Topics Geo - Séisme, inondations, accident nucléaire
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Topics Geo - Séisme, inondations, accident nucléaire
Topics Geo – 50 catastrophes naturelles graves survenues en 2011 Date Événement Région 1 10–14/1 Inondations Australie 2 12–16/1 7 2–7/2 Glissements de terrain, crues torrentielles Inondations, crues torrentielles Tempêtes d’hiver, blizzards Dommages causés par le froid, gel Inondations, glissements de terrain Cyclone Yasi Australie 1 2 500 8 3–14/2 Inondations Sri Lanka 18 300 3 26–28/1 4 31/1–6/2 5 1–8/2 6 Fév.–avril États-Unis Mexique Bolivie Préjudice total (en millions de $US) 22 2 800 900 460 11 300 39 1 900 3 500 Dommages Commentaires, description du sinistre assurés en millions de $US 1 875 Débordement de la Brisbane River. Des dizaines de milliers de bâtiments inondés. Dommages dans le secteur agricole et dans des mines. 50 Fortes chutes de pluie, débordement de fleuves. Des milliers de maisons endommagées. 185 ponts et routes détruites. 80 Rupture d’une digue. Bâtiments historiques détruits, entrepôts inondés. 11 000 véhicules endommagés. 52 1 300 Cyclone Bingiza Madagascar 34 Séisme Nouvelle-Zélande 181 16 000 13 000 11 5–16/3 12 11/3 Inondations Séisme, tsunami Angola Japon 113 15 840 210 000 35 000– 40 000 13 3–5/4 14 18/4–23/5 Intempéries, tornades Inondations États-Unis États-Unis 9 9 3 500 4 600 2 000 500 15 22–28/4 Intempéries, tornades États-Unis 350 15 000 16 Avril–mai Inondations, glissements de terrain Colombie 90 17 11/5 18 14–16/5 Séisme Feux de forêt Espagne Canada 10 1 200 1 500 19 20–27/5 Intempéries, tornades États-Unis 176 14 000 20 1/6–17/7 Inondations, glissements de terrain Chine 355 2 000 21 4/6–21/7 Éruption du volcan Puyehue Séisme Chili, Argentine, Uruguay Nouvelle-Zélande 30 Tempête tropicale Meari, inondations Intempéries Chine, Philippines, Corée Danemark 17 Inondations, glissements de terrain Typhon Muifa (Kabayan), inondations Inondations Inondations Corée du Nord et Corée du Sud Corée, Chine, Japon, Philippines Pakistan Cambodge, Viêt Nam Thaïlande 23 25–28/6 24 2–3/7 25 26/7–2/8 26 28/7–9/8 27 Août–oct. 28 Août–nov. 29 Août–nov. Inondations, glissements de terrain 30 22/8–2/9 31 26–29/8 32 Sept.–oct. Ouragan Irene, onde de tempête, inondations Crues torentielles Inondations Caraïbe, Amérique du Nord Nigeria Inde 1 7 300 Plus de 160 tornades de catégorie EF5, violents orages, grêle. Des villes (notamment Tuscaloosa), des milliers d’habitations et de voitures ainsi qu’un aérodrome endommagés. Dommages à l’industrie et à l’agriculture. 269 000 foyers privés d’électricité. 100 Mw 5,1 ; 20 000 bâtiments, routes et véhicules endommagés. Plus de 300 blessés. 720 Vents soufflant jusqu’à 100 km/h. Plusieurs centaines de bâtiments endommagés/détruits. Coupures de courant. 10 000 personnes évacuées. 6 900 Plus de 100 tornades de catégorie EF5, fortes pluies, grêle. Hangar pour avions et plus de 10 000 bâtiments endommagés/détruits. Tornade de catégorie EF5 sur Joplin dans le Missouri (158 morts) : 75 % de la ville dévastée. Routes fermées. Fortes pluies. 130 000 bâtiments endommagés ou détruits. Des centaines de ponts, de routes et plusieurs centrales hydroélectriques endommagés. Dégâts agricoles importants. 2,3 millions de personnes évacuées. 800 50 300 200 88 255 76 22 800 100 520 355 2 500 400 20 813 40 000 10 000 5 600 55 7 400 102 90 930 33 3–5/9 Typhon Talas Japon 68 650 430 34 3–10/9 Tempête tropicale Lee États-Unis 15 750 560 35 4–19/9 Feux de forêt 2 1 000 530 36 12/9 Intempéries États-Unis : surtout TX Europe du Nord 1 300 150 Somalie, Djibouti, Kenya, Éthiopie Colombie Plus de 50 000 187 39 18/9 Séisme Sud-Est asiatique 134 1 500 40 20–22/9 Typhon Roke (Onyok) Japon 13 1 700 41 26/9–4/10 Typhon Nesat, inondations 42 11–19/10 Inondations, glissements de terrain Philippines, Chine, Viêt Nam Amérique centrale 89 1 500 124 1 500 43 23/10 Séisme Turquie 604 550 40 44 28–31/10 45 4–9/11 Tempête d’hiver Crues torentielles États-Unis, Canada France, Italie 29 14 900 2 100 665 1 100 46 23–24/11 Feux de forêt Australie 50 30 47 15–17/12 48 16–18/12 Tempête d’hiver Joachim Tempête tropicale Washi Tempête d’hiver Patrick (Dagmar) Ouest de l’Europe Philippines Sécheresse États-Unis 50 Janv.–déc. Nord de l’Europe, pays Baltes 1 268 650 40 1 200 8 000 1 200 Rejet de gaz et de cendres volcaniques. Aéroports fermés, plusieurs centaines de vols annulés. Agriculture, oviculture et pisciculture touchées. Mw 5,9 ; liquéfaction des sols. Plus d’une centaine de bâtiments endommagés. Ponts effondrés, installations portuaires et chantiers navals touchés. Vents soufflant jusqu’à 135 km/h, crues torrentielles et coulées de boue. Des milliers de maisons endommagées/détruites. Ponts et routes endommagés. Trafic aérien interrompu. Dommages agricoles. Violents orages, tempêtes de grêle, fortes pluies. Plus de 1 000 bâtiments endommagés. Réseau de communication coupé. Rupture de digues, débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. Plus de 15 000 habitations et des milliers de véhicules endommagés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. Typhon de catégorie 5. Des milliers de maisons et des installations portuaires détruites. Bateaux de pêche coulés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. 1,35 millions de personnes évacuées. Rupture de digues, 6 000 villages inondés, ponts emportés. Grosses pertes dans l’agriculture et l’élevage. Crue du Mékong. Digues et ponts emportés, route bloquées. Plusieurs centaines de maisons endommagées/détruites. Dommages agricoles. Pluies diluviennes. 1 million de bâtiments inondés/endommagés. 7 parcs industriels inondés. Dégâts importants causés à l’infrastructure, à l’agriculture, aux élevages intensifs de poissons et à l’élevage de bétail. Ouragan de catégorie 3. Plusieurs centaines de milliers de maisons et de véhicules endommagés/ détruits. Secteur agricole et réseau de télécommunication touchés. Fortes pluies, effondrement du barrage d’Eleyele. Maisons, véhicules et ponts endommagés/détruits. Fortes pluies de mousson. Débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. 130 000 maisons endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure, dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Fortes chutes de pluie, avalanches de boue. Plusieurs milliers de maisons et de véhicules endommagés/détruits. Villages coupés du reste du monde. Des milliers de maisons et de voitures endommagées/détruites. Dommages à l’infrastructure. 11 000 km2 dévorés par les flammes. Le pire incendie de forêt au Texas depuis plus de 10 ans. 1 600 maisons détruites. Queue de l’ouragan Katia. Rafales de vent jusqu’à 130 km/h, fortes pluies, crues torrentielles. Maisons endommagées. 2 saisons successives de très faibles pluies, grave manque d’eau. Agriculture et élevage sinistrés. Famine, sous-alimentation et maladies. Nombre de personnes affectées : 13,3 millions. 150 000 bâtiments endommagés ou détruits. 11 000 km2 de terres cultivées inondées et 160 000 têtes de bétail tuées. Mw 6,9 ; épicentre dans la région du Sikkim. Des centaines de glissements de terrain. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés ou détruits. Ponts et routes endommagés. Réseaux d’électricité et de communication coupés. Plus de 100 000 sans-abri. Typhon de catégorie 4, vitesses de vent atteignant jusqu’à 215 km/h, fortes pluies. Dommages à l’infrastructure, transports publics affectés. Les constructeurs d’automobiles (Toyota, Mitsubishi, Nissan) ont dû suspendre momentanément la production de leurs usines. Vents soufflant jusqu’à 150 km/h, fortes pluies, glissements de terrain. Plusieurs milliers de maisons inondées. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de la pêche. Débordement de fleuves, rupture de digues. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés/détruits. Plusieurs centaines de ponts emportés. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Mw 7,2 ; 65 000 maisons endommagées/détruites. Coupures de courant, réseaux de distribution d’eau et de gaz touchés. Plus de 4 200 blessés. Fortes chutes de neige. Réseau de communication coupé. Lignes électriques et arbres renversés. Intempéries, coulées de boue. Des milliers de bâtiments et de voitures endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure. Feu de brousse, 155 km2 détruits par les flammes. Plus de 30 maisons détruites, 16 autres endommagées. Routes fermées. 200 personnes évacuées. 390 Fortes chutes de neige et de pluie, crues torrentielles. Trafic routier et ferroviaire interrompu. Crues torrentielles, glissements de terrain. Débordement de fleuves. Plus de 6 800 maisons endommagées/détruites. Vents soufflant jusqu’à 232 km/h, fortes pluies, ondes de tempête, glissements de terrain. Villes inondées. Bâtiments, maisons et voitures endommagés. Trafic routier et ferroviaire arrêté. Réseau de télécommunication coupé. 1 000 Déficit pluviométrique et manque d’eau dans les nappes phréatiques. Graves dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. TOPICS GEO Édition 2012 Catastrophes naturelles 2011 Analyses – Évaluations – Positions Séisme, inondations, accident nucléaire La triple catastrophe du Tohoku a ébranlé la société, la science et l’économie PAGE 6 Inondations L’Australie, les ÉtatsUnis et la Thaïlande sous les eaux Munich Re 37 Oct. 2010– Sécheresse sept. 2011 38 Sept.–déc. Inondations 49 25–26/12 Débordements de fleuves. Éboulement. Plusieurs centaines de maisons détruites. Villes, ponts et autoroutes endommagés. 10 000 sans-abri. Cyclone de catégorie 4. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Ports fermés, trafic ferroviaire interrompu. Dégâts dans l’agriculture. 180 000 foyers privés d’électricité. Fortes pluies de mousson. 45 000 maisons endommagées/détruites. Dommages dans l’agriculture, l’élevage et dans le secteur de la pêche. Plus de 6 000 maisons et beaucoup d’écoles endommagées. 80 % de l’infrastructure détruite. Dommages agricoles. 77 000 sans-abri. Mw 6,3 ; liquéfaction des sols dans de vastes zones. Des bâtiments de plusieurs étages et 10 000 maisons endommagés/détruits. 5 000 habitations détruites. Ponts et routes endommagés. Dégâts dans l’agriculture. 35 000 sans-abri. Mw 9 ; tsunami ayant pénétré jusqu’à 5 km à l’intérieur des terres. Larges secteurs côtiers entièrement détruits. Graves dommages causés à l’industrie et à l’économie. Centrale de Fukushima Daiichi : réacteurs endommagés, fuite radioactive. 6 000 blessés et 500 000 personnes évacuées. Plus de 20 tornades, violentes averses de grêle. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Averses, intempéries, fortes pluies, fonte des neiges. Débordement de fleuves, notamment du Mississippi et de l’Ohio. Villes inondées. Plus de 7 400 maisons détruites. Gros dégâts à l’infrastructure. 2 000 Numéro de commande 302-07226 1 425 « Groundhog Day Blizzard ». Maisons et véhicules endommagés. Production arrêtée chez plus de 30 constructeurs automobiles. 200 Températures de –15°C. Tempêtes de neige. Lourds dégâts dans l’agriculture. 10 22/2 22 13/6 © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107, 80802 München, Allemagne Triple catastrophe au Japon · Portraits : séismes, inondations, tempêtes · NatCatSERVICE et gestion des risques 9 14–19/2 Brésil Arabie saoudite Morts TOPICS GEO 2011 N° Sommet sur le climat Les décisions reportées sine die Gestion des risques Les modèles 3D créent de la transparence 22 10 1 7 33 41 40 48 23 28 20 11 31 2 21 6 5 événements ayant répondu aux critères qui caractérisent une « grande » catastrophe naturelle 820 catastrophes naturelles, dont 50 événements importants (sélection) 42 5 50 34 15 38 16 44 14 13 19 4 35 Événements géophysiques : séisme, tsunami, éruption volcanique Événements météorologiques : tempête tropicale, tempête d’hiver, intempéries, grêle, tornade, tempête locale Événements hydrologiques : débordement fluvial, crue éclair, onde de tempête, mouvement de terrain (glissement) Événements climatologiques : vague de chaleur, vague de froid, incendie de forêt, sécheresse 3 37 9 32 27 8 39 29 46 12 25 26 43 45 17 47 Impression Druckerei Fritz Kriechbaumer Wettersteinstrasse 12 82024 Taufkirchen/München Allemagne 30 Téléchargement Les données, analyses, statistiques et graphiques actuels sont téléchargeables gratuitement sur notre site : www.munichre.com/touch>>>NatCatSERVICE Downloadcenter 24 Numéros de commande Allemand 302-07224 Anglais 302-07225 Français 302-07226 Espagnol 302-07227 Italien 302-07228 49 Rédaction Angelika Wirtz, Munich Re Dr.-Ing. Wolfgang Kron, Munich Re Florian Wöst, Munich Re 36 Contact Angelika Wirtz Téléphone : +49 89 38 91-34 53 Téléfax : +49 89 38 91-7 34 53 [email protected] 18 Responsable du contenu Recherche en géorisques (GEO/CCC1) Illustrations Photo de la couverture, p. 2 (à gauche), p. 3 (les deux), pp. 6, 10, 20, 26, 28, 29, 33, 36, 44, 46, 48 (en totalité), 49 (en totalité) : Reuters P. 1, 4 (à droite), 12, 13, 14, 15, 16, 17, 53, 54, 55 (en haut) : Munich Re P. 2, à droite : Chris Spannagle P. 4, à gauche : GettyImages P. 5, 24 : NASA P. 11, 25, 31, 39, 45, 51, 55 (en bas) : Fotostudio Meinen, Munich P. 22 (en haut), 30 : AP P. 22 (en bas), 23, 38 : picture alliance/dpa P. 35 : Munich Re America P. 56 : Kevin Sprouls Topics Geo – Carte mondiale des catastrophes naturelles 2011 © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107 80802 München Allemagne Téléphone : +49 89 38 91-0 Téléfax : +49 89 39 90 56 www.munichre.com Avant-propos Chères lectrices, chers lecteurs, La catastrophe survenue au Japon le 11 mars 2011 a mis en évidence à quel point la société et le secteur économique étaient également vulnérables aux événements géophysiques, dont on a cependant peu parlé, les débats portant ces dernières années principalement sur le changement climatique. En outre, le séisme de Tohoku a été la première catastrophe naturelle à avoir entraîné des changements durables en matière de politique énergétique dans de nombreux pays situés bien loin de la région sinistrée (sortie du nucléaire en Allemagne et en Suisse, refus du nucléaire pour l’Italie). Notre chronique, page 56, précise le contexte de l’exposition aux risques géophysiques. Le Professeur Norio Okada, sismologue japonais, a dit à propos de la catastrophe qui a frappé son pays que « cet événement différait complètement de tout ce que nous connaissions jusqu’à maintenant ». Il comptait parmi les participants invités par Munich Re à une réunion d’experts internationaux pour mieux comprendre et examiner de différents points de vue cet épisode exceptionnel de l’année 2011. Les conséquences de l’événement confrontent le monde scientifique et assurantiel à de nouveaux défis, s’agissant par exemple des interactions économiques complexes ou de la qualité des cartes de vulnérabilité, des modèles de risque sismique, des alertes précoces et de la prévention des catastrophes. Quelles leçons sont à retenir pour le monde politique, scientifique et assurantiel – tant au Japon que dans le contexte international ? Vous trouverez des réponses détaillées à ce sujet page 12 et suivantes. Avec un préjudice économique de 380 milliards de $US, 2011 a été en matière de catastrophes naturelles l’année la plus coûteuse jamais enregistrée jusqu’ici, surpassant de loin l’année record 2005 (220 milliards de $US). Les sinistres assurés ont eux aussi atteint un montant encore inégalé, soit 105 milliards de $US. Les séismes de 2011 – celui survenu au Japon, mais aussi la catastrophe dévastatrice en Nouvelle-Zélande – ont fortement marqué le bilan des sinistres. Sont venus s’y ajouter les inondations désastreuses survenues en Australie, en Thaïlande, en France et en Italie ainsi que les séries de tornades qui ont sévi sur les États-Unis. En raison du réchauffement climatique d’origine anthropique et de cycles climatiques naturels comme celui de La Niña, les risques météorologiques aux États-Unis et au Canada subissent constamment des changements. Nous évoquons entre autres ces phénomènes dans le chapitre « Chiffres, faits et contexte » à partir de la page 40. Nous prévoyons pour mai 2012 la publication d’une brochure spéciale sur les risques météorologiques en Amérique du Nord, dans laquelle nous nous proposons d’examiner en détail les risques naturels concernant cette région. Je vous souhaite à présent une intéressante lecture de ce nouveau numéro des Topics Geo. Munich, février 2012 Dr. Torsten Jeworrek Membre du Directoire de Munich Re et Président du Comité de réassurance NOT IF, BUT HOW MUNICH RE Topics Geo 2011 1 Sommaire Gros plan : le séisme du 11 mars a provoqué un tsunami qui a coûté la vie à des milliers de personnes et causé une fusion du cœur des réacteurs dans la centrale de Fukushima. 6 Gros plan 6 Tremblement de terre, tsunami, accident nucléaire – la triple catastrophe du Tohoku 12 2 6 « Cet événement diffère complètement de tout ce que nous connaissions jusqu’à maintenant » Munich Re a réuni des experts de renommée internationale qui ont discuté de la mégacatastrophe de Tohoku d’un point de vue scientifique, politique, socio-économique et technique. MUNICH RE Topics Geo 2011 Portraits de catastrophes : la série de violentes tornades aux États-Unis a, à elle seule, représenté la moitié de tous les dommages assurés causés par les tempêtes en 2011. 20 20 Portraits de catastrophes 20 Tremblement de terre à Christchurch en Nouvelle-Zélande Au mois de février 2011, la région de Christchurch, déjà ébranlée par toute une série de tremblements de terre, a connu le séisme le plus destructeur qu’elle ait jamais enregistré jusqu’à présent. 26 Terres sous les eaux : inondations en Australie, aux États-Unis et en Thaïlande L’année 2011 a été marquée non seulement par des séismes, mais surtout par des inondations catastrophiques. 32 Printemps 2011 : de fortes tempêtes se sont abattues sur les États-Unis Climat et changement climatique : la planète tout entière ressent les effets du changement climatique. Pourtant au Sommet de Durban, les décisions relatives à la protection du climat ont de nouveau été reportées. 36 36 Conférence climatique de Durban 40 Chiffres, faits et contexte 46 NatCatSERVICE et gestion des risques 48 Photos de l’année 50 L’année en chiffres 52 Les modèles 3D créent de la transparence 56 56 Climat et changement climatique 36 Natcatservice : dans la plus grande base de données du monde, Munich Re répertorie et analyse les phénomènes naturels globaux et les données concernant les dommages. 46 Avant-propos Nouvelles 1 4 Chronique Regard sur la planète Les risques liés aux événements géo physiques par le Professeur Peter Höppe MUNICH RE Topics Geo 2011 3 NOUVELLES ÉTUDE 40 ans de « Halte à la croissance ? » En 1972, à la demande du Club de Rome, des chercheurs du MIT publiaient leur rapport intitulé en français « Halte à la croissance ? ». Dans ce livre, ils analysaient les répercussions mondiales de l’industrialisation, de la croissance démographique, de la sousalimentation, de l’exploitation des réserves de matières premières et de la destruction des espaces naturels. Il était déjà aussi question de l’impact des émissions de gaz à effet de serre sur le climat. Aujourd’hui, 40 ans après, l’étude qui, à l’époque, avait soulevé beaucoup de vagues, n’a rien perdu de son actualité. Le débat porte toujours sur la manière de maîtriser l’augmentation de la population, la raréfaction des ressources naturelles et les conséquences du changement climatique. FONDATION MUNICH RE Qui préside aux destinées du monde ? Bouleversements dans le monde arabe, sortie du nucléaire en Allemagne, crise de la dette en Europe. Quel est le moteur de ces événements politiques, économiques et sociaux ? Quel rôle jouent les ressources, quel est le rôle des nouveaux médias – qui décide des futures structures du pouvoir ? Ces questions et bien d’autres encore sont au cœur des forums de discussion en 2012. >> Pour plus d’informations, rendez-vous sur www.munichre-foundation.org >> Pour toute information sur le Club de Rome, veuillez consulter le site www.clubofrome.de RECHERCHE SUR LES CATASTROPHES IRDR crée un groupe de travail Le Conseil international pour la science (ICSU) a mis en place, dans le cadre de son programme international intitulé « Integrated Research on Desaster Risk (IRDR) », un groupe de travail DATA (Disaster Loss Data). Celui-ci est chargé, entre autres, d’identifier les données de sinistres nécessaires pour une gestion efficace des risques de catastrophe, d’élaborer des référentiels et des méthodes pour recueillir et gérer les informations sur les sinistres et de favoriser les synergies entre les organisations pour un échange des données de sinistres. Le département Recherche en géorisques de Munich Re assure la présidence de ce groupe de travail. >> Pour plus d’informations, veuillez consulter le site www.irdrinternational.org Brèves Munich Re en tête du classement « Green Ranking » : Munich Re se situe à la première place du classement international « Green Ranking » du magazine américain « Newsweek ». Avec 83,6 points sur 100, il a pris la place de son prédécesseur IBM, devenu numéro 2 au classement avec 82,5 points, et s’est positionné loin devant d’autres entreprises du secteur assurantiel. Le nouveau « Munich Re Scholarship Programme » Munich Re renouvelle son offre aux boursiers. À partir de 2013, le « Munich Re Scholarship Programme » remplacera les 2 programmes boursiers qui étaient en place depuis de nombreuses années. La bourse Horst-K.-Jannott est proposée encore une dernière fois en 2012 ; la bourse Alois Alzheimer, quant à elle, prend fin cette année. 4 MUNICH RE Topics Geo 2011 Le nouveau « Munich Re Scholarship Programme », d’une durée de 3 mois, s’adresse aux employés à haut potentiel de notre clientèle internationale ; il a pour objectif de contribuer à ce que ces « High Potentials » soient bien préparés face aux défis qu’ils auront à relever dans le secteur assurantiel global. Le projet Munich Re à Princeton prend de la vitesse : Munich Reinsurance American, Inc. a signé un contrat avec SunPower Corp., leader de la fabrication de modules et de panneaux solaires, pour la conception et la construction d’une grande installation solaire sur un abri de voitures. Grâce à cette installation de 2,5 MW, Munich Re à Princeton pourra économiser, par an, près de 500 000 $US de frais d’électricité. NOUVELLES NATHAN Risk Suite primée La Commission Géoinformatique du Ministère allemand de l’Économie et de la Technologie décerne chaque année un « GeoBusiness Award » aux idées innovantes en matière de géoinformations. Parmi les 3 produits primés en 2011, on compte le produit de Munich Re : NATHAN Risk Suite. Celui qui aspire aujourd’hui à une gestion globale des risques doit avoir une excellente connaissance de l’environnement spatial. Grâce à NATHAN (Natural Hazards Assessment Network) Risk Suite de Munich Re, vous optimisez vos estimations des risques naturels, qu’il s’agisse de risques individuels géocodés à l’adresse ou de portefeuilles de risques, et cela dans le monde entier. Nos clients peuvent sélectionner le produit ou le module qui leur convient en fonction du nombre de lieux d’assurance qu’il leur faut examiner, du degré de détail souhaité, de la profondeur d’intégration requise et l’insérer dans leur propre organisation. Les situations complexes deviennent ainsi transparentes, les calculs de prix deviennent plus précis, l’enchaînement des opérations s’accélère et la gestion des portefeuilles s’améliore. NATHAN Risk Suite est basée sur des cartes et des images satellites à très haute résolution de Microsoft Bing Maps. Il est facile de localiser de manière précise les risques individuels et d’analyser leur environnement. Il est également possible d’examiner l’exposition aux périls naturels que présentent des portefeuilles entiers – et même, si on le souhaite, en temps réel, via une solution Web directement intégrée dans les processus de l’entreprise partenaire. Outre les services en ligne disponibles, NATHAN Risk Suite est proposée dans une version DVD dont les 50 000 exemplaires représentent le produit le plus répandu de Munich Re. Et naturellement, sous sa forme imprimée, la carte mondiale des risques naturels continue d’avoir aussi toute sa place dans la Suite. >> Pour plus d’informations, cliquez sur : www.munichre.com/touch/naturalhazards/de MUNICH RE Topics Geo 2011 5 Gros plan Tremblement de terre, tsunami, accident nucléaire – la triple catastrophe du Tohoku Le 11 mars 2011, le nord-est du Japon a été secoué par le plus puissant séisme jamais enregistré dans ce pays. Le tsunami qu’il a déclenché n’a pas seulement ravagé le littoral sur quelques centaines de kilomètres. Il est aussi à l’origine de la catastrophe nucléaire de Fukushima. Alexander Allmann Le tremblement de terre de magnitude Mw 9,0 est survenu à 14 h 26 (heure locale) et à 30 km de profondeur, le long de la zone de subduction située au large de la côte orientale de Honshu. Le foyer sismique se trouvait à 130 km à l’est de la ville côtière de Sendai et à environ 370 km au nord de Tokyo. À l’échelle mondiale, il s’agit du quatrième séisme le plus puissant des 100 dernières années. Il a engendré un tsunami de plus de 10 mètres de haut, voire, dans certaines baies, un déferlement d’une hauteur supérieure à 40 mètres. Deux jours auparavant avait eu lieu un séisme précurseur de magnitude Mw 7,2, dont la plus forte réplique (Mw 7,9) s’était produite 40 minutes après la secousse principale. Bien que le Japon soit dans l’ensemble extrêmement vulnérable aux tremblements de terre, le lieu et la violence de l’événement n’en étaient pas moins surprenants. D’après le système japonais officiel de modélisation des risques sismiques établi par le HERP (Headquarter for Earthquake Research Promotion), qui sert de référence à tous les modèles commerciaux d’évaluation des risques de tremblements de terre, la magnitude maximum escomptée dans cette région était de Mw 8,3. Alors que la partie septentrionale de la zone affectée avait déjà été dévastée par de violents tsunamis au cours de l’histoire (notamment en 1611, 1896 et 1933), la région méridionale (Sendai) n’a vraisemblablement connu qu’un seul événement similaire, en 869. Le gigantesque tsunami provoqué par le séisme du 11 mars a dévasté plusieurs centaines de kilomètres de côtes. MUNICH RE Topics Geo 2011 7 Gros plan Diverses études scientifiques sur des vagues sismiques historiques du même ordre et des mesures GPS ont montré que les périodes de récurrence d’un séisme de magnitude Mw 9,0 se situent entre 440 et 1 500 ans, dans cette région du Japon. À ce jour, on dénombre au moins 15 800 morts, plus de 3 400 disparus et près de 6 000 blessés. Plus de 300 000 maisons ont été détruites ou gravement détériorées et environ 600 000 bâtiments légèrement endommagés. Compte tenu de l’intensité du phénomène, la zone de cassure de 450 kilomètres à l’origine du choc tellurique est infime. Par contre, le déplacement maximum de 50 mètres enregistré le long de cette zone est considérable. Le fait que des zones de rupture relativement restreintes comme celle-ci puissent déclencher un séisme d’une telle ampleur incite à s’interroger sur les magnitudes