Voyage en terre lointaine, l`Arabie Heureuse, au coeur d`un
Transcription
Voyage en terre lointaine, l`Arabie Heureuse, au coeur d`un
Yemen 1984 Voyage en terre lointaine, l’Arabie Heureuse, au coeur d’un royaumefabuleux et de la légende de la Reine de Saba Calepin de Voyage Dominique Epiney Chalet La Tour CH-3961 Saint-Jean – Suisse [email protected] +4179 433 04 38 YÉMEN DU NORD, printemps 1984 TERRE DE SABLE AUX RIVAGES ABYSSAUX Cette contrée est connue comme le Royaume de la Reine de Saba, souveraine légendaire désignée sous le nom de Bilkis dans la littérature arabe. La Bible et le Coran relatent sa visite au roi Salomon à qui elle offrit des aromates qui poussaient en abondance dans la région. Le Yémen est un état d'Asie situé au Moyen Orient, il domine la Mer Rouge et l'Océan Indien. calepin de voyage page 1 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Au-delà de la plaine de la Tihama qui s'étire le long de la Mer Rouge, s'élèvent des chaînes de montagnes avec de hauts plateaux fertiles pouvant atteindre 3000 m. d'altitude avant de se dilater en désert vers l'Est. carte de la péninsule arabique Lors de ma visite en 1984, le territoire est scindé en deux pays, le Yémen du Nord (République Arabe du Yémen) et le Yémen du Sud (République Démocratique et Populaire du Yémen). Ses hautes montagnes basaltiques aux sommets vertigineux témoignent bien des convulsions de la Terre. Sa superficie totale est de 527'970 km2 et la population yéménites est d'env. 18'000'000 habitants. La capitale du Nord est Sanaa et celle du Sud, Aden, port stratégique situé entre la Mer Rouge et le Golfe d'Aden. La langue officielle est l'arabe et la monnaie, le rial yéménite (chf 0,50 = rials 1.-- en 1984). En hiver, l'heure de Sanaa = GMT + 2 heures par rapport à la Suisse. La population islamisée se concentre sur les hauteurs de la Mer Rouge et dans les capitales Sanaa et Aden. calepin de voyage page 2 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Les ressources du pays sont le pétrole, l'élevage ovin et caprin, la pêche du poisson et des perles, les cultures du millet, sorgho, dattes, fruits tropicaux et le khat. Cultivé depuis l'Antiquité dans la péninsule arabique, le khat (ou qat) y est consommé de manière rituelle et ancestrale car ses feuilles et ses tiges contiennent un léger psychotrope. Pour l'ingérer, on mâchouille les feuilles jusqu'à en faire une boule qu'on garde ensuite dans le coin de la bouche pour en aspirer le jus. Ses effets varient d'une personne à l'autre : coupe-faim, euphorie, effet stimulant, tout dépend mais ils ne sont pas dangereux pour la santé. La consommation du khat est la même que celle de la feuille de coca : même manière d'ingestion, même genre d'effets et même origines ancestrales. le vendeur de khat Le Yémen fut une importante place tournante pour le commerce du café qui donna son nom au port de Mokka sur la Mer Rouge. Depuis quelques années, les cultures en terrasse des arbustes du khat ont largement remplacés celle des caféiers devenus peu rentables. Les implications économiques sont complexes car cette culture permet à de nombreux Yéménites d'avoir un revenu fixe. Ce marché se chiffre annuellement par dizaines de millions de dollars. calepin de voyage page 3 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Le Yémen est réputé pour produire un khat de très bonne qualité, environ 80 % des hommes et 50 % des femmes broutent ces feuilles qu'il est possible d'acheter librement sur les marchés. Sa consommation a aussi des implications sociales et économiques importantes, sociales surtout car mastiquer le khat est l'occasion de se réunir entre amis. Dans les maisons traditionnelles il y a toujours une pièce équipée de grands coussins spécialement consacrée à ce rituel. muffredge - le salon yéménite Selon les historiens, la Péninsule arabique des temps anciens était un pays verdoyant jusqu'à ce que les masses glaciaires se retirent gentiment vers le Nord. Le soleil commença alors à assécher les rivières, à calciner les végétations et le désert s'étala à perte de vue. Les Sud-Est et Sud-Ouest côtiers sont humides et on y vit comme dans les oasis, une existence paysanne et sédentaire alors que le reste de la population doit nomadiser avec ses troupeaux pour survivre dans une nature hostile. Le trafic par caravanes et par bateaux permis aux Yéménites leur développement économique et culturel car à l'époque, leurs richesses fabuleuses voyagèrent jusqu'en Méditerranée. On chantait alors l'Arabie Heureuse qui désignait pour les Grecs et les Romains le Yémen,, région humide grâce à ses montagnes et à un système d'irrigation astucieux qui garantissait la survie aux portes du désert. C'était aussi le centre de la riche civilisation des Sabéens, courant religieux antérieur à la conquête musulmane. calepin de voyage page 4 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Pour les Romains, l'Arabie Heureuse représentait une terre fabuleuse où vivait le phénix (oiseau doué de longévité au pouvoir de renaissance qui symbolisait les cycles de la mort et de la résurrection) et aussi une région miraculeuse d'où provenait l'encens consumé lors des actes religieux. C’était aussi un pays fertile qui produisait une grande variété d'épices. Cette terre fut une étape importante