnelle.
Jean-Paul Poletti
Terra mea, A rota, Notte,
Alivu
Ces quatre pièces illustrent les différents aspects qui
composent ma culture personnelle : la musique lyrique
italienne (puisque j’ai été formé à Bastia qui avait une
grande tradition lyrique, et à Florence) la polyphonie
traditionnelle corse que je pratique et enseigne. Les
textes témoignent d’une interrogation d’ordre général, concernant le devenir du peuple corse et son
identité. Terra mea est écrite par accords avec un
système de bourdon et s’appuie sur un style plus
mélodique conclu par un si bémol final au ténor. Notte
s’inspire enfin d’une écriture entre lyrique et traditionne de même que l’Alivu.
traditionnel
Terzini de Guagno
Chantés au village de Guagno (centre de la Corse), les
Terzini reprennent les trois voix caractéristiques de la
musique traditionnelle corse (seconde, basse et tierce)
sur un texte de Dante (La Divine Comédie, chant XVII
du Purgatoire). L’originalité de ces pièces réside dans
le fait d’avoir été chanté conjointement par des prêtres
- ce qu’a priori on pourrait aisément imaginer vu leur
culture - et par des bergers qui ne savaient en général ni lire, ni écrire. Le rythme comme toute polyphonie traditionnelle corse est lié au verbe. Seuls les mots
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voix de Corse et de Sardaigne
assurent les cadences mais le style contrapuntique
est déjà là, ce qui permet à la terza de développer
de somptueux mélismes.
Jean-Paul Poletti
Sanctus
Cette pièce réalise une synthèse entre les styles sardes
et corses. Elle reflète aussi un autre mélange : celui
que l’on observe quotidiennement entre la musique
religieuse et le répertoire profane. Il faut en effet rappeler que dans la culture des deux îles, l’église faisait
office de « maison de la culture » pour la population.
A l’inverse, le chant liturgique était souvent pratiqué
« au comptoir » des cafés, sans que personne ne
s’offusque.
Jean-Paul Poletti
8 | cité de la musique
voix de Corse et de Sardaigne
les chants sacrés
de la Corse
Naguère moribonds, les chants sacrés de la Corse
connaissent de nos jours une véritable résurrection,
dont témoigne l’engouement d’un public parfois inattendu pour l’austère grandeur de leur univers spirituel et sonore. Un telle résurrection surprend par la
vitalité de ses acteurs et l’ampleur des questions
qu’elle soulève, particulèrement sur le plain-chant dit
« baroque », l’importance de la spiritualité franciscaine dans l’histoire de la musique, la confrontation
des traditions renaissantes. On le voit : ces questions
qu’anime ici le chœur d’hommes de Sartène dépassent de très loin les seules problématiques insulaires.
le plain-chant
Comme l’auditeur le perçoit d’emblée, le plain-chant
sous-tend l’ensemble de la tradition sacrée de la
Corse. Mais cette évidence particulière renvoie à des
pratiques traditionnelles universelles. Les initiatives
se multiplient qui donnent au plain-chant « baroque »
les honneurs qu’il mérite amplement, tant pour avoir
conservé mainte pratique médiévale que pour avoir
profondément nourri, selon l’expression de Marcel
Pérès, le substrat musical de toute une civilisation.
Comment ignorer que les noms de Nivers, Lulli,
Dumont, Campra, du Padre Illuminato, illustrèrent un
genre dont les siècles n’ont en rien émoussé l’efficacité ? Ce plain-chant, toutefois, puise à des sources
bien diversifiées. Les sources gallicanes, issues de la
volonté de recréer, dans le cadre de la rhétorique
classique ou baroque, un style antique propre au
royaume face au chant romain, ne se recoupent guère
avec les sources franciscaines qui actualisèrent la
« prédication musicale » des frères mineurs, caractérisée par son éloquence populaire, son immédiateté, sa fraîcheur mélodique.
