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Actualité juridique Selon la Cour supérieure du Québec, un locataire ne peut se fonder sur un bail pour se soustraire à sa responsabilité en cas de faute lourde Décembre 2015 Assurance Les contrats tels que les baux ou les contrats d’assurance sont généralement régis par la volonté des parties. La Cour supérieure du Québec a récemment confirmé, cependant, que les parties contractantes ne pouvaient faire 1 indirectement, soit par le truchement d’un contrat, ce que la loi leur interdisait de faire directement . En vertu de l’article 1474 du Code civil du Québec (CcQ), une partie à un contrat ne peut pas exclure ou limiter sa responsabilité résultant d’une faute lourde ou d’une faute intentionnelle. Dans cette affaire, la Cour a refusé d’accueillir une requête d’un locataire visant à faire rejeter un recours intenté par son propriétaire et l’assureur du propriétaire agissant en subrogation, étant donné que le rejet de l’action aurait pu contrevenir à l’article 1474 du CcQ. Faits Les demanderesses dans cette affaire étaient la Corporation Immobilière Timex (Timex), en qualité de propriétaire, et Royal & Sun Alliance of Canada (Royal), en qualité d’assureur de Timex. Timex et Royal poursuivaient la locataire Services Professionels Brio Inc. (Brio) pour des dommages causés par un incendie ayant eu lieu dans la propriété de Timex et louée à Brio. Royal, en qualité d’assureur de Timex, a été subrogée aux droits de son assuré après avoir indemnisé Timex pour la perte subie en raison de l’incendie, alors que Timex réclamait à Brio le montant de la franchise qu’elle a dû assumer. En appui à sa requête en rejet, Brio a fait valoir les modalités du bail qu’elle avait signé avec Timex et sur ce que les parties avaient convenu, à savoir que Brio paierait un loyer additionnel pour couvrir « l’assurance bâtiment ». 2 Invoquant la trilogie des arrêts rendus par la Cour suprême du Canada il y a plusieurs années et subséquemment 3 appliqués par les tribunaux du Québec , Brio a fait valoir qu’étant donné qu’elle avait payé une partie des primes d’assurance à Timex dans le coût du loyer, ni Royal ni Timex ne pouvaient la poursuivre. Les demanderesses, quant à elles, ont soutenu que les modalités du bail étaient équivoques et qu’elles ne prévoyaient pas expressément le paiement des primes d’assurance par Brio. Dans tous les cas, les demanderesses ont fait valoir que l’interprétation du bail appartenait au juge du fond (plutôt que d’être décidée à un stade préliminaire, soit à l’audition de la requête en rejet de Brio). De plus, les demanderesses ont soutenu qu’en vertu de l’article 1474 du CcQ, qui est d’ordre public, Brio ne pouvait pas se fonder sur le bail pour exclure sa responsabilité à l’égard de sa faute lourde en lien avec l’incendie. Décision de la Cour supérieure du Québec La Cour a examiné les demandes des parties en deux temps. Dans un premier temps, la Cour a traité l’argument de Brio selon lequel les demanderesses n’étaient pas habilitées à poursuivre Brio compte tenu des contributions de Brio aux primes d’assurance. La Cour a cité à l’appui de son analyse un arrêt de la Cour d’appel du Québec qui concluait PAGE 2 que, lorsqu’un bailleur s’engage à assurer les lieux loués contre le risque d’incendie, cet engagement l’empêche par la 4 suite de poursuivre le locataire qui pourrait être responsable de l’incendie . De plus, la Cour d’appel, dans une autre affaire, a considéré que cet engagement ne devait pas être explicite pour être reconnu et qu’il pouvait même être implicite dans les modalités du bail (lorsque, par exemple, une partie du loyer est affectée au paiement de la police 5 d’assurance couvrant la propriété) . En examinant le bail entre Timex et Brio, la Cour a conclu que Timex s’était implicitement engagée à souscrire une assurance pour les lieux loués par Brio et que Brio avait accepté de payer des primes d’assurance à cet égard. Par conséquent, la Cour a jugé