Dossier pédagogique

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Dossier pédagogique
DOSSIER PEDAGOGIQUE
MYSTERE DE NOEL 2010
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION : Présentation du Mystère de Noël 2010
1. Présentation du spectacle 2010 «Il a habité parmi nous»
2. Plan du spectacle
3. Quelques « secrets » de la création 2010… à ne pas dévoiler avant la
représentation !
PREMIERE PARTIE : Sources bibliques et spirituelles du Mystère de Noël 2010
1. Sources bibliques
a. Le Prologue de Jean
b. Les Psaumes
2. Noël chez les mystiques rhénans
a. Introduction
b. Maître Eckhart et la naissance de Dieu dans l’âme
c. L’Hymne de Noël de Tauler
DEUXIEME PARTIE : Sources populaires et littéraires du Mystère de Noël 2010
1. La tradition de Noël en Alsace
a. la tradition de l’arbre de Noël
b. la tradition du pain d’épices
c. les personnages emblématiques de la tradition de Noël en Alsace
d. un conte de Noël
e. des poètes d’Alsace disent Noël
2. La cathédrale de Strasbourg dans la littérature
3. Le cycle de Noël : activités pédagogiques
TROISIEME PARTIE : Sources théâtrales du Mystère de Noël
4. Les mystères, un genre théâtral du Moyen-Âge
5. L’aventure du « Mystère de Noël » en la cathédrale de Strasbourg
BIBLIOGRAPHIE
2
INTRODUCTION
1. PRESENTATION DU MYSTERE DE NOEL « Il a habité parmi nous »
L’argument du Mystère de Noël 2010
Une aïeule conte les récits des « Noëls en Alsace » à sa petite fille. Héritière des traditions
vivantes de notre région, elle introduit les différents tableaux qui rythment le spectacle. Loin
des légendes et fariboles, Noël vibre alors au cœur d’un sculpteur sur bois, d’un charpentier,
d’un artisan bien de notre région et les ouvre à la Parole et au Verbe grâce à des psaumes du
Premier Testament.
2. SUJET DU SPECTACLE « Il a habité parmi nous »
Tableau 1 : La mémoire
Au commencement était le Verbe : le premier tableau évoque l’origine des temps, l’origine du
monde, l’attente du Verbe, la naissance des récits. Et c’est une aïeule qui en transmet la mémoire à
sa petite-fille.
Tableau 2 : Le feu
La nuit est traversée par le jour : c’est ce mystère primordial qui suscite l’espérance de l’homme. Et
quand il apprivoise enfin le feu, il peut affronter la peur et vivre debout. Il invente les rites et les
contes qui célèbrent cette conquête d’une nature d’abord hostile à l’homme.
Tableau 3 : Le village
La lumière se partage de maison en maison. L’homme construit une communauté solidaire où
personne n’est oublié. Car la parole circule entre tous. C’est ainsi que l’enfant peut grandir en paix au
milieu des siens.
Tableau 4 : Saint Nicolas
Sur le chemin de la réalisation de soi, il y a la rencontre d’êtres de bonté qui aident l’homme à se
construire, à faire son unité. C’est la découverte de l’amour et de la bonté qui encourage l’homme à
poursuivre sa quête d’humanité.
Tableau 5 : Hans Trapp
Pour devenir qui il est, l’homme a besoin d’affronter sa nuit intérieure. Au-delà du paraître, il
apprend à faire confiance à la vie et à s’ouvrir à la lumière. C’est en traversant sa peur de l’autre qu’il
peut vivre en plénitude sa vocation d’homme.
Tableau 6 : Les chanteurs de l’étoile
Quand l’homme rencontre l’amour, son cœur se dilate aux dimensions du monde. Au long des jours,
il reste fidèle à sa quête de la lumière en laquelle son être se réalise.
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Tableau 7 : Persévérance
Aux jours d’errance, une voix l’invite à ne pas désespérer, à garder le cap sur l’espérance. Son avenir
est toujours à inventer. L’homme s’exerce alors à la constance et à la patience, vertu divine.
Tableau 8 : Couronne de l’Avent
Le rite de lumière rassemble la communauté et l’invite à attendre la vraie lumière qui va vaincre
toutes les nuits du monde. A chaque Noël, l’Enfant de Lumière nous rappelle la présence et l’amour
inconditionnel de Dieu pour l’homme. En Lui, toutes les promesses sont accomplies.
3. QUELQUES SECRETS DE LA CREATION 2010 … à ne pas dévoiler avant la
représentation !
- les jeux de lumière : en couleurs chaudes, le monde de la réalité ; en couleurs froides, le
monde des mythes et légendes.
- le dialogue entre Dinah Faust et Roland Engel rythme le spectacle et évoque les traditions
d’Alsace, interroge la façon de vivre Noël aujourd’hui.
- un paysage se développe sur le plateau : toute l’Alsace entre dans la cathédrale.
- la création d’un village alsacien est l’une des composantes essentielles du décor 2010; la
scène finale présente le village en entier avec ses deux églises catholique et protestante.
4. L’association MYSTERES DES CATHEDRALES remercie pour la création du
Mystère de Noël 2010 « Il a habité parmi nous »
Programme d’une veillée de Noël
organisée à Périgueux par les réfugiés
Alsaciens en 1939.
98 AL 289 - Archives Départementales du
Bas-Rhin.
Texte : Michel Jermann - Robert Riber
Mise en scène : Michel Jermann
Direction d’acteurs : Martine Jacquemin
Direction chorégraphique : Stéphanie Hénot
Création musicale : Roland Engel
Création affiche : Bruno Boulala
Création décors : Yves Christmann, Claude Helmlinger,
Gérard Schultz, François Wimmer, CFA Eschau
Costumes : Pascale Berthelot
Régie plateau : Christophe Merkel,
Dima Hajjara, David Schoch, François Wimmer
Régie son et lumière : Alpha Sono
Accueil du public : Myriam Ricotier, Elisabeth Pernot,
les élèves de l’aumônerie du Lycée Alexandre Dumas
Dossier pédagogique : M. Jacquemin, M. Jermann, M. Odeau
Création site : Dima Hajjara
Responsables ressources : Geneviève Diss, Matthieu Diss
Coordination générale : Martine Jacquemin, Myriam Odeau
Un merci tout particulier à Dinah FAUST et Roland ENGEL pour leur amitié et
leur engagement généreux dans l’aventure 2010 !
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PREMIERE PARTIE
Sources bibliques et spirituelles du Mystère de Noël 2010
« Il a habité parmi nous »
1. SOURCES BIBLIQUES
Le Prologue de Jean
1
Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu.
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Il était au commencement tourné vers Dieu.
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Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut sans lui.
4
En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes,
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et la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point comprise.
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Il y eut un homme, envoyé de Dieu : son nom était Jean.
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Il vint en témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui.
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Il n’était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la lumière.
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Le Verbe était la vraie lumière qui, en venant dans le monde, illumine tout homme.
10 Il était dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l’a pas reconnu.
11 Il est venu dans son propre bien et les siens ne l’ont pas accueilli.
12 Mais à ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, il a donné le pouvoir de devenir
enfants de Dieu.
13 Ceux-là ne sont pas nés du sang, ni d’un vouloir de chair, ni d’un vouloir d’homme, mais de Dieu.
14 Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire, cette gloire que,
Fils unique plein de grâce et de vérité, il tient du Père.
15 Jean lui rend témoignage et proclame : “ Voici celui dont j’ai dit : après moi vient un homme qui
m’a devancé, parce que, avant moi, il était. ”
16 De sa plénitude en effet, tous, nous avons reçu, et grâce sur grâce.
17 Si la Loi fut donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
17 Personne n’a jamais vu Dieu ; Dieu Fils unique, qui est dans le sein du Père, nous l’a dévoilé.
Traduction TOB
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Dieu vient prendre place parmi nous
J'établirai ma demeure au milieu de vous
Levitique 26, 11
Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous
Jean1,14
Que le langage du Christ habite parmi vous avec richesse ;
Instruisez-vous et reprenez-vous les uns les autres avec sagesse,
Par des psaumes, des hymnes, des chants inspirés,
Que la reconnaissance vous fasse chanter à Dieu de tout votre cœur.
Colossiens 3,16
Puis je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre;
Car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n'était plus.
Et je vis descendre du ciel, d'auprès de Dieu,
La ville sainte, la nouvelle Jérusalem,
Préparée comme une épouse qui s'est parée pour son époux.
Et j'entendis du trône une forte voix qui disait:
Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes!
Il habitera avec eux, et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux.
Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus,
et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu.
Apocalypse 21, 1-5
Les Psaumes
Les Psaumes sont un livre de la prière biblique : cent cinquante poèmes composés et chantés pour
près de la moitié par David. Les Psaumes accompagnent la prière et la vie quotidienne des hommes
depuis plus de 2000 ans. Aujourd’hui encore les juifs les chantent à la synagogue, les chrétiens dans
les églises et les monastères.