sur les routes maritimes vers l'Inde et l'Extrême Orient. De nos jours, le Yémen est une terre ingrate par rapport aux sables d'Arabie Saoudite qui produisent beaucoup d'or noir et ceci provoque un contraste sans pareille entre ces deux civilisations. Seules la langue arabe et la religion islamique unissent encore les habitants de cette péninsule. SES DESERTS ET SES WADIS Les déserts de sable, les paysages en terrasses sont traversés par des fleuves desséchés nommés wadis qui restent secs presque toute l'année sauf lors des violents orages qui provoquent des crues dangereuses. Le Yémen est situé au sud des montagnes de l'Azir qui s'élèvent de 600 à 1000 m. d'altitude dans la plaine de la Tihama, longeant la Mer Rouge. Vers le Nord, la région du Hedjaz s'étire jusqu'à Aquaba et au Sud de la péninsule, des chaînes de collines se dispersent dans l'immensité des monts du Rub al Khali. La côte du Golfe d'Aden est parsemée d'îles proches de la côte iranienne qui forment le Détroit d'Hormuz. Seuls les fleuves des régions côtières sont alimentés toute l'année grâce au sol karstique composé de roches solubles carbonatées et grâce au climat des lieux. Les fleuves de l'Azir sont nourris par les pluies de la mousson en été mais s'assèchent souvent avant d'atteindre la mer, alors que le fleuve Hajr de l'Hadramaout au Nord-Est, s'écoule jusqu'à son delta durant toute l'année. SA FAUNE Les grands animaux sont menacés de disparition et le lion a été exterminé. L'autruche et la gazelle disparaissent peu à peu du désert Rub al Khali car il y a la tradition des armes à feu et car il n'existe aucune réglementation en faveur de la chasse. Le bouquetin vit encore dans les montagnes et est toujours chassé avec cérémonie selon les anciennes traditions. On trouve aussi dans l'Hadramaout et en Azir des chats sauvages et des léopards ainsi que des babouins. calepin de voyage page 5 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney On dit que les sangliers et les renards sont tellement détestés par la population islamique qu'elle refuse de leur sacrifier une seule balle de leur fusil. Il y a aussi des oiseaux aquatiques et des reptiles qui supportent bien le climat sec et des sauterelles comestibles, véritable fléau lorsqu'elles déferlent par nuages entiers sur les cultures. On dit aussi que le chien est détesté par les Arabes car il serait la réincarnation d'un être qui était mauvais ! mon prénom Dominique, écrit en arabe SON CLIMAT Nous avons choisit le printemps pour voyager dans ce pays car c'est la meilleure saison (de décembre à mai) vu que le climat est encore supportable. Cerclé par la mer, le Yémen est constitué d'immenses étendues désertiques. La zone centrale avec ses déserts de sable et de pierre est la plus chaude du monde alors que la sécheresse de l'air et la chaleur du climat sont supportables malgré les vents de sable qui assombrissent la clarté du ciel. La température passe de 24° à 50° en été et tombe à 4° en hiver mais, sans jamais descendre au-dessous de 0°. Certaines années, aucune goutte de d'eau ne tombe même si parfois des pluies torrentielles se déclenchent subitement. La région côtière de la Mer Rouge a des températures de 31 à 37° en août, mois le plus chaud de l'année car l'humidité de l'air et la brise de mer n'apportent que peu de fraîcheur si ce n'est des pluies occasionnelles. En hiver, le thermomètre descend peu et durant janvier, le mois le plus frais, la température se maintient autour de 27° à 28°. Les hautes régions de l'ouest yéménite sont presque aussi chaudes que dans les plaines mais les variations de température journalières sont plus marquées que sur la côte. Les mois d'hiver sont rudes, il y a parfois du gel et de la neige en altitude. calepin de voyage page 6 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney SA POPULATION la yéménite La population est accueillante mais méfiante et, gardienne de traditions millénaires. Les indigènes sont répartis en deux genres, le type yéménite, petit, gracieux que l'on rencontre dans l'Ouest et le type arabe des plateaux élevés, plus grand et plus fort. Sur les rivages, les mélanges asiatiques, africains sont issus du trafic maritime intense déployé depuis la nuit des temps dans la région. Les esclaves africains déportés et le brassage des populations islamiques venues avec les caravaniers et les pèlerins ont également métissé la population. Yéménites Les minorités indiennes ne sont pas assimilées, elles ont conservé leurs mœurs, coutumes et parlent leurs langues. Il y a peu d'Erythréens même si l'Ethiopie est juste en face du Yémen, séparé par la Mer Rouge. mes notes de voyage au Yémen du Nord, mars-avril 1984 Je travaille chez Air Afrique et bénéficie régulièrement de billets d'avion gratuits grâce à M. Mackoubily, notre gentil directeur, d’origine congolaise. calepin de voyage page 7 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney En mars 1984, Jacqueline, ma collègue, Evelyne son amie, hôtesse chez Air France et moi-même embarquons gratuitement sur un vol d'Air France pour Paris puis pour Sanaa à bord de la compagnie Yéménia Airways (IY), pour un voyage périlleux et hors du temps… Tout au long de ce séjour insolite, tous nos sens seront sans cesse sollicités. L'aventure commence déjà à l'aéroport de