Pouvait-on prédire la fusion Air France/KLM
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Pouvait-on prédire la fusion Air France/KLM
Networks and Communication Studies NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 p. 159-182 Pouvait-on prédire la fusion Air France/KLM ? Une analyse en termes de réseaux sociaux Laurence Saglietto1 Abstract.— Could we have predicted Air France/ KLM fusion: a social networks analysis.— The merger among KLM and Air France has disrupted the games of power within the airline world. For all that, could have one “predicted” this merger? In other words, this article suggests appreciating the morphology and the morphogenesis of Air France and KLM’s relational networks as well as the relational networks of their respective alliances. Indeed, the positioning of the companies within their alliance allows the estimation of their potential of action, opportunities and constraints. In this respect, we shall use as framework of analysis a social networks approach and measures from graphs theory. Keywords.— Fusion/acquisition, Networks, Graph theory Résumé.— Le rapprochement entre KLM et Air France a bouleversé les jeux de pouvoir au sein du monde aérien. Pour autant, pouvait-on « prédire » cette fusion ? En d’autres termes, cet article se propose d’apprécier la morphologie et la morphogenèse des réseaux relationnels d’Air France et KLM, ainsi que des réseaux relationnels des alliances auxquelles ces compagnies appartiennent. En effet, le positionnement des compagnies au sein de leur alliance permet d’estimer leur potentiel d’action, leurs opportunités et leurs contraintes. À cet égard, nous mobiliserons comme cadre conceptuel d’analyse une approche en terme de réseaux sociaux et des mesures issues de la théorie des graphes. Mots clés.— Acquisition, Réseaux, Théorie des graphes INTRODUCTION Les médias s’accordent à dire que le rapprochement entre Air France et KLM bouleverse les jeux de pouvoir au sein du paysage aérien mondial. Pour autant, pouvait-on « prédire » cette fusion ? Certes d’un point de vue culturel, KLM aurait préféré s’allier à Lufthansa, mais la Commission européenne, au travers des règles du droit de la concurrence, aurait refusé cet accord qui mettait la nouvelle entité en position dominante. Elle a cependant accepté le rapprochement avec Air France, 1. Maître de conférences HDR en Science de Gestion. Responsable du M2 Professionnel « Audit Informationnel et Stratégique » Master des Affaires de l’IAE de Nice. GREDEG UMR 6227, 250 rue Albert Einstein, 06560 Valbonne, E-mail : [email protected] 160 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 qui entravait moins le jeu concurrentiel européen tout en lui permettant de consolider sa position sur la scène mondiale. Si le terme de « prédiction » est volontairement provocateur, il n’en demeure pas moins qu’apprécier la morphologie et la morphogenèse des réseaux relationnels d’Air France et de KLM permettrait d’aborder leur compatibilité sous un angle complémentaire à celui des critères du droit de la concurrence. La contextualisation des compagnies au sein de leur alliance permet en effet d’estimer leur potentiel d’action, leurs opportunités et leurs contraintes. Nous proposons donc de présenter le jeu des affaires dans lequel évoluent ces deux compagnies aériennes, puis de mobiliser comme cadre conceptuel d’analyse une approche en terme de réseaux sociaux. Nous définirons ainsi les contours structurels des réseaux relationnels des deux compagnies, ceux de leur alliance respective et enfin ceux de leur voisinage d’affaires. Nous pourrons alors apprécier la performance économique de la nouvelle alliance et les éléments annonciateurs de cette fusion. 1. LE CAS AIR FRANCE/KLM2 L’annonce du rapprochement des deux compagnies le 30 septembre 2003 a bouleversé le paysage aérien. Le montage juridique envisagé prévoyait une prise de contrôle progressive de KLM par Air France, en dissociant intérêts économiques et contrôle juridique. Cette fusion-acquisition devait ainsi favoriser la mise en œuvre d’une stratégie de croissance externe fructueuse. 1.1 L’organisation de la fusion Une première étape a été franchie lorsque la direction de KLM et les syndicats néerlandais sont parvenus à un accord prévoyant une garantie d’emploi pour le personnel de KLM. Deux conditions ont été posées : d’une part, la non introduction de facteurs externes susceptibles de peser négativement sur la rentabilité de la compagnie et, d’autre part, le maintien de la profitabilité de KLM dans la moyenne de celle des grandes compagnies aériennes européennes. Enfin pour protéger les intérêts spécifiques de KLM, des garanties ont été offertes par Air France à KLM (pour 5 ans) et à l’État néerlandais (pour huit ans). Par ce montage, la direction d’Air France et le gouvernement français ont pu atteindre différents objectifs. • Ils ont progressivement abouti à la privatisation de la compagnie publique Air France. En effet, l’échange capitalistique Air France/KLM (avec une augmentation du capital d’Air France) a fait passer la part de l’État français dans le capital d’Air France de 54 % à 44 %. • Ils ont créé une multinationale financière du transport aérien permettant de réaliser des économies grâce à la valorisation de synergies potentielles identifiées. 