« Nous naissons avec ce livre aux entrailles.
Un petit livre :
150 poèmes,
150 marches érigées entre la mort et la vie
150 miroirs de nos révoltes et de nos fidélités,
De nos agonies et de nos résurrections.
Davantage qu’un livre,
Un être vivant qui parle
Qui vous parle,
Qui souffre, qui gémit et qui meurt,
Qui ressuscite et qui chante
Au seuil de l’éternité
Et vous emporte,
Vous et les siècles des siècles,
Du commencement à la fin »
André Chouraqui , traducteur de la Bible
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Des psaumes à découvrir, des psaumes à écrire
Choisis une phrase qui te plait, qui te convient et écris un poème dans lequel cette phrase est insérée.
"Je lève les yeux vers les montagnes. C’est de là que vient mon aide.
Mon aide vient du Seigneur, celui qui a fait le ciel et la terre
Psaume 121, 1-2
C'est sûr, bonheur et bonté iront vers moi tous les jours de ma vie, et j'habiterai dans la Maison de
Yahvé tout au long des jours.
Psaume 23,6
Le jour où je T'appelai, Tu m'as répondu, Tu m'as donné du courage en fortifiant mon être
Psaume 138,3
Yahvé protège ceux qui l’ont choisi et rendra à l’orgueilleux tout ce qu’il mérite.
Soyez forts, que vos cœurs soient forts, vous qui attendez Yahvé.
Psaume 31, 24-25
Je suis plus sage que tous mes enseignants car Tes vérités sont le thème de mes réflexions.
Psaume 119,99
Ta parole éclaire mes pas, Ta parole est une lumière pour ma route
Psaume 119, 105
Les justes possèderont la terre, et ils y habiteront pour toujours.
Psaume 37,29
Mon âme a soif du Dieu vivant. Quand le verrai-je face à face ?
Psaume 42,3
L’angoisse de mon cœur augmente, j’étouffe ; fais-moi sortir,
Regarde ma misère et ma peine, arrache moi de mes égarements.
Psaume 25,17-18
Mon âme attend plus sûrement le Seigneur que les veilleurs n’attendent l’Aurore
Psaume 130,6
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A propos du Roi Messie
Tu es beau, le plus beau des enfants des hommes…aussi tu es béni de Dieu à jamais
Psaume 45,3
Le seigneur est mon berger, rien ne pourra me manquer
Psaume 23,1
D’un cœur brisé, broyé, tu n’as pas de mépris.
Psaume 51,19
Mon cœur et ma chair crient de joie vers le Dieu vivant
Psaume 84,3
Je crois et j’ai confiance, même lorsque je suis malheureux
Psaume 116,10
Rends-moi la musique de la joie et de la fête
Ne regarde pas mes crimes, oublie mes fautes
Dieu me fait un cœur pur, un grand souffle neuf en moi
Psaume 51,10
Il y avait ceux qui erraient dans le désert,
Solitude dans le chemin
Ils ne trouvaient pas une ville habitable.
Faim et soif
Tout en eux s’affaiblissait
C’est là qu’ils ont crié vers Yahvé dans leur détresse
il les délivre de cette angoisse
Psaume 107,4-6
Détourne ta face de mes fautes et tout mon mal, efface-le
Psaume 51,11
Si tu retiens les fautes, Seigneur, qui donc subsistera ?
Psaume 130,3
8
Seigneur, vers Toi j’ai crié, et tu m’as guéri
Psaume 30,3
Merveilles que fit pour eux le Seigneur!
Merveilles que fit pour nous le Seigneur,
nous étions dans la joie
Psaume 126,2
Regardez!
Qu'il est bon, qu'il est doux
d'habiter en frères tous ensemble!
Psaume 133,1
Bientôt, il n’y a plus de criminels
Tu as beau chercher, il n’y en a plus
Les humbles posséderont la terre,
Il y a beaucoup de joie sur la terre.
Psaume 37,10-11
Ceux qui sèment dans les larmes, moissonnent dans la joie
Psaume126, 5
Les ténèbres n’ont aucune obscurité pour toi,
la nuit s’illumine comme le jour,
et les ténèbres comme la lumière.
Psaume 139,12
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2. NOEL CHEZ LES MYSTIQUES RHENANS
Introduction de l’ouvrage Noël chez Eckhart et les mystiques rhénans, Essai
sur les origines de la spiritualité de Noël, Marie-Anne Vannier, Arfuyen, 2005
… Eckhart et les mystiques rhénans ont donné une remarquable expression du sens de la
fête de Noël à partir de la naissance de Dieu dans l’âme, qui est une autre manière de parler
avec saint Jean de la filiation divine ou d’affirmer avec saint Irénée que « Dieu s’est fait
homme pour que l’homme participe à la vie de Dieu ». C’est ce remarquable
approfondissement que reprend Marie-Anne Vannier à partir des trois naissances
distinguées par Jean Tauler, sans en oublier les sources chez Origène et les Cisterciens,
l’influence sur Angelus Silesius, Nicolas de Cues… On trouvera également des textes peu
connus comme l’admirable hymne de Noël de Tauler, aujourd’hui encore chantée et donnée
ici en bilingue : « Voici que nous vient un bateau, / Lourd d’un beau chargement. / Des nuées
d’anges l’accompagnent / Et il dresse un grand mât. // Le bateau nous vient glissant, / Le
batelet arrive à terre, / Il a ouvert grand le ciel / Et en apporte le fils » (tr. G. Pfister).
Alors que dans les premiers siècles, l’année religieuse est centrée sur Pâques, la fête de
Noël, commémorant le 25 décembre la Nativité du Christ, est introduite vers 336 comme
début de l’année liturgique et va prendre au Moyen Âge une place de plus en plus
importante. Le premier témoignage que nous ayons de la fête de Noël date de 354. Mais
c’est principalement avec saint Léon le Grand que la fête de Noël se développe en Occident.
Eckhart et Tauler qui sont avant tout des prédicateurs, s’attachent, comme Léon le Grand
à donner à leurs auditeurs de vivre pleinement le mystère de Noël. Ils s’inscrivent dans le
cadre liturgique qui, à leur époque est plus élaboré, pour aider leurs contemporains à entrer
véritablement dans le mystère de Noël.
Aussi ne s’intéressent-ils pas tant à la commémoration historique de l’Incarnation, à
l’anniversaire de la naissance du Christ à Bethléem, qu’à son sens théologique et spirituel, ce
qui les amène à considérer son origine dans la vie même de la Trinité.
Dans la chrétienté médiévale, où le baptême n’a plus la même importance vitale pour la
survie de l’église que dans les premiers siècles, la fête de Noël est ainsi, pour Eckhart et
Tauler, l’occasion de rappeler le sens même de la vie chrétienne.
Texte © Editions Arfuyen
Nativité, Hortus Deliciarum
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Maître Eckhart et la naissance de Dieu dans l’âme
« Dieu, de toute éternité a engendré
Son Fils. Il l’engendre encore
maintenant et l’engendrera toujours
éternellement. C’est ainsi que le Père
enfante dans chaque âme bonne.
Heureux celui qui doit ainsi enfanter
Dieu dans son âme ! N’oublie donc pas
d’être heureux, très profondément
heureux, toi qui, dans ton âme, dois
enfanter Dieu. Écoute.
Annonciation, Le Caravage, Musée municipal de Nancy
Ce que ton âme offre volontiers à Dieu ici-bas, elle en jouira par Lui
dans la vie éternelle. C’est pour cela que Dieu a créé l’âme : pour y
engendrer son Fils unique. Quand cette naissance eut lieu
spirituellement en Marie, cela fut plus agréable encore à Dieu que
lorsqu’il naquit d’elle corporellement. Et quand cette naissance a lieu
aujourd’hui encore dans une âme bonne et aimante, cela est plus
agréable à Dieu que lorsqu’il créa le ciel et la terre. Écoute encore.
Dieu ne désire dans le monde entier qu'une seule chose, la seule dont
il ait besoin, mais il la désire d'une façon si extraordinairement forte
qu'il lui donne tous ses soins. Voici cette seule chose.
C'est de trouver vide et préparé le noble fond qu'il a mis dans le
noble esprit de l'homme, afin de pouvoir y accomplir son oeuvre
noble et divine. Car Dieu a toute puissance au ciel et sur la terre.
Seulement, une chose lui manque, c'est de ne pas pouvoir accomplir
en l'homme la plus exquise de ses œuvres, sa propre naissance.