Genève-Cointrin. Côté français, un sac abandonné provoque une alerte à la bombe et nous assistons au dynamitage du sac en question dans la salle des guichets, c’est rasssurant. Plus tard, dans l'avion, Evelyne, petite blonde rondouillette qui adore attirer l'attention, brandi de son sac une bouteille de vin rouge pour la boire durant le repas servi en vol, et demande sans discrétion au personnel de cabine un tire-bouchon ! Je plonge la tête sous le siège pour tenter de passer inaperçue. mon visa A peine parties et nous voilà déjà repérées, je suis morte de honte. Aucun ustencil de ce genre n'est trouvable dans l'avion mais du coup tous les passagers non chrétiens nous mitraillent du regard. Nous sommes en pays musulman traditionnel et il serait bon de ne pas choquer la population par une tenue impudique ou des manières insensées. Nous débarquons à Sanaa le matin. L'aéroport est situé à 10 km de la ville et le taxi coûte très cher, rials 100.-- (chf 50.--) jusqu'à notre Hôtel Al Zohra situé dans le vieux Sanaa. L'hôtel revient à rials 125.-- (=chf 62.50) pour une chambre à 3 lits avec une douche. Ce logement ressemble à un lodge, pas trop pouilleux. Après notre installation et une bonne douche, nous prenons un taxi direction Air France Sanaa, pour offrir du chocolat suisse à Malik, un Yéménite collègue d'Evelyne. Tout content, il nous invite pour un souper au restaurant pour festoyer avec ses amis. calepin de voyage page 8 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Nous acceptons, il semble sympa et très occidentalisé avec son joli costard gris clair. Plus tard, Malik débarque comme prévu avec deux amis Ali et Zaki dans une longue Mercedes noire reluisante. Ils sont tous vêtus de la tenue yéménite, la fouta, sorte de pagne-jupe accroché à la taille par une ceinture ornée de la djanbiyya, le poignard traditionnel à lame recourbée, finement sculpté, l'armement des mâles du pays. Seules manquent les babouches. Ils portent des chaussures en cuir noir avec des chaussettes blanches ce qui contraste avec leur garde-robe typique. Ici les hommes portent souvent une veste de costume occidental sur une chemise. Leur tête est couronnée d'un turban, le keffieh en arabe, ك وف ية. Ce look fait effet, notre confiance s'estompe un peu envers ses hommes inconnus mais Evelyne nous réconforte en nous rappelant que Malik travaille chez Air France et que nous ne risquons rien vu qu'elle le connaît. De plus, nous irons manger dans un restaurant, lieu censé être sûr ! Nous embarquons donc dans la Mercedes mais je ne suis pas tranquille, Jacqueline non plus, d'ailleurs. Ils sont trois hommes et nous, trois femmes… Trop tard, la voiture fonce à travers la ville, passe un checkpoint aux gardes armés jusqu'aux dents et nous voilà sur une piste de terre battue en train de gravir une colline sur le Djebel Nogûm, proche de Sanaa. Nous débarquons sur un terrain vague où une dalle de béton sert de terrasse… de restaurant à toute une équipe de mâles yéménites assis en rond à même le sol. Tous sont armés de la djanbiyya et parfois d'une kalashnikov ou d'un pistolet, craignos… Dès 6 ans, les petits yéménites arborent fièrement une petite djanbiyya et dès 14 ans ils reçoivent leur première kalachnikov, symbole de virilité. De tous temps les Yéménites ont très vite dû apprendre à se défendre contre les envahisseurs, d'où cette tradition. Un feu crépite dans un coin et une broche tourne lentement sur des braises avec le méchoui, préparé en notre honneur. Des musiciens tambourinent sur un daff, sorte de tambour et pincent les cordes d'un ûd, un instrument à cordes, style mandoline. A mon avis, les sons jaillissent grinçants des instruments tout comme l'ambiance qui règne ici haut. Les hommes ingurgitent de l'alcool, soit de la bière soit du whisky et sont déjà tous bourrés. Je commence à me sentir mal et j'attrape la crampe de la peur, celle que nous n'avons pas souvent, qui tord les tripes et crispe le ventre. C'est la première fois de ma vie que j'ai une telle angoisse de l'inconnu. calepin de voyage page 9 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney J'imagine déjà les manchettes des journaux en Suisse annonçant un scoop du style, …trois jeunes femmes disparues au Yémen… La panique s'empare de moi, de plus, Jacqueline me lance des regards inquiets alors qu'Evelyne la blondasse s'amuse comme une petite folle avec son décolleté ouvert sur ses gros seins tout roses. D'un coup, elle se lève et photographie le groupe ! La réaction est immédiate, des hommes se fâchent, se lèvent d'un bond et gesticulent mécontents car c’est ici, dans ce lieu, qu’ils se retrouvent discrêtement les vendredis pour boire de l'alcool en cachette, loin des regards de la ville. Les photos d'Evelyne ne sont donc pas vraiment les bienvenues. Je bondis sur mes pieds et crie à Evelyne de cacher son décolleté et de planquer son appareil photo afin d'éviter des problèmes. Elle se rassied, toute confuse ! Le calme revient et le vieillard près de moi commence à servir la nourriture. Comme nous sommes les invitées, nous recevons de la bière, du whisky et la graisse du mouton grillé. Tout le monde nous observe manger avant d'entamer le repas, si bien qu'il est impossible de refuser ces bouts de cellulite. J'ai cru mourir en goûtant cette chose