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N°260 March 2015 L’hydrocarbure IFP School / ENSPM Alumni Association DOSSIER HydrocarbureS non conventionnels : entre inquiétudes et opportunités NEWS FROM IFP SCHOOL MOOC: Successful bet! About the ASSOCIATION Assemblée générale : bilan et avenir DOSSIER : Hydrocarbures non conventionnels Points de repères sur les typologies de ressources conventionnelles et non conventionnelles Jean-Pierre Deflandre Professeur IFP School, Centre EP Roland Vially Géologue IFPEN GOL 81 Jean-Claude Heidmann Directeur Centre EP, IFP School - GOL 81 L’objet de cet article est de dresser un rapide panorama typologique des ressources de pétrole et de gaz selon leur contexte géologique. On s’intéressera tout d’abord à l’origine des hydrocarbures puis à leur migration et piégeage éventuel dans le sous-sol, balayant ainsi le spectre des ressources dites à ce jour “conventionnelles” et “non conventionnelles”. Origine et genèse des hydrocarbures Aujourd’hui, comme depuis des millions d’années, des matériaux organiques et minéraux (les sédiments) se déposent et s’amoncèlent dans des contextes différents : lacs, estuaires des grands fleuves, zones deltaïques, fond des mers et océans, et formeront ainsi des bassins sédimentaires. Du fait de l’enfouissement progressif, la boue sédimentaire va devenir, par compaction mécanique et transformation chimique, MARCH 2015 N°260 L’HYDROCARBURE 11 DOSSIER Hydrocarbures non conventionnels une roche. En fonction de la nature des sédiments et de leurs conditions de dépôt, une faible partie de la matière organique, issue des organismes vivants constituant la flore et la faune, sera préservée dans ce qui deviendra la roche mère. Celle-ci se caractérise par une porosité très faible (quelques pourcents) et une perméabilité extrêmement faible. Lors de l’enfouissement, la matière organique se transformera lentement en kérogène. Si les conditions de pression et de température le permettent, ce dernier se transformera à son tour en pétrole puis en gaz. Ce processus d’enfouissement et de maturation de la matière organique se déroule sur des millions d’années. Il peut être interrompu ou au contraire accéléré du fait des mouvements tectoniques. On trouvera donc des roches mères immatures en surface ou à faible profondeur alors qu’il faudra atteindre des profondeurs importantes (de 2 à 4 km) pour que la température et la pression soient suffisantes pour transformer la matière organique en hydrocarbures. Cette roche, une fois mature, finira par expulser une partie de ses hydrocarbures en se micro-fissurant sous l’effet de l’augmentation de la pression interne due à l’accroissement de volume associé à la transformation de la matière organique en hydrocarbures. Le volume et la nature des hydrocarbures générés dépendent de la composition initiale de la matière organique (lacustre, continentale, marine) et de l’histoire géologique du bassin sédimentaire. Migration et piégeage des hydrocarbures : les typologies de ressources Intéressons-nous maintenant aux hydrocarbures expulsés qui, plus légers que l’eau, vont migrer depuis la roche mère vers la surface. Pour cela, nous nous appuierons sur une coupe géologique schématique (voir Figure). Selon la structure géologique du bassin concerné, les hydrocarbures générés dans les roches mères vont emprunter des chemins de migration plus ou moins complexes lors de leur remontée vers la surface. Ces chemins influenceront au final la typologie Coupe géologique schématique : migration depuis la roche mère et piégeages des hydrocarbures (pétrole et gaz). Source : IFPEN / IFP School. 12 MARCH 2015 N°260 L’HYDROCARBURE pétroles très visqueux (par exemple le brut lourd vénézuélien) ou en bitumes (sables bitumineux de l’Alberta au Canada). des gisements d’hydrocarbures que nous connaissons aujourd’hui. En fonction de leur perméabilité, les roches constitueront soit des chemins préférentiels de migration pour les différents fluides (cas des roches poreuses et perméables), soit à l’inverse des obstacles plus ou moins infranchissables à cette migration. C’est le cas notamment des formations très peu perméables, tels les grès ou carbonates compacts, ou imperméables comme les argiles ou le sel. De même, la présence de failles affectera différemment cette migration suivant que celles-ci seront perméables ou pas. Notons que dans certaines conditions thermodynamiques particulières, le gaz généré n’atteindra pas l’atmosphère, restant bloqué à très faible profondeur, dans les formations sédimentaires sous forme d’hydrates de gaz. C’est le cas dans le pergélisol dans les régions arctiques (en Alaska et Sibérie par exemple) et dans les sédiments marins peu enfouis mais gisant sous une grande profondeur d’eau comme au large du Nigéria. Les pétroles et gaz expulsés de la roche mère inférieure (la plus ancienne) ne peuvent qu’infiltrer les grès compacts dont la très faible perméabilité retiendra