dossier de presse_pantani_2012 (1)

Transcription

dossier de presse_pantani_2012 (1)
14 février 2004: le corps de Marco Pantani est retrouvé sans vie dans une résidence à Rimini. Il avait
tout juste fêté ses 34 ans.
Après les succès au Giro d’Italie et au Tour de France, les accusations de dopage à Madonna di
Campiglio (démenties par la suite) l’ont amené à un effondrement psychologique lent et inexorable…
jusqu’à la mort. Entre le champion adulé, l’icône qui a rendu ses lettres de noblesses au cyclisme, et
le cadavre de Rimini, étendu sur un tas de cocaïne, vêtu comme un clochard, il y a toute la
complexité d’une époque à la fois sublime et cruelle, qui agit sans pudeur. Sans honte.
C’est donc une plongée dans les entrailles de la société de consommation et des médias de masse
que Marco Martinelli offre au public. Son texte dessine autour de la soif de justice de la famille
Pantani une fresque qui représente l’Italie des trente dernières années, l’énigme d’une société
malade de délire télévisé et médiatique.
L’écriture de Marco Martinelli plonge dans les entrailles de nos jours et de la société de
consommation et des médias de masse, qui exigent sacrifices et boucs émissaires. Autours des
figures de Tonina et Paolo, les parents de Pantani, qui clament toujours que justice soit faite pour la
mémoire salie de leur fils, Martinelli va mettre en scène une veillée funèbre et onirique, avec une
foule de personnages, qui, comme un rite ancien, retrace les exploits lumineux du héros. Les parents
de Marco, figures archétypales d’une Romagne anarchique et charnelle, sont en suspens comme
Antigone de Sophocle devant le cadavre sans sépulture du bien aimé : ils cherchent la vérité et
n’auront de paix tant qu’ils ne l’auront pas obtenue.
Le texte de Martinelli dessine, autour de cette soif de justice, une fresque qui représente l’Italie des
trente dernières années, l’énigme d’une société malade de délire télévisé et médiatique, se donnant
du mal à créer du néant ses vedettes en plastique et à les détruire jour après jour, mais une société
aussi capable de mettre au pilori ses héros de chair, les vrais, comme Marco Pantani de Cesenatico,
le grimpeur qui venait de la mer.
Entretien avec Marco Martinelli
Dans ta dernière création Detto Molière tu t’attaquais à un mythe de la littérature,
dans Pantani à un mythe du sport. Comment est née cette envie de consacrer un spectacle
à Marco Pantani ? As-tu découvert via ce spectacle un nouveau Pantani ?
Il n’y a pas tant de différence que ça entre l’art et le sport! Les pères du théâtre l’ont toujours su :
Artaud décrivait l’acteur comme « un athlète affectif », Brecht réclamait « davantage de sport sur
scène », Meyerhold et la biomécanique de l’acteur, se rapprochait des talents physiques de la
commedia dell’arte, Pasolini et Camus considéraient que le football était la forme la plus aboutie de
« représentation sacrée ». L’art et le sport sont tous deux liés au mythe, à notre quête éternelle de
héros et d’histoires extraordinaires. Le sport et le théâtre, tous deux de manière extrême, ont à voir
avec l’enfance éternelle qui sommeille en chacun de nous. Au fond, nous avions déjà expérimenté
cette idée dans Detto Molière via le catch, à travers les yeux d’un enfant. Cette fois-ci, j’ai trouvé en
Marco Pantani un exemple de rebelle, un jeune homme d’origine modeste qui gravit des sommets et
devient un champion à l’échelle internationale, pour ensuite être victime d’un lynchage médiatique
d’une extrême violence, une « condamnation de la mémoire » que notre Pantani essaie de renverser.
Marco Pantani a été le bouc émissaire d’un système qui, pour se donner bonne conscience, doit
s’acharner sur une seule et même victime, alors que cette dernière est justement l’incarnation de ce
système.
Comment as-tu construit ton processus de création (investigation, recherches, traductions
plateau, incarnation des acteurs…). Pourquoi avoir gardé cette forme presque
journalistique ?