que la police d’assurance était au bénéfice de Timex et de Brio, nonobstant le fait que seule Timex était inscrite comme assurée aux termes de la police. Par conséquent, la Cour a jugé que ce premier examen militait en faveur d’un accueil de la requête de Brio visant à rejeter non seulement la poursuite de Timex mais aussi celle de Royal. Dans un deuxième temps, la Cour a examiné les arguments des demanderesses fondés sur l’article 1474 du CcQ, qui prévoit qu’une partie ne peut exclure sa responsabilité dans un contrat pour le préjudice matériel causé à autrui par une faute intentionnelle ou une faute lourde. Peu après l’audition de la requête en rejet de Brio, les demandeurs ont amendé leur poursuite pour alléguer que Brio avait commis une faute lourde et que cette faute était la cause de l’incendie. Étant donné que cette question devait être tranchée par le juge du fond (puisqu’aucune preuve n’avait encore été présentée en appui de cette nouvelle allégation), la Cour a jugé que l’autorisation de la requête en rejet de Brio risquait de contrevenir à l’article 1474 du CcQ. En d’autres termes, si Brio a commis une faute lourde, rejeter l’action à ce stade de la procédure servirait à exclure sa responsabilité qui découlerait de sa faute lourde. Par conséquent, la Cour a rejeté la requête de Brio visant à faire rejeter la demande des demanderesses et l’affaire va maintenant procéder sur le fait. Ce jugement est intéressant, car il démontre l’approche prudente de la Cour à l’égard des requêtes en rejet. Bien que la Cour ait cité à l’appui de son analyse la jurisprudence en faveur de la restriction des droits des propriétaires et de leurs assureurs à poursuivre les locataires qui ont contribué aux paiements des primes d’assurance, la Cour n’était pas disposée à accueillir la requête en rejet par crainte de contrevenir à une règle d’ordre public. De plus, l’amendement tardif apporté par les demandeurs (un jour après l’audition de la requête en rejet) était suffisant pour invoquer l’article 1474 du CcQ et exiger des parties qu’elles procèdent sur le fond. Charles A. Foucreault Notes 1. Royal & Sun Alliance du Canada, société d'assurances c Services professionnels Brio inc., 2015 QCCS 4215. 2. Agnew-Surpass Shoe Stores c Cummer-Yonge Investments, [1976] 2 RCS 221; Ross Southward Tire c Pyrotech Products, [1976] 2 RCS 35; T. Eaton c Smith, [1978] 2 RCS 749. 3. La St-Maurice, Compagnie d’assurances c Les Importations Sava internationales, EYB 1989 – 63181 (C.A.); Lewis Shoes Store c S.B.I. Holding Inc., J.E. 84-616 (C.A.); Axa Assurances inc. c Club de golf Summerlea inc., 2013 QCCA 708 (C.A.). 4. Axa Assurances inc. c Club de golf Summerlea inc., 2013 QCCA 708 (C.A.). 5. Lewis Shoes Store c S.B.I. Holding Inc., J.E. 84-616 (C.A.). PAGE 3 Pour plus de renseignements sur le sujet abordé dans ce bulletin, veuillez communiquer avec l’un des avocats mentionnés ci-dessous : > André Legrand Montréal +1 514.847.4412 [email protected] > Sally A. Gomery Ottawa +1 613.780.8604 [email protected] > Éric Hardy Québec +1 418.640.5022 [email protected] > Randy C. Sutton Toronto +1 416.216.4046 [email protected] > Alan Rudakoff Calgary +1 403.267.8270 [email protected] Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L., s.r.l., Norton Rose Fulbright LLP, Norton Rose Fulbright Australia, Norton Rose Fulbright South Africa Inc. et Norton Rose Fulbright US LLP sont des entités juridiques distinctes, et toutes sont membres du Verein Norton Rose Fulbright, un Verein suisse. Le Verein Norton Rose Fulbright aide à coordonner les activités des membres, mais il ne fournit aucun service juridique aux clients. Les mentions de « Norton Rose Fulbright », du « cabinet », du « cabinet d’avocats » et de la « pratique juridique » renvoient à un ou à plusieurs membres de Norton Rose Fulbright ou à une de leurs sociétés affiliées respectives (collectivement, « entité/entités Norton Rose Fulbright »). 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