Juin 2011 - PCET Limoges Métropole
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Juin 2011 - PCET Limoges Métropole
Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local - Juin 2011 - Table des matières Table des matières ................................................................................................................................. 3 Table des illustrations ............................................................................................................................ 4 Analyse des vulnérabilités climatiques du territoire ............................................................................ 5 1.1. Introduction : le changement climatique .............................................................................. 7 1.1.1. A l’échelle planétaire .................................................................................................... 7 1.1.2. A l’échelle de la France ................................................................................................. 8 1.2. Le contexte : d’une stratégie nationale { un plan national d’adaptation ...........................11 1.3. Scénarios d’évolution du climat ........................................................................................... 13 1.3.1. Présentation des scénarios .........................................................................................13 1.3.2. A l’échelle planétaire .................................................................................................. 14 1.3.3. A l’échelle nationale ................................................................................................... 16 1.3.4. A l’échelle de Limoges Métropole .............................................................................. 17 1.4. La vulnérabilité du territoire aux effets du changement climatique ................................. 20 1.4.1. Les arrêtés de catastrophes naturelles sur le territoire de Limoges Métropole ..... 21 1.4.2. La vulnérabilité des milieux........................................................................................ 22 1.4.3. La vulnérabilité des activités ...................................................................................... 34 1.4.4. La vulnérabilité des populations................................................................................ 49 1.4.5. Synthèse des risques climatiques futurs pour le territoire ...................................... 55 Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [3] Table des illustrations Figure 1 : Evolution des températures à l'échelle de la planète depuis 1860 (GIEC) .......................... 8 Figure 2 : Evolution des températures à l'échelle de la France depuis 1950 (Météo-France) ............ 9 Figure 3 : Evolution du cumul annuel de précipitation en France au cours de la Période 1901-2000 (Météo-France)...................................................................................................................................... 10 Figure 4 : Scénarios d’émissions de GES pour la période 2000-2100 et projections relatives aux températures de surface (GIEC) ........................................................................................................... 15 Figure 5 : Projections régionalisées de l’évolution du climat : température en surface et précipitation (GIEC) ............................................................................................................................... 16 Figure 6 : évolution des températures en France sur un siècle (Météo-France) ............................... 17 Figure 7 : Evolution des températures moyennes et maximales d’été (juin- juillet-août) à Limoges sur la période 1960-2100 (ONERC) ........................................................................................................ 18 Figure 8 : Evolution des précipitations annuelles et printanières (mars-avril-mai) à Limoges sur la période 1960-2100 (ONERC).................................................................................................................. 19 Figure 9 : Les arrêtés de catastrophes naturelles sur la période 1982-2010 (Explicit, GASPAR) ....... 21 Carte 1 : Zones inondables de Limoges Métropole (Explicit, GASPAR) ..............................................25 Carte 2 : Zones humides de Limoges Métropole (Aqua Concept Environnement) .......................... 28 Carte 3 : Zones remarquables et zones protégées de Haute-Vienne (Explicit, CARMEN) ................ 31 Figure 11 : Evolution de la localisation des groupes biogéographiques d’essences forestières selon le scénario B2 (INRA).............................................................................................................................32 Figure 12 : Evolution de la répartition du Hêtre et du Pin maritime entre 2005 et 2100 (INRA) ...... 33 Figure 13 : Carte des risques de présence de la maladie de l’encre du chêne : situation 1968-1998 et prédiction 2068-2098 (INRA)............................................................................................................... 34 Carte 4 : Les cavités souterraines sur le territoire de Limoges Métropole (Explicit, BRGM) ............37 Carte 5 : L’aléa retrait-gonflement des argiles en Haute-Vienne (BRGM) ......................................... 39 Carte 6 : Occupation du sol sur le territoire de Limoges Métropole (Explicit, Corine Land Cover).. 41 Carte 7 : Température moyenne dans les quartiers de l’agglomération du Grand Lyon le 21 juillet 2001 (Agence d’urbanisme du Grand Lyon) ........................................................................................ 42 Figure 14 : Nombre de points de connexion privés d’électricité { la suite des tempêtes de 2009 et 2010 (CRE, ERDF) .................................................................................................................................. 45 Figure 15 : ICT des mois de juillet et août sur la période 1980 - 2000 (ONERC) ................................. 46 Figure 16 : ICT des mois de juillet et août sur la période 2080 – 2100 sous le scénario A1B (ONERC) ............................................................................................................................................................... 47 Figure 17 : Les impacts croisés du changement climatique sur l’activité touristique ....................... 47 Carte 8 : Les Sites de valeur en Haute-Vienne et à Limoges Métropole (Explicit, CARMEN)........... 48 Figure 18 : Excès de décès observé quotidiennement pendant le mois d’août 2003 et relevé des températures maximales (trait plein) et minimales (trait en pointillé) (INSERM) ........................... 50 Figure 19 : Evolution du ratio de surmortalité et des températures maximales (trait rouge plein) et minimales (trait bleu en pointillé) au mois d’août 2003 en Limousin (INSERM) ............................... 51 Figure 20 : Synthèse de la vulnérabilité du territoire aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat ......................................................................................................................... 56 Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [4] Analyse des vulnérabilités climatiques du territoire Quelques définitions pour commencer : Un risque climatique est défini par l’interaction de trois composantes que sont 1. l’aléa climatique ; 2. l’exposition des populations, milieux et activités sur un territoire à cet aléa ; et, 3. leur vulnérabilité à cet aléa climatique. L’aléa climatique est un évènement climatique ou d’origine climatique susceptible de se produire (avec une probabilité plus ou moins élevée) et pouvant entraîner des dommages sur les populations, les activités et les milieux. L’exposition aux aléas climatiques correspond { l’ensemble des populations, milieux et activités qui peuvent être affectés par les aléas climatiques (et qui sont ainsi soumis à des pertes potentielles). La nature d’exposition c’est la typologie de ce qui est exposé : une technologie/un processus industriel (par exemple le système de refroidissement d’une usine), des actifs de production (par exemple une turbine hydroélectrique) ; des infrastructures, des bâtiments, des sites touristiques naturels ; les habitants des zones rurales isolées/des zones urbaines denses, etc. Le niveau d’exposition c’est le « volume » (ou encore la quantification) de ce qui est exposé : un unique bâtiment, un quartier ou une ville ; un hectare ou plusieurs milliers d’hectares de culture (etc.). La vulnérabilité aux aléas climatique caractérise le degré au niveau duquel un système peut subir ou être affecté négativement par les effets néfastes des aléas climatiques, y compris les phénomènes climatiques extrêmes, et par la variabilité climatique. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [5] On parle de vulnérabilité d’un système à un aléa climatique comme la « fragilité » de ce système à la présence d’un aléa identifié (par exemple la vulnérabilité d’une plante à la hausse des températures et à l’aléa sécheresse, la vulnérabilité d’un type de bâtiment à l’aléa RGA, etc.). La vulnérabilité d’un secteur ou d’un territoire au changement climatique correspond à la synthèse des risques climatiques pour le secteur/territoire dans un contexte de changement du climat. L’impact d’un risque climatique est la mesure des conséquences de la manifestation d’un risque climatique donné sur un territoire donné et/ou dans un secteur donné. On parlera par exemple de l’impact d’une tempête sur le secteur forestier ou de l’impact d’une canicule sur la population d’une ville. L’adaptation au changement climatique peut être définie comme l’ensemble des ajustements des systèmes naturels ou humains réalisés en réponse aux changements du climat pour en limiter les impacts négatifs et en maximiser les effets bénéfiques. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [6] 1.1. Introduction : le changement climatique Le climat et ses variations préoccupent les scientifiques depuis plus d’un siècle. Ce n’est toutefois qu’au cours des années 1980 que l’ampleur du problème a été reconnue par les organisations internationales. Depuis 1988, le GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat), créé par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), étudie le processus du changement climatique, ses causes et ses principales conséquences. Si certaines polémiques sur le phénomène et ses causes (notamment la responsabilité de l’homme) ont alimenté – et, pour certaines, alimentent toujours – les débats, la conclusion formulée par le GIEC est admise : les équilibres climatiques mondiaux changent. Cette modification globale entraînera une évolution du climat au niveau local, qui aura elle-même des conséquences sur les territoires, leurs populations, leurs milieux et leurs activités. Aujourd’hui, certains événements exceptionnels, même s’ils ne peuvent être assurément reliés au changement climatique, alertent la population et ses représentants sur les risques liés au climat. La multiplication des tempêtes et notamment celle ayant engendré d’importantes inondations dans les régions atlantiques en février 2010 (tempête Xynthia), les canicules dont celle d’août 2003, qui a touché l’ensemble du territoire mais aussi les problèmes récents et récurrents de déficit de réalimentation des nappes d’eau conduisent nécessairement { s’interroger sur une éventuelle accentuation des phénomènes par le changement climatique. C’est l’avenir d’un territoire qui est alors considéré et la capacité de ce dernier à faire face à de telles menaces. L’objet du volet ‘Adaptation au changement climatique’ d’un Plan Climat-Energie Territorial est la définition d’une stratégie locale pour la prise en compte de l’impact de l’évolution anticipée des aléas climatiques sur le territoire. Il est nécessaire de mener une double réflexion sur : la compréhension et la caractérisation des impacts du changement climatique sur les territoires, l’adaptation aux impacts identifiés (opportunités du territoire en matière d’innovation ou de politiques publiques). 