Pendant deux ans, j’ai lu des tas de choses sur Pantani. Pendant deux ans, j’ai rencontré énormément
de témoins ; leur regard et le ton de leur voix m’ont fait comprendre que ce « Marco » là n’était pas
celui qui était décrit dans les livres. Puis je me suis enfermé chez moi un mois durant et j’ai écrit le
texte. J’ai ensuite travaillé pendant trois mois sur scène avec l’équipe, accompagné d’Ermana qui
m’assistait à la mise en scène. Mais le caractère journalistique n’est qu’une facette du travail que je
me plais à définir comme « transgenre », dans le sens où il se situe entre la tragédie (qui gravite
autour des parents forts comme des rocs, la mère pouvant être perçue comme une Ecube
populaire…) et le roman, le journalisme d’investigation, et la poésie. Pantani ne peut pas être défini
par un seul et unique style, c’est un ensemble de styles et de personnages, de présent et de passé,
divisé en 34 chapitres, 34 comme l’âge qu’avait Pantani lorsqu’il est mort.
Dans Pantani, tu abordes la manière dont les médias peuvent mettre sur un piédestal ou
clouer au pilori une personnalité. Maintenant que la création a eu lieu, comment éclairestu ce sujet ? Quel rôle les médias ont-ils véritablement joué dans la vie et chute de
Pantani ? Et quelle métaphore plus globale de la société en tires-tu ?
Nous ne pouvions dissocier le sport de la société : le sport est le miroir de la société, dans ses bons
et ses mauvais côtés, dont nous sommes la chair et le sang. Le sport n’est pas un coin de paradis où
l’important est de participer ; c’est un monde féroce où seule la victoire compte, où seul l’argent
compte. Et dans ce monde, les médias jouent aussi un rôle crucial. Je dis cela en tant qu’italien, en
ayant conscience d’avoir vécu, ces vingt dernières années, dans une sorte de dictature télévisuelle
(et je ne suis même pas sûr qu’elle soit terminée…). Finalement, Pantani ne se contente pas de
raconter l’histoire emblématique de cet homme, c’est aussi un moyen de montrer à quel point sa vie
et sa mort reflètent les mauvais côtés de nos républiques médiatiques. En italien, le titre Pantani fait
référence à deux choses, impossibles à traduire dans d’autres langues : pour vous, Pantani est le nom
de famille de Marco. Pour nous, le mot pantano signifie boue, marécage. Et si nous continuons à faire
un certain genre de théâtre, qui s’efforce d’associer l’âme et le cœur, c’est justement parce que
nous ne voulons pas nous engluer dans cette boue.
Pour cette création, tu entames une toute nouvelle collaboration avec le collectif italien
Orthographe connu pour ses effets visuels et décors virtuels. De quel espace scénique
rêvez-vous pour Pantani ?
J’ai écrit un texte que je pourrais décrire comme “transgenre”: hors-genre ou à cheval sur plusieurs
genres. Entre roman et théâtre, entre journalisme d’investigation et poésie. Lyrique, choral et
filmique. Les Orthographe sont des maîtres dans l’entrelacement du cinéma et de la scène. Ermanna
et moi leur avons proposé de réaliser une “mise en page” d’un grand roman-photo populaire.
L’espace scénique sera un jardin de la mémoire: au milieu des images, on retrouve les parents de
Pantani et la figure de “L’Inquiet”. Les parents sont des figures populaires et anciennes: Tonina
incarne l’archétype d’une Hécube irréductible, extrême dans sa fureur, une mère ancienne comme
les montagnes; Paolo au contraire est le père silencieux, qui est resté aux côtés de son fils dans
toutes les côtes. L’Inquiet quant à lui est un “suiveur”, un journaliste plein de doutes. C’est moi,
déguisé en “étranger”, qui porte un regard sur l’histoire de notre Nation.
Car Pantani c’est surtout ça: un retour sur les 30 dernières années de l’histoire italienne, à travers les
vicissitudes du dernier mythe du cyclisme. Nous prendrons la vie de Marco Pantani comme un signe
à déchiffrer afin de tenter de nous comprendre nous-mêmes, de comprendre une société qui
fonctionne toujours en lapidant ses boucs émissaires, en l’occurrence à travers le lynchage
médiatique.
