Guide des auteurs des manuels scolaires d`histoire

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Guide des auteurs des manuels scolaires d`histoire
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Guide des auteurs
des manuels scolaires
d’histoire
Sur une voie partagée
Nouvelles approches méthodologiques professionnelles
pour corriger l’image de ‘l’Autre’ dans les manuels scolaires
d’histoire en Europe et dans les mondes arabe et islamique
(Cas de la région méditerranéenne)
Organisation islamique pour l’Education, les Sciences et la Culture
- ISESCO - 1435H/2013
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Dépôt légal : 2013 MO 3622
ISBN : 978-9981-26-588-2
Photocomposition, montage
et impression : ISESCO
-Rabat - Royaume du Maroc
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Table des
matières
Présentation
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Avant-propos
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CHAPITRE I : Identité et pluralisme : Les défis que rencontrent
les auteurs des livres scolaires d’histoire
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Le rôle de l’enseignement de l’histoire
14
L’orientation des élèves vers la découverte de l’histoire
15
Les défis liés à l’élaboration des manuels scolaires d’histoire
16
Le respect de l’histoire de ‘l’Autre’
19
Les formes d’omission et de déformation
Les sensibilités religieuses et culturelles
21
24
CHAPITRE II : Identification des formes de rencontres positives
avec ‘l’Autre’
29
La philosophie et les sciences au Moyen-âge
Le commerce au Moyen-âge au début de l’époque moderne
L’Andalousie : Etude du cas de coexistence religieuse et de tolérance
culturelle
37
L’art et l’architecturee
40
CHAPITRE III : Découverte de modèles historiques chargés
d’aspects emotionnels et polémiques, et
proposition d’alternatives
29
36
47
Les conquêtes islamiques
48
Les croisades
L’Europe et l’Empire ottoman
50
54
Le colonialisme européen
L’Europe et le conflit israélo-arabe
57
60
Conclusion
63
Bibliographie
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Ce Guide d’orientation s’inscrit dans le cadre des publications du projet ‘’l’image
de ‘l’Autre’ dans les manuels scolaires européens, arabes et islamiques’’, qui est un
partenariat fondé sur l’initiative de l’Organisation des Nations-Unies pour
l’Education, la Science et la Culture (UNESCO), de l’Organisation Islamique pour
l’Education, les Sciences et le Culture (ISESCO), de la Fondation Euroméditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures et de L’Institut
Suédois d’Alexandrie, en collaboration avec le Département de l’Education de
l’UNESCO (Section de la consolidation de la programmation et de la qualité de
l’enseignement) et l’Institut Georg Eckert pour les recherches en matière de livres
scolaires internatioanux. Ce manuel a été élaboré par un groupe d’experts arabes et
européens qui sont :
Fawzia Al Ashmaoui
(Professeur de civilisation arabe et islamique
Université de Génève)
Folza Rice
(Professeur de l’histoire des religions
Université de Vienne)
Nouredine Doji
(Professeur d’histoire
Université Mennouba – Tunisie)
Mikel Rayli
(Directeur du Projet de l’histoire scolaire
Royaume Uni)
Moustapha Hassani Idrissi
(Professeur de l’enseignement de l’histoire
Université Mohamed V – Rabat)
David Thorfeel
(Professeur agrégé d’histoire des religions
Université de Sodirto – Stokholm)
Révision et rédaction : Dr Mikel Rayli
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Présentation
L
a fondation d’une culture de paix, basée sur une nouvelle orientation
humaniste qui garantit le raffermissement et la consolidation des concepts de
compréhension mutuelle, de réconciliation et de dialogue entre les nations et
les peuples, est une lourde responsabilité dont le poids incombe à toutes les
composantes de la communauté internationale sans exception. Aussi, la défense et
la préservation de la diversité culturelle et de son pendant, le dialogue des cultures,
demeure-t-elle l’un des défis pressants de l’heure actuelle aux niveaux local,
régional et international.
Plus que jamais, nous avons besoin, aujourd’hui, du dialogue entre les cultures et les
civilisations, étant donné qu’il constitue la voie la plus appropriée pour faire face
aux différentes formes d’intolérance qui emplissent notre monde d’aujourd’hui. En
effet, sont nombreuses les manifestations de discorde et d’intolérance qui dominent
les relations internationales, surtout entre l’Europe et les deux mondes arabe et
islamique, y compris dans la région méditerranéenne.
Ce défi prend encore plus d’ampleur avec les événements que nous avons vécus ces
quelques dernières années, avec la prévalence de la vision stéréotypée axée sur la
différence culturelle et religieuse, pour produire des clichés et des conceptions
étriqués des mondes arabe et islamique. L’Europe, elle aussi, a eu sa part de ce
phénomène dans d’autres régions du monde.
Etant donné que les arguments qui fondent l’intolérance, les préjugés et la
ségrégation sont irrecevables suivant tous les canons universels, nous œuvrons,
chacun de sa position, à promouvoir une coopération et une collaboration étroites
avec nos homologues régionaux et internationaux qui partagent avec nous la même
vision et la même volonté inébranlable pour affronter les causes fondamentales des
préjugés, de la division et de la haine, et ce en nous servant de la connaissance, de
l’information, de l’éducation et de l’enseignement.
Personne ne peut nier que la prévalence des informations et des visions étriquées sur
‘l’Autre’ et, surtout, son ignorance, comptent parmi les principaux facteurs qui sont
à l’origine de la diffusion de la haine, de la confrontation et de l’instabilité.
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Par conséquent, nous avons tous des rôles décisifs que nous devons jouer aux
niveaux individuel, collectif et international pour affronter les facteurs qui sont à
l’origine de la ségrégation, de l’intolérance religieuse et toutes les conséquences qui
en découlent. Notre responsabilité consiste en premier lieu à dégager une vision qui
nous ouvre la voie vers un monde meilleur, qui s’édifie sur les piliers de la tolérance,
de la justice, de la diversité culturelle, du respect mutuel et des relations de paix
entre ses composantes.
Le message que véhicule l’enseignement et l’éducation doit être axé sur la
consolidation de la tolérance, de la compréhension et du respect mutuels et sur le
rejet des stéréotypes sous toutes leurs formes, ce qui implique, en retour,
l’intégration du dialogue des cultures, des civilisations et des religions dans les
programmes scolaires à tous les niveaux pour aider les générations montantes à
comprendre les différences culturelles et religieuses et à les respecter.
Les partenaires qui ont élaboré ce guide ont joué un rôle d’éclaireur dans ce cadre,
par la conjugaison des efforts de l’UNESCO, de la Ligue des Etats Arabes, de
l’ISESCO, de la Fondation Euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le Dialogue
entre les Cultures, de l’Institut Suédois d’Alexandrie, avec la coopération de
l’Institut Georg Eckert et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la
Recherche scientifique de la République Arabe d’Egypte, en vue de faire face à la
problématique de l’image de ‘l’Autre’ dans les manuels scolaires en Europe et dans
les mondes Arabe et Islamique.
Depuis 2004, notre travail s’est concentré sur l’amélioration de l’image de ‘l’Autre’
dans les programmes scolaires, en commençant par une évaluation commune des
manuels, tout en donnant la priorité dans notre coopération à la recherche d’une
meilleure communication entre les cultures, partant de notre foi que l’utilisation
malintentionnée des questions culturelles et religieuses constitue la source de tous
les dangers de ségrégation, de discorde et du centralisme civilisationnel.
Par conséquent, ces efforts communs constituent un pas positif dans la concrétisation
de la culture de la justice et de la paix ainsi que dans la consolidation des valeurs du
pluralisme culturel et des fondements de l’alliance entre les civilisations.
Le ‘’Guide des auteurs des manuels scolaires d’histoire’’ constitue la première
réalisation importante accomplie dans le cadre de cette coopération. Nous visons, à
travers son élaboration, à opérer une ouverture sur les acteurs dans le domaine de
l’éducation et de l’enseignement, les auteurs des manuels scolaires d’histoire, les
concepteurs des programmes qui s’y rapportent et qui ont une influence profonde
sur le façonnement des mentalités des élèves.
Partant de notre foi en les valeurs de communication et d’ouverture ainsi que de
notre respect de la liberté de pensée et d’expression, nous encourageons toutes les
parties concernées par l’élaboration des manuels scolaires à tenir compte des
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recommandations du présent document qui a été élaboré par une équipe
internationale d’experts européens, arabes et islamiques.
Ces experts ont produit, grâce à leur expérience dans les domaines académique,
éducatif et scolaire, ainsi qu’à leur approche scientifique équilibrée, un document de
valeur dont on doit s’inspirer en tant que référence essentielle dans l’élaboration des
programmes relatifs à l’histoire, et dans lesquels il est nécessaire de s’attacher à faire
ressortir une vision plus équilibrée vis-à-vis des sensibilités, des faits et des
questions de tous ordres.
Partant des expériences réussies de certains pays des deux rives de la Méditerranée,
ce document insiste sur la nécessité d’adopter une démarche multilatérale et
équilibrée dans la présentation de l’histoire de ‘l’Autre’, de sa culture et de sa religion
aux élèves ; ouvrant ainsi la voie à une approche nouvelle qui encourage la culture
de paix et de compréhension mutuelle et œuvre pour la consolidation du dialogue
entre les civilisations en tant que composante du processus éducatif. A cet effet, cette
démarche doit présenter des méthodes alternatives pour aborder les questions
controversées et insister sur l’importance des rencontres positives, sur l’interaction et
l’interpénétration entre les peuples des deux rives de la Méditerranées.
Nous ne pouvons ici que féliciter les auteurs pour leurs efforts dans la mise en valeur
du rôle que peuvent jouer la culture, l’éducation et l’enseignement dans
l’affermissement de la compréhension et de la compréhension mutuelle, ainsi que dans
la consolidation des valeurs de la diversité culturelle, du pluralisme civilisationnel et
de la coexistence entre les peuples pour un avenir meilleur pour tous.
Amr Moussa
Secrétaire Général
De la Ligue des Etats Arabes
Irina Bokova
Dr.Abdulaziz Othman Altwaijri
Directrice générale de
Directeur général de
l’Organisation es Nations-Unies l'Organisation islamique pour
Pour l’Education, Les Sciences et l'Education, les Sciences et la
la Culture (UNESCO)
Culture (ISESCO)
André Azoulay
Birgitta Holst Alani
Président de la Fondation
Euro Méditerranéenne Ana
Lindh pour le dialogue
entre les cultures
Directrice de l’Institut
Suédois d’Alexandrie
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Avant-propos
L
es dernières décennies ont vu croître, de manière remarquable, les voies et
moyens de communication entre les européens, les arabes et les musulmans.
La mondialisation a fait de la rencontre entre les peuples venant
d’environnements différents un aspect naturel de la vie quotidienne. Les formes des
migrations et des déplacements dans la période postcoloniale ont entrainé des
transformations importantes dans les structures démographiques des Etats-nation
qui étaient plus homogènes dans le passé, aussi bien en Europe que dans les autres
contrées du monde.
La politique, l’économie et la culture sont devenues des phénomènes qui ignorent
de plus en plus les frontières nationales. En effet, nous vivons désormais dans un
monde où le pluralisme est devenu plus visible qu’avant au sein de nos sociétés,
mais où, malheureusement, les relations entre l’Europe et les mondes arabe et
islamique sont également devenues sous la menace de courants basés sur la
polarisation et l'animosité.
Nos enfants naissent pour se retrouver enfermés dans des identités prédéfinies et
grandissent dans des sociétés où dominent des versions particulières pour relater le
passé. L’occasion n’est souvent pas donnée aux enfants et aux nouvelles générations
de méditer sur leurs appartenances sociales avec le recul nécessaire ou d’avoir une
attitude critique concernant ce qu’on leur raconte à propos des autres peuples et des
autres sociétés.
En même temps, étant donné que les enfants et les jeunes générations sont les plus
exposés à l’influence des mutations sociales, ils ressentent, plus que tous les autres,
les effets directs de la mondialisation, en comparaison avec leurs parents et leurs
enseignants. D’où la nécessité de l’enseignement de l’histoire dans les écoles d’un
point de vue pluraliste et selon une démarche critique.
Les manuels scolaires peuvent jouer un rôle vital pour aider les élèves à s’approprier
une compréhension approfondie de l’histoire, en les amenant à se poser les
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questions et à trouver les réponses en ce qui concerne le présent en se référant au
passé. Ils peuvent également éveiller la curiosité des élèves et les amener à faire
preuve d’interactivité avec les situations qui représentent ce que les hommes ont
connu dans leur passé comme faits problématiques, adopté comme choix, ou
embrassé comme foi et croyances.
Les manuels scolaires d’histoire peuvent également aider les générations montantes
à développer leurs consciences de leurs identités à travers la compréhension de leurs
cultures propres et celles des autres. Pendant que ces jeunes générations travaillent
au développement de leur compréhension de l’enseignement de l’histoire, les
manuels scolaires peuvent les encourager à se poser des questions importantes
concernant le passé, à analyser les preuves et à évaluer les différentes explications
et justification relatives l’histoire.
Il existe plusieurs études académiques qui se rapportent à l’image de ‘l’Autre’ dans
les manuels scolaires. Certaines de ces études traitent particulièrement des
stéréotypes et des différentes formes d’incompréhension et d’interprétations
erronées qui sont encore présentes dans certains livres scolaires en Europe et dans
les mondes arabe et islamique. De telles études spécialisées visent à rectifier
beaucoup d’idées qui figurent dans les livres scolaires d’histoire en Europe et dans
les mondes arabe et islamique et qui ont été incapables d’apporter une image précise
qui représente ‘l’Autre’.
L’objectif de ce Guide d’orientation ne consiste pas à faire une critique des livres
d’histoire anciens ou actuels. Il vise plutôt à présenter des propositions concernant
la manière avec laquelle les auteurs des manuels scolaires peuvent adopter une
démarche méthodique pour l’étude de l’histoire de manière à donner aux élèves une
compréhension plus profonde de ‘l’Autre’.
Ce Guide vise également à motiver les auteurs des manuels scolaires et à les
encourager, à travers la présentation de certaines idées dont on peut se servir pour
aborder un domaine aussi vaste que celui des questions qui se rapportent à l’histoire.
Ce livre s’appuie sur des modèles positifs tirés des livres scolaires d’histoire en Europe
et dans les mondes arabe et islamique, et ce dans le but d’aider les auteurs à développer
un champ d’initiatives encore plus vaste pour élaborer des manuels scolaires qui se
caractérisent par la précision et l’attractivité. Le but est de développer une
compréhension basée sur une vision plus profonde de nous-mêmes et des autres.
Aussi, ce Guide d’orientation s’appuie-t-il sur les trois hypothèses suivantes :
1. Les livres d’histoire doivent refléter la diversité en Europe et dans les mondes
arabe et islamique. En effet, les sociétés en Europe, au Moyen-Orient et en
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Afrique du Nord ont toujours été caractérisées par le pluralisme et la diversité aux
plans culturel, linguistique et religieux. Tel était le cas avant l’avènement des trois
religions monothéistes ; tel a été également le cas avec le Judaïsme, le
Christianisme et l’Islam. Cette caractéristique demeure présente à nos jours. Les
livres scolaires d’histoire se doivent d’aider les élèves à connaître l’histoire des
sociétés et à identifier les traits qui les caractérisent. Ces manuels se doivent
également d’encourager les élèves à étudier le pluralisme culturel, ethnique et
religieux au sein de ces sociétés.
2. Les manuels scolaires d’histoire doivent mentionner les aspects positifs des
formes de rencontre entre les cultures. L’histoire de nos sociétés en est riche
et en comporte plusieurs aspects. Tout au long de l’histoire, la rencontre entre
les hommes et leur interaction culturelle a permis une osmose dans les
domaines des connaissances et des expériences, qui a eu des effets positifs sur
le développement de nos sociétés et leur prospérité. L’un des exemples les
plus brillants dans ce domaine aura été l’époque Abasside, époque qui a vu le
transfert du patrimoine arabe et islamique ainsi que du patrimoine grec vers
l’Europe. Le présent Guide vise à renforcer la vision équilibrée des périodes
de rencontres historiques entre l’Europe et les mondes arabe et islamique, sans
toutefois prêcher l’occultation les aspects négatifs de ces rencontres. Il vise
plutôt à souligner le besoin d’élargir les horizons et les sources des élèves
dans les domaines de la connaissance et de la compréhension, en insistant
aussi sur les aspects positifs relatifs à l’enrichissement culturel mutuel tout au
long de l’histoire de la civilisation humaine.