Pour accueillir cette naissance, tu dois revenir en notre divine origine,
commune à tous et chacun. Dès lors, il te faut entrer en toi pour
sortir de toi-même. Si tu veux sortir de toi-même, tu dois alors
renoncer à tout vouloir, désir et agir propres. Il ne doit plus rester en
toi qu’une simple et pure recherche de Dieu, pour lui faire place de la
façon la plus élevée et la plus intime avec Lui. Dieu pourra ainsi
accomplir son œuvre, et naître en toi. »
Extrait de Gottesgeburt, Lecture-concert, Le Rhin Mystique, Rémy Vallejo o.p.
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L’hymne de Noël de Tauler
Uns komt ein schif gewaren
Es bringt ein schoenen last.
Darruf vil engelscharen
Und hat ein grossen mast.
Voici que nous vient un bateau
Lourd d’un beau chargement.
Des nuées d’anges l’accompagnent
Et il dresse un grand mât.
Daz schif komt uns geladen
Got vater hatz gesant,
Ez bringt uns grossen staden,
Jesum unsern heilant.
Le bateau nous vient chargé,
Dieu le Père l’a envoyé
Il nous apporte un grand bien,
Jésus notre Sauveur.
Daz schif komt uns geflossen,
Daz schiflein get am lant,
Hat himel ufgeschlossen,
Den sün heruz gesant.
Le bateau nous vient glissant,
Le batelet arrive à terre,
Il a ouvert grand le ciel
Et en apporte le fils.
Marie hat geboren
Uz irem fleisch un bluot
Daz kindlin uz erkoren,
War mensch und waren Got.
Maria a engendré
De sa chair et de son sang
L’enfant élu entre tous,
Vrai homme et vrai Dieu.
Ez ligt in der wigen
Daz liebe kingelin,
Sin geist liubt wie ein spiegel :
Gelobet muost du sin !
Il est couché dans son berceau
L’aimable petit roi,
Son esprit brille comme un miroir :
Loué, loué sois-tu !
Maria Gotes muoter :
Gelobet muost du sin !
Jesus ist unser bruoder,
Daz liebe kindelin.
Marie, Mère de Dieu,
Louée, louée sois-tu !
Jésus est notre frère,
Ah, l’aimable enfançon !
Möcht ich daz kindlin küssen
An sin lieplichen munt:
Und waer ich krank für gewisse,
ich würd davon gensunt !
Puissé-je l’embrasser
Sur sa mignonne bouche
Serais-je bien malade
Que j’en serais guéri.
Maria, Gotes Muoter,
Din lob ist also breit !
Jesus ist unser bruoder,
Gibt dir gross wüdigkeit.
Marie Mère de Dieu,
De toutes parts louée !
Jésus est notre frère,
Par lui sois glorifiée !
Trad. Gérard Pfister
Extrait de Noël chez Eckhart et les mystiques rhénans, Marie-Anne Vannier, Arfuyen, 2005, p. 59-63
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DEUXIEME PARTIE
Sources populaires et littéraires du Mystère de Noël
« Il a habité parmi nous »
1. LA TRADITION DE NOEL EN ALSACE
La tradition de l’arbre de Noël
« Le sapin de Noël surgissait droit devant nous.
Rutilant du feu de cent lumières, il nous envoyait
l’éclat de ses fruits d’or, de ses boules de verre
couleur pourpre brillamment illuminées de
l’intérieur, de ses branches d’un vert sombre
courues de cheveux d’anges, qui sentaient bon la
cire fondante et la résine fraîche mordue par la
flamme. Au pied de l’arbre incandescent
s’entassait une montagne de cadeaux enveloppés
de papier de soie et ornés de rubans aux nœuds
immenses. Le sapin vosgien, levant ses sept bras
d’archange, emplissait de ses ramures aux longues
aiguilles d’émeraude la moitié de la chambrette,
qui paraissait incendiée par cette splendeur
d’outre-monde. Le ciel étoilé lui-même était
descendu ce soir sur la terre hivernale. Il scintillait
de toute sa force, dans l’embrasement de l’arbre
des montagnes au visage transfiguré de séraphin !
Jamais je n’avais vu surgir devant mes yeux un
être créé d’une telle beauté. »
Christkindel et Hans Trapp, Gouache sur papier 1902, Paul Kauffmann (vers 1849-1939), Strasbourg, MAMCS - Cabinet d’arts graphiques
Claude Vigée évoque avec émotion ses souvenirs de la veillée de Noël en Alsace quand, petit
garçon juif, il était invité à partager la fête chez ses voisins catholiques de Bischwiller.
Un récit évocateur et enchanteur, dans une langue magnifique.
Claude Vigée, Le buisson ardent, 1970, Mon heure sur la terre, Galaade Editions, pp. 808 – 820, 2008
Bref historique
Dès l’Antiquité, les romains ornaient le 1er janvier leurs maisons de branches de conifères en
l’honneur du dieu Janus. C’était un acte magique aidant à capter la longévité de la plante.
Cette coutume s’est perpétuée dans les maisons des particuliers jusqu’à la Renaissance
puisque Sébastien Brant la cite dans ses écrits en 1494. En revanche, les corporations ont
dressé dans leurs salles de réunions des sapins décorés dès la fin du XVème siècle.
13
Le sapin de Noël est un arbre décoré. Et c’est précisément cette décoration qui lui donne une
dimension explicitement chrétienne. Pour en retrouver l’origine, il faut remonter aux
« mystères » du Moyen-Age. Sur le parvis des églises alsaciennes, le 24 décembre, on voyait
représentée l’histoire d’Adam et Eve chassés du Paradis , avec bien entendu l’arbre « du bien
et du mal », souvent un sapin auquel on accrochait une ou plusieurs pommes.
Peu à peu, la
les pays rhénans
du Paradis » dans
suspendre
des
pommes. Ainsi, le
symbole
du
celui du Salut
On y ajouta par la
pour
rappeler
bougies
pour
désormais
« la
coutume s’installa dans
de dresser cet « arbre
les
maisons,
d’y
hosties à côté des
sapin portait à la fois le
« péché originel » et
apporté par le Christ.
suite des roses de papier
l’arbre de Jessé, des
manifester
que
lumière brille dans les
La fête de Noël dans une famille d’artisans, vers 1840
ténèbres » (Jean 1,5), puis des noix, symbole de la fécondité, des objets en paille, espoir des
futures récoltes, des jouets …
Quelques dates
•
Dès 1521, il fallut prendre des dispositions pour limiter l’abattage illicite des sapins
aux approches de Noël dans les forêts alsaciennes.
•
Un auteur anonyme décrit en 1605 un sapin richement décoré aperçu à Strasbourg,
mais c’est seulement au XVIIème siècle que l’on mentionne les bougies.
•
Le premier arbre de Noël sera dressé à Paris en 1840, dans le jardin des Tuileries,
grâce à la duchesse d’Orléans, originaire d’Allemagne.
•
C’est seulement après 1870 qu’il se popularisera peu à peu en France, et c’est
également au XIXème siècle qu’il se répandra en Angleterre et en Amérique.
D’après Annales d’Issoudun, Décembre 2009
La tradition du pain d’épices
En alsacien, on les appelle « Lebküeche ». Ce mot vient sans doute de l'ancien allemand « lebbe » qui
signifie doux, sucré.
Déjà les Grecs, les Romains et les peuplades germaniques faisaient
des gâteaux au miel. Ceux des Germains revêtaient la forme d'un
disque qui symbolisait le soleil. Dans nos contrées, on les épiçait à
l'origine avec de l'anis. Après les croisades, l'Europe découvrit les
épices de l'Orient qui vinrent, à partir de Venise jusqu'à Nuremberg,
considérée, au XVe siècle, comme la capitale des pains d'épices. A
cette époque, la ville allemande possédait déjà une corporation de
14
« Lebküchler » (confectionneurs de pains d'épices). Mais d'autres villes avaient acquis une solide
réputation dans le domaine : Aix-la-Chapelle, Thor, Offenbach, Ulm, Erlangen, Metz, Verdun et Bâle
dont
la
tradition
se
perpétue
avec
les
célèbres
«
Leckerli
»
A la même époque, il existait aussi des « Lebkuechler » à Strasbourg, qui, d'abord membres de la
corporation des boulangers, furent attachés à celle des pâtissiers lors de la séparation des deux
professions, en 1476. Ce sont donc ces derniers qui, en général, confectionnaient les pains d'épices
dont on connaît même une recette : du miel, de la cannelle, quelques noix, des clous de girofle,
autant de gingembre et beaucoup de farine. On leur avait, à cette époque, déjà, confié la délicate
mission de réjouir les grands et les petits, à partir de la Saint-Nicolas jusqu'à la fête des Rois-Mages.