maximales susceptibles d’être atteintes dans d’autres zones de subduction de la planète. Globalement, le préjudice économique a excédé 200 milliards de $US. Le phénomène a entraîné une modification des tensions sous une grande partie du territoire japonais Les puissants mouvements telluriques ont duré plusieurs minutes et ont atteint une valeur maximale de 2,7 g (g = accélération du sol). L’intensité du séisme et la présence de nombreuses stations sismiques ont permis d’enregistrer l’événement avec une précision inédite. Selon le premier relevé de mesures, les pics d’accélération (PGA) de haute fréquence dépassaient largement les prévisions dans un rayon d’environ 100 kilomètres autour de la zone de cassure et diminuaient considérablement à mesure qu’elles s’en éloignaient. Par contre, indépendamment de la distance à l’hypocentre, la part des ondes longues libérées par les mouvements du sol a été bien moindre que ce que prévoyaient les modèles courants. Le séisme a altéré le champ local des tensions dans une bonne partie du sous-sol japonais. Parallèlement aux répliques auxquelles on s’attendait dans la zone de cassure, cela s’est traduit par une augmentation appréciable de la sismicité, notamment dans des régions plus reculées. Ainsi, plusieurs secousses d’une magnitude de Mw > 6 ont eu lieu jusqu’à près de 300 kilomètres du champ original des répliques. Lorsqu’un tremblement de terre de cette ampleur survient, il faut s’attendre à un taux d’activité sismique accru pendant plusieurs années. Les dégâts causés à la mégapole de Tokyo ont heureusement été relativement restreints. Les dommages étaient concentrés en majeure partie dans les préfectures de Iwate, Miyagi, Fukushima et Ibaraki. Si le préjudice économique dépasse 200 milliards de $US, les dommages assurés, eux, se situent entre 35 et 40 milliards de $US (y compris ceux couverts par la Japan Earthquake Reinsurance qui bénéficie du soutien de l’État). Il s’agit là de la catastrophe naturelle la plus coûteuse que le monde ait jamais connue et la plus meurtrière du Japon depuis le grand tremblement de terre de Tokyo qui a fait, en 1923, 143 000 victimes. Tout le littoral nord-est de Honshu a subi les effets dévastateurs du tsunami. Les petites et moyennes agglomérations situées le long de baies étroites ont été les plus touchées. Même les immeubles de 4 ou 5 étages ont été entièrement submergés et des agglomérations entières ont été rasées. Une partie des infrastructures incluant routes, ponts et voies ferrées ont été littéralement arrachées et bon nombre de ports de pêche détruits, à l’instar de milliers d’embarcations. Le bon fonctionnement du système d’alerte précoce, qui a prévenu la population 15 à 20 minutes avant l’arrivée de la vague, et l’extrême solidité des murs de protection uniques au monde n’ont pas pu empêcher que les victimes du tsunami se chiffrent par milliers ; mais, sans ces mesures, le nombre de morts aurait été beaucoup plus élevé. Seul moyen d’éviter à l’avenir de telles catastrophes : interdire systématiquement de construire dans les zones côtières particulièrement vulnérables. Les 10 séismes qui ont coûté le plus cher à l’industrie des assurances Mois/ année Événement Magnitude Mw Pays Préjudice total en millions de $US (valeurs originales) Dommages assurés en millions de $US (valeurs originales) Nombre de morts 15 840 3/2011 Séisme, tsunami 9,0 Japon 210 000 35 000–40 000 1/1994 Séisme 6,8 États-Unis 44 000 15 300 61 2/2011 Séisme 6,1 Nouvelle-Zélande 16 000 13 000 181 2/2010 Séisme, tsunami 8,8 Chili 30 000 8 000 520 9/2010 Séisme 7,0 Nouvelle-Zélande 6 500 5 000 1/1995 Séisme 6,9 Japon 100 000 3 000 12/2004 Séisme, tsunami 9,0 Sud et Sud-Est asiatique 10 000 1 000 10/1989 Séisme 6,2 États-Unis 10 000 960 6/2011 Séisme 5,9 Nouvelle-Zélande 2 000 800 1 10/2004 Séisme 6,6 Japon 28 000 760 46 8 MUNICH RE Topics Geo 2011 6 430 220 000 68 Gros plan Comparés à la destruction quasi totale des régions balayées par le tsunami, les dégâts causés par le séisme lui-même en d’autres endroits sont modérés. Même là où les mouvements du sol ont été très violents, très peu de bâtiments ont vu leur structure endommagée et pratiquement aucun ne s’est effondré, mais l’étendue géographique des dégâts était nettement plus importante que celle du tsunami. Les strictes normes de construction appliquées aux bâtiments édifiés après 1981 ont largement contribué à réduire l’ampleur des sinistres. Bien que les gratte-ciel de Tokyo aient fortement oscillé pendant plusieurs minutes, ils n’ont subi aucun dommage significatif. Certains quartiers résidentiels de la grande métropole, qui avaient été construits sur un sous-sol remblayé, ont été affectés par de brusques affaissements de terrain de grande envergure et bon nombre de maisons sont devenues inhabitables. En revanche, la plupart des grands immeubles d’habitation et bâtiments industriels reposaient sur des fondations profondes qui les mettaient à l’abri des gros sinistres. Ce sont surtout les conduites d’alimentation et les installations extérieures qui ont été endommagées. Les quelque 300 incendies et autres feux spectaculaires, comme celui de la raffinerie de Chiba, ne représentent pas une part importante du préjudice global. Mais même si les dommages survenus aux bâtiments en dehors du champ d’action du tsunami ont été minimes, certaines entreprises industrielles ont dû cesser leur activité par suite de dégâts significatifs causés aux marchandises et aux installations de production. À la centrale nucléaire de Fukushima, également touchée par le tsunami, l’alimentation en électricité par le réseau public et les groupes électrogènes locaux a été complètement interrompue. La défaillance du système de refroidissement a entraîné la surchauffe des réacteurs puis la fusion du cœur, vraisemblablement dans 3 d’entre eux. Conséquences de la plus grande catastrophe nucléaire après Tchernobyl : les vastes régions contaminées dans un périmètre de 30 kilomètres autour de la centrale ont été évacuées ; l’électricité a été rationnée dans tout le pays pendant plusieurs mois ; l’Allemagne et la Suisse, quant à elles, ont décidé d’abandonner au plus vite l’énergie nucléaire. Les grandes incertitudes relatives à l’évaluation des dommages Le marché japonais de l’assurance est réparti entre 3 types d’acteurs. La plupart des compagnies n’accordent de garanties Tremblement de terre que pour les risques commerciaux et dans le cadre de polices Risques industriels très restrictives. Les bâtiments d’habitation, eux, sont assurés par des coopératives et un pool réassuré par l’État japonais (JER – Japanese Earthquake Reinsurance). Les séismes les plus meurtriers depuis 1900 Mois/ année Événement Magnitude M w Pays Préjudice total Dommages assurés en millions de $US en millions de $US (valeurs originales) (valeurs originales) Nombre de morts 12/1920 Séisme 8,5 Chine 25 273 400 7/1976 Séisme 7,8 Chine 5 600 242 800 1/2010 Séisme 7,0 Haïti 8 000 200 222 570 12/2004 Séisme, tsunami 9,0 Sud et Sud-Est asiatique 10 000 1 000 220 000 9/1923 Séisme 7,9 Japon 2 800 590 142 800 10/2005 Séisme 7,6 Asie du Sud 5 200 5 88 000 12/1908 Séisme, tsunami 7,2 Italie 116 86 000 5/2008 Séisme 8,0 Chine 85 000 300 84 000 12/1932 Séisme 7,6 Chine 77 000 5/1970 Séisme 7,9 Pérou 550 14 67 000 Préjudice total Dommages assurés en millions de $US en millions de $US (valeurs originales) (valeurs originales) Nombre de morts Séismes de magnitude égale ou supérieure à Mw 9,0 survenus depuis 1900 Mois/ année Événement Magnitude M w Pays 5/1960 Séisme, tsunami 9,5 Chili 550 3/1964 Séisme, tsunami 9,2 États-Unis 540 45 131 11/1952 Séisme, tsunami 9,0 Fédération de Russie (Asie) 1 300 12/2004 Séisme, tsunami 9,0 Sud et Sud-Est asiatique 10 000 1 000 220 000 3/2011 Séisme, tsunami 9,0 Japon 210 000 35 000–40 000 15 840 1 500 MUNICH RE Topics Geo 2011 9 Gros plan La magnitude décrit l’énergie libérée par un séisme, tandis que l’intensité en mesure les effets (autrement dit l’ampleur des dégâts). La carte montre que les préfectures japonaises n’ont pas toutes été touchées dans la même mesure. Intensité du séisme Épicentre Sendai Extrêmement forte Très forte Forte Modérée ou faible Régions où le tsunami a généré des dégâts Surface approximative de la zone de cassure Fukushima Daiichi Tokyo Le tsunami a fait chavirer de nombreux bateaux et de grandes quantités de carburant se sont déversées dans la mer. 10 MUNICH RE Topics Geo 2011 Source : Munich Re, d’après les données de l’USAID, http://japan-guide.com Gros plan Pour le JER, qui couvre environ 25 % de tous les bâtiments résidentiels du Japon, le préjudice s’élève à quelque 1 200 milliards de yens (soit près de 15 milliards de $US) et plus de 800 000 polices sont appelées à jouer. Bien que le centre de Tokyo n’ait pratiquement pas été endommagé, il n’existe pas moins de 200 000 polices affectées dans la métropole. Le coût moyen d’un sinistre par police n’y est inférieur que d’environ 50 % à celui enregistré dans les préfectures du nord-est, très sévèrement touchées et ravagées par le tsunami. En ce qui concerne les polices couvrant de grands risques industriels, les montants dus se réduisent à un pourcentage minime de la somme assurée. Les limites de garantie étant parfois largement dépassées en cas de sinistre majeur imputable à un tsunami, certains clients du secteur industriel se voient contraints à payer eux-mêmes une bonne partie des dommages. Comme les assureurs couvrent surtout les risques industriels de grande taille, il arrive que le préjudice global subi par certaines compagnies d’assurance ne fasse jouer qu’un petit nombre de polices. Cette particularité, alliée au manque d’informations détaillées en matière d’engagement, crée une foule d’incertitudes à l’heure d’évaluer les dommages. Or, en cas de tsunami, la localisation précise des risques assurés est d’autant plus indispensable à l’évaluation des dégâts qu’une marge d’erreur d’un kilomètre peut signifier l’absence de dommages ou, inversement, un sinistre total. Il est absolument primordial, au Japon, de disposer d’informations très précises sur les engagements pour pouvoir réaliser une estimation et une modélisation plus fiables. Sur le marché japonais, les couvertures Pertes d’exploitation sont très restrictives, voire impossibles à obtenir. Mais bien que la région affectée ne regroupe qu’environ 8 % du potentiel économique japonais, les dégâts subis par d’importants sous-traitants des industries automobile et high-tech ont occasionné des arrêts de production dans le monde entier. C’est ce qui explique l’intérêt suscité en outre par les couvertures internationales contre la carence des fournisseurs. Les spéculations sur les milliards de pertes de certaines entreprises et leur impact sur l’industrie des assurances ont mis en évidence la complexité des imbrications internationales au sein des processus de production et les énormes difficultés qu’elle pose pour l’évaluation des dommages. La transparence relative aux grandes entreprises de sous-traitance et l’application de limites de garantie strictes sont donc essentielles si l’on veut se prémunir contre les grands sinistres imprévisibles. Les dommages précités, alliés à ceux qui relèvent des assurances Transport (notamment dans les ports), Vie et Accidents corporels, font finalement du séisme du Tohoku un événement multibranches. Si, au Japon, le tremblement de terre n’était pas habituellement exclu des garanties Automobile, les sommes à verser au titre de cette branche auraient aussi été considérables. Pour ce qui est de l’assurance Vie aussi, le Japon est un cas à part : il se caractérise par un nombre de victimes potentiellement élevé doublé d’une densité d’assurance non négligeable. Le tremblement de terre du Tohoku est arrivé au beau milieu du processus de reconduction du traité de réassurance, qui a pu être conclu en dépit des profondes incertitudes générées par les fortes répliques et les éventuels sinistres à venir. La probabilité de survenance d’événements de moyenne ampleur ayant sensiblement augmenté, il faut s’attendre à un accroissement des sinistres qui affectera plus particulièrement les traités en proportionnelle. Étant donné la taille des régions touchées par ce type de gros tremblements de terre et l’étendue des dommages qui en résultent, il est difficile de distinguer les dégâts causés par le séisme principal de ceux imputables aux fortes répliques qui lui succèdent. Conclusion Le tremblement de terre du Tohoku n’est pas seulement le cataclysme naturel le plus coûteux de l’histoire à l’échelle planétaire. Il a aussi montré que même des pays comme le Japon, qui déploient des efforts exceptionnels en matière de recherche sur les séismes, de construction parasismique et de systèmes d’alerte précoce, ne peuvent éviter ce type de grandes catastrophes. En dépit du fait que l’on ne s’attendait pas à une secousse d’une telle magnitude dans la région, les modèles de séismes disponibles livrent une appréciation correcte du risque global au Japon. L’ampleur des mouvements telluriques et des dégâts consécutifs n’a d’ailleurs pas dépassé le maximum prévu, même si les résultats issus des modélisations recèlent toujours une part d’incertitudes non négligeable. Cependant, le séisme du Japon a montré, une fois de plus, qu’il est impossible d’effectuer une évaluation exacte du risque et du préjudice si les informations en matière d’engagement sont trop imprécises. Notre expert : Alexander Allmann, consultant senior pour les tremblements de terre et autres catastrophes naturelles au sein du département Souscription Entreprise/Gestion Risques de cumuls/Géorisques. [email protected] MUNICH RE Topics Geo 2011 11 Gros plan « Cet événement diffère complètement de tout ce que nous connaissions jusqu’à maintenant » Suite au terrible séisme du 11 mars 2011, l’économie, la science et la politique doivent revoir leur façon de penser – à la fois aux niveaux national et international. En octobre 2011, Munich Re a convié des experts de renommée internationale, afin de discuter de cette catastrophe d’un point de vue scientifique, politique, socioéconomique et actuariel. Prof. Dr. Norio Okada, Disaster Prevention Research Institute (DPRI), Université de Kyoto, Japon Prof. Dr. Jochen Zschau, Centre Helmholtz Potsdam Centre allemand de recherche en géosciences (GFZ) Sur notre site www.munichre.com, vous trouverez une vidéo présentant une synthèse et des avis d’experts sur le séisme japonais, qui aura marqué comme nul autre événement l’année 2011 riche en catastrophes naturelles. 12 MUNICH RE Topics Geo 2011 Dr. Charles Scawthorn, Associé, SPA Risk LLC, cabinet de conseil spécialisé dans la réduction des risques de catastrophes naturelles Gros plan Anselm Smolka : Chers collègues, je souhaite tout d’abord vous remercier pour votre participation à notre table ronde sur le séisme du Tohoku. Je me réjouis tout particulièrement de pouvoir saluer aussi Ludger Arnoldussen, membre du Directoire de Munich Re. Le séisme du Tohoku a été un événement d’ampleur exceptionnelle. Au vu de l’étendue des dégâts, il s’est agi du plus fort tremblement de terre et de la plus grande catastrophe naturelle survenue au cours des dernières décennies. Quelles ont été vos premières réactions lorsque vous avez été informé de ce séisme ? Norio Okada : Lorsque la catastrophe est arrivée, j’étais en train de présider une réunion de faculté à l’Université de Kyoto, mais il nous a fallu une dizaine de minutes pour réaliser que quelque chose n’allait pas. Ensuite, ma première réaction a été de demander à quelques personnes d’aller voir ce qui était réellement en train de se passer. Dr. Anselm Smolka, Responsable Géorisques au sein du département Souscription Entreprise/Gestion des risques de cumuls, Munich Re Dr. Ludger Arnoldussen, Membre du Directoire de Munich Re A. Smolka : Avez-vous ressenti les secousses ? ravages provoqués par le tsunami et avons su pour Fukushima. N. Okada : Oh oui, mais nous n’avons pas tout de suite envisagé un séisme. Nous – c’est-à-dire les autres professeurs et moi-même – avons pensé que nous étions en train de fabuler. Mais au bout d’un quart d’heure, j’ai mis fin à la réunion, et nous avons très vite appris qu’à Fukushima, il était arrivé une catastrophe d’une ampleur encore jamais vue. J’ai tout de suite compris que cet événement différait complètement de tout ce que nous avions connu jusqu’à présent. Et je pressentais que celui-ci allait avoir des répercussions mondiales. A. Smolka : Monsieur Arnoldussen, vous êtes responsable des régions Japon et Australasie, déjà frappées auparavant par une série de catastrophes. Qu’avez-vous fait ? A. Smolka : Monsieur Zschau, vous avez suivi le tremblement de terre dans l’océan Indien qui a précédé le terrible tsunami de 2004. Quelle a été votre première impression lorsque vous avez été informé du séisme du Tohoku ? A. Smolka : Monsieur Scawthorn, vous vivez au Japon depuis longtemps et avez vu de nombreux sinistres causés par des tremblements de terre dans le monde entier. Qu’avez-vous pensé lorsque vous avez été mis au courant du séisme ? Charles Scawthorn : Au moment du séisme, je me trouvais au Maroc, mais nous vivons à Kyoto et ma femme était au Japon. Je l’ai appelée et elle m’a dit que même à Kyoto, elle avait ressenti les secousses. Et à peine 1 ou 2 heures plus tard, nous avons vu à la télévision les premières images des Ludger Arnoldussen : J’ai appris la nouvelle du séisme lors de mes vacances au ski en Suisse. Le chef de département m’a alors appelé et notre première question pleine d’inquiétudes a été de savoir si nos collaborateurs à Tokyo étaient en sécurité. D’abord, nous avons pris contact avec tout le monde. Puis, nous avons dû décider ce qu’il fallait faire concernant la catastrophe nucléaire à Fukushima, car le renouvellement des traités de réassurance a toujours lieu dans les semaines précédant le 1er avril. Ensuite, nous avons décidé en fin de semaine de transférer la majeure partie de notre personnel de notre agence de Tokyo dans un premier temps dans un hôtel à Osaka, puis dans notre filiale à Singapour, où nous disposons d’un environnement de travail opérationnel à 100 %. Cela a été très difficile pour nos collaborateurs japonais, car ils ne voulaient pas quitter leur pays dans une situation comme celle-là. Jochen Zschau : J’ai été mis au courant tôt le matin par un appel de la presse. J’ai convenu avec les journalistes qu’ils ne m’appellent à la maison que si c’est vraiment important. Chose qu’ils n’ont faite par le passé que pour le séisme de Sumatra. Je ne m’attendais pas à ce qu’une situation semblable se reproduise. Le cas du Japon n’a rien à voir. Ce pays hyperindustrialisé dispose du meilleur système d’alerte précoce aux séismes et également d’un très bon système d’alerte précoce aux tsunamis. C’est pour cela que dans un premier temps, je ne pensais pas que cette catastrophe allait prendre l’ampleur qui s’est révélée par la suite. Mais lorsque nous avons appris la magnitude réelle et découvert au fur et à mesure les autres conséquences, il est devenu évident que le risque de séisme est aujourd’hui un risque mondial. Cet événement montre la nécessité pour nous d’être plus attentifs aux interactions existant non seulement dans le système de la nature, mais aussi dans celui créé par l’homme. MUNICH RE Topics Geo 2011 13 Gros plan A. Smolka : Permettez-moi d’évoquer le manque de compréhension scientifique. Après la catastrophe, un grand débat s’est ouvert entre les experts à propos de la carte japonaise officielle des risques. Elle contient un facteur temporel, ce qui a peut-être un peu induit en erreur, car trop d’importance a été accordée à la lacune sismique de la région Tokai-Nankai et à l’éventualité d’un nouveau puissant séisme à Tokyo. N. Okada : Tout du moins, certains sont d’avis que nos spécialistes et autorités de surveillance doivent mieux agir, lorsqu’il s’agit de communiquer sur des sujets de ce type. Car aucune carte des risques ne peut vous dire comment un séisme se déroule réellement. Voici donc, de mon point de vue, l’un des domaines dans lequel nous devrons affiner nos outils et devenir plus compétents. Nous devrons également nous atteler à la question primordiale de l’évacuation. A. Smolka : La cartographie des risques est généralement une affaire nationale, et il existe donc toujours le danger que l’opinion peu orthodoxe de certains soit réprimée. Je dirais que ce problème concerne la science en général. J. Zschau : Ce fait existe partout, pas seulement au Japon, mais dans tous les pays du monde. Prenons par exemple le séisme en Haïti de 2010. Deux années auparavant, une publication avait indiqué qu’à tout moment, un séisme d’une magnitude de 7,2 pouvait survenir. Et c’est exactement ce qu’il s’est passé. Je pense que, d’une façon générale, nous avons du mal à mettre en relation savoir théorique et application pratique. Les grands projets européens financés actuellement par la Commission européenne ont comme axe principal, outre la gestion des catastrophes et la protection civile, l’influence mutuelle entre théorie et pratique, car une faille générale a été reconnue à ce niveau-là. « Le risque de séisme est aujourd’hui un risque mondial. » Jochen Zschau 14 MUNICH RE Topics Geo 2011 C. Scawthorn : Vous abordez à mon sens un point important. L’une de mes premières observations après cette catastrophe a été que l’estimation de probabilité a ses limites. Premièrement, il existe des limitations techniques, du fait des données dont nous disposons, ainsi que de notre capacité à les exploiter correctement. Deuxièmement : certes, dans certains cas, nous pouvons prévoir des événements rares, susceptibles de se produire une fois tous les 5 000 ans. Mais, bien trop souvent, leur éventualité est écartée, car estimée beaucoup trop improbable. Certaines fois, elle est tout simplement jugée impossible, et d’autres, on considère que cela reviendrait trop cher de réagir en conséquence. Mais il s’agit là d’événements menaçant l’existence d’une société ou d’une entreprise. De par sa dimension nucléaire, la catastrophe du 11 mars a constitué une menace existentielle pour le Japon. Si le rayonnement nucléaire avait été un tant soit peu plus élevé et s’était propagé dans la mauvaise direction, nous aurions pu perdre Tokyo. Et pour le Japon, cela constitue une menace existentielle à bien des égards. Nous aurions également dû tenir compte de cela. A. Smolka : Qu’est-ce que cela implique pour la communication sur les risques ? C. Scawthorn : La communication sur les risques est une question fondamentale. Certes, nous avons besoin d’une discussion entre scienti- fiques et experts – nous pouvons aussi considérer les avis divergents et, le cas échéant, les rejeter. Mais l’opinion publique ne souhaite pas participer à ce débat. Elle n’en a pas le temps, cela ne l’intéresse pas ou bien le jargon technique lui fait défaut. Elle ne veut que le résultat. Les experts doivent donc se réunir et se prononcer ensuite d’une seule voix. Et après avoir fait cela, ils ne devraient pas être accusés d’homicide s’ils s’étaient trompés, comme cela est actuellement le cas en Italie, où des chercheurs en sismologie sont poursuivis, car ils n’ont pas donné d’alerte avant le séisme catastrophique de L’Aquila en avril 2009. J. Zschau : Nos cartes des risques nous renseignent sur l’activité sismique, rien d’autre. En d’autres termes, une grande activité sismique indique un risque majeur et une faible activité, un risque mineur. Le stade auquel nous nous trouvons dans le cycle sismique n’est pas pris en compte. Actuellement, le risque sismique est peut-être plus élevé à Cologne qu’en Italie centrale, car nous ignorons quand le dernier séisme dans la région de Cologne a eu lieu et à quel stade du cycle nous nous trouvons en ce moment. Il est très important d’estimer les risques en tenant compte de l’échelle temporelle. Gros plan A. Smolka : Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que l’estimation de probabilité doit être complétée par une projection déterministe des scénarios les plus défavorables. Et les modèles nous permettant cette projection vont désormais être disponibles, quand bien même elle nécessite toujours une bonne dose d’imagination de notre part. Monsieur Arnoldussen, cet aspect est-il intéressant pour vous aussi ? L. Arnoldussen : Absolument, et je me demande de plus en plus si la façon dont nous avons exploité jusqu’à présent les modèles est vraiment adaptée pour calculer une prime de risque adéquate. Pour nous, il est très important de savoir si c’est en l’espace de 2 ou 3 mois, ou bien de quelques secondes, que 3 tremblements de terre de magnitude 6 se sont succédé. Les très longues périodes de temps dont nous parlons ici – 500 ans, 1 000 ans – et l’absence de données sur des événements antérieurs compliquent extrêmement les choses. Les modèles nous renseignent sur un sinistre maximum probable, mais pour les assureurs, les circonstances d’un cas particulier peuvent engendrer d’énormes charges de sinistres. A. Smolka : Après le séisme du Tohoku, nous considérons qu’il existe une probabilité élevée de survenance d’un séisme de magnitude moyenne dans la baie de Tokyo. L. Arnoldussen : Cela a évidemment des conséquences directes sur nos négociations avec les clients relatives au montant des primes de risque. La question se pose ici de savoir ce qu’il convient de faire d’un point de vue commercial. Il est important d’obtenir des taux et des conditions contractuelles adéquats, Munich Re mettant ensuite la capacité à disposition. « Face aux consé quences drastiques, nous devons faire preuve de plus de créativité et d’imagi nation. » Norio Okada C. Scawthorn : Cela soulève 2 questions fondamentales. Premièrement : mon entreprise ou moi-même pouvons-nous au juste survivre à un sinistre ? Et deuxièmement : puis-je réaliser un bénéfice dans le cadre d’une telle opération ? La première question se rapporte à un événement menaçant l’existence et en tant qu’assureur, il convient de constituer des réserves. Concernant la seconde question, les modèles de probabilité entrent en jeu, car dans le cadre de l’analyse financière dynamique ou de l’analyse coût/bénéfice, ceux-ci peuvent servir à établir une tarification adéquate. Mais revenons plutôt à la question de savoir si l’on peut survivre à un événement. Solvabilité II exige des réserves de capital qui, d’un point de vue statistique, ne peuvent être épuisées qu’au maximum une fois en l’espace de 200 ans. Ce qui équivaut à dire que sur 100 grandes compagnies d’assurances, une société doit faire faillite tous les 2 ans. Certes, ce calcul est très simpliste, mais il n’est pas si absurde que ça. A. Smolka : … c’est vrai, bien que, appliqué à un certain scénario d’événement, un événement se produisant une fois tous les 500 ou tous les 1 000 ans serait aussi surmontable. Et qu’en est-il des centrales nucléaires ? C. Scawthorn : Le monde compte environ 500 centrales nucléaires. Chacune d’entre elles est exposée à un risque de 1 pour 1 000 000, c’est-àdire qu’il peut se produire une fusion du cœur une fois en un million d’années. La probabilité d’une fusion du cœur est donc, quant à