3. Les manuels scolaires d’histoire doivent aider les élèves à développer une
démarche méthodique multilatérale dans leur étude du passé. La démarche
multilatérale consiste à prendre en compte plusieurs points de vue en même
temps que le notre. Elle nous permet de voir que notre point de vue comporte une
dose d’impartialité et de subjectivisme. Elle suppose la possession d’une capacité
réelle pour observer une situation donnée à partir de plusieurs angles, ainsi que
la faculté de se mettre à la place de ‘l’Autre’ et d’observer le monde du point de
vue de celui-ci. Ainsi les élèves pourront être capables, grâce à cette démarche
multilatérale, d’analyser et d’interpréter les points de vue différents et divergents,
tout comme ils seront capables d’identifier les sujets de controverse dans les
points de vue et de respecter les us et coutumes des autres, même quand ils ne les
approuvent pas. Aussi, la démarche multilatérale permet-elle d’enseigner les
questions sensibles et controversées en aidant les élèves à reconnaître toute la
complexité qui caractérise ces questions. Les manuels d’histoire peuvent jouer
un rôle vital dans la consolidation de l’approche basée sur la vision multilatérale
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en ouvrant devant les élèves un vaste champ d’interprétations concurrentes, leur
permettant ainsi de s’ouvrir sur les cultures des autres, tout en s’attachant à leurs
identités et leurs spécificités culturelles propres.
Ce Guide d’orientation se compose de trois chapitres principaux. : Le premier
traite des défis que posent la diversité et le pluralisme, ainsi que de l’importance
de l’enseignement de l’histoire aux générations montantes. Il traite également des
défis inhérents à l’élaboration des manuels scolaires d’histoire, tout en tenant
compte, de manière particulière, des sensibilités religieuses et culturelles. Le
deuxième chapitre expose un certain nombre de stratégies utilisées pour aider les
élèves à se concentrer sur certaines formes de rencontres positives entre les
peuples d’Europe et des mondes arabe et islamique. Malheureusement, la relation
entre l’Europe et les mondes arabe et islamique a été parfois empreinte de
méfiance, de luttes et de violence, qui sont autant d’aspects négatifs qu’il ne faut
pas ignorer. Cependant, la leçon d’histoire doit offrir un espace ‘’sécurisé’’ et
stimulant intellectuellement pour les jeunes générations, où celles-ci étudient ce
qui représente généralement des versions de l’histoire chargées de passions et de
controverses. C’est ce qui explique l’importance donnée, dans le troisième
chapitre de ce Guide, aux voies et moyens qui permettent aux auteurs des manuels
scolaires d’aider les élèves à étudier ces aspects controversés de l’histoire avec des
méthodes qui ne suscitent pas l’intolérance et l’animosité. Ce manuel présente
cinq études de cas se rapportant à des questions historiques dont les échos sont
encore présents dans les deux mondes arabe et islamique et en Europe. Dans
chacun des cas, sont discutées certaines sensibilités qui entourent l’événement où
l’époque considérés. Il propose également certaines démarches pédagogiques que
les auteurs des manuels scolaires peuvent trouver utiles.
Nous avons de nombreux exemples de livres scolaires excellents en Europe et
dans les mondes arabe et islamique. Beaucoup d’auteurs se sont employés à relater
les événements politiques chargés de sensibilités d’une manière conforme aux
principes du pluralisme et de la vision multilatérale exposés dans ce Guide. Ce
Guide mentionne ces exemples et s’emploie à diffuser les principes sur lesquels
ils reposent afin de les faire parvenir à un public plus large.
Il est incontestable que le présent Guide comporte certaines insuffisances. Les
stratégies proposées ne représentent naturellement pas un inventaire exhaustif des
démarches possibles, mais elles se résument en un ensemble de questions diverses
fondées sur la pratique active et que les auteurs des manuels scolaires d’histoire
peuvent trouver utiles.
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Chapitre 1 :
Identité et pluralisme
Les défis que rencontrent
les auteurs des livres scolaires d’histoire
Notre identité n’est ni unique ni figée. Le fait de classer une personne donnée
comme appartenant fondamentalement au ‘’monde occidental’’ sur la base du
simple fait qu’elle est issue d’une région ou d’une culture données ne fait que
réduire cette personne à une seule dimension.
Nous avons tous besoin de comprendre la riche diversité au sein des cultures et, par
conséquent, la diversité qui caractérise notre identité. Tout comme nous avons
besoin de reconnaître les différentes formes d’interaction complexe au sein même
des cultures et entre elles. Les générations montantes dans les mondes arabe et
islamique et en Europe doivent appréhender le fait que les identités sont soumises à
l’effet de l’interaction et de l’influence mutuelle des cultures et se caractérisent par
la souplesse, le changement et l’interpénétration. Ils doivent être capables de
comprendre que ceux qu’ils voient ‘’différents’’ d’eux possèdent un patrimoine
valeureux, souvent imbriqué avec le leur.
Il va sans dire que jeter un éclairage sur les différents points de rencontre et sur les
aspects communs et les partages culturels ne veut point dire éluder les différences.
Celles-ci existent entre les individus et les groupes en ce qui concerne les modes vie,
les attitudes morales, les idéologies politiques et les croyances. Cette pluralité et
cette diversité sont une caractéristique importante de l’Europe et du monde
islamique. Les Chrétiens et les Musulmans, ainsi que d’autres, ont vécu côte à côte
durant plus d’un millénaire et demi. Mais des heurts peuvent naître dans les
moments où la vie devient difficile et où la sécurité devient absente. Il en découle
une montée du désir de posséder une structure autonome et une identité à part. Les
heurts dus au pluralisme culturel dans la vie quotidienne ne peuvent se régler par les
veux pieux ni par la simple invocation de la cohésion sociale ou de la parfaite
entente idéologique. Cependant, nous pouvons nous accorder sur le fait que l’autoidentification est un droit inaliénable, et que le respect de soi et de sa propre histoire
font partie des exigences du respect de ‘l’Autre’. L’individu ne peut avoir de
considération pour les cultures, les religions et les modes de vie différents des siens,
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et ne peut s’ouvrir à eux, que s’il sent la reconnaissance, la stabilité sociale et la
considération sur la base de la position et de la personnalité qui sont les siennes.
Le rôle de l’enseignement de l’histoire
La connaissance de l’histoire et sa compréhension sont nécessaires pour être en
mesure de s’apprécier soi-même et de respecter les autres. L’histoire est une source
qui enrichit les élèves en ouvrant devant eux une fenêtre pour connaître les
impasses, les choix et les croyances qu’ont connus les hommes dans le passé. Elle
les aide à développer leurs dons à travers la compréhension de leurs sociétés propres
ainsi que celles des autres.
L’importance de l’histoire se manifeste surtout dans le fait qu’elle aide les élèves à
se poser des questions concernant le présent et à leur trouver des réponses, et ce
grâce à leur interactivité avec le passé. Par l’enseignement de l’histoire, les
générations montantes développent les capacités qui les préparent à la vie d’adultes,
dans la mesure où ils apprennent à poser les questions importantes et à leur trouver
des réponses, à évaluer les preuves, à analyser les différentes interprétations et à
étayer les idées et les jugements auxquels ils parviennent.
Dans une époque qui connaît des mutations rapides et déroutantes, l’étude de
l’histoire devient un moyen qui permet aux jeunes générations de prendre des
positions basées sur la connaissance et la pensée par rapport aux questions
fondamentales de portée humaine. Le programme d’histoire qui est élaboré avec
précision permet aux élèves de faire face aux stéréotypes et à éviter les visions
superficielles, tout comme il leur permet de développer une compréhension
approfondie des versions historiques qui comportent des aspects controversés.
Les enseignants d’histoire et les auteurs des livres scolaires d’histoire jouent un rôle
vital dans la préparation des générations montantes à développer leurs hobbys et à
comprendre le pluralisme et la diversité qui caractérisent les différentes sociétés. En
effet, ils peuvent aider à la formation de jeunes générations qui possèdent la
curiosité intellectuelle, le sens critique, l’indépendance et l’ouverture d’esprit, aussi
bien en Europe que dans les deux mondes arabe et islamique.
Ces enseignants et auteurs peuvent également contribuer à la formation de la
conscience des élèves et à leur donner les outils intellectuels qui leur permettent
d’aborder les sujets de points de vues différents. En effet, les démarches qui
permettent aux élèves de connaître l’histoire de leur culture et de leur société et leur
apportent des interprétations et des explications diverses concernant celles-ci et qui
leur apprend, en même temps, l’histoire et les interprétations de ‘l’Autre’, peuvent
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aider ces élèves à envisager de manière positive la diversité culturelle et le
pluralisme civilisationnel en les rendant aptes à accepter les différences et la vie en
paix dans un monde pluriel.
L’orientation les éleves vers la découverte de l’histoire
L’étude de l’histoire revient à accomplir un voyage à travers le temps pour découvrir
des lieux et des cultures parfois inconnus des élèves. Les leçons d’histoire peuvent
aider les élèves à découvrir un monde éloigné à travers la compréhension des
expériences et des valeurs qui étaient celles des hommes dans le passé.
Les enseignants et les auteurs des manuels scolaires peuvent aider les élèves à
identifier les réalités, à évaluer les sources, et à interpréter les faits et les situations.
Ils peuvent ainsi associer les élèves au processus de recherche et les aider à former
leurs propres opinions concernant les personnes, les situations et les événements qui
ont marqué les époques passées. C’est ainsi que l’enseignement de l’histoire jouera
son rôle grâce à l’aide qu’il apporte aux élèves dans le développement de leurs
opinions propres sur la base de la règle du respect des preuves historiques, loin des
préjugés et des stéréotypes.
Dans le cadre de cette quête de la connaissance, il est inévitable de mener
l’expérience qui consiste à se confronter psychologiquement avec les luttes et les
blessures du passé, dans la mesure où il faut faire connaître aux élèves les questions
historiques controversées et sensibles, telle l’histoire de la violence collective, des
guerres, des croisades et de la colonisation. Mais comment faut-il enseigner ces
questions conflictuelles ? Les enseignants et les auteurs des manuels d’histoire
doivent traiter de ces sujets de manière directe, tout en étant conscients des dangers
qui consistent, dans le cas d’espèce, à tracer des lignes de démarcation nettes et
rigides entre ‘’nous’’ et ‘’ les autres’’.
Pour éviter de tels dangers il est nécessaire de prendre les précautions
méthodologiques qui permettent de placer la confrontation entre ‘’nous’’ et
‘’l’Autre’’ dans son optique véritable, dans la mesure où il faut éviter de présenter
‘’l’Autre’’ comme une source de menace pour des identités données, mais plutôt
comme l’une des conditions de leur vitalité.
Peut-être que le point le plus important à mentionner ici est que l’histoire se
distingue par son caractère problématique et que l’enseignement et les manuels
d’histoire ne doivent pas prêcher des vérités absolues ou des positions définitives.
En effet, l’histoire est une branche de la connaissance qui comporte un discours
critique, où s’interfèrent les opinions contradictoires et concurrentes. Le fait de
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susciter l’intérêt des élèves par la controverse historique et de les aider à étudier un
certain nombre d’interprétations historiques successives constituent un élément
essentiel dans le développement de leur compréhension de l’histoire en tant que
domaine de connaissances.
Il est important que les livres scolaires d’histoire expliquent aux élèves que les
questions passionnelles sujettes à controverse dans l’histoire permettent des
interprétations diverses et, parfois, concurrentes. Les auteurs des manuels scolaires
peuvent aider les élèves à dépasser la compréhension simpliste et unilatérale des
événements et des situations du passé, et ce en portant à leur connaissance les
différentes interprétations de l’histoire.
Les défis liés à l’élaboration des manuels scolaires d’histoire
Il est parfois exigé que les manuels scolaires d’histoire soient soumis à des exigences
politiques données et de répondre aux pressions qu’impose le contexte social et
culturel dans lequel ils sont enseignés. Dans certaines sociétés contemporaines, on
impose des rappels spécifiques à des groupes ou sociétés donnés dans les manuels
scolaires d’histoire. Mais si nous devons laisser une place aux souvenirs et au
patrimoine au sein du discours historique dans les écoles, nous devons avoir la
prudence de ne pas confondre histoire et mémoire. Parmi les défis difficiles auxquels
sont confrontés les enseignants et les auteurs des manuels, il y a celui qui consiste à
aider les élèves à dépasser les opinions unilatérales qu’ils peuvent avoir acquises sur
des bases étrangères à la connaissance. Il n’y a aucun espoir d’aider les élèves à se
départir d’une version légendaire du passé et à parvenir à une compréhension sensée
de l’histoire sans la présentation de textes et de références scientifiques et objectives
qui aident l’élève à connaitre le point de vue de ‘l’Autre’.
Les livres scolaires d’histoire sont élaborés dans le cadre de l’orientation d’un
programme scolaire d’histoire. D’où la nécessité, dans certains pays, de réviser le
cadre général de l’enseignement de l’histoire en vue de présenter une orientation
appropriée des livres scolaires, afin qu’ils encouragent l’adoption d’une
compréhension de ‘l’Autre’ empreinte de plus de complexité. C’est ainsi que les
Etats européens, arabes et islamiques ont besoin de programmes scolaires qui ne sont
pas uniquement axés sur la connaissance historique, mais s’intéressent aussi aux
concepts, aux processus et aux cheminements qui fondent la connaissance historique.
Il faut, en particulier, que le programme d’histoire soutienne la démarche
méthodologique multilatérale, tout comme il doit affirmer le besoin de l’étude des
différentes interprétations de l’’histoire. Sans ce fondement solide sur lequel doit
reposer le programme d’histoire, il est impossible de se représenter comment les
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auteurs peuvent élaborer des manuels scolaires qui encouragent les élèvent à adopter
une démarche multilatérale.
Un autre contexte qui présente un défi plus important pour les auteurs des livres
scolaires d’histoire est le fait que les leçons d’histoire ne sont pas la seule source à
partir de laquelle les élèves développent leur connaissance et leur compréhension du
passé. En effet, il existe d’autres facteurs qui jouent un rôle de plus en plus
important dans la formation des connaissances des générations montantes et leur
compréhension de l’histoire. Parmi ces facteurs, il y a la famille, la société,
l’information, les musées et l’internet, ce qui impose aux auteurs des manuels
scolaires de faire preuve de créativité dans les méthodes avec lesquelles ils élaborent
les sources des connaissances de manière à ce que celles-ci soient interconnectées
avec les autres moyens d’information.
Il existe une grande diversité dans les objectifs et la nature des livres scolaires
d’histoire, aussi bien en Europe que dans les mondes arabe et islamique. C’est ainsi
que, dans certains pays, les professeurs d’université élaborent ces manuels qui sont
soumis à l’approbation du gouvernement et ne sont utilisés, le plus souvent, que
comme une simple source d’enseignement dans les cours d’histoire. Dans d’autres
pays, les enseignants et les acteurs du secteur de l’éducation et de l’enseignement
élaborent les livres scolaires ainsi que les autres sources de l’enseignement.
Ces différences qui existent dans la réalité rendent difficile la généralisation en
parlant des défis auxquels sont confrontés les auteurs des livres scolaires d’histoire.
