Cauchemar de Darwin
Transcription
Cauchemar de Darwin
D ON MI S ISDO I E RS S I E R LaRevueDurable LaRevueDurableN°18 N°8 LRD Quelles réponses au « Cauchemar de Darwin » ? Agriculture locale et commerce équitable 58 58 Cycle de 3 x 3 conférences publiques à Genève, Lausanne et Neuchâtel Sorti au printemps 2005, Le cauchemar de Darwin a réussi l’exploit de bouleverser un large public sur un thème pourtant rebattu : les inégalités entre pays pauvres et pays riches. Filmé en Tanzanie, ce documentaire relate les conséquences actuelles de l’introduction artificielle, dans les années 1950, de la perche du Nil dans le lac Victoria. Pour LaRevueDurable, ce succès et l’intérêt en soi de ce film justifient de s’appuyer sur lui pour organiser une série de neuf soirées sur les questions brûlantes de la souveraineté alimentaire, de l’agriculture durable et d’un commerce plus équitable. Sur le fond, le documentaire d’Hubert Sauper Le cauchemar de Darwin n’apporte rien de nouveau. Les milieux progressistes dénoncent depuis la signature des accords de Marrakech, en 1994, et la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en 1995, l’absurdité absolue d’une harmonisation mondiale des cours des denrées alimentaires1. Le problème de la vente d’armes par des pays riches à des pays pauvres financée grâce à l’exploitation de leurs matières premières est lui aussi bien identifié, y compris lorsque cette vente est illégale2. Et cela fait longtemps que des écologues étudient les fortes perturbations liées à l’introduction artificielle de la perche du Nil dans le lac Victoria3,4 et que d’autres chercheurs alertent sur le drame humain qui se joue autour de ce lac dans les trois pays qui le bordent – Kenya, Ouganda, Tanzanie – depuis que la pêche de ce poisson a été industrialisée à la fin des années 19805. Sur la forme, en revanche, il est indéniable que la narration très accrocheuse du Cauchemar de Darwin touche le spectateur d’une façon exceptionnelle. De fait, le public qui est allé voir ce film dépasse de beaucoup le cercle habituel de ceux qui s’alarment de la situation inhumaine qui règne non pas seulement autour du lac Victoria, mais un peu partout dans le monde. En France, une excellente couverture médiatique et un bouche-à-oreille très efficace ont permis au Cauchemar de Darwin de longtemps figurer au Top 20 des entrées des salles de cinéma, atteignant 283 000 spectateurs durant les treize premières semaines de projection. Minovembre, 370 000 spectateurs ont vu le film en salle en France. Et 12 000 en Suisse romande. Eclairer En donnant à voir un tableau concret de l’enfer du mal-développement, qui produit misère et exclusion, l’intention première d’Hubert Sauper est d’élargir le cercle de ceux qui en ont une vive conscience. Pari gagné, donc, sur ce plan. Mais là est aussi la limite de la démarche, car Le cauchemar de Darwin ne donne aucune indication pour savoir comment répondre à la situation qu’il présente si bien au spectateur. Ce faisant, son réalisateur s’inscrit dans une tradition bien ancrée dans les milieux artistiques et littéraires, qui estiment qu’il relève de leur vocation de montrer, voire de dénoncer les maux du monde, mais pas de leur apporter des réponses. Le grand problème, en l’occurrence, est que ces réponses ne sont ni simples, ni intuitives, ni faciles. Tout d’abord, les solutions ne peuvent pas se situer à l’échelle de la seule perche du Nil – boycott ou pas boycott ? – ni même du seul lac Victoria. La globalisation du commerce de ce poisson est une manifestation particulière d’une injustice écologique et humaine qui prévaut pour l’ensemble des échanges de denrées agricoles à l’échelle planétaire. Des situations comme celle que décrit ce film, il en