C'est dans cet ordre d'idées qu'on les trouve dès 1453, à Noël, sur la table des moines cisterciens de
Marienthal … Leur importance fut telle que Geiler de Kaysersberg crut devoir en faire le titre d'un
sermon. Il les y compara à Jésus-Christ, avec lequel il leur trouva vingt et un points communs. Ils
laissèrent d'ailleurs des traces parmi les noms de famille. On considère, en effet, que « Letzelter » est
dérivé de « Lebzelter », soit « Lebkuechler ».
Au XVIIe siècle, ils formaient même un élément important de la cuisine. On les durcissait au four,
pour ensuite les écraser en vue de les utiliser, notamment pour faire des gelées de fruits On cite, en
général, deux sortes de formes de pains d'épices : les langues et les coeurs. On peut y ajouter les
petits fours et les « Rübeltzle » (Pères-Noël) ou « Niklausle » (Saints-Nicolas). Les premières, glacées
de sucre blanc sur le dessus, minces ou épaisses, dures ou molles, s'offrent, par petits paquets, à
Noël et au Nouvel An, alors qu'on trouve les autres de la Saint-Nicolas jusqu'à Noël, à l'exception des
coeurs qui, géants ou moyens, apparaissent à l'occasion des « Messti » ...
François Voegling, Pain d’épices, La gastronomie alsacienne, DNA, 1978
Le marché de Noël
Christkindelmärik, Gouache sur papier 1902, Paul Kauffmann (vers 1849-1939), Strasbourg, MAMCS - Cabinet d’arts graphiques
Longtemps les cadeaux ont été distribués le jour de la Saint-Nicolas. Pour se procurer les objets et les
friandises nécessaires, les parents se rendaient au « Nikolausmarkt », marché de la Saint-Nicolas, qui
battait son plein à ce moment-là. Mais en 1570, un prédicateur protestant du nom de Johannes
Flinner monta en chaire à la cathédrale de Strasbourg et se mit à critiquer sévèrement l’habitude de
remettre les cadeaux aux enfants le jour de la Saint-Nicolas, disant que saint Nicolas est un
« morceau du levain des Pharisiens », qu’il est un élément du papisme et qu’il fallait dire aux enfants
que c’est l’enfant Jésus qui leur faisait des cadeaux et non Saint-Nicolas. Le sermon eut un tel impact
sur les fidèles présents, que lors de la réunion du Conseil des XXI le jour du 4 décembre 1570, la
question fut abordée …
15
Après discussion, le Conseil des XXI décida « que l’on doit supprimer la Saint-Nicolas, et l’interdire,
mais l’on doit autoriser les marchands à tenir leur marché trois jours avant ... »
Ainsi, à partir de décembre 1570, le marché de Saint-Nicolas a été remplacé par celui de l’enfant
Jésus (Christkindlein), la remise des cadeaux s’est progressivement déplacée de la Saint-Nicolas à la
veille de Noël ou au jour même de Noël. Sous l’influence du protestantisme strasbourgeois, luttant
contre les coutumes catholiques, naît une nouvelle tradition.
Extrait de Noël Wihnachta en Alsace ,Gérard Leser, 2006, pp32-33.
Les personnages emblématiques de Noël en Alsace
Saint Nicolas
Le personnage historique de Nicolas est mal connu. Il est né
vers 270 à Patara, une cité de Lycie, au sud-ouest de l'Asie
Mineure et mort entre 345 et 352 dans la ville portuaire de
Myre (Demre, Turquie), en Asie Mineure, dont il était
évêque. Il semble qu’il ait été en bute aux persécutions de
l’empereur Dioclétien. Arrêté et emprisonné, il fut contraint
à vivre un certain temps en exil.
En 313, l'empereur Constantin établit la liberté religieuse et
Nicolas revient à Myre pour y exercer son autorité. Il
participa sans doute, en tant qu’évêque, au 1er Concile
Œcuménique de Nicée en 325 (mais son nom n’est pas
mentionné dans l'ancienne liste des évêques).
Saint Nicolas de Myre
Fresque de l'Abbaye Notre-Dame du Bec (France)
Après sa mort, le culte de Nicolas s’étendit très rapidement. C’est l’une de ces figures de saint que la
tradition populaire a chargée de nombreux faits et légendes, ce qui en fit, au fil du temps, un des
saints la plus populaires de la chrétienté. Chaque
épisode de sa vie a donné lieu à un patronage ou une
confrérie d'un métier ou d'une région. C'est aussi l'un
des saints le plus souvent représenté dans
l'iconographie religieuse : sur les vitraux des églises,
dans les tableaux, en statue, sur les taques de cheminée,
les images d'Epinal sur pain d’épice …
On dit que le jour de sa naissance, il se tint debout dans
le bain… Devenu grand, il évitait les divertissements et
préférait fréquenter les églises…
Collégiale Saint-Martin, Colmar, tympan de Saint-Nicolas, 1270
Il aurait ressuscité 3 enfants qu´un aubergiste avait assassiné et caché dans son saloir…
Mais l’épisode « légendaire » le plus important attaché à la vie du personnage est celui des trois
jeunes filles : un père, noble appauvri et endetté, vivait autrefois à Patara avec ses trois filles ; pour
améliorer la situation familiale, il était sur le point de prostituer ses filles ou de les vendre comme
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esclaves, lorsque Nicolas eut vent de l’affaire. Trois nuits de suite, il alla jeter par la fenêtre de la
chambre à coucher de l’or et de l'argent, avec lequel le père put non seulement rembourser ses
dettes, mais encore doter ses trois filles afin de les marier correctement et de leur trouver une bonne
situation. Certaines versions de cette histoire racontent que saint Nicolas aurait jeté les pièces d'or
par la cheminée...
Rapidement, son culte s´étend en Orient et il devint le saint patron de la Russie. Au début du VIè
siècle, l'empereur Justinien construit une église en son honneur à Constantinople. Les légendes
traditionnelles à son sujet furent pour la première fois recueillies et écrites en Grèce par
Metaphrastes au Xème siècle. Lorsqu’en 1087 les Sarrasins s’emparent de Myre, des marins italiens
emportent ses ossements à Bari (d’ou le nom de saint Nicolas de Bari dans certaines régions…) En
Allemagne, son culte s’étend à partir du règne déjà sous Otto II, probablement à cause de son
épouse, la grecque Théophane. Au fil des siècles la légende disparaît peu à peu, à l'exception d'un
épisode conté par Saint Bonaventure au XIIIe siècle. Celle des enfants enlevés, tués, mis au saloir et
sauvés par le saint Nicolas qui leur rendit la vie. C'est la légende la plus marquante sur Saint Nicolas.
La légende des trois petits enfants
La légende de Saint Nicolas raconte que le saint ait ressuscité trois petits enfants qui étaient venus
demander l’hospitalité à un boucher. Celui-ci les accueillit et profita de leur sommeil pour les
découper en morceaux et les mettre au saloir. Sept ans plus tard, Saint Nicolas passant par là
demande au boucher de lui servir ce petit salé vieux de sept ans. Terrorisé, le boucher pris la fuite, et
Saint Nicolas fit revenir les enfants à la vie.
Cet épisode est aujourd’hui le plus célèbre concernant le personnage de Nicolas de Myre, et est à
l’origine de la célèbre chanson qu’autrefois l’on apprenait dans toutes les maternelles.
L’arrivée de Saint Nicolas, Gouache sur papier 1902, Paul Kauffmann (vers 1849-1939), Strasbourg, Cabinet des Estampes et des Dessins
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Saint Nicolas en Alsace Lorraine
En Allemagne, en Suisse et dans l'est de la France surtout en Lorraine et en
Alsace, c'est Saint Nicolas, patron des enfants, qui apporte les présents. Dans
ces régions la date du 6 décembre, fête de la Saint Nicolas, revêtait jadis
autant d'importance, si ce n'est pas plus que Noël, le 25 décembre
(particulièrement en Suisse).
Saint Nicolas faisait le tour des villes, visitait les écoles maternelles, distribue
des friandises aux enfants (du pain d'épices, des oranges et de mandarines) et
se voit remettre les clés de la ville par le maire. Chars, défilés prestigieux, feux
d'artifices accompagnaient souvent le cortège du saint qui faisait équipe avec
un personnage sinistre, le père Fouettard. Celui-ci, tout vêtu de noir était
chargé de distribuer les coups de trique aux garnements qui n’avaient pas été
sages et d’effrayer les autres pour rendre la figure du saint plus
sympathique….
Saint Nicolas va aussi de maison en maison dans la nuit du 5 au 6 décembre
pour demander aux enfants s'ils ont été obéissants. Les enfants sages reçoivent des cadeaux, des
friandises et les méchants reçoivent une trique donnée par le Père Fouettard.
