EVOLUTION DU LITTORAL ALGERIEN ET IMPACT DES

International Journal of Environment & Water
ISSN 2052-3408
Dynamique du littoral de Skikda (Est Algérien) :
Analyse par photo - interprétation, traitement d’images et analyse des cartes
Cemali N* et Ramoul S**
*Université Larbi Ben M’hidi Oum –el- Bouaghi : Faculté des sciences de la terre et d’architecture
** Université Hadj Lakhdar Batna Faculté des sciences département de science de la terre
Résume:
Les espaces côtiers sont soumis à une forte dégradation sous l’action de différents facteurs
naturels et des conditions climatiques et surtout sous la pression anthropique .Dans le contexte de
l’Algérie la préservation du littoral est devenu une grande priorité qui nécessite une approche de
gestion globale.
Le littoral de Skikda situé dans la partie Est de la côte Algérienne, il se distingue par leur
biodiversité marine et terrestre, mais il subit de multiples perturbations, la construction du port de
Stora, et du port méthanier de Ben M’Hidi ont nécessité des prélèvements massifs de sables des
plages et des dunes.
L’intervention humaine ou la réalisation d’un aménagement quelconque rompt l’équilibre
naturel, et se crée un nouvel état d’équilibre se traduisant par une nouvelle évolution qui menace
l’instabilité des infrastructures avec de lourdes conséquences.
Le littoral de Skikda est caractérisé par une forte variabilité qui s’exprime par un recul net du
trait de côte et un engraissement important, cette dynamique constitue une menace sérieuse sur les
installations portuaires et les nouvelles zones urbaines. Face à ces risques littoraux, il n’existe
aucune prise de conscience quant à la réalisation d’aménagement de défense contre la mer.
Le présent travail détermine les effets des aménagements réalisés sur le littoral de Skikda, il
présente une analyse basée sur plusieurs missions de photographies aériennes, traitement
numérique d’image satellitaire (Spot,landsatTM) et plans bathymétriques suivi d’un travail de
terrain. Ces outils ont permis de caractériser l’évolution morphodynamique du littoral de Skikda.
MOTS CLES:
Littoral, Télédétection, morphodynamique, facteurs hydrodynamiques, érosion marine.
1. Introduction :
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Le littoral est généralement défini comme une zone de contact entre la mer et la terre, il est
l’un des milieux naturels les plus complexes de la terre (Paskoff 1994).C’est un espace exigu
à grande importance dans tous les domaines, habitats, industrie, tourisme, commerce,
agriculture.
L’occupation humaine du littoral est un phénomène connu depuis l’antiquité, c’est un
milieu attractif qui soumit aujourd’hui à des multiples perturbations.
L’Algérie avec une façade maritime de 1200 km possède une zone côtière qui n’occupe que
1.9% du tout le territoire algérien et malgré cette petite partie elle est considérée comme une
composante majeure dans le domaine de planification nationale.
2. Cadre de l’étude :
Situé entre deux pointes rocheuses (Cap Bougaroun à l’Ouest et Cap de fer à l’Est) le
golfe de Skikda de 147 km est relativement rectiligne selon une direction Est- Ouest. La
partie sud du golfe est entourée par un ensemble de montagnes côtières du socle kabyle
(Djebel el Alia, Djebel Lilou165m, Djebel Filfila, et Djebel Bouyala).
La zone étudiée se trouve au fond du golfe elle présente une petite baie de 28 km limité à
l’est par Ras Filfila et à l’Ouest par Stora. Elle est composée d’une série de plages sableuses
qui constituent un atout touristique incontestable (fig.1).
Fig.1 : Situation géographique de la baie de Skikda
Stora
Ras Filfila
3. Contexte géomorphologique :
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L’arrière-pays de la baie de Skikda développe
une topographie basse faite
essentiellement de plaines et de collines, les caractéristiques du climat méditerranéen ont
favorisées la présence d’un couvert végétal dense sur les versants nord du socle kabyle on
donnant à la baie un beau regard.
A l’approche de la mer, l’aspect de la côte est irrégulier où se développent des plages
sableuses de15.85 km, découpées dans des falaises plongées sur la mer (12.15 km).
La plage de Ben Mhidi (Jean Darc) est spécifique par sa vaste zone sableuse située à
l’Est de l’embouchure d’Oued Saf-Saf. Elle est limitée par un système plus étendu composé
de dunes anciennes et dunes récentes (Fig2).
L’avant-pays montre en général des profondeurs qui évoluent progressivement vers le
large. Les lignes bathymétriques nous apprennent que les grands fonds atteignent presque le
pied de Ras Filfila et Ras Skikda (à-3m). Au contraire vers l’Est la zone côtière s’abaisse en
pente douce (Fig3).
Djbel Filfila
.586
Oue
igha
dR
Djbel
Re
265. hbet Edan
ia
Fi2.Géomorphologie de
la baie de Skikda
??? ???????