Mais, en faisant abstraction de leurs contextes et quelle que soit le milieu dans lequel
ils travaillent, les auteurs des manuels scolaires doivent se poser les trois questions
importantes suivantes :
1. Comment présenter aux élèves une expérience éducative significative ?
Le bon manuel d’histoire est celui qui apprend aux élèves comment réfléchir. Il
y arrive partiellement à travers le choix minutieux du contenu historique et des
matières principales qui contribuent à approfondir la compréhension historique
chez les élèves. Au lieu d’insister de manière exagérée sur l’histoire militaire et
les batailles, le choix du contenu doit susciter l’attention sur l’histoire
économique, politique, sociale et culturelle. Il doit présenter des visions globales
concernant les aspects, les événements et les mutations importants. Il doit
également couvrir un large champ de positions et de croyances, tout en tenant
compte des expériences des femmes et des hommes ainsi que de la diversité et
de la pluralité dans l’histoire de l’humanité. Les manuels scolaires qui ont de la
valeur évitent le traitement superficiel de l’histoire et s’attachent à provoquer une
accumulation des connaissances en alliant la concision de l’exposé et le
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traitement approfondi de l’histoire, à travers le développement de la
compréhension par les élèves des idées, des concepts, des processus et des
cheminements qui fondent la discipline de l’histoire et qui se manifestent à
travers : les traits distinctifs des âges, le changement et la continuité, la cause et
l’effet, l’usage des preuves et la formulation des interprétations. La précision
académique dans les livres scolaires d’histoire ne peut découler d’un survol
rapide de longues époques du passé, mais plutôt à travers le mélange solide entre
la vision globale et la connaissance historique approfondie à travers le
développement d’une compréhension globale de l’histoire.
2. Comment présenter aux élèves un contexte éducatif incitatif ?
Les livres scolaires qui encouragent les élèves à participer aux discussions
relatives à des questions historiques données et qui offrent des activités
éducatives incitatives, contribuent à faire de l’apprentissage de l’histoire une
expérience agréable. L’élaboration des chapitres des manuels scolaires d’histoire
dans le cadre de questions d’investigation telles ‘’quels étaient les centres
d’intérêt des habitants de Cordoue au Moyen âge ?’’, ou encore ‘’qu’est-ce qui
caractérisait Bagdad durant l’époque des Abassides ?’’, constitue l’un des styles
qui offrent un contexte qui incite à apprendre. Il est important que les auteurs
réfléchissent à des styles motivants à travers lesquels les élèves répondent à ce
genre de questions. Les enseignants et les auteurs des manuels scolaires d’histoire
peuvent proposer un ensemble de procédés qui incitent les élèves à exprimer les
conclusions auxquelles ils ont abouti dans leurs tentatives de répondre à ces
questions, et ce à travers la rédaction d’articles, l’organisation de débats, la
présentation d’exposés visuels, la formulation de contes, la tenue de congrès,
l’organisation d’expositions, la conception de scénarios pour des feuilletons
télévisuels, etc. C’est ainsi que les manuels scolaires d’histoire peuvent
encourager les générations montantes et les inciter à l’étude de l’histoire à travers
le recours à ces formes concrètes qui expriment leur connaissances scolaires.
3. Comment rapprocher les manuels scolaires d’histoire des générations montantes ?
Beaucoup de jeunes estiment que l’histoire est une matière difficile. Aussi fautil élaborer les manuels d’histoire de manière à garantir la simplicité dans la
méthode d’enseignement de l’histoire et à éviter le simplisme dans sa lecture et
dans l’exposition de ses événements, de leurs causes et motivations ; et ce en vue
de mettre la matière d’histoire à la portée d’un grand nombre d’élèves de manière
neutre et objective. Il est nécessaire d’aider les lecteurs en définissant des étapes
claires et structurées dans le processus d’enseignement. Le chapitre qui débute
par une source attirante, telle une belle photo ou une histoire passionnante,
prépare les lecteurs à faire un voyage exaltant à travers l’histoire, à l’issue duquel
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on peut attirer encore plus les lecteurs à travers la présentation d’un texte narratif
bien construit qui jette un éclairage sur le passé à travers l’expérience des
individus, sans le présenter comme une chaîne d’idées et de concepts complexes
et abstraits, mais plutôt comme une branche de la connaissance dont les hommes
constituent la substance. Nous constatons que beaucoup d’élèves trouvent
difficile la matière d’histoire tout simplement du fait de leur manque de
compréhension de cette matière et de ce qu’elle requiert quant à la nécessité de
réunir plusieurs idées à la fois. Les nouveaux manuels scolaires d’histoire
peuvent dépasser cela en proposant des activités diversifiées qui aident les élèves
à choisir les informations et à suivre leur interpénétration, leur classification, leur
rassemblement, leur intégration et leur harmonisation. Ils peuvent aider à la
formulation du texte lui-même par l’utilisation d’un style clair et vivant appuyé
par les effets visuels tels les graphiques et les photos illustratives.
Le respect de l’histoire de l’Autre
Il n’est pas rare que les enfants et les jeunes générations traitent l’histoire à travers la
vision étriquée que présentent les légendes sociales et les moyens d’information. Les
histoires qu’ils entendent concernant le passé sont souvent le reflet de préoccupations
et de questions contemporaines, étant donné qu’il y a un penchant naturel qui consiste,
en parlant de l’histoire de notre société, à évoquer uniquement les événements dont
nous sommes fiers et non ceux dont nous avons honte. Malheureusement, le
phénomène s’inverse souvent en parlant de l’histoire de ‘l’Autre’, dont nous
exagérons alors les aspects négatifs et en occultons les aspects positifs.
Pour beaucoup de ressortissants des deux mondes arabe et islamique, l’histoire de
l’Europe est souvent liée à ses époques les plus controversées, dans la mesure où
on met en exergue, le plus souvent, les croisades, l’expansionnisme sanguinaire
des empires colonialistes d’Europe en tant qu’épisodes représentatifs de l’histoire
de ce continent.
Or, en dépit de la grande importance que revêt l’étude de ces phénomènes, il est tout
aussi important de mentionner que la plupart des européens contemporains estiment
que ces événements sont une composante importante de leur identité européenne à
l’heure actuelle. Nombre d’entre eux s’accordent sur le fait que ces époques
historiques sont sources de beaucoup de controverses et même d’embarras. C’est ainsi
que beaucoup d’européens estiment qu’il y a d’autres développements historiques qui
jouent un rôle non moins important dans le façonnement de l’identité européenne.
Aussi trouvons-nous des exemples de réalisations historiques qui font la fierté des
européens et qui ont apporté des progrès significatifs dans l’histoire de l’Europe.
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Nous pouvons en citer : le patrimoine de l’ancienne civilisation grecque, le siècle
des lumières et les concepts de l’humanisme, la laïcité, les droits de l’homme, le
développement technologique depuis la révolution industrielle à nos jours, la
libération de la femme et l’octroi de ses droits dans le XXème siècle.
Pour beaucoup d’européens, l’histoire arabo-islamique se définit généralement par
rapport à ses aspects les plus controversés. L’on peut citer comme exemple le début
des conquêtes islamiques au détriment du pouvoir chrétien, ainsi que la menace que
faisait peser l’Empire ottoman sur l’Europe.
Commerçants européens en Orient islamique
Cependant, il est important de mentionner que la majeure partie des arabes et des
Musulmans s’accordent sur le fait que l’histoire de la culture arabo-islamique se
caractérise fondamentalement par des expériences différentes et positives, telles que
son interaction positive avec le patrimoine des cultures anciennes en Grèce, en
Egypte, en Mésopotamie et en Perse, ainsi que la tolérance qui a caractérisé le
pluralisme religieux dans les Etats islamiques, l’âge des lumières qu’a connu la
culture arabo-islamique dans les domaines des sciences, des mathématiques et de la
philosophie au cours du Moyen-âge et son apport au développement de la
civilisation humaine, en plus de l’importance stratégique de la région du Moyen
Orient dans l’époque contemporaine.
Il est important que les auteurs des manuels scolaires reconnaissent les aspects
positifs de l’identité de ‘l’Autre’. Ces auteurs jouent un rôle important dans la
présentation des différents aspects de l’histoire, y compris aussi bien ceux qui sont
controversés que ceux qui sont source de fierté dans l’histoire de ‘l’Autre’.
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Les manuels scolaires qui ignorent l’interpénétration des relations entre l’Europe et
les deux mondes arabe et islamique, qui mettent l’accent de manière exagérée sur la
lutte des cultures, ou qui abordent ces relations d’un seul point de vue, représentent
un danger à travers leur insistance, non voulue, sur l’existence d’identités
individuelles uniques. Tout comme ils échouent à reconnaître l’enrichissement
mutuel qui a résulté de l’histoire des échanges matériels et intellectuels entre
l’Europe et le monde arabo-islamique.
Les formes d’omission et de déformation
Les études relatives aux manuels scolaires d’histoire en Europe et dans le monde arabe
mentionnent l’existence de plusieurs cas d’omission et, parfois, de déformation, ce qui
empêche les élèves de développer une connaissance plus profonde et plus objective de
‘l’Autre’. Cependant, il est important de souligner ici que ces cas d’omission ou de
déformation n’expriment pas, généralement, une volonté délibérée de la part des
auteurs des manuels scolaires de présenter une vision étriquée ou unilatérale de
l’histoire, mais qu’elles sont plutôt dues au contexte politique et culturel global dans le
cadre duquel sont élaborés les livres scolaires d’histoire. Des études analytiques menées
sur des manuels scolaires en Europe et dans le monde arabo-islamique ont révélé
certains cas courants d’omission et de déformation.
C’est ainsi que nous trouvons que les manuels scolaires européens présentent
l’Europe comme étant le centre ou l’axe autour duquel tournent les événements
historique qui se sont déroulés dans le reste du monde. Les élèves européens
étudient les cultures grecque et romaine comme étant la source de leur culture
européenne. Mais ces manuels omettent parfois de mentionner le rôle important de
la culture arabe et islamique en tant que facteur majeur qui a contribué au
développement de l’Europe.
En effet, les traductions des travaux réalisés par les érudits et philosophes
musulmans ont été mises à profit durant des siècles en Europe, en tant que source
principale de la naissance des sciences et de la philosophie modernes en Europe. La
traduction de ces œuvres ont jeté les bases et les fondements de la plupart des
sciences modernes, telles les mathématiques, la physique, la chimie et la médecine.
Tout comme elles ont joué un rôle essentiel dans le domaine de la philosophie.
Nombre d’expressions arabes sont encore présentes dans les langues européennes
pour témoigner de cette influence culturelle.
Les explorateurs européens n’auraient pu réussir dans leurs grandes découvertes
sans les études géographiques et les inventions scientifiques réalisées par les arabes
et les musulmans, notamment la cartographie et l’astrolabe, sans parler des
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découvertes géographiques accomplies par les Arabes et les Musulmans. Il est donc
regrettable que la plupart des manuels scolaires européens ne reconnaissent pas le
mérite des scientifiques arabes et musulmans et ignorent leur contribution à l’essor
de l’Europe et dans la civilisation humaine.
Nous constatons également que les manuels scolaires européens ignorent souvent le
fait que le monde arabo-islamique et l’Europe partagent ensemble le legs de la
culture grecque. Tout comme ils ignorent parfois le concept de nation islamique et
la longue histoire de tolérance de l’Islam vis-à-vis des autres religions. Certains de
ces manuels scolaires ne consacrent pas l’espace qu’il faut pour faire ressortir la
présence islamique et le croisement culturel et religieux en Europe même (en
Espagne, en Sicile, en Bosnie ; etc.), tout comme ils font, parfois, l’impasse sur
l’époque de la renaissance arabe à la fin du XIXème siècle.
Enfin, parmi les domaines importants omis par les manuels scolaires européens
figure la question des conséquences découlant du mouvement sioniste et
l’occupation par Israël des territoires arabes, tant dans le passé que dans le présent,
et leur effet sur les palestiniens et le monde arabo-islamique tout entier.
Aristote et ses disciples, transmission de la philosophie et des sciences grecques en Europe, via
les savants musulmans, librairie Topkapi, Istanbul
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Nous pouvons également trouver des formes d’omission et de déformation dans les
manuels scolaires dans les mondes Arabe et islamique. C’est ainsi qu’on ignore parfois
les développements cruciaux et les événements historiques de l’Europe qui forment
l’identité de nombre d’européens, tout comme ces manuels scolaires ont tendance à ne
pas accorder l’attention qu’il faut à l’Eglise en tant qu’institution et abordent le
christianisme d’un point de vue islamique et non du point de vue des chrétiens.
Bien que les manuels scolaires dans le monde arabo-islamique mentionnent les
luttes entre l’Etat et l’Eglise à l’époque de la renaissance, le mouvement de la
réforme au sein de l’Eglise et les guerres de religions qui ont éclaté en Europe au
début de l’époque moderne, en tant que développements qui ont laissé une
empreinte visible sur l’identité européenne, il n’en demeure pas moins que certains
manuels scolaires dans le monde arabo-islamique abordent l’époque de la
renaissance et les facteurs qui sont à l’origine des différentes formes de laïcité dans
les états européens d’une manière qui ne tient pas compte de manière scrupuleuse
de la nature des contextes européens qui les ont engendrées.
Au moment où nous constatons que les contributions des Arabes et des Musulmans
dans la culture européenne et la civilisation humaine sont ignorées ou omises dans
les manuels scolaires européens, nous retrouvons le même phénomène quant aux
apports de l’Europe à la culture arabo-islamique dans certains manuels scolaires
dans les mondes arabe et islamique.
Les révolutions scientifique et industrielle en Europe ont ouvert un vaste champ de
mutations. Au XIXème siècle, les progrès que l’Europe a connus dans les domaines de la
médecine, de l’éducation, de l’enseignement et des communications ont eu un effet
incontestable sur le monde arabo-islamique. Malgré les formes de confrontation
militaire, on a enregistré plusieurs aspects d’osmose culturelle et d’échanges
commerciaux et intellectuels depuis le début de l’ère coloniale. Nous constatons que
certains manuels scolaires d’histoire dans les mondes arabe et islamique traitent parfois
de ces sujets mais ne les présentent que rarement du point de vue qu’ils renferment un
processus d’échanges culturels positifs entre l’Europe et les mondes arabe et islamique.
Parmi les aspects courants de déformation dans les manuels scolaires en Europe et
dans les mondes arabe et islamique, on peut citer la mise en avant des conflits armés.
C’est ainsi que certains manuels scolaires européens présentent les débuts de
l’histoire islamique comme une guerre ininterrompue avec l’Empire byzantin et
s’attachent à décrire avec forces détails les batailles qui se sont déroulées entre les
musulmans et les byzantins, et, par contre, omettent de mentionner le rôle qu’ont
joué les commerçants musulmans dans la propagation de l’Islam dans nombre de
pays et de contrées à travers le monde.
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De leur côté, les manuels scolaires d’histoires arabo-islamiques présentent, parfois,
les croisades comme étant des guerres religieuses entre les Musulmans, d’une part,
et les Chrétiens européens, d’autre part, en faisant un lien direct entre ces croisades
et le colonialisme européen, laissant ainsi entendre que ce que les croisés du Moyenâge n’ont pu réussir, les ‘’croisés de l’époque moderne’’ ont tenté de le réussir ont
tenté de le réaliser plus tard.
Ces deux approches sont tout aussi nocives l’une que l’autre. La première présente
l’Islam comme une religion qui s’est propagée par le glaive et les Musulmans
comme des ‘’ennemis’’. La seconde présente les européens uniquement comme
‘’des croisés’’, ‘’des colonialistes’’ et ‘’des ennemis’’.
L’exagération dans l’évocation des confrontations militaires en parlant des formes
de rencontres, dans le passé, entre l’Europe et les deux mondes arabe et islamique
est une autre caractéristique des livres scolaires d’histoire en Europe. En effet, il
n’est pas rare de les voir accorder beaucoup d’importance aux croisades, puis à
l’histoire des confrontations en axant sur l’expansionnisme militaire de l’Empire
ottoman et le siège de Vienne au XVIème et XVIIème siècle. Insister sur ces
événements, surtout dans le contexte des actions terroristes qu’a connu le début du
XXIème siècle, et dans le cadre des tentatives que mènent certaines parties
malintentionnées pour déformer l’image de l’Islam et exacerber la tendance de
‘’l’islamophobie’’, est de nature à faciliter la présentation de l’Islam comme étant
une menace permanente et dangereuse pour l’Europe.