Hans Trapp
Hans Trapp serait une figure faisant référence à un personnage historique : il Le seigneur
Hans von Trotha a vécu au XVè et habitait un château près de Wissembourg, dans le
Palatinat : le château de Berwartstein. Il avait aux yeux des Wissembourgeois une réputation
exécrable, car la ville lui disputait la propriété du château : l’abbaye de Wissembourg avait
en effet acquis la forteresse, mais suite à divers conflits l’avait perdu, tout en en restant le
propriétaire légal. En 1480 L'électeur palatin Philipp I Le Franc,
prêta Berwartstein au chevalier thuringien Hans von Trotta et le
lui vendit cinq ans après, malgré les protestations de
Wissembourg. Von Trotta était entre-temps devenu maréchal du
Palatinat. Von Trotta fit du château une véritable forteresse
adaptée à l’artillerie, entendant bien le garder. Malgré tous leurs
efforts, les abbés de Wissembourg n'arrivèrent pas à récupérer
Berwartstein. La position de Hans von Trotha dans l’échiquier
politique de ces années là fut tellement protégée, que même un
anathème du pape et les tentatives de conciliation de l'empereur
Maximilien restèrent sans succès. Il fallut attendre la mort du
maréchal en 1503 pour obliger ses successeurs de rendre aux
abbés quelques villages, domaines et droits, mais le château de
Dans un village d’Alsace... 1953
Berwartstein resta la propriété des von Trotha.
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En tout cas, la réputation de von Trotta auprès
des Wissembourgeois fut exécrable de son vivant,
et empira après sa mort… On raconte qu’il aurait
assiégé la ville de Wissembourg et construit un
barrage sur la Lauter afin de priver d'eau la ville, le
monastère et ses habitants. Puis, après plusieurs
semaines, le barrage étant rempli, il aurait lâché
l’eau pour inonder la cité… Pendant de longues
années il aurait fait régner la terreur dans la
région…
Ainsi la figure historique de Hans von Trotha est devenu le Hans Trapp qui la veille de Noël
emporte les méchants enfants dans son sac. Jadis, il venait dans les maisons et faisait réciter
une poésie ou une prière, et si les enfants ne le savaient pas, il les fouettait …
Christkindel
L’origine de la tradition du « Christkindel », l’« l’EnfantChrist » est à rechercher dans la Réforme protestante. À la
fin du XVIe siècle, la Réforme veut remplacer Saint Nicolas,
dont elle trouve la célébration trop païenne, par le
Christkindel, personnage qui doit rappeler le don de Dieu
fait aux hommes. La tradition évolue au fil des siècles et
fait oublier ce pieux changement.
C’est sans doute la figure la plus énigmatique de tous les
personnages qui peuplent la période de Noël. Très attendu
dans les maisonnées alsaciennes il y a encore à peine 50
ans, il est aujourd'hui inconnu de la plupart des enfants.
Cette figure est-elle la survivance d’une figure féminine qui
incarne la fertilité et annonce le nouveau cycle de la nature, ou s’agit-il de Sainte Lucie,
toujours majestueusement fêtée dans les pays scandinaves ?
À partir du XIXe siècle, le Christkindel est représenté sous les traits d’une jeune fille voilée,
tout de blanc vêtue, parée d’une couronne dorée faite
de branches de sapin et ornée de 4 bougies et tenant en
main un bâton avec une étoile. Elle venait
s’approvisionner en présents (des « bredele » et des
mandarines) à l’intention des enfants sages. À ses côtés,
le redoutable Hans Trapp continue à jouer le rôle du
Père Fouettard.
La veille de Noël en Alsace
M.T. Schuler, Gravure extraite du «Journal illustré », 1875.
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Un conte de Noël : Les deux sapins de Sainte-Aurélie à Strasbourg
Le soir de Noël, l’enfant pauvre allait de porte en porte, il frappait et disait :
- Voulez-vous mes deux petits sapins ? … Vous y attacherez des boules d’or et des étoiles de papier …
c’est bien amusant pour les enfants …
Mais à chaque maison, les gens lui répondaient :
- Il est trop tard, petit. Il y a longtemps que les arbres de Noël sont achetés ! … Passe l’an prochain !
Et l’enfant se désespérait, car il n’y avait pas de pain chez lui. Son père était très vieux, sa mère
malade, et les deux autres enfants au berceau. Il savait que lui seul pouvait gagner quelque argent
afin de nourrir les siens, et malgré la grande froidure, il errait dans les rues, toujours en quête d’une
maison où l’on voudrait lui acheter ses sapins qu’il avait cueillis à l’orée du bois, à la nuit tombante, à
l’heure où l’on entend la plainte lugubre des loups affamés.
Après bien des demandes et bien des réponses indifférentes ou dures, il se trouva devant la maison
d’Eidel, le jardinier. A-t-on jamais eu l’idée de vendre des sapins à l’homme dont c’est le métier de
les faire pousser ? Le pauvre innocent frappa et la grosse voix d’Eidel lui répondit :
- Qui frappe à pareille heure ? L’enfant n’osa répondre.
- Mais qui frappe chez moi quand je veux être en paix ? reprit Eidel et ses sabots claquèrent sur le
plancher. Il ouvrit sa grande porte, et l’humble quémandeur aperçut un arbre magnifique, tout
rutilant, tout chargé de richesses et qui jeta sa vive lueur jusque dans la rue déserte. Et trois enfants
assis près d’un bon feu regardaient au foyer la dinde de Noël qui cuisait dans son jus.
- Qu’est-ce que tu veux, petit ? demanda Eidel, tu as l’air d’un béjaune avec tes deux sapins
rabougris !
L’enfant se tenait tout triste, sans rien dire, parce qu’il comprenait que sa dernière espérance s’était
envolée.
- Le froid entre chez moi, reprit le jardinier. Parle vite ou je te ferme la porte au nez !
C’était un homme qui avait le ton bourru.
Autant dire qu’il était bon. Il regarda le déshérité qui avait l’âge de ses enfants, et qui, pieds nus dans
la neige, n’osait même pas lever les yeux. Il songea qu’une fois sa mort venue, peut-être les siens
viendraient-ils, les soirs de neige, mendier chez les autres. Il parla d’une voix radoucie.
- Que veux-tu ? Je te donnerai suivant mon possible …
- Vendre mes deux sapins pour Noël … mais le vôtre est bien plus beau.
- N’importe ! dit Eidel. Donne-les-moi !
Et il alla quérir une pièce d’or qu’il gardait en réserve dans un tiroir. Ce que voyant, le pauvre petit ne
pouvait en croire ses yeux, et pensait que l’homme se moquait de lui.
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Mais les enfants lui donnèrent chacun une cuisse de la dinde, et la mère, dans un bol, une part de
bonne soupe chaude, et le chien aussi fut aimable pour lui et lécha bonnement ses mains rougies par
le froid. Alors il osa croire à sa joie, il remercia du mieux qu’il pût et rentra chez lui, heureux comme
une alouette au printemps. (Le chien l’accompagna jusqu’à la porte par criante de mauvaises
rencontres). Cependant Eidel, qui n’aimait pas les attendrissements, jeta dans un coin les deux sapins
du pauvre, et se mit à table. Le repas fut bon, la dinde bien cuite, le vin bien frais, puis chacun s’en
fut se coucher.
Le lendemain matin, jour de Noël, Madame Eidel balaya soigneusement sa maison, car les jours de
fête sont des jours où l’on combat le désordre et elle poussa les deux sapins dans la rue. Ses enfants
qui se battaient dans la neige, en attendant l’heure de la messe, prirent les deux arbustes et par jeu,
pour imiter leur père, s’en furent les planter derrière l’église. Et les cloches sonnèrent. La foule prit
place dans la nef et les bas-côtés. Eidel, au banc d’œuvre, avec sa belle redingote priait Dieu pour sa
famille. Les chants célébraient la gloire du Sauveur des hommes et le jardinier se disait qu’on n’est
jamais trop bon pour les enfants pauvres, puisqu’ils sont les frères véritables de celui qui est né dans
une étable parce qu’on voulait de lui nulle part.
Mais quand la messe fut dite, quand les cierges furent éteints, l’encens dissipé, l’église désertée, la
foule sur la place cria au prodige. Deux sapins hauts comme le clocher, aux troncs tout droits comme
des mâts de navires, aux branches vastes et lourdes, s’élevaient au ciel. Et dans l’air pur de noël, les
oiseaux chantaient la gloire des charitables : de ceux qui aiment leur prochain. Et l’on vit la colombe
d’un vitrail s’animer soudain, voler au faîte de chaque sapin, battre des ailes par trois fois et revenir
prendre place au vitrail chrétien ! Ayez la foi, l’espérance et la charité !
Jean Varior, Légendes et traditions orales d’Alsace, tome 3, 1919, pp. 213-217
Des poètes d’Alsace disent Noël
De Nathan Katz (né à Waldighoffen en 1892 et mort à Mulhouse en 1981) à Roland Engel (né
à Bischheim en 1948), les poètes d’Alsace évoquent Noël.