le tradition franciscaine
Sur l’un des plus anciens manuscrits du Cantique
des Créatures de Saint-François, paraît une portée
vierge de toute notation, heureuses prémices de la
floraison musicale qui marque toute l’histoire de la
famille franciscaine. Pour une grande part, le chant
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voix de Corse et de Sardaigne
que nous appelons aujourd’hui « grégorien » et qui,
dès la fin du XIIIe siècle, supplante définitivement les
vieux répertoires romains, doit son essor à la famille
franciscaine. Indissociablement liées à la prédication
des disciples de François, les laude, chantées en latin
et, très tôt, dans les parlers italiens, utilisent et créent
tout à la fois une musique véritablement moderne et
populaire, que diffusent activement les confréries de
pénitents. L’élégance des laude, par ailleurs modestement présentes en Corse, leur simplicité, leur
expressivité mélodique, irriguent encore l’abondant
corpus des messes élaborées au sein de la famille
franciscaine, conservées dans un nombre considérable de manuscrits corses des XVIIe et XVIIIe siècles, et
recopiées tout au long du XIXe siècle. Les études
récentes attestent une circulation intense de ce répertoire et de ses auteurs pour les territoires explorés
jusqu’ici : Ligurie, Piémont, Comté de Nice, Corse,
mais le titre de nombreuses messes évoque un brassage encore plus vaste : siciliana, comasca, napolitana, romana...
oral et écrit
10 | cité de la musique
L’abondance des manuscrits comme des traditions
orales dissimule une captivante énigme. Les deux
sources, de parenté souvent très claire, ne coïncident que fort rarement dans l’identité d’une même
œuvre. La Messe des défunts de Sartène exemplifie
à cet égard une exception riche d’enseignements
puisqu’elle se trouve reconstituée à partir de la
mémoire traditionnelle et des manuscrits conservés au
couvent des saints Côme et Damien. Une telle situation pose évidemment des questions diverses qui ne
demeurent pas sans espoir de solution, malgré bien
des traquenards musicologiques, dont le moindre
n’est pas la datation des œuvres conservées par les
manuscrits. Dans l’un des livres de chœur du couvent de Marcassu, certaines messes s’avèrent extrêment proches de la tradition orale et présentent divers
styles de composition, dont le plus ancien fait usage
de formules typiques du chant orné italien du XVIe
voix de Corse et de Sardaigne
siècle. Or, les récentes identifications par informatique ne laissent aucun doute : les messes de
Marcassu copient fidèlement le Canto ecclesiastico
diviso in quatro libri que le Padre Illuminato publie à
Turin en 1733...
la tradition corse
11 | cité de la musique
On le voit : la spécificité musicale de la Corse ne réside
pas dans l’irréductible et inaccessible apanage de
mythiques gènes fondateurs, mais dans cette capacité d’assimiler les influences les plus diverses au
caractère affirmé d’une culture vivante. L’influence
franciscaine apparaît sans nul doute comme prépondérante dans la musique sacrée, mais également,
sans doute par extension naturelle, dans la musique
profane, particulièrement lorsqu’elle-même se construit
sur la récurrence d’inspirations traditionnelles, jamais
reniées, toujours renouvelées par leur constante insertion dans l’évolution des goûts et des styles. Cette
prépondérance tient vraisemblablement à l’ancienneté des fondations, qui remontent à l’activité de Jean
Parente, l’un des premiers compagnons de François,
comme au type d’implantation des communautés
franciscaines, profondément enracinées, contrairement aux pratiques urbaines de l’ordre sur le continent, dans le monde rural, privilégiant ainsi la
composante érémitique primordiale de la spiritualité du
poverello. Le retour aux sources qui s’affirme au XVIe
siècle, le zèle à promouvoir la réforme tridentine
déployé par Saint Alexandre Sauli, évêque d’Aleria
de 1570 à 1591, confesseur et théologien de Saint
Charles Borromée, alors cardinal protecteur de l’ordre,
paraissent bien comme l’axe principal autour duquel
se greffèrent ou s’inventèrent les traditions corses
telles qu’elles nous parviennent aujourd’hui. A témoins
l’omniprésence des formes responsoriales comme
les marques stylistiques évidentes du falsobordone,
particulièrement encouragé par saint Charles
Borromée, presqu’universellement repérables dans
les formes variées de la paghjella, profane ou sacrée.
voix de Corse et de Sardaigne
Typiquement corse
ou typiquement
franciscaine ?