1.1.1. A l’échelle planétaire i. Elévation des températures Au cours du XXème siècle, la température moyenne { la surface de la terre a crû d’environ 0,7°C. Le réchauffement global devient de plus en plus rapide ces cinquante dernières années avec une hausse globale de 0,13°C par décennie. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [7] Figure 1 : Evolution des températures à l'échelle de la planète depuis 1860 (GIEC) Les modifications concernant les régimes de précipitations sont moins nettes que celles observées pour les températures. De manière globale, on observe une hausse des précipitations dans le Nord de l’Europe, et une baisse des précipitations dans les pays méditerranéens. Sur une grande majorité des zones terrestres, un accroissement de la fréquence des événements extrêmes de précipitations a été mis en évidence. Dans le dernier rapport du GIEC, de nouveaux résultats montrent que proportionnellement l’augmentation des précipitations extrêmes est plus importante que l’augmentation des précipitations totales annuelles. La contribution des événements extrêmes est donc plus forte sur une année. ii. Elévation du niveau de la mer Entre 1961 et 2003, le niveau de la mer s’est élevé { un rythme annuel de 1,8 mm. L’élévation du niveau de la mer s’explique { la fois par la fonte des glaces continentales, et par l’expansion thermique du volume des eaux marines superficielles, conséquences directes du réchauffement de la température du surface de la terre. A la fin du XXIème siècle, le GIEC prévoit un niveau de la mer qui se situerait entre 15 et 80 cm audessus du niveau actuel. 1.1.2. A l’échelle de la France i. Elévation des températures Depuis une trentaine d’années, on observe, en France, une augmentation de la température. En effet, selon Météo-France, la température moyenne en France a augmenté de 0,1°C par décennie depuis le début du 20ème siècle, avec une accélération de ce réchauffement depuis le milieu des années 70. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [8] Sur la deuxième moitié du 20ème siècle, les étés sont devenus de plus en plus chaud et le nombre de jours de gel a diminué. Ces observations sont accompagnées de l’augmentation des vagues de chaleur estivales et de la diminution des vagues de froid en hiver. Cela est illustré par la figure suivante : Figure 2 : Evolution des températures à l'échelle de la France depuis 1950 (Météo-France) Les 10 années les plus chaudes du siècle sont toutes postérieures à 1988. Le réchauffement, à l’échelle nationale, est légèrement supérieur { celui observé { l’échelle planétaire. Cette différence s’explique par le fait que les océans qui recouvrent 70% de la surface de la Terre se réchauffent moins vite que les continents. iii. Modification du régime des précipitations En France, le cumul annuel des précipitations a augmenté de 7% en un siècle. Cette augmentation varie en fonction des saisons et en fonction des régions. On observe une augmentation du régime des précipitations en hiver, notamment au Nord de la France, tandis que les tendances sont plutôt à la baisse dans le Sud. En été, la plupart des données montrent une baisse du régime des précipitations. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [9] Figure 3 : Evolution du cumul annuel de précipitation en France au cours de la Période 1901-2000 (Météo-France) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [10] 1.2. Le contexte : d’une stratégie nationale { un plan national d’adaptation L’importance des impacts du phénomène de dérèglement climatique rapportée dans les conclusions les plus récentes du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat1, rend en effet nécessaire l’élaboration de deux réponses aussi importantes que complémentaires : l’atténuation du phénomène de changement climatique : la réduction de la concentration de gaz { effet de serre dans l’atmosphère par la réduction de leurs émissions ; l’adaptation aux effets prévisibles du changement climatique : elle consiste en l'ajustement des systèmes naturels ou humains en réponse à des stimuli climatiques effectifs ou anticipés ou à leurs impacts, dans le but d'atténuer les conséquences des évolutions néfastes des équilibres climatiques ou d'exploiter des opportunités liées à des évolutions bénéfiques. Il s’agit pour les collectivités d’une démarche de « dévulnérabilisation » de leur territoire face aux risques de nature diverse induits par le changement climatique. Un large éventail de mesures d’adaptation peut être mis en œuvre pour faire face aux conséquences observées et anticipées du changement climatique. Jusqu’{ présent, les cycles de négociations internationales ont quasi-exclusivement concerné les engagements en matière de réduction des émissions de GES (atténuation du changement climatique) et la création de mécanismes internationaux de flexibilité liés à ces engagements. C’est le cas notamment du Protocole de Kyoto adopté en 1997. La question de l’adaptation, parent pauvre des négociations, semble s’imposer progressivement dans l’Agenda des gouvernements. A l’échelle française, une Stratégie nationale d’adaptation au changement climatique, élaborée dans le cadre d’une large concertation menée par l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), a été adoptée en 20062. Ce document d’orientation, point de départ d’une réflexion plus opérationnelle, présente les options et domaines d’investigations des pouvoirs publics en matière de réduction de la vulnérabilité des territoires, des milieux, des populations, des acteurs socio-économiques et des filières aux effets induits par la modification des conditions climatiques. Les différentes finalités de la Stratégie nationale d’adaptation sont les suivantes : Agir pour la sécurité et la santé publique : « assurer la protection des personnes et des biens dans des situations aujourd’hui jugées extrêmes, mais demain banalisées et peut-être largement dépassées » ; 1 Intergovernmental Panel on Climate Change, Climate Change 2007 : The Physical Science Basis - Summary for Policy Makers (2007) 2 Observatoire national sur les effets du changement climatique, Stratégie nationale d’adaptation au changement climatique (2006) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [11] Réduire les inégalités devant les risques : « éviter que les conséquences du changement climatique renforcent ou établissent des inégalités entre les populations subissant ces effets » ; Limiter les coûts, tirer parti des bénéfices potentiels : « le changement climatique induira des coûts que des politiques préventives d’adaptation auront pour objectif de réduire ou d’éviter. » Dans certains cas, « les effets du réchauffement climatique pourront aussi se traduire par des bénéfices dont l’anticipation permettra de tirer un plus grand avantage. » ; Préserver le patrimoine naturel : « les écosystèmes formant le patrimoine naturel sont à l’origine d’une multitude de biens et services essentiels pour l’homme […] L’importance de ces effets régulateurs ou amortisseurs se révèlera d’autant plus décisive que les phénomènes climatiques extrêmes sont appelés à s’accentuer avec les changements climatiques. » Un groupe interministériel a été réuni en 2007, dans le prolongement des réflexions engagées pour la rédaction de la Stratégie nationale d’adaptation, afin de recenser les impacts du changement climatique, les coûts associés et les pistes d’adaptation. Les groupes de travail de la concertation nationale sur l’adaptation au changement climatique ont remis leurs recommandations en juin 2010 ; ces recommandations ont porté sur les thématiques sectorielles de la Biodiversité, des Ressources en eau, des Risques naturels, de la Santé, de l’Agriculture et de la Forêt, de l’Energie, des Infrastructures de transport, du Tourisme, de l’Urbanisme et du Cadre bâti ainsi que des thématiques transversales du Financement, de la Gouvernance, de l’Information-Education et de la Recherche. Les quelques 200 recommandations formulées par les groupes de travail forment aujourd’hui le cadre d’une concertation régionale, qui devra aboutir { l’élaboration d’un Plan national d’adaptation au changement climatique pour les différents secteurs d’activités { l’horizon 2011 (comme le prévoit la loi « Grenelle 1 » du 3 août 2009). Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [12] 1.3. Scénarios d’évolution du climat 1.3.1. Présentation des scénarios Le GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) a récemment réalisé de nouvelles projections sur l’évolution des concentrations de gaz { effet de serre d’ici les 100 prochaines années. Différents scenarios ont été élaborés en tenant compte d’hypothèses notamment sur le changement de nos comportements et les politiques de maîtrise de l’énergie. Tous les scenarios envisagés conduisent inexorablement à une augmentation brutale de la concentration atmosphérique de CO2, plus ou moins rapidement selon nos comportements à venir. En 1996, le GIEC a commencé d’élaborer un nouvel ensemble de scénarios d’émissions, afin d’actualiser et de remplacer les scénarios d’émissions IS92 notoirement connus. Le nouvel ensemble approuvé de scénarios est décrit dans le Rapport spécial du GIEC sur les scénarios d’émissions (SRES). Quatre canevas circonstanciés différents ont été élaborés pour donner une description cohérente des rapports entre les forces qui déterminent ces émissions et leur évolution et ajouter un contexte pour la quantification des scénarios. L’ensemble de 40 scénarios (dont 35 contiennent des données sur la gamme complète des gaz nécessaires au forçage des modèles climatiques) ainsi obtenu porte sur un large éventail des principales forces démographiques, économiques et technologiques qui détermineront les émissions futures de gaz { effet de serre et d’aérosols sulfatés. Chaque scénario représente une quantification spécifique de l’un des quatre canevas retenus. Tous les scénarios fondés sur le même canevas constituent une «famille de scénarios» (voir l’encadré N° 5, qui donne une brève description des principales caractéristiques des quatre canevas du SRES et des familles de scénarios). Les scénarios du SRES ne prennent pas en compte d’éventuelles initiatives en matière de climat, ce qui signifie qu’aucun d’eux ne retient explicitement l’hypothèse de la mise en œuvre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques ou de la réalisation des objectifs d’émissions du Protocole de Kyoto. En revanche, les émissions de gaz à effet de serre subissent directement l’effet des décisions impliquant des changements d’ordre non climatique qui sont prises pour répondre { une grande diversité d’autres objectifs (par exemple pour améliorer la qualité de l’air). Par ailleurs, certaines politiques gouvernementales peuvent influer, à des degrés divers, sur les facteurs qui déterminent les émissions de gaz { effet de serre, notamment l’évolution démographique, le développement social et économique, le progrès technologique, l’utilisation des ressources et la lutte contre la pollution. Il est tenu compte d’une façon générale de cette influence dans les canevas et les scénarios qui en découlent. Le canevas et la famille de scénarios A1 décrivent un monde futur dans lequel la croissance économique sera très rapide, la population mondiale atteindra un maximum au milieu du siècle pour décliner ensuite et de nouvelles technologies plus efficaces seront introduites rapidement. Les principaux thèmes sous-jacents sont la convergence entre régions, le renforcement des capacités et des interactions culturelles et sociales accrues, avec une réduction substantielle des différences régionales dans le revenu par habitant. La famille de scénarios A1 se scinde en trois groupes qui