La version européenne basée sur les confrontations permanentes entre l’Europe et le
monde arabo-islamique est une version non étayée historiquement, de la même
manière que ne l’est pas celle qui pousse à croire que monde arabo-islamique est
sous la menace d’une attaque permanente de la part de l’Europe.
Les sensibilités religieuses et culturelles
Les classes d’enseignement dans les pays européens comportent actuellement un grand
nombre d’élèves musulmans. Aussi les auteurs des livres scolaires d’histoire enseignés
dans les écoles européennes doivent-ils respecter la présence des Musulmans, et ce en
élaborant des manuels scolaires équilibrés qui accordent une place suffisante à l’histoire
du Monde islamique. Il est particulièrement important que ces manuels soient élaborés
avec un style qui dénote d’une connaissance juste et d’un respect réel de ce que ces
générations montantes peuvent avoir comme foi et comme culture.
Parmi les questions qui attirent l’attention et que font ressortir certaines études
relatives aux manuels scolaires, figure le manque de précision dans l’usage de
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certaines terminologies. Ce qui conduit, par exemple, à former une opinion négative
concernant la Charia qui est un terme qui se rattache presque toujours, dans le
contexte européen, aux lois répressives entrainant de lourdes peines et à
l’interprétation fondamentaliste de ces lois dans certains pays islamiques.
C’est ainsi que la Charia évoque généralement et uniquement, dans l’optique
européenne, les seules peines de flagellation, de lapidation et d’amputation. C’est
pourquoi il revient aux auteurs des manuels scolaires européens de placer le
concept de la Chria dans son contexte réel en partant du fait qu’il ne s’agit pas, à
l’origine, d’un code pénal répressif, mais plutôt d’une législation globale qui
réglemente les domaines public et privé et se compose d’éléments fondamentaux
relatifs à la foi, à la vénération et aux enseignements islamiques. La Charia
embrasse les domaines suivants :
Les rites (les ablutions, la prière, le jeûne, la zakat, et le pèlerinage)
Les transactions (les règles qui codifient les transactions financières, le waqf,
l’héritage, le mariage, le divorce, la garde des enfants, la nourriture, les
procédures pénales, la guerre et la paix, les affaires judiciaires, etc.)
Les mœurs (la morale) : ils comportent les règles morales et de bonne conduite.
Les questions relevant de la foi
Les sanctions : elles concernent les peines qui s’attachent aux atteintes
graves à la morale et à la pudeur.
Il existe également un intérêt en Europe pour le concept du ‘’djihad’’ et qui est
souvent traduit dans les manuels scolaires d’histoire européens par la formule
‘’guerre sainte’’ au lieu de son sens linguistique qui invoque le combat contre le mal
d’une manière générale. Nous trouvons également que le mot ‘’djihad’, dans le
patrimoine culturel islamique, renvoie surtout vers la lutte contre soi, contre ses
mauvais penchants, afin que le Musulman joue pleinement son rôle dans le progrès
de la société dans laquelle il vit.
Les Musulmans n’ont connu le sens du concept de guerre sainte qu’avec les croisades
dont ils ont été d’ailleurs les victimes. Le mot ‘’djihad’’ n’est employé dans le sens de
lutte armée qu’au deuxième degré, tout en sachant qu’il faut toujours rappeler, qu’à
l’origine, il s’agit d’un ‘’djihad défensif’’ ou combat pour se défendre contre
l’agression, donc un combat légitime. L’action militaire dans l’Islam est considérée
comme ‘’le combat mineur’’, tandis que ‘’le combat majeur’’, encore plus important,
est le combat spirituel pacifique qui n’a aucune relation avec l’action militaire.
Le statut de la femme compte également parmi les questions auxquelles
s’intéressent les livres sur l’Islam édités en Europe, qui l’évoquent souvent sous
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l’angle de la polygamie ou de l’héritage. Les élèves européens ne savent pas que la
polygamie dans l’Islam est soumise aux conditions édictées par un verset coranique
auxquelles il est difficile, et même presque impossible, de se conformer, et que si
la fille hérite la moitié de ce qu’hérite son frère, il y a d’autres cas où la part de la
femme dans l’héritage est supérieure à celle de l’homme.
Parmi les autres qui questions chargées d’une sensibilité particulière, nous pouvons
citer celles qui se sont ajoutées aux droits de l’homme. Présenter les droits de
l’homme comme étant un produit direct des valeurs chrétiennes et européennes
relève d’un simplisme patent. En effet, nous ne devons pas oublier que l’adoption
des droits de l’homme n’est autre que le fruit des développements relativement
récents de l’histoire de l’Occident.
Nombre de chercheurs occidentaux estiment que les droits de l’homme ne sont pas
le produit de la modernité en Europe, mais trouvent plutôt que leurs racines se
prolongent dans les profondeurs de l’histoire de l’Islam. Dans ce cadre, les manuels
scolaires arabes mentionnent ‘’la Charte de Médine’’ élaborée par le Prophète
Mohamed (PSL) au VIIème siècle, après concertation avec les communautés juive et
chrétienne qui résident à Médine, et qui garantit à ces deux communautés les mêmes
droits et les mêmes devoirs que ceux accordés au musulmans qui résident dans la cité,
y compris leur droit de pratiquer leurs religions, d’appliquer leurs lois, de construire
leurs lieux de cultes, avec l’engagement de l’armée islamique d’assurer leur défense.
Sur un autre plan, il arrive que les sensibilités religieuses et culturelles soient l’objet
de digressions de la part des auteurs des livres dans les mondes arabe et islamique.
Il est en effet important que les manuels scolaires arabes mentionnent que les
chrétiens d’Orient ont toujours constitué une composante essentielle des sociétés
islamiques depuis l’aube de l’Islam. Jusqu’à présent, les élèves musulmans étudient
et vivent côte à côte avec les Chrétiens orientaux dans la plupart des écoles du
Moyen-Orient.
Les auteurs des manuels scolaires dans les mondes arabe et islamique doivent donc
tenir compte de la nécessité impérieuse de respecter davantage la présence
chrétienne dans les écoles arabes et islamiques. Au cours de l’élaboration des
manuels scolaires, il est nécessaire de prendre en compte les particularités
culturelles des élèves chrétiens et de mentionner l’apport des chrétiens d’Orient tout
au long des différentes époques de l’histoire. Il est nécessaire de faire plus de
lumière sur les différents aspects de la culture chrétienne orientale, représentée dans
l’architecture, les monastères, les églises, les patriarcats, les nonces, les écoles et les
hôpitaux, tout en axant sur le rôle des chrétiens orientaux dans la lutte contre le
colonialisme européen.
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Eglises d’Al-Quds
Les auteurs des livres scolaires d’histoire dans les pays arabes et islamiques doivent
également s’arrêter devant l’image sous laquelle ils présentent la culture et les
concepts européens, qu’ils soient juifs ou chrétiens. Tout en insistant sur le fait que
les états européens ont adopté le principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat et
qu’ils ont, de ce fait, atteint un degré de laïcité où la religion relève désormais du
domaine privé, ils doivent insister également sur le pluralisme qui caractérise
l’Europe. Dans nombre de pays européens l’Eglise constitue encore un facteur
agissant dans la politique, la société et les principes de l’Etat. En Allemagne, par
exemple, l’Etat collecte l’impôt au nom des églises. Plusieurs institutions, telles les
jardins d’enfant, les écoles et les œuvres sociales, reçoivent des subventions de
l’état, et la reine d’Angleterre demeure encore à la tête de l’église anglicane.
Si nous procédons à une analyse de l’image des Européens, des Chrétiens et des
Juifs présente dans les manuels scolaires arabes et islamiques, nous constatons que
ces religions sont parfois présentées du point de vue des valeurs et de la morale
islamiques. Or, il est plus judicieux que les auteurs des manuels d’histoire dans les
mondes arabe et islamique présentent les concepts chrétiens et juifs d’un point de
vue qui ne se limite pas uniquement à la vision islamique, mais qui intègre aussi les
visions chrétienne et judaïque.
Il existe des exemples d’une telle approche dans la pensée islamique moderne, tels
les écrits de Abbass Mahmoud Al Aqaad, de l’Emir Al Hassan Ibn Talal, entre
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autres écrivains musulmans, dont les œuvres publiées présentent des informations
justes sur la foi chrétienne, sur l’église et sur les principales factions chrétiennes,
ainsi que sur tout ce qui se rapporte aux concepts basés sur le nouveau testament et
sur le patrimoine chrétien. Une telle approche positive doit également être adoptée
dans l’élaboration des livres scolaires d’histoire.
Pour éviter le traitement imprécis de certaines questions dans l’élaboration des livres
scolaires d’histoire en Europe et dans les deux mondes arabe et islamique, il est
préférable d’associer des représentants d’autres religions à l’élaboration de ces
manuels. En Allemagne, il est devenu d’usage que des représentants des autres
religions procèdent à la révision des chapitres des livres scolaires qui traitent de
leurs religions. La Syrie a initié un nouveau projet qui consiste à faire écrire les
chapitres qui traitent de la foi chrétienne dans les matières de l’éducation islamique
par des chercheurs chrétiens, au même moment où des chercheurs musulmans
écrivent les chapitres qui traitent de la foi islamique dans les matières de l’éducation
religieuses chrétienne.
De telles approches aident à éviter les digressions de part et d’autre, tout comme
elles représentent un cheminement positif dans le processus de l’élaboration des
manuels scolaires d’histoire aussi bien en Europe que dans les deux mondes arabe
et islamique.
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Chapitre 2
Identification des formes de
rencontres positives avec ‘l’Autre’
Les livres scolaires d’histoire en Europe et dans les mondes arabe et islamique sont
parfois dominés par la mise en relief de la confrontation historique. C’est ainsi que les
manuels d’histoire en Europe ont tendance à s’étendre de manière exagérée sur les
conquêtes islamiques et les croisades dans leur traitement de l’histoire des premières
époques de l’Islam. De leur côté, les manuels scolaires arabo-islamiques ont tendance
à exagérer les effets négatifs de l’impérialisme européen.
L’excès dans la mise en évidence des luttes représente une vision étriquée du passé.
Cette tendance représente un véritable danger à l’orée du XXIème siècle qui voit le
durcissement des positions de nombre de jeunes. Le fait de se concentrer sur ‘l’Autre’
en le présentant comme un agresseur ne fait que jeter l’huile sur le feu de la
confrontation. Aujourd’hui, nous avons besoin plus que jamais de nous retourner sur
les nombreux exemples de convergence avec ‘l’Autre’, et sur ces longues périodes
historiques où la coexistence entre les peuples, les cultures et les religions était une
situation normale et une réalité vécue.
Dans cette partie du présent Guide, nous nous arrêterons devant quatre domaines
d’étude historique qui peuvent aider les élèves à développer une compréhension plus
riche et plus profonde concernant les relations passées entre le Monde araboislamique et l’Europe. Il s’agit de la philosophie et des sciences au Moyen-âge, du
commerce au Moyen-âge et dans les débuts de l’époque moderne, de l’Andalousie
et de l’architecture.
La philosophie et les sciences au Moyen-âge
Le développement intellectuel qu’ont connu les mondes arabe et islamique durant
les IXème et Xème siècles est certainement l’un des plus importants dans l’histoire de
l’humanité. Il est donc nécessaire de faire connaître à la jeunesse d’Europe et du
monde arabo-islamique cette époque importante et ses aspects qui ont fait que son
influence s’est perpétuée jusqu’à nos jours pour marquer la vie des générations
montantes actuelles.
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Les auteurs des manuels scolaires doivent aborder cet essor intellectuel d’une
manière qui s’accorde avec les études spécialisées les plus récentes qui font ressortir
l’interaction civilisationelle et l’osmose culturelle qui se sont produites durant
l’époque abbasside. En effet, pour mesurer le rôle joué par les chercheurs arabes et
musulmans dans les domaines de la philosophie et des sciences, il est nécessaire de
le placer dans un large contexte culturel qui s’étend jusqu’à la Perse, l’Inde, la Chine
et l’Afrique.
En expliquant l’influence de la culture arabo-islamique sur l’Europe durant le
Moyen-âge, les auteurs des manuels scolaires doivent insister sur le rôle central de
l’Islam dans la propagation de la science et du savoir ainsi que dans le
développement de la pensée et l’usage de la raison. Ils doivent, en même temps,
attirer l’attention des élèves sur l’importance des facteurs économiques, tels les
échanges commerciaux à travers de longues distances dans le développement de la
connaissance et de la compréhension humaine.
Les manuels scolaires doivent placer le mouvement de traduction dans son contexte
historique précis. Le IXème siècle a connu un véritable essor de la traduction, à
l’époque des Abbassides, surtout sous le règne du Khalife musulman Al-Maamoun.
Ainsi, de nombreux apports scientifiques et culturels à la civilisation humaine ont
eu pour point de départ ‘’Beyt El-Hikma’’ à Bagdad, grâces aux traducteurs
chrétiens, juifs et musulmans arabes et non arabes. La traduction a fait de grands
progrès, sous le règne d’Al-Maamoun, qui se sont poursuivis durant les règnes de
ceux qui lui ont succédé parmi les Khalifes musulmans, pour atteindre l’Andalousie
sous le règne du Khalife musulman Aderrahmane Naçer et de son fils Al-Hakam
Almoustansir.
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La philosophie
Yakoub Ibn Ishâq Al-Kindî
La philosophie islamique est née de l’activité
intellectuelle remarquable dans laquelle les
musulmans perses, arabes, turcs, berbères et autres ont
joué un rôle actif. Cependant, l’apport des arabes
musulmans s’est distingué de manière particulière, ce
qui nous amène à présenter la philosophie islamique
comme étant une philosophie arabe. Le début du IXème
siècle a vu la naissance d’une philosophie arabe
islamique remarquable, avec l’avènement de grands
philosophes tels Al-Kindi (le philosophe des arabes),
Al-Farâbî (le deuxième maître), Ibn Sinâ (le Cheikh
principal) et Ibn Rochd (le petits-fils). En abordant la
philosophie arabe, les auteurs des manuels scolaires se
doivent d’attirer particulièrement l’attention des
élèves sur les deux points essentiels suivants :
La relation entre la science et la religion :
La philosophie islamique s’est caractérisée par
certains aspects dont l’analyse de la question de la
divinité à travers une vision globale et intégrale qui
Al-Farâbî
s’appuie sur l’abstraction et le rationnel. En
s’appuyant sur le rationalisme, les philosophes musulmans ont fait usage de la
raison et de la logique dans l’interprétation des textes religieux. D’Al-Kindi à Ibn
Rochd, les penseurs musulmans se sont employés à réconcilier les différentes écoles
philosophiques pour parvenir à une approche complémentaire entre la philosophie
et la religion. A titre d’exemple, le savant chimiste Jaber Ibn Hayyan s’est appuyé,
dans ses travaux sur l’expérimentation et l’observation, tandis qu’Al-Kindi s’est
employé à prouver l’existence d’Allah à travers les mathématiques.
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L’étude par les philosophes musulmans de la
philosophie grecque et leur apport à celle-ci a eu son
influence sur les fondements philosophiques en
Europe.
Ibn Rochd (Averroès)
Al-Ghazali
Thomas d’Aquin
Les philosophes européens ont procédé à la
traduction de nombres de textes arabo-islamiques
durant le Moyen-âge dont, notamment, ‘’Kitab
Chifaa’’ d’Ibn Sinâ et ‘’Tahafout Attahafout’’ d’Ibn
Rochd.
La pensée islamique a contribué à ancrer les
conceptions scientifiques telles l’examen minutieux
(la vérification et l’exploration), l’induction et la
formulation des hypothèses. Il existe beaucoup
d’exemples qui illustrent l’influence culturelle araboislamique sur l’Europe dans le domaine de la
philosophie. C’est ainsi que Thomas d’Aquin s’est
inspiré de la démarche intellectuelle des imams et
philosophes musulmans, tels Al-Kindi et Al-Ghazali.