2. Les Échos, 18/09/2003, 26-27/09/2003, 07/10/2003, 29/10/2003, 19/11/2003 ; 10/02/2004 POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 161 Ces synergies visent une amélioration du résultat opérationnel du groupe combiné, après une mise en place progressive sur une période de cinq ans. Plus de la moitié des synergies envisagées sont réalisées grâce à une optimisation des réseaux, un meilleur redéploiement des activités Passagers et Cargo, une offre élargie dans les activités de Maintenance, ainsi que des économies de coûts en matière d’informatique, d’approvisionnement et de distribution commerciale. • Ils ont su saisir l’opportunité de ce rapprochement. En effet, si la fusion n’avait pas eu lieu, elle aurait profité aux concurrents restants que sont British Airways ou Lufthansa. La compagnie allemande n’aurait toutefois pas pu fusionner avec KLM car les deux compagnies sont fortement implantées sur les mêmes destinations. Par cette fusion, Air France prend le contrôle de l’aéroport international d’Amsterdam (Schiphol), situé à 400 kilomètres de Paris. Il appartient avec Roissy, Londres et Francfort au club des quatre sites qui se partagent 54 % des vols européens. Mais, quand le hub français accueille 16 000 connexions quotidiennes, son homologue hollandais n’en reçoit que 4 500. C’est pour maîtriser ce potentiel de développement qu’Air France a donc accepté de payer 784 millions d’euros, soit 40 % de plus que la valeur du dernier cours de KLM. La structure du nouveau groupe revêt un caractère extrêmement complexe. Elle a pris la forme d’une holding détenue à 81 % par des intérêts français (État et autres actionnaires d’Air France) et à 19 % par les actionnaires de KLM. Cette organisation permet aux compagnies de préserver leur autonomie et leur identité (marque, nom, flotte). La structure du groupe a également été élaborée de manière à préserver les droits de trafic internationaux de KLM. En effet, 51 % des droits de vote de KLM seront détenus pendant une période transitoire de 3 ans par deux fondations néerlandaises (à hauteur de 36,3 %) et par l’État néerlandais (à hauteur de 14,7 %). L’État néerlandais conserve ainsi son option actuelle3, sous réserve de certaines modifications. À l’issue de cette période, le groupe Air France/KLM récupérera les 51 % de droits de vote de KLM. Ainsi, pour la première fois en Europe, un État a perdu le contrôle de sa compagnie nationale. Dès lors, les compagnies nationales, considérées comme les porte-drapeaux des nations, sont en train de se fondre dans un ciel européen bientôt unique, qui assure leur survie. Sur la scène internationale, cette fusion a été présentée comme la réunion incontournable de firmes cherchant à atteindre une taille critique afin de répondre à un mouvement de fond : la construction du grand marché européen dont la mise en place s’appuie sur une forte croissance structurelle de leurs métiers sur le long terme. Parallèlement, cette fusion horizontale4 porte sur l’ensemble des segments de marché occupés par les deux compagnies. Elle correspond à des effets de synergie pour les trois métiers principaux du nouveau groupe à savoir : l’activité Passagers (77 % du chiffre d’affaires combiné), 3. Monter à 50,1 % des droits de vote de KLM si ses droits de trafic sont menacés. 4. Selon la classification de la Federal Trade Commission états-unienne. 162 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 le Cargo (14 %) et la Maintenance (4 %). Or, le débat peut être ouvert sur les raisons de cette fusion : est-elle due plutôt à un objectif de concentration ou à une recherche de synergies5 ? Il semblerait que les synergies de coûts constituent la justification de la logique économique de cette opération. Ceci s’explique au travers de plusieurs éléments dépendants de l’activité choisie. Dans le transport de passagers, ce rapprochement s’appuie, tout d’abord, sur la combinaison des deux places fortes que sont Paris et Amsterdam, permettant ainsi de renforcer l’alliance Skyteam. En effet, dans un contexte concurrentiel où les transporteurs européens se battent pour essayer de relâcher la contrainte des limitations aéroportuaires, Skyteam bénéficie d’un aéroport supplémentaire et contrôle ainsi sur le marché des vols intercontinentaux deux places-fortes sur quatre. Ce rapprochement concerne également la réalisation de synergies opérationnelles et managériales. Elles se traduisent par : • une coordination des ventes, qui prend appui sur l’utilisation par KLM du « yield management » d’Air France ; • une offre intégrée auprès des entreprises, des agences de voyages et des distributeurs ; • une coordination rationnelle de leurs réseaux (horaires, vols long-courrier au départ des deux plates-formes…) afin d’offrir plus de destinations et plus de correspondances aux passagers. Cela devrait conduire à une augmentation du nombre de passagers et à une amélioration des performances commerciales ; • une rationalisation des flottes (remplacement des Mc Douglas de KLM par des Airbus). Dans le cargo, Air France et KLM étant déjà deux grands opérateurs mondiaux, cette fusion leur permet de se placer en tête, devant leurs concurrents asiatiques, et de proposer ainsi une gamme de produits uniques, une offre commerciale coordonnée et un réseau à couverture mondiale. Enfin dans la maintenance, les deux compagnies déjà complémentaires souhaitent accentuer cet aspect en développant une politique conjointe d’achats et de gestion des stocks… 1.2 La fusion au cœur de la concentration du marché aérien La fusion Air France et KLM s’intègre dans les divers mouvements mondiaux de privatisation des compagnies aériennes et de regroupement des compagnies au sein d’alliances stratégiques globales. Le mouvement de consolidation des alliances s’est accéléré ces dernières années suite à une chaîne de causalité qui débute avec les attentats du 11 septembre 2001. 