existe des milliers dans le monde. Ce n’est donc pas uniquement en abordant les problèmes au cas par cas que l’on progressera, c’est aussi en les envisageant au niveau global6. Ensuite, les solutions n’apparaîtront qu’à la lumière d’une compréhension minimale des mécanismes destructeurs qui accentuent les inégalités partout sur la planète. Le but de LaRevueDurable, en organisant un cycle de neuf Voir Le cauchemar de Darwin Le DVD Le cauchemar de Darwin est désormais disponible dans les commerces et peut être commandé sur internet à l’adresse : www.mk2.com/new/home/home.asp soirées à partir du Cauchemar de Darwin, se situe à ce niveau : il est de s’appuyer sur ce film pour explorer les effets de l’industrialisation de la production alimentaire à vocation exportatrice sur les écosystèmes et les populations. Loin de vouloir enfoncer encore un peu plus le public dans un sentiment d’impuissance, de désespoir ou de culpabilité, l’idée est au contraire d’éclairer au moins un peu les rouages qui sont en partie à l’origine de la destruction et de la misère que ce film expose de façon si spectaculaire. Neuf soirées Les thèmes des conférences et des tables rondes ont donc une visée très générale. La première série de trois soirées (en janvier) traitera de la surexploitation et de la destruction des écosystèmes qui, liées à la production de nourriture, menacent les ressources de la planète. La seconde série (en février) envisagera la pertinence de la régionalisation des marchés agricoles et, en MINIDO SSIE R LaRevueDurable N°18 59 Un cycle qui peut voyager complément, du commerce équitable, pour lutter contre les méfaits d’un développement trop tourné vers l’exportation. La troisième série (en mars) mettra l’accent sur l’intérêt de soutenir l’agriculture locale partout dans le monde. Chacune des deux premières séries de trois conférences commencera par un documentaire sur la situation autour du lac Victoria. C’est là un moyen de relier ce cas particulier aux problèmes généraux que LaRevueDurable souhaite aborder. Ces films ont un autre mérite, et non des moindres : ils donnent chair aux statistiques et aux situations que les orateurs et les intervenants de ces soirées aborderont. Ainsi leur projection devrait-elle aider tous les participants aux soirées à prendre la mesure de l’ambiance qui règne sur le terrain. Ce cycle se veut le plus convivial possible. Dès 18h30, chacun pourra se restaurer en produits locaux et biologiques. Pour étoffer les rencontres et les échanges, un stand librairie et des stands des organisations qui participent aux tables rondes seront présents. Et pour qu’un maximum de gens puissent venir, LaRevueDurable a tenu à ce que l’entrée soit gratuite. Elle remercie pour cela la Direction du développement et de la coopération (DDC) qui lui a accordé un soutien financier. 1 LaRevueDurable. Agriculture: de la nécessité des peuples de se nourrir eux-mêmes, LaRevueDurable, juillet-août-septembre 2003 (6) : 11-61. 2 LaRevueDurable. Préserver les ressources naturelles et la paix, LaRevueDurable, mars-avril 2003 (4) : 11-61. 3 Goldschmidt T. Le vivier de Darwin, Seuil, 2003. 4 The Freshwater Killers, documentaire, 26 minutes, Tele Images International. 5 Big Fish Small Fry, documentaire, 30 minutes, IUCN, The Media Trust, 1999. 