Une autre illustration du niveau de propagation de la
philosophie islamique réside dans le degré de
diffusion de ‘’la méthode d’Ibn Rochd’’ basée sur
l’observation rationnelle et qui était enseignée dans
les écoles françaises sur ordre du roi Louis XI. Quant
au troisième exemple, il se révèle dans la pratique
philosophique consacrée au renforcement des critères
scientifiques pour juger de la viabilité de la
production intellectuelle avant son acceptation ou son
rejet. Cette pratique méthodologique était l’essence
même de la philosophie d’Ibn Rochd.
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Les sciences
Al-Khawarizmî
Il est important pour les élèves de savoir que les
apports de la culture arabo-islamique à la
connaissance scientifique ne se sont pas limités au
seul mouvement de traduction. En effet, les penseurs
et les chercheurs arabes et musulmans n’étaient pas
seulement de simples traducteurs, mais plutôt des
producteurs d’idées. Ils commentaient les textes et
développaient les idées scientifiques à travers les
expériences pratiques pour confirmer l’authenticité de
la pensée. La créativité dont ont fait preuve les Arabes
et les Musulmans durant la période située entre le
IXème et le XIème siècle, surtout dans les domaines de
l’astrologie, des mathématiques et de la médecine,
leur a permis d’apporter une grande contribution au
progrès scientifique de l’humanité.
Les Arabes ont également joué un rôle remarquable
dans l’étude des différents opérateurs de calcul, y
compris le calcul différentiel et le calcul intégral,
l’algèbre, la géométrie, le calcul des triangles,
l’amélioration des systèmes de numérotation indienne
Descartes
et arabe, y compris l’ajout de l’usage du zéro. Ils ont
également mis en place les règles de l’algèbre, inventé les symboles et développé les
équations jusqu’au quatrième degré et transmis le système décimal à l’Europe. AlKhawarizmi est considéré comme l’un des plus grands promoteurs de la pensée
mathématique humaine au plan universel. Il est utile de mentionner une autre des
empreintes que les Arabes et les Musulmans ont laissées en Europe dans le domaine
des mathématiques, à savoir celle d’avoir fait connaître la numérotation arabe à
l’Europe. D’une manière générale, on peut considérer que les principaux apports des
arabes au développement des mathématiques sont :
Le système de numérotation
La division du calcul différentiel et intégral en deux procédés, l’un théorique
et l’autre pratique
L’invention de la multiplication par l’usage de la toile des logarithmes
Les équations du troisième degré
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Dans la science physique, Jaber Ibn Hayyan a posé la
théorie du mercure et du phosphore dans la
composition des minerais. Al-Razi devait plus tard y
ajouter une matière salée. Grâce à leurs efforts
scientifiques, la réforme apportée à la théorie des
minerais, comme étant composés de sel, de phosphore
et de mercure, était la théorie dominante en Europe
jusqu’à la fin du XVIIIème siècle.
Jabir Ibn Hayân
Ibn Al-Haytham
Léonard de Vinci
Les découvertes et les travaux de nombreux chimistes
arabes ont joué un rôle déterminant dans l’histoire des
sciences et de la civilisation. Les minéraux acides,
l’alcool et l’usage de la poudre figurent parmi les plus
importantes de ces découvertes.
Dans le domaine de la physique, s’est distingué Ibn
Al-Haytham dont le livre ‘’Kitab Al-Manadhir’’ qui
traite de la science de l’optique a été traduit vers le
latin et a eu une grande influence sur Roger Bacon,
Léonard de Vinci et Johannes Kepler. Les Arabes ont
été les premiers à jeter les bases de l’idée de l’espace
aérien de la terre, de la force d’attraction terrestre et
de la force de la centrifugation, qui ont fondé les
travaux de Newton.
Roger Bacon
Johannes Kepler
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Les Arabes ont brillé dans les domaines de la
médecine et de la pharmacie grâce au fait qu’ils ont
allié les expériences médicales grecques, indiennes et
chinoise. Les cursus des études médicales arabes se
composaient de deux cycles, le premier théorique et le
second pratique et comporte un entrainement sur la
manière de prodiguer les soins et la médicamentation.
Abu Bakr Al-Râzî
Les européens ont acquis leur connaissance de la
médecine et de la pharmacie grâce aux savants arabes,
tels Al-Razi, Ibn Sinâ, Ibn Zahr et Ibn Rochd, auteur
du livre ‘’AlKulliyat fi T’tib’’. Le premier grand
hôpital et la première grande formation théorique et
pratique des médecins remontent à l’âge d’or de
l’Islam. Les écoles et instituts de médecine européens
ont recouru, dans leur enseignement et dans le
développement de nouvelles techniques médicales,
aux ouvrages arabes de médecine traduits vers le latin.
Les auteurs arabes et musulmans des livres scolaires
d’histoire s’accordent à louer cette époque historique,
tout comme certains manuels scolaires en Europe
Ibn Sîna (Avicenne)
insistent fortement sur les progrès scientifiques et
ème
culturels qu’a connu le X siècle à Bagdad, ainsi que sur l’importance de ces
progrès pour la pensée et la compréhension scientifique en Europe. Cependant, les
manuels scolaires d’histoire européens peuvent jeter encore plus de lumière sur les
aspects de convergence positive entre l’Europe et les deux mondes arabe et
islamique.
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Le commerce au Moyen-âge et au début de l’époque moderne :
Le commerce a toujours constitué un trait d’union entre les mondes arabe et
islamique, d’une part, et l’Europe, d’autre part. Le fait de mettre en exergue les
relations commerciales durant le Moyen-âge et les débuts de l’époque moderne crée
un équilibre dans le rapport des forces en ce qui concerne les luttes et les conflits
qu’ont connu ces époques historiques. Quels sont les aspects des relations
commerciales qui peuvent éveiller la curiosité des élèves ? Et quels sont les
dimensions spécifiques au commerce qui peuvent constituer l’objet d’études de cas
intéressants dans les manuels scolaires d’histoire ? Il y a un certain nombre de
versions qui peuvent être présentées dans ce cadre, à savoir :
Le commerce au Moyen-âge et l’importance de la région méditerranéenne.
Avec la fin du Moyen-âge, l’Europe possédait d’importants ports commerciaux à
Gênes, Venise, Pise, Amalvie, Marseille et Barcelone. Tout comme il y avait des
ports florissants en Orient et au Maghreb, tels Alexandrie, Akka, Beyrouth,
Antakiya, Tunis et Tripoli. Ces deux derniers ports constituaient des centres pour le
commerce de transit entre l’Europe et l’Orient et le terminus des caravanes
commerciales venant d’Afrique et d’Asie. Parmi les sujets dignes d’être enseignés
aux élèves figurent certainement la nature du commerce au Moyen-âge, l’importance
de la région méditerranéenne et les différents ports existants à cette époque.
Le changement des modes de l’activité commerciale depuis le XVIème siècle.
En effet, le début du XIème siècle a vu la rupture du monopole qu’exerçaient Gênes
et Venise sur les réseaux des échanges commerciaux. Les Portugais avaient réussi à
dépasser la Presqu’île Arabique et le Détroit d’Ormuz pour fonder des relations
directes avec la Perse et l’Inde.
De leur côté, les Anglais et les Hollandais ont réussi à dominer une partie du marché
du Bilad Chaam (ancienne Syrie), tandis que les Français ont mis à profit leur alliance
avec les Ottomans pour renforcer leur position commerciale dans l’ancienne Syrie et
au Maghreb Arabe. Ces mutations qu’ont connues les modes de l’activité commerciale
peuvent représenter des études de cas intéressants dans les manuels scolaires.
L’influence des échanges commerciaux sur la mobilité et les migrations.
Parmi les résultats dignes d’intérêt qui ont découlé de l’activité commerciale entre
l’Europe et les mondes arabe et islamique figure la formation de nouvelles sociétés
cosmopolites dans les ports et les centres commerciaux. Les groupes de
commerçants venant de Marseille, de Livorno, de Pise, de Gênes et de Venise
s’établissaient dans divers ports des deux mondes arabe et islamique, tels
Alexandrie, Akka, Antakiya, Istanbul ou Tunis. Aussi, les expériences des
commerçants qui on vécu dans les sociétés de ‘l’Autre’ ou qui ont traité avec elles
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de près peuvent-elles constituer un sujet intéressant d’études qui aident à changer
nombre de stéréotypes répandus concernant ‘l’Autre’.
La nature des privilèges commerciaux.
Les gouvernants musulmans ont accordé, à divers moments de l’histoire, des
privilèges spéciaux aux commerçants européens. C’est ainsi que les Mamluks et,
après eux, les sultans hafsides, puis les gouvernants perses et ottomans ont établi des
relations diplomatiques avec certains états européens et signé des traités de paix et
des accords commerciaux avec les différentes républiques italiennes. Certains de ces
accords ont comporté des clauses qui permettent aux commerçants chrétiens de
développer leurs activités dans les pays arabes et islamiques. Il leur a été permis de
résider dans des lieux particuliers, des ‘’hôtels’’, qui leur offraient le gite et où ils
entreposaient leurs marchandises. Les expériences des commerçants européens et
les mobiles qui ont poussé les gouvernants arabes et musulmans à leur accorder des
privilèges commerciaux, font partie des sujets qui méritent d’être étudiés.
L’influence du commerce sur la vie quotidienne en Europe et dans les
mondes arabe et islamique .
Au Moyen-âge et au début des temps modernes, le commerce avait grandement
influencé et changé la vie courante des gens en Europe et au monde arabo-islamique.
Ainsi, les nouvelles manières de construire, de s'habiller, de se nourrir et de se
comporter pourraient constituer un fascinant sujet d'étude pour les élèves. En cette
période, le commerce a également entrainé d'importants échanges de savoir, en ce
sens qu'il a activement contribué au transfert des techniques, des arts et des sciences
telles que la médecine, les mathématiques ou la philosophie. Par exemple, la relation
directe qui liait les européens avec les Arabes musulmans a favorisé la mise en place
de nouveaux systèmes comptables et financiers, de même qu'elle a amélioré les
systèmes de navigation. En mettant la lumière sur les différentes manières par
lesquelles le commerce influait la vie des gens, les étudiants pourront découvrir et
comprendre un aspect important de l'échange interculturel.
L’Andalousie : Etude du cas de coexistence religieuse
et de tolérance culturelle
Nous avons besoin, aujourd’hui plus que jamais, que les livres scolaires d’histoire se
retournent sur ces longues périodes de l’histoire où la coexistence entre adeptes de religions
différentes était le mode dominant et la situation normale. Plusieurs zones géographiques
et étapes historiques peuvent être prises comme exemple à cet égard. En effet, des formes
de coexistence et de convergence arabo-européens fructueux ont été connues en Sicile au
cours du Moyen-âge, en Inde sous le règne des sultans Mogols musulmans dans les XVIème
et XVIIème siècles et en Bosnie dans les XVIIIème et XIXème siècles.
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Mais nous trouvons dans l’Andalousie du Moyen-âge un contexte qui peut être le
plus riche et le plus à même de susciter la curiosité des élèves quant au pluralisme,
à la diversité, à la tolérance et à la coexistence à travers l’histoire des relations euroislamiques. La longue histoire de l’Andalousie, depuis l’arrivée d’Abderrahmane
Dakhel à Cordoue dans la moitié du VIIIème siècle jusqu’à l’expulsion du dernier des
Nasrides en 1492, présente une version complexe, celle des conflits et de l’animosité
et celle de la paix et de la tolérance. En effet, depuis le début du XIème siècle,
l’agression chrétienne et les divisions au sein des Musulmans ont conduit à une
déchirure en Andalousie. Cependant, les gouvernants musulmans en Andalousie ont
réussi à créer une culture épatante au sein de laquelle Musulmans, Chrétiens et Juifs
ont coexisté dans un contexte de paix et de prospérité relatives.
L’Andalousie islamique était devenue, durant les IXème et Xème siècles, l’un des
centres les plus vivants et les plus actifs du monde, grâce à la conjugaison de la force
militaire, de l’activité commerciale, de l’éducation et de la science dont elle était le
creuset. L’Andalousie avait représenté le point géographique et l’instant historique
où ont coexisté, côte à côte, les adeptes des trois religions et où ils ont créé, malgré
leurs différences et leurs conflits épisodiques, une culture riche et prospère basée sur
la pluralité des identités et la tolérance mutuelle. Les premiers gouvernants
musulmans d’Espagne avaient fondé leur pouvoir sur une interprétation éclairée du
concept des dhimmis (‘’Ahl dhimma’’)’. Ainsi, les adeptes des trois religions ontils partagé la vaste culture qui refuse l’extrémisme religieux et politique, et œuvre
pour un développement intellectuel, artistique et esthétique.
La Grande Mosquée de Cordoue
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Le premier défi auquel sont confrontés les auteurs des manuels scolaires dans leur
écriture de l’histoire de l’Andalousie consiste à définir un domaine particulier sur
lequel doit se concentrer l’enseignement des élèves. Certaines questions de
recherche peuvent dégager un espace pour l’étude de l’histoire de l’Andalousie.
Parmi celles-ci : Pourquoi les historiens sont-ils incapables de s’accorder entre eux
en ce qui concerne l’Andalousie ? Que révèle l’histoire de la Mosquée de Cordoue
? Qu’est ce qui intéressait les gens, malgré leurs différences, dans l’Andalousie du
Xème siècle ? Qu’est ce qui conférait à Cordoue son caractère remarquable au Xème
siècle ? Comment les habitants de Cordoue voyaient-ils leur monde au Xème siècle ?
Que pouvons-nous apprendre des édifices et de l’architecture de l’Andalousie ?
Qu’est ce qui a mis fin à la paix et à la tolérance en Andalousie ? Quel est l’instant
qui a vu le changement le plus rapide qu’a connu l’Andalousie ? Que devons-nous
retenir de Cordoue pendant le Xème siècle ?
Quant à la question ‘’que révèle l’histoire de la Mosquée de Cordoue ?’’, elle permet
d’adopter une méthode à même de suivre le temps, pas à pas, dans l’étude de
l’histoire de l’Andalousie et donne aux élèves l’occasion de comprendre les aspects
du changement et de la continuité qui ont façonné l’Espagne islamique. Les élèves
remarqueront que l’Andalousie a vu se succéder et, parfois, coexister des périodes de
restrictions et parfois de répression avec des périodes d’essor de la coopération dans
les domaines du commerce, des arts, des sciences et de l’osmose entre les cultures.
Cette narration historique peut couvrir les principales étapes qui ont marqué
l’extension et la décoration de la Mosquée de Cordoue et finir par la décision
choquante, prise au début du XVIème siècle, de construire une cathédrale au cœur
même de la Mosquée. Les élèves peuvent être invités à s’arrêter devant ce que révèle
l’histoire de la Mosquée de Cordoue concernant les questions suivantes :
Le penchant des Musulmans vers l’art et l’esthétique,
La relation entre Musulmans, Chrétiens et Juifs,
La relation entre Cordoue et le Monde islamique dans toute son étendue
Parmi les aspects les plus importants de l’étude du passé pour les générations
montantes figurent l’analyse et la présentation des images du pluralisme et de la
diversité. Nombre d’élèves trouveront une difficulté intellectuelle à se départir de
leurs idées préconçues liées au XXIème siècle et à s’accorder avec des croyances et
des positions totalement différentes des leurs. Il est donc judicieux d’analyser les
croyances et les positions des habitants de l’Andalousie du Xème siècle à travers
l’orientation de l’attention des élèves pour s’arrêter devant la question qui dit :
‘’qu’est-ce qui intéressait les gens, malgré leurs différences, dans l’Andalousie du
Xème siècle ?’’ Tout comme on peut raconter l’histoire de l’Andalousie des IXème et
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Xème siècle et inviter les élèves à méditer sur l’opinion des différentes communautés
musulmane, chrétienne et juive quant à la manière de gagner sa vie et quant à la
religion, la science, l’art, l’esthétique, la justice, l’équité, le passé de l’Andalousie et
son avenir.