5. Théoriquement, le concept de synergie est associé à la théorie de l’efficience. Il permet la création de valeur, par le regroupement de synergies différentes. Mais empiriquement, les études menées sur le sujet sont peu probantes (cf. Meier & Schier, 2003). POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 163 En effet, les compagnies ont dû faire face à un nouveau problème : le renchérissement du coût des primes d’assurance et des mesures de sécurité, pour des montants estimés, par la Commission européenne, respectivement à 180 millions d’euros pour Air France et 145 millions d’euros pour KLM. De nombreuses compagnies ont alors été confrontées à de grandes difficultés financières, car les assureurs ont rapidement résilié leurs garanties de responsabilité civile applicables aux risques de guerre, avant de proposer une nouvelle couverture partielle, avec des primes nettement accrues. Malgré les aides octroyées par les États membres de la Communauté européenne, certaines compagnies n’ont pu retrouver leur rentabilité. Pour le groupe Air France le coût des assurances a atteint environ 91 millions d’euros pour l’exercice 2002-2003 contre 85 pour l’exercice 2001-2002, mais il a réussi à passer la crise, alors que KLM a dû supprimer 4 500 emplois et externaliser sa production informatique à IBM Global Services (Sénat, 2003). À cette première difficulté, issue des attentats du 11 septembre 2001, il faut noter une compensation presque équivalente du trafic des compagnies à « bas coûts » accentuant la concurrence. 1.3 La fusion Air France/KLM renforce l’alliance Skyteam La fusion Air France/KLM donne ainsi une forme capitalistique au vaste mouvement de consolidation européenne en cours dans le secteur et pose en substance la question de la capacité du ciel européen à se structurer, notamment autour des trois pôles formés par les grandes alliances stratégiques globales que sont: Star Alliance, Skyteam et oneworld. En effet, le groupe Air France/KLM se classe à la première place mondiale pour le chiffre d’affaires (avant Japan Airlines System), et à la troisième place mondiale pour le trafic, après American Airlines et United Airlines. Au niveau européen, il devance British Airways et Lufthansa. Ce rapprochement représente une étape majeure de la consolidation du secteur qui modifie les rapports de forces existant entre les alliances. En effet, au-delà des simples accords de coopération liant deux compagnies, les alliances se sont peu à peu imposées, ramifiées autour de pôles composés de compagnies de la triade. Les principaux bénéfices des réseaux globaux s’expriment par une réduction des dépenses et une meilleure efficacité atteinte grâce à la rationalisation de l’utilisation conjointe des ressources, créant ainsi des synergies et apportant une « valeur de réseau ». Les points forts qui les caractérisent sont les suivants : enregistrement unique, suivi automatique des bagages, partage des réseaux d’agences, gestion commune des réclamations des passagers, accroissement du nombre de destinations, alimentation en passagers des hubs respectifs, achats communs (avions, équipements, carburant, restauration, maintenance, assistance en escale…). Le principal inconvénient de ces alliances est qu’elles peuvent limiter la concurrence, réduisant à néant certains bénéfices, plus particulièrement dans le cas d’une position dominante collective sur certaines routes aériennes. 164 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Ces précisions apportées, quant au contexte dans lequel s’inscrit ce rapprochement, nous pouvons maintenant aborder les indicateurs de prédictibilité complétant les explications juridiques et financières de cette fusion. 2. ÉTUDE EMPIRIQUE À ce stade de l’analyse, la question qui se pose est la suivante : existe-t-il des indicateurs qui permettent de justifier le rapprochement entre ces deux compagnies ? Afin de répondre à cette question, notre investigation analysera les différents systèmes relationnels d’Air France et KLM. 2.1 La méthodologie Le cadre conceptuel, qui se prête le mieux à cette recherche, est celui de l’analyse des réseaux sociaux et la méthodologie privilégiée est celle de la théorie des graphes et des grands champs disciplinaires qui en usent depuis longtemps au travers de diverses applications6. Leurs méthodes permettent l’observation globale de réseaux à partir d’informations sur les contenus et les formes de relations entre chaque acteur d’un système social considéré (par exemple une alliance) ou entre plusieurs systèmes (entre alliances) ; ainsi que la mise en évidence des caractéristiques structurales des systèmes relationnels et l’identification des positions qu’occupent les acteurs. Un réseau est constitué d’unités (appelées nœuds ou sommets) et de liens qui les unissent (appelés arêtes ou arcs). Les sommets sont des acteurs (compagnies, alliances…), caractérisés par un ensemble d’attributs (nationalité des compagnies…), de comportements et par les interactions observables entre acteurs (relations d’affaires…), qui sont qualifiées par leur contenu, leur intensité et leur fréquence. Ces variables et indicateurs topologiques sont résumés dans le tableau 1. Le réseau social que nous abordons est composé de l’ensemble mondial des compagnies aériennes régulières. Les sous-groupes cohésifs (les cercles sociaux) auxquels nous nous intéressons sont les quatre alliances stratégiques globales existant actuellement. Ainsi, les réseaux et les cercles peuvent être qualifiés morphologiquement en premier lieu par des variables et des indicateurs de connectivité, de densité et de clustering (tableau 2). Toutefois, certains facteurs peuvent affecter la densité du réseau : le type de