l’essentiel des fluides. Au-delà d’une certaine pression ils pourront se déplacer dans la porosité du milieu initialement saturée d’eau générant ainsi ce qu’on appelle des tight gas / tight oil sands. Les fluides restants dans la roche mère elle-même deviendront les fameux shale gas et shale oil. Mais c’est surtout en profondeur que les hydrocarbures pourront s’accumuler au sein de roches perméables et poreuses appelées roches réservoir (gréseuses et/ ou carbonatées) recouvertes de roches imperméables telles que des argiles (au centre de la figure et à droite). Ce mode de piégeage dit “structural”, car lié à des structures géologiques, est très localisé à l’échelle du bassin sédimentaire. Il est idéal car il permet de concentrer, retenir et préserver au fil du temps des volumes importants d’hydrocarbures. Il constitue de nos jours la cible principale des activités d’exploration-production. Les hydrocarbures piégés dans de telles structures géologiques (on parle d’accumulations ou de gisements) sont communément appelés “pétroles et gaz conventionnels”. Les fluides expulsés de la seconde roche mère (plus récente) pourront migrer soit vers les grès peu compacts situés au-dessous du fait de la forte surpression, soit plus aisément vers les grès poreux et perméables situés au-dessus. Ils parcourront lentement ces grès jusqu’à la surface si leur migration n'est pas stoppée par une barrière de perméabilité ou un piège structural donnant ainsi naissance à d'innombrables indices de surface dans le monde entier. À faible profondeur dans le sous-sol, les hydrocarbures subiront une dégradation bactérienne et se transformeront en Les ressources d’hydrocarbures non conventionnels À l’inverse des hydrocarbures conventionnels, accumulés dans des structures géologiques de taille limitée (quelques milliers de kilomètres carrés au maximum comme pour le champ de Kashagan au Kazakhstan), les hydrocarbures restés dans les roches mères et ceux retenus dans les formations peu perméables sont disséminés sur de très grandes étendues (ancienne mer intérieure, bassin sédimentaire, etc.) pouvant représenter plusieurs millions de kilomètres carrés. MARCH 2015 N°260 L’HYDROCARBURE 13 DOSSIER Hydrocarbures non conventionnels Bien que très difficiles à évaluer, ces quantités d’hydrocarbures non conventionnels sont donc gigantesques. Les ressources en place incluent : les pétroles extra lourds et les sables bitumineux (hydrocarbures biodégradés), les hydrocarbures de roche mère immature (oil shale) , les hydrocarbures de roche mère mature (shale gas et shale oil), les huiles et gaz imprégnant les formations peu perméables (tight oil et tight gas), le méthane (d’origine thermique ou biogénique) piégé sous forme d’hydrates, les gaz de houille (coal bed methane) adsorbés sur le charbon. Exploitation des ressources d’hydrocarbures non conventionnels Une partie de ces ressources en place sont devenues techniquement et économiquement récupérables grâce à l’évolution continue des technologies. Pour produire ces ressources, plusieurs approches techniques sont actuellement utilisées. On peut les subdiviser en deux catégories : Technologies ex situ (exploitation minière de surface) : séparer par traitement et chauffage les bitumes du sable qui en est imprégné (sables bitumineux), pyrolyser (par chauffage) la matière organique contenue dans les roches mères immatures (oil shale). Technologies in situ (dans la roche en profondeur) : fracturer les roches peu perméables pour permettre aux hydrocarbures légers d’en sortir (tight reservoirs, shale gas et shale oil), chauffer le milieu et rendre les pétroles lourds plus mobiles (injection de vapeur), dissocier les hydrates et produire le méthane (à l’étude). 14 MARCH 2015 N°260 L’HYDROCARBURE A team of oil prospectors inspect a natural oil seep at Kotuku near Greymouth, New Zealand, January 3, 2015. Conclusion Du point de vue de leur genèse et de leur composition chimique d’origine, les hydrocarbures non conventionnels ne diffèrent pas des conventionnels (à l’exception du gaz biogénique et du CBM). Les différences résident avant tout dans leur histoire géologique en termes de maturation de la matière organique, de migration et de piégeage. Ces ressources sont gigantesques mais plus disséminées. Leur exploitation dépend et dépendra des évolutions technologiques, de la réduction des coûts de production et de l’empreinte environnementale résultante. En effet, c’est le développement simultané au cours des trente dernières années de deux techniques : le forage horizontal et la facturation hydraulique ainsi que leur utilisation combinée qui ont permis aux États-Unis de devenir un producteur majeur d’huile et gaz issus de ce type de ressources. Mais tout ceci est sans compter le gigantesque potentiel mondial des hydrates de méthane, qui représentent d’ores et déjà un enjeu stratégique majeur pour le Japon.
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