Le Teatro delle Albe
Portrait
Depuis plus de trois décennies, le Teatro delle Albe ne cesse de prôner un théâtre d’innovation,
généreux et métissé, résolument ancré dans la société contemporaine. Implantés depuis 1983 au
centre de la ville de Ravenna, au Nord de l’Italie, Marco Martinelli, Ermanna Montanari et leur troupe
réinventent chaque jour un art qui revendique sa place au cœur de la communauté, au centre du
quotidien de la Cité. Ils voient ainsi leur pratique renouer davantage avec ses origines grecques : le
choix d’un théâtre dans lequel les habitants de la polis peuvent effectivement s'identifier, un théâtre
qui leur parle d'eux-mêmes.
Que ce soit dans la relecture (et la réécriture) du répertoire – Aristophane, Goldoni, Shakespeare,
Schwab, Jarry, Molière… - ou avec des textes inédits, l’Albe bouleverse les codes et traditions pour
faire du plateau une véritable mise en vie du texte, imprimant les mots au corps même des acteurs,
abolissant les frontières avec le public. Chaque œuvre est relue et fouillée pour revivre les gestes
fondateurs qui l'inspirèrent, pour ressusciter la fureur créatrice qui l'anima.
De Chicago à Dakar, l’Albe parcourt le monde hors des sentiers battus et tient sa place sur la grande
scène internationale, attendu dans de nombreux Festivals et gratifié de reconnaissances
prestigieuses. Intégrant des artistes et non-artistes de nationalités diverses en fonction des projets, la
troupe se plaît à métisser les langues et les cultures dans bon nombre de ses spectacles, donnant
ainsi à voir l’éclectisme et le foisonnement de nos sociétés.
Marco Martinelli fait du théâtre pour tous un véritable crédo. Depuis 1991, il provoque l’insurrection
douce et permanente à Ravenne avec sa pratique de la « non-école ». Une expérience théâtrale dans
des lycées et des écoles professionnelles de la ville, devenue un véritable lieu de partage et de
dialogue entre les jeunes, la société civile et le théâtre. Une expérience qui réunit chaque année
environ 400 adolescents, et qui est devenu un observatoire privilégié pour de nombreux spécialistes.
Les routes du Teatro delle Albe le mènent régulièrement à Mons ; une franche amitié lie Marco
Matinelli au Manège depuis presque dix ans : après l’accueil de l’inoubliable I Polacchi d’après Alfred
Jarry en 2003 et de L’Isola di Alcina de Nevio Spadoni et Luigi Ceccarelli en 2004, Mons a vu naître
deux créations inédites : La Mano de profundis rock en 2005 et Detto Molière en 2010. Le rendezvous avec Pantani en décembre 2012 sera notre prochain jalon vers Mons 2015, capitale européenne
de la culture.
Donnez-moi un théâtre qui soit un mystère : comme pour les anciens, un mélange d'obscurité et de
connaissance.
Donnez-moi un théâtre qui ait la force de l'orgie sacrée, dans lequel je puisse jouir jusqu'au bout,
jusqu'à l'extrême, de l'étreinte du spectateur.
Donnez-moi un théâtre qui m'accompagne dans la nuit, comme les histoires que les anciens du village
racontaient à mes camarades africains, un théâtre pour les petits de l'homme, à côté du feu.
Donnez-moi un théâtre qui puisse m'éveiller tous les jours, qui m'initie chaque jour au jour et à sa
fatigue.
Donnez-moi un théâtre qui soit nourriture, que je puisse sentir sous les dents.
Donnez-moi un théâtre qui m'enfonce dans les rêves et qui se prolonge dans l'esprit comme certains
rêves,
Donnez-moi un théâtre qui me réveille des cauchemars.
Donnez-moi un théâtre pour tous ces damnés qui, comme moi, ne savent pas ce que c'est qu'un
village, ni les "racines" et le "peuple", pour ceux qui ne connaissent que les appartements et ses
horizons limités, qui partagent leur espace entre le frigo, la machine à laver et la télé, au lieu d'une
société faite de présences divines, d'animaux et de plantes.
Donnez-moi un théâtre à cultiver avec patience, tous les jours, un théâtre qui respire ensemble avec la
ville, ses générations, un théâtre de vieux et de jeunes gens, de cheveux blancs et de premiers émois
sensuels, un théâtre de subversifs et de bâtisseurs, un théâtre où il soit impossible de distinguer les
uns des autres, un théâtre où les pères ne dévorent pas leurs fils, ni les fils ne poignardent leurs pères,
un théâtre si exubérant d'histoires qu’il se pose en dehors de l'Histoire et de ses outrages.