décrivent des directions possibles de l'évolution technologique dans le système énergétique. Les trois groupes A1 se Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [13] distinguent par leur accent technologique : forte intensité de combustibles fossiles (A1FI), sources d'énergie autres que fossiles (A1T) et équilibre entre les sources (A1B). Le canevas et la famille de scénarios A2 décrivent un monde très hétérogène. Le thème sous-jacent est l'autosuffisance et la préservation des identités locales. Les schémas de fécondité entre régions convergent très lentement, avec pour résultat un accroissement continu de la population mondiale. Le développement économique a une orientation principalement régionale, et la croissance économique par habitant et l'évolution technologique sont plus fragmentées et plus lentes que dans les autres canevas. Le canevas et la famille de scénarios B1 décrivent un monde convergent avec la même population mondiale culminant au milieu du siècle et déclinant ensuite, comme dans le canevas A1, mais avec des changements rapides dans les structures économiques vers une économie de services et d'information, avec des réductions dans l'intensité des matériaux et l'introduction de technologies propres et utilisant les ressources de manière efficiente. L'accent est sur des solutions mondiales orientées vers une viabilité économique, sociale et environnementale, y compris une meilleure équité, mais sans initiatives supplémentaires pour gérer le climat. Le canevas et la famille de scénarios B2 décrivent un monde où l'accent est mis sur des solutions locales dans le sens de la viabilité économique, sociale et environnementale. La population mondiale s'accroît de manière continue mais à un rythme plus faible que dans A2, il y a des niveaux intermédiaires de développement économique et l'évolution technologique est moins rapide et plus diverse que dans les canevas et les familles de scénarios B1 et A1. Les scénarios sont également orientés vers la protection de l'environnement et l'équité sociale, mais ils sont axés sur des niveaux locaux et régionaux. Actuellement, seuls les scénarios A2 et B2 sont pris en compte dans les simulations. 1.3.2. A l’échelle planétaire Le GIEC prévoit une élévation globale des températures à la surface de la terre pour les prochaines décennies. Comme le montre la figure suivante, l’augmentation moyenne des températures d’ici 2100 se situe entre + 1,8°C (scénario B1) et +4°C (scénario A1F1). « Emissions mondiales de GES en l’absence de politiques climatiques : six scénarios illustratifs de références et intervalle au 80ème percentile des scénarios depuis le SRES. Les lignes en pointillés correspondent aux moyennes mondiales multimodèles du réchauffement en surface pour les scénarios A2, A1B et B1, en prolongement des simulations relatives au XXème siècle. Ces projections intègrent les émissions de GES et d’aérosols de courte durée de vie. La courbe en rose ne correspond pas à un scénario mais aux simulations effectuées à l’aide de modèles de la circulation générale couplés atmosphère-océan (MCGAO) en maintenant les concentrations atmosphériques aux niveaux de 2000. Les barres sur la droite précisent la valeur la plus probable (zone foncée) et la fourchette probable correspondant aux six scénarios de référence du SRES pour la période 2090-2099. Tous les écarts de température sont calculés par rapport à 1980-1999. » Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [14] Figure 4 : Scénarios d’émissions de GES pour la période 2000-2100 et projections relatives aux températures de surface (GIEC) De même, le GIEC décrit une hausse très probable de la fréquence des événements extrêmes (vagues de chaleurs et fortes précipitations), ainsi qu’une baisse des débits annuels moyens des cours d’eau et de la disponibilité en eau de certaines régions sèches. La figure suivante montre les projections régionalisées réalisées par le GIEC du réchauffement climatique prenant en compte la modification des régimes du vent, des précipitations et certains aspects des phénomènes extrêmes et des glaces des mers. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [15] Figure 5 : Projections régionalisées de l’évolution du climat : température en surface et précipitation (GIEC) Décembre à février : Juin à août : Évolution projetée de la température en surface pour le début et la fin du XXIe siècle par rapport à la période 1980-1999 Variations relatives du régime des précipitations (%) pour la période 2090-2099, par rapport à la période 1980-1999 pour le scénario A1B. Les zones en blanc correspondent aux régions où moins de 66 % des modèles concordent sur le sens de la variation et les zones en pointillé à celles où plus de 90 % des modèles concordent sur celui-ci. 1.3.3. A l’échelle nationale En France, les producteurs des modélisations d’évolutions du climat sont Météo-France et l’IPSL dont les modèles sont, par ailleurs, utilisés par le GIEC. Des simulations récentes pour l'ouest de l'Europe prévoient pour la fin du XXI e siècle (scénarios A2 et B2 du Giec) : En été, un réchauffement marqué et une diminution des précipitations sur les régions méditerranéennes. Le risque de sécheresse sur le sud de la France, l'Espagne et l'Italie devrait être accru. En hiver, une augmentation des précipitations sur toute la façade atlantique. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [16] Figure 6 : évolution des températures en France sur un siècle (Météo-France) 1.3.4. A l’échelle de Limoges Métropole i. Evolution des températures A l’échelle du territoire de Limoges Métropole, les projections de l’ONERC (Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique) montrent un impact significatif du changement climatique sur la température. Ainsi, la température moyenne annuelle de l’ordre de 12°C actuellement serait de 15°C environ en 2100. La hausse de température engendrée par le changement climatique pourrait être particulièrement soutenue lors des périodes estivales et se traduirait ainsi par deux phénomènes : l’augmentation de la fréquence des phénomènes caniculaires ; la croissance de l’intensité des épisodes caniculaires. Ainsi, les températures des mois de juin, juillet et août pourraient augmenter de plus 5°C sur le territoire pour atteindre une moyenne supérieure à 25°C en été. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [17] Figure 7 : Evolution des températures moyennes et maximales d’été (juin- juillet-août) à Limoges sur la période 1960-2100 (ONERC) + 3°C Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [18] ii. Evolution des précipitations S’agissant des épisodes de précipitations, la tendance est moins nette. On prévoit cependant une diminution des précipitations annuelles à Limoges, particulièrement marquée pour le printemps (en-bas, à gauche) et l’été (en-bas, à droite), marquée à partir de 2030. Figure 8 : Evolution des précipitations annuelles et printanières (mars-avril-mai) à Limoges sur la période 1960-2100 (ONERC) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [19] 1.4. La vulnérabilité du territoire aux effets du changement climatique Dans la démarche de réflexion sur l’adaptation possible d’un territoire au changement climatique, la réflexion passe tout d’abord par un diagnostic de la vulnérabilité du territoire aux impacts potentiels et avérés du changement climatique. Les objectifs de cette étude sont donc multiples : D’enrichir les diagnostics réalisés sur les problématiques de vulnérabilité et d’adaptation du territoire aux impacts du changement climatique et la raréfaction des énergies non renouvelables afin d’orienter et affiner les réflexions sur les pistes d’actions ; D’apporter des éléments de connaissances aux acteurs sur ces enjeux en vue de les mobiliser. La vulnérabilité du territoire aux impacts du changement climatique se définie à travers trois dimensions : La vulnérabilité des populations La vulnérabilité des activités La vulnérabilité des milieux Populations Santé Solidarités Stratégie d’adaptation Biodiversité Risques naturels Ressources en eau Milieux Activités Agriculture Tourisme Production d’énergie Infrastructures Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [20] 1.4.1. Les arrêtés de catastrophes naturelles sur le territoire de Limoges Métropole 140 arrêtés de catastrophes naturelles ont été décrétés concernant les 18 communes du territoire de Limoges Métropole entre novembre 1982 et mai 2007. Le premier risque identifié est le risque inondation : 10 phénomènes entre 1988 et 2007 ont fait l’objet de 52 arrêtés d’inondation par ruissellement et coulée de boues et de 52 arrêtés d’inondation par crue (débordement de cours d’eau) dans les 18 communes de l’agglomération. Figure 9 : Les arrêtés de catastrophes naturelles sur la période 1982-2010 (Explicit, GASPAR) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [21] 4 évènements majeurs ont marqué l’histoire du territoire face aux risques climatiques : - La violente tempête du 6 au 8 novembre 1982 qui a balayé l’Europe occidentale, accompagnée de très fortes pluies dans certaines régions : un arrêté ‘Tempête’ a été déclaré pour les 18 communes ; - En conséquence de violents orages le 5 juillet 1993, 10 communes sont déclarées par arrêté en catastrophe naturelle ‘Inondation’ (par ruissellement et coulée de boue et par débordement de cours d’eau) ; la vallée de l’Aurence sera la plus fortement frappée par le phénomène ; - Les très fortes précipitations du 22 au 24 septembre 1993 entraînent d’importants débordements de cours d’eau et des coulées de boues, concernant notamment les bords de la Briance : 9 communes sont déclarées en catastrophe naturelle ‘Inondation’ ; - Le 25 décembre 1999, la France est traversée par une tempête extrêmement violente. Les 18 communes de Limoges Métropole sont déclarées en arrêté de catastrophes naturelles ‘Inondation’ et ‘Mouvement de terrain’ 1.4.2. La vulnérabilité des milieux i. La ressource en eau L’hydrologie des cours d’eau La Communauté d’agglomération de Limoges Métropole est située dans le périmètre du Schéma d’Aménagement et de Gestion de l’Eau (SAGE) du Bassin de la Vienne (cf. carte ci-dessous), un bassin étendu sur près de 7 060 km², intégrant plus de 1 200 km de cours d’eau, et appartenant luimême au périmètre du Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du bassin LoireBretagne. Le SAGE est un outil réglementaire de gestion concertée de l’eau sur un territoire : il définit des orientations que les Schémas de Cohérence Territoriale et Plans Locaux d’Urbanisme doivent respecter. Globalement, la situation environnementale sur le bassin de la Vienne est contrastée. Sur le plan qualitatif, près de 56% des masses d’eau sont classées en risque de non atteinte du bon état écologique en 2015. Sur le plan quantitatif de l’hydrologie des cours d’eau, la situation, jugée préoccupante au milieu des années 2000, s’est améliorée entre 2007 et 2009 même si les pluviométries n’ont pas toujours permis d’éviter des situations d’assecs pour les affluents de la Vienne aval. La situation en ce début d’année 2011 démontre la forte exposition des cours d’eau du territoire au risque climatique. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [22] Source : Etablissement public du Bassin de la Vienne (2010) L’hydrologie du bassin de la Vienne est caractérisée par un fort gradient pluviométrique entre le Plateau de Millevaches { l’amont et la région de Châtellerault. La présence { l’amont d’une structure géologique essentiellement composée de terrains primaires imperméables, favorables aux écoulements des eaux en surface, et, { l’aval, de terrains sédimentaires où l’infiltration est prépondérante est une caractéristique majeure du bassin. L’année 2010 n’a pas connu de crues significatives. Elle peut être considérée comme une année moyenne, avec des précipitations annuelles conformes aux moyennes observées. Le territoire de Limoges Métropole compte 4 stations d’observation des débits de rivières : La Vienne au Palaissur-Vienne et à Verneuil-sur-Vienne, la Briance à Condat-sur-Vienne et l’Aurence { Isle. Les débits annuels pour l’année sur ces points sont conformes { ce qui se produit tous les 2 ou 3 ans d’après Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [23] la DREAL Limousin3. En comparaison, l’année 2009 a connu des débits beaucoup plus faibles, correspondant à des débits se produisant tous les 6 ou 7 ans secs pour la Vienne et tous les 4 ou 5 ans secs pour l’Aurence et la Briance. L’année 2008 avait, quant { elle, été relativement humide, avec des volumes de précipitations excédentaires. Il est intéressant de regarder ensuite les premières données de débits mensuels pour l’année 2011. Après un début d’année très sec, l’ensemble des points d’observation de Haute-Vienne affiche à la mi-mai 2011 des débits largement inférieurs aux débits moyens ; ils sont tous conformes à des débits qui se produisent moins d’une fois tous les 20 ans secs. En comparaison aux autres années particulièrement sèches des dernières décennies (1976, 1989 et 2003), les moyennes des débits minimums pour 3 jours consécutifs, calculées par la DREAL Limousin pour le mois 2011, sont d’un très faible niveau. Les deux graphiques ci-dessous, issus respectivement des bulletins hydrologiques de l’année 2010 et du mois de mai 2011 publiés par la DREAL Limousin : 3 Bulletin hydrologique Année 2010, DREAL Limousin Les bulletins des années 2006 à 2010 ont été étudiés, ainsi que les bulletins mensuels de 2011 Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [24] Les débits moyens (QM) de la Vienne au Palais-sur-Vienne sont pour les premiers mois de 2011 largement inférieurs { ceux de 2010, année moyenne sur le plan de l’hydrologie. On observe par ailleurs une diminution du débit journalier (QJ) entre janvier et mai plus importante en 2011 qu’en 2010 (de 34 à 10 m3/s entre janvier et mai 2011 alors qu’elle était de 60 { 40 m3/s entre janvier et mai 2010). La présence de barrages hydrauliques en amont de la station de mesure du Palais-sur-Vienne, qui régissent le débit (par le « stockage » d’eau dans les barrages) et font de la Vienne une rivière « artificielle » doit conduire à modérer l’analyse. Les zones inondables Caractérisé par une forte densité de cours d’eau et par des sols imperméables, le territoire de Limoges Métropole est exposé aux aléas de débordement des cours d’eau. La carte des zones inondables ci-dessous s’appuie sur les Plans de prévention du risque inondation adoptés par les communes. Carte 1 : Zones inondables de Limoges Métropole (Explicit, GASPAR) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [25] Les communes pour lesquelles le risque inondation est le plus fort sont les communes de Limoges et Condat-sur-Vienne, qui ont respectivement adopté 4 et 3 Plans de prévention des risques inondation. Les changements climatiques en cours sont susceptibles d’augmenter les épisodes de fortes précipitations. Ces épisodes peuvent ensuite entrainer des crues. Pour limiter le risque de crues, plusieurs actions préventives peuvent être mises en place comme l’entretien des cours d’eau et la préservation des ZEC (Zones d’Expansion des Crues). Ces zones permettent de limiter l’impact des crues. Le maintien de ces zones hors urbanisation permet de limiter le risque d’inondations sur le territoire. Les eaux souterraines Les eaux souterraines s’infiltrent dans le sol et circulent dans les couches géologiques perméables où elles sont stockées. Les réserves souterraines ainsi constituées, nappes superficielles ou profondes, jouent un rôle fondamental dans l’alimentation des rivières en période de basses eaux et dans l’approvisionnement des activités humaines (irrigation, production d’eau potable). Les piézomètres sur le bassin de la Vienne, qui permettent de mesurer la hauteur des nappes d’eau, sont tous situés sur la partie aval de la rivière, en Poitou-Charentes. Alors qu’{ partir de mi-2006 les hauteurs de nappes se stabilisaient voire augmentaient, l’année 2009 a marqué un retour à une tendance de diminution des niveaux moyens des nappes souterraines. Les variations de niveaux des nappes sont liées aux variations de pluviométrie été-hiver. Les sols se rechargent en eau au cours de la saison hivernale à une double condition : la régulation des prélèvements et une hydrologie annuelle satisfaisante (le rechargement des nappes est ainsi retardé suite à une période de sécheresse). Sur le territoire de la Communauté d’agglomération de Limoges Métropole – en amont du Bassin de la Vienne – les systèmes aquifères sont composés de formations cristallines. Ces formations sont de faibles capacités mais bien adaptées aux besoins diffus des zones rurales : l’alimentation en eau est principalement assurée par les zones superficielles. Ces eaux superficielles sont particulièrement vulnérables aux périodes de sécheresse. Il n’y a pas de réel suivi quantitatif opéré sur les ressources en eau superficielles exploitées pour l’alimentation en eau du territoire de Limoges Métropole mais la fréquence de l’observation de périodes de tensions sur ces ressources est une réalité pour le territoire. L’assèchement des réservoirs d’eau de surfaces qui s’observe aujourd’hui avec une fréquence des étiages sévères de plus en plus importante pourrait se renforcer d’après les projections climatiques locales. Dans le même temps, et du fait d’une même évolution projetée du climat, pourraient s’intensifier les conflits d’usage de l’eau avec un accroissement des prélèvements industriels et pour l’irrigation. L’irrigation des surfaces agricoles est une pratique peu répandue sur le territoire de Limoges Métropole, qui ne compte que trois points de prélèvements pour l’irrigation : l’un est situé sur la commune du Vigen, un autre sur la commune de Panazol et le troisième à Verneuil-sur-Vienne. Le graphique ci-après présente le pic de prélèvements en 2003, année caniculaire marquée par une Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [26] sécheresse importante, et permet d’illustrer l’impact que pourrait avoir sur la gestion locale des ressources d’eau une politique de développement de l’irrigation. 22 000 21 000 21 200 mètres cubes d’eau ont été prélevés pour l’irrigation en 2003, un volume 31% plus important que la moyenne de prélèvement sur la période 1999-2002. 20 000 19 000 18 000 17 000 16 000 15 000 14 000 1999 ii. 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Source : Explicit d’après l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne Biodiversité en milieux aquatiques et espèces envahissantes Biodiversité en bord de cours d’eau Le problème posé par les espèces envahissantes est une atteinte directe à la biodiversité : de nombreuses espèces envahissantes sont très compétitives et ont tendance à évincer les plantes et animaux indigènes, soit par prédation directe, soit en leur transmettant des parasites ou maladies, soit, enfin, en les privant totalement du milieu qui leur est indispensable (oxygène, lumière, nourriture, habitats privilégiés, etc.). Les espèces végétales les plus fréquemment rencontrées sont les Jussies – qui recouvrent les plans d’eau – et la renouée du Japon (notamment à Limoges Métropole) – qui forme des massifs compacts sur les talus et bords de rivière, excluant tout autre végétal, et sécrète des substances toxiques. Les deux espèces animales envahissantes les plus répandues sont les ragondins – espèce nuisible qui contamine le bétail – et les écrevisses américaines – prédatrices des poissons. Le grand cormoran, espèce autochtone très présente dans le bassin de la Vienne, est une espèce animale envahissante problématique et différentes mesures de contrôle de la population de cormorans ont été définies par les autorités. Zones humides Les zones humides constituent un élément majeur de la richesse naturelle du Limousin où de très nombreuses rivières prennent leur source. Elles sont, dans leurs différentes formes, les milieux les plus représentés dans l’inventaire des Zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) (cf. Paysages et biodiversité). La vulnérabilité des zones humides est grande et leur disparition comme leur raréfaction provoquent d’importants problèmes socio-économique (activités) et écologiques (préservation des ressources et écosystèmes). Le socle cristallin de la région Limousin réduit les potentiels de stockage des eaux de pluies dans les nappes profondes. Les sols peu profonds et le socle imperméable favorisent les écoulements Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [27] de surface, qui font apparaître de nombreux petits cours d’eau en surface. L’inondation de ces zones est quasi-permanente suivant les conditions pluviométriques. La Communauté d’agglomération de Limoges Métropole a dirigé en 2007-2008 un état des lieux et diagnostic des zones humides de son territoire4. Cette étude présente les principaux enjeux qualitatifs et quantitatifs pour le maintien des zones humides. Carte 2 : Zones humides de Limoges Métropole (Aqua Concept Environnement) 4 Aqua Concept, Les zones humides de Limoges Métropole : Etat des lieux et diagnostic, Août 2008. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [28] Au total, 2 724 hectares de zones humides ont été répertoriés sur le territoire étudié en 2008 (les 18 communes de Limoges Métropole, Couzeix, Chaptelat et Saint-Jouvent), ce qui représente 5,1% de la superficie totale du territoire. Les zones humides assurent plusieurs fonctions diverses pour la qualité des ressources naturelles du territoire : Fonction hydrologique. Les zones humides assurent un stockage temporaire des eaux et permettent l’étalement du débit d’une crue dans le temps. La rétention d’eau dans les zones humides permet une recharge des nappes et le soutien des étiages. Rôle épurateur. Les zones humides réduisent les volumes de matériaux solides issus des produits d’érosion du bassin versant et des lits lors des crues. Rôle écologique. Les zones humides contribuent à maintenir la diversité des écosystèmes et les habitats pour les amphibiens, oiseaux et peuplements piscicoles. La situation des zones humides évolue très vite. Elles peuvent subir des atteintes provenant de multiples sources de pression anthropiques : L’extension des zones urbaines : l’urbanisation est une cause importante de réduction des zones humides. Le développement des zones urbaines imperméabilise les sols, ce qui peut accroître les débits de crues et favoriser les inondations en aval. L’extension du tissu urbain (et de l’artificialisation des espaces végétalisés) peut par ailleurs générer des pollutions multiples de la ressource en eau, se traduisant par la disparition des espèces spécifiques au profit d’espèces opportunistes résistantes. Le maillage du territoire par les infrastructures : le maillage du territoire par les infrastructures linéaires (routes, autoroutes,) est une cause importante de fragmentation de l’espace et de déconnexion des différentes unités fonctionnelles des écocomplexes. Le boisement de zones humides : il conduit à un assèchement des zones humides et à une réduction de leur fonction de soutien d’étiage. Le drainage pour les activités agricoles ou le remblaiement des bords de cours d’eau D’autres types de pression peuvent également menacer le maintien des zones humides : L’extension des espèces végétales invasives : elle peut entraîner une disparition ou la réduction des potentiels écologiques des zones humides (c’est le cas, par exemple, de la renouée du Japon qui colonise le bassin de la Vienne et celui de l’Aurence) Les incendies de forêt : ils affectent les milieux les plus fragiles tels que les zones humides temporaires. Les usages : certains usages exercés sur les zones humides ont entraîné une altération de leur qualité, notamment la fréquentation des sites pour le développement d’une activité de loisirs (occasionnant des dérangements de la faune et une altération des habitats les Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [29] plus fragiles) et les modes de gestion piscicole (l’empoissonnement de plans d’eau est souvent préjudiciable au maintien de la batrachofaune.) Le renforcement de la pression anthropique combiné à la modification des conditions climatiques (sécheresse, modification du régime des précipitations) pourraient contribuer à la fragilisation de l’écosystème de ces zones. iii. Paysages et biodiversité Le territoire de Limoges Métropole se situe au carrefour de trois unités paysagères : les monts de Blond au NordOuest, les Monts d’Ambazac et de SaintGoussaud au Nord-Est et, au Sud et { l’Est, les collines limousines de Vienne-Briance. Les paysages de l’agglomération sont en grande partie homogènes, formés de campagnes agricoles. Le territoire de la Communauté d’agglomération de Limoges Métropole abrite 10 Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF). Ces ZNIEFF indiquent des zones géographiques possédant de fortes capacités biologiques et un bon état de conservation. 