elle, de 10–6 par an. Ce risque faible semble somme toute acceptable. Mais en fait, cela correspond à une probabilité de 1 pour 2 000 qu’une fusion du cœur advienne une fois dans l’année, quelque part dans le monde. Ces centrales nucléaires ont une durée de vie de 20 ans environ, généralement prolongée de 20 années supplémentaires. En considérant une durée de vie de 40 ans, cela revient à une probabilité de fusion du cœur de 1/50, sur 500 centrales. Je sais que ces calculs sont trop simplistes, la réalité est bien plus complexe. Mais que s’est-il passé au cours des 32 dernières années ? Trois événements de ce genre ont déjà eu lieu : Three Mile Island en 1979, Tchernobyl en 1986 et dernièrement Fukushima Daiichi en 2011. Donc, ce taux de probabilité de 10–6 paraît fantastique, mais … MUNICH RE Topics Geo 2011 15 Gros plan A. Smolka : … donne une image tout à fait différente, pris dans un contexte global. C. Scawthorn : Après cette catastrophe, j’ai tout de suite réalisé que les jours de l’énergie nucléaire étaient comptés au Japon, pour la simple et bonne raison que ce pays ne peut pas se permettre un tel risque. À mon avis, la société japonaise tout entière – jusqu’aux individus qui la composent – l’a déjà compris. Et entre-temps, le message a également fait son chemin dans plusieurs pays européens. N. Okada : Face aux conséquences drastiques, nous devons tout simplement faire preuve de plus de créativité et d’imagination. Dans une situation où l’État et la société sont sur le point de s’effondrer, nous avons besoin de la contribution de chacun. C’est pourquoi il est extrêmement important d’impliquer les scientifiques de différentes disciplines, les hommes politiques, les autorités de surveillance et les compagnies d’assurances. « Le secteur de l’as surance pourrait jouer un rôle plus important. » Ludger Arnoldussen Je souhaiterais également parler du rôle des entreprises. Chacune d’entre elles a impérativement besoin d’un plan d’urgence. Même les entreprises basées à Kyoto ont beaucoup souffert de ce qui s’est passé dans l’est du Japon. Elles pourraient peut-être changer leur stratégie d’approvisionnement, en s’intégrant à des chaînes logistiques supplémentaires. Pour ce faire, il faudrait par exemple qu’elles règlent la question de leur mode de communication avec d’autres entreprises situées en dehors du Japon. C’est pourquoi nous avons besoin d’une gestion des risques de catastrophe plus intégrée – de cela, je suis convaincu. L. Arnoldussen : Je suis tout à fait d’accord. Nous avons constaté que depuis le séisme du Tohoku, l’industrie au Japon, ainsi que dans d’autres parties du monde, voit ce point sous 16 MUNICH RE Topics Geo 2011 un nouveau jour. Je crois que de nombreuses entreprises s’efforcent de diversifier leur chaîne d’approvisionnement. Permettez-moi encore d’approfondir un autre sujet que vous avez abordé, à savoir la possibilité qu’un État puisse s’effondrer après une catastrophe extrême. Je pense que cette possibilité est encore plus forte aujourd’hui, compte tenu de la dette publique, car l’État supporte un risque important, à savoir le risque résiduel. Pour le Japon, nous estimons par exemple que les assurances couvrent 15 % à peine des pertes économiques et l’État japonais, la majeure partie du reste. Et nous ne sommes peut-être plus très loin d’un effondrement économique, avec les taux d’endettement que nous avons atteints entre-temps dans de nombreux pays. Nous sommes donc d’avis que le secteur de l’assurance et de la réassurance pourrait jouer un rôle plus important. C. Scawthorn : Vous dites que le secteur de l’assurance pourrait en faire plus. Une question : comment le pourrait-il ? En ce moment, nous constatons en effet que dans de nombreux pays, les compagnies d’assurance privées n’arrivent justement pas à combler les pertes et que l’État doit intervenir, par exemple avec des instruments comme la California Earthquake Authority (CEA), la Earthquake Commission (EQC) en Nouvelle-Zélande ou le Turkish Catastrophe Insurance Pool (TCIP) en Turquie. Alors comment le secteur de l’assurance pourrait-il en faire plus, dans le cadre d’une approche aussi intégrée ? L. Arnoldussen : Eh bien, selon moi, le cœur du problème réside dans la prise de conscience des risques par l’opinion publique, ainsi que par les gouvernements. Pourquoi existe-t-il au juste des institutions d’État en Californie et en Nouvelle-Zélande ? Parce qu’on ne peut effectuer efficacement ces opérations d’assurance que si l’on élargit le plus possible la base de la couverture des risques, et une assurance obligatoire ou une institution d’État peut parfois s’avérer utile en ce sens. Souvent, les réassureurs acceptent ensuite de couvrir les risques encourus par ces autorités. De mon point de vue, nous devons trouver des moyens d’augmenter l’étendue de la couverture, que cela soit en offrant au public un attrait accru ou en lui faisant davantage prendre conscience des risques. Si je prends Munich Re comme exemple, nous n’avons pas exploité notre capacité maximale pour le Japon – et cela vaut également pour quelques autres grands réassureurs. Nous aurions été en mesure d’assurer une part plus importante du risque, mais il n’en a pas été ainsi, car pour le niveau de primes que nous exigions, la demande n’était pas assez forte. N. Okada : Je souhaite revenir sur un autre point. Pour une gestion intégrée des risques liés aux catastrophes, toutes les parties concernées doivent se réunir afin de prendre une orientation cohérente. Pour par- Gros plan venir à cette fin, nous avons besoin de ce que j’appelle une « gestion adaptative », c’est-à-dire une gestion capable de réagir rapidement à une nouvelle donne. Un exemple : d’abord, vous déclarez cette pièce non fumeur. Si cela fonctionne, vous interdisez de fumer sur tout l’étage, ensuite dans l’ensemble du bâtiment et enfin dans la ville de Munich tout entière. Dans la perspective d’une réduction des sinistres occasionnés par des catastrophes futures, je propose d’adopter cette démarche adaptative, afin de constater si une méthode fonctionne ou pas. Si elle ne fonctionne pas, il convient de savoir pourquoi et de réfléchir à des moyens de mettre au point des solutions réalisables. Ma question serait la suivante : le secteur de l’assurance et de la réassurance est-il lui aussi intéressé par la promotion de ce type d’expérience sociale ? Car si cette approche est d’intérêt pour des réassureurs comme Munich Re, il doit y avoir, en ce moment précisément, un grand nombre de scientifiques intéressés par une gestion intégrée des risques, qui coopéreraient très volontiers avec le secteur de la réassurance. L. Arnoldussen : Il me semble que cette démarche serait intéressante pour solutionner le problème. A. Smolka : L’une des questions que je me suis posée après la catastrophe était la suivante : quels enseignements puis-je tirer de cet événement pour un scénario similaire à Tokyo ? C. Scawthorn : À l’instar de la ligne de faille d’Anatolie du Nord où la croûte terrestre s’est déchirée à plusieurs endroits jusqu’à Istanbul, menaçant désormais la ville d’un méga-séisme, lors du séisme du Tohoku, 3 grandes déchirures se sont formées jusqu’au portes de Tokyo. Ainsi, en ce moment, le risque d’un tremblement de terre à Tokyo est considérablement accru. Il importe peu de savoir s’il sera de magnitude 8 comme le séisme de 1923, ou de 7 seulement, directement centré sous la baie de Tokyo. Dans tous les cas, il sera catastrophique. Tout le monde en est convaincu. A. Smolka : Où en est-on de la qualité des constructions dans le secteur du bâtiment ? C. Scawthorn : Au Japon plus que dans la plupart des autres pays, les bâtiments sont rasés et remplacés par de nouveaux. Depuis le séisme de Kobe, cette tendance s’est encore renforcée, car les Japonais ont reconnu que leurs vieilles maisons traditionnelles étaient très susceptibles de s’écrouler. Nombreux sont ceux qui ont entre-temps construit des maisons neuves. Mais il y a encore de vieilles bâtisses à Tokyo et des dégâts surviendront sans aucun doute sur les bâtiments … A. Smolka : … par liquéfaction des sols … C. Scawthorn : … notamment dans l’est de Tokyo, dans la zone entourant le fleuve Sumida. Les principales conduites de gaz et d’eau vont se rompre à cet endroit. Je suppose que de nombreux incendies se déclareront dans les raffineries implantées dans toute la baie de Tokyo, ainsi que de grands incendies au sein de la capitale, même si cette dernière présente la plus grande concentration de pompiers au monde et que ceux-ci sont extraordinairement compétents. Mais je présume qu’ils seront tout simplement débordés. Le vent et les conditions météorologiques vont bien sûr influencer pour beaucoup la situation. Dans la nuit du 1er septembre 1923, il faisait chaud et sec et il y avait beaucoup de vent. Mais dans des conditions autres, par exemple en cas de journée froide et pluvieuse, la situation peut s’avérer complètement différente. J. Zschau : Je souhaite revenir une fois de plus sur ce que Monsieur Okada a affirmé à propos d’une approche intégrée : en quoi les choses auraient-elles été différentes si nous avions disposé de connaissances optimales ? À mon avis, cela est difficile à dire. « 380 000 personnes ont été sauvées. C’est remarquable ! » Charles Scawthorn C. Scawthorn : Si quelqu’un avait garanti que demain à 14 h, un tel événement avec des vagues de cette hauteur allait se produire, qu’est-ce que cela aurait changé ? Dans quelle mesure cela aurait-il influé sur l’étendue des dommages ? On aurait certainement été en mesure d’évacuer une partie des 20 000 personnes qui ont perdu la vie. Mais dans les faits, l’alerte et l’évacuation ont très bien fonctionné. Sur 400 000 personnes menacées, 380 000 ont été sauvées. Je trouve que c’est remarquable. Mais on n’aurait pas pu déplacer les habitations, ni ériger des digues de protection en une nuit. Cela n’aurait donc quasiment rien changé au niveau des dommages matériels. L’approche intégrée est une approche à long terme qui doit également tenir compte du plan d’aménagement des sols. Elle doit faire converger les processus liés à la construction, aux sites, aux entreprises et au transfert des risques vers un tout cohérent. MUNICH RE Topics Geo 2011 17 Gros plan J. Zschau : J’ai entendu dire que le système d’alerte précoce avait fourni les premières données 8 secondes après l’impact de la vague primaire, soit 31 secondes après le séisme. La magnitude annoncée était certes largement sous-estimée, mais il s’agissait là de la première information donnée au public. Et l’on estime que cette alerte a permis de sauver de nombreuses vies. Néanmoins, certaines personnes ayant entendu l’alerte ne se sont pas suffisamment mises en sécurité en hauteur, parce qu’elles ne s’attendaient pas à un tsunami de cette ampleur. Cette information a donc induit en erreur et tout cela se serait certainement mieux terminé si des informations exactes sur la magnitude avaient été disponibles quelques minutes plus tôt. « Nous devons poursuivre avec plus d’énergie le déve loppement des scénarios les plus défavorables ». Norio Okada C. Scawthorn : Les systèmes d’alerte précoce sont fantastiques et dans la mesure où nous pouvons les mettre en place, ils représentent l’une des plus grandes contributions de la science pour combattre ce risque. N. Okada : Dans un certain sens, nous n’avons pas mal réussi. Dans certaines régions, le système d’alerte précoce et la préparation aux catastrophes ont bien fonctionné. Nous disons souvent que nous disposons désormais du cas critique et que nous devrions en tirer des leçons. Ce que nous devrions poursuivre avec plus d’énergie, c’est le développement des scénarios les plus défavorables. C. Scawthorn : Le gouvernement japonais se consacre avec grande application à cette question. Seuls quelques pays dans le monde l’étudient sérieusement et, dans ce domaine, le Japon fait figure de leader. Il y a de nombreuses leçons à tirer et je pense que les Japonais essayent d’abord de les assimiler eux-mêmes. 18 MUNICH RE Topics Geo 2011 N. Okada : C’est vrai. On peut peutêtre exprimer cela de 2 façons différentes : d’une part, la façon dont le gouvernement s’est comporté est évaluée et d’autre part, la question est posée de savoir ce que nous aurions pu mieux faire. Un exemple de ce qui a très bien fonctionné est la mobilisation immédiate de la protection civile. Cette dernière a également très bien travaillé à Fukushima. C’est le meilleur des enseignements que nous avons tiré du séisme de Kobe. Même les organisations non gouvernementales ont fourni un excellent travail. Cette fois-ci, une sorte de cellule centralisée a été mise en place. C’est elle qui a mis en œuvre les premières étapes pour une gestion intégrée des situations d’urgence et a organisé l’échange d’informations. Des processus de ce genre illustrent clairement ce nous avons retiré de Kobe. t sunamis dans cette région et à chaque fois, quelqu’un a dit : « Nous devons pousser les gens à aller plus loin. » Un début a été amorcé et cela a même fonctionné dans quelques régions, mais dans de nombreuses autres non. Nous avons besoin ici d’une gestion adaptative pour inciter les gens à poursuivre sur la bonne voie. Cela devrait s’effectuer pas à pas et les personnes devraient être impliquées à tout moment. J’ignore si nous allons y arriver, mais si nous réussissons, ce serait un succès énorme pour la reconstruction. A. Smolka : … et pour ce qui est de Fukushima ? C. Scawthorn : D’un autre côté, on dispose des expériences du séisme de Kobe. En 1995, une division des forces d’autodéfense était stationnée à Nishinomiya, autrement dit à 2 pas de Kobe. Mais les soldats n’ont pas bougé, car le gouvernement central n’en avait pas donné l’ordre. Les Japonais en ont tiré une leçon. J’ai rencontré le général de division Watanabe, commandant de l’armée du NordOuest, et également le directeur régional du ministère des Transports responsable de la région de Tohoku. Comme le général Watanabe et ses officiers l’ont expliqué, la situation juridique et la politique des forces d’autodéfense ont été adaptées entretemps, si bien que cette fois-ci, les forces armées sont intervenues d’elles-mêmes aussitôt après la survenance de cet événement. N. Okada : Eh bien, la catastrophe nucléaire a clairement montré qu’une prise de décision rapide et centralisée n’est pas la qualité première de notre pays. À côté de ceux qui assument la responsabilité politique de ce pays, il devrait exister une autre autorité. À mon avis, il manque encore au Japon l’expérience correspondante ou une culture politique, sans oublier surtout une culture de la gestion de l’urgence. Cela a peut-être pris trop de temps pour impliquer les différentes parties dans la discussion et l’organisation, chose qui peut parfois être vraiment déconcertante. Nous avons dû cette fois-ci coopérer avec d’autres pays et sommes très reconnaissants de l’aide internationale reçue pour l’organisation. Mais le Japon lui-même rencontre encore de grandes difficultés avec la gestion adaptative dont j’ai parlé précédemment. L’amendement des lois prend un temps considérable. Lorsqu’une loi est adoptée, nous ne voulons pas la changer. Par ailleurs, la reconstruction est une tâche herculéenne … A. Smolka : … et demande une approche participative … N. Okada : … qui nous fait encore défaut actuellement. C’est une des raisons pour laquelle cela n’a pas fonctionné. Nous avons souvent vécu des tremblements de terre et des A. Smolka : Je pense que ce problème existe partout, pas seulement au Japon. De nombreuses décisions sont prises après une catastrophe, mais les individus, et surtout les principaux concernés, sont tout simplement laissés pour compte. A. Smolka : Le défi posé par un événement imprévu est difficile à planifier, quand bien même la planification est parfaite. Ce que je veux dire, c’est que si nous en avions su davantage, nous aurions pu prévoir un séisme de magnitude 9 suivi d’un tsunami, voire même Fukushima. Mais si l’on pense à un scénario pour Tokyo, la situation pourrait être complètement différente. C. Scawthorn : Un événement peut être imprévu, prévisible, prévu, prédit par écrit ou pré-annoncé. Il s’agit peut-être de nuances sémantiques insignifiantes, mais ces qualificatifs indiquent une délimitation tempo- Gros plan relle et spatiale croissante. En fait, le séisme du Tohoku était prédit dans la littérature spécialisée. Un autre exemple de prédiction a été Katrina – qui a fait l’objet de la une du « National Geographic » 6 mois avant la catastrophe. La une ! Et San Francisco ? Cinq mois avant le séisme de 1906, le National Board of Fire Underwriters de San Francisco prédisait qu’un tel séisme allait se produire et que l’incendie dévastateur qui s’ensuivrait ne pourrait pas être évité. Le problème est le suivant : comment reconnaît-on les « inconnues inconnues » ? Comment pouvons-nous prévoir l’imprévisible ? Comment transformons-nous l’imprévisible en quelque chose de prévu ? Nous devons faire appel à notre imagination. La littérature fourmille de romans et d’histoires qui se sont avérés véridiques par la suite. Citons par exemple le roman « La Vengeance du Lion » de Nelson DeMille qui prédisait les attentats du 11 septembre. Dans le roman, il s’agit d’une attaque d’un Boeing 747 sur le Capitole, mais pour le reste, tout est prédit. J. Zschau : En ce qui concerne l’imagination, je suis d’accord avec vous. L’imagination est habituellement le point de départ de tout travail scientifique. Mais elle ne suffit pas à elle seule à convaincre qui que ce soit, il faut des preuves pour cela … C. Scawthorn : … et il en existe … J. Zschau : Exact, la paléosismologie gagne en importance. Elle nous fournit les preuves dont nous avons besoin, en plus de l’imagination, pour disposer de plus d’informations sur ces grands événements très rares. A. Smolka : Récapitulons tous les aspects abordés ici : quels sont les principaux enseignements de cette catastrophe ? L. Arnoldussen : Pour moi, un aspect important et qui a déjà été traité est la question de savoir à quel point les modèles sont crédibles et comment ils doivent être utilisés à des fins commerciales. Les modèles offrent peut-être la meilleure estimation possible, mais la réalité est toujours différente, et je pense que cet événement a permis de présenter les choses sous leur véritable jour. Un autre point est l’interdépendance de l’économie mondiale et les relations entre les chaînes d’approvisionnement et les marchés financiers. Le troisième point est que nous nous approchons des limites de ce que l’État peut offrir en tant que dernière instance d’indemnisation. Je pense qu’il existe des limites économiques et nous essayons de découvrir comment les réassurances et les assurances peuvent repousser ces limites, que cela soit en soutenant les gouvernements, ou en réglant les sinistres. « Les modèles sontils crédibles et com ment doivent-ils être utilisés à des fins commerciales ? » Ludger Arnoldussen N. Okada : Le premier enseignement pour moi est le suivant : certaines leçons sont « désapprises ». Cela est vrai tout le temps et partout. Les leçons sont désapprises ou font partie des choses qui sont inévitablement désapprises et donc, des erreurs se produisent à nouveau. Mais de nouvelles connaissances sont également nécessaires. J’ai par exemple mentionné qu’on a déjà souffert plusieurs fois de tels événements sur les côtes orientales du Japon. Et aujourd’hui à nouveau. Vu sous cet angle, les leçons ne sont pas bien apprises et la question se pose de savoir pourquoi. Il existe ici de nombreuses lacunes à combler – les questions de responsabilité, par exemple, doivent être tirées au clair –, sinon on ne fait que ce qui est prescrit sur le papier. Si la ville de Tokyo est frappée par un tremblement de terre dont la magnitude n’est évaluée qu’à 7, les répercussions vont être énormes. Tokyo pourrait être ainsi paralysée d’une façon qui n’a pas du tout été prévue, mais qui est peut-être prévisible. C. Scawthorn : Le premier enseignement est que l’estimation de probabilité a ses limites. Et ces limites se situent dans le fait que les menaces existentielles doivent être gérées différemment. Pour plus de clarté, si nous considérons le risque comme une « conséquence » se produisant avec une probabilité définie, peu importe que la probabilité soit faible ; si la « conséquence » est illimitée, le risque est lui aussi illimité. Et de ce point de vue, l’énergie nucléaire est pour de nombreux sites un risque « semi-illimité ». Au Japon, à mon avis, l’idée va s’imposer que le pays ne peut tout simplement pas se permettre l’énergie nucléaire. Je crois que d’autres pays en viendront également à cette conclusion. Un second enseignement est que la réduction du risque de catastrophe est une affaire à long terme qui demande une approche intégrée combinant des mesures de restriction sur les plans de la construction, de l’occupation des sols, de l’économie et des finances. J. Zschau : Pour moi, le premier enseignement est que la chaîne des risques d’une catastrophe est un phénomène très complexe dans lequel de nombreuses interactions entrent en jeu, non seulement dans le système de la nature, mais aussi dans celui créé par l’homme. Cela nécessite d’une part une concentration accrue sur la recherche interdisciplinaire et d’autre part, le développement de nouveaux partenariats plus efficaces en matière de gestion des risques entre l’État et le secteur de l’économie privée. Deuxième enseignement : comme nous en avons déjà parlé, même si les géoscientifiques ont accompli des progrès considérables depuis le tremblement de terre dans l’océan Indien, ce séisme du Tohoku nous a montré les limites de notre savoir. À ce sujet, je suis d’accord avec Monsieur Scawthorn sur le fait que nous devons réfléchir à de meilleures méthodes d’évaluation des risques et que l’estimation des risques reposant sur les probabilités ne suffit vraisemblablement pas. Et le troisième enseignement est que très clairement, ce séisme doit être considéré d’un point de vue mondial. Il a montré que le risque sismique devient de plus en plus un risque mondial. Selon moi, cela va nécessiter à long terme une amélioration et une intensification de la coopération internationale. A. Smolka : Comme vous l’avez résumé, le séisme du Tohoku a révélé notre manque de connaissances, notre imperfection, mais nous a aussi montré les voies à suivre pour maîtriser une telle situation et que nous suivrons, espérons-le, lorsque semblables cas se produiront. Merci beaucoup ! MUNICH RE Topics Geo 2011 19 PORTRAITS DE CATASTROPHES Tremblement de terre à Christchurch en Nouvelle-Zélande Quelques mois à peine après le tremblement de terre de Darfield en 2010, la plaine de Canterbury a été frappée en 2011 par une autre catastrophe. Le 22 février, un séisme de magnitude 6,2 a secoué la région de Christchurch. Bilan : 181 morts et de lourds dégâts au centreville et dans sa banlieue. Et, une fois de plus, se posent les questions suivantes : quelle est la qualité des règlements applicables à la construction ? Quel est le niveau de préparation des hommes à ce type d’événements ? Marco Stupazzini La série de tremblements de terre qui a commencé en septembre 2010 est appelée séquence sismique de Canterbury. Elle a débuté le 4 septembre 2010 par un fort séisme de magnitude Mw 7,0 (dit tremblement de terre de Darfield) qui a été suivi par plusieurs milliers de répliques. Le 22 février 2011 à 12 h 51 heure locale, soit plus de 5 mois après le séisme principal de Darfield, un séisme de magnitude Mw 6,1 (dit tremblement de terre de Lyttelton) a secoué Christchurch et sa banlieue ; avec ses quelque 400 000 habitants, Christchurch est la plus grande ville de l’île sud de la Nouvelle-Zélande. Le 13 juin 2011, un séisme de magnitude Mw 5,9 s’est produit dans les environs de la banlieue Sumner, faisant une victime tandis que de nouveaux dégâts matériels étaient enregistrés à Christchurch et Lyttelton. Le 23 décembre, la terre s‘est remise à trembler. Quatre séismes d’une magnitude comprise entre Mw 5,0 et 6,0 ont secoué la côte est, près de New Brighton. Comme lors des autres tremblements de terre, une liquéfaction du sol s’est produite localement et des éboulements de rochers étaient enregistrés sur la côte. Le tremblement de terre du 22 février est l’une des plus grandes catastrophes naturelles de l’histoire de la Nouvelle-Zélande avec 181 victimes et environ 2 000 blessés ; de plus, des dizaines de milliers de bâtiments, déjà en partie ébranlés par le séisme de Darfield et ses répliques, ont été fortement endommagés. Le centre-ville de Christchurch était un éritable champ de ruines. v MUNICH RE Topics Geo 2011 21 PORTRAITS DE CATASTROPHES La cause du tremblement de terre était un chevauchement oblique de la plaque australienne et de la plaque pacifique, dans leur zone frontière, à environ 6 kilomètres à peine du centre-ville. La série de séismes s’est produite le long d’un système de failles jusqu’alors inconnu, situé sous les sédiments de la plaine de Canterbury et non identifiable à la surface. Au cours des 10 dernières années, de nombreuses études sismiques ont été réalisées à cet endroit. Elles n’ont pourtant pas révélé le moindre signe laissant supposer qu’un fort tremblement de terre était imminent dans cette région précise. Deux aspects frappants concernant les effets et les conséquences du séisme ont joué un rôle essentiel lors de l’interprétation du type de sinistre : d’une part, de très fortes secousses du sol, aussi bien horizontales que verticales, ont été observées ; d’autre part, une liquéfaction du sol s’est produite sur un vaste périmètre de l’agglomération urbaine. Différents facteurs ont contribué à ces violentes secousses du sol : −−la distance par rapport à l’épicentre : le bord supérieur de la faille du séisme de Lyttelton se trouvait à une faible profondeur, à 6 kilomètres du centre-ville ; lors du séisme de Darfield, la fracture s’était arrêtée à environ 20 kilomètres du centre-ville. −−l’effet directionnel : la superposition des ondes sismiques dans le sens de la rupture de la faille peut conduire à un net renforcement du séisme. −−sous-sol meuble/effet de cuvette : le sous-sol de la ville de Christchurch est constitué de couches sédimentaires profondes (de 600 à 1 200 mètres d’épaisseur jusqu’au soubassement). Lors de l’évaluation de la sécurité parasismique des bâtiments et des infrastructures, il faut considérer la séquence sismique de 2010/2011 en relation avec les principes qui régissent la réglementation parasismique actuelle. L’effondrement des bâtiments a enveloppé Christchurch d’un épais nuage de poussière. À gauche : les ondes sismiques peuvent provoquer des vibrations du sous-sol telles que celuici devient instable et prend les caractéristiques d’un liquide. Conséquence : les véhicules et les bâtiments s’enfoncent. À droite : des sables mouvants, phénomène caractéristique de la liquéfaction du sol qui a endommagé de nombreuses habitations. 