6 Voir sur ce point Monbiot G. Plaidoyer pour une organisation mondiale du commerce équitable, page 63 de ce numéro. Joseph D. White La rédaction de LaRevueDurable étant basée en Suisse romande, des raisons pratiques l’ont conduit à organiser ce cycle dans trois villes de cette région. La rédaction encourage cependant tout lecteur ou toute institution en France ou en Belgique à reprendre l’idée à son compte. Elle appuiera toute démarche qui consistera à organiser un cycle comparable, ne serait-ce qu’en le faisant connaître à son lectorat. Soirées 1 Préserver les écosystèmes « L’image qui s’est imposée après que toutes les données eurent été traitées peut être représentée par un seul mot : carnage. » Spécialiste des cichlides du lac Victoria décimés par l’introduction de la perche du Nil, Tijs Goldschmidt ne prend pas de gants pour qualifier l’action de ce prédateur sur les poissons de ce lac auparavant extrêmement foisonnants1. Quant au pourtour du lac, il a été massivement déboisé avant même l’industrialisation du commerce de la perche du Nil, notamment pour obtenir le combustible nécessaire pour le fumer. Avec des conséquences dramatiques : glissements de terrain et perte de la fonction épuratrice des eaux de surface souillées par une activité humaine de plus en plus intense. Or, ces eaux partent dans le lac, contribuant à perturber encore un peu plus l’ensemble de l’écosystème. En 2005, l’état du lac est pire que jamais2. Projeté au début des trois soirées de cette première partie du cycle, le documentaire The Freshwater Killers3 décrit en partie cette réalité. Un orateur, Marc Hufty ou Marc Dufumier, abordera ensuite les bouleversements qui frappent d’autres écosystèmes dans le monde soumis à la pression de la production alimentaire. Marc Hufty, de l’Institut universitaire 1 d’étude du développement (Iued), à Genève, dira comment la production agro-industrielle de soja en Amérique du Sud passe par un déboisement intensif de la forêt amazonienne. Ce soja répond à la forte demande mondiale et sert en grande partie à nourrir le bétail en Amérique du Nord et en Europe4. Professeur à l’Institut national agronomique Paris-Grignon (Inapg), à Paris, Marc Dufumier évoquera la façon dont, en plus de provoquer une déforestation croissante et une perte de biodiversité, l’extension des activités agricoles et de l’exploitation forestière inconsidérée en Asie du Sud-Est pollue les eaux de surface, les nappes phréatiques et les mangroves, affectant la santé des populations et la productivité des écosystèmes. Reste que le défi est total : comment nourrir 500 millions d’habitants dans cette région du monde sur seulement 4,5 millions de km2 ? « Cette forte densité de population pose d’autant plus de problèmes que des régions montagneuses d’accès difficile et sans grande aptitude agricole occupent 70 % de la superficie. »5 La question centrale que cette première soirée soulève est ainsi : comment produire plus de nourriture pour alimenter des populations Programme PRÉSERVER LES ÉCOSYSTÈMES 60 1 2 PRÉSERVER LES POPULATIONS VIVE L’AGRICULTURE LOCALE 3 • Projection de The Freshwater killers, film documentaire de 26 minutes, Tele Images International • Projection de Big Fish, Small Fry, documentaire de Nick Hughes de 30 minutes, IUCN, The Media Trust, 1999 MARDI 17 JANVIER 2006 Casino de Montbenon, Lausanne MARDI 14 FÉVRIER 2006 Casino de Montbenon, Lausanne JEUDI 16 MARS 2006 Musée d’histoire naturelle, Neuchâtel • Conférencier : Marc Hufty, Institut universitaire d’étude du développement (IUED), Genève • Conférencier : Claude Auroi, Institut universitaire d’étude du développement (IUED), Genève • Conférencier : Gil Ducommun, Haute école suisse d’agronomie (HESA), Zollikofen CULTURE DU SOJA ET DÉFORESTATION EN AMERIQUE LATINE LE COMMERCE ÉQUITABLE COMME COMPLÉMENT À UNE RÉGIONALISATION DES MARCHÉS AGRICOLES AU BURKINA FASO, LES AGRICULTEURS POURRAIENT NOURRIR LEUR PAYS • Participants à la table ronde : Helvetas, Greenpeace, FRC JEUDI 26 JANVIER 2006 La Maison des Associations, Genève • Conférencier : Marc Dufumier, Institut national agronomique Paris-Grignon (INAPG), Paris LIMITES DE LA RÉVOLUTION VERTE, CULTURES