La question d’elle-même esquisse une réponse et
définit la nature musicale de l’île, joliment résumée en
deux mots par Jean-Paul Poletti : convergence et
influence, dont l’harmonie construit de fait une
musique dont on ne connaît ailleurs aucun autre
exemple, même si les éléments qui la composent ne
peuvent revendiquer l’exclusivité. En témoigne la
fécondité de la tradition tout au long du XIXe siècle,
émotionnellement vérifiée dans le Transitus - la présentation de François à Dieu -, dû au père PietroBattista Farinelli da Falconara ou le Hostias et preces
- daté du 22 octobre 1889 - du père Franco dans la
Messe des défunts de Sartène.
La Corse paraît ainsi comme le conservatoire unique
d’une tradition vivante où l’on découvre, en même
temps qu’un vaste répertoire, les clefs de son interprétation, tant dans l’émission sonore, la pureté des
intervalles, la scansion lyrique de la phrase, que dans
l’ornementation ou le réflexe polyphonique.
La transmission d’un tel répertoire, malgré la floraison de la pratique et des études contemporaines,
paraît encore fragile. Une considération nouvelle du
latin, si naturel sur ces rivages, et que soutiendrait
une reconnaissance plus officielle et moins jacobine de
la langue corse, une ouverture plus sensible du clergé
aux enjeux culturels et sprituels ici engagés, doivent
assurer son avenir. Ce chant déclame un texte dans
l’esprit même de François tel qu’il se manifeste dans
la solitude de La Verna aux yeux de Saint
Bonaventure. Le stigmatisé qui découvrit au monde
moderne la splendeur de la création porte expresse
impressam similitudinem Christi (expressivement imprimée la ressemblance avec le Christ). L’expressivité
du chant sacré de la Corse sourd de l’image imprimée
au plus profond du cœur. En dehors de cette perspective, nous risquerions de n’entendre ici qu’une
« musique planante », alors qu’il s’agit bien du chant
des profondeurs.
Michel Foussard
12 | cité de la musique
voix de Corse et de Sardaigne
L’alivu di u tempu chi vene
L’Olivier nouveau
Alivu di u tempu chi vene
Chi sole tù vuleresti vede
E chi chiesa vuleresti tù
Per suminà la to fede tù
So briaghe le cità e mute li sò curtilli
Cetere di lume turnat’a fiuri isse notte d’oru
I giurnali dinù
Perdenu lu sò vangelu
Lettere d’amore
Turnat’a fiuri isse notte d’oru invece le prigio
Un si riposanu mai libertà sacrata
Turnat’a fiuri isse notte d’oru
Olivier du temps qui va venir
Quel soleil voudrais-tu voir, toi
Quelle église voudrais-tu, toi, pour semer ta foi
Regarde les banlieues sont ivres et leurs
places sont muettes
Cistres de lumière revenez-nous pour fleurir ces nuits d’or
Les journaux aussi perdent leurs évangiles
Lettres d’amour revenez-nous pour fleurir
ces nuits d’or
Tandis que les prisons ne se reposent jamais
Liberté sacrée, reviens-nous fleurir ces nuits d’or.
Terra mea
Ma Terre
Culà so li ghjorni e le funtane
Induve l’ombre di l’alivi si miranu in celu
Culà so li monti cù le so croce altiere
In l’eterni silenzi...
Terra mea
Culà l’onde di un ruscellu s’accendenu di
Canti colti per issi viaghi in le vene terranie
Culà un rispiru d’umanu si perde
In mille lumi... Terra mea
Là-bas sont les jours et leurs fontaines où les
ombres des oliviers dansent au ciel
Là-bas sont les montagnes aux croix altières
posées dans les silences éternels... ma terre
Là-bas les ondes d’un ruisseau brillent de
toutes les musiques cueillies aux sources
de voyages intérieurs
Là-bas un souffle d’humanité s’étale en mille
lumières... ma terre.
A rota
La Roue
Eccu la rota di u mondu chi gira senza pianta
Di stagion’belle e fiurite o cumpa
Gira, gira, gira, gira
Dalli a manu o compà, per un perde la to
strada, coglie tuttu cio chi granerà
E un ti ferma per nunda chi o sinno ti lascierà o compa.