horrible mais je n'avais pas le choix, il valait mieux ne pas vexer nos hôtes encore une fois ! Nous buvons nos bières et les hommes sont tous étonnés de voir que nous ne sommes pas aussi saoules qu'eux. On leur explique que nous avons l'habitude de consommer de l'alcool en mangeant chez nous. Nous discutons en anglais le temps du repas et assez rapidement, tous se lèvent pour repartir. Nous apprenons alors que la majorité de ces hommes étaient des autorités importantes de Sanaa, entre autre des policiers, et qu'ils étaient ravis d'avoir mangé avec des femmes occidentales pour les accueillir et échanger des points de vue sur nos vies tellement différentes. Que de stress pour rien, j'aurais pu éviter cette peur si nous avions été présentés dès notre arrivée. Nous saluons nos nouveaux amis et repartons en Mercedes. Nous pensions rentrer chez nous mais impossible, Malik et ses copains veulent nous faire visiter les alentours de Sanaa. Nouveau passage d'un check-point puis nous roulons un moment dans la montagne jusqu'à une plantation de khat. Malik en achète un petit bosquet pour le prix de… US$ 200.-- ! Il veut absolument que nous goûtions cet arbre aux vertus stimulantes pour découvrir les coutumes de son peuple. Nous continuons notre route jusqu'au sommet d'une colline et d'un coup la Mercedes s'immobilise devant la maison d'Ali. Le jardin est fermé par des fils barbelés et le site est complètement isolé. calepin de voyage page 10 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney C'est la maison familiale des fins de semaines. A nouveau, je sens la peur m'envahir les triples mais que faire, nous ne pouvons pas nous enfuir, nous sommes dans un endroit désertique et inconnu, à leur merci. Après une petite visite de la maison et du jardin, les hommes s'installent confortablement dans le jardin intérieur et se calent sur de gros coussins pour boire du thé, fumer le narghilé et préparer le khat, rituel qui a lieu en général dans l'après-midi à l'heure de la sieste. Durant ces heures, c'est tout le pays qui est paralysé par ce phénomène. Impossible d'y échapper, nous devons tester ces feuilles amères et relaxer pour essayer de sentir l'effet euphorique de cette plante. Khater est tout un art. les brouteurs de khat Une fois mastiquées, les feuilles ne doivent pas être avalées mais stockées contre la joue pour former une boule déformant les traits du visage. Le jus est alors aspiré lentement. Je ne sens rien car il faut un temps d'adaptation. Du coup, les hommes deviennent tous gentils et essaient de nous approcher. Evelyne semble ravie de trouver de la compagnie mais Jacqueline et moi n'avons pas du tout envie de roucouler avec eux. Nous restons très calmes, je me lève et commence à discuter en anglais avec le plus âgé des trois nommé Zaki, un noble vieillard très sympa. Je lui explique que chez nous en Europe il n'est pas dans nos habitudes de tromper nos conjoints et que cela n'est pas correct. Une longue discussion s'ensuit et finalement il explique à ses copains la situation et ils nous laissent en paix. Nous ne risquons plus rien, ils ont essayé, pas pu et nous nous quittons tout de même bons amis. Ouf ! Ils nous ramènent en fin de journée à notre hôtel et nous nous terrons dans notre chambre. Que d'aventures pour ce premier jour de voyage, qu'elle journée incroyable ! SANAA LA BELLE Dès le lendemain, nous commençons notre visite du pays et partons à la découverte de Sanaa. Capitale du Yémen du Nord, quelques 150’000 habitants y vivent. Perchée à 2350 m. d'altitude au pied du Djebel Nogûm (montagne de la colère) sur lequel se serait aussi échoué l'Arche de Noë et dont le fils Sem aurait fondé la ville. On dit qu’elle serait l'un des premiers sites de peuplement humain. calepin de voyage page 11 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Connue dès le 2e siècle de notre ère, elle est considérée comme la plus belle ville d'Arabie car aucune cité n'est si raffinée et ne lui ressemble. C'est une cité légendaire et mythique. La ville ancienne jaillit comme une perle dans son écrin alors que les quartiers modernes sont assez glauques. L'architecture est unique et représente la fine fleur des créations. L'une des caractéristiques de ses constructions est la multiplicité des niveaux. Les étages inférieurs des bâtiments sont construits en pierre et les autres étages en briques pisé. L'épaisseur des murs à la base atteint parfois plus d'un mètre. Les fenêtres sont larges et surmontées de décorations en plâtre djouss colorées de vitraux originaires de la ville de Mokka sur les bords de la Mer Rouge. La technique de construction, faite d'un mélange de paille et de terre est la mieux adaptée pour ce pays car les briques séchées au soleil sont peu coûteuses et forment des murs isolants. Souvent de fausses fenêtres en trompe l'œil ornent les façades pour l'harmonie et le plaisir des yeux. Chaque bâtisse a minimum 7-8 étages aussi bien en ville que dans les villages de montagne. Certains palais ont parfois plus de 10 étages et les marches sont si hautes qu'il est difficile d'y grimper. Le rez-de-chaussée sert à entreposer des marchandises et comme étable ou comme parking. Les étages supérieurs abritent les pièces communes et le salon des Yéménites, le muffredge est placé tout au sommet