22 MUNICH RE Topics Geo 2011 PORTRAITS DE CATASTROPHES En principe, 2 facteurs peuvent être distingués : le caractère fonctionnel et la limite de portance. Le premier est pertinent pour des événements relativement fréquents et établit que le bâtiment doit être entièrement fonctionnel et habitable. Le deuxième concerne des événements de fréquence moindre (c’est-à-dire survenant en moyenne une fois en 475 ans, valeur standard usuelle dans les codes de construction), occasionnant certes des dégâts mais pas d’une ampleur provoquant l’effondrement des bâtiments. Le code sismique prévoit que des mouvements du sol, tels qu’ils ont été constatés lors du tremblement de terre de février, ne se produisent qu’une fois en 2 500 ans environ ; ils ont été par conséquent nettement plus forts que ceux qui avaient été envisagés lors de la construction des bâtiments à Christchurch. En outre, le parc immobilier de Christchurch est relativement ancien. Les bâtiments historiques et les immeubles construits au centre-ville avant l’entrée en vigueur de la législation sur la construction étaient particulièrement sensibles aux séismes. Des destructions d’une ampleur inhabituelle Le tremblement de terre de Lyttelton a frappé par l’ampleur inhabituelle des destructions qu’il a provoquées : de nombreux bâtiments dont les murs n’étaient pas renforcés ont été lourdement endommagés ou se sont écroulés. Même 2 tours en béton armé, l’une abritant le siège de la chaîne de télévision régionale Canterbury Television (CTV) et l’autre les locaux de la société financière Pyne Gould Corporation, se sont effondrées ; les escaliers, les piliers et les murs dans d’autres bâtiments en béton armé ont également cédé. Ceci a été le cas notamment de l’immeuble Forsyth-Barr et de l’hôtel Grand Chancellor. La liquéfaction du sol, qui s’est étendue à la fois au centre-ville et à sa banlieue, a entraîné des mouvements latéraux des fondations et une rupture du sol ou l’effondrement des bâtiments. La série de séismes a soulevé de nombreuses questions concernant l’évaluation des dangers et des risques et, d’une manière générale, la perception du risque. En voici quelques points essentiels : −−Essaim sismique (clustering) et répliques : la séquence sismique de Canterbury est un des rares cas au monde dans lesquels une réplique ou un événement déclenché (le séisme de Lyttelton en 2011) a occasionné de plus gros dégâts que le séisme principal qui l’a précédé (le séisme de Darfield en septembre 2010). Il faudra analyser comment la propagation des tensions et les répliques peuvent être intégrées dans la modélisation probabilistique des risques mais aussi quelle est la probabilité de tels événements dans le contexte mondial. Si, par exemple, la séquence sismique de New Madrid de 1811/1812, dont c’était le 200e anniversaire en décembre 2011/janvier 2012, se répétait aujourd’hui, les dommages assurés se chiffreraient en dizaines ou centaines de milliards. −−Les séries de séismes ne compliquent pas seulement la modélisation mais aussi la reconstruction dans un environnement très incertain. −−Toute la séquence sismique et en particulier le séisme de Lyttelton sont des événements extrêmement rares. Les études géologiques ont révélé que les derniers mouvements du système de failles réactivé lors de cette séquence s’étaient produits il y a plus de 10 000 ans. Si la probabilité de tels tremblements de terre est certes enregistrée correctement dans le modèle sismique de la Nouvelle-Zélande, il n’en est pas de même pour les graves effets dommageables. Ce type d’événements extrêmement rares constitue un défi particulier pour les planificateurs et les gestionnaires de risques. −−Déformation et liquéfaction du sol : le risque de liquéfaction dans la plaine de Canterbury était parfaitement connu. L’ampleur du phénomène – surtout lors du séisme de Lyttelton au cours duquel plusieurs kilomètres carrés ont été touchés – a néanmoins surpris, posant aussi la question de savoir où un tel phénomène serait encore possible. −−Vulnérabilité : si l’on veut tirer des conclusions pour d’autres scénarios sismiques en Nouvelle-Zélande et surtout pour la région de Wellington, il faut tenir compte du fait que la région de la capitale est nettement mieux préparée aux tremblements de terre que Christchurch. Ceci est dû à un programme d’assainissement rigoureux qui, depuis la fin des années 80, a remplacé par du neuf ou renforcé les bâtiments vulnérables. D’autre part, la magnitude maximale possible est supérieure à Wellington et la faille longe directement la périphérie du centre-ville. MUNICH RE Topics Geo 2011 23 PORTRAITS DE CATASTROPHES Pyne Gould QuartiersdeChristchurch(vueagrandiedu centred’affaires)danslesquelsdesliquéfactionsdusolontétéobservéeslorsdesséismes du4septembre2010,du22février2011etdu 13juin2011. Cathédrale Hôtel Grand Chancellor CTV Liquéfactiondusolobservéele4septembre2010 Liquéfactiondusolobservéele22février2011 Liquéfactiondusolobservéele13juin2011 Faille(cachée) Mw 7,0 04/09/2010 Leséismeprincipaldu4septembre2010 etles2répliqueslesplusfortessurvenues jusqu’enjuin2011. Mw 5,9 13/06/2011 Mw 6,1 22/02/2011 Épicentres Faille(cachée) FailledeGreendale N 0 5 10 24 MUNICHRE TopicsGeo2011 20 Kilomètres Source : Munich Re sur la base des données de GNS Science et de Misko Cubrinovski de l’Université de Canterbury à Christchurch PORTRAITS DE CATASTROPHES Versement d’indemnisations forfaitaires pour les dommages de moindre importance LaséquencesismiquedeChristchurchaconduità denouvellesconclusionsnonseulementdansles domainesdessciences,dugénieciviletdel’évaluation desrisques,maisaussientermesd’assuranceoùelle asoulevédenombreuxproblèmes: −Nombredesinistresetclassementdesévénements: lesdéclarationsdesinistresdépassantlargementles 600 000,desretardsdanslerèglementdesdommagessesontévidemmentproduits,endépitdes effortsénormesdéployésparlaCommissiondes séismes(EarthquakeCommission,EQC)etlesecteur privédel’assurance,etbienqu’unpland’urgenceait étéétabliavantleséisme.L’imputationdesdifférents sinistresàdesévénementsprécisdelaséries’estavéréedifficiledansdenombreuxcaslorsquedesbâtimentsavaientététouchésàplusieursreprises. −Lenombreélevédesinistresarenduinéluctablele versementd’indemnisationsforfaitairespourles dommagesdemoindreimportance. −Unautreobstacleaurèglementdesdommagesaété l’inaccessibilitéducentre-villependantplusieursmois. −L’ampleurconséquentedeladéformation/liquéfactiondusolaconduitàunnombreinhabituellement élevédepertestotalesquidépassaientlalimited’assuranceaupremierrisqueparmilespolicesd’assurancedel’EQCetquiontparconséquenttouchéles couverturesd’assuranceenvaleurtotaleproposées parlemarchéprivé. −Deplus,lasituations’estaggravéelorsquelaCanterburyEarthquakeRecoveryAuthority(CERA)aclassé enzonesinhabitablescertainsarrondissements,cette décisionconcernantaussilesbâtimentsquin’étaient pasentièrementdétruits.Danscescas-là,laCERAa rachetélesmaisonsconcernéesets’estvuetransférer lesdroitsauxprestationsd’assurance;laCERAs’efforcerad’obtenirdesprestationsd’assuranceaussi élevéesquepossiblepourdédommagerlespropriétairesdesbâtimentsexpropriés. −Undesprincipesdel’assurance,àsavoirlecaractère imprévisibledudommage,n’existeplusdanslasituationactuelle,personnenepouvantdirequandlasérie deséismess’arrêtera.D’autresséismesdemagnitude Mw6,0etplussontpossiblesdanslarégionetpourraientavoirdesrépercussionsaussisurdeszones moinstouchéesjusqu’àprésent.Cefacteurdoitêtre prisencomptedanslatarification. Bilan des dommages du séisme du 22 février 2011 Morts Blessés LeséismedemagnitudeMw6,1,quiafrappélavillede Christchurchle22février2011,adéveloppélaconsciencedurisqueetconduitàexigeravecplusde véhémencequelesingénieursconçoiventdesbâtimentséconomiquementrentables,n’assurantpasseulementlasurviedesvictimeslorsdegravestremblementsdeterremaisminimisantaussilesdommages matériels.Ilfautcréerunconceptdéfinissantcomment lesrégionsconcernéespourrontmieuxfairefaceàde telsévénementsetl’intégrerdanslaprochainegénérationdecodesrelatifsauxconstructionsparasismiques. Au-delàdel’aspectrelatifauxconstructions,lasériede séismesdeChristchurch,etenparticulierceluide février,asoulevédenombreusesquestionsconcernant l’évaluationdesdangersetdesrisquesetsonapplicationdanslagestiondesrisquesetlatechniquedes assurances.Laduréedela«crisesismique»quise poursuitreprésenteunproblèmeparticulierpourla reconstructiond’unepartetlasouscriptiond’autrepart. Desplansd’urgenceefficacespourdesévénements occasionnantplusieurscentainesdemilliersde sinistresainsiquedesconditionsdecouvertureetdes processusderèglementdedommagestransparents sontnécessairespourdessituationsdanslesquellesle secteurprivédel’assurance,unpland’assurancepublic etl’Étatproprementditsontétroitementliés.Enfinde compte,desévénementstelsqueceluidu22février,au coursduquell’interactiondeplusieursélémentsdommageablesaentraînéd’énormespertes,sonttrèsrares. Tirerdesconclusionsàvaleuruniverselled’unévénementuniquedecetypeestunvéritabledéfipourl’évaluationdesrisques,pourleurgestionetpourl’assurance. NOTRE EXPERT : Dr.MarcoStupazzini,consultant dansledomainedestremblementsde terreetautrescatastrophesnaturelles auseindudépartementSouscription Entreprise/GestionRisquesde cumuls/Géorisques. [email protected] 2 000 Montanttotaldesdommages 16milliardsde$US Dommagesassurés 13milliardsde$US Maisonsdétruitesouendommagées 181 Conclusion 10 000 MUNICHRE TopicsGeo2011 25 PORTRAITS DE CATASTROPHES Terres sous les eaux : inondations en Australie, aux États-Unis et en Thaïlande La survenance de grosses catastrophes sismiques a fait un peu oublier que 2011 a aussi été une année de grandes inondations catastrophiques. Des chutes de pluie inhabituellement abondantes sur une durée dépassant parfois plusieurs mois ont causé les pires inondations depuis des décennies. Wolfgang Kron Queensland, Australie : de fortes quantités de pluie avaient déjà touché le pays en décembre 2010 ; peu avant le Nouvel An, un nouvel épisode de fortes pluies a sévi jusqu’à la mi-janvier. Il a généré plusieurs crues éclair dont la plus importante, survenue le 10 janvier dans la petite ville de Toowoomba, a coûté la vie à 22 personnes ; très rapidement, les réservoirs d’eau se sont remplis et les cours d’eau ont grossi. Comme lors des inondations de 1974, Brisbane, métropole de 2 millions d’habitants, a été envahie par une vague géante provenant du fleuve Brisbane. L’ensemble du quartier commercial du centre-ville a été inondé et le niveau de l’eau a atteint plusieurs mètres. Les secouristes, les habitants et les propriétaires de magasins ont lutté durant presque 2 semaines contre les flots. Au final, les événements survenus entre décembre et janvier ont occasionné des dégâts s’élevant au total à quelque 7,3 milliards de $US, dont un tiers (2,4 milliards de $US) était assuré. À peine venait-on de sortir du pire que, dans l’océan Pacifique, Yasi, un cyclone de catégorie 4, mettait le cap sur le Queensland. Mais cette fois-ci, les habitants ont eu la vie sauve : la tempête a touché terre à quelques centaines de kilomètres au nord de la ville et déversé de fortes pluies sur des zones en grande partie inhabitées. Elle n’en a pas moins causé des dégâts d’un montant de 2,5 milliards de $US, dont 1,3 milliard était assuré. Même si, contrairement à ce qui a souvent été annoncé dans la presse, il n’est pas vrai que les eaux aient recouvert un territoire de la taille de la France et de l’Allemagne réunies (en réalité, les inondations sont survenues isolément sur une superficie comparable), l’ampleur des inondations a tout de même été exceptionnelle. Par contre, les pluies extrêmement abondantes qui sont tombées durant plusieurs semaines n’étaient pas surprenantes. On pouvait en effet escompter en Australie une saison des pluies particulièrement intense en raison du phénomène climatique La Niña. À cela est venu s’ajouter le fait que les eaux du Pacifique occidental, au large de l’Australie, ont connu de fin 2010 à début 2011 un réchauffement encore 26 MUNICH RE Topics Geo 2011 inégalé, ce qui a favorisé une forte évaporation et, par suite, une teneur en eau élevée dans les masses d’air progressant en direction des terres. États-Unis : en mai et juin 2011, la crue du Mississippi et de plusieurs de ses principaux affluents a provoqué les pires inondations que le pays ait connues depuis des décennies. Les dégâts causés ont été assez graves, mais, compte tenu de l’ampleur de l’événement, ils sont tout de même restés limités, représentant un montant inférieur à 10 milliards de $US. Cette limitation des dégâts s’explique entre autres par la précoce mise en place, aux États-Unis, d’un programme de gestion des crues nettement plus performant que la plupart de ceux qui sont appliqués dans les autres pays. Ainsi, au début de l’été 2011, grâce à l’application ciblée des dispositifs d’urgence, ce ne sont pas, comme dans d’autres pays, de vastes La crue de la rivière Brisbane a submergé des quartiers entiers de la ville. PORTRAITS DE CATASTROPHES régions qui ont été inondées de façon incontrôlée, mais des zones à faible concentration de valeurs. Vous trouverez une description détaillée de la crue du Mississippi dans notre brochure Schadenspiegel 2/2011 (www.munichre.com/publications/302-07077_fr.pdf). Thaïlande La large vallée du fleuve Chao Phraya qui traverse la Thaïlande du nord au sud forme la plaine centrale, cœur du pays, et est considérée comme la zone agricole la plus productive du royaume. Peu avant de se jeter dans le golfe de Thaïlande, le fleuve traverse Bangkok, une métropole de 7 millions d’habitants, auxquels s’ajoutent 5 millions de personnes vivant dans la périphérie. C’est essentiellement dans cette plaine, où est généré 40 % du produit national brut, que sont survenues les inondations catastrophiques de 2011, bien que d’autres parties du pays ainsi que le Cambodge, le Laos et le Viêt Nam aient aussi été sévèrement touchés. Plusieurs mois de pluie Dans le centre de la Thaïlande, la saison des pluies s’étend de mai à octobre. La mousson du sud-ouest apporte de l’air humide et chaud qui donne naissance à des pluies, au plus tard lorsqu’il atteint la pente des montagnes. Ainsi, lors d’une année moyenne, les précipitations peuvent atteindre de 1 000 à 1 300 mm (soit au moins 80 % de la quantité annuelle). En 2011, le phénomène climatique La Niña a exercé une influence importante, la mousson étant particulièrement intense durant cette phase. L’Asie du Sud et du Sud-Est a été frappée par des chutes de pluie réitérées. Le nord de la Thaïlande avait déjà reçu en mars 3,5 fois plus de précipitations que la normale, ce qui en montagne a provoqué de nombreuses crues éclair et a fait largement monter le niveau d’eau dans les barrages de Bhumipol et Sirikit. En mai a commencé la mousson d’été avec des chutes de pluie supérieures à la moyenne durant plusieurs mois. Des inondations plus importantes sont survenues lorsque, fin juillet, le typhon Nock-Ten a touché terre au nord du Viêt Nam, déversant d’énormes quantité de pluie sur l’ensemble de la région, jusqu’au nord de la Thaïlande. De nouveau, des crues éclair se sont produites un peu partout. Au cours des 2 mois suivants, les inondations ont progressé du nord au sud, de plus, les vannes des 2 grands barrages ont dû être ouvertes toujours plus grand pour qu’il n’y ait pas de débordement. Mais du même coup, ces derniers perdaient largement leur fonction de barrières anti-inondations. De grandes quantités d’eau en provenance du nord de la Thaïlande sont descendues vers le Chao Phraya. À la mi-septembre, du centre de la Thaïlande jusqu’à la limite Nord de Bangkok, pratiquement toutes les zones situées en plaine étaient touchées par les inondations. Plusieurs barrages anti-crues aux embranchements des canaux de dérivation ont cédé ou ont été ouverts ; les masses d’eau ont inondé rizières, villages et villes. La ville de Nakhon Sawan, située au confluent des rivières Yom et Ping, affluents du Chao Phraya a rapidement été submergée par les flots. Ayutthaya, ville historique avec ses merveilleux temples a, elle aussi, été victime des inondations, tout comme un grand nombre de parcs industriels. Cependant ces débordements ont été bénéfiques pour Bangkok, car ils ont permis d’atténuer l’onde de crue. Excédent de précipitations en mm +200 0 –200 Mars-avril Mai-juin Durant chacune des périodes de 2 mois, de mars à octobre, il est tombé au nord de la Thaïlande nettement plus de pluie que dans la moyenne bimensuelle. L’excédent a parfois atteint jusqu’à 1 000 mm. Juillet–août Septembre-octobre Source : Munich Re d’après les données du Thai Meteorological Departement, analysées par M. Saman Prakarnrat. MUNICH RE Topics Geo 2011 27 PORTRAITS DE CATASTROPHES Début octobre, tous les barrages étaient tellement pleins que les exploitants ont dû, par mesure de protection, ouvrir les vannes pour l’évacuation d’énormes quantités d’eau, ce qui a provoqué une aggravation des inondations en aval du fleuve. Cela a aussi augmenté le risque pour Bangkok et les parcs industriels dans la plaine du Chao Phraya. Des barrières de sacs de sable ont été mises en place, réparées et surélevées. Cependant, 32 des 50 districts de la ville ont été inondés et 2 millions de personnes ont été obligées de quitter leurs habitations. Toutefois, le centre-ville avec son quartier commerçant a été épargné par les eaux. Début novembre, l’eau s’est retirée peu à peu à partir du nord du pays. La vallée du Chao Phraya n’a pas beaucoup de pentes et dans plusieurs zones, l’eau a même dû être évacuée à l’aide de pompes. Ce n’est qu’en fin d’année que les eaux ont partout fini de se retirer. Les inondations n’ont pas touché que la région du Chao Phraya. Les hommes ont lutté contre les flots, souvent en vain, dans 64 des 76 provinces de la Thaïlande. Cela a été également le cas à l’est du pays, sur le plateau de Korat, qui ne présente heureusement pas de grosses concentrations de valeurs et où, de ce fait, les pertes financières sont restées moindres. Les conséquences humaines ont toutefois été au moins aussi graves que dans le centre de la Thaïlande. Le préjudice total s’est élevé à environ 40 milliards de $US. Les inondations ont été les pires que la Thaïlande ait connues depuis un demi-siècle. Cependant, ce n’est pas l’ampleur des zones inondées qui a été le plus impres- 28 MUNICH RE Topics Geo 2011 sionnant, mais l’importance des dommages (préjudice total : quelque 40 milliards de $US) causés par les inondations. La Thaïlande s’est développée extrêmement rapidement au cours de ces 30 dernières années. Avec l’accroissement de la population (1980 : 46,5 millions d’habitants ; 2010 : 68 millions d’habitants) et l’essor économique, la Thaïlande a vu surgir de son sol d’immenses surfaces urbanisées, et surtout des zones commerciales et industrielles représentant des con centrations de valeurs se chiffrant en milliards. L’infra structure en matière de transport et d’approvisionnement a été énormément améliorée, surtout dans l’agglomération de Bangkok. Le pays était en plein boom ; le risque d’inondation est passé au second plan et a été généralement sous-estimé, alors que parallèlement, il s’aggravait, car de vastes superficies servant autrefois de tampons contre les vagues de crues disparaissaient. C’est ainsi que les grandes zones d’activité industrielle sont devenues des générateurs de sinistres. Sept de ces parcs industriels comprenant un millier de halles de production et où travaillaient près de 500 000 personnes ont subi des inondations atteignant plusieurs mètres de hauteur. Les dommages matériels ont été énormes, la production a été stoppée, les chaînes de livraison et d’approvisionnement ont été interrompues en partie durant plusieurs semaines, ce qui a finalement eu des conséquences à l’échelle mondiale. Les branches industrielles les plus touchées ont été celles du secteur électronique, informatique et automobile ainsi que les fabricants d’appareils médicaux et de produits alimentaires. Neuf constructeurs automobiles japonais ont suspendu leur production : ainsi, par jour, 6 000 véhicules de moins sont sortis des usines. PORTRAITS DE CATASTROPHES Diverses entreprises opérant globalement ont particulièrement souffert de la pénurie de livraisons thaïlandaises. Ainsi, la fermeture d’usines de production de disques durs a eu un impact sur le marché mondial. Un quart de la production totale de disques durs (HDD) vient de Thaïlande. Il y a donc eu des goulots d’étranglement et des augmentations de prix. En dehors des parcs industriels, un très grand nombre d’usines ont aussi subi des dégâts : d’après les estimations, 10 000 à 15 000 exploitations ont été touchées dans 20 provinces thaïlandaises ; ne serait-ce que dans la zone de Ayutthaya, au moins 900 des 2 150 usines ont été sinistrées. Il est probable que 300 000 personnes seront au chômage de façon permanente et 700 000 autres de façon provisoire. les inondations et 2 millions ont dû abandonner leur logement. Le secteur agricole et le secteur de l’élevage ont été très sévèrement touchés. 1,6 million d’hectares de terres agricoles, dont 1,35 million d’hectares de rizières, plus de 10 % de la surface exploitable, ont été inondés et détruits ou endommagés. Un quart de la récolte à été détruit. Près de 10 millions de têtes de bétail étaient menacées ou ont dû être évacuées, un grand nombre d’entre elles ont été tuées. Selon les évaluations de l’Autorité du tourisme, le secteur touristique a enregistré des pertes représentant au moins 2 milliards de $US, en raison d’un désistement estimé à 300 000 touristes. Les inondations ont ravagé plusieurs centaines de milliers d’habitations ainsi que d’innombrables installations et conduites d’approvisionnement, écoles et universités, dont le réputé Asian Institute of Technology (AIT) et la Thammasat University. Cette dernière, qui servait de principal centre d’accueil pour les sinistrés a elle-même dû être évacuée. Plusieurs hôpitaux ont été évacués. Rues et voies ferroviaires sont devenues impraticables parce qu’elles ont été submergées ou parfois aussi du fait que de nombreux automobilistes conduisaient leur véhicule sur des voies surélevées et les bloquaient. Les dégâts subis par les routes et les autoroutes totalisent environ un demi-milliard de dollars. Bangkok avait de la chance dans la malchance, car 2 systèmes de transport très utilisés, le métro souterrain et le métro aérien, n’ont pas subi de gros dégâts. L’aéroport international n’a pratiquement pas été touché ; l’aéroport national, par contre, a été totalement envahi par les eaux et a dû être fermé. La circulation à Bangkok a tout de même été sérieusement perturbée. Le niveau de l’eau a atteint au moins 80 cm dans plus de 30 districts de la ville. 800 000 personnes vivent ici. Densité d’assurance faible – haut potentiel de croissance Durant toute la période des crues, de juillet à novembre, plus de 13 millions de personnes ont été affectées par Après le séisme de Tohoku au Japon, les inondations en Thaïlande ont fait apparaître une fois de plus la Jamais jusqu’ici une inondation fluviale n’a généré des dommages assurés aussi élevés (dernier record : Grande-Bretagne, 2007, avec 6 milliards de $US), et ce, dans un pays où la densité d’assurance n’est pas élevée. Les estimations (situation en février 2012) prévoient un montant supérieur à 10 milliards de $US. Près de 90 % de tous les dommages assurés ont frappé les affaires industrielles, la majeure partie étant constituée par 7 parcs industriels totalement recouverts par les eaux. Les valeurs y représentaient près de 20 milliards de $US. Les taux de sinistres se situaient autour de 50 %, ce qui est très élevé pour une inondation fluviale. À cela sont venues s’ajouter des pertes d’exploitation (arrêts de production dus à l’inondation des sites de production) et des carences de fournisseurs (suite à l’interruption des chaînes de livraison et des voies de communication), qu’il est toutefois très difficile de quantifier, car elles se sont produites dans le monde entier. À gauche : de nombreux sites historiques, comme ce temple au nord de Bangkok, ont été cernés par les eaux. À droite : pour beaucoup d’automobilistes, la dernière ressource était d’utiliser les voies express surélevées. Cela a toutefois provoqué des embouteillages sur les axes de communication. MUNICH RE Topics Geo 2011 29 PORTRAITS DE CATASTROPHES roblématique des grosses polices Pertes d’exploitation. p Les quatre cinquième des dommages industriels ont frappé des firmes japonaises qui avaient déjà été touchées lors du séisme de Tohoku et avaient, de ce fait, transféré leur production en Thaïlande. Malgré de grosses pertes, les réassureurs vont continuer à garantir les risques industriels en Thaïlande, à condition que le gouvernement et les exploitants de parcs industriels prennent des mesures intensives et durables pour qu’à l’avenir les sites soient mieux protégés. D’après les informations de l’Agence générale d’assurance, la densité d’assurance en Thaïlande dans le secteur privé ne dépasse pas 1 %. Les propriétaires fonciers qui souscrivent un prêt doivent s’engager auprès de leur banque à s’assurer contre le risque d’incendie, mais pas contre le risque d’inondation. En conséquence, seulement 10 % de ces personnes ont une protection contre le risque d’inondation moyennant une majoration de prime de 25 % sur leur couverture Incendie. Selon les estimations de l’Office thaïlandais de la Commission de l’assurance, les dommages assurés sur un million de maisons abîmées ou détruites (150 000 dans l’agglomération de Bangkok) ont atteint « seulement » un demi-milliard de $US. Les investisseurs étrangers comptent sur une assurance adéquate et abordable des risques industriels en Thaïlande. En même temps, la Thaïlande a besoin que les groupes internationaux maintiennent leurs sites de production dans le pays. Le gouvernement doit donc veiller à ce que de plus amples mesures de prévention et de protection contre les crues soient appliquées pour que ce genre de sinistres ne se reproduise pas. Il serait par exemple question de protéger les centres de concentration de valeurs en déviant les eaux du Chao Phraya à l’ouest et à l’est, au niveau du cours inférieur du fleuve grâce à l’aménagement de cours d’eau et de canaux existants. La protection des parcs industriels s’avère onéreuse ; ne serait-ce que les mesures de protection du parc Rojana à Ayutthaya sont estimées à 400 millions de $US. Devant l’ampleur des dommages assurés en Thaïlande, il est indispensable que le secteur assurantiel réagisse. Il y aurait lieu d’examiner le contrôle des cumuls et les conditions d’assurabilité, et de vérifier si les taux sont adéquats. Particularité de cet événement : bien que le pays soit dans l’ensemble peu développé, un grand nombre de valeurs assurées élevées ont été endommagées. Ici, l’interconnexion globale et, en conséquence, les carences de fournisseurs aux 4 coins du monde ont joué un rôle particulièrement important. Le parc industriel Rojana près d’Ayutthaya a été complètement noyé par les eaux et l’ensemble de la production a été interrompu durant plusieurs semaines. 