relations étudiées, la taille du réseau et l’accessibilité au réseau, c’est-à-dire la distance moyenne entre chacun des nœuds du réseau. Dans la toile que dessine un réseau, certains sommets ont plus de liens directs ou indirects que d’autres et plusieurs mesures de comparaison existent (tableau 3) : la centralité et la périphéralité traduisent la notion de firmes-pivots 6. Voir l’article « Quelques points de repères dans l’étude des réseaux par la théorie des graphes ». POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 165 Tableau 1. Mesures topologiques Variables topologiques Indicateurs topologiques 1) Importance du graphe 1) Nombre de sommets, nombre de compagnies = s Nombre d’arêtes, nombre de liens = a Nombre d’arêtes maximum théorique = s(s-1)/2 Distance géodésique = la plus petite longueur entre deux sommets Diamètre = la plus grande longueur entre deux sommets 2) Étendue de l’espace géographique 2) Représentativité des continents par la nationalité des compagnies 3) Caractéristiques des sommets 3) Nationalité et appartenance à une alliance 4) Valuation des arêtes 4) Relations d’affaires = Contrats de coopération interfirmes7 Tableau 2. Mesures morphologiques Variables morphologiques Indicateurs morphologiques 1) Indices liés à la fréquence 1) Nombre cyclomatique nombre de cycles du graphe : des cycles Indice m = a - s + 1 2) Connectivité 2) Mesure la densité et la variété des relations possibles, directes ou indirectes entre les sommets d’un graphe (indices liés à la fréquence des arêtes) - Indice de connectivité alpha : nombre de cycles / nombre maximum de cycles possibles - Indice de connectivité beta : nombre d’arêtes / nombre de sommets 3) Densité 3) Nombre d’arêtes / nombre maximum d’arêtes possible (densité appelée aussi Indice de connectivité gamma) 4) Clustering 4) C’est une mesure de l’existence de sous-groupes cohésifs. Plus le taux est élevé plus le réseau se rapproche d’un groupe unique (par exemple au sein d’une alliance), la notion de voisinage (exclusivité et rayonnement) et donc de coopétition. Il peut également exister plusieurs groupes dans un réseau qui ne sont liés entre eux que par un sommet appelé « pont » dont la suppression isole les deux groupes. Les graphes sont connexes car deux sommets quelconques (deux compagnies quelconques d’une même alliance) sont toujours reliés par une séquence d’arêtes (puisque par définition les compagnies sont membres exclusifs d’une alliance). Dans notre cas, les graphes sont non orientés c’est-à-dire que la directionnalité des liens n’a aucune incidence sur la capacité d’interprétation du réseau. En revanche, ils sont valués : la représentation des flux (des relations d’affaires) circulant entre les membres du réseau est prise en compte. Ils se matérialisent par des contrats de coopérations interfirmes permettant d’apprécier la création de valeur qui en est issue (tableau 4). 7. Voir pour le détail, le tableau « Les éléments des alliances aériennes » de Li (2000) dans le tableau 4. 166 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Tableau 3. Mesures de positionnement Variables de positionnement Indicateurs de positionnement 1) Centralité 1) Mesure le degré de centralité ou d’accessibilité des différents sommets à l’intérieur d’un graphe : - Indice de centralité d’un sommet : rapport entre la somme de toutes les distances de tous les sommets deux à deux et la somme des distances de ce sommet. Elle correspond à la notion de carrefour idem firme pivot - Indice de périphéralité d’un sommet : différence entre l’indice de centralité d’un sommet et l’indice de centralité du sommet le plus central dans le réseau. -> Ces deux mesures sont aussi calculées pour le réseau - un pont est l’unique intermédiaire entre deux sous-groupes 2) Exclusivité 2) Appartenance à une seule alliance 3) Rayonnement 3) Inverse de l’exclusivité. C’est le degré d’ouverture des membres d’une alliance et de l’alliance, dans sa globalité, au reste du réseau. C’est une mesure du voisinage. 4) Coopétition 4) Nombre d’interconnexions entre compagnies d’alliances différentes. Notons que l’étude d’un réseau à un moment donné est forcément limitée à l’image obtenue lors du recueil des données. Afin de tenir compte de la dimension temporelle de l’étude de ces réseaux, nous travaillerons sur trois dates 2002, 2003 et 2004. Les données recueillies sont issues de la base de données Airlines Business qui répertorie l’ensemble des accords conclus entre toutes les compagnies aériennes régulières mondiales (hors low costs). Par exemple, cette base a répertorié, en 2003, pour 150 compagnies aériennes, 550 accords de coopération passés avec d’autres compagnies (date de l’accord, type d’accord et destinations concernées…). Le protocole d’analyse que nous avons suivi provient des étapes classiques Tableau 4. Mesures relationnelles Variables relationnelles Indicateurs relationnels. Ces mesures expriment la cohésion relationnelle 1) Signification 1) Matérialisation de la commerciale valuation des arêtes par les types d’accords (cf. liste cicontre) 2) Création de valeur 2) Somme des valeurs des accords/ nb-arêtes 3) Signification 3) Prise de participation financière financière au capital 4) Performance 4) Part de marché exprimée en RPK Les éléments des alliances aériennes (Source : M. Li, 2000) C01- Capital (Prise de participation) C02- Programme joint de fidélisation C03- Partage de code C04- Groupe de places et dispositions spatiales C05- Marketing joint C06- Achat joint C07- Support au sol C08- Partage des dispositifs d’équipements aéroportuaires C09- Planification des vols C10- Accords globaux sur les coûts et les revenus C11- Franchise/royalties C12- Coopération en technologie de l’information C13- Opérations jointes C14- Accord commercial (services, vols, joint-ventures) POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? nécessaires à une application de la théorie des graphes : nous avons codifié l’ensemble de ces accords et construit pour chaque alliance donnée la matrice de connexité8, puis la matrice des distances, afin d’appliquer les différentes mesures qui caractérisent l’état structurel des réseaux observés. 