L’art et l’architechture
Palais de l'Alhambra à Grenade
Le monde arabo-islamique et l’Europe ont produit durant des siècles un certain
nombre des plus impressionnants types d’art et d’architecture dans le monde. L’un
des plaisirs de la vie consiste à découvrir les réalisations artistiques et architecturales
produites par notre culture et par son interaction avec les arts et l’architecture de
’l’Autre’. L’un des objectifs principaux de l’éducation doit être celui de cultiver et
de nourrir le sens de l’admiration vis-à-vis de la capacité des hommes à la création.
Le programme scolaire d’histoire peut jouer un rôle important dans l’éveil de la
curiosité autour des édifices et des arts propres aux différentes cultures. Cependant,
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il y a là un danger qui réside dans l’omnipotence, dans les manuels scolaires, des
sujets relatifs à la politique, à l’économie et aux conflits, ce qui empêche les jeunes
générations à prendre connaissance du patrimoine artistique créé par leurs propres
cultures et celles des autres à travers les programmes d’histoire.
La Cathédrale de Reims
Les auteurs des livres scolaires d’histoire et les professeurs d’histoire peuvent aider
les élèves à nourrir un sens de l’esthétique orienté vers le caractère saisissant de
l’architecture et des arts. Ils peuvent offrir un espace et un temps qui permettent aux
élèves d’admirer la beauté de ‘’la Mosquée des Omeyade’’ à Damas, la Mosquée
Al-Aqsa et le Dôme du Rocher à Al-Qods Al-Charif, la Cathédrale de Reims en
France, la Mosquée du Sultan Ahmed et l’Eglise Aya Sophia d’Istanbul, ou les
mosquées et les écoles de Fès.
Ils peuvent également encourager les élèves à avoir une attitude interactive avec le
génie artistique du hollandais Peter Bruegel, la beauté de la calligraphie arabe et
des arts décoratifs islamiques. Le développement du sens de l’esthétique et de
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Aya Sophia d'Istanbul
l’admiration de l’architecture et des arts qui ont caractérisé l’histoire des sociétés
arabo-islamiques et européennes est une partie importante de l’étude de l’histoire.
Cependant, l’histoire offre aux élèves bien plus que cela. A travers l’examen du
contexte historique qui a vu la création de l’art et du monument architectural,
l’histoire peut aider les élèves à apprendre des leçons importantes concernant la
relation entre l’art, le monument architectural et la société dans le passé.
Les livres scolaires d’histoire comportent généralement des photos ou des dessins
des immeubles et des arts pour illustrer les différentes époques ou aspects
historiques. Mais quand on place les idées concernant les croyances, la force, la
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politique et la vie quotidienne au centre de l’action
éducative, il revient alors aux auteurs des livres
scolaires de susciter chez les élèves une
compréhension plus profonde de la relation entre l’art,
l’architecture, la société et le passé.
Tout au long des siècles, les habitants des deux
mondes arabe et islamique et d’Europe ont développé
l’art et l’architecture en tant qu’expression directe de
la foi. En effet, les édifices religieux ont toujours
Ibn Khaldoun
exprimé la foi. Depuis le VIIème siècle, l’Islam a
profondément influencé les arts et l’architecture de nombres de contrées à travers
le monde.
On peut voir cette expression esthétique de la foi dans un bel exemplaire du Saint
Coran, ou dans l’architecture intérieure ou extérieure d’une mosquée donnée, ou
encore dans les designs de toute autre œuvre artistique religieuse. Tout comme on
peut trouver dans les cathédrales, les églises, les synagogues et les œuvres
artistiques religieuses en Europe un témoignage de la relation intime entre
l’architecture, l’art et la foi chrétienne au Moyen-âge.
L’étude des édifices et des arts dans leurs contextes religieux et sociaux peut aider
les élèves à comprendre les situations et les croyances fondamentales qui étaient
celles des gens dans les sociétés antérieures.
L’historien arabe et musulmans Ibn Khaldoun (1332-1406) a affirmé que les villes et
les autres monuments historiques reflètent les familles régnantes sous lesquelles ils ont
été édifiés. Parmi les fonctions importantes qu’ont accompli l’art et l’architecture, tant
en Europe que dans les mondes arabe et islamique, figure celle d’avoir renforcé le
pouvoir des gouvernants et de l’élite. L’étude de la relation entre le pouvoir et l’art
peut être un sujet attirant pour les élèves. L’on peut choisir une ville, un édifice ou une
œuvre artistique donnés pour servir d’introduction à une telle étude.
Parmi ces exemples, on peut citer la ville de Bagad à l’époque Abbasside, le palais
d’Abderrahmane III en Andalousie, le palais d’Alhambra à Grenade, le palais de
Versailles, un fort ou une demeure rurale quelconque, ou un portrait peint d’un
gouvernant donné. Etablir le lien, dans les manuels d’histoire, entre un édifice ou
une œuvre d’art et ceux qui l’ont bâti ou réalisée, est un moyen par lequel les auteurs
de ces manuels et les enseignants aident à développer la connaissance et la
compréhension de l’histoire par les élèves.
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Mohamed II
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Parmi les exemples pertinents de l’utilisation d’un
portrait pour aborder des sujets plus larges concernant
le pouvoir, on peut mentionner l’une des œuvres
artistiques de la cour impériale ottomane. En 1994, à
la suite du traité de paix entre l’Empire ottoman et la
ville de Venise, le gouverneur de cette dernière
envoya l’artiste vénitien Gentile Bellini pour travailler
dans la cour du Sultan ottoman Mohamed II. Au cours
de son travail dans cette cour, Bellini a peint un
portrait du Sultan, qui est devenu le célèbre tableau
exposé actuellement dans la salle nationale des arts à
Londres.
Ce tableau comporte beaucoup d’éléments
impressionnants pour les jeunes générations. L’on peut
alors poser la question suivante aux élèves : qu’inspire
ce tableau par rapport à la personnalité et à l’autorité de
Mohamed II ? Quels sont les effets politiques,
diplomatiques, matériels et culturels qui se cachent
derrière ce portrait ? Bellini avait fixé le sujet de son
tableau dan un moment précis, qui montre l’essence du
gouvernant musulman dans le cadre de l’ère de la
Gentile Billini
renaissance. Bellini a ainsi servi de pont qui relie
l’Europe et le monde ottoman. Il a appris certaines
choses de l’art islamique durant son séjour à Istanbul et, de leurs côté, les artistes
musulmans ont assimilé les techniques picturales dans lesquelles excellaient les italiens.
Se concentrer sur un seul artiste dans un laps de temps donné est une bonne méthode
pour aider les élèves en Europe et dans les mondes arabe et islamique à comprendre
les profondes influences culturelles réciproques. Plus précisément, les XVème et
XVIème siècles présentent un riche contexte pour étudier les relations qui existaient
entre l’Europe les mondes arabe et islamique. Au cours de ces dernières années, les
historiens ont procédé à la réécriture de la version du XIXème siècle concernant
l’époque de la renaissance européenne avec ce que l’Europe a connu de prospérité
dans les domaines des arts et de l’architecture alors qu’elle était restée loin de toutes
les influences extérieures.
C’est ainsi que les historiens contemporains reconnaissent maintenant la grande
importance de l’activité commerciale et des échanges culturels entre
Constantinople, à Bagdad et à Pékin. Nous retrouvons ainsi, dans les tableaux
d’artistes tels Giotto, Uccello et Fra Angelico, des écritures en arabe (généralement
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tirées du Saint Coran) peintes sur les habits des Saints et sur les portraits de la
Vierge. De tels détails peuvent rappeler aux élèves que la renaissance européenne a
été le produit des échanges entre les différentes croyances et cultures.
Enfin, les études qui se rapportent aux demeures, aux jardins, aux hôpitaux, aux
écoles, aux agences, aux échoppes, aux usines, à la céramique, aux meubles et autres
édifices et œuvres d’art, peuvent aider les élèves à comprendre les structures de la
vie quotidienne dans le passé. L’analyse détaillée des maisons et du mobilier des
demeures des paysans dans un village de France au Moyen-âge, l’analyse du
domicile d’un commerçant de Damas ou de Fès, la comparaison de l’environnement
architectural à Londres et au Caire au XVème siècle, sont autant de sujets qui ouvrent
des fenêtres sur la diversité et le pluralisme dans l’histoire des sociétés d’Europe et
des deux mondes arabe et islamique.
La Mosquée Al-Qarawiyine à Fès
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Les échanges culturels entre l’Europe et les mondes arabe et islamique ont toujours
été réciproques tout au long de l’histoire. Par conséquent, il faut jeter plus de
lumière sur ces échanges dans les manuels scolaires d’histoire. Les auteurs des
manuels scolaires et les enseignants peuvent attirer l’attention des élèves par
l’étude de l’influence de l’architecture islamique sur l’Europe durant le Moyenâge, ainsi que par l’observation du patrimoine architectural qui porte le témoignage
d’influences multiples à Palerme, Cordoue, Fès, Al-Qods et le Caire. Une plus
grande mise en valeur des réalisations artistiques et architecturales des habitants de
l’Europe et des mondes arabe et islamique et de la longue histoire de l’interaction
positive entre ces deux cultures, offrira une riche expérience éducative à tous les
élèves.
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Chapitre 3
Découverte de modèles historiques
chargés d’aspects émotionnels
et polémiques, et proposition d’altenatives
Malgré toutes les formes de rencontre positive entre les mondes arabe et islamique
et l’Europe dans le passé, l’histoire mentionne également des époques qui ont vu des
confrontations et des conflits. La leçon d’histoire peut offrir aux élèves un espace
‘’sécurisé’’ pour étudier ces aspects controversés de l’histoire. Les manuels
scolaires d’histoire jouent un rôle central pour aider les élèves à étudier les
événements controversés à partir de points de vue différents et avec des méthodes
qui ne renforcent pas les stéréotypes concernant ‘l’Autre’.
Le meilleur procédé pour cela consiste à présenter l’histoire comme étant un
contenu et une forme de connaissance. Il ne suffit pas de porter les réalités relatives
à l’évènement qui comporte des aspects émotionnels et controversés à la
connaissance des élèves, mais il faut plutôt intégrer les réalités cognitives au sein
d’un processus éducatif qui englobe d’autres aspects, tels l’étude des sources
originelles et les différents points de vue contemporains. Le fait que les auteurs des
manuels scolaires mettent l’accent sur le processus de recherche scientifique en tant
que tel peut aider les élèves à comprendre la complexité qui caractérise les
évènements historiques controversés et de dépasser la position qui voit les
évènements du passé d’un point de vue unique : ou blanc ou noir.
Le traitement des versions historiques différentes et les procédés par lesquels on
peut voir les évènements historiques de points de vue différents constituent un autre
aspect de la pratique juste de l’enseignement de l’histoire. Il est de la plus haute
importance de souligner les procédés que les hommes ont suivi au cours des âges
ultérieurs pour la refondation et la révision des versions relatives aux événements
historiques controversés, et la mise en exergue de l’objectif visé derrière les
différentes explications et interprétations historiques, ainsi que la relation entre les
interprétations et les preuves disponibles à l’heure actuelle. Parmi les facteurs qui
menacent la fiabilité de l’enseignement des aspects de l’histoire porteurs de
passions et de controverses, figure le fait d’ignorer que l’histoire, en tant que telle,
est une matière sujette à la controverse et à la discussion.
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Ce chapitre s’articule sur cinq aspects émotionnels et controversés dans l’étude de
l’histoire en ce qui concerne la relation entre l’Europe et le monde arabo-islamique,
à savoir : la propagation de l’Islam, les croisades, l’Europe et l’Empire ottoman, le
colonialisme européen et la relation de l’Europe avec le conflit israélo-arabe. On
s’arrête ici devant des questions historiques et pédagogiques précises dans leur
relation avec ces évènements historiques, tout comme on présente des propositions
quant aux méthodes idoines pour les traiter.
Les conquêtes islamiques
Les conquêtes islamiques ont atteint l’Empire sassanide dès le premier siècle après
la mort du Prophète Mohamed (PSL). Il s’agit des territoires qui englobaient l’Irak
et l’Iran actuels. Les armées islamiques ont poursuivi vers le nord et l’ouest dans
les profondeurs de l’Empire byzantin et ont conquis Bilad Chaam et l’Egypte. En
705, les conquêtes islamiques avaient atteint l’Afghanistan d’aujourd’hui et, en 711,
elles avaient atteint le nord de l’Inde et l’Asie centrale. Ces conquêtes se sont
également étendues vers l’Ouest. En 700, les Musulmans avaient établi leur
domination sur toute la côte nord de l’Afrique et, en 711, les armées islamiques
avaient conquis l’Espagne. Ces conquêtes ne se sont arrêtées qu’en France avec la
bataille de Potiers en 732. Ainsi donc, les conquêtes islamiques et la propagation de
l’Islam au cours des XIIème et XIIIème siècles auront été parmi les développements les
plus importants qu’a connu l’histoire de l’humanité.
Les conquêtes islamiques représentent un sujet qui revient régulièrement dans les
manuels scolaires européens. Dans une étude comparée réalisée en 1995 concernant
l’image de ‘l’Autre’ dans les livres scolaires d’histoire dans sept pays de la région
méditerranéenne (France, Espagne, Grèce, Egypte, Jordanie, Liban et Tunisie), il est
apparu que la présentation de l’Islam dans les manuels scolaires européens commence
généralement par la narration ‘’des expansions islamiques’’. Une autre étude, réalisée
dix ans après, mentionne la persistance de la même concentration sur les ‘’expansions
islamiques’’. Les conquêtes islamiques sont mentionnées dans nombre de manuels
scolaires européens comme étant des conquêtes purement militaires.
En effet, au lieu de commencer par l’explication des concepts islamiques et des
principes de l’Islam ainsi que par le rôle des commerçants musulmans dans la
propagation de l’Islam en dehors de toutes batailles ou guerres, certains manuels
scolaires européens présentaient les armées islamiques soumettant les peuples par la
force, ‘’exerçant contre eux toutes les formes d’humiliation et pillant leurs biens et
leurs richesses’’. Nous trouvions certains manuels scolaires qui présentent une
image stéréotypée des conquérants musulmans en tant qu’agresseurs et razzieurs qui
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portent avec eux la terreur et représentent une source de menace extrême et
permanente pour leurs voisins.
Au cours des dernières années, les auteurs des livres scolaires européens ont
commencé à encourager les élèves à développer une conscience plus profonde dans
leur compréhension de la propagation de l’Islam. Le fait de poser la question de
savoir quelles sont les raisons dérrière la propagation de l’Islam représente une
approche causale qui attire l’attention des élèves et à travers laquelle on peut faire
connaître aux élèves nombre de ces causes d’ordre militaire, économique, religieux
et social. Il s’agit, en tout cas, d’une question qui se situe au cœur de l’étude de
l’histoire.
En effet, les historiens ont divergé sur l’interpénétration de ces causes ainsi que sur le
meilleur procédé pour expliquer le succès de l’Islam, ce qui peut encourager les élèves
à formuler leurs arguments propres à eux quant à ces causes. Les auteurs des manuels
scolaires peuvent renforcer la logique causale chez leurs élèves en ce qui concerne la
propagation de l’Islam par divers procédés. Ils peuvent, par exemple, présenter un
grand nombre d’’’idées causales’’ qu’il reviendra aux élèves de classer de diverses
manières pour sortir avec une interprétation causale convaincante. Les ‘’idées
causales’’ suivantes peuvent aider les élèves à parvenir à une preuve et à formuler un
argument causal convaincant en ce qui concerne la propagation de l’Islam :
Les deux grands empires (byzantin et sassanide) n’avaient plus la force de
combattre les musulmans après s’être épuisés dans la guerre qu’ils se livraient
eux-mêmes.
La foi des Musulmans les a poussés à l’héroïsme sur le champ de bataille. La
religion islamique interdit la guerre d’agression et autorise la guerre pour
l’auto-défense seulement. Aussi faut-il faire la distinction entre certains
événements historiques et la religion islamique et ses commandements.