Wiehnächtsnacht
D’Glocke lütte d’Wiehnacht i --Still heer i di geh, Herr Jesis, dusse dur d’Nacht.
Arem, bleich, läufsch dur d’Gasse duss
Mi dim mitlidige Harz.Dur Schnee un Sturm.Millione Mensche lide.
De weisch’s.
Millione gehn unger in Chrieg un Verbäuscht.
De weisch’s.
Hass isch un Eland dur d’ganzi Walt.De weisch’s.Verlosse n irsch, Herr Jesis, dusse dur d’Nacht.-
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Nuit de Noël
Le son des cloches ouvre la nuit de Noël
En silence, je t’entends marcher, Seigneur Jésus, au-dehors, dans la nuit
Pauvre, blême, c’est ainsi que tu vas à travers les petites rues,
Le coeur plein de miséricorde.
A travers la neige et la tempête.
Des millions d’hommes souffrent.
Tu le sais.
Des millions d’hommes périssent par la guerre et
Tu le sais.
La haine et l’envie règnent dans le monde entier.
Tu le sais.
par l’envie.
Abandonné tu erres, Seigneur Jésus, au dehors dans la nuit.
Nathan Katz
Es wurd Wihnachte
Es wurd Wihnachte
S'blost e nejer Wind
Wenn mr d'Angscht vertriebt
Un macht de Find ze Frind
Jeder kan füer d'andre
E echter Engel sin...
Bringt in s'Lewe vom andre
Wieder Hoffnung un Sin
Es wurd Wihnachte
Wenn de Hass verschwind
Wenn endlich d'Menschheit
De Wäj züe de Lieb find
Wenn s'ken Ungerichtichkeit
Ken armuet meh gibt
Wenn s'riche Land im arme
Nim in de Hintre tritt
Es wurd Wihnachte
Wenn de Kriej verschwind
Kommt endlich die Zit
Wie Friede mit sich bringt
Jesüs isch gebore
Mer fiere die Geburt
Gott isch uf d'Welt rab komme
Das d'Menschheit menschlich wurd
Gloria in exelsis Deo ! Alleluia !
Roland Engel
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2. LA CATHEDRALE DE STRASBOURG DANS LA LITTERATURE
Nombreux sont les auteurs qui évoquent la cathédrale de Strasbourg dans leurs écrits. A un
peu plus d’un siècle de distance, voici en extrait du récit de Victor Hugo et un poème de Hans
Arp.
« Tout-à-coup, à un tournant de la route, une brume s’est enlevée, et j’ai aperçu le Munster. Il était
six heures du matin. L’énorme cathédrale, le sommet le plus haut qu’ait bâti la main de l’homme
après la grande pyramide, se dessinait nettement sur un fond de montagnes sombres d’une forme
magnifique, dans lesquelles le soleil baignait çà et là de larges vallées. L’œuvre de Dieu faite pour les
hommes, l’œuvre des hommes faite pour Dieu, la montagne et la cathédrale, luttaient de grandeur.
Je n’ai jamais rien vu de plus imposant. […] Hier, j’ai visité l’église. Le munster est véritablement une
merveille. Les portails de l’église sont beaux, particulièrement le portail roman, il ; y a sur la façade
de très superbes figures à cheval, la rosace est noble et bien coupée, toute la face de l’église est un
poème savamment composé. Mais le véritable triomphe de cette cathédrale, c’est la flèche. C’est
une vraie tiare de pierre avec sa couronne et sa croix. C’est le prodige du gigantesque et du délicat.
J’ai vu Chartres, j’ai vu Anvers, il me fallait Strasbourg.
L’église n’a pas été terminée. L’abside, misérablement tronquée, a été arrangée au goût du cardinal
de Rohan, cet imbécile, l’homme du collier. Elle est hideuse. Le vitrail qu’on y a adapté a un dessin de
tapis courant ; c’est ignoble. Les autres vitraux sont beaux, exceptées quelques verrières refaites,
notamment celles de la grande rose. Toute l’église est honteusement badigeonnée ; quelques parties
de sculpture ont été restaurées avec quelque goût. Cette cathédrale a été touchée par toutes les
mains. La chaire est un petit édifice du quinzième siècle, gothique fleuri, d’un dessin et d’un style
ravissants. Malheureusement on l’adorée d’une façon stupide. Les fonts baptismaux sont de la
même époque et supérieurement restaurés. C’est un vase entouré d’une broussaille de sculpture la
plus merveilleuse du monde.
[…] Les statues me disent beaucoup de choses ; aussi j’ai toujours la manie de les questionner, et
quand j’en rencontre une qui me plaît, je reste longtemps avec elle. J’étais donc en tête à tête avec le
grand Erwyn, et profondément pensif depuis plus d’une grosse heure, lorsque un bélître est venu me
déranger. C’était le suisse de l’église qui, pour gagner trente sous, m’offrait de m’expliquer sa
cathédrale. Figurez-vous un horrible suisse mi-parti d’allemand et d’alsacien, et me proposant ses
explications – Monsir, fous afre pas fu lé champelle ? – J’ai congédié assez rudement ce marchand de
baragouin.
Je n’ai pu voir l’horloge astronomique qui est dans la nef et qui est un charmant petit édifice du
seizième siècle. On est en train de la restaurer, et elle est recouverte d’une chemise en planches.
L’église vue, je suis monté sur le clocher. Vous connaissez mon goût pour le voyage perpendiculaire.
Je n’aurai eu garde de manquer la plus haute flèche du monde. Le Munster de Strasbourg a près de
cinq cents pieds de haut. Il est de la famille des clochers accostés d’escaliers à jour. C’est une chose
admirable de circuler dans cette monstrueuse masse de pierre toute pénétrée d’air et de lumière,
évidée comme un joujou de Dieppe, lanterne aussi bien que pyramide, qui vibre et palpite à tous les
souffles du vent. Je suis monté jusqu’en haut des escaliers verticaux. J’ai rencontré en montant un
visiteur qui descendait tout pâle et tout tremblant, à demi porté par son guide. Il n’y a pourtant
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aucun danger. Le danger pourrait commencer au point où je me suis arrêté, à la naissance de la
flèche proprement dite. Quatre escaliers à jour, en spirale, correspondant aux quatre tourelles
verticales, enroulés dans un enchevêtrement délicat de pierre ouvragée et amenuisée, s’appuient sur
la flèche, dont ils suivent l’angle et rampent jusqu’à ce qu’on appelle la couronne, à environ trente
pieds de distance de la lanterne surmontée d’une croix qui fait le sommet du clocher. Les marches
de ces escaliers sont très hautes et très étroites, et vont en se rétrécissant à mesure qu’on monte. Si
bien qu’en haut elles ont à peine la saillie du talon. Il faut gravir ainsi une centaine de pieds, et l’on
est à quatre cents pieds du pavé […]
D’où j’étais la vue est admirable. On a Strasbourg sous ses pieds, vieille ville à pignons dentelés et à
grands toits chargés de lucarnes, coupée de tours et d’églises, aussi pittoresque qu’aucune ville de
Flandre. L’Ill et le Rhin, deux jolies rivières égaient ce sombre amas d’édifices de leurs flaques d’eau
claires et vertes. Tout autour des murailles s’étend à perte de vue une immense campagne pleine
d’arbres et semée de villages. Le Rhin, qui s’approche à une lieue de la ville, court dans cette
campagne en se tordant sur lui-même. En faisant le tour du clocher trois chaînes de montagnes, les
croupes de la Forêt Noire au nord, les Vosges à l’ouest, au midi les Alpes. »
Me voilà à Strasbourg, Victor Hugo, Le Rhin, 1839
Cathédrale Notre-Dame, aquarelle, Jean-Paul Ehrismann
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La cathédrale est un cœur
Comment ai-je pu dire
que la cathédrale de Strasbourg
était un cœur ?
Pour la même raison
que vous pourriez dire
que nous sommes une branche d’étoiles
que les anges ont des mains de poupée
que le bleu est en danger de mort
qu’il déteste les surhommes
et qu’il préfère les hommes de neige
qui fondent sur une plage d’été
entourés de lampes à pétrole.
La cathédrale est un cœur.
La tour est un bourgeon.
Avez-vous compté les marches
qui mènent à la plate-forme ?
Elles deviennent chaque soir de plus en plus nombreuses.
Elles poussent.
La tour tourne
et tourne autour d’elle.
Elle tourne elle pousse
elle danse avec ses saintes
et ses saints
avec ses cœurs.
S’envolera-t-elle avec ses anges
La tour de la cathédrale de Strasbourg ?
La cathédrale de Strasbourg est une hirondelle.
Les hirondelles
croient aux anges des nuages.
Les hirondelles
ne croient pas aux échelles.