2.2 Résultats9 et analyse 167 300 250 200 150 100 50 0 1999 2000 Total alliances 2001 2002 2003 Autres compagnies 2004 Monde Schéma 1. Nombre de compagnies aériennes régulières 25 20 15 La démarche que 10 nous avons choisie, pour 5 comprendre le rappro0 chement entre Air France 1999 2000 2001 2002 2003 2004 et KLM, suit une logique KLM/NW Qualiflyer Oneworld Skyteam Star alliance imbriquée : étude du réseau relationnel des Schéma 2. Part de marché des alliances stratégiques compagnies puis de l’alglobales(Passenger traffic world share (RPK) liance à laquelle elles appartiennent et enfin leurs réseaux d’affaires. Mais avant tout, voir, résumé en quelques chiffres, le contexte des alliances aériennes (schémas 1 et 2 et tableau 5). L’évolution de ce contexte est intéressante, dans le sens où elle nous permet d’apprécier la performance économique de la nouvelle alliance Skyteam (après l’adhésion de KLM). Cette appréciation s’effectue grâce un indicateur classique : l’évolution des parts de marché10. Elle consiste en une comparaison de l’évolution des parts de marché avant et après l’opération de croissance externe (de Skyteam et KLM/NW) avec des alliances équivalentes n’ayant pas opté pour ce type de développement durant la période analysée (Star Alliance et oneworld). Cet élément est essentiel car les études existant sur le sujet sont empreintes de contradictions. Par exemple, Ravenscraft et Scherer (1989) avancent que « plus la fusion est de type horizontal plus la performance de l’opération a de chances d’être élevée », alors que Meier et Schier (2003) estiment que « près de 50 % des opérations sont considérées comme des échecs ». Quant aux résultats de nos investigations, ils soulignent que la performance de l’alliance Skyteam « élargie » est importante et proche de la somme 8. Voir l’article « Quelques points de repères dans l'étude des réseaux par la théorie des graphes ». 9. Les résultats des mesures présentées dans la partie méthodologie sont en annexe 1. 10. En terme de trafic passager – la norme officielle étant en RPK- Revenue Passenger Kilometers 168 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Tableau 5. Les membres des alliances stratégiques globales en 2004 Alliance Membres des alliances Star Alliance (1997) Air Canada, Air New Zealand, All Nippon Airways, Asiana Airlines, Austrian Airlines, British Midland Airways, Lauda Air, LOT Polish Airlines, Lufthansa, Mexicana, SAS Scandinavian Airlines, Singapore Airlines, Spanair, Thai Airways, Tyrolean Air, United Airlines, Varig oneworld (1999) Aer Lingus, American Airlines, British Airways, Cathay Pacific Airways, Finnair, Iberia, Lan Chile, Qantas Aeromexico, Air France, Alitalia, Czech Airlines, Delta Airlines, Korean Air, Klm Royal Dutch Airlines, Continental Airlines, NorthWest Airlines Skyteam (2000) de celle des deux compagnies (voir annexe). Ainsi dans les lignes qui suivent, nous proposons d’apporter quelques explications à ces résultats, sans avoir recours à une étude des cours boursiers, tout simplement au regard de l’évolution de la morphologie et de la morphogenèse des alliances et de leurs membres. Nous procéderons par affinements successifs de la structure des compagnies à leur réseau d’affaires. La structure du réseau relationnel d’Air France et KLM. La représentation graphique des réseaux relationnels de KLM et d’Air France laisse à penser qu’ils sont semblables (schéma 3). Cependant, leurs réseaux apparaissent plus complémentaires que similaires : par exemple en Asie, Air France est liée aux compagnies China Eastern Airlines, Vietnam Airlines, Japan Airlines, Korean Air tandis que KLM est liée aux compagnies Surinam Airways et Malaysia Airlines. De même aux États-Unis, Air France est en relation avec Delta Airlines alors que KLM coopère avec Continental Airlines, Alaska Airlines et Northwest Airlines. Elles ont également en commun un ensemble de compagnies réparties sur tous les continents. En effet, l’articulation entre les systèmes relationnels d’Air France et de KLM se concrétise par un ensemble de relations qu’elles entretiennent avec les mêmes compagnies telles que les compagnies tchèques, russes, hongroises, chinoises… Ces relations sont de même ordre pour chaque compagnie (partages de codes, programmes conjoints de fidélisation, accords de communauté, partage des revenus et coûts), parfois plus poussées pour Air France qui a des liens privilégiés avec la compagnie tchèque, car elles sont membres de la même alliance. Nous pouvons donc déduire de ces premiers résultats que l’intégration s’est faite par rationalisation, puisque les ressources de deux entreprises ont été réorganisées autour d’un nouvel ensemble axé sur les économies de taille et l’uniformisation de pratiques commerciales. Le nouveau groupe peut donc en espérer des bénéfices à la fois en terme d’efficacité (compétences spécifiques) et d’efficience (gains de temps et de coûts). La structure des alliances Skyteam et KLM/Northwest. Afin de tenir compte de la sphère dans laquelle évoluent les compagnies Air France et KLM, nous prenons en considération la structure de Skyteam