30 MUNICH RE Topics Geo 2011 Bilan des dommages Morts Personnes évacuées 813 2 000 000 Montant total des dommages 40 milliards de $US Dommages assurés 10 milliards de $US Maisons détruites ou endommagées Terres cultivées inondées 1 million 1,6 million d’hectares PORTRAITS DE CATASTROPHES Conclusion Nan Ping Parmi les 27 000 personnes qui ont trouvé la mort dans les catastrophes naturelles survenues en 2011, 95 % ont été tuées par l’action de l’eau, que ce soit à la suite de tsunamis, d’inondations ou de crues éclair. Aux Philippines, peu avant la fin de l’année, plus d’un millier de personnes, surprises dans leur sommeil, ont péri dans des flots de boue qui ont englouti leurs habitations. Nakhon Sawan La plus grande inondation catastrophique de ces dernières décennies en Thaïlande a touché le pays de plein fouet et a probablement freiné son développement économique fulgurant. Malgré les prestations d’assurance, un grand nombre d’entreprises ont perdu beaucoup d’argent dans ce pays de production considéré comme « sûr ». Un retrait de ces firmes porterait énormément préjudice à la Thaïlande. Le pays a beaucoup investi dans la protection contre les inondations, surtout à Bangkok. Eu égard aux investissements futurs indispensables pour la protection contre les crues, Il y a lieu de reconsidérer cette focalisation sur la capitale. Chao Phraya Tha Chin Bangkok 7 R égions inondées 6 Ayutthaya 5 3 2 4 Parcs industriels touchés 1 Bang Kadi 2Nava Nakorn 3Bang Pa-In 4Wang Noi 5Hi Tech 6Rojana 7Saha Rattana Nakorn 1 D’immenses étendues le long du Chao Phraya ont été submergées par les flots. Les inondations ont aussi frappé 7 parcs industriels. C’est là que la catastrophe a généré la plupart des dommages assurés. Source : Munich Re selon les données de NASA NRT Experimental Flood Maps. Il est nécessaire de prévoir des normes plus rigides en matière d’occupation des sols et de les faire respecter. Leur application ne freinerait pas l’évolution du pays, bien au contraire. En effet, pour les investisseurs, la sécurité de planification est un critère primordiale. Cet événement catastrophique a privé plusieurs entreprises d’une partie de leur rendement. S’il souhaite continuer à offrir aux entreprises internationales des sites attractifs, le pays doit prévoir un niveau de protection plus élevé contre ce genre de pertes, que ce soit grâce à un renforcement des mesures de protection contre les crues ou, ce qui serait préférable et plus efficace, par un plan d’aménagement des sols bien structuré. Il est en outre important d’augmenter la densité d’assurance dans les secteurs privé et commercial. C’est dans cette perspective qu’il a été proposé entre-temps de fonder un pool d’assurance avec un volume de 500 milliards de bahts (environ 17 milliards de $US). Population, branche économique et secteur assurantiel en profiteront à part égale. Une densité d’assurance plus élevée permet en effet de déterminer les risques de façon plus fiable et de les répartir sur plusieurs épaules. NOTRE EXPERT : Dr.-Ing. Wolfgang Kron, chef de recherche Risques hydrologiques dans le secteur Recherche en géorisques/Centre Entreprise Sciences du Climat. Il est responsable de tout ce qui a trait au domaine des « catastrophes naturelles liées à l’eau ». [email protected] MUNICH RE Topics Geo 2011 31 PORTRAITS DE CATASTROPHES Printemps 2011 : de fortes tempêtes se sont abattues sur les États-Unis Sur la côte est des États-Unis, une saison de tempêtes extrêmement active a causé des sinistres d’une ampleur sans précédent. De nombreuses éruptions de tornades ont dévasté des villes entières ; le montant des dommages assurés de l’année causés par les intempéries se chiffre à plus de 25 milliards $US et le nombre de morts (600) n’avait pas été aussi élevé depuis 1925. Mark Bove Bien que de nombreux facteurs climatologiques et météorologiques aient contribué à la survenance de fortes tempêtes et de violentes éruptions de tornades en 2011, les conditions climatiques marquées causées par le phénomène La Niña comptent parmi les facteurs les plus importants (voir également sur ce point l’article d’Eberhard Faust, à partir de la page 40). Le phénomène La Niña est un refroidissement anormal de la température des eaux superficielles du Pacifique estéquatorial, causé par les conditions atmosphériques dans la moitié est des États-Unis, qui favorisent la formation de violentes tempêtes orageuses et de tornades. En effet, La Niña renforce le courant-jet polaire audessus de l’Amérique du Nord, ce qui alimente ensuite les tempêtes extra-tropicales se déplaçant du Pacifique et du Canada jusqu’aux États-Unis. Un tel phénomène, combiné aux forts gradients de température et courants aériens accompagnant de tels systèmes frontaux, peut augmenter le risque de survenance de tempêtes orageuses et des dangers qui y sont liés. La saison des tempêtes de 2011 a battu plusieurs records. Bien que le nombre total de tornades en 2011 n’ait pas dépassé le record atteint en 2004 avec 1 817 tornades, ce printemps a vraisemblablement connu la saison des tornades la plus active de l’histoire. En effet, au cours de l’été 2004, les ouragans ayant touché terre avaient déclenché plusieurs centaines de tornades. En avril 2011, on a pu en dénombrer 748, un nombre record ; avec 226 tornades répertoriées le 27 avril, cette journée est devenue la journée où s’est produit le plus grand nombre de tornades de l’histoire des États-Unis. En 2011, avec 6 tornades de niveau EF5, le record de 1974 a été atteint. Cette saison des tornades a été également la plus meurtrière depuis plus de 85 ans aux États-Unis : en tout, 551 personnes sont décédées, parmi lesquelles 318 au cours de la seule journée du 27 avril. La saison des tornades printanière la plus active de l’histoire Deux violentes éruptions orageuses sont à l’origine de plus de la moitié des dommages assurés survenus en 2011. Le premier phénomène climatique, appelé « Super Outbreak 2011 », a été causé par une forte tempête extra-tropicale qui s’était formée au sud des Grandes Plaines avant de se déplacer vers l’est, du 25 au 27 avril, au-dessus de la vallée du fleuve Ohio. Au cours de ces 3 jours, le système a engendré des centaines de tornades qui se sont déplacées de la partie sud-est des États du sud jusqu’à la côte est des ÉtatsUnis. En tout, le phénomène a déclenché 353 tornades et des milliers de tempêtes orageuses et de tempêtes de grêle dans 22 États américains. L’effet amplificateur de La Niña concernant les orages violents peut être avant tout observé au cours des derniers mois d’hiver ainsi qu’au printemps et il est particulièrement prononcé dans la partie sud-est des États du sud et dans le Midwest des États-Unis, de la Louisiane et du Mississipi jusque dans l’Ohio et le Michigan au nord. À l’intérieur de cette vaste région, le risque de survenance de violentes éruptions de tornades est plus élevé ; les tornades y sont par ailleurs plus fréquemment dévastatrices et ont de longues trajectoires. Cette région a également été touchée par le « Super Outbreak », la violente éruption de tornades de 1974 au cours d’une année La Niña, ainsi que par plusieurs éruptions importantes en 2011. En revanche, dans d’autres régions des États-Unis, et notamment dans la région des Grandes Plaines, également appelée l’« allée des tornades », on observe normalement aucune multiplication particulière des tornades au cours d’une année La Niña. 32 MUNICH RE Topics Geo 2011 Des milliers de tempêtes de grêle et de tempêtes orageuses Cette éruption a particulièrement touché le nord de l’Alabama, où 3 tornades de catégorie EF5 ont quasiment rayé de la carte les petites villes d’Hackleburg, de Shottsville et de Rainsville et coûté la vie à 120 personnes. La ville de Tuscaloosa ainsi que plusieurs banlieues de Birmingham, la plus grande ville de l’Alabama, ont été elles aussi dévastées par une tornade qui a été en contact avec la terre sur plus de 110 kilo- PORTRAITS DE CATASTROPHES Le 27 avril, certaines zones de Prattville, en Alabama, ont été réduites à néant par le « Super Outbreak ». mètres (70 miles) et atteint une largeur maximale de 2,4 km (1,5 mile). Plus de 60 personnes sont décédées au cours de cette tornade de catégorie EF4, laquelle, parmi tous les phénomènes provoqués par l’éruption, a causé les dommages assurés les plus élevés. En fin de compte, le « Super Outbreak » de 2011 a engendré les plus importants dommages assurés (en valeurs originales) ayant jamais été causés par un système orageux ; leur montant est estimé à 7,3 milliards de $US. Au cours des 3 premières semaines qui ont suivi le « Super Outbreak », la situation a été tout d’abord relativement calme jusqu’à la survenance, à la fin du mois de mai, du deuxième plus important sinistre causé par un orage de 2011. Une série de dépressions avaient produit plusieurs vagues de fortes tempêtes orageuses qui se sont propagées du Texas jusqu’aux États du centre atlantique. Cette éruption a déclenché au moins 180 tornades, dont 2 de catégorie EF5. Les tempêtes ont causé des dommages assurés à hauteur de 6,9 milliards de $US et ont coûté la vie à au moins 178 personnes. Dommages matériels assurés causés par de violents orages aux États-Unis en milliards de $US entre 1980 et 2011 Dommages causés par de violents orages (à la valeur de 2011) Moyenne mobile sur 5 ans 25 La charge financière engendrée par les violents orages aux États-Unis pour les assureurs a continuellement augmenté depuis 1980 pour atteindre un nouveau niveau record en 2011. 20 15 10 5 0 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 MUNICH RE Topics Geo 2011 33 PORTRAITS DE CATASTROPHES La tornade qui a ravagé Joplin, dans l’État du Missouri, a été, à elle seule, à l’origine d’une grande partie des dommages assurés et causé un grand nombre de décès. La tempête, qui s’est formée près de la frontière avec le Texas, s’est rapidement intensifiée tandis qu’elle se déplaçait vers l’est, au-dessus de la moitié sud densément peuplée de Joplin, et a atteint jusqu’à 1,6 km (1 mile) de largeur ainsi qu’une intensité EF5. Bien que le centre-ville de Joplin ait été épargné, on estime que 2 000 bâtiments ont été détruits par la tornade, soit environ 15 % des bâtiments de la ville. Les maisons et les commerces étaient en ruines. Le St. John’s Regional Medical Center, un important centre de soins médicaux pour la ville et le sud-ouest du Missouri, a également été fortement endommagé. Il a finalement été déclaré hors service, son fonctionnement n’étant plus sûr, et sa démolition est désormais prévue. La violente tempête Joplin, sur la trajectoire de laquelle se trouvait une grande ville, a provoqué des dommages dont le montant total est estimé à plus de 3 milliards de US$ et causé la mort de 158 personnes ; elle compte ainsi parmi les tornades les plus meurtrières et les plus coûteuses de l’histoire des États-Unis. Tendance à une augmentation des dommages Actuellement, le montant des dommages assurés causés par les phénomènes orageux ayant touché les États-Unis en 2011 est estimé à 25,9 milliards de $US. Cette somme représente plus du double du montant record atteint en 2010. Bien que les dommages survenus en 2011 aient un caractère exceptionnel, en raison de la violence des systèmes orageux et des dégâts matériels considérables subies par 2 grandes villes, ces éruptions soulignent de manière dramatique la poursuite de la tendance à l’augmentation des dommages assurés causés par des orages, que l’on observe depuis ces 30 dernières années. À l’heure actuelle (2007–2011), la moyenne annuelle sur 5 ans du montant des dommages causés par des orages est de 12 milliards de $US, un montant record qui correspond à une augmentation de 3 milliards de $US par rapport à la précédente période de 5 ans. Le montant des pertes annuelles moyennes actuelles dépasse ainsi de près de 6 milliards de US$ le montant qu’elles atteignaient il y a encore 10 ans et est environ 10 fois plus élevé que le montant moyen des pertes subies au cours des années 1980–1984. Les 9 dernières années ont connu les 6 années au cours desquelles les coûts ont été les plus élevés, avec des dommages assurés causés par des orages se montant, pour chacune d’entre elles, à plus de 8 milliards de $US. De la même manière, la fréquence des dommages causés par des orages et se chiffrant en milliards de dollars a augmenté : l’année 2011, tout comme l’année 2010, a connu de tels dommages par 3 fois. Depuis 1994, on dénombre en tout 24 phénomènes orageux ayant causé des dommages se chiffrant en milliards ; auparavant, seul un phénomène avait provoqué des dommages d’une telle ampleur. L’augmentation des dommages causés par des orages aux États-Unis est principalement due à des facteurs socio-économiques. Au cours des 50 dernières années, la population américaine s’est déplacée vers le sud des États-Unis, dans des régions où les violentes tempêtes orageuses sont plus fréquentes. Les villes se sont donc agrandies et les banlieues se sont étendues à la périphérie ; de plus en plus de régions concentrant de nombreuses valeurs patrimoniales sont ainsi exposées aux tempêtes. En outre, cette période est marquée par une augmentation considérable des valeurs ainsi que par un fort accroissement des valeurs mobilières locales et des biens mobiles, tels que, par exemple, les appareils électroniques qui sont extrêmement sensibles à la foudre, ce qui augmente le potentiel de dommages dus aux orages. Un dernier facteur non moins important est que les règles de construction dans de nombreux États exposés aux orages ne suffisent pas à garantir la résistance des bâtiments contre des vents forts (tornades ou autres phénomènes liés au vent) et contre la grêle. Certains signes tendent à prouver que les changements climatiques au cours des prochaines décennies joueront un rôle toujours plus important dans la survenance de dommages assurés causés par des orages. En effet, une atmosphère plus chaude, contenant plus d’humidité, est également plus susceptible de connaître des mouvements convectifs et donc des orages. Comme le montrent les études scientifiques, les changements climatiques pourraient accroître le Les 10 catastrophes naturelles les plus coûteuses pour le secteur de l’assurance aux États-Unis Rang Année Date Événement 1 2005 25–30 août Ouragan Katrina Dommages assurés en millions de $US (valeurs originales) 62 200 2 2008 12–14 sept. Ouragan Ike 18 500 3 1992 23–27 août Ouragan Andrew 17 000 4 1994 17 janv. Séisme de Northridge 15 300 5 2005 20–24 sept. Ouragan Rita 12 100 6 2004 12–21 sept. Ouragan Ivan 12 000 10 700 7 2005 24 oct. Ouragan Wilma 8 2004 13–14 août Ouragan Charley 7 600 9 2011 22–28 avril « Super Outbreak de 2011 » (violents orages, tornades) 7 300 10 2011 20–27 mai Intempéries, tornades 6 900 34 MUNICH RE Topics Geo 2011 PORTRAITS DE CATASTROPHES nombre de jours par an pendant lesquels les conditions atmosphériques favorisent la survenance de fortes tempêtes, dans tout l’est des États-Unis. De tels effets se produisent déjà en partie, comme le montre un certain nombre de signes, tels que l’augmentation de la fréquence des fortes chutes de grêle au cours des 35 dernières années ou bien également les conditions météorologiques favorisant fortement la survenance de violents orages que l’on observe de plus en plus souvent depuis les années 1970 à l’est des Rocheuses. Quelques mesures simples pour de grands effets Si l’on considère les risques du point de vue individuel, des techniques de construction adaptées constituent un facteur décisif pour la réduction des dommages causés par les orages. Les bâtiments devraient être construits de telle sorte que les murs aient une ligne de charge continue et des liaisons mur-toiture et toiture-fondations adéquates. Les portes extérieures devraient s’ouvrir vers l’extérieur, les fenêtres devraient être anti-chocs et les portes de garages renforcées. Toutes ces mesures peuvent permettre de réduire fortement le potentiel des dommages causés par le vent, en particulier en cas de fronts de rafales et de faibles tornades. Des mesures additionnelles, telles que les consolidations de toitures, peuvent également protéger un bâtiment contre les dégâts causés par le vent. Les dommages causés par la grêle, une forme beaucoup plus fréquente de dommages causés par les orages, peuvent être réduits relativement facilement par le recours à du matériel de construction adapté, tel que des toitures et des revêtements extérieurs anti-grêle. Une implémentation générale de ces mesures permettrait à l’avenir de réduire considérablement les risques de dégâts majeurs causés par des événements climatiques. Au niveau des portefeuilles, on peut limiter les dommages potentiels causés par de violents systèmes orageux en fixant un plafond pour les cumuls d’engagements à l’intérieur de petites zones et en assurant des types de bâtiments différents. La surface touchée par une tornade unique ou une chute de grêle est très petite en soi, de sorte que la limitation des engagements souscrits à l’intérieur d’une certaine zone résidentielle, commerciale ou industrielle permet d’éviter l’accumulation de dommages assez importants causés par un seul et même événement grave. Ce genre de stratégie géographique peut, si elle est implémentée de manière uniforme et appliquée à tous les portefeuilles, contribuer à réduire le cumul des dommages dus à des phénomènes climatiques de grande ampleur touchant des centaines de zones dispersées. De la même manière, la diversification des types de bâtiments ou le recours limité à certains types de bâtiments au sein d’une même zone géographique peut réduire les dommages, puisque certaines catégories de construction sont moins sensibles que d’autres aux dommages causés par le vent ou par la grêle. Conclusion Les montants des dommages causés par des orages n’ont jamais été aussi élevés qu’en 2011 ; au vu des précédents records atteints en 2008 et 2010, rien ne laissait prévoir de tels chiffres. Même en ne tenant pas compte de l’année 2011 en raison du caractère exceptionnel des dommages survenus, il ne semble pas que la tendance à l’augmentation des dommages causés par des orages faiblisse. Le facteur de loin le plus important est l’exposition de plus en plus forte aux phénomènes climatiques, mais les changements climatiques peuvent également jouer un rôle. Les dommages considérables survenus en 2011 soulignent l’importance de la gestion du risque aussi bien au niveau des phénomènes isolés qu’au niveau global. Les phénomènes orageux isolés présentent, en comparaison avec des ouragans ou des séismes isolés, un risque plus faible, la hauteur du montant des dommages assurés qu’ils provoquent n’étant pas comparable. En raison de la fréquence de leur survenance, le montant annuel total des dommages causés par les orages est toutefois souvent plus élevé que le montant annuel total des dommages causés par les ouragans ; ils jouent un rôle important dans l’évolution des dommages causés par les catastrophes naturelles aux États-Unis. En 2008 comme en 2009, le montant des dommages assurés causés par les orages a atteint 20 milliards de $US ; il excède ainsi celui des dommages causés par les ouragans (y compris Ike) au cours de la même période. Depuis 1980, 6 ouragans et un séisme ont provoqué à eux seuls des dommages assurés (en valeurs originales) plus importants que ceux causés par le « Super Outbreak » de 2011 et la tempête ayant touché Joplin. Au cours de la même période, le montant annuel des dommages causés par les ouragans a dépassé dans seulement 5 cas celui des dommages causés par les orages. Le coût des dommages causés par les orages est désormais comparable à celui des dommages causés au cours d’une saison des ouragans modérée ou violente. Ces constatations doivent être prises en compte par les assureurs dans le cadre de la gestion du risque. Notre expert : Mark Bove, météorologue et expert en modélisation des risques de catastrophes naturelles, essentiellement pour l’Amérique du Nord. Il exerce ses activités aux États-Unis pour Munich Re dans le domaine des risques de cumul. [email protected] MUNICH RE Topics Geo 2011 35 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE Protection du climat : décisions de nouveau reportées Cette année encore, le sommet international de Durban sur le climat a été marqué par des déclarations d’intention globales, les engagements fermes ayant été à nouveau reportés à plus tard. La clé d’une lutte efficiente contre le réchauffement climatique : un accord en petit comité des plus gros émetteurs. Peter Höppe Jamais les attentes d’un sommet sur le climat n’ont été aussi faibles que celles exprimées avant la « 17e Conférence des Parties » (COP17) à Durban. Les grandes déceptions du sommet du climat de Copenhague en 2009 et l’avancée relativement faible obtenue l’an dernier à Cancún se sont encore fait ressentir ici. De plus, d’autres problèmes tels que la crise de la dette souveraine en Europe et aux États-Unis et la menace d’une récession mondiale ont catalysé toute l’attention et ont ainsi relativisé la nécessité de trouver des solutions rapides face au changement climatique. Le point de départ des négociations était l’objectif, déjà adopté à Copenhague et réaffirmé à Cancún, d’une limitation du réchauffement de la planète à 2 °C. Les négociations portant sur l’adaptation aux impacts inévitables du changement climatique avaient pour objectif la mise en place d’un « Fonds vert pour le climat » afin de soutenir les pays en développement. D’ici à 2020, ce dernier doit être alimenté en grande partie par les pays industrialisés avec un apport annuel planifié de 100 milliards de $US. Mesures convenues pour les pays en développement Dès la fin de la première semaine des négociations, des décisions concrètes, passées inaperçues auprès du grand public, ont été prises au sujet du programme Le changement climatique n’entraîne pas seulement un surcroît d’inondations. Les périodes de sécheresse vont également s’allonger et causeront des problèmes aux usagers des voies navigables et aux producteurs d’énergie. MUNICH RE Topics Geo 2011 37 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE conclu à Cancún, « Pertes et dommages ». Ainsi, un projet concret devra être élaboré jusqu’au sommet du climat qui se tiendra en décembre 2012 au Qatar (COP18) sur la stratégie à suivre face aux dommages engendrés par le changement climatique dans les pays en développement. L’indice de risque climatique, présenté par Germanwatch à Durban et dont le calcul se base sur des données du NatCatSERVICE de Munich Re montre que les 10 pays les plus exposés au changement climatique sont les pays en développement, avec à leur tête le Pakistan en 2010. À Durban, un programme de travail a défini les nouvelles procédures à suivre, en 2012, concernant le programme « Pertes et dommages ». La réflexion sur la mise en place d’un mécanisme international, comme la proposition par la Munich Climate Insurance Initiative (MCII) d’un pool global destiné aux dommages causés par des phénomènes météorologiques extrêmes, n’a pas fait l’unanimité. Les États-Unis s’opposent particulièrement à ce genre d’initiatives qu’ils ne peuvent pas directement influencer eux-mêmes. Trois domaines thématiques doivent être traités en 2012 : Une « feuille de route technique » est censée être rédigée afin d’évaluer le degré de risque des pays en développement face aux impacts attendus du changement climatique. Les principales parties prenantes devraient toutes y être impliquées. La feuille de route doit être présentée aux experts et déboucher sur un projet de décision pour la COP18. Quatre rencontres d’experts (trois régionales et une pour les « petits États insulaires en développement ») portant sur les outils possibles de gestion du risque, dont aussi des concepts d’assurance, sont prévues. Lors de ces réunions, la discussion ne devra pas seulement porter sur des solutions possibles de prévention et de garantie du risque, mais aussi sur la quantification des ressources nécessaires correspondantes. Les délégations de la négociation et les organisations compétentes ont jusqu’au 17 septembre 2012 pour soumettre des propositions sur le rôle que doit jouer la Convention-cadre des Nations unies sur les Changements climatiques (CCNUCC) afin d’aborder la gestion du risque de dommages liés au changement climatique. Ces propositions doivent elles-aussi être prises en compte dans le projet de décision destiné à la COP18. À Durban, une question est restée en suspens : celle de l’apport et du contrôle d’ici à 2020 des fonds nécessaires au « Fonds vert pour le climat » (FVC), à partir duquel les dites mesures d’adaptation doivent être financées. Certains pays, dont les États-Unis, sont opposés à une administration centrale du fonds. La majorité des délégations y est cependant favorable. Le ministre de l’environnement allemand Norbert Röttgen a proposé que l’Allemagne soit le site de cette administration centrale. La Suisse et la Corée du Sud ont également fait des offres similaires. Une décision est attendue d’ici à la fin de l’année prochaine. D’ici là, un secrétariat provisoire du FVC doit être aménagé à Bonn. 38 MUNICH RE Topics Geo 2011 Ce baobab a été le symbole de la 17e Conférence internationale sur le climat à Durban. Dans l’esprit de la politique de protection du climat, l’électricité des illuminations a été produite par des personnes invitées à pédaler. On ignore encore de quelle manière la structure du fonds doit être financée à partir de 2013. Pour la période 2010–2012, les pays industrialisés avaient mobilisé de façon décentralisée environ 10 milliards de $US par an. À ce jour, il n’existe toujours pas d’engagements concrets pour la période post 2013. À Durban, la question d’une taxation éventuelle du trafic maritime en vue d’alimenter le FVC a également été débattue, sachant qu’il contribue aujourd’hui à environ 3 % des émissions mondiales de CO2. Un prix de 25 $US par tonne de CO2 pourrait rapporter une recette de 25 milliards de $US et alimenter ainsi en partie le FVC. Toutefois, étant donné que certaines délégations restent fondamentalement opposées aux taxes sur les émissions du trafic maritime, aucun accord n’a pu être conclu à cet effet. Peu d’engagement en faveur de réductions d’émissions rapides, contraignantes Les négociations visant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre n’ont finalement pas été moins informelles que les mesures d’adaptation au changement climatique. Ici, le paradoxe perdure encore, entre d’une part, un réel consensus sur la volonté de limiter le réchauffement de la planète à 2 °C (certaines délégations ont même exigé de réduire cet objectif à 1,5 °C), et CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE d’autre part, le manque constant de volonté du plus grand nombre pour prendre rapidement des engagements de réduction juridiquement contraignants, en vue d’atteindre cet objectif. Comme lors des sommets climatiques précédents, on s’est encore tenu à des déclarations d’intention et les mesures concrètes ont été reportées à un avenir plus lointain. Certes, il a été convenu qu’un accord international englobant tous les grands pays émetteurs serait négocié d’ici à 2015, mais son entrée en vigueur ne se fera qu’en 2020. Les engagements de plein gré et sans obligation de réduction des émissions de gaz à effet de serre, pris à Copenhague, sont bien insuffisants pour atteindre