des édifices car il offre une vue imprenable sur la ville. Près de 6500 maisons ont été érigées il y a plus de quatre siècles. calepin de voyage page 12 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney L'art de l'architecture spontanée semble inné chez les bâtisseurs yéménites et illustre parfaitement le célèbre ouvrage de Bernard Rudofsky, Architecture sans architecte. Avant la sanglante guerre civile de 1962-69, Sanaa était protégée par huit portes, il n'en reste que quatre à ce jour. La splendide Bab el-Yaman (la porte du sud) est la plus connue et ses remparts ont été érigés pendant l'occupation ottomane au 16e siècle. Sanaa est divisée en quartiers, le turc Bir el Azab, aux constructions aérées avec de beaux jardins et parfois un bassin d'eau. Wadi Dhar maison à Sanaa citadelles des montagnes calepin de voyage page 13 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney L'ancien quartier juif, Qâa el Yahoud abandonné lors de l'exode massif des Juifs en 1950 a été reconstruit peu à peu au milieu d'un joli souk où les maisons n'ont que deux étages. Ces Juifs n'ont pas le droit de porter la djanbiyya ni la moindre arme. Artisans habiles, ils sont forts regrettés dans les souk de Sanaa car personne n'est plus capable de ciseler les bijoux comme eux. Le travail des berceaux de cuir, les vitraux et le tressage des paniers étaient leurs spécialités. En bordure du vieux Sanaa, nous parcourons la rue Abdel Moghni où d'horribles bâtiments font un sacré contraste avec l'architecture traditionnelle. C'est le quartier des bâtiment officiels et des loisirs. Il y a 134 mosquées recensées à Sanaa et toutes sont plus majestueuses les unes que les autres. Jamia el Kebir est la plus célèbre et date du VIIe siècle, époque de Mahomet. On dit qu'elle a été construite sur l'emplacement d'une ancienne cathédrale chrétienne, elle est cernée de quatre minarets et d'une Kaaba sacrée (la maison de Dieu) semblable à celle de la Mecque. AU SOUK AL BAQR Nous passons bien entendu du temps à flâner dans le souk au cœur de la vielle ville car c'est là que se trouve l'âme de toute la population. C'est aussi le lieu idéal pour se restaurer car la nourriture y est excellente vu que tous s'y approvisionne. On y trouve des ganams ou chiche-kebabs, des pains ronds tout chauds, du thé brûlant, de la viande grillée enrobée de pain, des fruits et j'en passe. Nous mangeons souvent ici dans une petite gargote qui a trois tables recouvertes de nappes faites avec des papiers de journaux. Moi qui n'aime pas trop la viande, j'y ai mangé un matin tôt, la meilleure brochette de ma vie. Très animé, le souk se trouve près de la Grande Mosquée où la voix caverneuse d'un muezzin lance cinq fois par jour son Allah Akbar, Allah Akbar pour rappeler la prière. Dans les environs il y a un hammam qui date de l'époque ottomane très fréquenté les vendredis, jours de congé. Chaque ruelle abrite différentes corporations d'artisans. Dans celle aux étoffes, j'achète un pagne rose vif brodé et le fameux keffieh, un turban vert à pied de poule, celui que portent les hommes des tribus. Dans la ruelles des bijoutiers je m'offre une paire de créoles en or serties de pierres roses fluo synthétiques que je m'empresserai de remplacer lors de mon retour en Suisse, par de véritable yeux de tigre (reçus de ma maman Georgette). J'échangerai aussi les deux crochets de ces boucles peu solides par des fermoirs à brisure en or et dépouillerai les anneaux de tous leurs petits pendentifs (qui étaient mal fixés) en forme de gouttes d'eau, décoration typique des femmes orientales. calepin de voyage page 14 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Les marchandises surgissent des sacs en jute et les gens utilisent encore d'étranges mesures telles que le rotle, frasla ou l'okka qui correspondent aux mêmes quantités selon qu'il s'agit de grain ou de sucre. La djanbiyya, le poignard que tous les yéménites mâles portent sur le ventre est vendu dans des ruelles spécialement consacrées et est hors de prix car depuis l'exode des Juifs ils sont devenus plus chers. On trouve aussi des ornements bédouins. Le Marché aux Voleurs est situé sur une place au centre du souk et chacun peut y vendre ce qui lui plaît, sans être un marchand attitré, on y trouve de tout ainsi que pleins d’objets de contrebande. au souk LES FORTERESSES DES HAUTS-PLATEAUX Chaque matin, nous quittons notre hôtel pour visiter les environs de Sanaa en taxi avec chauffeur et nous payons un prix fixe journalier comprenant l'autorisation obligatoire pour circuler hors de la ville. Le prix de l'essence est dérisoire et chose curieuse, les femmes yéménites ont le droit de conduire des véhicules contrairement à celles d'Arabie Saoudite et du Qatar. carte des sites visités calepin de voyage page 15 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Cette semaine est consacrée à suivre l'itinéraire au sud-ouest de Sanaa pour visiter les monts escarpés du Djebel Harraz où sont perchés une myriade de villages accrochés aux flancs de pics vertigineux, tels des nids d'aigles. Les fiers montagnards de ces citadelles vivent carrément en autarcie et la culture du khat représente souvent leur seule richesse avec les figuiers de Barbarie. Les brumes du matin et l'intensité des rayons du soleil engendrent