D’EXPORTATION ET DÉFORESTATION EN ASIE DU SUD-EST • Participants à la table ronde : Swissaid, WWF, DDC MARDI 31 JANVIER 2006 Musée d’histoire naturelle, Neuchâtel • Conférencier : Marc Hufty, Institut universitaire d’étude du développement (IUED), Genève CULTURE DU SOJA ET DÉFORESTATION EN AMERIQUE LATINE • Participants à la table ronde : Greenpeace, DDC, Helvetas ENTRÉE LIBRE • Participants à la table ronde : Magasins du monde, Alliance Sud, Déclaration de Berne JEUDI 16 FÉVRIER 2006 La Maison des Associations, Genève • Conférencier : Claude Auroi, Institut universitaire d’étude du développement (IUED), Genève LE COMMERCE ÉQUITABLE COMME COMPLÉMENT À UNE RÉGIONALISATION DES MARCHÉS AGRICOLES • Participants à la table ronde : • Participants à la table ronde : Lopin bleu, Biosuisse, les Jardins de Cocagne, DDC MARDI 28 MARS 2006 Casino de Montbenon, Lausanne • Conférencier : Christian Mouchet, Ecole nationale supérieure d’agronomie de Rennes (Ensar) LE RÉSEAU AGRICULTURE DURABLE DU GRAND-OUEST (RAD) ET L’AGRICULTURE LOCALE • Participants à la table ronde : Tournerêve, le Jardin potager, DDC IATP, Max Havelaar JEUDI 23 FÉVRIER 2006 Musée d’histoire naturelle, Neuchâtel • Conférencier : Guy Durand, Ecole nationale supérieure agronomique de Rennes (Ensar) LE DÉBAT SUR LE COMMERCE ÉQUITABLE ET SES IMPLICATIONS VENDREDI 31 MARS 2006 la Maison des Associations, Genève • Conférencier : Pierre Rabhi, Association Terre et humanisme DES OASIS EN TOUS LIEUX • Participants à la table ronde : Fondation Diagonale, Amaps, Uniterre • Participants à la table ronde : Alliance Sud, Terre Espoir, Seco, Eper ENTRÉE LIBRE ENTRÉE LIBRE • Dès 18h30 : rejoignez-nous autour d’un buffet bio et des stands des organisations qui participent à la table ronde • 19h30-21h00 : diffusion du documentaire, suivie de la conférence principale, puis de la table ronde LIEUX LAUSANNE : Casino de Montbenon, allée Ernest-Ansermet 3, 1003 Lausanne GENÈVE : la Maison des Associations, rue des Savoises 15, 1205 Genève NEUCHÂTEL : Musée d’histoire naturelle, rue des Terreaux 14, 2000 Neuchâtel • Depuis la gare : bus 3 (direction Bellevaux), arrêt Cécil. A pied, monter l’avenue Ruchonnet, puis tourner à droite (avenue de Savoie) jusqu’au Casino. • Depuis la gare : prendre le bus 1 (direction Rive) ou les trams 13 (direction Palettes) et 15 (direction Lancy-Pont-Rouge), arrêt Cirque (2 minutes à pied). • A 5 minutes à pied de la gare, à l’angle de l’avenue de la Gare et de la rue des Terreaux. Bus 7, 9, 9b (direction place Pury), arrêt Terreaux. Pour tout renseignement supplémentaire : www.larevuedurable.com • [email protected] • tél. : + 41 (0)26 321 37 11 Avec le soutien de la DDC LaRevueDurable N°18 MINIDO SSIE R croissantes sur des écosystèmes limités et fragiles tout en les préservant ? Les tables rondes qui suivent les conférences ont pour mission d’en discuter. Des spécialistes de l’agriculture représentants des organisations non gouvernementales (ONG) WWF, Greenpeace, Swissaid et Helvetas, ainsi que de la Fédération romande des consommateurs (FRC) et de la DDC y participeront à tour de rôle. g 61 Max Havelaar 1 Le vivier de Darwin, Seuil, 2003. 2 Kiapi Matsamura E. A Rough Passage for Lake Victoria, Inter Press Service, 25 octobre 2005. 3 Tele Images International. 