Beaucoup de peuples abhorraient leurs anciens dirigeants et ont considéré les
Musulmans comme des libérateurs.
L’impôt que les chrétiens et les juifs versaient aux nouveaux gouvernants
musulmans était plus léger que celui qu’ils versaient à leurs anciens
gouvernants byzantins ;
Les gouvernants musulmans étaient généralement plus tolérants que les
Chrétiens byzantins vis-à-vis des Chrétiens et des Juifs.
L’occasion était offerte à certaines tribus arabes pour s’enrichir en participant
aux conquêtes islamiques.
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Les Arabes étaient des soldats aguerris qui possèdent la combativité, la
rapidité de mouvement et la capacité de surprendre l’ennemi.
Les armées arabes possédaient des armes impressionnantes, tels le catapulte.
Les Arabes avaient bâti une force maritime.
Les Arabes n’ont pas contraint les Chrétiens et les Juifs à embrasser l’Islam.
Les commerçants arabes ont contribué à la propagation de l’Islam qui a
pénétré dans certaines contrées grâce à eux.
L’Islam avait unifié les Arabes, ce qui a accru leur force. Ainsi les armées
arabes avaient une force suffisante pour mater les révoltes et les rebellions
dans les régions sous leur domination.
Les berbères se sont joints en Afrique du Nord aux armées islamiques, ce
qui a augmenté la force de celles-ci.
Les enseignants ont contribué à l’appel des populations pour embrasser
l’Islam, surtout en Afrique et en Asie.
Le fait de faire connaître aux élèves un vaste champ de facteurs de causalité et de
les inviter à formuler leurs interprétations de ces causes constituent deux stratégies
adaptées pour les aider à dépasser les interprétations superficielles et simplistes qui
ne présentent ‘l’Autre’ que sous le visage d’un agresseur.
Les croisades
Les croisades qui ont eu lieu entre le XIème et le XIIIème siècle ont constitué un
tournant majeur dans les relations entre l’Europe et le monde arabo-islamique. Pour
ce dernier, ces croisades sont devenues l’un des épisodes historiques les plus
controversés de ses relations avec l’Europe. Présenter les croisades de manière
superficielle et simpliste dans les manuels scolaires d’histoire en Europe et dans le
monde arabo-islamique peut conduire à la formation d’une compréhension limitée
des croisades chez les élèves.
Les manuels scolaires européens continuent encore à présenter parfois les croisades
d’un point de vue européen. Conformément à ce qui figure dans les manuels scolaires
européens, l’objectif principal des croisades était la libération des lieux saints à AlQods des mains des ‘’impies’’. Ces ‘’impies’’ étaient les Musulmans dont les
Chrétiens ont prétendu qu’ils avaient occupé la ville sainte et maltraité les Chrétiens
orientaux et les pèlerins européens lors de leurs visites des lieux sacrés du
Christianisme dans la ville d’Al-Qods. Certains manuels scolaires arabo-islamiques,
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quant à eux, présentent les croisés comme des personnes non civilisées dominés par
la violence et la boulimie. Ils se fondent sur le fait que les croisés n’ont pas respecté
le caractère sacré ni des lieux saints, ni des civils. Nous trouvons également que
certains auteurs de manuels scolaires arabes utilisent un style emphatique pour
magnifier la grandeur des victoires remportés par les Musulmans sur les croisés.
Nous n’avons pas vécu une étape historique où l’étude des croisades revêt une
importance aussi grande que celle qu’elle revêt à l’époque actuelle où s’est accrue la
tendance à donner une coloration religieuse aux conflits en cours, alors que la
confrontation existe entre ceux qui ignorent les commandements des religions célestes
ou entre ceux qui veulent les instrumenter pour justifier leurs politiques ou réaliser
leurs desseins. En effet, nous constatons que la proportion de la violence dont les
justifications sont religieuses connaît un accroissement à l’échelle mondiale. Les
élèves se trouvent exposés quotidiennement à un flot impressionnant d’images
médiatiques et d’informations concernant des massacres perpétrés au nom de la
religion, alors que celle-ci y est totalement étrangère. Nombre de protagonistes du
conflit religieux utilisent la terminologie de ‘’guerre sainte’’ et de ‘’croisades’’ pour
présenter un alibi moral à l’usage de la force. Ils vont même souvent jusqu’à établir
un lien direct entre les ‘’croisades’’ et les conflits actuels, lien qui se fonde uniquement
sur des représentations mentales et non sur les réalités historiques. La compréhension
de l’histoire des croisades et les réactions dues à la connaissance partielle et partiale
de ces guerres religieuses en font un sujet riche qui mérite d’être étudié.
Les croisades sont devenues, au cours de ces dernières années, un sujet qui bénéficie
d’une attention particulière dans le domaine académique spécialisé. Aussi les auteurs
des manuels scolaires doivent-ils être au fait des démarches méthodologiques ainsi
que des discussions et de la controverse historique en cours, dues aux efforts de
recherche actuels. Nous trouvons qu’il y a trois aspects qui dominent les travaux de
recherche actuels concernant la consignation de l’histoire des croisades, et qui traitent
des sujets suivants : les discussions concernant ce qu’ont été en fait les croisades,
l’analyse et la présentation des arguments sur les mobiles des croisés et les points de
vue qui diffèrent concernant la nature de la société croisée.
Comment les croisades étaient-elles ? Le problème de la définition des croisades
a conduit à une certaine controverse entre les historiens. A cet égard, on peut identifier
six démarches méthodologiques différentes.
a. Les historiens enturbannés : Ce sont ceux qui placent les premières croisades dans
le contexte continu de la guerre chrétienne sacrée et ne voient, par conséquent,
aucune différence entre les premières croisades avec ce qui les a précédées.
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b. Les historiens classiques : Ils se basent sur l’importance fondamentale pour les
croisades de la ville d’Al-Qods et des terres sacrées.
c. Les historiens consensualistes : Ce sont ceux qui se fondent sur le pouvoir papal
en tant que spécificité distinctive des croisades. C’est pourquoi ils étendent le
champ de la recherche dans l’espace (pour englober la Presqu’île ibérique, la
région de la Baltique et les autres contrées européennes) et dans le temps (pour
englober les XVIème et XVIIème siècles).
d. Les historiens populistes : Ils estiment que les croisades sont nées de la religiosité
populaire. Il s’agit d’une démarche qui se retrouve chez des historiens d’une
génération antérieure, mais qui peut connaître un regain avec l’acquisition de plus
de connaissances sur les mobiles des participants aux croisades parmi ceux
d’entre eux qui n’avaient pas de motivations militaires.
e. Les historiens informatifs : Ce sont ceux qui affirment que les croisades font partie
de l’expansionnisme européen chargé d’animosité religieuse, et sont un produit
des développements économiques, sociaux et culturels que l’Europe a connus
après l’écroulement du pouvoir de l’Empire romain, ainsi qu’une sécrétion de
l’interaction entre l’Eglise et la Féodalité qui a amené les forces féodales, la
bourgeoisie naissante, le clergé, les chevaliers et les paysans à embrasser
l’idéologie croisée, chacun à partir de l’interprétation qui lui est propre et qui sert
ses intérêts de classe, le débarrasse de ses problèmes intérieurs et lui procure les
acquis matériels qu’il était impossible pour l’Europe du XIème siècle, avec sa
situation économique dégradée et ses conditions de vie humiliantes, de lui offrir.
f. Les historiens marxistes : Ils considèrent que les croisades étaient des projets
colonialistes et d’occupation qui visaient à asservir les peuple sous la bannière de
la Croix, prenant comme preuve les souffrances qu’ont endurées les Balkans du
fait de la sauvagerie des croisés durant la campagne populaire et les premières
croisades, en plus du fait que l’Empire byzantin est tombé victime de la quatrième
croisade au début du XIIIème siècle.
Les mobiles des croisés : L’étude des raisons qui ont poussé les gens à porter la croix
et de leurs attentes quant aux résultats d’un tel acte, occupe un riche domaine de la
recherche historique et a soulevé une controverse sans fin entre les historiens. Certaines
études récentes indiquent que seul un tout petit nombre de ceux qui ont participé aux
premières croisades se sont établis dans les terres qu’ils ont occupées et que la tentation
de posséder une nouvelle terre en orient n’a pas été le mobile principal de leur
établissement. D’autres études indiquent que le mobile des croisades était d’ordre
économique et politique sous la bannière de la croix et les considèrent comme le
premier des projets colonialistes européens.
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La nature de la société croisée : Certains chercheurs historiens insistent sur la
nature de la société née dans les Etats croisés durant les XIIème et XIIIème siècles ainsi que
sur le degré d’intégration des peuples de ces Etats. Cette démarche méthodologique
offre un domaine qui suscite l’intérêt des élèves parce qu’elle leur apprend comment
l’archéologie, la géographie historique et les arts peuvent contribuer à former une
compréhension de l’histoire. Les historiens français du XIXème siècle ont avancé une
idée selon laquelle ‘’la société franco-syrienne’’ est apparue dans les Etats croisés avec
l’intégration des colons occidentaux dans la société autochtone, ce qui a produit une
culture unique.
Les historiens Joshua Prawer et Ottito Samuel ont attaqué ce point de vue dans les
années cinquante et soixante du XXème siècle, partant du fait qu’il faut considérer les
colons occidentaux comme appartenant à une classe dirigeante distincte des habitants
autochtones par la langue et la religion, ainsi que par leur recours à la violence pour
imposer leur existence. Au cours de ces dernières années, les études menées par Rony
Alain-Blum présentent une vision plus complexe à travers le traçage des formes
d’établissement dans la campagne et à travers l’étude récente qu’il a menée sur les forts
des croisés. Nous constatons également que Yaroslav Fulda expose, dans ses études sur
l’art croisé, l’idée de l’existence de concordance et d’interpénétration culturelles.
Il est important que les auteurs des manuels scolaires s’appuient sur les études
récentes et s’emploient à faire participer les élèves aux discussions académiques sur
les croisades. Il est particulièrement important que les élèves dépassent la vision
unilatérale des croisades et y explorent les images de l’Autre. Parmi les études de
valeur dans ce domaine, et auxquelles peuvent se référer les auteurs des manuels
scolaires européens, on peut citer, par exemple, le livre d’Amin Malouf, intitulé
‘’Croisades : Points de vue islamiques’’, qui présente un inventaire complet, détaillé
et analytique des visions islamiques et offre un grand nombre de sources
intéressantes, y compris des référence à la littérature populaire, aux édifices, aux
photos et aux mémoires arabes, ces sources aident les élèves à connaître les visions
qu’avaient les Musulmans des Francs du temps des croisades. De telles sources
présentent des exemples de la qualité de la convergence culturelle que les
générations montantes doivent connaître et comprendre, parce qu’elles leur offrent
l’occasion de découvrir les situations, les valeurs, les thèses et les activités de la vie
quotidienne chez les chrétiens (autochtones et européens) et chez les Musulmans et
les juifs quand ils vivaient cote à cote durant les XIIème et XIIIème siècles.
Les auteurs des manuels scolaires peuvent également associer les élèves à suivre les
différentes manières avec lesquelles ont été interprétées les croisades, tant en Europe
que dans le monde arabo-islamique. L’insistance sur la manière dont sont présentées
les croisades dans les tableaux, les pièces de théâtre, les films, les restaurations, les
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expositions des musées et les œuvres romancières et non romancières, aide les élèves à
acquérir les facultés du questionnement et de la critique, dans la mesure où ils
perçoivent que les différentes interprétations reflètent les conditions qui les ont
engendrées et où ils appréhendent les mobiles de ces interprétations.
L’Europe et l’Empire ottoman
L’année 1453 représente un tournant décisif dans l’histoire du monde. La conquête
de Constantine par les Ottomans a conduit à l’émergence d’un grand empire qui a
duré longtemps. Durant les XVème et XVIème siècles, tous les pays arabes ont été
annexés à l’Empire ottoman, à part certaines parties de la Presqu’île arabique, le
Soudan et le Maroc.
Les débuts de l’époque moderne ont vu la mobilisation par l’Empire ottoman d’une
part importante de ses ressources et de ses forces pour étendre son influence au
centre et l’est de l’Europe. L’année 1453 peut ne pas être connue de la part de
nombre d’élèves en Europe bien qu’elle occupe un grand espace dans la mémoire
collective des Européens et des Ottomans. Les batailles, telles celle de Mohach
(connue parfois sous le nom de bataille de Mohàcs en 1526), le siège de Vienne
(1529), puis la bataille de Vienne (1683) et la bataille de Lepante, représentent des
marques importantes dans les relations entre l’Europe et l’Empire ottoman. L’un des
points les plus sensibles de ces relations se situe peut-être dans les Balkans où les
échos des conflits militaires des XIVème, XVème et XVIème siècles ont eu des suites
graves qui se perpétuent à nos jours. Les auteurs des manuels scolaires ne doivent
pas ignorer les conflits passés entre l’Europe et l’Empire ottoman, mais doivent
plutôt prendre en compte le fait que ces sujets doivent être traités avec prudence si
l’on veut éviter de consacrer une opinion stéréotypée de ‘l’Autre’ en tant qu’ennemi
et en tant que menace permanente.
La mise en exergue des conflits ne doit pas prévaloir dans les manuels scolaires si
leurs auteurs veulent développer chez les élèves une compréhension académique
plus précise et plus riche des relations entre l’Europe et l’Empire ottoman. En effet,
ces relations ne se sont pas limitées à l’animosité absolue. On peut orienter les
élèves vers une compréhension plus profonde du passé grâce à l’étude d’un autre
type de relations entre l’Europe et les Ottomans dont les échanges techniques
constituaient une dimension importante.
C’est également le cas des échanges commerciaux, sachant que l’activité
commerciale durant les premiers siècles de la vie de l’Empire ottoman était dominée
par les commerçants de Venise et de Gênes, avant d’être dominée par les français et
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les Britanniques au XVIIIème siècle. Les états européens ont œuvré, à partir du XVIème
siècle, à consolider ces relations commerciales avec l’Empire ottoman à travers
l’établissement d’ambassades et de consulats européens à Istanbul, au moment où
les souverains européens ont établi de nombreuses alliances avec le Sultan Ottoman
contre des ennemis communs.
Parmi les développements importants qu’a connus la recherche historique en
Europe, figure l’étude des récits d’européens ‘’lambda’’ qui ont visité l’Empire
ottoman au début de l’ère moderne. Certaines de ces études commencent à
influencer les livres scolaires. C’est ainsi que, par exemple, nous trouvons qu’un
manuel scolaire anglais met l’accent sur le récit rapporté par Thomas Dalm,
l’inventeur de l’harmonium grâce à l’usage de la technique de fabrication des
montres de précision, et qui a voyagé en 1599 de l’Angleterre vers Istanbul lorsque
la Reine Elisabeth II a vu en l’harmonium précis un présent digne d’être offert au
Sultan ottoman Mohamed III. Elle a alors demandé à Thomas Dalm de porter
l’harmonium au Sultan dans l’espoir que ce cadeau le convaincra d’étendre les
privilèges commerciaux pour englober la société anglaise de Bilad Chaam.
Sultan Suleiman
Les auteurs de ce manuel demandent aux élèves
de lire le récit du voyage de Thomas Dalm et de
méditer sur ce qu’il rapporte quant aux positions
de l’homme par rapport au Monde islamique et
aux relations de l’Angleterre avec l’Empire
ottoman au cours de cette période. Il s’agit là
d’un bon exemple de la capacité des auteurs des
manuels scolaires à aider les élèves à dépasser les
images stéréotypées des sociétés du passé à
travers la mise en valeur des aspects de la
complexité des relations de convergence
individuelle entre Européens et Musulmans.