un climat propice pour ce type de culture. L'entrée à ces citadelles passe par des portes de bois sculptées, toutes plus belles les unes que les autres et qui s'ouvrent les matins et se referment les soirs, comme à l'époque des invasion turques. Les sites sont escarpés et un seul escalier aux marches taillées dans la roche permet d'accéder à ces portes. Le peu d'espace utilisable dans ces lieux de sable et de rocs a donné naissance à ces citadelles de pierres sèches finement décorées de motifs en stuc qui ressemblent à de fines dentelles, entourées de murs-remparts et édifiées tout en hauteur pour permettre de surveiller les vallées. Tous les villages possèdent des bassins de retenues d'eau où les femmes-oiseaux (appelées ainsi car complètement voilées de noir ou de jolis tissus aux motifs colorés) et les enfants viennent s'y approvisionner en eau potable. Les jerrycans de plastique ont malheureusement remplacés les jarres de terre traditionnelles et ho, horreur, des sachets en plastique bleus flottent partout, au gré du vent. C’est le paradis de la poussière. Proche de Sanaa, Rowdah, à 12 km en direction de l'aéroport est un charmant village ombragé à l'air vivifiant. Un hôtel est situé dans l'ancien Palais de l'Imam Ahmaa jouxtant une mosquée du XVIIIe siècle et offre un véritable havre de paix pour les voyageurs fatigués. A Hadda, situé à 9 km au pied du Djebel Dafar, il y a des maisons en pierres, cachées au milieu de vergers verts flamboyants et qui illuminent la masse sombre de la montagne. Des cascades y coulent en été, c'est le lieu privilégié des Yéménites lors des promenades familiales les vendredis. Emerveillement visuel à Wadi Dhar, vallée fertile située à 15 km de Sanaa dans un étroit canyon verdoyant bordé de montagnes désertiques. Un village-oasis est étalé au pied du majestueux Dar al Hajar (le Palais du Roc) perché en équilibre sur un piton de grès rouge. Cet édifice est le symbole du pays et depuis le dernier étage du palais la vue s'ouvre sur toute la vallée. calepin de voyage page 16 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Construit par l'Imam Yahya dans les années 1930, il fut sa résidence d'été. Le site est spectaculaire et abrite un musée. Le taxi s'arrête à l'entrée du village-wadi car l'unique rue que nous empruntons n'est autre que le lit de la rivière. Des aigles tournoient sur les hauts de la forteresse. Wadi Dhar Plus loin, en continuant les routes du Wadi Dahr et du Wadi Dulla, on traverse des cultures en terrasse et des plateaux rocailleux pendant environ 50 km. Puis, on arrive àThula, village fortifié aux maisons d'une unité architecturale rare dans lequel trônent une mosquée et une citadelle. Murailles, citernes à ciel ouvert, façades en dents-de-scie et anciennes maison juives, cette petite cité est charmante. Nichée au pied d'une forteresse imposante, elle est parsemée de passages discrets qui serpentent entre les maisons de plusieurs étages aux façades décorées. Au bout d'une ruelle étroite on aperçoit l'ancien palais d'un Imam aménagé en funduq, sorte d'hôtel traditionnel. A quelques kilomètres de là, suivant les traces des ânes et des enfants pendant près d'une heure, on s'enfonce dans un défilé rocheux qui de marches taillées en escarpements nous amène à près de 3000 m. d'altitude dans le village de Kaukaban perché au sommet d'une falaise abrupte. Cette citadelle, fief des Zaïdites* depuis le XIIe siècle, est cerclée d'une immense muraille défensive. (*le zaïdisme est une branche du chiisme et ses adeptes reconnaissent Zayd Ben Alî comme 5e et dernier Imam). En chemin, des femmes nous crachent à la figure et nous insultent ! les cracheuses calepin de voyage page 17 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Le panorama grandiose nous fait oublier la méchanceté de ces femmes. On leur pardonne leur attitude étrange et fanatique. Il n’y a pas beaucoup de touristes par ici, encore moins de femmes voyageant seules, sans hommes… Bon, on continue notre chemin. Alternance de cultures en terrasses et de champs en jachère, on admire une vallée fertile et nous apercevons à l'Est le désert du Rub al Khali, les plateaux de l'Ouest et le Rocher de Thula massif qui séparent ces lieux de Sanaa. La vue nous coupe le souffle ! Kaukaban Kaukaban surplombe la veille ville de Shilam (à ne pas confondre avec la Shilam située au Nord du Yémen du Sud) et sa grande mosquée, étendue en contrebas de la falaise. Sur l'axe Sanaa-Hodeidah, voie historique au cœur du Djebel Harraz, les montagnes sont découpées, les pentes sculptées en terrasses, et la végétation est tropicale. A 90 km de Sanaa, nous visitons Manakha, située à 2200 m. d'altitude et fief des Ismaéliens (un courant minoritaire de l'Islâm shîite). Plus haut perché dans une falaise, le village de Kahel, petite perle architecturale aux maisonstourelles qui servent de rempart naturel. Ces lieux sont magiques, il y règne une paix incroyable. En repartant, nous contemplons l'ancienne porte de bois d'un funduq et un village troglodyte qui doit avoir l'une des plus anciennes mosquées du pays. ATihama, on se croirait en Afrique, le climat est subtropical et la population très mélangée d'indigènes, d'Africains car de tous temps, des marchands y sont arrivés de tous les coins du monde par caravane