Pour monter en l’air
elles se laissent tomber en l’air
dans l’air tissé
de bleu infini.
La cathédrale de Strasbourg
est une hirondelle.
Elle se laisse tomber dans le ciel ailé
Dans l’air des anges.
Jean Hans Arp, Jours effeuillés, Gallimard, 1966
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3. LE CYCLE DE NOEL : ACTIVITES PEDAGOGIQUES
MOTS MELES
Règle du jeu : Dans la grille de mots mêlés, retrouvez les mots liés à Noël indiqués dans ces listes. Les mots
marqués d’une (<) sont écrits à l’envers dans la grille.
Vous pourrez ensuite prendre le temps de vous demander pourquoi tel ou tel terme est associé à la fête de
Noël...
ORANGES
WIEHNACHT
POMME (<)
SAPIN
AVENT
NATIVITE
NAISSANCE
AVE
CIEL
SAUVE
VIE
PAIX
REVEILLON
NOEL
ETOILE
EPICES
BUCHE
(<)
HOSTIE
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QUESTIONNAIRE
1. Qui a fixé la date de Noël au 25 décembre ?
les romains
l’Eglise
2. Que signifie le mot Noël ?
jour de naissance
nouveau jour
premier jour
3. Depuis quand l’Eglise fête-t-elle Noël ?
depuis le IVème siècle
depuis le XIème siècle
4. Combien existe-t-il de psaumes ?
72
103
depuis le XVème siècle
150
5. St Nicolas a-t-il existé ?
oui
non
6. Quelle est la ville d’Alsace qui a inventé la légende du Hans Trapp ?
Kayserberg
Altkirch
Wissembourg
7. Par qui a été imaginé le personnage de Christkindel ?
par les catholiques
par les protestants
8. Quand le marché de Noël de Strasbourg a-t-il eu lieu pour la première fois ?
1120
1805
1570
9. Que symbolise à l’origine l’arbre de Noël (Wihnachtsbauïm) ?
l’arbre de l’enfantement
l’arbre du Paradis
10. Quand apparaît la tradition du sapin de Noël ?
1354
1521
1870
11. Quand le sapin de Noël a-t-il été installé pour la première fois à Paris ?
au XVII ème siècle
au XVIII ème siècle
au XIXème siècle
12. Quand l’arbre de Noël devient-il obligatoire dans les écoles d’Alsace ?
en 1669
en 1870
13. Quels sont les premiers décors de l’arbre de Noël ?
pommes et hosties
boules de Noël
14. Quelle pièce de théâtre jouée pendant 40 ans évoque la fidélité des Alsaciens à la
tradition de l’arbre de Noël ?
Enfin, redde m’r nimm devun
Le Père Noël est une ordure
Le voyage de Noël
15. D’où vient la tradition de la bûche de Noël ?
une tradition de bûcherons
une bûche déposée dans l’âtre avant la messe de minuit
pour réchauffer la maison
16. Quel saint fête-t-on le 26 décembre ?
Saint Jean
Saint-Etienne
Saint-André
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17. Que signifie le mot « crèche » ?
mangeoire
étable
grotte
18. Où est représentée à la cathédrale la scène des rois mages ?
portail Saint-Laurent
chapelle Sainte-Catherine
chapelle Saint-Jean-Baptiste
19. Où se trouve à la cathédrale une nativité peinte de l’école de Schongauer ?
sur une tapisserie
au dessus de l’entrée de la chapelle Saint-André
20. De quelle époque date la confection des tapisseries exposées dans la cathédrale durant
le temps de l’Avent ?
XVIIème siècle
XVIIIème siècle
Réponses
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
l’Eglise
jour de naissance (dies natalis)
depuis le IVème siècle
150
oui ; c’est le personnage historique de l’évêque de Myre, né vers 270
Wissembourg
par les protestants contestant que Saint-Nicolas puisse apporter des cadeaux. C’est le
Christ qui offre des cadeaux.
8. 1570
9. l’arbre du Paradis
10. 1521
11. au XIXème siècle (1840)
12. après 1870, Guillaume II voulant insister sur l’origine « germanique » des traditions
d’Alsace
13. pommes (tentation) et hosties (rédemption)
14. Enfin … redde m’r nimm devun
15. une bûche, parfois aspergée d’eau bénite, déposée dans l’âtre
16. Saint-Etienne, premier témoin (martyr) de la chrétienté
17. mangeoire (cripia)
18. portail Saint-Laurent
19. au-dessus de l’entrée de la chapelle Saint-André
20. confection : XVIIème (1638-1657); elles sont arrivées à la cathédrale au XVIIIème
(1739).
La tradition des papiers découpés ou canivets.
Canivet est le nom donné à une image pieuse dont les bords ou le fond sont découpés comme de la
dentelle. À l'origine il s'agissait d'une image de papier découpé finement au canif d'où le nom. Le
canivet désigne également l'outil (lame ou point fine) qui permet le découpage. Par la suite les
découpages en dentelles se firent mécaniquement. Ce mot est à l'origine de « canivetie » qui désigne
l'activité de collectionner des images pieuses (collectionneur = canivetiste).
Les papiers découpés permettent de réaliser un joli décor de fenêtres pour Noël.
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TROISIEME PARTIE
Sources théâtrales du Mystère de Noël
« Il a habité parmi nous »
1. LES MYSTERES, UN GENRE THEATRAL DU MOYEN – AGE
Le mystère est un genre dramatique qui nous vient du Moyen - Age. Le théâtre
médiéval entretient à l'origine des rapports étroits avec l'Eglise et son rituel. La messe,
centre de la liturgie chrétienne, a donné naissance au drame liturgique par le
développement progressif de passages dialogués : les tropes. Les premiers tropes remontent
sans doute au Xème siècle. Ils s'inscrivent dans les grandes célébrations : Pâques, Epiphanie,
Nativité. Au début, il s'agit d'une liturgie théâtralisée, plutôt que de théâtre proprement dit.
Toutes ces "dramatisations" se déroulent dans l'église, la langue utilisée est le latin, les
acteurs sont des membres du clergé et les thèmes sont liés au culte.
Dès le XIIème siècle se développent des processions plus élaborées dramatiquement qui
vont progressivement conduire à un véritable théâtre religieux dans la langue du peuple.
Dans toute l'Europe, ces expressions théâtralisées passeront du choeur à la nef des églises,
pour gagner le parvis et la rue.
Pour compléter l'enseignement des bas-reliefs et des vitraux, les jeux du XIIIème siècle
présenteront l'histoire sainte de façon divertissante.
Au XIVème siècle, les porches et les parvis des églises, les places des cités de France, d'Italie,
d'Angleterre ou d'Espagne vont accueillir les miracles.
Ces manifestations dramatiques deviendront les mystères au XVème siècle et à la première
moitié du XVIème siècle. Clercs et magistrats municipaux ont mis en commun leurs
ressources pour donner aux fêtes, tant civiles que religieuses, un éclat qui rehausse le
prestige de la cité.
Les drames liturgiques laisseront place à des tableaux vivants, qui s'animaient, se mêlaient
aux processions, s'ordonnaient en jeux scéniques, s'enrichissaient d'un dialogue, d'une
musique, d'un décor.
Une fresque pour l'éveil des consciences
Ce théâtre vise à reporter les acteurs et les spectateurs à l'origine du monde et de la
création. Devant la représentation d'un mystère, chaque homme peut se sentir interpellé. Il
est question de son âme, de la préparation de sa mort, de son salut personnel. Enraciné aux
sources de la sensibilité, ce christianisme du Moyen - Age invitait à une prise de conscience
et à la responsabilité.
A l'opposé du théâtre moderne dit de la "distanciation", le mystère est un théâtre de
"communion" dans lequel le spectateur cesse d'être un assistant pour devenir un
participant. Dans ce théâtre symbolique se sont développés des éléments de réalisme : on
passait ainsi d'un système évocatif à un système illustratif tel qu'on a pu comparer la scène
médiévale à un "grand livre d'images" ou à une "fresque".
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La fin des Mystères
Par le jeu de la représentation, les conditions sociales et les réalités de la vie quotidienne
sont recréées et condensées dans la perspective d'une histoire de la Création et de
l'humanité. Pendant deux siècles, des confréries planteront ainsi, dans les bourgs et les cités,
la Croix de la Rédemption au centre du mystère joué en rond. Devant l'ampleur et le succès
de ces manifestations dramatiques, les autorités religieuses vont passer de la méfiance à la
sanction. Un arrêt du Parlement de Paris de 1548 s'insurgea contre les confréries de la
Passion.
Depuis 1565, il n'y a plus eu de mystère joué à l'intérieur des cathédrales. Suite au concile
de Trente, les autorités ecclésiastiques avaient mis fin, dans le cadre de la réforme
catholique des fêtes, aux anciens jeux para liturgiques de Nativité et de Résurrection
représentés dans les cathédrales.