et KLM/Northwest (schéma 4). POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 169 Schéma 3. Air France/KLM 2004 Les alliances s’appréhendent comme un ensemble de relations et d’attributs entre compagnies de continents différents, qui par construction forment un réseau évolutif en fonction des comportements des membres. Cette contextualisation permet de positionner les compagnies au sein de leur réseau et d’estimer leur potentiel d’action. Ainsi, le nombre de liens entre les membres de Skyteam s’est accentué au cours de la période étudiée alors que ce n’est pas le cas de l’alliance KLM/NorthWest, qui affiche en revanche une diminution de ses liens. En 2003, KLM se retrouve pivot de son alliance suite à une détérioration des relations entre Continental Airlines et Northwest Airlines avec Kenya Airways. Malgré tout, la cohésion relationnelle entre KLM et les deux compagnies américaines se renforce. Toutefois, remarquons que plus la densité des enchevêtrements est dense, plus il est difficile d’aller au-delà dans l’interprétation de ces réseaux sans l’utilisation de mesures appropriées. Ainsi, l’étude de la connectivité11 et des « ponts » met en évidence l’existence ou l’inexistence de points de rupture qui contribuent à comprendre l’évolution des alliances. Cette étude révèle qu’en 2002 et 2003, Skyteam n’a pas de point de rupture. La réunion, d’un taux de clustering élevé, d’une longueur géodésique faible et d’un diamètre faible atteste de l’inexistence de compagnies « excentriques » et confirme que c’est un groupe fortement cohésif. À l’opposé, l’alliance KLM/NW 11. La connectivité au sein des alliances apparaît lorsque les réseaux étendus de chaque membre sont raccordés, engendrant ainsi des sous-systèmes intégrés. En pratique, la connexité qu’elle sous-tend se traduit par : une interconnexion informationnelle (informations qui circulent entre les membres et qui permettent de connaître en temps réel, les horaires, les disponibilités des vols des différents partenaires, les FFP, les codesharing…) et une interconnexion des infrastructures c’est-à-dire une connexité du réseau des correspondances autour des plaques tournantes aussi appelées « pivots ». 170 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Skyteam 2002 Skyteam 2004 KLM/NorthWest en 2002 KLM/NorthWest en 2003 Schéma 4. Exemple de l’évolution de Skyteam et KLM/NorthWest possède un point de rupture (en 2003), c’est-à-dire un « acteur critique » (KLM) dont le retrait de l’alliance implique la division du réseau en deux sous-groupes distincts. Cette constatation s’est révélée exacte en 2004 puisque, après la fusion Air France/ KLM, le sous-groupe le plus restreint est resté isolé tandis que le sous-groupe le plus important a rejoint, par l’intermédiaire de KLM, Skyteam sous des accords contractuels divers. De plus, la connexité démontre une forte activité au sein des alliances, fonction de leur ancienneté. Pour affiner l’étude morphologique, le positionnement des firmes s’avère intéressant. La centralité et la périphéralité des membres des alliances, mettent en lumière l’existence de « pivots ». Sachant que ces pivots sont associés à des aéroports principaux en Europe et hors Europe12, nous pensons qu’ils permettent de souligner deux approches stratégiques différentes selon les alliances. 12. Les aéroports principaux sont de véritables plaques tournantes, dont l’efficience est un facteur de succès pour les compagnies qui les exploitent et un atout qu’elles concèdent en adhérant à un réseau. Tant qu’un aéroport national demeure la principale plaque tournante d’une compagnie aérienne (comme c’est le cas pour les compagnies européennes), son emplacement sur le marché continental est un avantage concurrentiel qu’une compagnie peut exploiter pour devenir membre d’une alliance. L’alliance bénéficiera pleinement de cet apport, en se dotant d’un enchaînement logique des correspondances par le contrôle et l’harmonisation des créneaux horaires. Ainsi, toutes les alliances ont une emprise sur un aéroport principal, centre de gravité de tous leurs flux, constituant une barrière à la compétition au sein de cet aéroport. POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 171 La première stratégie que nous nommerons « multi-pivots » suit une logique de liens étroits entre les représentants de la triade Europe/États-Unis/Asie qui s’accentue au fil des années. Cette stratégie dénote une forte connectivité entre les compagnies membres, de sorte qu’il n’émerge pas de sous-groupes distincts mais plutôt un seul sous-groupe autonome au sein duquel les membres sont en relation d’échange au travers d’une répartition des dessertes sur l’ensemble des continents. La seconde stratégie, « mono-pivot », répond à un souci de centralisation avec une logique coopérative forte induisant des relations durables et étroites entre le pivot et les autres membres. Elle est caractéristique des compagnies plus anciennes ayant trouvé leur équilibre. Mais que confère une telle position centrale ? Nous pensons que c’est une proximité vis-à-vis des autres. Soit parce que cette compagnie est un intermédiaire physique incontournable au sein d’une alliance ou à l’interface de plusieurs alliances, soit parce qu’elle est plus active et possède de nombreuses possibilités de communication avec l’ensemble de son groupe. Notons que cette situation peut être temporisée. Si la densité des liens confère de l’importance à certaines compagnies, pour autant, la cohésion relationnelle peut être variable et relativiser cette position. En effet, seule la « valuation » des liens permet d’apprécier l’accentuation ou