Oue
d Ks
Skikda
ob
d El
Oue
Djebel
mesk
353.
iane
Gat
Zone
INdustrielle
Socle Kabyle
d
Oue
Saf
SAf
Accumulation fluviale
Djbel El Alia
.659
Oued
Zeramn
a
Morphologie littorale
Morpholgie continentale
?Occupation Humaine
Zone urbaine et
industrielle
Glacis
ravin moin de 1m
Dune ancienne
Ports
Lignes de crête
Ravin plus de 1 m
Dune récente
Oued
point d'altitude
Deltas
Falaise
Falaise à ravin
-0.03
Plage sableuse
0Km
Point d'altitude sous la
mer
Escarpement
.659?
50
Rs Filfila
Stora
P
Skikda
lage
de
Ben
idi
Mh
Djbel FIfila
4?
?4
?
km
0
af
Af S
dS
Oue
Fig3 : Topographie sous- marine de la baie de Skikda.
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4. Contexte hydrologique et hydrodynamique :
Six Oueds
débouchent la baie de Skikda, Oued Righa, Oued El Gat et Oued Ksob à
l’Est; Oued Saf Saf entre les deux ports, oued Bni Melek et Oued Chadi à l’Ouest.
Ces Oueds subissent un régime torrentiel méditerranéen, ils provoquent des phénomènes
d’inondation, glissement de terrain en aval, et érosion intense en amont des bassins versants.
(Photos n°1,2).
Photo1.Inondation à Skikda le 3.1.2011
Photo2. Glissement de terrain le12.3-2005(versant
de Stora).
La baie de Skikda subit l’influence du régime des vagues du secteur O à NO, ces vagues
ont une amplitude moyenne de 3.75 m, elles se caractérisent par sa violence pendant les
tempêtes où ils se génèrent d’énormes vagues (+7 m) et provoquent des dégâts importants
sur les infrastructures portuaires (phots n°3,4).
Photo3.Impact de la vague sur l’ancien
port
Photo 4.Déferlement de la vague sur la route
de Stora
Ces fortes vagues se combinent avec d’autres facteurs hydrodynamiques tels que les
courants de dérive littorale favorisant ainsi un transit sédimentaire Est-Ouest dont la quantité
est estimée 39200.3 m3/an (LEM 1998).
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5. Cinématique du trait de côte :
La baie de Skikda présente un équilibre instable. Actuellement elle se trouve dans une
phase évolutive intense matérialisée par une extension portuaire et des aménagements réalisés
en amont et en aval de la zone côtière.
L’analyse de l’évolution du littoral de la baie de Skikda a permis d’identifier les
facteurs qui interviennent dans l’évolution du trait de côte.
L’analyse se repose sur la comparaison des photographies aériennes couvrant les périodes ;
1972-1988 et des plans bathymétriques.
La synthèse réalisée à partir des différents documents
a permis de dégager les
tendances suivantes :
- Le secteur côtier Est de la baie de Skikda a connu une avancée du trait de côte à proximité
de la jeté secondaire du nouveau port méthanier. Ce phénomène est bien marque après
l’installation du nouveau port méthanier où la jetée secondaire d’une longueur de 100 m
étendue vers la mer joue un rôle d’obstacle qui ne laisse pas le transît sédimentaire de l’Est
vers l’Ouest ce qui provoque un engraissement progressif (Fig4).
1972
″
1988
″
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Fig4 : Evolution du trait de côte de la baie de Skikda entre 1972-1988
(à partir de photographies aériennes)
Les plans bathymétriques de la plage Ben Mhidi à l’Est de la baie confirment cette
situation, les isobathes 0.1.2.3.m connaissent une avancée vers le large traduisant ainsi un
engraissement (Fig5, 6).
Fig6.Evolution de plage Ben M’hidi (1974-1969)
Fig6.Evolution de plage Ben M’hidi (1991-1974)
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- Un recul du trait net de côte est bien marqué entre les ouvrages de protection réalisés pour
la protection du port.
1972
1988
RN°18
Erosion
Erosion
v
Photo5.Effet de la construction des épis sur la morphologie de la plage Ben M’hidi
6. Impact des aménagements sur la dynamique littorale de la baie de Skikda :
La situation naturelle de la baie de Skikda est aggravée par les interventions humaines en
amont des bassins versants, en aval et sur le rivage.
a. Les infrastructures portuaires :
Elles modifient le cheminement naturel du transit sédimentaire des dérives littorales et elles
favorisent l’ensablement et l’envasement des ports.
Les ports Algériens connaissent un ensablement important et nécessitent des dragages très
coûteux.
Le golfe de Skikda comprend cinq ports sur les 28 ports que compte l’Algérie, notre aire
d’étude possède les ports suivants (Fig.7) :
- Le nouveau port des hydrocarbures, appelé le nouveau port.
- Le port mixte hydrocarbures/marchandises/passagers, (Ancien port)
- Le port de pêche de Stora.
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Port de Stora
Le port mixte
Port des hydrocarbures
Oued Saf Saf
Fig7 : les Ports de la baie de Skikda
Le port des hydrocarbures est crée dans une plaine à l’Est de l’embouchure de l’oued
Saf Saf en 1972, il constitue avec la zone industrielle un complexe pétrochimique à grande
importance nationale et internationale. Malgré cette importance le port soumis à un
ensablement important à cause de sa situation géographique et l’orientation de son entrée.