Gira, gira, gira, gira
E un ti scurda di u campà o compà
Volta la vita chi và, dalli a manu o compà
Regarde la roue du monde qui tourne et
jamais ne s’arrête au sommet de ces saisons belles et fleuries
Ami, elle tourne, elle tourne, elle tourne, elle
tourne
Donne-lui la main pour ne pas perdre ta
route et cueille tout ce qui fleurira
Ami, ne t’arrête pas en chemin sinon elle te
laissera.
Et surtout n’oublie pas de vivre.
notes de programme | 13
voix de Corse et de Sardaigne
Gira, gira, gira, gira
Voilà la vie qui vient, voilà la vie qui va
Donne-lui la main car elle tourne, elle tourne,
elle tourne, elle tourne.
Notte
Nuit
Luna silenziu chi parli cun l’ombre
Dimme l’estate di le to stelle
Dimmi tutt’i venti chi vanu a nord e a sud
O allora più luntanu versu li bianchi deserti
Lune silence qui parle aux ombres
Raconte-moi l’été de tes étoiles
Dis-moi tous les vents qui vont au nord et au sud
Ou alors plus loin vers les blancs déserts
Luna misteru chi parli cu l’omi
Dimmi l’inguernu di le to cità
Dimmi le miserie chi vanu a nord e a sud
O allora più luntanu versu li neri deserti
Lune mystère qui parle aux hommes
Raconte-moi l’hiver de tes villes
Dis-moi les misères qui habitent au nord et au sud
Ou alors plus près de nous vers les noirs
déserts
Luna rivolta chi parli cun l’ore
Dimmi stagione di qualichi sperà
Dimmi le to mosse chi vanu a nord e a sud
O allora in ogni celu versu li nostri deserti
14 | cité de la musique
Lune révolte qui parle aux heures
Raconte-moi les saisons de quelque espérance
Dis-moi les révoltes qui germent au nord et au sud
Ou alors sous chaque ciel de nos déserts.
voix de Corse et de Sardaigne
biographies
Pier Giorgio Masia
Né en 1955, depuis son
enfance, il a la passion de
la musique étudiant au
début la guitare comme
autodidacte, son instrument préféré. Après avoir
fait partie de plusieurs
groupes musicaux, il s’est
engagé depuis 1993 dans
la direction du chœur de
Pozzomaggiore en
découvrant la beauté de
la composition de la
mélodie contenue dans
les œuvres de la tradition
sarde.
Chœur de
Pozzomaggiore
Le Chœur de
Pozzomaggiore, depuis le
début de son activité
s’est proposé de découvrir, maintenir et
apprendre toutes les
musiques qui sont l’empreinte séculaire et
régulière de son propre
territoire. Ces dernières
années ont vu le chœur
découvrir le répertoire
masculin et féminin de
Pozzomaggiore avec
l’aide des concitoyens du
village. Un autre objectif
du chœur est celui de
mettre en valeur les
diverses expressions nées
d’auteurs de
Pozzomaggiore en
essayant d’en harmoniser
les poésies les plus significatives pour les faire
connaître. Les positions
chantées du chœur respectent celles de la plus
classique tradition sarde
que l’on nomme chez
nous « su cuncordu »
avec les quatre voix
dénommées altu, mesa,
oghe, basciu, contra. Un
style de chant apprécié
dans le monde tant pour
la caractéristique du système qui fait l’unité des
voix que le fait de chanter
des pièces qui font parties de la tradition
folklorique sarde. Le
chœur se propose aussi
de faire connaître des
chants nouveaux qui enrichissent son propre
répertoire tant dans le
secteur de la musique
sacrée que de la musique
profane.
tenor I
Angelo Arru
Francesco Deriu
Giorgio Fiori
Gino Carta
Giovanni Solinas
Salvatore Calaresu
tenor II
Salvatore Antonio Spanu
notes de programme | 15
voix de Corse et de Sardaigne
Gianni Spanu
Giovannino Dettori
Mariano Cazzari
Tonino Pischedda
Domenico Fiori
Pier Luigi Cappai
contra
Stefano Leoni
Stefano Cannas
Mario Giovannino
Calaresu
Giovannagelo Calaresu
Graziano Saiu
Salvatore Pala
basso
Antonello Madeddu
Antonio Lai
Grazietto Cuccuru
Luca Cannas
Antonio Maria Sanna
Gianni Nuvoli
Jean-Paul Poletti
Un père originaire de
Venaco, une mère de
Santa Maria Figaniella,
Jean-Paul Poletti réunit le
nord et le sud de la
Corse. S’il naît à Ajaccio
en 1949, c’est à Bastia
qu’il apprend la musique
avec son professeur
Vincent Orsini. Le classique et le chant lyrique
sont à la base de son
éducation. Auteur, compositeur, interprète, il a
chanté la révolte, prêché
16 | cité de la musique
le réveil et donné naissance à un véritable
renouveau culturel avec
Cant U Populu Corsu.