4 www.wwf.ch/wwfdata/media/de/Managing_the_Soy_Boom.pdf 5 Dufumier M. Réformes agraires, « révolution verte » et développement économique en Asie du Sud-Est, chapitre 9 in : Dufumier M., Agricultures et paysanneries des tiers-mondes, Karthala, 2004. Soirées 2 Préserver les populations « J’aurais pu faire le même style de film au Sierra Leone, où les poissons auraient été remplacés par des diamants, au Honduras par des bananes, en Libye, au Nigeria ou en Angola par le pétrole… » Ainsi s’exprime Hubert Sauper, le réalisateur du Cauchemar de Darwin. Estimant que le succès fulgurant et éphémère de la perche du Nil dans le lac Victoria est une métaphore de la loi du plus fort qui tient lieu de « Nouvel ordre mondial », il a voulu illustrer la dislocation des équilibres humains liés à la surexploitation d’une richesse locale à des fins d’exportation. L’introduction de la perche du Nil dans le lac Victoria a totalement détruit les équilibres qui existaient entre les poissons qui y vivaient jusqu’alors. S’en est suivie une réorganisation complète de l’activité humaine autour de cet énorme écosystème lacustre. Le documentaire Big Fish Small Fry1, qui sera projeté au début des trois soirées de cette deuxième partie du cycle, est une charge contre la machine à démanteler les rapports sociaux traditionnels qui s’est mise en place autour de l’industrialisation de la pêche et du commerce de la perche du Nil. L’exportation vers l’Europe et l’Asie de la chair des perches du Nil fait que son prix ne dépend plus des équilibres locaux entre pêcheurs et villageois, mais de critères extérieurs sur lesquels les populations locales n’ont pas la moindre prise. Incapables de rivaliser avec les acheteurs étrangers malgré le coût du carburant des avions-cargos, les intermédiaires locaux ont été anéantis. Pour quelques centaines d’emplois créés dans les usines à poisson, des dizaines de milliers d’emplois traditionnels ont disparu. Les populations locales, en particulier les femmes, ont été laissées sans moyen de nourrir leur famille. Face à cette situation, Claude Auroi, professeur à l’Iued, soulignera la pertinence de considérer l’agriculture comme un secteur d’exportation forcément limité. La production alimentaire devrait se réorienter vers le marché intérieur avant tout. L’idée est de « construire une stratégie alternative fondée sur d’autres critères que l’exploitation à tout prix de produits agricoles, dont la valeur baisse sans cesse sur les marchés internationaux ». Cette stratégie devrait être fondée sur le principe d’ « utiliser les ressources locales »2. 2 Complémentaire à la régionalisation des marchés agricoles, le commerce équitable n’est pas à négliger. Il est toutefois l’objet de récupérations et de critiques récurrentes. Tour à tour, Claude Auroi3 et Guy Durand4, professeur à l’Ecole nationale supérieure agronomique de Rennes (Ensar), discuteront de son apport et de la validité des critiques dont il fait l’objet. Des représentants des organisations Eper, Alliance Sud, la Déclaration de Berne, de l’Institut pour l’agriculture et les politiques commerciales (Iatp), du Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco), des Magasins du monde, de Max Havelaar Suisse et de Terre Espoir participeront à l’une ou plusieurs des trois tables rondes pour discuter des moyens d’orienter les marchés vers l’intérieur et d’introduire plus d’équité dans le commerce international. g 1 IUCN, The Media Trust, 1999. 2 Auroi C. Un autre modèle agricole dans le Sud est-il possible ? Annuaire Suisse tiers-monde 2002, IUED. 3 Auroi C. Le commerce équitable face aux nouveaux défis commerciaux : évolution des dynamiques d’acteurs, Université catholique de Louvain, lundi 21 juin 2004, Bruxelles. 