l’atténuation de la position centrale (tableau 5 pour la liste). Par exemple, posséder plusieurs codesharing avec le même partenaire n’a pas la même valeur que d’avoir créé une joint-venture. Les experts en transport aérien ont donc pour habitude de classer les différents types d’accords en fonction de leur importance afin de pondérer les relations (Li, 2000)13. Ainsi, l’alliance KLM/NW qui a le taux d’accords le plus faible a également l’indicateur de création de valeur le plus fort (schémas 5 et 6). Ceci s’explique par le fait que ses accords sont surtout des coopérations. La cohésion relationnelle entre les partenaires historiques de KLM/NW renforce donc son attrait pour Air France. De plus, la stratégie de Skyteam étant expansionniste, elle se complète fort bien avec celle de KLM/NW. Globalement, on constate également pour l’ensemble des alliances que les engagements dont les occurrences les plus fréquentes sont : le partage de code (unilatéral et bilatéral), les accords conjoints en marketing, les programmes conjoints de fidélisation et les opérations conjointes (joint-ventures, accords de coopérations, alliances stratégiques, services conjoints). Ainsi en associant l’étude des différentes mesures topologiques, morphologiques, de positionnement et relationnelles, nous pouvons en déduire plusieurs types de structuration possibles pour les alliances (tableau 6). Le voisinage des alliances Skyteam et KLM/Northwest. Le rôle potentiel d’une compagnie relativement à sa position dans la structure peut être déduit à la fois des relations qu’elle entretient ou non avec les autres et simultanément des relations que les autres entretiennent ou non entre elles. Nous proposons d’illustrer cette 13. Par exemple une joint venture vaut 14 points alors qu’un codesharing n’en vaut que 3(tableau 4). 172 160 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 double approche sur un continuum de voisinage 100 (schéma 7). Celui-ci 80 englobe trois niveaux 60 distincts qui s’identifient 40 selon des critères de 20 0 proximité : les membres 2002 2003 2004 d’une alliance constiStar alliance Oneworld Skyteam KLM/NW tuent le voisinage pertinent (espace P) alors que Schéma 5. Nombre d’accords de partenariats les partenaires les plus éloignés appartiennent 30 au voisinage de l’e25 commerce (espace E). 20 Quant à l’espace inter15 médiaire (G) c’est un 10 voisinage complexe où 5 s’enchevêtrent des liens 0 2002 2003 2004 géographiques, poliStaralliance Skyteam Oneworld KLM/NW tiques et stratégiques. Cette complexité Schéma 6. Indice de création de valeur des accords s’explique par une double caractéristique que possèdent les compagnies et qui rend la situation paradoxale. Elles sont à la fois le portedrapeau d’un pays, en quelque sorte son image de marque à l’extérieur de leur territoire national, et membres d’une alliance au sein de laquelle elles tentent de ne faire qu’une seule entité. Ainsi, dans un premier volet (associé à la nationalité de la compagnie), l’espace géopolitique est le résultat de relations historiques qui définissent les opportunités des relations présentes et futures entre compagnies. Dans un second volet (fonction de l’appartenance à une alliance), l’espace stratégique est lié au système de relations sociales proches ou lointaines des compagnies et reste dépendant des objectifs et des intérêts de chacune d’elles : c’est l’attraction culturelle. L’extension du voisinage des compagnies (G vers E) est un processus d’appropriation sociale. L’espace E est d’autant plus étendu et original que la compagnie recherche des alliances pour des activités hors transports : développement d’agences de voyages virtuelles, systèmes informatisés de réservation, partenariats… En un mot tout les acteurs se centrent sur le « client » qui est submergé d’offres. À cet égard, les compagnies considèrent qu’il vaut mieux s’allier avec les concurrents directs pour proposer au client le plus grand choix possible de tarifs et de possibilités de vols (schéma 8/les prises de participations financières, les créations conjointes et les partenariats des compagnies aériennes). 140 120 POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 173 Tableau 6. Cycle de vie des alliances par le prisme des réseaux sociaux Indicateurs Structuration quantitative Structuration médiane Structuration qualitative Connectivité Forte Moyenne Connexion Entre membres instigateurs Extension interne du projet Faible Extension externe Cohésion relationnelle Faible Forte Forte Indice de création de valeur Faible Forte Moyenne Phase du cycle de vie Émergence Stabilisation Croissance Explication Les liens au sein du réseau s’établissent en fonction des avantages mutuels recherchés par les membres et par l’instauration d’accords Intensification des relations avec ses partenaires historiques. Le réseau s’enrichit de nouveaux adeptes qui pas nécessairement d’affinités avec toutes les activités de tous les membres de l’alliance Exemple Star Alliance et KLM/NW à KLM/NW leurs débuts Skyteam Star Alliance 2005 Schéma 7. Exemple : les voisinages P et G de KLM/NW en 2003 174 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Agence de voyages traditionnelles + leur site web Agence de voyages virtuelles (travelocity expedia, trip.com…) Tours operators Compagnies aériennes CLIENT Systèmes Informatisés de Réservation spécialisés : hotels, auto, ferry…. Consortium de réservation des compagnies aériennes (Orbitz, Opodo, Zuji) Les GIS aériens et touristiques : Amadeus, Sabre, Wordspan, Galiléo Acheminement de la commande et prix du billet Source : Saglietto (2006) Partenariat Liés par des droits de propriétés