Une aventure qui dure de
1974 à 1981. Vient le
temps de la recherche
d’autres libertés, d’enrichissements nouveaux
pour la polyphonie,
d’autres orchestrations,
d’autres instruments
comme les percussions
africaines... En 1986,
Jean-Paul Poletti est à
l’Olympia et à Bourges
l’année suivante. Entre
1987 et 1990, il passe
tous ses degrés de chef
de chœur à l’école de
Fiesole et à celle de
Sienne. En 1988, Sergio
Vartolo, maître de chapelle à Bologne,
réactualise un Oratorio du
XVIIe siècle et demande à
Jean-Paul Poletti d’y intégrer une partition
polyphonique. L’œuvre
fera un triomphe à la
Fenice de Venise. En
1988, Jean-Paul Poletti
écrit, avec le compositeur
Costa Papadoukas, un
opéra, Théodor de
Neuhoff, l’histoire de celui
qui fut roi de Corse le
temps de 9 mois... et
crée en 1989 le Roi de
Pierre. Avec le groupe les
Nouvelles Polyphonies, il
fait l’ouverture des Jeux
Olympiques d’Albertville
de 1992. Il crée à Cannes
la Cantata Corsica (1993)
qui fera l’ouverture de la
saison du Théâtre du
Châtelet en 1995, et
reçoit une Victoire de la
Musique avec les
Nouvelles Polyphonies
Corses en 1994.
Chœur d’hommes
de Sartène
Tous les membres du
chœur ont une formation
classique ce qui leur permet de chanter non
seulement les polyphonies traditionnelles mais
également le répertoire
classique. Le chœur a
une expérience d’orchestre (c’est une de ses
spécificités) et a travaillé
notamment avec William
Dickinson (chef de chœur
de Winthertur), avec
Marian Didu (chef de
l’Opéra de Bucarest),
John Aldis (chef du
London Symphony), le
Centre de formation des
musiciens itinérants
d’Orsay et de Lille, le
Centre d’Art
Polyphonique de PoitouCharente. Postier de
métier, sartenais depuis
voix de Corse et de Sardaigne
toujours, Jacques
Tramoni (basse) a participé à la création du
Chœur mixte (Granitù
Maggiore) avant de faire
partie du Chœur
d’Hommes dès 1995. Il
travaille avec jean-Paul
Poletti depuis 10 ans.
Postier également de
métier et sartenais depuis
toujours, Jean-Claude
Tramoni (basse) a été un
des pilliers du Chœur
mixte dès sa création en
1987. Tout en participant
ponctuellement au travail
d’autres chanteurs, il est
depuis 1995 un élément
fondateur du Chœur
d’Hommes de Sartène. Il
chante avec Jean-Paul
Poletti depuis plus de 10
ans. Il a fait partie du
groupe les Nouvelles
Polyphonies Corses.
Etudiant en musicologie à
Aix-en-Provence, JeanMarc Jonca est le plus
jeune membre du chœur.
Elève de l’école de chant
pendant 4 ans, il a fait
partie du Chœur
d’Hommes dès sa création. Vivant à Sartène tout
en poursuivant ses
études, il est issu de
l’école de chant et du
Grand Chœur. Il a rejoint
le Chœur d’Hommes
depuis septembre 1997.
Entré à 16 ans à l’école
de chant, il entre dans le
Chœur mixte quelques
années plus tard avant de
rejoindre le Chœur
d’Hommes en 1995.
ténor
Cyrille Lovighi
barytons
Yvan Giovannangeli
Jean-Marc Jonca
Jean-Paul Poletti
basses
Jacques Tramoni
Jean-Claude Tramoni
technique
Joël Simon
régie générale
Jean-Marc Letang
régie plateau
Marc Gomez
régie lumières
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