Donnez-moi un théâtre où l'on ne jette pas de la merde et du mépris sur la voix des poètes, sur ceux
qui ne comptent pas, donnez-moi un théâtre qui soit haut et bas, philosophie et rigolades, tradition et
offense, féminin et masculin, blanc et noir et jeune et rouge et même des nuances d'azur.
Donnez-moi un théâtre où, par magie, le temps ne compte pas, où tous les quadrants de toutes les
montres sautent en l'air.
Marco Martinelli
Biographie
Dramaturge et metteur en scène, Marco Martinelli est une des figures actuelles les plus
importantes de la scène italienne. Fondateur du Teatro Delle Albe en 1983, il est directeur
artistique de Ravenna Teatro, « Teatro Stabile di Innovazione » depuis 1991. Dès le début de
son activité théâtrale, il a reçu de nombreux prix tant pour son travail artistique que de
direction : le Prix Ubu (prix théâtral italien équivalent aux « Molière » français) qui lui a été
remis 3 fois : en 1996 pour « l’engagement et la recherche linguistique » ; en 1997 pour « la
meilleur dramaturgie italienne » et en 2007 pour « la meilleure mise en scène » ; le Golden
Laurel 2003) du Festival International Mess de Sarajevo pour la mise en scène du spectacle I
Polacchi ; le Prix des Journées Théâtrales de Carthage de Tunis (2009) pour l’ensemble de sa
carrière, pour « l’impact fondamental de son travail théâtral sur le milieu international des
arts de la scène ». Il créé cette saison Pantani, biopic du champion cycliste et chronique de la
société italienne de ces trente dernières années.
En 1991, Marco Martinelli créé la non-scuola (non-école) du Teatro Delle Albe, une
expérience de théâtre dans les lycées et les écoles techniques de la ville de Ravenne, qui
implique environ 400 adolescents par an, et qui est devenu, au cours des années, un projet
étudié et suivi par des spécialistes et des professionnels du théâtre du monde entier.
Distribution
conception générale Marco Martinelli et Ermanna Montanari mise en scène Marco Martinelli avec
Alessandro Argnani, Francesco Catacchio, Luigi Dadina, Fagio, Roberto Magnani, Michela Marangoni,
Ermanna Montanari, Francesco Mormino, Laura Redaelli
itinéraires en Romagne Luigi Dadina
accordéon, composition musicale Simone Zanchini
chants romagnols Michela Marangoni, Laura Redaelli
concéption espace scénique Alessandro Panzavolta-Orthographe
conception et réalisation des éléments du décor Fabio Ceroni, Enrico Isola, Danilo Maniscalco,
Ermanna Montanari
montage et élaboration vidéo Alessandro et Francesco Tedde – Black Box Film
costumes Teatro delle Albe
réalisation costumes Laura Graziani Alta Moda, A.N.G.E.L.O., Les Jolies Sposi
direction technique Enrico Isola
régisseur lumières et vidéo Francesco Catacchio
régisseur son Fagio
diapositives Olycom/Publifoto, Olycom/Daniele Venturelli, Olycom/Arnaldo Magnani, Lauro Bordin
Maître de chant Matteo Unich – Direttore Artistico Gruppo Corale “Pratella-Martuzzi”
photos Claire Pasquier
affiche du spectacle Cosetta Gardini, Giuseppe Tolo - Casa Walden
organisation Marcella Nonni, Silvia Pagliano, Francesca Venturi
attachés de presse Rosalba Ruggeri, Matteo Cavezzali
Dates et lieux
Présenté à Ravenna (Italie) au Teatro Delle Albe du 16/11 au 02/12
Création à Mons, au Théâtre le Manège, le 9 décembre 2012 à 16h.
Mons - Théâtre Le Manège – Le 09 décembre (16h), du 11 au 13 décembre à 20h et –
www.lemanege.com
+++
Apéro Création le jeudi 13 décembre à 19H15
Contacts presse
Fleur SIZAIRE
[email protected]
065/37.77.54
0497/439.212