ou par bateau. LE VOYAGE A SAADA Comme nous aimerions visiter le Nord et le Sud du Yémen, nous passons dans les bureaux de la Yéménia Airways à Sanaa demander des billets d'avion pour Saada et Taiz. Sur simple présentation de nos cartes d'identité Air Afrique et Air France, on nous prépare des tickets one-way pour Saada et Taiz. Nous rentrerons en bus de ces voyages afin de voir tous les paysages ! calepin de voyage page 18 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Nos demandes de billets d’avion n'étaient pas prévues mais nous avons bien joué puisque on nous les a attribués sans problèmes et… gratuitement. Au matin du lendemain, nous sautons dans un taxi pour l'aéroport et embarquerons dans un avion militaire plein de recrues qui se dirigent vers la frontière avec l'Arabie Saoudite. Nous sommes très surprises d'embarquer sur un tel vol et sommes les seules dames de l'avion avec une maman et son enfant. Tous les militaires sont sympas avec nous et nous atterrirons parmi de grosses turbulences sur une piste en terre battue de l'aéroport militaire de Saada. Quelle histoire, on se croyait en mission spéciale. A l'atterrissage, une jeep nous attend et embarque seulement les dames, la maman, son enfant et nous autres. On nous dépose sur une route goudronnée où un taxi nous attend pour nous conduire à Saada où nous logerons dans un hôtel très bizarre tenu par des Chinois où des prisonniers également chinois effectuent leur peine en travaillant dans cet hôtel pendant quelques mois. Quelle angoisse ! L'hôtel est sobre et lugubre, la nourriture mauvaise et le personnel légèrement craignos, ils ont tous des têtes de balafrés et il n'y a pas une seule femme à l'horizon, à part nous. J'ai à nouveau la crampe de la peur qui me titille mais rôdée comme je l'ai été depuis mon arrivée dans ce pays, je respire un bon coup et j'oublie tout cela. Ouah, quelle expérience et quelle idée pour trois jeunes femmes de visiter un tel pays ! Nous passons quelques jours à Saada avant de repartir en bus pour Sanaa. Saada est une ville de hautes maisons en pisé avec une mosquée en pierre. C'est une ville sainte et son souk est très animé, nous y passons un après-midi sur une terrasse à observer la vie. Cette région n'a rien à voir avec celle d'où nous venons, la frontière avec l'Arabie est proche mais la manière de vivre des gens semble différente. Il s’agit d’une zone interdite, sous contrôle des hommes des tribus ! La route de 247 km qui mène de Saada à Sanaa est goudronnée et les paysages sont magnifiques. On passe à travers Al Mundir, petit village quelconque puis on arrive à Harf, point de départ d'une piste qui mène vers Al Matammah sur la route de Mareb pas très loin de la frontière avec le Yémen du Sud. Nous traversons Chaharé, ville très connue pour sa situation étonnante en nid d'aigle, son beau pont et car plusieurs Imams s'y sont réfugiés au cours des siècles. Plus loin, à Rayda, on peut voir des inscriptions himyarites (royaume antique du Yémen) sur des pierres utilisées sur des constructions modernes et à Amran, ville édifiée sur des ruines sabéennes et entourée d'une muraille en pisé comme une cité médiévale, il y a le départ d'une piste pour rejoindreTihama. calepin de voyage page 19 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Enfin, c'est l'arrivée à Sanaa. Nous sommes fatiguées mais satisfaites de notre périple aux portes de l'Arabie Saoudite. Demain nous nous reposerons un peu puis nous partirons vers le Sud, visiter Taiz en autobus (rials 60.-p/pers.) puis après, nous reviendrons en avion à Sanaa. Après un jour de repos bien mérité, nous quittons Sanaa en ressortant par la porte Bal el-Yaman et nous passons à nouveau plusieurs check-points, douane, sécurité militaire, etc. Routine, nous n'avons jamais eu de problèmes à ces passages, si ce n'est que des salut de bienvenues et des regards curieux. Nous roulons sur un beau plateau de montagne avant d'atteindre le col d'Yslah à 2635 m. d'altitude. La route traverse de jolis villages, Mabar, Mawahib, Dhamar parmi les plus beaux paysages du monde, serpentant entre virages et précipices. A Bainum, des ruines en forme de fer à cheval s'étendent sur des vallées situées autour d'un wadi. Nous rêvons au passé et imaginons la grandeur de ces anciens royaumes. Bainum a été l'une des plus belles villes de l'Arabie du Sud préislamique. On traverse un tunnel de 150 m. édifié en l'honneur de Dieu. Yarim est l'une des régions les plus fertiles du pays et Zafar est un village en ruine. Nous passons le col de la Sumarah (156 km) qui monte à 2708 m. d'altitude avant de redescendre sur Taiz. Les paysages sont splendides, il y a des cultures en terrasses et des maisons fortifiées en pierres vertes et rouges. Ibb est à 197 km de Sanaa et représente l’architecture classique du Yémen. On saute dans un taxi collectif pour visiter ce coin, le village est bâtit sur un grand plateau qui domine des vallées aux terres fertiles. On dit qu'à Ibb, les oiseaux dansent de joie tant le ciel est pur. On arrive alors à Jibla, cité harmonieuse et ancienne résidence royale aux nombreuses mosquées, les plus belles du pays. Ville calme, elle abrite un hôpital américain et la route continue à descendre par un petit col dans des régions verdoyantes et toujours plus chaudes. Au km 247, il y a le croisement pour Rahidah, la frontière avec la République Démocratique et Populaire du Yémen. On arrive alors à Taiz où nous logerons dans un hôtel nommé De Luxe (rials 135.