4 Durand G. Commerce équitable et agricultures du Sud. Revue Pour n° 184, décembre 2004. D ON MI S ISDO I E RS S I E R Soirées 3 Vive l’agriculture locale La libéralisation des échanges agricoles en cours à l’OMC rend plus difficile le soutien à une agriculture durable et tournée vers le marché intérieur, mais cela ne devrait pas empêcher, partout dans le monde, les efforts pour maintenir l’agriculture locale. Même si elle ne peut pas toujours couvrir 100 % des besoins alimentaires d’un pays, l’agriculture locale mérite d’être soutenue et peut l’être de diverses manières. auteurs de l’étude suggèrent aux autorités du pays de rééquilibrer leur développement en relançant leurs marchés agricole et agro-industriel intérieurs, notamment en sensibilisant les populations urbaines. En Bretagne, Christian Mouchet, professeur à l’Ensar de Rennes, est le principal conseiller scientifique du Réseau agriculture durable du Grand-Ouest (RAD). Tout ce qui permet aux paysans de réduire leur utilisation d’engrais, de pesticides et d’aliments pour bétail en restant compétitifs freine la désertification rurale. Depuis vingt ans, des exploitants laitiers membres du RAD expérimentent une agriculture plus autonome reposant sur d’importantes surfaces en herbe, qui réduit les coûts de production et limite les sources de pollution. Les réponses ne sont ni intuitives ni faciles Professeur à la Haute école suisse d’agronomie (Hesa), à Zollikofen, en Suisse, Gil Ducommun vient de diriger une enquête en collaboration avec le Centre d’études, de documentation et de recherches (Cedres) de l’Université de Ouagadougou, au Burkina Faso, qui met en avant le potentiel considérable de l’agriculture vivrière de ce pays1. Le Burkina Faso a choisi, comme bien d’autres pays, d’accroître ses productions agricoles pour les marchés extérieurs, pourtant soumis à des fluctuations et des risques de distorsions. Les Dans un contexte de contingentement de la production, l’une des meilleures pistes pour 3 maintenir l’emploi et les installations consiste à augmenter la valeur ajoutée du litre de lait pour produire plus d’emplois et de richesses avec moins de lait. Pour convaincre les éleveurs à faire le pas d’opter pour cette approche, Christian Mouchet est le coauteur d’une récente étude qui prouve son efficacité économique2. Co-invité par la fondation Diagonale3 et LaRevueDurable pour la dernière soirée de ce cycle, Pierre Rabhi, de l’Association Terre et humanisme4, parlera de son projet d’oasis en tous lieux, prônant le retour à une terre nourricière et la reconstitution du lien social. Pierre Rabhi a prouvé par la pratique la viabilité de l’agriculture biologique – et même biodynamique – en « sauvant » de la désertification une ferme des Cévennes ardéchoises dans les années 1960. Depuis, il multiplie les initiatives pour former paysans et néoruraux à l’agroécologie, de façon à réduire leur dépendance à l’égard de l’agriculture d’exportation. Sollicité en Afrique, dont il est originaire, il revendique y avoir notamment formé 900 paysans burkinabés depuis 1981, qui ont eux-mêmes diffusé leurs savoir-faire à 100 000 paysans. Cultiver ses propres légumes relève de l’acte politique, estime Pierre Rabhi. Et si l’on ne dispose pas d’un petit lopin de terre, l’agriculture contractuelle entre urbains et ruraux est un excellent succédané. Les tables rondes mentionneront ce type d’initiatives qui prennent tout leur sens à la lumière de l’ensemble du cycle de conférences. Des représentants de la DDC, du syndicat Uniterre, de l’organisation professionnelle Biosuisse, de la fondation Diagonale et des organisations locales Jardin potager, Jardins de Cocagne, Tournerêve, Lopin bleu et d’une Association pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) y contribueront tour à tour. g Chrissi Nerantzi 62 LaRevueDurable LaRevueDurableN°18 N°8 1 Ducommun G et coll. Commercialisation vivrière paysanne, marchés urbains et options politiques au Burkina Faso, 2005. 2 Le Rohellec C, Mouchet C. Evaluation de l’efficacité économique d’exploitations laitières en agriculture durable, Réseau agriculture durable, 2004. 3 www.fondationdiagonale.org 4 http://terrehumanisme.free.fr