le seuil des 2 degrés. Le pacte sur l’élaboration d’un accord juridiquement contraignant dès 2020 n’aurait pas été possible sans la conduite ambitieuse des négociations menée par la coalition de la délégation de l’UE avec les petits États insulaires et les pays en développement, et sans également l’ouverture de la Chine en faveur d’une solution contraignante. C’est au moment où les négociations se sont enlisées que la Chine a donné, pour la première fois, un accord de principe sur les objectifs de réduction dès 2020, tout en ajoutant certaines conditions, par exemple une prolongation du protocole de Kyoto et la prise en compte des émissions historiques de gaz à effet de serre. L’attitude rigide des États-Unis face à des engagements de réduction contraignants et le refus corrélatif de l’Inde de faire des concessions ont extrêmement compliqué les négociations. La volonté de négocier un pacte international juridiquement contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2015 est un résultat qui va bien au delà de ce qui était escompté de la conférence de Durban au préalable ; toutefois, il ne s’agit pour l’heure que d’une déclaration d’intention. Accord en petit comité – la condition préalable à une protection efficace du climat À vrai dire, il est fort peu probable que les grands pays émetteurs soient réellement prêts à des réductions effectives. Il a certes été convenu de prolonger le protocole de Kyoto après 2012, mais les émissions de CO 2 ainsi couvertes ne représentent que 15 % des émissions mondiales. De plus, le Canada a annoncé son retrait du protocole de Kyoto en vigueur quelques jours seulement après le sommet du climat à Durban. Le Canada est loin d’avoir atteint ses objectifs et se soustrait ainsi au versement de lourdes indemnités compensatoires. De même, le Japon et la Russie – ils sont au 4e et 5e rang des pays les plus fortement émetteurs de CO2 – avaient déclaré déjà avant Durban, au cours d’une deuxième phase du protocole de Kyoto, ne plus vouloir en faire partie. international et la prise en compte des besoins des pays principalement affectés par les impacts du changement climatique. Toutefois, pour parvenir à cet objectif, il serait plus approprié d’organiser tout d’abord des rencontres en plus petit comité des principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre. La clé d’une protection du climat efficace réside dans une entente des 6 plus grands émetteurs : la Chine, les États-Unis, l’UE, l’Inde, la Russie et le Japon, qui produisent 75 % des émissions mondiales de CO2. Des propositions concrètes pourraient être élaborées entre eux et soumises ensuite à discussion lors des sommets climatiques. Les résultats actuels des négociations ne répondent pas au risque humain d’un changement climatique, puisque la protection du climat n’autorise aucun report de décisions. Les défenseurs d’un objectif de 2 degrés doivent en conséquence être prêts à adopter des objectifs concrets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Mais cette suite logique se fait malheureusement toujours attendre. Une petite lueur d’espoir en marge du sommet Déjà avant Durban, Munich Re a demandé de poursuivre, parallèlement aux négociations internationales, un plan B de protection du climat. Ce dernier prévoit de développer les énergies renouvelables respectueuses des enjeux climatiques avec pour objectif de les rendre également compétitives sur le plan économique à moyen terme vis-à-vis des combustibles fossiles. En l’occurrence, certaines régions pourraient jouer un rôle pionnier. Une avancée très positive a été réalisée à cet effet en marge du sommet. Les gouvernements d’Afrique du Sud, d’Allemagne, du Royaume-Uni, de Norvège, de Suisse, ainsi que la Banque d’investissement européenne ont signé un accord de coopération dans le cadre de l’« Initiative de l’énergie renouvelable sud-africaine » (SARi). L’expansion massive des énergies renouvelables doit débuter en l’espace de quelques années en Afrique du Sud. NOTRE EXPERT : Prof. Dr. Dr. Peter Höppe, chef du département Recherche en géorisques/Centre Entreprise Sciences du Climat. [email protected] Les sommets climatiques internationaux organisés sous la coupe de la CCNUCC sont devenus de plus en plus complexes au fil du temps, ce qui rend les négociations difficiles. Il faut reconnaître que les sommets sur le climat constituent un forum de premier choix pour la conclusion d’accords contraignants de droit MUNICH RE Topics Geo 2011 39 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE Chiffres, faits et contexte Les effets de La Niña sur les conditions climatiques, de janvier à mai puis d’août à décembre, ont été la cause essentielle des nombreux dommages engendrés par des phénomènes météorologiques extrêmes au cours de l’année 2011. Eberhard Faust Selon les indications provisoires de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), l’année 2011 devrait être la dixième année la plus chaude depuis 1850, date des premiers relevés. L’écart de température est de +0,41 °C (±0,11 °C) par rapport à la moyenne de 14 °C de la période de référence allant de 1961 à 1990. L’année écoulée a avant tout été marquée par un épisode La Niña très intense, qui s’était développé à partir du milieu de l’année 2010, pour atteindre un maximum lors du passage à 2011, avant de se dissiper au cours d’une brève phase neutre. Puis, en août 2011 et jusqu’à la fin de l’année, La Niña a de nouveau affecté, faiblement, les conditions climatiques. Les effets de La Niña peuvent être observés sur la carte des écarts de température du « National Climatic Data Center » des États-Unis, qui montre un refroidissement typique dans une vaste région dans la moitié est du bassin Pacifique. C’est ce refroidissement qui est principalement à l’origine de la baisse de la température annuelle moyenne par rapport à 2010. Toutefois, le relevé chronologique à l’échelle mondiale des températures moyennes annuelles sur une longue durée révèle certes que les années La Niña ont été d’environ 0,1 à 0,2 °C plus froides que les années qui les ont immédiatement suivies ou précédées, mais qu’en dehors de ces années La Niña, on peut observer une tendance générale à la hausse des températures. Comme l’a également constaté l’OMM, l’année 2011 a jusqu’à présent été l’année La Niña la plus chaude. Le bilan de l’année 2011 révèle des écarts thermiques prononcés avant tout en Sibérie et dans les hautes latitudes de l’Arctique, mais également au sud et à l’est de l’Amérique du Nord, en Europe du Nord ainsi qu’à l’ouest et à l’est de l’Afrique et du sud-ouest asiatique. Des changements importants dans l’Arctique Du fait du réchauffement de l’Arctique, la banquise, dont l’étendue est toujours minimale en septembre, avait déjà en septembre 2010 une étendue correspondant à la troisième valeur la plus faible enregistrée depuis le début des mesures par satellites en 1979. Le 9 septembre 2011, la surface de la banquise de l’Arctique avait diminué et atteint sa deuxième valeur la plus faible jamais mesurée (4,33 millions de km2). Ce rétrécissement est de –12 % par décennie par rapport à la valeur moyenne pour la période 1970–2000. Au cours des 5 dernières années, l’étendue de la banquise a atteint ses 5 plus faibles valeurs parmi l’ensemble des données relevées au mois de septembre de chaque année. Un calcul basé sur un modèle du « Polar Science Center » de l’Université de Washington a même montré que le volume de la banquise arctique, dont non seulement l’étendue mais également l’épaisseur diminue, avait atteint, au mois de septembre 2011, un minimum absolu depuis le début des calculs en 1979. Temperature Anomalies Jan-Dec 2011 Temperature Anomalies Jan-Dec 2011 (with respect to a 1971-2000 base period) National Climatic Center/NESDIS/NOAA (with respect tomoyenne a Data 1971-2000 period) Écart régional entre la température annuellebase de 2011 et la moyenne pour la période 1971–2000National Climatic Data Center/NESDIS/NOAA Dans la plupart des régions, les températures en 2011 étaient plus élevées que les températures moyennes relevées entre 1971 et 2000. C’est avant tout dans l’est du Pacifique que les températures étaient les plus faibles. Réchauffement Refroidissement par rapport à la moyenne sur une longue durée (1971–2000). Plus les points sont gros, plus les écarts de température par rapport à la moyenne étaient élevés. Source : National Climatic Data Center/NESDIS/NOAA –5 °C -5C 40 -5C –4 °C -4C –3 °C -3C –2 °C -2C –1 °C -1C 0 °C 0C 1 °C 1C Degrees Celsiu s MUNICH RE Topics Geo 2011-1C -4C -3C -2C 0C 1C Degrees Celsiu s 2 °C 2C 2C 3 °C 3C 4 °C 4C 3C 4C 5 °C 5C C 5C C CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE Série chronologique de 1950 à 2011 des écarts entre les températures annuelles moyennes globales et la moyenne pour la période 1961–1990 °C 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0,0 -0,1 -0,2 -0,3 -0,4 Les années La Niña dans la série chronologique du Met Office/University of East Anglia montrent, comme la série complète, une élévation avec le temps des températures annuelles moyennes globales. D’après les estimations provisoires, de toutes les années La Niña , l’année 2011 a été, jusqu’à présent, la plus chaude. Une année est qualifiée d’année La Niña dès lors que l’indice ONI, Oceanic Niño Index, (NOAA/CPC) calculé pour l’année n’est pas supérieur à –0,5. 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0,0 –0,1 –0,2 –0,3 –0,4 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 Années neutres et années El Niño Années La Niña Estimations provisoire se basant sur la période janvier–octobre 2011 Source : Met Office/Climate Research Unit University of East Anglia ; NOAA/ Climate Prediction Center Écarts de volume de la banquise arctique pour la période 1979–2011 par rapport à la moyenne de la période 1979–2010 km3 En septembre 2011, le volume de la banquise arctique, modelé sur la base de données d’observation du Polar Science Center de l’Université de Washington, avait diminué de 380 km3, battant ainsi le précédent record de 2010 ; cet écart reste toutefois encore dans le domaine de l’incertitude du modèle. +5 000 0 Source : Munich Re d’après les données du Polar Science Center, Applied Physics Laboratory, Université de Washington –5 000 380 km3 –10 000 –15 000 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 MUNICH RE Topics Geo 2011 41 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE Conséquence des profonds bouleversements affectant l’Arctique, les passages du Nord-Est et du Nord-Ouest ont été ouverts pendant plusieurs semaines à la circulation maritime pendant l’été 2011, comme cela avait déjà été le cas lors des années précédentes. Actuellement, les services et l’infrastructure sont en train d’être développés au niveau du passage situé au nord des côtes canadiennes, en particulier pour la circulation des navires- citernes ; au niveau de la baie Resolute, le Canada envisage la construction d’un port en eaux profondes. En passant par le passage du Nord-Ouest, la route entre Rotterdam et Tokyo serait plus courte de plus 5 000 km qu’en empruntant le canal de Suez, et les zones dangereuses où sévit la piraterie au niveau de la Corne de l’Afrique et en Indonésie pourraient être évitées. La Niña a sévi pendant des mois Les effets de La Niña sur les conditions climatiques, de janvier à mai puis d’août à décembre, ont été la cause principale des nombreux dommages engendrés par des phénomènes météorologiques extrêmes au cours de l’année 2011. Le phénomène La Niña entraîne un refroidissement considérable du Pacifique estéquatorial et centre-équatorial ainsi que de grandes parties de l’est du bassin Pacifique, tandis que les alizés venant de l’est se renforcent et entraînent les eaux chaudes superficielles des tropiques vers le bord ouest du bassin principalement, en face des côtes du sud-ouest asiatique et de l’Australie. Ces mouvements océaniques et atmosphériques modifient la répartition de la pression et des précipitations non seulement dans le bassin Pacifique et aux bords de ce bassin, mais également dans de nombreuses autres régions du globe, en raison des effets à distance sur le système climatique. Le premier épisode La Niña de l’année 2011, qui s’est produit à partir du milieu de l’année 2010 jusqu’en mai 2011, a été, selon l’indice d’oscillation australe (SOI) qui mesure la différence de pression atmosphérique entre Darwin et Tahiti, l’un des épisodes les plus intenses jamais enregistrés. La Niña I : sécheresse et chaleur Une conséquence dramatique de La Niña a été la forte sécheresse qui s’est installée dès le mois d’octobre 2010 au niveau de la Corne de l’Afrique, affectant de vastes régions du Kenya, de la Somalie et de l’Éthiopie, et qui a duré jusqu’en septembre 2011. Une grave famine s’est alors développée en Somalie et au Kenya ainsi que d’importants flux migratoires. En Somalie, 80 % du cheptel des nomades a succombé et, en tout, 13 millions de personnes ont nécessité une aide humanitaire. Le développement de sécheresses extrêmes et également, en été, de sécheresses persistantes dans le sud des États-Unis et au nord du Mexique est, lui aussi, étroitement lié à l’intense épisode La Niña de 2010– 2011 : au Texas, la quantité des précipitations entre janvier et octobre, a été, avec 273 l/m2, bien en-dessous de la moitié de la moyenne des années précédentes, et la température moyenne relevée entre juin et août était de 3 degrés supérieure à la moyenne sur une longue durée. De vastes incendies de forêts, des feux de brousse et des tempêtes de poussière comptent également parmi les conséquences du phénomène La Niña. Au mois de septembre, l’incendie qui a ravagé le Bastrop County au Texas a détruit près de 1 600 maisons. Les pertes agricoles directement causées par la sécheresse aux cultures végétales, au bétail et à l’exploitation forestière se sont élevées, pour le sud des États-Unis, à près de 8 milliards de $US, dont 1 milliard de $US était assuré. En juillet, une vague de chaleur s’est propagée du Texas et de l’Oklahoma vers le nord des États-Unis en passant par les États du centre du pays et a également Régions touchées par la sécheresse aux États-Unis Les États américains du NouveauMexique, du Texas, de l’Oklahoma, de la Louisiane et de la Géorgie ainsi que le nord du Mexique ont particulièrement été touchés par l’absence de précipitations. La carte montre la situation en juillet 2011. Aridité exceptionnelle Sécheresse modérée Forte sécheresse Sécheresse extrême Sécheresse exceptionnelle Source : NOAA 42 MUNICH RE Topics Geo 2011 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE atteint de vastes régions de la moitié est. Les stations météorologiques ont enregistré, à 78 reprises, de nouveaux records en matière de maximums journaliers. La Niña II : fortes précipitations et inondations Entre décembre 2010 et janvier 2011, les manifestations typiques de La Niña ont été à l’origine de graves inondations ayant causé des dommages élevés au nord et à l’est de l’Australie. Dans le Sud-Est asiatique également, une mousson active, probablement influencée par La Niña, a entraîné des précipitations extrêmes à grande échelle, notamment dans les bassins versants du Mékong et du Chao Phraya, ce qui a conduit à des inondations importantes ayant causé des dommages d’un montant très élevé (voir à ce sujet l’article de Wolfgang Kron, à partir de la page 26). Les fortes précipitations ayant eu lieu entre janvier et mars au sud de l’Afrique, les diverses inondations survenues au nord de l’Afrique du Sud ainsi qu’en Namibie, au Botswana, au Zimbabwe et en Angola ont également été des effets à distance de l’épisode La Niña. On peut également mentionner les fortes précipitations accompagnées de coulées de boue, de glissements de terrains et d’inondations qui ont ravagé la Colombie et la Bolivie au cours des 3 premiers mois de l’année. De tels événements sont de nouveau survenus en Colombie à partir du mois de novembre, pendant le second épisode La Niña de l’année. Au total, des centaines de personnes ont perdu la vie dans cette région et les maisons, les ponts et les routes ont été détruits. La Niña III : violentes tempêtes et cyclones tropicaux Les orages extrêmes, accompagnés de nombreuses tornades, de fortes pluies, de grêle et de rafales de vent, survenus aux États-Unis en avril et en mai, comptent parmi les orages ayant fait le plus de morts et ayant causé les plus importants dommages annuels depuis le début de l’observation de tels phénomènes. Ils s’expliquent avant tout par un front polaire rendu plus actif pendant les années La Niña : des perturbations peuvent se déplacer du nord-ouest vers l’Amérique du Nord et de violents orages peuvent se déclencher dans les régions plus au sud (voir l’article de Mark Bove, à partir de la page 32). On observe également que, sur le long terme, ce ne sont pas seulement les dommages normalisés causés par des orages, pour lesquels l’influence de l’exposition grandissante au fil du temps a déjà été mesurée, qui augmentent ; les mesures météorologiques en matière de potentiels orageux révèlent également une tendance similaire à la hausse. Bien que ces événements aient été déclenchés par des changements climatiques à long terme, les phénomènes extrêmes observés au cours de l’année 2011 ont avant tout été causés par les variations climatiques saisonnières naturelles liées à La Niña. Les météorologues s’attendaient à une saison des ouragans active dans l’Atlantique en raison du passage à un épisode La Niña moins intense depuis le mois d’août et de la chaleur des eaux de l’Atlantique tropical. Conformément à ces prévisions, cette saison cyclonique avec 19 tempêtes nommées dans le bassin Atlantique a été la troisième la plus forte jamais enregistrée depuis le début des observations climatiques ; au cours de la phase chaude de 1995 à 2010, une moyenne de 15 tempêtes avait été relevée. Il convient de remarquer que relativement peu d’entre elles ont atteint la force d’un ouragan (7 sur 19 comparé à une moyenne de 8 sur 15 au cours d’une phase chaude) et se sont transformées en violents ouragans de catégorie 3 et plus (3 sur 19 comparé à une moyenne de 4 sur 15 au cours d’une phase chaude). Precipitation Anomalies Jan-Dec 2010 Écart régional entre les précipitations annuelles de 2011 et la moyenne pour la (with respect to a 1961-1990 base period) période 1961–1990 en pourcentage National Climatic Data Center/NESDIS/NOAA La moyenne annuelle révèle une sécheresse exceptionnelle non seulement au sud des États-Unis mais également dans de grandes parties de l’Europe et de l’Asie. Dans plusieurs régions, des phases très sèches ont été compensées par des phases très humides, par exemple dans la région de la Corne de l’Afrique. Plus sec Plus humide que la moyenne pour la période 1961–1990 Source : National Climatic Data Center/NESDIS/NOAA –100 % –80 % –60 % –40 % –20 % -250mm -200mm -150mm -100mm -50mm 0 % 0mm 20 % 50mm 40 % 100mm 60 % 150mm 80 % 200mm 100 % 250mm Millimeters MUNICH RE Topics Geo 2011 43 CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE En 2011, comme au cours des 5 dernières années, aucun ouragan qualifié d’ouragan « majeur » (caté gorie 3 et plus) n’a atteint le territoire des États-Unis, alors qu’on en dénombre 7 en tout entre 2004 et 2005. Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’intensité relativement faible des tempêtes qui se sont développées dans ce bassin : −−en dépit des températures anormalement élevées des eaux de surface de la mer, en particulier dans la mer des Caraïbes, les parties orientale et centrale du corridor tropical étaient relativement froides par rapport à 2010. Les alizés, particulièrement prononcés, ont conduit à un mélange avec des couches d’eau plus profondes et, de cette manière, à un refroidissement dans la principale zone tropicale de formation des tempêtes jusqu’au moment le plus fort de la saison ; −−en dépit de la faiblesse des manifestations de La Niña, la différence entre le vent près du sol et le vent à 6 km de hauteur dans un corridor situé entre 20° et 30° de latitude nord au-dessus de l’Atlantique et du Golfe du Mexique n’a, en moyenne, pas diminué entre août et octobre, ce qui signifie que le cisaillement du vent est resté élevé. La plupart des tempêtes se sont déplacées dans ce corridor, où le cisaillement élevé les a empêchées de se renforcer. Dans la mer des Caraïbes, le cisaillement vertical du vent était certes plus faible, mais seules quelques tempêtes se sont formées dans cette zone ; Aux États-Unis, les pompiers ont lutté pendant des semaines contre les flammes. 44 MUNICH RE Topics Geo 2011 −−pendant longtemps, un creux en altitude était situé au-dessus de la côte est des États-Unis, ce qui signifie que le courant atmosphérique allait du territoire américain en direction du nord-est et redirigeait la plupart des cyclones, au-dessus de l’Atlantique, vers le nord puis le nord-est, avant qu’ils ne touchent la terre ferme. Le creux en altitude a également empêché les tempêtes de se déplacer vers l’ouest en direction de la mer des Caraïbes, où elles auraient pu se renforcer à la faveur des conditions climatiques de cette zone. Ce creux avait déjà protégé les côtes américaines au cours des 6 dernières années contre de violents ouragans en les empêchant d’atteindre la terre ferme. Il en avait été autrement en 2004 et en 2005. En 2011, les tempêtes ont frappé 3 régions des ÉtatsUnis: l’ouragan Irene a sévi en Caroline du Nord et dans le New Jersey le 27 août après avoir balayé les Caraïbes, et la tempête tropicale Lee a touché la Louisiane le 4 septembre. L’ouragan Irene, qui s’est déplacé le long de la côte est des États-Unis et au-dessus de la région de New-York, a avant tout été un signal d’alarme en mettant en évidence l’énorme potentiel de dommages de cette région si elle venait à être dévastée par un ouragan. Il s’était heureusement affaibli en touchant les côtes du New Jersey, se transformant en une tempête tropicale de catégorie 1. Les dommages subis dans cette région ont été essentiellement causés par de fortes précipitations et les crues-éclair qu’elles ont entraînées. Globalement, Irene a provoqué des dommages assurés d’un montant de 5,6 milliards de $US ; le préjudice total s’est élevé à 7,4 milliards de $US. CLIMAT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE La saison des typhons dans le Pacifique nord-ouest, avec 20 tempêtes nommées, parmi lesquelles 10 se sont transformées en typhons et 7 en typhons intenses (catégorie 3 et plus), a été relativement modérée ; on dénombre en moyenne 16 typhons et 9 typhons intenses entre 1965 et 2010. La faible intensité de cette saison ainsi que le fait que la plupart des tempêtes se sont déclenchées relativement loin à l’ouest du bassin sont des effets typiques d’un épisode La Niña. Bien que cette saison des typhons ait été relativement calme, il ne faut pas oublier que Washi/Sendong, la dernière tempête tropicale de 2011, a fait près de 1 300 morts aux Philippines. Crues éclair, inondations, glissements de terrain En janvier, environ 900 personnes ont disparu, dans le sud-est du Brésil, lors de crues éclair et de glissements de terrains déclenchés par de très fortes précipitations. Il s’agit de la catastrophe naturelle ayant fait le plus de morts dans l’histoire du Brésil. En avril, d’autres crues éclair et glissements de terrain se sont produits au sud du Brésil. En juin, de fortes précipitations ainsi que des inondations dans le sud et dans le centre de la Chine ont provoqué de graves inondations et glissements de terrain. 1,6 million de personnes ont dû être évacuées. Quant au Pakistan, après des crues dévastatrices en 2010, il a de nouveau été touché par de graves inondations qui sont survenues dans le sud du pays en août et en septembre 2011. La région de la Corne de l’Afrique, frappée par la sécheresse jusqu’en septembre, a subi, à partir d’octobre, de fortes pluies qui ont continué à ravager les cultures végétales ; le Kenya a été particulièrement touché. Notre expert : Dr. Eberhard Faust, expert leader Risques naturels au sein du département Recherche en géorisques/ Centre Entreprise Sciences du climat. Il travaille notamment sur les risques découlant des variations climatiques naturelles et du changement de climat. [email protected] Conclusion Le phénomène La Niña qui a marqué l’année 2011 a été à l’origine de nombreuses catastrophes météorologiques. Les répercussions sur les circulations atmosphériques et sur la répartition des précipitations, qui débutent dans la zone pacifique équatoriale, modifient les probabilités concernant la survenance de phénomènes météorologiques extrêmes dans de nombreuses régions du monde. On peut citer, à titre d’exemple, les inondations qui se sont produites au nord et à l’est de l’Australie, en particulier dans la région de Brisbane, la forte saison orageuse aux États-Unis ou encore l’intensification de la mousson dans le Sud-Est asiatique ; ces 3 phénomènes ont causé d’énormes dommages. Un tel bilan annuel ne peut qu’inciter à continuer de réaliser, sur les variations climatiques naturelles, tels que les phénomènes El Niño ou La Niña, et sur les modifications des risques qu’elles entraînent, des prévisions et des analyses basées sur des données scientifiques, et encourager les assureurs à intégrer des mesures adéquates dans leur gestion des risques. Il apparaît, dans certains cas, que les répercussions de La Niña se sont modifiées en raison des effets à long terme des changements climatiques, lesquels se traduisent déjà, au cours des dernières décennies, par un réchauffement de la surface de la mer. Par exemple, la température exceptionnellement élevée de la mer au niveau de la côte est australienne, qui a entraîné une augmentation des taux d’évaporation, a joué un rôle important dans les inondations survenues dans le nord-est de l’Australie. Une atmosphère ayant subi un réchauffement peut absorber plus d’humidité et générer des phénomènes de précipitations plus violents. Alors qu’une seule année où l’épisode La Niña est particulièrement marqué entraîne toujours une baisse relative dans la série chronologique des températures moyennes globales, on remarque tout de même clairement que les années La Niña deviennent elles-mêmes de plus en plus chaudes. La poursuite du réchauffement planétaire ne fait aucun doute. L’ouragan Irene, sur la trajectoire duquel se trouvaient la région densément peuplée située entre Boston et Washington ainsi que New-York, a de nouveau permis une prise de conscience de l’énorme potentiel de dégâts dans cette zone si elle venait à être touchée par un violent ouragan. Les compagnies d’assurances et les autorités locales seraient bien avisées de tenir compte de ce potentiel dans leur gestion des risques et de retenir, parmi les scénarios possibles, l’hypothèse – en aucun cas invraisemblable – d’une énorme catastrophe liée à un ouragan dans le nord-est des États-Unis. MUNICH RE Topics Geo 2011 45 NatCatSERVICE et gestion des risques NatCatSERVICE : la base de données la plus complète sur les catastrophes naturelles La hausse des concentrations de valeurs, la naissance de nouvelles régions à forte croissance, la complexité toujours grandissante des risques et bien sûr aussi les effets du changement climatique font de l’analyse des périls naturels une composante essentielle de la gestion des risques. Fort d’une grande expérience accumulée au fil de nombreuses décennies dans l’analyse et l’évaluation des phénomènes naturels, le NatCatSERVICE de Munich Re est l’une des sources d’informations sur les catastrophes naturelles les plus reconnues au monde. Depuis 1974 le département Recherche en géorisques de Munich Re documente et analyse les données relatives aux événements et aux sinistres survenus partout dans le monde. À partir de ces archives uniques sur les risques naturels a été créée la base de données la plus vaste du monde sur les sinistres liés aux catastrophes naturelles. Elle remonte jusqu’à l’éruption du Vésuve en l’an 79 apr. J.