Encyclopaedia Universalis ; Le Moyen - Age, G. Duby ; Histoire du théâtre, A. Degaine.
Le « Mystère » dans le théâtre contemporain
« Depuis la création du Martyre de Saint – Sébastien, de d’Annunzio, au Châtelet en 1911, de
l’Annonce faite à Marie, de Claudel, à l’oeuvre en 1912, du Pauvre sous l’escalier, de Ghéon,
au Vieux Colombier en 1921, du Mystère du Dieu mort et ressuscité de Dujardin, au Théâtre
Antoine en 1923, on assistait sur la scène à l’expansion des pièces à sujet religieux. Les
représentations du Soulier de Satin, à la Comédie française en 1943, puis, au lendemain de la
guerre, une succession de drames à sujets religieux de Claudel, Montherlant, Gabriel Marcel,
Thierry Maulnier, Sartre, Obey, Bernanos, Cocteau, Julien Green, Ghelderode, Anouilh,
manifestent, selon A - M Carré, la permanente « actualité de Dieu au théâtre ». De grands
metteurs en scène aspiraient également à recréer la ferveur et la solennité sacrées des
cérémonies théâtrales antiques et médiévales …Renouant avec la tradition des mystères et
des jeux médiévaux, des dramaturges et des comédiens se dévouèrent à la représentation
d’un répertoire essentiellement religieux. Grâce à eux, le public, en province et à Paris,
reprenait goût à la représentation des mystères. Ainsi dramaturges et metteurs en scène,
acteurs et spectateurs s’accordaient – ils pour promouvoir un théâtre illustrant l’idéologie
religieuse et tourmentée d’un siècle hanté par la tragédie antique et le drame chrétien, la
tentation de l’athéisme et l’obsession de l’absurde.»
Le théâtre religieux en France, Michel Lioure, « Que sais – je ? », PUF, 1983
« Mais le mystère moderne ne conserve du genre ancien que le caractère religieux du sujet.
Il emprunte sa forme au drame du XIXème siècle. »
Le théâtre, M – C Hubert, Armand Colin, 1988
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2. L’AVENTURE DU MYSTERE DE NOEL EN LA CATHEDRALE DE STRASBOURG
Une aventure collective
Depuis 1995, à l’initiative de Michel Jermann et de Robert Riber, le Mystère de Noël en la
cathédrale de Strasbourg propose une aventure théâtrale qui renoue avec la tradition des
mystères tout en mettant en oeuvre pour un large public les arts du spectacle contemporain.
Comme toute représentation scénique, le spectacle propose une approche sensible et
émotionnelle des récits dont il s’inspire et repose sur une adaptation libre des textes
bibliques. Chaque mystère entre ainsi en résonance avec la perception actuelle des textes et
s’attache à faire connaître la spécificité du Dieu des chrétiens. Ainsi, la forme de la fiction
théâtrale ouvre le dialogue avec les convictions et les spiritualités de ce temps.
Mis en oeuvre par une cinquantaine de collégiens, lycéens et étudiants de toutes
convictions, le spectacle offre la parole aux jeunes à la cathédrale, leur permet de valoriser
leurs capacités et de poser la question du sens. Il leur permet de découvrir la richesse du
patrimoine culturel et religieux de Strasbourg.
L’organisation du Mystère de Noël, fondé dans le contexte de l’Aumônerie de
l’Enseignement Public, est assurée depuis 2007 par l’association « Mystères des cathédrales
» présidée par le Père Etienne Uberall.
Tous, auteurs, musiciens, chanteurs, comédiens, figurants, équipes logistiques et
organisateurs sont bénévoles.
Ne sont rémunérés que les intervenants professionnels.
Une aventure artistique
L’écriture du « Mystère de Noël » est une écriture plurielle qui, inspirée par la riche
tradition biblique, traduit les défis posés par la société contemporaine dans les termes où le
dialogue entre les différentes générations les nomme. Le texte du spectacle est ainsi
l’aboutissement d’un montage d’expressions et de sensibilités différentes. Il ordonne
dialogues, textes poétiques, chants, monologues, jeux d’acteurs et actions scéniques autour
du sujet. C’est la répétition avec les jeunes comédiens qui fixe définitivement la forme écrite
du spectacle.
Ce texte est écrit pour être joué et représenté dans une cathédrale : c’est aussi une de ses
exigences.
La dramaturgie est conditionnée de façon directe par l’espace scénique de la cathédrale.
Musique, jeux d’acteurs, lumières, chorégraphies, mouvements d’ensemble, expressions
scéniques diverses actualisent l’utilisation médiévale de la cathédrale par le peuple.
La scénographie met en valeur, grâce à une régie son et lumière performante, l’espace
symbolique et spirituel de la cathédrale de Strasbourg et permet de redécouvrir un site
prestigieux du patrimoine religieux de France. Les allées sont également investies par le jeu
pour impliquer davantage les spectateurs dans le rythme du mystère.
Un plateau nu au centre de la cathédrale facilite la visibilité des spectateurs et impose aux
comédiens un jeu bi – frontal. Point de coulisses ou de rideau de scène : les entrées et
sorties des comédiens et des figurants, le jeu des musiciens, des lecteurs et des chanteurs,
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les changements de décor sur le plateau, la régie : tout « joue » et manifeste l’engagement
de chacun dans le spectacle: silence, rapidité, rigueur, concentration - voire recueillement –
de tous sont indispensables pour assurer le bon rythme du spectacle.
Les éléments du décor du plateau sont légers, stylisés, mobiles : le cadre de la cathédrale ne
tolère aucune surcharge ; le placement des accessoires de scène, les accrochages de
tentures font partie du « spectacle », permettant aussi de prendre conscience des
dimensions de l’espace sacré. Les jeux de lumière dessinent également des décors.
Les costumes s’inspirent du vêtement historique de l’Antiquité mais en proposent une
stylisation contemporaine décalée, aux formes sobres, aux couleurs riches. La définition d’un
code des couleurs facilite la compréhension du public. Chaque année, de nouveaux éléments
de costumes sont réalisés.
Les comédiens sont de jeunes amateurs formés dans le cadre d’un atelier de théâtre
spécifique. Tous les talents, confirmés ou non, sont accueillis. Cet atelier de formation –
production a lieu de septembre à décembre. Dans les dernières semaines avant le spectacle,
la troupe est renforcée par les figurants indispensables pour le développement du spectacle
dans la cathédrale. L’expérience montre que, souvent, après avoir été figurants, les jeunes
rejoignent la troupe pour un engagement dans la préparation et le spectacle plus
conséquent. Pour certains rôles, des professionnels sont parfois sollicités. Tous les arts du
spectacle et du mouvement sont sollicités : projections, danse, arts du cirque, GRS, théâtre
de rue, arts martiaux …
Les musiciens et choristes sont recrutés selon leur niveau musical et interprètent en direct
la partition originale de chaque spectacle. La part de la création musicale est importante.
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BIBLIOGRAPHIE
•
APPROCHE BIBLIQUE
L’Evangile de Jean, Commentaire pastoral, Alain Marchadour, Centurion, 1992 repris dans Les
Evangiles, Textes et commentaires, Bayard Compact, Bayard, 2001
Avec Jean, Pour accompagner une lecture de l’Evangile de Jean, Jean, chapitres 1 à12, Jean Landier,
François Pécriaux, Daniel Pizivin,Les Editions ouvrières, 1990
•
APPROCHE SPIRITUELLE
Noël chez Eckhart et les mystiques rhénans, Marie-Anne Vannier, Arfuyen, 2005
•
APPROCHE POPULAIRE ET LITTERAIRE
Au pays de Noël, Les Saisons d’Alsace, Novembre 2009
Noël Wihnachta en Alsace, Rites, coutumes, croyances,Gérard Leser, Editions du Donon, 2006
Fêtes de fin d’année, fins d’années en fête, Noël et Nouvel an à Strasbourg du Moyen-Age à nos
jours, Catalogue Archives municipales de Strasbourg
Mon heure sur la terre, Claude Vigée, Galaade Editions, 2008
S’isch Wihnachte, mi corazon, CD Rolan Engel 2003, [email protected]
Bie uns isch Noël « Wihnachte », CD Roland Engel, 2007
•
APPROCHE THEATRALE
Le théâtre religieux en France, Michel Lioure, PUF, 1983
Histoire du théâtre dessinée : de la préhistoire à nos jours, André Degaine, Nizet, 1992
Le Moyen – Age, Georges Duby, Seuil, 1995
Le théâtre, MC Hubert, Armand Colin, 1988
Mystères des cathédrales
27 rue des juifs 67000 STRASBOURG
[email protected]
Contact :
Myriam Odeau
03 88 21 29 77
[email protected]
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