Parmi les autres stratégies que les auteurs européens des manuels scolaires peuvent
adopter pour dépasser la représentation par les élèves européens des Ottomans
comme étant ‘’l’ennemi’’, celle qui se fonde sur la mise en exergue de la nature même
de l’Empire ottoman. Elaborer les manuels scolaires de manière à ce qu’ils
comportent plus d’intérêt pour un certain nombre de Sultans ottomans chacun à part,
s’intéresser à la ville d’Istanbul, à la résidence des sultans, au gouvernement ottoman,
au patrimoine ottoman islamique, à l’art architectural ottoman, aux positions des
ottomans vis-à-vis des chrétiens et des juifs, sont autant d’éléments qui aideront les
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élèves à développer une compréhension plus profonde quant à l’Empire ottoman. En
vue de développer les capacités intellectuelles des élèves, il est utile d’intégrer au
manuel scolaire un chapitre qui tourne autour d’une question de recherche.
Les auteurs doivent utiliser des questions historiques précises qui servent aussi à
attirer l’attention des élèves et à éveiller leur curiosité. Les questions suivantes
peuvent offrir de bonnes occasions d’enseignement concernant la nature de
l’Empire ottoman : Quel est le côté de ‘’magnifique’’ chez le Sultan Soliman ?
Quelles étaient les choses importantes pour les sultans ottomans ? Comment les
sultans ottomans manifestaient-ils leur force ? Qu’est ce qui conférait au Siège du
pouvoir ottoman toute sa spécificité ? Qu’est ce que les différentes sources peuvent
nous apprendre sur les ottomans ? Pourquoi les Ottomans doivent-ils rester présents
dans la mémoire ? Quels étaient les points de différence entre Paris et Istanbul au
XVème siècle ? Quand est ce que l’Empire ottomans a atteint son apogée ? Qu’est ce
qui a conduit à la disparition de l’Empire ottoman ? Pourquoi les historiens
n’arrivent-ils pas à se mettre d’accord concernant l’Empire ottoman ?
Parmi les aspects particulièrement sensibles dans les relations entre l’Europe et les
Ottomans figure le rôle joué par les pays européens dans l’écroulement de l’Empire
ottoman et l’instauration du ‘’protectorat européen’’, ce qui a conduit à un
changement du rapport des forces dans la région. Il est particulièrement important
de mentionner que les injustices attribuées à l’Etat ottoman n’étaient pas dirigées
contre les seuls Européens, mais se sont également étendues aux arabes d’Orient et
n’avaient aucune justification islamique. La preuve en est qu’une partie des Arabes
orientaux se sont alliés aux Européens dans la première guerre mondiale.
Il est également important de développer chez les générations montantes, tant en
Europe que dans le monde arabo-islamique, une compréhension claire de
l’importance que revêt le déclin de l’Empire ottoman et le lien entre la chute de cet
Empire et leur vie d’aujourd’hui, ainsi que les raisons qui peuvent pousser les gens
à avoir des interprétations différentes pour ces évènements. Les auteurs des manuels
scolaires se doivent de faire une pause pour réfléchir profondément aux réalités
historiques qu’ils sélectionnent pour les intégrer dans les livres scolaires d’histoire,
tout comme on a besoin de réfléchir sur l’axe idoine autour duquel doit tourner le
processus d’enseignement.
En écrivant sur la fin de l’Empire ottoman, les auteurs des manuels scolaires entrent
dans un champ d’interprétations miné. En effet, de par leurs différences et pour des
raisons diverses, les gens observent les évènements de la période 1917-1921 de
points de vue différents. A titre d’exemple, les versions des historiens divergent
concernant l’ampleur du rôle joué par les Arabes et sur leur participation aux
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événements qui ont marqué cette période. Les interprétations présentées par certains
moyens d’information affirment la trahison des puissances occidentales vis-à-vis de
l’Empire sans suivre le contexte dans lequel ont agit les hommes politiques. C’est
ainsi que nous voyons que le film ‘’Lawrence d’Arabie’’ réalisé par David Lean
(1962) a contribué à créer une vision légendaire de ces évènement dans
l’imagination populaire.
Parmi les démarches méthodologiques et pédagogique utiles, on peut citer le fait de
présenter une interprétation donnée comme sujet à étudier par les élèves. Les auteurs
des manuels scolaires disposent de plusieurs interprétations parmi lesquelles ils
peuvent choisir, dont notamment : les interprétations académiques (s’appuyer sur
des citations de livres et d’articles des historiens académiciens), les interprétations
romantiques (citations d’œuvres romantiques et de pièces de théâtre), les
interprétations pédagogiques et éducatives (les manuels scolaires, les musées, les
théâtres des évènements historiques et les documentaires télévisuels) et les
interprétations populaires (les imaginations populaires, les sites archéologiques et
les moyens d’information).
On peut inviter les élèves à observer les points suivants : l’objectif de
l’interprétation et le public qu’elle cible ; la relation entre l’interprétation, les
preuves et les arguments disponibles ; comment l’interprétation subit-elle
l’influence de son auteur (du point de vue de son penchant idéologique, de ses
valeurs, de sa nationalité et de sa personnalité). La mise en exergue explicite, dans
les manuels scolaires, des différentes manières avec lesquelles ont été interprétés
certains événements du passé, peut ouvrir les esprits des élèves devant les différents
points de vue et offrir une stratégie adaptée pour le traitement, en classe, des aspects
historiques chargés de facteurs émotionnels ou controversés.
Le colonialisme européen
Le XIXème siècle a vu la domination du monde par les puissances européennes.
L’accroissement de la production des usines et les progrès dans le domaine des
communications ont conduit à une extension du commerce européen. Ces
développements ont été accompagnés par un accroissement de la force militaire des
Etats européens et à la conquête, par ces forces militaires, de certaines parties des
Mondes arabe et islamique. La première grande victoire européenne sur un état
arabo-islamique a été la conquête de l’Algérie par la France (1830-1847), suivie par
la soumission de l’Egypte et de la Tunisie au pouvoir de l’Europe, puis par
l’occupation du Maroc et de la Libye ainsi que d’autres pays arabes. L’époque
coloniale est proche historiquement de la nôtre, c’est pourquoi elle est considérée
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comme une époque difficile pour nombre de pays des mondes arabe et islamique et
d’Europe. Aussi, l’enseignement de l’époque coloniale pose-t-il des problématiques
méthodologiques données. En effet, quelles sont les approches méthodologiques les
plus efficientes pour répondre aux exigences de la recherche historique et aux
besoins pédagogiques et éducatifs des jeunes générations ?
La colonisation européenne est présentée dans certains manuels scolaires du monde
arabo-islamique comme un acte d’agression pur et simple de la part des
colonisateurs vis-à-vis des populations. Certains manuels scolaires considèrent le
mouvement colonial du XIXème siècle comme un retour des croisades. Le
christianisme est parfois accusé d’être à la source de cet expansionnisme illégitime
au XIXème siècle, et ce dans le but de déstabiliser le monde arabo-islamique et de
porter atteinte à sa cohésion culturelle et morale.
Dans ce cadre, on établit un lien entre l’impérialisme et les activités des
missionnaires religieux qui avaient pour objectif de convertir les peuples soumis à
la colonisation au christianisme. Certains manuels scolaires mettent en exergue les
aspects de la violence liés à l’expansion du colonialisme européen et présentent les
colons comme des envahisseurs barbares et cruels. Tout comme il ne faut pas
justifier le colonialisme et ses pratiques - mais plutôt le condamner -, il faut aussi le
dissocier des mobiles religieux qu’on lui attribue.
Durant une longue période, les manuels scolaires européens penchaient pour
l’affirmation de l’idée de ‘’mission civilisatrice’’ en tant que mobile véritable du
mouvement colonial. Conformément à ce qui est mentionné dans certains manuels
scolaires, le colonialisme européen n’avait pas d’autre but que des objectifs
‘’civilisateurs’’, c'est-à-dire le progrès de la science et de l’éducation, la garantie de
la couverture sanitaire, la construction des routes et des ports. Les manuels d’histoire
actuels penchent vers l’adoption d’une approche moins inféodée à la vision
européenne en traitant du mouvement colonialiste. Certains utilisent une démarche
basée sur les questions de recherche et qui vise à éveiller l’attention des élèves par
un certains nombre de questions se rapportant à des aspects divers du mouvement
colonial, tout en les encourageant à former leurs opinions et leurs points de vue à
travers la découverte de certaines sources historiques et interprétations diverses.
Cependant, la réalité des choses indique que les points de vue et les sources
historiques liées aux expériences et aux attitudes des peuples qui ont été soumis au
colonialisme dans le monde arabo-islamique, ne sont pas encore suffisamment
représentés dans les manuels scolaires européens.
Pour aider les élèves à développer une compréhension plus profonde du
colonialisme européen, nous pensons qu’il serait utile que les auteurs des manuels
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scolaires en Europe et dans le Monde islamique œuvrent pour approfondir la
connaissance des élèves par rapport aux cinq caractéristiques qui distinguent le
mouvement colonial, à savoir :
Le mouvement colonial européen a été l’un des développements les plus
importants de l’histoire mondiale. Il a conduit à l’appropriation par l’Europe
de vastes territoires situés hors des frontières du Continent européen. Ce qui
a permis de renforcer les réserves générales de l’Europe ainsi que les
armées, les affaires commerciales et l’Eglise, et ce sur une large échelle.
La colonisation a été imposée par la force des armes aux pays qui ont été
envahis. En effet, la violence a précédé la colonisation et s’est perpétuée
après l’occupation des territoires situés hors des frontières européennes.
L’exploitation économique était le mobile principal de l’expansionnisme
colonial. C’est le désir de réaliser des profits et obtenir des gains qui a été à
l’origine de la construction d’infrastructures dans les pays sous domination
coloniale.
Les relations entre les puissances coloniales et les peuples colonisés sont
devenues totalement déséquilibrées. Les ressortissants des pays dominés
n’ont pas été traités comme des citoyens, et les colons avaient l’habitude
d’adopter des attitudes autoritaires et paternalistes au début, qui se
transformaient en attitudes répressives dès la parution de la moindre
protestation à caractère économique ou politique.
Les puissances coloniales ont œuvré à imposer leurs langues et leurs cultures
aux peuples soumis à la colonisation.
Il est important que les élèves saisissent les caractéristiques distinctives du
colonialisme européen. Cependant, les enseignants et les auteurs des manuels
scolaires doivent, en même temps, saisir les expériences et les attitudes diverses
adoptées par les peuples des sociétés colonisatrices. En effet, les Etats européens ont
adopté des politiques coloniales différentes, tout comme ceux qui ont embrassé le
mouvement colonial sont issus de milieux différents et étaient le produit des
contextes culturels et politiques dans lesquels ils ont grandi.
Ainsi donc, la relation des européens avec les peuples des deux mondes arabe et
islamique a revêtu de différentes et multiples formes qui méritent d’être étudiées. En
effet, certains, au sein même des pays européens, avaient adopté des positions
anticoloniales, et les auteurs des manuels scolaires se doivent d’œuvrer à renforcer
la conscience des élèves de la diversité des expériences des gens au cours de la
période du colonialisme européen.
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L’Europe et le conflit israélo-arabe
L’un des sujets les plus sensibles dont traitent les manuels scolaires en Europe et dans
le monde arabo-islamique est la question du conflit israélo-arabe, qui est un conflit
dont les racines sont, certes, profondes, mais où l’Europe a incontestablement joué
un rôle important, surtout à travers la Déclaration de Balfour, le traité de Sykes-Picot
et le vote européen en 1947 aux Nations-Unies en faveur de la partition qui a conduit
à la naissance de l’Etat d’Israël. Aussi faut-il porter à la connaissance des générations
montantes en Europe et dans le monde arabe ces évènements historiques qui ont
Le Dôme du Rocher à Al-Qods Al-Charif avec, en arrière plan, une vue sur l'Eglise
Sainte-Marie-Madeleine
contribué au conflit, en plus du rôle des forces extérieures. Les nouveaux manuels
scolaires en Europe et dans les mondes arabe et islamique doivent également
réviser les différentes formes de déformation existantes et porter à la connaissance
des élèves les différentes versions disponibles dans ce cadre.
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Les auteurs de ces manuels doivent traiter les évènements importants avec un style
objectif et clair, tout comme ils doivent présenter les points de vue et les sources
qui permettent aux élèves de parvenir à une compréhension des raisons qui
doivent faire de ces évènements historiques le champ d’une démarche
méthodologique basée sur la pluralité des visions, en tant qu’espoir unique d’une
étude juste du conflit israélo-arabe.
En effet, certains livres scolaires d’histoire européens versent dans la
simplification à outrance quant à leur traitement des origines du conflit et de ses
causes, en se limitant à y faire référence, sans mettre en exergue les conséquences
de la déclaration de Balfour sur les relations au Moyen-Orient. Certains de ces
manuels s’abstiennent de mentionner le nom de la Palestine sur les cartes
géographiques, ce qui empêche d’éveiller la conscience des élèves sur la réalité du
conflit et sur les résolutions de la légalité internationale.
Face à cela, les manuels scolaires d’histoire dans les mondes arabe et islamique
doivent mettre en valeur les positions européennes positives dans ce cadre, en
attirant l’attention des élèves sur le fait que l’Union Européenne soutient la
solution des deux Etats sur la base des résolutions de la légalité internationale et
s’oppose aux politiques de colonisation de l’Etat d’Israël. Il s’agit là de positions
importantes qui méritent d’être valorisées dans les manuels scolaires dans les deux
mondes arabe et islamique.
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Conclusion
L
e présent Guide d’orientation est le produit d’une réflexion
collective à laquelle ont participé des experts d’Europe et des
deux mondes arabe et islamique en vue de promouvoir une
compréhension plus profonde des complexités qui résident dans les
images de la convergence culturelle telle qu’elle est abordée et telle
qu’elle peut l’être dans les manuels scolaires d’histoire. Les
enseignants, les éducateurs, les auteurs des manuels scolaires et les
éditeurs, désireux de voir s’instaurer une compréhension et une
coexistence entre les peuples et les cultures, trouveront dans ce Guide
un certain nombre d’idées relatives aux voies à travers lesquelles
l’enseignement de l’histoire peut enrichir la connaissance par les élèves
des autres cultures et développer chez eux l’esprit critique.
Ce Guide propose certaines méthodes qui peuvent être appliquées dans
la construction de démarches incitatives pour l’apprentissage. Tout
comme il recommande un grand nombre de sources documentaires et
propose certaines approches méthodologiques et pédagogiques utiles
pour aider les jeunes générations dans l’étude des questions historiques
sensibles et controversées. Les usagers du présent Guide sont
encouragés à intégrer les démarches méthodologiques multilatérales, à
adopter des attitudes pédagogiques nouvelles pour ouvrir devant les
élèves une vision plus large en ce qui concerne l’échange culturel, et à
consolider la coexistence pacifique entre les peuples d’Europe et des
deux mondes arabe et islamique.
Nous trouvons aujourd’hui, et tout au long de l’histoire, un terrain
commun dans le fondement de l’expérience existentielle humaine.
Nous vivons à peu près tous les mêmes moments de bonheur et de
douleur, nous partageons les mêmes expériences de l’enfance, de la
croissance et de la famille, ainsi que l’expérience des divergences avec
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ceux qui nous sont les plus proches. Nous pouvons nous rencontrer en
tant qu’humains qui partagent des expériences uniques et semblables
du point de vue des soins que nous apportons à nos proches, de la joie
éprouvée à la naissance d’un enfant et de la tristesse ressentie à la
disparition d’un ami. Nous sommes semblables dans nos efforts pour
acquérir la confiance en nous-mêmes et pour l’honneur et le bonheur.
La plupart d’entre nous sont passés par une crise de souffrance
intérieure et nous partageons les mêmes préoccupations et la même
inquiétude concernant le monde où nous vivons tous. Nous nous
associons dans nos aspirations à la sécurité et à la vie qui porte un sens
et un bonheur à toute l’humanité. Il s’agit là du terrain commun que
nous pouvons prendre comme point de départ dans notre quête pour
exprimer un point de vue constructif concernant le pluralisme que nous
transmettons aux enfants et aux générations montantes. Nous, Arabes,
Musulmans et Européens, marchons sur une voie commune.
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