-C. et s’enrichit chaque année d’environ 1 000 événements naturels. Cette base de données constitue le fondement d’un vaste éventail d’informations, d’outils et de services dans le domaine de la gestion et de la recherche en matière de risques. Créé à l’origine pour le secteur de l’assurance, le NatCatSERVICE est aujourd’hui utilisé par des organismes scientifiques, des O.N.G. et les médias ; il est également consulté dans le cadre de certains processus de décision politiques. Les données, analyses, statistiques et graphiques actuels sont téléchargeables gratuitement à partir de la rubrique « Touch Natural Hazards » sur notre site www.munichre.com/touch Le 23 octobre 2011, un séisme de magnitude Mw7,2 a frappé l’est de la Turquie. Plus de 600 personnes ont trouvé la mort dans la province de Van. MUNICH RE Topics Geo 2011 47 NatCatSERVICE et gestion des risques Photos de l’année 10–14 janvier Inondations : Australie Préjudice total : 2 800 millions de $US Dommages assurés : 1 875 millions de $US 22 morts 12–16 janvier Crues torrentielles, glissements de terrain : Brésil Préjudice total : 460 millions de $US Dommages assurés : 50 millions de $US 900 morts 31 janvier–6 février Tempêtes d’hiver : États-Unis Préjudice total : 1 900 millions de $US Dommages assurés : 1 425 millions de $US 39 morts 2–7 février Cyclone Yasi : Australie Préjudice total : 2 500 millions de $US Dommages assurés : 1 300 millions de $US 1 mort 22 février Tremblement de terre : Nouvelle-Zélande Préjudice total : 16 000 millions de $US Dommages assurés : 13 000 millions de $US 181 morts 11 mars Tremblement de terre, tsunami : Japon Préjudice total : 210 000 millions de $US Dommages assurés : 35 000–40 000 millions de $US 15 840 morts Avril–mai Intempéries, tornades : États-Unis Préjudice total : 39 000 millions de $US Dommages assurés : 20 500 millions de $US 585 morts 18 avril–23 mai Inondation : États-Unis Préjudice total : 4 600 millions de $US Dommages assurés : 500 millions de $US 9 morts Avril–mai Inondations : Colombie 90 morts 48 MUNICH RE Topics Geo 2011 NatCatSERVICE et gestion des risques 11 mai Tremblement de terre : Espagne Préjudice total : 200 millions de $US Dommages assurés : 100 millions de $US 10 morts Mai–juillet Feux de forêt : Canada Préjudice total : 1 500 millions de $US Dommages assurés : 720 millions de $US 1 mort Juin–juillet Inondations : Chine Préjudice total : 2 000 millions de $US 355 morts Octobre 2010–septembre 2011 Sécheresse : Afrique orientale Plus de 50 000 morts 22 août–2 septembre Ouragan Irene : Caraïbes, États-Unis Préjudice total : 7 400 millions de $US Dommages assurés : 5 600 millions de $US 55 morts Août–novembre Inondations : Thaïlande Préjudice total : 40 000 millions de $US Dommages assurés : 10 000 millions de $US 813 morts 23 octobre Tremblement de terre : Turquie Préjudice total : 550 millions de $US Dommages assurés : 40 millions de $US 604 morts 4–9 novembre Crues éclair : Italie, France, Espagne Préjudice total : 2 100 millions de $US Dommages assurés : 1 100 millions de $US 14 morts 16–18 décembre Tempête tropicale Washi : Philippines Préjudice total : 40 millions de $US 1 268 morts MUNICH RE Topics Geo 2011 49 NatCatSERVICE et gestion des risques L’année en chiffres Petra Löw, Angelika Wirtz L’année 2011 a été, jusqu’à présent, l’année des catastrophes naturelles la plus coûteuse pour les économies nationales. Avec un préjudice se chiffrant à 380 milliards de $US, elle a surpassé de loin l’année record de 2005. Les dommages assurés ont atteint un montant total de 105 milliards de $US, également un record. Le département de recherche en géorisques de Munich Re a dénombré près de 820 événements ayant entraîné des dommages, un nombre qui correspond à la moyenne des 10 dernières années. En 2005, ce sont essentiellement les ouragans dans l’Atlantique Nord qui avaient contribué à l’énorme charge des sinistres, alors qu’au cours de l’année précédente, les graves séismes survenus au Japon et en Nouvelle-Zélande ont causé, à eux seuls, des dommages d’un montant total de 228 milliards de $US et des dommages assurés se chiffrant à près de 50 milliards de $US. Presque 90 % des événements survenus en 2011 étaient de nature météorologique. Les préjudices économiques, de même que les dommages assurés causés par les catastrophes météorologiques, ont atteint le deuxième montant le plus élevé depuis 1980 (après correction des variations due à l’inflation). L’année 2011 a donc également été une année extrême en termes de catastrophes météorologiques. Nombre d’événements La banque de données NatCatSERVICE de Munich Re recense toutes les catastrophes naturelles ayant causé des dommages aux biens ou aux personnes. Selon leur impact sur le plan monétaire ou humain, les événements sont rangés en 6 classes – de l’événement dommageable mineur à la grande catastrophe naturelle. L’année dernière, les 5 événements suivants se sont classés dans la catégorie 6 (grande catastrophe naturelle ayant fait des milliers de morts et/ou des centaines de milliers de sans-abri et/ou ayant occasionné un préjudice économique/des dommages assurés substantiels) : −−22 février : séisme en NouvelleZélande −−11 mars : séisme et tsunami au Japon −−d’avril à mai : série de tornades aux États-Unis −−d’août à novembre : inondations en Thaïlande −−d’octobre 2010 à septembre 2011 : sécheresse en Afrique de l’Est La répartition des événements entre les principaux risques naturels – événements géophysiques, météorologiques, hydrologiques et climatologiques – correspond à peu près à la moyenne des 30 dernières années. En 2011, 91 % de toutes les catastrophes naturelles du monde entier ont été des événements liés à des phénomènes atmosphériques : 300 tempêtes, 310 inondations, des ondes de tempête et des mouvements de masse causés par de fortes pluies. La catégorie des événements climatologiques, à savoir les incendies de forêts, les sécheresses et les vagues de chaleur ou de froid, comptait 140 événements, parmi lesquels 117 incendies de forêts. Celle des risques naturels géophysiques regroupait 9 % des événements : 54 séismes et 16 éruptions volcaniques ayant 820 événements Répartition mondiale en pourcentage 9 % 37 % 37 % 17 % Victimes : 27 000 Répartition mondiale en pourcentage 62 % 11 % 25 % 2 % Préjudice total : 380 milliards de $US Répartition mondiale en pourcentage 61 % 19 % 17 % 3 % Dommages assurés : 105 milliards de $US Répartition mondiale en pourcentage 47 % 37 % 13 % 3 % Nombre de catastrophes naturelles de 1980 à 2011 Événements géophysiques : tremblement de terre, éruption volcanique 1 000 800 Événements météorologiques : tempête tropicale, tempête d’hiver, intempéries, grêle, tornade, tempête locale 600 Événements hydrologiques : crue éclair, débordement fluvial, onde de tempête, mouvement de terrain (glissement) 400 200 0 1980 50 1985 1990 MUNICH RE Topics Geo 2011 1995 2000 2005 2010 Événements climatologiques : vague de chaleur, vague de froid, incendie de forêt, sécheresse NatCatSERVICE et gestion des risques ausés des dommages aux biens et/ c ou aux personnes. La répartition en pourcentage entre les différents continents correspond également à la moyenne à long terme. Ainsi, la majeure partie des catastrophes se sont produites en Asie (240) et en Améri que (290) ; on en dénombre 150 en Europe, 80 en Afrique et 60 en Australie. Nombre de morts En 2011, 27 000 personnes ont perdu la vie lors de catastrophes naturelles, soit un nombre très inférieur à la moyenne sur une longue durée puis que, depuis 1980, on compte en moyenne 73 000 morts par an. Le grave séisme et le tsunami ayant touché le Japon ont coûté la vie à 15 840 personnes. Au Brésil, des glissements de terrain ont fait 900 morts. Des milliers de personnes ont trouvé la mort au cours des inondations ayant dévasté le Pakistan (520 morts), la Thaïlande (813 morts) et les Philippines (1 268 morts). Les intempéries qui ont touché les États-Unis en avril et en mai ont fait 585 morts. La sécheresse catastrophique dans la Corne de l’Afrique et la famine qu’elle a entraînée n’ont pas encore été prises en compte dans le calcul du nombre de morts pour l’année 2011. Cette sécheresse a été l’une des catastrophes humaines les plus importantes de cette année. observe des écarts significatifs entre l’ensemble des sinistres qui se sont produits depuis 1980 et ceux survenus en 2011 : −−61 % du préjudice global et 47 % des dommages assurés ont été causés par des séismes ; la moyenne à long terme s’établit à 22 % pour les préjudices et à 10 % pour les dommages assurés. −−Le montant du préjudice causé par les séismes a totalisé 230 milliards de $US, dont 22 % – c’est-à-dire 50 milliards de $US – étaient assurés ; la moyenne de la part assurée est de 10 %. −−Seulement 37 % de l’ensemble des dommages assurés ont été causés par les tempêtes dans le monde, tandis que la moyenne était de 76 %. Ces écarts s’expliquent par la clémence de la saison des ouragans. Bien qu’elle ait été très active, seuls 3 ouragans ont touché la terre ferme aux États-Unis, n’occasionnant qu’environ 5 milliards de $US de dommages assurés, alors que la moyenne des années précédentes pour ces dommages aux États-Unis était de près de 17 milliards de $US. Les tornades qui ont dévasté les États-Unis en 2011 ont provoqué des dommages d’un montant record pour le secteur de l’assurance : en tout près de 25 milliards de $US, ce qui correspond à plus de 50 % de l’ensemble des dommages assurés causés par les tempêtes au cours de l’année 2011 ; −−Avec 15 milliards de $US de dommages assurés, la part des inondations a représenté 13 %. Les événements les plus coûteux ont été les inondations survenues en Australie (en janvier) et en Thaïlande (du mois d’août au mois de novembre). NOS EXPERTES : Angelika Wirtz, responsable du NatCatSERVICE au sein du département de recherche en géorisques/Centre Entreprise Sciences du Climat. [email protected] Petra Löw, spécialiste des catastrophes naturelles et de l’analyse de tendances. Elle travaille au sein du département de recherche en géorisques/Centre Entreprise Sciences du climat en tant que consultante NatCatSERVICE. [email protected] Dommages Le préjudice total, qui s’est élevé à 380 milliards de $US, est le plus haut montant jamais enregistré dans la base de données de Munich Re. Les dommages assurés ont également atteint un record de 105 milliards de $US. On Préjudice économique et dommages assurés en milliards de $US pour la période 1980–2011 Préjudice total (valeurs de 2011) 350 Dont dommages assurés (valeurs de 2011) 300 250 Évolution du préjudice économique total 200 Évolution des dommages assurés 150 100 50 0 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 MUNICH RE Topics Geo 2011 51 NATCATSERVICE ET gestion des RISques Les modèles 3D créent de la transparence Les modèles de bâtiments en 3D sont à ce jour peu répandus. Mais cela va changer. En effet, ils pourront par exemple s’avérer très utiles pour les assureurs, dans le cadre de l’identification et de l’évaluation des risques, ainsi que de la modélisation des sinistres, car ils recèlent de nombreuses informations. Andreas Siebert, Martin Simon Dans le cadre d’un projet de coopération entre l’Université Louis-et-Maximilien de Munich, l’Office bavarois du cadastre et de l’information géographique (Bayerisches Landesamt für Vermessung und Geoinformation) et Munich Re, des études sont actuellement menées pour savoir si les modèles de bâtiments en 3D, dits « modèles en blocs », conviennent pour la modélisation des risques naturels. L’hypothèse : une analyse détaillée avec des données de bâtiments 3D permettrait d’améliorer qualitativement les modèles utilisés pour l’assurance Dommages, notamment dans le cas d’événements naturels survenant à l’échelle régionale, comme les inondations. À cet effet, les études ont consisté à déterminer si ces données sont bien appropriées pour délimiter les zones inondables et si elles permettent d’améliorer les prédictions concernant les dommages aux bâtiments. Dans ce cadre, la précision du modèle numérique de terrain (MNT) utilisé comme modèle de base joue un rôle décisif. Le choix de modèles de terrain adéquats est déterminant Dans la modélisation des inondations, il est important de choisir des modèles de terrain adéquats pour déduire les surfaces et profondeurs d’inondation. L’Office bavarois du cadastre a fourni à cet effet plusieurs modèles présentant différentes résolutions. Afin d’atteindre un équilibre parfait entre niveau de détail, volume de données et temps de calcul, il a été étudié quelles dimensions de maille sont le plus adaptées aux modèles d’inondation. Certes, contrairement aux modèles ayant une dimension de maille de 10 mètres (MNT 10), les modèles de terrain haute résolution (< 2 mètres) fournissent des informations très précises sur la hauteur. Mais à cause du volume de données plus important, le temps de calcul est considérablement plus long et souvent, des modèles de terrain plus détaillés n’apportent pas d’améliorations notoires des résultats. Lors d’une étude sur la qualité de la modélisation des inondations prenant pour exemple Regensburg, 6 modèles numériques de terrain dans différentes résolutions (1 m, 2 m, 5 m, 10 m, 50 m, 90 m) ont été utilisés et des résultats très différents ont 52 MUNICH RE Topics Geo 2011 été obtenus. Comme attendu, les résultats fournis par les modèles de résolution 90 et 50 mètres étaient très imprécis. Ceux fournis par les modèles de résolution compris entre 10 mètres et 1 mètre différaient très peu, en termes de nombre de bâtiments inondés. Même lors de la détermination des profondeurs d’inondation, également très importantes pour le calcul du montant des dommages, les différences, pour ces 2 plages de résolutions, étaient de l’ordre de 5 à 10 centimètres et donc largement négligeables. Nous estimons donc qu’en raison de son volume de données moins important, le MNT 10 est le modèle de base le plus adapté pour la modélisation des inondations. La 3D indique la profondeur d’inondation des bâtiments Afin de modéliser les inondations le long du Danube, entre Regensburg et Passau, des niveaux d’eau historiques datant de l’inondation d’août 2002, ainsi que différents scénarios d’inondation ont été utilisés. L’un des scénarios était la crue centennale, c’est-à-dire une inondation survenant une fois tous les 100 ans selon les statistiques. De plus, un processus a été mis au point pour déduire des scénarios d’inondation à partir des zones inondables officielles déterminées par le système ZÜRS de la Fédération allemande des assurances. Avec tous ces scénarios, la région inondable a pu être déterminée avec précision. Outre les vastes portions inondables, l’utilisation du modèle de bâtiments en 3D a permis d’identifier chacun des bâtiments frappés par l’inondation. En plus de l’identification des bâtiments inondés, il est désormais possible de déterminer la profondeur d’inondation au niveau des bâtiments. Ces informations sont importantes pour l’application de mesures de protection contre les inondations, l’installation de digues mobiles par exemple, et pour une gestion efficace des risques commerciaux et industriels. Les dommages peuvent être différenciés Les montants relatifs des dommages peuvent être simulés, à l’aide de la modélisation des inondations et des différentes fonctions de dommage en rapport avec le niveau d’eau. La profondeur et la durée d’inondation sont des facteurs influant sur les dommages. De plus, le type de NATCATSERVICE Et gestion des risques bâtiment (maison individuelle, immeuble, bâtiment avec ou sans cave), les matériaux de construction (briques, bois) et l’année de construction influent sur la vulnérabilité et donc le montant des dommages associé aux bâtiments. L’analyse des dommages permet une subdivision entre dommages causés aux bâtiments et dommages causés aux meubles. De plus, il est désormais possible d’établir une distinction entre différentes fonctions de bâtiment, en combinaison avec les données d’utilisation des bâtiments, également mises à disposition par l’Office bavarois du cadastre. Outre les dommages aux bâtiments à usage d’habitation, cette subdivision et les différentes fonctions de sinistre permettent de calculer les dommages industriels ou ceux occasionnés sur les édifices publics. Une évaluation claire des risques, basée sur des données de position aux détails précis, présente un grand avantage, surtout pour les sites industriels avec des montants de garantie élevés – comme pour les inondations en Thaïlande. Contexte : sur les sites industriels ou logistiques, un arrêt d’exploitation et les interdépendances complexes entre les chaînes d’approvisionnement peuvent causer de lourds dommages résultant des carences de fournisseurs. En Thaïlande, plusieurs parcs industriels à très forte concentration de valeur ont été touchés par les inondations, ce qui a occasionné des pertes de production et des problèmes de transport ainsi que, par la suite, des carences de fournisseurs pour de nombreuses entreprises clés du secteur de l’électronique. Cela a à son tour provoqué des pénuries d’approvisionnement dans les secteurs informatique et automobile. Une modélisation précise permet de mieux déterminer ces risques liés à des sites et d’offrir plus de transparence sur leurs interrelations dans l’espace. Les informations complémentaires améliorent la transparence des risques Ligne de digue, représentée au moyen de modèles numériques de terrain (MNT) ayant différentes résolutions. Dimensions de maille de haut en bas : 90 m, 50 m, 10 m, 1 m. En plus de la modélisation des inondations et des sinistres au niveau des bâtiments, les informations complémentaires fournies par exemple par le système de zonage ZÜRS ou par les utilisations des bâtiments peuvent être transposées à chaque bâtiment individuel. Le modèle de bâtiments « LoD1 », utilisé pour cette modélisation d’une section du Danube, renseigne non seulement sur les adresses, mais fournit aussi des informations sur la hauteur et la surface, ainsi que des descriptions des types de bâtiments (et de toits), pouvant livrer de précieux aspects complémentaires dans le cadre de l’interprétation des dommages. Afin d’améliorer la transparence et la communication au niveau des risques, les données de bâtiments en 3D peuvent aussi être enregistrées avec d’autres informations ou valeurs (par exemple hauteur des bâtiments, dans le but de représenter les responsabilités ou les montants des dommages). Les cartes 3D offrent en outre d’excellentes possibilités de visualisation des concentrations de responsabilité et des principales zones sinistrées. D’un autre côté, n’oublions pas que l’écoulement et le niveau d’eau sont des grandeurs naturelles comportant une part d’incertitude élevée. Aucun modèle ne peut réduire ces incertitudes. MUNICH RE Topics Geo 2011 53 NATCATSERVICE Et gestion des risques Conclusion Les modèles de bâtiments en 3D sont utilisés depuis peu de temps seulement et principalement pour des études scientifiques. De plus, ces ensembles de données ne sont malheureusement pas encore disponibles dans toute l’Allemagne, et des questions restent également en suspens concernant le système de licences et les coûts. Cependant, au cours des prochaines années, ces modèles vont être fortement demandés, du fait de leur grande richesse en informations sur les bâtiments. Par la suite, ils pourront apporter une aide précieuse au secteur de l’assurance, dans le cadre de l’identification et de l’évaluation des risques, ainsi que de la modélisation des sinistres. Modèle de bâtiments 3D (LoD1) de la ville de Regensburg sur le Danube. « LoD2 », prochaine étape de développement des modèles de bâtiments, prévue par l’Office bavarois du cadastre et de l’information géographique pour 2015, devrait offrir encore plus de possibilités d’utilisation pour le secteur de l’assurance. Comme ce modèle amélioré offre, en plus, des informations exactes sur les toits des bâtiments, il pourra également s’avérer utile pour la modélisation des orages et tempêtes. Il permettra par exemple de mieux analyser les dommages causés par les tempêtes ou la grêle sur les bâtiments ou les constructions (installations photovoltaïques entre autres). Les résultats de modélisation permettent, outre une gestion complète des risques, d’identifier les bâtiments devant être mieux protégés contre les inondations par des installations techniques – facteur important dans la prévention des risques. Représentation de la profondeur d’inondation au niveau des différents bâtiments à Regensburg, dans le cas d’une crue centennale modélisée. Représentation de la profondeur d’inondation au niveau des différents bâtiments d’un site industriel, dans le cas d’une crue bicentennale modélisée. Profondeur d’inondation des bâtiments Pas d’inondation Jusqu’à 20 cm Jusqu’à 50 cm Jusqu’à 100 cm Plus de 100 cm 54 MUNICH RE Topics Geo 2011 NATCATSERVICE Et gestion des risiques Exemple de dommages dans le cas d’une crue centennale à Regensburg. Dommages Pas de dommages Jusqu’à 10 % de dommages Jusqu’à 25 % de dommages Jusqu’à 50 % de dommages Plus de 50 % de dommages Source : Bayerisches Landesamt für Vermessung und Geoinformation NOS EXPERTS : Andreas Siebert, chef de la section Solutions géospatiales dans le département Souscription Entreprise/Gestion des risques de cumuls. Il s’occupe des technologies de l’information géographique pour l’amélioration de la transparence des risques, dans le cadre de la gestion des risques naturels. [email protected] Martin Simon, chargé de la mise au point des solutions 3D innovantes dans la section Solutions géo spatiales au sein du département Souscription Entreprise/Gestion des risques de cumuls. [email protected] MUNICH RE Topics Geo 2011 55 CHRONIQUE Les risques liés aux événements géophysiques Regard sur la planète Prof. Dr. Dr. Peter Höppe, directeur du département Recherche en géorisques/ Centre Entreprise Sciences du Climat de Munich Re [email protected] L’année 2011, particulièrement marquée par des cataclysmes naturels, a été l’année la plus coûteuse de tous les temps. Alors qu’en 2005, ce sont avant tout les ouragans Rita, Wilma et Katrina qui avaient été à l’origine de dommages record, en 2011, ce sont des séismes, et plus particulièrement ceux qui ont touché le Japon et la Nouvelle-Zélande, qui ont eu des conséquences dévastatrices. C’est d’ailleurs uniquement parce que l’assurance contre les tremblements de terre est beaucoup moins répandue que l’assurance contre les risques de tempête que le montant des dommages assurés en 2011 – 105 milliards de $US – a été seulement légèrement plus élevé que celui de 2005, l’année la plus coûteuse jusque-là pour le secteur de l’assurance. Après 15 années où les catastrophes météorologiques ont été la cause essentielle des dommages, l’année 2011 nous a rappelé à quel point la Terre sur laquelle nous vivons est instable. En 2010 déjà, les séismes ayant touché Haïti et le Chili ainsi que l’éruption de l’Eyjafjallajökull en Islande avaient attiré l’attention sur les risques géophysiques. Cependant, le montant des dommages matériels avait seulement été d’environ la moitié de celui des dommages liés à des phénomènes naturels extrêmes. Au cours des 31 dernières années, les dommages causés par des événements géophysiques ont constitué, en moyenne, 22 % des pertes économiques, mais seulement 10 % des dommages assurés causés par les catastrophes naturelles. Les changements climatiques ne doivent pas faire oublier les risques sismiques L’augmentation du nombre d’événements météorologiques extrêmes, très 56 MUNICH RE Topics Geo 2011 vraisemblablement due aux changements climatiques, avait fait la une des journaux au cours des dernières années. Le fait que les activités humaines (émissions de gaz à effet de serre) puissent conduire à une augmentation du risque de catastrophes naturelles est une première dans l’histoire de l’humanité. Cependant, on oublie vite que d’autres risques importants liés à des éléments purement naturels, tels que les séismes, les tsunamis ou les éruptions volcaniques, existent toujours. À l’exception de faibles séismes, déclenchés par exemple par l’exploitation minière et des lacs de retenue, ces risques naturels, au regard de l’état des connaissances actuelles, ne sont pas influencés par les hommes mais obéissent aux lois naturelles, ne révélant aucune tendance particulière, également sur le long terme (sur plusieurs siècles). Le développement de la globalisation entraîne, lui aussi, une augmentation des dommages D’un point de vue statistique, le fait que des années de plus forte activité puissent se succéder est plausible. Les géophysiciens se posent certes la question de savoir si des processus physiques pourraient se cacher derrière un tel cluster d’événements. Or, même dans l’affirmative, il s’agirait tout de même de processus naturels, ce qui ne change rien, sur le long terme, concernant les risques qu’ils représentent. Le fait que les dommages causés par des événements géophysiques soient de plus en plus importants tient, d’une part, au fait que les hommes et les valeurs sont de plus en plus fortement exposés aux risques. D’autre part, le développement de la mondialisation entraîne une augmentation des dommages dus à des ruptures d’approvisionnement, tel que cela a été le cas après le séisme au Japon et les inondations en Thaïlande. Si les assureurs ne peuvent empêcher la survenance de catastrophes, ils peuvent cependant atténuer les conséquences Il y a 3 ans, Munich Re a décidé de soutenir, sur les plans financier et technique, le plus gros projet de modélisation des catastrophes naturelles du monde, le « Global Earthquake Model » (GEM), en tant que principal sponsor. Les événements survenus en 2011 et en 2010 ont montré, on ne peut plus clairement, que cette décision avait été la bonne. Même dans les pays qui n’intéresseraient pas les développeurs de modèles commerciaux en raison d’une faible densité d’assurance, la transparence créée par ce modèle en matière de risques sismiques peut permettre la mise en place d’une base pour l’assurabilité de ces risques et pour la prise de mesures préventives adéquates. En effet, seule une prise de conscience des risques existants peut permettre la mise en place de mesures de prévention et de conditions économiques nécessaires à la reconstruction et à l’assistance aux victimes en cas de survenance d’une catastrophe. L’année 2011 a clairement montré que si les discussions relatives à l’augmentation des risques météorologiques sont très importantes, les autres risques de catastrophes naturelles ne doivent pas être oubliés. Bien qu’ils ne révèlent aucune tendance à long terme, ils n’en recèlent pas moins un énorme potentiel de dommages. Les assureurs ne peuvent pas empêcher de telles catastrophes de se produire. Mais ils peuvent contribuer à en réduire les conséquences. 