9 des 10 ZNIEFF du territoire sont de ‘Type 1’, les plus riches sur le plan de la biodiversité. La richesse paysagère, les sites naturels, ZNIEFF et zones Natura 2000 constituent le patrimoine naturel du territoire ; il est une ressource précieuse pour l’attractivité touristique du territoire (le tourisme de nature est une orientation touristique importante pour le Limousin). Ce patrimoine naturel sera affecté par les changements des aléas climatiques { l’échelle locale dans un contexte de changement du climat local (évolution des températures, de la pluviométrie et de l’humidité des sols et de l’air, etc.). Même s’il est très difficile d’évaluer le lien direct entre évolutions du Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [30] climat et évolutions de la biodiversité – celle-ci étant soumise à des pressions multiples telles que l’artificialisation et le fractionnement des milieux, les pollutions, etc. – les évolutions des aléas climatiques conduiront à un accroissement des pressions sur les espèces floristiques et sur les habitats et l’environnement de la faune locale. Le changement climatique devrait notamment, à moyen et à long terme, provoquer le déplacement de certaines plantes et espèces animales vers des zones climatiques plus propices à leur développement. Carte 3 : Zones remarquables et zones protégées de Haute-Vienne (Explicit, CARMEN) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [31] iv. Zones forestières Le territoire de l’agglomération de Limoges Métropole est recouvert de 9 900 hectares de forêts, dont 74% de feuillus selon l’IFEN (2006). L’espace boisé représente donc 21 % de la surface du territoire. Les massifs forestiers vont devoir faire face à des modifications certaines des conditions climatiques. Tout d’abord, l’augmentation de la concentration en CO2 dans l’atmosphère devrait entraîner une croissance de la masse forestière. Cependant, la croissance de la forêt peut être retardée ou inversée par des périodes de stress hydriques liées à des épisodes de sécheresse ou bien par des dépôts d’ozone. Le projet CARBOFOR, projet de recherche de l’INRA Nancy (Badeau et al., 2004) a étudié la question de l’adaptation des essences forestières aux changements climatiques et la répartition possible des espèces. Divers groupes d’espèces forestières ayant des exigences assez homogènes et que l’on trouve fréquemment associées sur un même territoire ont été définis : 3 groupes d’espèces montagnardes (3 nuances de bleu) ; 3 groupes d’espèces de plaine et de colline du Sud-ouest (marron), du Centre-Ouest (jaune) et du Nord-est (vert) ; et le groupe des espèces méditerranéennes (rouge). Figure 11 : Evolution de la localisation des groupes biogéographiques d’essences forestières selon le scénario B2 (INRA) L’augmentation des températures devrait entrainer une migration des espèces vers le nord ou vers les zones situées en altitude. Ces changements climatiques rapides suscitent de nombreuses interrogations : les espèces et leurs écosystèmes pourront-ils s’adapter aussi rapidement ? 2 000 ans ont été nécessaires aux chênes pour traverser le France du sud au nord il y a 10 000 ans. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [32] Les cartes suivantes présentent l’évolution de la répartition de deux espèces forestières : le hêtre et le pin maritime. Le rouge est le domaine de parfaite adaptation des espèces et le bleu celui des marges de cette adaptation, le jaune et le vert étant des situations intermédiaires. Figure 12 : Evolution de la répartition du Hêtre et du Pin maritime entre 2005 et 2100 (INRA) Le Département de la santé des forêts du Ministère de l’agriculture et des forêts a étudié l’impact de la sécheresse-canicule de l’été 2003 sur le douglas, espèce forestière fortement implantée dans le Limousin5. D’après le Mémento de la forêt et du bois du Limousin, le douglas représente 69% des 15 600 ha boisés ou reboisés sur la période 2000-20106. Les peuplements en Limousin semblent avoir moins souffert des fortes chaleurs que dans d’autres régions où les arbres souffraient déj{ d’une alimentation en eau limitée. Seuls 1,3% des surfaces ont connu un taux de mortalité de plus de 40% ; le rôle des zones humides a été essentiel sur ce point. 5 6 DSF, Le douglas face à la sécheresse-canicule de l’été 2003 AGRESTE, Mémento de la forêt et du bois (2011) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [33] Par ailleurs, le changement climatique peut favoriser le développement des maladies forestières : des recherches ont été ainsi effectuées sur la remontée vers le nord de la chenille processionnaire du pin ou le développement de l’encre du chêne, champignon d’origine tropicale qui déprécie le bois produit. L’INRA a simulé l’évolution de la carte des zones identifiées { risque pour la maladie de l’encre du chêne { partir des simulations Arpèges-climat de MétéoFrance et dans le cadre de la réalisation du scénario modéré B2 (+2,5°C en 2100). 3 zones à forts risques, caractérisées par des hivers doux, émergent : le pourtour méditerranéen, le Sud Ouest et l’ensemble BretagneCotentin. La Haute-Vienne se situerait, d’après les projections de l’INRA, dans une zone de risque modéré de présence de la maladie de l’encre du chêne. Figure 13 : Carte des risques de présence de la maladie de l’encre du chêne : situation 19681998 et prédiction 2068-2098 (INRA) 1.4.3. La vulnérabilité des activités i. L’agriculture Les modifications liées au changement climatique (augmentation des températures moyenne de l’air, amplitude thermique plus forte, événements climatiques extrêmes, disponibilités de la ressource en eau) auront un impact sur les activités agricoles du territoire. Un impact à la fois sur la quantité et la qualité des productions agricoles et sur l’environnement (sols, eau, biodiversité, etc.). Le retour d’expérience de la canicule d’août 2003 donne des indications sur la vulnérabilité du secteur aux effets du changement climatique comme la perte d’une production fourragère de 20% à 30% au niveau national. Les effets du changement climatique au niveau local sont encore incertains. Actuellement, les projections se font à une échelle plus globale. La modification du climat aura des conséquences pour les activités d’élevage et pour les activités de culture. L’élevage Les effets indirects des aléas climatiques sur les activités d’élevage, par exemple l’impact des épisodes de sécheresses et inondations qui fragilisent la disponibilité des fourrages et pâturages Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [34] et donc l’alimentation du bétail, sont bien connus. Le début d’année 2011 offre une illustration de cette problématique, confrontant des éleveurs { la nécessité d’arbitrer entre abattre le bétail des filières viandes et laitières ou augmenter les coûts de son alimentation (et donc les coûts de production). Le changement climatique pourrait également avoir un impact direct sur le bétail, sur la santé et la performance animale (le développement du bétail dans un contexte de diminution des ressources fourragères). Le développement de parasites et maladies devrait être favorisé par des hivers plus doux et plus humides ; il pose la question des interactions entre les populations et des mécanismes de résistance/tolérance aux agents pathogènes. Les fortes chaleurs ont également un impact direct sur la mortalité des animaux fragiles et la reproduction animale qui peuvent durer jusqu’{ 2 mois après une période caniculaire (les embryons sont très sensibles aux chocs thermiques). Les enjeux de l’adaptation des activités d’élevage aux changements du climat sont globalement méconnus et la recherche dans ce secteur doit progresser. Les cultures La modification du régime des précipitations influencera l’humidité des sols et la disponibilité en eau pour les cultures. L’augmentation de la température moyenne à la surface du globe devrait raccourcir les cycles de végétation et impacter positivement la production céréalières. Des changements de calendriers agricoles sensibles sont déjà constatés en France : anticipation de la floraison du pommier dans le Sud-Est, anticipation des dates de vendange, accélération des premières coupes de prairie. Le projet CLIMATOR7 co-piloté par l’Agence nationale pour la recherche (ANR) et par l’INRA a réalisé une simulation de l’impact du changement climatique sur les principales activités culturales et forestières dans un futur proche (2020-2049) et lointain (2070-2099). 5 thématiques ont été étudiées : le timing, l’eau, la santé des plantes, la matière organique et le rendement. Les simulations pour la région Centre-Est (Rhône-Alpes, Auvergne, Limousin) ont été réalisées pour deux sites représentatifs de cet ensemble : Clermont-Thieix et Saint-Etienne, les deux sites étudiés les plus arrosés dans le passé récent et qui le resteraient d’après les simulations. Un impact potentiel majeur pour le territoire limousin a été identifié : une opportunité créée par l’accroissement du rendement des prairies, déj{ très élevé aujourd’hui. L’augmentation des températures de l’air pourrait permettre la récolte d’une coupe supplémentaire et l’augmentation des productions de fin d’hiver et de début de printemps dans un futur lointain. Deux impacts non modélisés pourraient réduire les rendements des activités de culture : 7 L’apparition de nouvelles espèces d’insectes et l’expansion d’espèces endémiques pourrait créer un risque de pertes de récolte Les terres plus humides en hiver ou au début du printemps, du fait des pluies plus abondantes, pourraient devenir moins praticables, ce qui compliquerait le travail du sol. Climator, Livre Vert du Projet, ANR-INRA (2010) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [35] ii. Cadre bâti, urbanisme et infrastructures La question de la prise en compte des enjeux d’adaptation aux changements du climat local dans la politique d’urbanisme et la stratégie de construction d’infrastructures doit prendre en compte un élément caractéristique du secteur : la durée de vie des ouvrages, ceux-ci étant construits pour être exploités sur une période de 100 à 150 ans. Cet élément amène une interrogation essentielle pour le secteur : comment élaborer et construire un bâtiment (une infrastructure) adapté à une large gamme de climats, celui d’aujourd’hui, celui de 2150 et ceux intermédiaires ? Les mouvements de terrains Les changements des températures, des précipitations et les évènements climatiques extrêmes entraîneront une perturbation de la stabilité des sols qui aura un impact direct sur le cadre bâti et le milieu urbain (par exemple les fissures de bâtiments sous lesquels le sol a bougé) ou indirect, en impactant les éléments extérieurs situés à proximité des bâtiments et infrastructures (par exemple les chutes de blocs, chutes d’arbres, glissements de terrain). L’évolution des équilibres climatiques pourraient causer une augmentation des mouvements de terrain, qu’ils soient rapides et discontinus comme les effondrements de cavités souterraines, glissements de terrain, chutes de blocs et éboulements, ou lents et continus comme le retrait-gonflement des argiles (cf. paragraphe suivant), tassement et affaissement des sols. Ces mouvements se traduisent par l’endommagement, voire la destruction de l’infrastructure ou du bâtiment, pouvant entraîner une coupure d’accès et la paralysie d’une zone ou encore des pollutions locales (lorsqu’ils concernent une station d’épuration ou une usine chimique par exemple). Les risques de dommages et de perturbations sur les ouvrages et infrastructures (réseaux de transports, ouvrages d’art, bâtiments) pourraient augmenter du fait de la perturbation du cycle de l’eau et des conditions de température ou de vent. Les modifications de la teneur en eau ou de la température des sols pourraient notamment être { l’origine d’une recrudescence des aléas gravitaires (glissements de terrain, chutes de blocs). Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [36] Carte 4 : Les cavités souterraines sur le territoire de Limoges Métropole (Explicit, BRGM) Le retrait-gonflement des argiles Le phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA) peut avoir un impact destructeur sur les bâtiments et infrastructures en surface. Le retrait-gonflement, en réalité un phénomène en deux temps, est provoqué par deux types de facteurs : des facteurs de prédisposition et des facteurs de déclenchement : Les facteurs de prédisposition induisent l’aléa mais ne suffisent pas { le déclencher. Ils sont fixes ou évoluent très lentement. On distingue les facteurs internes (liés à la nature du sol) des facteurs d’environnement (qui caractérisent plutôt le site). Les facteurs de prédisposition sont la nature du sol (composition minéralogique), le Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [37] contexte hydrogéologique (teneur en eau et degré de saturation), le contexte géomorphologique (topographie de surface), la végétation (présence de racines profondes qui soutiennent l’eau du sol) et des défauts de construction des bâtiments. Les facteurs de déclenchement sont ceux dont la présence provoque le phénomène de RGA mais qui n’ont d’effet significatif que s’il existe des facteurs de prédisposition. La connaissance des facteurs de déclenchement permet de déterminer l’occurrence du phénomène (l’aléa retrait-gonflement et non plus la susceptibilité à cet aléa). Les facteurs de déclenchement sont les phénomènes climatiques (précipitations et évapotranspiration (transfert d’eau du sol vers l’atmosphère par évaporation des eaux de surface et transpiration des plantes)) et les facteurs anthropiques (du type modification des écoulements superficiels dans le cadre de travaux de drainage qui modifient les teneurs en eau de la tranche superficielle des sols). Le phénomène de retrait-gonflement des argiles illustré (Source : BRGM) Le retrait-gonflement de sols argileux engendre chaque année des dégâts particulièrement coûteux, principalement dans le bâti individuel. Les dérèglements climatiques (notamment les aléas température, pluviométrie et vent) auront des impacts sur les facteurs déclenchant du phénomène de RGA. Les sécheresses estivales risquent de devenir plus fréquentes et d’entraîner une augmentation du nombre des années présentant une sinistralité importante. Par ailleurs, la profondeur de terrain affectée par les variations saisonnières de teneur en eau ne dépasse guère 1 à 2 m sous les climats tempérés, mais peut atteindre 3 à 5 m lors d’une sécheresse exceptionnelle. L’augmentation prévisible de la durée et de l’intensité des épisodes de sécheresse risque d’entraîner un accroissement de la profondeur du sol affectée par le phénomène du retrait-gonflement des argiles. Le département de Haute-Vienne est parmi les départements français les moins affectés par le phénomène : une seule commune du territoire a été reconnue une fois en état de catastrophe naturelle. Selon le BRGM8, 37% du territoire de Haute-Vienne est en niveau d’aléa faible et 63% de la surface du département n’est a priori pas concerné par le phénomène (0,06% du territoire est en aléa moyen). 8 BRGM, Cartographie de l’aléa retrait-gonflement des sols argileux dans le département de Haute-Vienne, Juin 2010 Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [38] Carte 5 : L’aléa retrait-gonflement des argiles en Haute-Vienne (BRGM) Il est important de noter que l’état d’humidité des argiles est une caractéristique très localisée, dépendant notamment du niveau des nappes d’eau souterraines et de la proximité d’espèces végétales identifiées (certaines ont une capacité d’absorption d’eau par les racines ou, { l’inverse, de transpiration très fortes) ; il doit donc être estimé { l’échelle infra-pavillonnaire. L’aléa est par conséquent très complexe à diagnostiquer à grande échelle et difficile à cartographier. Le risque l’est plus encore puisqu’il dépend de caractéristiques des fondations des bâtiments (plus elles sont profondes et moins le bâtiment est exposé au phénomène ; c’est la raison pour laquelle les maisons individuelles sont plus touchées que les immeubles collectifs). Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [39] iii. Les îlots de chaleur urbains Le milieu urbain est { l’origine de processus radiatifs, thermiques, dynamiques et hydriques qui modifient le climat de la ville. La couche superficielle du sol, avec la présence plus ou moins importante de surfaces végétales ou d’eau, les activités humaines qui induisent des rejets de chaleur et de polluants, et la structure urbaine, avec des matériaux de construction et une certaine morphologie du cadre bâti, sont les principaux facteurs de cette modification. Le climat urbain a pour effet principal de limiter la baisse des températures durant la nuit, baisse qui, lors de vagues de chaleur, est essentielle pour permettre aux organismes humains une récupération des fortes chaleurs du jour. Le phénomène des îlots de chaleur urbains apparaît en cas d’épisodes de fortes chaleurs et lorsque le réchauffement de l’air en centre-ville est accentué par l’énergie calorifique générée par le fonctionnement urbain et les activités humaines (la hausse de la température dans le centre de la ville est, dans un tel contexte, supérieure à celle dans la périphérie). Le diagnostic du phénomène d’îlots de chaleur urbains est nécessairement très local : il dépend d’éléments tels que l’albédo, qui dépend des matériaux utilisés pour l’aménagement urbain, de la morphologie urbaine et de la circulation du vent en milieu urbain, de la hauteur des bâtiments, etc. de nombreux éléments qui ne peuvent être analysés { l’échelle du département qui est celle de l’étude. Les principaux éléments caractérisant un îlot de chaleur urbain sont l’albédo, l’aspect ratio (profondeur du canyon urbain), l’orientation des rues, la surface imperméable, la surface végétalisée et les intrants (chaleur émise par les transports motorisés). Les zones urbanisées du territoire sont des zones potentielles de développement des îlots de chaleur. L’analyse de l’occupation du sol et de l’artificialisation du territoire fournit les premiers éléments d’identification des zones { risques. A titre d’illustration, la cartographie des températures moyennes sur le territoire du Grand Lyon produite, { l’échelle des quartiers, par l’Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise est reproduite ci-dessous. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [40] Carte 6 : Occupation du sol sur le territoire de Limoges Métropole (Explicit, Corine Land Cover) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [41] Carte 7 : Température moyenne dans les quartiers de l’agglomération du Grand Lyon le 21 juillet 2001 (Agence d’urbanisme du Grand Lyon) iv. Energie L’activité du secteur énergétique est particulièrement sensible aux conditions climatiques. Ce sont en effet des paramètres climatiques qui créent des besoins à satisfaire par la consommation d’énergie (température et besoin de chaleur ou de froid, ensoleillement et besoin de lumière, volume de précipitations et besoin de pompage d’eau, etc.). Ces paramètres définissent par ailleurs le contexte opérationnel du fonctionnement de nombreuses unités de production d’énergie et leur efficacité (température des cours d’eau et satisfaction du besoin de refroidissement, volume de précipitations et production hydroélectrique, etc.). Enfin, les lignes de transports et de distribution d’énergie sont sensibles au gel, vents forts et fortes pluies, et la stabilité des sols est essentielle à la sécurité des réseaux. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [42] L’équilibre offre-demande d’énergie Les aléas identifiés influençant l’équilibre offre-demande d’électricité en France sont les suivant : La température : les températures d’hiver influencent la demande de chauffage et donc de consommation de combustibles et d’électricité ; les températures d’été augmentant la consommation et la puissance demandée d’électricité pour les besoins en climatisation ; l’augmentation de la température des cours d’eau dégrade l’efficacité des systèmes de refroidissement des centrales électriques thermiques et nucléaires ; L’hydraulicité : le niveau d’eau des barrages et des rivières dépend du climat (via les précipitations et les températures notamment) et impacte la production hydro-électrique (volume de productible pour les installations) ; L’impact du vent sur le volume annuel de production éolienne n’a pas été mesuré mais il est de plus en plus important pour le système électrique du fait de l’accélération du développement de l’éolien ; Ces aléas sur le volume annuel se traduisent également par un impact en puissance, c’est-à-dire ponctuel ou instantané, à des niveaux qui peuvent être élevés sur un plan local. Le territoire de Limoges Métropole est principalement concerné par l’évolution de la demande de chauffage avec les températures, les autres aléas ne le concerne qu’indirectement – l’équilibre productionconsommation du système électrique est défini { l’échelle nationale (réseau de transport d’électricité) et le territoire ne compte pas de grande installation de production électrique connectée au réseau. L’activité de toute la filière du gaz est très étroitement liée à la température : son niveau moyen a des impacts sur les volumes consommés et la gestion des approvisionnements ; les valeurs extrêmes influencent le dimensionnement du réseau de transport-distribution et des équipements de stockage. Le cas des autres énergies de production individualisée de chaleur (bois, fioul domestique, GPL, charbon) est similaire à celui du gaz, les contraintes de réseau de distribution en moins. Les phénomènes climatiques extrêmes (feux de forêt, vents violents) peuvent également impacter la ressource bois et causer des dégâts dans les raffineries. L’augmentation de l’ensoleillement pourrait créer une opportunité pour la production locale d’énergie : l’amélioration du rendement des installations solaires photovoltaïques et thermiques. Le transport et la distribution d’énergie La réflexion sur les impacts du changement climatique sur les infrastructures de transport d’énergie doit prendre l’angle de l’impact des évènements climatiques extrêmes ; c’est sur la base de l’étude de ces évènements qu’est dimensionné le réseau (il est par exemple élaboré pour assurer le transport d’énergie { la pointe de consommation). Les réseaux de transport d’énergie doivent protéger d’une rupture d’approvisionnement très coûteuse. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [43] Le Bilan Sûreté 2003 publié par RTE ne rapporte aucun impact direct de l’épisode caniculaire d’août 2003 sur les lignes de transport électrique – les fortes chaleurs enregistrées n’ont provoqué aucune rupture de l’approvisionnement électrique. Le réseau électrique enterré est toutefois sensible aux fortes chaleurs : la chaleur de la terre fragilise les lignes enterrées ; le réseau aérien torsadé est moins sensible aux températures élevées. Par ailleurs le réseau torsadé aérien permet une intervention plus rapide en cas d’incident et donc un temps de coupure inférieur { celui nécessaire { l’intervention sur une ligne enterrée. Les principales contraintes sur les lignes de distribution électrique sont causées par les chutes d’arbre lors de tempêtes (coupures) et périodes de froid, neige collante et givre (problèmes de tension et coupures). En 2009, la tempête Klaus qui a frappé le Sud-Ouest avec des vents dépassant les 160 et 170 km/h dans l’intérieur des terres, a été { l’origine de 400 courts-circuits fugitifs, essentiellement du fait de chute d’arbres. 1,7 millions de foyers se sont retrouvés sans électricité le 24 janvier 2009, 75% de ces foyers avaient été reconnectés 2 jours plus tard et les derniers ménages ont été réalimentés à partir du 3 février. Le Limousin a particulièrement été frappé par les dernières tempêtes. Il convient toutefois de préciser que le nombre de courtscircuits consécutifs à la tempête représente moins de 9% des courts-circuits de l’année alors que la foudre est chaque-année responsable de plus de 50% des courts-circuits (57% en 2009). Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [44] Figure 14 : Nombre de points de connexion privés d’électricité à la suite des tempêtes de 2009 et 2010 (CRE, ERDF) Le risque inondations est un risque important pour les installations de stockage et pour le réseau gaz et le réseau électrique enterré. L’apparition d’une crue centenaire aurait des impacts importants sur les réseaux et nécessiterait le délestage de zones importantes du territoire seineet-marnais. Une étude a été réalisée par ERDF en partenariat avec les pouvoirs publics sur l’impact d’une crue centenaire sur les réseaux. v. L’activité touristique Les impacts du changement climatique sur l’activité touristique { Limoges Métropole pourraient être d’ordres divers. Le territoire pourrait bénéficier d’un report du tourisme urbain et ‘de plage’ Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [45] vers un tourisme ‘de nature’. Dans le même temps, le changement climatique devrait amener une modification des paysages et des richesses naturelles du territoire ou de ses activités agricoles et agro-artisanales. Dans son rapport sur le changement climatique, les coûts des impacts et les pistes d’adaptation de 2009, l’ONERC a approché la notion d’impact du changement climatique sur le confort des touristes grâce { l’analyse de l’indice climato-touristique (ICT) de Mieczkowski. La première étape a consisté { analyser sur la base de l’ICT « l’attractivité climatique» moyenne des mois de juillet et août sur la période de référence 1980-2000. La figure suivante présente le résultat de ce calcul. Figure 15 : ICT des mois de juillet et août sur la période 1980 - 2000 (ONERC) On peut constater que l’Ouest de la France offre sur la période de référence des conditions climatiques favorables au tourisme estival. La Figure 16 propose un calcul de l’ICT dans un scénario de changement climatique (scénario A1B du GIEC). Le changement climatique devrait se traduire en été par une dégradation des conditions climatiques attractives pour le tourisme sur le territoire du Grand Sud Ouest et de la Haute-Vienne. L’impact réel des variations du climat dépend toutefois de paramètres très locaux (notamment la présence de sources de fraîcheur, zones humides ou zones forestières) et doit être étudié à une échelle plus locale. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [46] Figure 16 : ICT des mois de juillet et août sur la période 2080 – 2100 sous le scénario A1B (ONERC) Aussi, le climat n’est pas l’unique facteur de décision de destination touristique. Des paramètres tels que la variété de l’offre culturelle et de loisirs, la présence d’infrastructures adaptées et le prix ne sont pas considérés dans l’indicateur ci-dessous. Figure 17 : Les impacts croisés du changement climatique sur l’activité touristique Milieux naturels Réduction de la « valeur spécifique » des paysages, fragilisation du tourisme « nature » Biodiversité / Forêts / Plans d’eau Pression sur la qualité et sur la quantité de la ressource Confort thermique Eau Eaux de loisirs et consommation d’eau Pressions sur l’agriculture et réduction de la valeur ajoutée de l’agriculture locale Agriculture et terroir Patrimoine gastronomique TOURISME Fraîcheur climatique Patrimoine touristique Dégradation du confort thermique dans les parcs de loisirs et cités touristiques Risques de dommages directs sur le patrimoine à valeur touristique Monuments et bâtiments historiques Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [47] Carte 8 : Les Sites de valeur en Haute-Vienne et à Limoges Métropole (Explicit, CARMEN) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [48] 1.4.4. La vulnérabilité des populations Les risques directement liés au climat dans le secteur des populations concernent la Santé et sont très hétérogènes { l’échelle locale : il s’agit principalement de la surmortalité caniculaire (hyperthermie), de la pollution { l’ozone et du risque de développement des maladies infectieuses. i. La surmortalité caniculaire Une étude des six vagues de chaleur identifiées entre 1971 et 20039 identifie « une bonne concordance » entre les variations quotidiennes des températures et de la mortalité pour chacune des vagues de chaleur. L’auteur observe ainsi qu’« une augmentation progressive de la mortalité tant que les températures [sont] très élevées [est] suivie d’une baisse rapide dès que la température [redevient] proche de la température de référence. » En règle générale, les études portant sur la surmortalité lors des épisodes de forte chaleur cherchent { savoir si la forte surmortalité lors des vagues de chaleur est suivie d’une surmortalité résiduelle dans les jours ou semaines qui suivent les vagues de chaleur ou si, au contraire, une sous-mortalité secondaire et transitoire, révélant un éventuel phénomène d’anticipation de la mortalité (appelé « effet moisson »), peut être observée. D’après l’étude citée précédemment, « l’existence d’un effet moisson n’est ni systématique ni quantitativement significative. » La canicule de l’été 2003 a été un des évènements marquant de la dernière décennie pour les professionnels de la Santé. Au cours de la première quinzaine d’août 2003 en effet, la vague de chaleur d’une durée et d’une intensité exceptionnelles (les températures minimales moyennes et maximales moyennes observées sur les 11 jours de la vague de chaleur (4-15 août) étaient respectivement de 20,0°C et 36,4°C) a entraîné un nombre de morts en excès estimé à environ 15 00010. 9 REY Grégoire, Surmortalité liée aux vagues de chaleur : facteurs de vulnérabilité sociodémographiques et causes médicales de décès, INSERM (2007) 10 Le Rapport ‘Surmortalité liée à la canicule d’août 2003’ de l’INSERM a calculé une mortalité « attendue » (valeur de référence) à partir notamment des nombres de décès des mois de juillet, août et septembre des années 2000 à 2002 et d’une estimation de la population (et de ses caractéristiques) en 2003. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [49] Figure 18 : Excès de décès observé quotidiennement pendant le mois d’août 2003 et relevé des températures maximales (trait plein) et minimales (trait en pointillé) (INSERM) Toutes les classes d’âge de la population n’ont pas été impactées de la même manière par l’épisode caniculaire de 2003 et la surmortalité a également varié en fonction du sexe (la surmortalité observée chez les femmes (70%) est ainsi sensiblement plus élevée que celle observée chez les hommes (40%)). Le degré d’urbanisation (défini selon la tranche d’unité urbaine) semble également jouer un rôle dans l’importance relative de la surmortalité dans les différentes régions françaises : la surmortalité, de +54% en moyenne nationale, a par exemple été moins importante dans les zones rurales, petites agglomérations et villes de moyenne et de grande taille (environ 40% en moyenne pour ces catégories d’unités urbaines) que dans la région parisienne (+151%). Les augmentations de mortalité les plus importantes ont été observées pour des causes de décès directement attribuables à la chaleur : déshydratation, hyperthermie, coup de chaleur (fièvre aigüe, perte de connaissance, choc cardio-vasculaire) ; viennent ensuite les maladies de l’appareil génito-urinaire et les maladies de l’appareil respiratoire. Aussi, l’analyse de l’effet cumulatif de plusieurs jours consécutifs d’exposition { des températures caniculaires chez les sujets de 75 ans ou plus a permis d’observer que plus le nombre de jours cumulés au-delà de 35°C a été élevé dans un département, plus la hausse du nombre de décès y a été forte. Enfin, il est important de noter que 42% des décès en excès sont survenus dans des hôpitaux, 35% à domicile, 19% dans des maisons de retraire et 3% en clinique privée. Les nombres de décès qui ont eu lieu à domicile et en maison de retraite ont été multipliés environ par 2 par rapport à leur valeur habituelle. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [50] Le Limousin a été particulièrement concerné par l’épisode caniculaire d’août 2003. Début août, les températures ont augmenté fortement et sont restées à un niveau particulièrement élevé pendant une dizaine de jours. Le taux de surmortalité fut très élevé pendant les jours les plus chauds : le ratio de mortalité a été 2 à 3 fois plus élevé que le ratio attendu entre le 8 et le 14 août. Figure 19 : Evolution du ratio de surmortalité et des températures maximales (trait rouge plein) et minimales (trait bleu en pointillé) au mois d’août 2003 en Limousin (INSERM) Les risques pour la santé liés { l’exposition de la population aux vagues de chaleur font intervenir de nombreux facteurs incluant les données climatologiques, l’existence éventuelle d’une pollution atmosphérique, les caractéristiques du micro-environnement urbain et des lieux de vie – et plus largement l’environnement économique et social des individus, leur état de santé et leur prise en charge médicale. La première des causes de surmortalité liées aux épisodes caniculaires qui pourrait être influencée { la hausse sous l’effet du changement climatique est le « coup de chaleur », caractérisé par une température corporelle supérieure { 40,6°C au moment du décès. Si l’on considère que les températures maximales enregistrées au mois d’août 2003 ont dépassé en moyenne de 2°C celles atteintes lors des trois étés les plus chauds précédents, la hausse anticipée des températures maximales des mois d’été invite { penser que le phénomène de « coup de chaleur » prendra de l’ampleur dans les décennies { venir. Les risques de déshydratation devraient augmenter de même. Les enjeux d’adaptation { une plus grande intensité et une plus grande fréquence des épisodes caniculaires sont particulièrement décisifs en milieu urbains denses où l’effet « îlot de chaleur urbain » peut constituer un facteur aggravant (cf. Cadre bâti, urbanisme et infrastructures). Zoom : Le Système d’alerte canicule et santé (Sacs) Le Sacs est fondé sur la surveillance d’un indicateur biométéorologique pouvant être lié { une forte surmortalité quotidienne en cas d’atteinte ou de dépassement de valeurs seuils, en tenant compte de certains critères qualitatifs (météorologiques, environnementaux, démographiques). Cet indicateur, définis par l'InVS et Météo-France, est la moyenne sur trois jours des températures Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [51] minimales nocturnes (Tmin) et maximales diurnes (Tmax). Pour chaque département, deux seuils d'alerte (diurne et nocturne) ont été définis pour cet indicateur. Si les prévisions météorologiques