La jetée secondaire joue un rôle de barrière qui stoppe le transit sédimentaire de l’Est vers
l’Ouest. L’engraissement observé dans le secteur Est
de la baie sur les photographies
aériennes de 1972, 1988 confirme la prédominance d’un transit sédimentaire de direction
Est-Ouest. L’entrée du port est orientée vers l’Est donc il est exposé directement à
l’envahissement des sédiments ce que favorise le phénomène d’ensablement (Fig8).
Dans la partie occidentale les courants de dérive littorale qui se produisent par les vents
d’Ouest sont moins puissant par rapport aux courants de la partie Est parce qu’elle présente
une zone protégée naturellement par les caps et les falaises de Djbel Mouader. Donc la
réduction du stock sédimentaire disponible pour alimenter les plages.
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La dérive littorale dominante
Ensablement
Ensablement
Fig.8 : Ensablement du nouveau port de Skikda
b. Les ouvrages lourds de protection contre l’érosion marine:
Les épis rocheux sont des ouvrages de protection implantés à l’Est et à l’Ouest du trait de
côte contribués à modifier l’équilibre sédimentaire en perturbant le transport naturel des
matériaux ce qui provoque une érosion.
Le phénomène est plus remarquable entre les deux épis implantés en 1982-1983.Ces
ouvrages ont emporté un succès mais la diffraction de la houle en tète de l’ouvrage a
provoqué une érosion intense en arrière de l’épi et favorise ainsi l’instabilité de la Rn°18
(Photo5).
Les enrochements sont également des ouvrages de défense contre l’attaque de la mer, ils
sont implantés à l’Est et à l’Ouest de la côte pour la protection des infrastructures routières.
Mais ces ouvrages peuvent réduirent l’estran ce qui diminue son pouvoir de dissipation de
l’énergie des vagues (photo6, 7).
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Disparition totale de la plage
Photo6 : Protection de la plage Lilo par l’enrochement
L’attaque directe des vagues favorisent l’érosion.
Photo7 : Protection de la plage de Ben M’hidi par l’enrochement
c. Aménagement touristique et prélèvement du sable :
L’urbanisation anarchique, l’aménagement touristique et la construction à proximité du
rivage accélèrent l’amaigrissement des plages. L’exploitation des sables dunaire pour les
besoins de construction, la destruction des dunes bordière pour aménager des boulevards, des
promenades ou pour édifier des bâtiments fait disparaître la réserve en sable qui joue un rôle
de pare-chocs contre les fortes vagues et aussi qui constitue un élément essentiel de
l’équilibre dynamique d’une plage (R.Paskoff 1998).
Skikda n’échappe à cette situation, des multiples constructions linéaires du front de mer de
la baie, sont réalisées directement sur la dune bordière en affectant ainsi tout échange entre la
dune et la plage. (photos 8.9)
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Zone de dune bordière
Photo 8, 9 : Plages de Molo, Ben M’hidi,. Les aménagements ont
largement empiété sur la partie haute de la plage
d. L’aménagement du bassin versant d’oued Safsaf :
L’impact des aménagements hydriques sur la baie de Skikda n’est pas à négliger, en
effet la présence du barrage de Zerdazas et les retenues collinaires sur le bassin versant
d’Oued Saf Saf ont entrainé un piégeage des sédiments. Le fort taux d’envasement qui
caractérise le barrage du Zerdazas et la baisse des apports liquides enregistrés en1988-1989
(fig9) peuvent favoriser le phénomène d’érosion en aval.
4.5
140
4
120
3.5
100
2.5
80
2
60
1.5
40
1
20
0.5
0
0
1996 - 1997
1995 - 1996
1994 - 1995
1993 - 1994
1992 - 1993
1991 - 1992
1990 - 1991
1989 - 1990
1988 - 1989
1987 - 1988
1986 - 1987
1985 - 1986
1984 - 1985
1983 - 1984
1982 - 1983
1981 - 1982
1980 - 1981
1979 - 1980
1978 - 1979
volume hm3/année
debit…
1977 - 1978
débit liquide m3/s
3
années
Fig 9 : Variations annuelles des débits liquides et volume annuelle
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M3/ans
400000
350000
300000
250000
200000
Envasement …
150000
100000
50000
0
Années
Fig 9 : Moyenne d’envasement du barrage de Zerdazas(1945-2004)
Conclusion :
Par sa situation géographique et potentialité économique la ville de Skikda représente
aujourd’hui
un moteur
du développement Algérien. Depuis la réalisation de la zone
industrielle (1970) la ville à connu une forte croissance démographique ce qui a causé des
perturbations sur l’environnement côtier.
L’étude du trait de côte entre Rass filfila et Stora a permis de mettre en évidence l’impact
des aménagements sur l’équilibre sédimentaire du littoral qui constitue une ressource
économique importante.
Les ouvrages lourds de défense contre l’érosion marine réalisée par les autorités de
Skikda sont insuffisants là où la dégradation est avancée. Il faut donc traiter le problème en
impliquant une stratégie basée surtout sur une étude précise du phénomène.
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