22 10 1 7 33 41 40 48 23 28 20 11 31 2 21 6 5 événements ayant répondu aux critères qui caractérisent une « grande » catastrophe naturelle 820 catastrophes naturelles, dont 50 événements importants (sélection) 42 5 50 34 15 38 16 44 14 13 19 4 35 Événements géophysiques : séisme, tsunami, éruption volcanique Événements météorologiques : tempête tropicale, tempête d’hiver, intempéries, grêle, tornade, tempête locale Événements hydrologiques : débordement fluvial, crue éclair, onde de tempête, mouvement de terrain (glissement) Événements climatologiques : vague de chaleur, vague de froid, incendie de forêt, sécheresse 3 37 9 32 27 8 39 29 46 12 25 26 43 45 17 47 Impression Druckerei Fritz Kriechbaumer Wettersteinstrasse 12 82024 Taufkirchen/München Allemagne 30 Téléchargement Les données, analyses, statistiques et graphiques actuels sont téléchargeables gratuitement sur notre site : www.munichre.com/touch>>>NatCatSERVICE Downloadcenter 24 Numéros de commande Allemand 302-07224 Anglais 302-07225 Français 302-07226 Espagnol 302-07227 Italien 302-07228 49 Rédaction Angelika Wirtz, Munich Re Dr.-Ing. Wolfgang Kron, Munich Re Florian Wöst, Munich Re 36 Contact Angelika Wirtz Téléphone : +49 89 38 91-34 53 Téléfax : +49 89 38 91-7 34 53 [email protected] 18 Responsable du contenu Recherche en géorisques (GEO/CCC1) Illustrations Photo de la couverture, p. 2 (à gauche), p. 3 (les deux), pp. 6, 10, 20, 26, 28, 29, 33, 36, 44, 46, 48 (en totalité), 49 (en totalité) : Reuters P. 1, 4 (à droite), 12, 13, 14, 15, 16, 17, 53, 54, 55 (en haut) : Munich Re P. 2, à droite : Chris Spannagle P. 4, à gauche : GettyImages P. 5, 24 : NASA P. 11, 25, 31, 39, 45, 51, 55 (en bas) : Fotostudio Meinen, Munich P. 22 (en haut), 30 : AP P. 22 (en bas), 23, 38 : picture alliance/dpa P. 35 : Munich Re America P. 56 : Kevin Sprouls Topics Geo – Carte mondiale des catastrophes naturelles 2011 © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107 80802 München Allemagne Téléphone : +49 89 38 91-0 Téléfax : +49 89 39 90 56 www.munichre.com Topics Geo – 50 catastrophes naturelles graves survenues en 2011 Date Événement Région 1 10–14/1 Inondations Australie 2 12–16/1 7 2–7/2 Glissements de terrain, crues torrentielles Inondations, crues torrentielles Tempêtes d’hiver, blizzards Dommages causés par le froid, gel Inondations, glissements de terrain Cyclone Yasi Australie 1 2 500 8 3–14/2 Inondations Sri Lanka 18 300 3 26–28/1 4 31/1–6/2 5 1–8/2 6 Fév.–avril États-Unis Mexique Bolivie Préjudice total (en millions de $US) 22 2 800 900 460 11 300 39 1 900 3 500 Dommages Commentaires, description du sinistre assurés en millions de $US 1 875 Débordement de la Brisbane River. Des dizaines de milliers de bâtiments inondés. Dommages dans le secteur agricole et dans des mines. 50 Fortes chutes de pluie, débordement de fleuves. Des milliers de maisons endommagées. 185 ponts et routes détruites. 80 Rupture d’une digue. Bâtiments historiques détruits, entrepôts inondés. 11 000 véhicules endommagés. 52 1 300 Cyclone Bingiza Madagascar 34 Séisme Nouvelle-Zélande 181 16 000 13 000 11 5–16/3 12 11/3 Inondations Séisme, tsunami Angola Japon 113 15 840 210 000 35 000– 40 000 13 3–5/4 14 18/4–23/5 Intempéries, tornades Inondations États-Unis États-Unis 9 9 3 500 4 600 2 000 500 15 22–28/4 Intempéries, tornades États-Unis 350 15 000 16 Avril–mai Inondations, glissements de terrain Colombie 90 17 11/5 18 14–16/5 Séisme Feux de forêt Espagne Canada 10 1 200 1 500 19 20–27/5 Intempéries, tornades États-Unis 176 14 000 20 1/6–17/7 Inondations, glissements de terrain Chine 355 2 000 21 4/6–21/7 Éruption du volcan Puyehue Séisme Chili, Argentine, Uruguay Nouvelle-Zélande 30 Tempête tropicale Meari, inondations Intempéries Chine, Philippines, Corée Danemark 17 Inondations, glissements de terrain Typhon Muifa (Kabayan), inondations Inondations Inondations Corée du Nord et Corée du Sud Corée, Chine, Japon, Philippines Pakistan Cambodge, Viêt Nam Thaïlande 23 25–28/6 24 2–3/7 25 26/7–2/8 26 28/7–9/8 27 Août–oct. 28 Août–nov. 29 Août–nov. Inondations, glissements de terrain 30 22/8–2/9 31 26–29/8 32 Sept.–oct. Ouragan Irene, onde de tempête, inondations Crues torentielles Inondations Caraïbe, Amérique du Nord Nigeria Inde 1 7 300 Plus de 160 tornades de catégorie EF5, violents orages, grêle. Des villes (notamment Tuscaloosa), des milliers d’habitations et de voitures ainsi qu’un aérodrome endommagés. Dommages à l’industrie et à l’agriculture. 269 000 foyers privés d’électricité. 100 Mw 5,1 ; 20 000 bâtiments, routes et véhicules endommagés. Plus de 300 blessés. 720 Vents soufflant jusqu’à 100 km/h. Plusieurs centaines de bâtiments endommagés/détruits. Coupures de courant. 10 000 personnes évacuées. 6 900 Plus de 100 tornades de catégorie EF5, fortes pluies, grêle. Hangar pour avions et plus de 10 000 bâtiments endommagés/détruits. Tornade de catégorie EF5 sur Joplin dans le Missouri (158 morts) : 75 % de la ville dévastée. Routes fermées. Fortes pluies. 130 000 bâtiments endommagés ou détruits. Des centaines de ponts, de routes et plusieurs centrales hydroélectriques endommagés. Dégâts agricoles importants. 2,3 millions de personnes évacuées. 800 50 300 200 88 255 76 22 800 100 520 355 2 500 400 20 813 40 000 10 000 5 600 55 7 400 102 90 930 33 3–5/9 Typhon Talas Japon 68 650 430 34 3–10/9 Tempête tropicale Lee États-Unis 15 750 560 35 4–19/9 Feux de forêt 2 1 000 530 36 12/9 Intempéries États-Unis : surtout TX Europe du Nord 1 300 150 Somalie, Djibouti, Kenya, Éthiopie Colombie Plus de 50 000 187 39 18/9 Séisme Sud-Est asiatique 134 1 500 40 20–22/9 Typhon Roke (Onyok) Japon 13 1 700 41 26/9–4/10 Typhon Nesat, inondations 42 11–19/10 Inondations, glissements de terrain Philippines, Chine, Viêt Nam Amérique centrale 89 1 500 124 1 500 43 23/10 Séisme Turquie 604 550 40 44 28–31/10 45 4–9/11 Tempête d’hiver Crues torentielles États-Unis, Canada France, Italie 29 14 900 2 100 665 1 100 46 23–24/11 Feux de forêt Australie 50 30 47 15–17/12 48 16–18/12 Tempête d’hiver Joachim Tempête tropicale Washi Tempête d’hiver Patrick (Dagmar) Ouest de l’Europe Philippines Sécheresse États-Unis 50 Janv.–déc. Nord de l’Europe, pays Baltes 1 268 650 40 1 200 8 000 1 200 Rejet de gaz et de cendres volcaniques. Aéroports fermés, plusieurs centaines de vols annulés. Agriculture, oviculture et pisciculture touchées. Mw 5,9 ; liquéfaction des sols. Plus d’une centaine de bâtiments endommagés. Ponts effondrés, installations portuaires et chantiers navals touchés. Vents soufflant jusqu’à 135 km/h, crues torrentielles et coulées de boue. Des milliers de maisons endommagées/détruites. Ponts et routes endommagés. Trafic aérien interrompu. Dommages agricoles. Violents orages, tempêtes de grêle, fortes pluies. Plus de 1 000 bâtiments endommagés. Réseau de communication coupé. Rupture de digues, débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. Plus de 15 000 habitations et des milliers de véhicules endommagés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. Typhon de catégorie 5. Des milliers de maisons et des installations portuaires détruites. Bateaux de pêche coulés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. 1,35 millions de personnes évacuées. Rupture de digues, 6 000 villages inondés, ponts emportés. Grosses pertes dans l’agriculture et l’élevage. Crue du Mékong. Digues et ponts emportés, route bloquées. Plusieurs centaines de maisons endommagées/détruites. Dommages agricoles. Pluies diluviennes. 1 million de bâtiments inondés/endommagés. 7 parcs industriels inondés. Dégâts importants causés à l’infrastructure, à l’agriculture, aux élevages intensifs de poissons et à l’élevage de bétail. Ouragan de catégorie 3. Plusieurs centaines de milliers de maisons et de véhicules endommagés/ détruits. Secteur agricole et réseau de télécommunication touchés. Fortes pluies, effondrement du barrage d’Eleyele. Maisons, véhicules et ponts endommagés/détruits. Fortes pluies de mousson. Débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. 130 000 maisons endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure, dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Fortes chutes de pluie, avalanches de boue. Plusieurs milliers de maisons et de véhicules endommagés/détruits. Villages coupés du reste du monde. Des milliers de maisons et de voitures endommagées/détruites. Dommages à l’infrastructure. 11 000 km2 dévorés par les flammes. Le pire incendie de forêt au Texas depuis plus de 10 ans. 1 600 maisons détruites. Queue de l’ouragan Katia. Rafales de vent jusqu’à 130 km/h, fortes pluies, crues torrentielles. Maisons endommagées. 2 saisons successives de très faibles pluies, grave manque d’eau. Agriculture et élevage sinistrés. Famine, sous-alimentation et maladies. Nombre de personnes affectées : 13,3 millions. 150 000 bâtiments endommagés ou détruits. 11 000 km2 de terres cultivées inondées et 160 000 têtes de bétail tuées. Mw 6,9 ; épicentre dans la région du Sikkim. Des centaines de glissements de terrain. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés ou détruits. Ponts et routes endommagés. Réseaux d’électricité et de communication coupés. Plus de 100 000 sans-abri. Typhon de catégorie 4, vitesses de vent atteignant jusqu’à 215 km/h, fortes pluies. Dommages à l’infrastructure, transports publics affectés. Les constructeurs d’automobiles (Toyota, Mitsubishi, Nissan) ont dû suspendre momentanément la production de leurs usines. Vents soufflant jusqu’à 150 km/h, fortes pluies, glissements de terrain. Plusieurs milliers de maisons inondées. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de la pêche. Débordement de fleuves, rupture de digues. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés/détruits. Plusieurs centaines de ponts emportés. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Mw 7,2 ; 65 000 maisons endommagées/détruites. Coupures de courant, réseaux de distribution d’eau et de gaz touchés. Plus de 4 200 blessés. Fortes chutes de neige. Réseau de communication coupé. Lignes électriques et arbres renversés. Intempéries, coulées de boue. Des milliers de bâtiments et de voitures endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure. Feu de brousse, 155 km2 détruits par les flammes. Plus de 30 maisons détruites, 16 autres endommagées. Routes fermées. 200 personnes évacuées. 390 Fortes chutes de neige et de pluie, crues torrentielles. Trafic routier et ferroviaire interrompu. Crues torrentielles, glissements de terrain. Débordement de fleuves. Plus de 6 800 maisons endommagées/détruites. Vents soufflant jusqu’à 232 km/h, fortes pluies, ondes de tempête, glissements de terrain. Villes inondées. Bâtiments, maisons et voitures endommagés. Trafic routier et ferroviaire arrêté. Réseau de télécommunication coupé. 1 000 Déficit pluviométrique et manque d’eau dans les nappes phréatiques. Graves dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. TOPICS GEO Édition 2012 Catastrophes naturelles 2011 Analyses – Évaluations – Positions Séisme, inondations, accident nucléaire La triple catastrophe du Tohoku a ébranlé la société, la science et l’économie PAGE 6 Inondations L’Australie, les ÉtatsUnis et la Thaïlande sous les eaux Munich Re 37 Oct. 2010– Sécheresse sept. 2011 38 Sept.–déc. Inondations 49 25–26/12 Débordements de fleuves. Éboulement. Plusieurs centaines de maisons détruites. Villes, ponts et autoroutes endommagés. 10 000 sans-abri. Cyclone de catégorie 4. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Ports fermés, trafic ferroviaire interrompu. Dégâts dans l’agriculture. 180 000 foyers privés d’électricité. Fortes pluies de mousson. 45 000 maisons endommagées/détruites. Dommages dans l’agriculture, l’élevage et dans le secteur de la pêche. Plus de 6 000 maisons et beaucoup d’écoles endommagées. 80 % de l’infrastructure détruite. Dommages agricoles. 77 000 sans-abri. Mw 6,3 ; liquéfaction des sols dans de vastes zones. Des bâtiments de plusieurs étages et 10 000 maisons endommagés/détruits. 5 000 habitations détruites. Ponts et routes endommagés. Dégâts dans l’agriculture. 35 000 sans-abri. Mw 9 ; tsunami ayant pénétré jusqu’à 5 km à l’intérieur des terres. Larges secteurs côtiers entièrement détruits. Graves dommages causés à l’industrie et à l’économie. Centrale de Fukushima Daiichi : réacteurs endommagés, fuite radioactive. 6 000 blessés et 500 000 personnes évacuées. Plus de 20 tornades, violentes averses de grêle. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Averses, intempéries, fortes pluies, fonte des neiges. Débordement de fleuves, notamment du Mississippi et de l’Ohio. Villes inondées. Plus de 7 400 maisons détruites. Gros dégâts à l’infrastructure. 2 000 Numéro de commande 302-07226 1 425 « Groundhog Day Blizzard ». Maisons et véhicules endommagés. Production arrêtée chez plus de 30 constructeurs automobiles. 200 Températures de –15°C. Tempêtes de neige. Lourds dégâts dans l’agriculture. 10 22/2 22 13/6 © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107, 80802 München, Allemagne Triple catastrophe au Japon · Portraits : séismes, inondations, tempêtes · NatCatSERVICE et gestion des risques 9 14–19/2 Brésil Arabie saoudite Morts TOPICS GEO 2011 N° Sommet sur le climat Les décisions reportées sine die Gestion des risques Les modèles 3D créent de la transparence © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107 80802 München Allemagne Téléphone : +49 89 38 91-0 Téléfax : +49 89 39 90 56 www.munichre.com Responsable du contenu Recherche en géorisques (GEO/CCC1) Contact Angelika Wirtz Téléphone : +49 89 38 91-34 53 Téléfax : +49 89 38 91-7 34 53 [email protected] Rédaction Angelika Wirtz, Munich Re Dr.-Ing. Wolfgang Kron, Munich Re Florian Wöst, Munich Re Illustrations Photo de la couverture, p. 2 (à gauche), p. 3 (les deux), pp. 6, 10, 20, 26, 28, 29, 33, 36, 44, 46, 48 (en totalité), 49 (en totalité) : Reuters P. 1, 4 (à droite), 12, 13, 14, 15, 16, 17, 53, 54, 55 (en haut) : Munich Re P. 2, à droite : Chris Spannagle P. 4, à gauche : GettyImages P. 5, 24 : NASA P. 11, 25, 31, 39, 45, 51, 55 (en bas) : Fotostudio Meinen, Munich P. 22 (en haut), 30 : AP P. 22 (en bas), 23, 38 : picture alliance/dpa P. 35 : Munich Re America P. 56 : Kevin Sprouls 5 événements ayant répondu aux critères qui caractérisent une « grande » catastrophe naturelle 1 2 10 21 7 9 11 6 41 48 28 8 37 31 16 Numéros de commande Allemand 302-07224 Anglais 302-07225 Français 302-07226 Espagnol 302-07227 Italien 302-07228 50 événements importants (sélection) Événements géophysiques : séisme, tsunami, éruption volcanique Événements météorologiques : tempête tropicale, tempête d’hiver, intempéries, grêle, tornade, tempête locale Événements hydrologiques : débordement fluvial, crue éclair, onde de tempête, mouvement de terrain (glissement) Événements climatologiques : vague de chaleur, vague de froid, incendie de forêt, sécheresse 820 catastrophes naturelles, dont 50 34 29 32 38 42 23 27 3 40 33 20 15 39 5 12 25 26 43 45 17 44 14 13 19 4 35 47 30 49 24 36 18 Téléchargement Les données, analyses, statistiques et graphiques actuels sont téléchargeables gratuitement sur notre site : www.munichre.com/touch>>>NatCatSERVICE Downloadcenter Impression Druckerei Fritz Kriechbaumer Wettersteinstrasse 12 82024 Taufkirchen/München Allemagne Topics Geo – Carte mondiale des catastrophes naturelles 2011 46 22 Topics Geo – 50 catastrophes naturelles graves survenues en 2011 Date Événement Région 1 10–14/1 Inondations Australie 2 12–16/1 7 2–7/2 Glissements de terrain, crues torrentielles Inondations, crues torrentielles Tempêtes d’hiver, blizzards Dommages causés par le froid, gel Inondations, glissements de terrain Cyclone Yasi Australie 1 2 500 8 3–14/2 Inondations Sri Lanka 18 300 3 26–28/1 4 31/1–6/2 5 1–8/2 6 Fév.–avril États-Unis Mexique Bolivie Préjudice total (en millions de $US) 22 2 800 900 460 11 300 39 1 900 3 500 Dommages Commentaires, description du sinistre assurés en millions de $US 1 875 Débordement de la Brisbane River. Des dizaines de milliers de bâtiments inondés. Dommages dans le secteur agricole et dans des mines. 50 Fortes chutes de pluie, débordement de fleuves. Des milliers de maisons endommagées. 185 ponts et routes détruites. 80 Rupture d’une digue. Bâtiments historiques détruits, entrepôts inondés. 11 000 véhicules endommagés. 52 1 300 Cyclone Bingiza Madagascar 34 Séisme Nouvelle-Zélande 181 16 000 13 000 11 5–16/3 12 11/3 Inondations Séisme, tsunami Angola Japon 113 15 840 210 000 35 000– 40 000 13 3–5/4 14 18/4–23/5 Intempéries, tornades Inondations États-Unis États-Unis 9 9 3 500 4 600 2 000 500 15 22–28/4 Intempéries, tornades États-Unis 350 15 000 16 Avril–mai Inondations, glissements de terrain Colombie 90 17 11/5 18 14–16/5 Séisme Feux de forêt Espagne Canada 10 1 200 1 500 19 20–27/5 Intempéries, tornades États-Unis 176 14 000 20 1/6–17/7 Inondations, glissements de terrain Chine 355 2 000 21 4/6–21/7 Éruption du volcan Puyehue Séisme Chili, Argentine, Uruguay Nouvelle-Zélande 30 Tempête tropicale Meari, inondations Intempéries Chine, Philippines, Corée Danemark 17 Inondations, glissements de terrain Typhon Muifa (Kabayan), inondations Inondations Inondations Corée du Nord et Corée du Sud Corée, Chine, Japon, Philippines Pakistan Cambodge, Viêt Nam Thaïlande 23 25–28/6 24 2–3/7 25 26/7–2/8 26 28/7–9/8 27 Août–oct. 28 Août–nov. 29 Août–nov. Inondations, glissements de terrain 30 22/8–2/9 31 26–29/8 32 Sept.–oct. Ouragan Irene, onde de tempête, inondations Crues torentielles Inondations Caraïbe, Amérique du Nord Nigeria Inde 1 7 300 Plus de 160 tornades de catégorie EF5, violents orages, grêle. Des villes (notamment Tuscaloosa), des milliers d’habitations et de voitures ainsi qu’un aérodrome endommagés. Dommages à l’industrie et à l’agriculture. 269 000 foyers privés d’électricité. 100 Mw 5,1 ; 20 000 bâtiments, routes et véhicules endommagés. Plus de 300 blessés. 720 Vents soufflant jusqu’à 100 km/h. Plusieurs centaines de bâtiments endommagés/détruits. Coupures de courant. 10 000 personnes évacuées. 6 900 Plus de 100 tornades de catégorie EF5, fortes pluies, grêle. Hangar pour avions et plus de 10 000 bâtiments endommagés/détruits. Tornade de catégorie EF5 sur Joplin dans le Missouri (158 morts) : 75 % de la ville dévastée. Routes fermées. Fortes pluies. 130 000 bâtiments endommagés ou détruits. Des centaines de ponts, de routes et plusieurs centrales hydroélectriques endommagés. Dégâts agricoles importants. 2,3 millions de personnes évacuées. 800 50 300 200 88 255 76 22 800 100 520 355 2 500 400 20 813 40 000 10 000 5 600 55 7 400 102 90 930 33 3–5/9 Typhon Talas Japon 68 650 430 34 3–10/9 Tempête tropicale Lee États-Unis 15 750 560 35 4–19/9 Feux de forêt 2 1 000 530 36 12/9 Intempéries États-Unis : surtout TX Europe du Nord 1 300 150 Somalie, Djibouti, Kenya, Éthiopie Colombie Plus de 50 000 187 39 18/9 Séisme Sud-Est asiatique 134 1 500 40 20–22/9 Typhon Roke (Onyok) Japon 13 1 700 41 26/9–4/10 Typhon Nesat, inondations 42 11–19/10 Inondations, glissements de terrain Philippines, Chine, Viêt Nam Amérique centrale 89 1 500 124 1 500 43 23/10 Séisme Turquie 604 550 40 44 28–31/10 45 4–9/11 Tempête d’hiver Crues torentielles États-Unis, Canada France, Italie 29 14 900 2 100 665 1 100 46 23–24/11 Feux de forêt Australie 50 30 47 15–17/12 48 16–18/12 Tempête d’hiver Joachim Tempête tropicale Washi Tempête d’hiver Patrick (Dagmar) Ouest de l’Europe Philippines Sécheresse États-Unis 50 Janv.–déc. Nord de l’Europe, pays Baltes 1 268 650 40 1 200 8 000 1 200 Rejet de gaz et de cendres volcaniques. Aéroports fermés, plusieurs centaines de vols annulés. Agriculture, oviculture et pisciculture touchées. Mw 5,9 ; liquéfaction des sols. Plus d’une centaine de bâtiments endommagés. Ponts effondrés, installations portuaires et chantiers navals touchés. Vents soufflant jusqu’à 135 km/h, crues torrentielles et coulées de boue. Des milliers de maisons endommagées/détruites. Ponts et routes endommagés. Trafic aérien interrompu. Dommages agricoles. Violents orages, tempêtes de grêle, fortes pluies. Plus de 1 000 bâtiments endommagés. Réseau de communication coupé. Rupture de digues, débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. Plus de 15 000 habitations et des milliers de véhicules endommagés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. Typhon de catégorie 5. Des milliers de maisons et des installations portuaires détruites. Bateaux de pêche coulés. Dommages à l’infrastructure et à l’agriculture. 1,35 millions de personnes évacuées. Rupture de digues, 6 000 villages inondés, ponts emportés. Grosses pertes dans l’agriculture et l’élevage. Crue du Mékong. Digues et ponts emportés, route bloquées. Plusieurs centaines de maisons endommagées/détruites. Dommages agricoles. Pluies diluviennes. 1 million de bâtiments inondés/endommagés. 7 parcs industriels inondés. Dégâts importants causés à l’infrastructure, à l’agriculture, aux élevages intensifs de poissons et à l’élevage de bétail. Ouragan de catégorie 3. Plusieurs centaines de milliers de maisons et de véhicules endommagés/ détruits. Secteur agricole et réseau de télécommunication touchés. Fortes pluies, effondrement du barrage d’Eleyele. Maisons, véhicules et ponts endommagés/détruits. Fortes pluies de mousson. Débordement de fleuves. Villages coupés du reste du monde. 130 000 maisons endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure, dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Fortes chutes de pluie, avalanches de boue. Plusieurs milliers de maisons et de véhicules endommagés/détruits. Villages coupés du reste du monde. Des milliers de maisons et de voitures endommagées/détruites. Dommages à l’infrastructure. 11 000 km2 dévorés par les flammes. Le pire incendie de forêt au Texas depuis plus de 10 ans. 1 600 maisons détruites. Queue de l’ouragan Katia. Rafales de vent jusqu’à 130 km/h, fortes pluies, crues torrentielles. Maisons endommagées. 2 saisons successives de très faibles pluies, grave manque d’eau. Agriculture et élevage sinistrés. Famine, sous-alimentation et maladies. Nombre de personnes affectées : 13,3 millions. 150 000 bâtiments endommagés ou détruits. 11 000 km2 de terres cultivées inondées et 160 000 têtes de bétail tuées. Mw 6,9 ; épicentre dans la région du Sikkim. Des centaines de glissements de terrain. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés ou détruits. Ponts et routes endommagés. Réseaux d’électricité et de communication coupés. Plus de 100 000 sans-abri. Typhon de catégorie 4, vitesses de vent atteignant jusqu’à 215 km/h, fortes pluies. Dommages à l’infrastructure, transports publics affectés. Les constructeurs d’automobiles (Toyota, Mitsubishi, Nissan) ont dû suspendre momentanément la production de leurs usines. Vents soufflant jusqu’à 150 km/h, fortes pluies, glissements de terrain. Plusieurs milliers de maisons inondées. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de la pêche. Débordement de fleuves, rupture de digues. Plusieurs dizaines de milliers de bâtiments endommagés/détruits. Plusieurs centaines de ponts emportés. Dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. Mw 7,2 ; 65 000 maisons endommagées/détruites. Coupures de courant, réseaux de distribution d’eau et de gaz touchés. Plus de 4 200 blessés. Fortes chutes de neige. Réseau de communication coupé. Lignes électriques et arbres renversés. Intempéries, coulées de boue. Des milliers de bâtiments et de voitures endommagées/détruites. Graves dommages à l’infrastructure. Feu de brousse, 155 km2 détruits par les flammes. Plus de 30 maisons détruites, 16 autres endommagées. Routes fermées. 200 personnes évacuées. 390 Fortes chutes de neige et de pluie, crues torrentielles. Trafic routier et ferroviaire interrompu. Crues torrentielles, glissements de terrain. Débordement de fleuves. Plus de 6 800 maisons endommagées/détruites. Vents soufflant jusqu’à 232 km/h, fortes pluies, ondes de tempête, glissements de terrain. Villes inondées. Bâtiments, maisons et voitures endommagés. Trafic routier et ferroviaire arrêté. Réseau de télécommunication coupé. 1 000 Déficit pluviométrique et manque d’eau dans les nappes phréatiques. Graves dommages dans le secteur agricole et le secteur de l’élevage. TOPICS GEO Édition 2012 Catastrophes naturelles 2011 Analyses – Évaluations – Positions Séisme, inondations, accident nucléaire La triple catastrophe du Tohoku a ébranlé la société, la science et l’économie PAGE 6 Inondations L’Australie, les ÉtatsUnis et la Thaïlande sous les eaux Munich Re 37 Oct. 2010– Sécheresse sept. 2011 38 Sept.–déc. Inondations 49 25–26/12 Débordements de fleuves. Éboulement. Plusieurs centaines de maisons détruites. Villes, ponts et autoroutes endommagés. 10 000 sans-abri. Cyclone de catégorie 4. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Ports fermés, trafic ferroviaire interrompu. Dégâts dans l’agriculture. 180 000 foyers privés d’électricité. Fortes pluies de mousson. 45 000 maisons endommagées/détruites. Dommages dans l’agriculture, l’élevage et dans le secteur de la pêche. Plus de 6 000 maisons et beaucoup d’écoles endommagées. 80 % de l’infrastructure détruite. Dommages agricoles. 77 000 sans-abri. Mw 6,3 ; liquéfaction des sols dans de vastes zones. Des bâtiments de plusieurs étages et 10 000 maisons endommagés/détruits. 5 000 habitations détruites. Ponts et routes endommagés. Dégâts dans l’agriculture. 35 000 sans-abri. Mw 9 ; tsunami ayant pénétré jusqu’à 5 km à l’intérieur des terres. Larges secteurs côtiers entièrement détruits. Graves dommages causés à l’industrie et à l’économie. Centrale de Fukushima Daiichi : réacteurs endommagés, fuite radioactive. 6 000 blessés et 500 000 personnes évacuées. Plus de 20 tornades, violentes averses de grêle. Bâtiments et véhicules endommagés/détruits. Averses, intempéries, fortes pluies, fonte des neiges. Débordement de fleuves, notamment du Mississippi et de l’Ohio. Villes inondées. Plus de 7 400 maisons détruites. Gros dégâts à l’infrastructure. 2 000 Numéro de commande 302-07226 1 425 « Groundhog Day Blizzard ». Maisons et véhicules endommagés. Production arrêtée chez plus de 30 constructeurs automobiles. 200 Températures de –15°C. Tempêtes de neige. Lourds dégâts dans l’agriculture. 10 22/2 22 13/6 © 2012 Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft Königinstrasse 107, 80802 München, Allemagne Triple catastrophe au Japon · Portraits : séismes, inondations, tempêtes · NatCatSERVICE et gestion des risques 9 14–19/2 Brésil Arabie saoudite Morts TOPICS GEO 2011 N° Sommet sur le climat Les décisions reportées sine die Gestion des risques Les modèles 3D créent de la transparence