indiquent un risque suffisamment élevé d’atteindre ou de dépasser ces seuils, l’InVS recommande d’activer le niveau de "mise en garde et actions" du PNC. D’autres paramètres sont également pris en compte dans la décision, par exemple l’intensité de la vague de chaleur, sa durée et son extension géographique. Le tableau ci-dessous présente quelques seuils { l’échelle du grand Sud-Ouest : Département Commune de référence Creuse Guéret Dordogne Périgueux Gironde Bordeaux Haute-Garonne Toulouse Haute-Vienne Limoges Source : InVS (2004) ii. Tmin 22 19 22 21 16 Tmax 33 35 36 38 36 Pollution { l’ozone L’ozone, polluant « secondaire » qui n’est pas rejeté directement dans l’atmosphère, est produit sous l’effet du rayonnement solaire à partir de polluants « primaires » par des réactions entre les oxydes d’azote (émis par les pots d’échappement de véhicules, centrales thermiques et procédés industriels) et les composés organiques volatils (hydrocarbures provenant de mauvaises combustions d’essence, peintures, colles, solvants, etc.). L’ozone est produit en l’absence de vent qui permettrait sa dispersion et sa production est renforcée par les fortes chaleurs. L’ozone ayant une durée de vie relativement longue, c’est un polluant qui voyage ; il constitue de ce fait une problématique régionale plus que locale. L’ozone est très présent autour des grandes agglomérations qui en fournissent les précurseurs mais peut, localement toucher des zones rurales en périphérie d’agglomération (circulation de masses d’air déplaçant les polluants primaires vers les zones rurales). Lors de l’épisode caniculaire de 2003, le Limousin a, comme la grande majorité des régions françaises, dépassé les seuils de recommandations et d’information de la procédure d’alerte nationale à la pollution atmosphérique11. Alors que, depuis la création du réseau de mesure fin 1996, une seule mesure de relevé horaire avait dépassé le seuil des 180 µg/m3 en ozone (niveau d’information et de recommandation), 33 heures de dépassements cumulés de ce seuil ont été observées { l’été 2003 en Limousin. Le taux record relevé au Palais-sur-Vienne, de 214 µg/m3 en ozone s’est approché du premier seuil du niveau d’alerte (240 µg/m3 dépassé pendant 3 heures consécutives). Les pollutions par l’ozone, puissant oxydant, impactent { la fois les végétaux et l’homme. A haut degré de concentration, l’ozone conduit { la formation de nécroses sur les feuilles et les aiguilles d’arbres forestiers mais également sur de nombreux végétaux des milieux naturels. La 11 LIMAIR, Pollution par l’ozone : une situation exceptionnelle en août (2003) Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [52] photosynthèse des végétaux soumis à ces concentrations peut diminuer et provoquer à terme des baisses de rendement pour les cultures, voire des dépérissements des écosystèmes. Les conséquences de la pollution par l’ozone, gaz irritant qui pénètre facilement jusqu’aux voies respiratoires les plus fines, sur la santé dépendent de son degré de concentration, de la quantité inhalée et de la durée d’exposition. Selon la sensibilité de chacun, il peut provoquer des irritations des yeux, de la gorge et du nez, de la toux, des essoufflements, voire un inconfort thoracique ou une gêne douloureuse en cas d’inspiration profonde. Le changement climatique est susceptible d’augmenter le niveau de concentrations d’ozone troposphérique { niveau d’émissions de polluants précurseurs constant12. Cela entrainerait une augmentation de la morbidité et de la mortalité. iii. Les maladies infectieuses L’évolution des principaux aléas climatiques (températures et pluviométrie) devraient impacter les maladies infectieuses, leur apparition, leur développement et leur transmission. L’ampleur comme la rapidité du phénomène { l’échelle locale sont sujets { de nombreuses incertitudes mais les experts conçoivent que les cycles de circulation des agents pathogènes puissent être affectés par des variations interannuelle et interdécennale. Le phénomène El Niño par exemple laisse observer une variation de la fréquence de certaines maladies infectieuses. Les cinq types de maladies infectieuses devraient être impactés différemment par le changement climatique. Les maladies vectorielles (le chikungunya et le paludisme par exemple) sont transmises par des vecteurs (animaux { sang froid, insectes, acariens) dont l’abondance et la répartition géographique sont sensibles aux conditions climatiques et évoluent avec elles. Les zoonoses sont des maladies circulant chez l’animal mais peuvent se transmettre { l’homme ; les rongeurs sont les principaux animaux porteurs de maladies transmissibles { l’homme et la population des rongeurs peut évoluer sous l’effet du changement climatique. Les maladies alimentaires (du type salmonellose) sont transmises par la consommation de produits alimentaires ; elles posent la question de la conservation des aliments et du respect de la chaîne du froid, qui peut être affectée par le changement climatique. Les maladies hydriques (type choléra) sont transmises lors de contacts avec une eau insalubre et le changement climatique devrait impacter la qualité des eaux (cf. 3.1 Eau). Les maladies respiratoires (du type bronchite, pneumonie et allergies) sont la cinquième catégorie de maladie infectieuse ; les conditions climatiques devraient impacter la transmission des virus et les conditions de production des allergènes. Il est fortement présumé que les évolutions des équilibres climatiques auront des conséquences en termes d’éco-épidémiologie. Des conséquences directes sur les vecteurs de maladies vectorielles et animales (longévité des vecteurs, mortalité animale) et des conséquences indirectes { travers l’évolution des milieux (par exemple la réduction de certaines zones humides par la baisse des précipitations) qui créent une bio-écologie plus ou moins favorable à la transmission des maladies. En ce qui concerne les maladies vectorielles et zoonoses, le changement climatique devrait affecter la biologie et l’écologie des vecteurs et des hôtes 12 Changement climatique, ozone troposphérique et particules atmosphériques, et leur impact sur la santé Kristie L. Ebi1 et Glenn McGregor2 Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [53] intermédiaires. Certains spécialistes estiment que l’effet le plus sensible du changement climatique sur la transmission devrait s’observer aux extrémités de l’intervalle de températures favorables { la transmission, c’est-à-dire, pour de nombreuses maladies, vers 14-18°C pour les températures les plus basses et 35-40°C pour les températures les plus élevées. L’Europe s’est réchauffée en moyenne de 0,8°C au cours des 100 dernières années, le réchauffement le plus important ayant concerné l’hiver et les régions septentrionales. La poursuite de cette tendance devrait probablement faire baisser la forte mortalité hivernale des vecteurs et rendre de nouvelles régions propices à la transmission. Ainsi en 2004, le moustique tigre (Aedes albopictus), un des vecteurs du virus de la dengue a été détecté pour la première fois dans les Alpes Maritimes. L’espèce a ensuite colonisé le Var et les Bouches du Rhône. Pour la première, en août et septembre 2010, des cas de dengue ont été recensés dans les Alpes Maritimes. Concernant les maladies respiratoires, le Changement climatique devrait avoir deux impacts divergeant. D’un coté, la date de démarrage de la période de pollinisation et devrait arriver plus tôt dans l’année, la durée et l’intensité de cette pollinisation devraient s’accroître, augmentant les nuisances des espèces végétales allergisantes et la pollinose, allergie touchant près de 10 millions d’individus. D’un autre côté, des hivers raccourcis et des températures hivernales plus douces auraient un impact positif sur certaines maladies respiratoires (rhumes, grippes saisonnières, bronchites, etc.). Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [54] 1.4.5. Synthèse des risques climatiques futurs pour le territoire La vulnérabilité future du territoire aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat locale dépend à la fois : Des aléas climatiques : aujourd’hui le territoire fait face { certains aléas et ceux-ci vont connaître une modification de leurs fréquences et de leurs intensités. Par ailleurs, d’autres aléas climatiques inexistants { l’heure actuelle sur le territoire peuvent également apparaître ; De l’exposition future des populations, milieux et activités du territoire aux aléas climatiques : celle-ci dépend de l’exposition actuelle, de l’évolution tendancielle de la pression anthropique (augmentation de la population, choix d’aménagement, installations d’activités) et de la stratégie de développement du territoire (politique d’urbanisation, orientations des activités, etc.) ; De la vulnérabilité future des populations, milieux et activités aux aléas climatiques : la vulnérabilité future des différents secteurs à enjeux aux aléas climatiques dépend de la prise en compte ou non du risque et de la conduite d’une politique de renforcement des milieux, populations et activités exposés à faire face aux aléas climatiques (prise en compte de l’aléa dans les pratiques de construction, dans les comportements individuels et collectifs, etc.) Risques climatiques actuels Scénarios territoriaux (évolution de l’exposition et de la vulnérabilité) Risques climatiques futurs Evolution des aléas climatiques dans un contexte de changement du climat Enjeux sectoriels et territoriaux Le tableau de synthèse ci-dessous propose, sur la base du pré-diagnostic des enjeux locaux d’adaptation au changement climatique, une hiérarchisation des priorités pour l’implication de la Communauté d’Agglomération de Limoges Métropole dans une action pour l’adaptation. C’est une vision, forcément subjective, qui doit être affinée par un diagnostic plus approfondi et enrichie d’une connaissance de la perception des enjeux d’adaptation par les acteurs locaux et de leur niveau de préparation à la prise en compte de ces enjeux. Le tableau en Figure 20 ne représente en aucun cas une feuille de route pour l’action, mais plutôt une évaluation des priorités pour le développement de la connaissance sectorielle des enjeux d’adaptation pour Limoges Métropole. Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [55] Figure 20 : Synthèse de la vulnérabilité du territoire aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat Incidence potentielle du changement Degré de vulnérabilité climatique sur le degré de vulnérabilité du climatique actuelle du secteur secteur Priorité pour l'action d'adaptation Ressource en eau Hydrologie des cours d'eau Zones inondables Eaux souterraines Milieux Elevé Elevé Elevé Hausse du degré de vulnérabilité Hausse du degré de vulnérabilité Hausse du degré de vulnérabilité Moyen Hausse du degré de vulnérabilité Moyenne Forte Faible Faible Hausse du degré de vulnérabilité ? Incidence non modélisée Hausse du degré de vulnérabilité Moyenne Faible Faible Moyen ? Incidence non modélisée Hausse du degré de vulnérabilité Moyenne Faible Faible Hausse du degré de vulnérabilité Hausse du degré de vulnérabilité Faible Faible Elevé Faible Moyen Faible Faible ? Incidence non modélisée Hausse du degré de vulnérabilité ? Incidence non modélisée Hausse du degré de vulnérabilité Hausse du degré de vulnérabilité ? Incidence non modélisée Moyenne Forte Bidoversité en milieux aquatiques Biodiversité en bord de cours d'eau Zones humides Paysages et biodiversité Zones forestières Agriculture Elevage Cultures Cadre bâti, infrastructures Activités Mouvements de terrain Retrait-gonflement des argiles Energie Equilibre offre-demande Transport-distribution Tourisme Surmortalité caniculaire Populations Pollution à l'ozone Maladies infectieuses Faible Moyenne Moyenne Faible Diagnostic des vulnérabilités du territoire de Limoges Métropole aux risques climatiques dans un contexte de changement du climat local [56]