-- avec une douche et un WC). LA VALLEE DES BELLES JABUSABA Dans le bus nous nous lions d'amitié avec un blond américain, John Kirrene (PO Box 5713 - Taiz - Yemen Arab Republic) anthropologue de métier qui vit au Yémen depuis plusieurs années. calepin de voyage page 20 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Il nous propose une ballade sur son territoire de prédilection et d'étude, le village des Jabusaba Girls, femmes libres et indépendantes qui règnent et dirigent les hommes dans leur vallée. Ici les femmes sont hardies et ne portent pas le voile. Pour accéder à ce village depuis Taiz, nous empruntons la route du Palais Sala, à gauche et grimpons à pied dans une jolie vallée toute pentue où se niche le village des femmes. Nous vivons une magnifique expérience parmi ces dames curieuses et nos contacts sont privilégiés. Elles me font penser aux femmes Touaregs, musulmanes, libres comme l'air lorsque les maris nomadisent. C'est le monde à l'envers, spécialement dans ce pays où les femmes sont peu présentes et où l'islam y est pur et dur. les belles Jabusaba girls Après quelques jours, nous prendrons notre vol gratuit pour retourner à Sanaa et une fois installée dans notre petit hôtel, je décide que j'en ai assez vu et que je passerai mes derniers jours au Yémen tranquillement. Jacqueline est d'accord avec moi et pour ce faire nous recherchons un hôtel avec une piscine. Le Sam City Hôtel situé pas trop loin du nôtre, fera très bien l'affaire. C'est un hôtel moderne mais il est si cher que Jacqueline et moi y passerons uniquement d'agréables moments au bord de la piscine. Mais voilà, là encore, il est impossible d'avoir la paix, il y a toujours un mâle à l'horizon qui bombe le torse et tente de faire connaissance pour nous inviter quelque part. Pendant ce temps, Evelyne, insatiable, décide de visiter encore quelques villages dans les parages et loue un taxi avec chauffeur pour la guider. Nous lui recommandons d'être prudente. Le jour de notre départ prévu en fin d'après-midi, elle nous quitte pour une dernière visite touristique et revient toute agitée vers midi. Le chauffeur du taxi a voulu l'arnaquer sur le prix du voyage. Comme elle refusait de payer plus que le prix fixé, il a stoppé son taxi et tenté d'abuser d'elle en pleine nature. Elle a malgré tout réussi à se faire ramener à l'hôtel sans dommage, prétextant qu'elle n'avait pas assez d'argent avec elle pour le payer. Finalement elle s'est enfuie du taxi et réfugiée dans notre chambre sans régler sa note. calepin de voyage page 21 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney Conseil de guerre, nous décidons qu'il vaut mieux quitter les lieux rapidement pour nous réfugier à l'aéroport et attendre notre vol de retour pour l'Europe, en sécurité. Chose dite, bagages bouclés, nous sautons dans un taxi et quittons la ville comme des voleuses car nous ne voulons pas croiser le chauffeur de taxi. A l'aéroport, les guichets Yéménia Airways sont ouverts si bien que nous enregistrons nos bagages, passons la douane et nous nous installons dans la salle d'attente, toutes soulagées. Comme nous étions bien en avance sur l'horaire, le personnel de la compagnie d’aviation nous a proposé de prendre place dans une salle VIP prévue pour des groupes d'Anglais et du champagne nous est servi, quel pied ! Ravies nous oublions nos soucis et relaxons enfin en nous remémorant les bons et les mauvais souvenirs de ce périple à travers le Yémen mythique. Une demi-heure avant les préparatifs d'embarquement, nous voyons un groupe d'agités tenter d'entrer dans la zone où nous sommes installées et nous reconnaissons avec horreur le chauffeur de taxi d'Evelyne, accompagné d'un fonctionnaire qu'il semble connaître. Les autorités douanières nous encerclent et la confrontation commence. Nos sacs sont fouillés et on me réclame les films de mon Nikon FM. Heureusement, j'ai un film vierge dans mon sac à main que je remets aux autorités qui m'accusent avoir photographié l'aéroport de Saada et des check-point militaires, selon les dires du chauffeur de taxi… ce qui est faux ! Nous expliquons toute la situation aux douaniers et finalement nous donnons au chauffeur de taxi le prix qui avait été fixé pour la course et la monnaie yéménite qu'il nous reste. Il est satisfait, tout semble rentrer dans l'ordre et nous embarquons enfin dans notre avion. Nous aurons vraiment eu des tracas jusqu'au tout dernier moment et souvent par la faute d'Evelyne qui est complètement inconsciente. Ce fût une bonne leçon, depuis j'ai toujours préféré voyager seule ou avec ma famille. 13e siècle, marché aux esclaves – BNF Paris Références Simon Jargy & Alain St-Hilaire, Yémen, avec les Montagnards de la Mer Rouge. Editions Mondo SA, 1978. mes notes de voyage, diapositives & photos calepin de voyage page 22 sur 22 cyberfolio ©dominique epiney
Documents pareils
Français - Yemen Tourism
une île unique, ouverte au tourisme depuis peu. Le territoire présente
une surprenante variété de paysages naturels: montagnes plongeant
à pic dans la mer, plaines recouvertes de palmiers et de ros...