Schéma 8. Stratégie du « customer centric » Après avoir défini le continuum de voisinage, nous pouvons dès à présent aborder sa dynamique, c’est-à-dire la structure des interactions qui l’animent au travers des interconnections de voisinage. L’étude du réseau d’affaires des alliances met en évidence que Skyteam est l’alliance la moins exclusive, car elle a passé de nombreux accords de coopération avec des membres d’alliances concurrentes. Dans Skyteam, les liens de coopétition sont développés principalement au travers d’Air France, compagnie très ouverte sur la création de réseaux d’affaires extérieurs. En revanche, Star Alliance entretient peu de relations de coopétition, cette tâche étant dévolue aux membres de la périphérie. Ainsi, en filigrane, se dessine pour Skyteam une transformation culturelle et processuelle des affaires (schéma 9) : l’ennemi d’hier devient l’allié d’aujourd’hui. Ceci permet à d’Aveni (1995) d’avancer que « non seulement la position stratégique d’une entreprise dépend de celle de la concurrence, mais il faut également l’étudier dans le contexte historique des interactions de ses concurrents ». L’histoire des relations entre partenaires joue ainsi un rôle clé, même si au premier plan de la formation des alliances on trouve un intérêt strictement mercantile. POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 175 Schéma 9. L’alliance Skyteam et son réseau d’affaires en 2004 3. DISCUSSION Cette étude de cas, nous permet d’aborder plus généralement l’importance d’une analyse en termes de réseaux sociaux pour étudier les fusions. En effet, quel que soit le secteur, plusieurs grandes catégories de fusion cohabitent au sein du paysage économique : les fusions concernant les marchés arrivés à maturité, les fusions sectorielles, complémentaires, de croissance et les fusions plus « politiques » visant à freiner un concurrent. Cependant, la configuration propre à chaque fusion empêche une modélisation scientifique universelle. Par exemple, dans le secteur aérien, les fusions sont à la fois sous le contrôle du droit européen de la concurrence et du droit aérien. Ces deux éléments pèsent fortement sur le devenir des compagnies aériennes. Rappelons que l’industrie du transport aérien fait partie de ce que l’on nomme les « industries de réseaux » et, qu’à ce titre, elle fut longtemps réglementée avant d’être ouverte à la concurrence. Or, l’Europe n’a pas encore achevé totalement son processus de libéralisation du ciel aérien, contrairement aux États-Unis. La situation est identique dans plusieurs secteurs, c’est-à-dire que l’on ne peut pas négliger la contrainte de l’environnement institutionnel et légal car les autorités de 176 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 régulation ou les autorités concurrentielles exercent un fort pouvoir qui limite le champ des opportunités de fusion. Nous pensons qu’une analyse des réseaux sociaux des acteurs d’une fusion, peut apporter un éclairage nouveau par rapport aux études classiques, d’autant plus que le nombre d’échecs est élevé les premières années, puisque deux à cinq ans sont au minimum nécessaires pour apprécier le succès ou l’échec d’une fusion. La réalité exige souvent de gérer dans l’urgence la mise en place d’une fusion, alors même qu’une intégration progressive est la clé de la réussite. Si les facteurs culturels, humains et financiers (création de valeur actionnariale) sont les dimensions traditionnellement prises en compte, elles ne dévoilent qu’une partie des informations nécessaires à la compréhension des liens d’intérêt qui existent entre les acteurs d’une fusion. Il ne faut pas oublier que les fusions sont avant tout fondées sur des liens d’intérêt et non sur des liens affectifs. L’analyse en termes de réseaux sociaux permet d’aller au-delà, puisqu’une fusion est aussi la réunion de deux organisations et de deux identités culturelles dont les synergies sont difficiles à apprécier, mais qui commencent à dévoiler leurs secrets au travers de cette approche. À partir de la grille de lecture suivante, nous pouvons apprécier l’apport d’une analyse des réseaux sociaux lors d’un projet de fusion (schéma 10). L’étude de la possibilité d’une fusion s’effectue au regard des conditions juridiques européennes ou internationales, c’est-à-dire à partir des mesures du marché pertinent (critères géographiques et critères sur les caractéristiques des produits), appréciation des effets d’une concentration par le calcul des parts de marché afin de déterminer la taille totale du marché et les parts des différents acteurs (chiffre d’affaires, nombre d’unités de la flotte…). Si l’environnement n’est pas favorable, les deux sociétés pourront toujours passer des contrats de coopération, mais la somme de ces contrats ne sera jamais équivalente à l’intégration obtenue par une fusion. Si l’environnement est favorable, les sociétés pourront préparer le document de notification à partir des études classiques mais aussi des résultats de l’analyse des réseaux d’affaires des sociétés afin d’apprécier plus précisément leur compatibilité. La notification peut être acceptée sans condition ou « sous réserve » de l’adoption de certaines mesures correctives, destinées à rétablir les conditions d’une concurrence effective et à éviter les distorsions résultant de la création ou du renforcement d’une position dominante par l’opération de concentration (par exemple Air France et KLM ont dû rendre des créneaux horaires). Enfin, l’étude de cas que nous avons présentée est aussi le reflet d’un autre type de décision : le choix d’entrer ou non dans une alliance stratégique, qui dépend de la compatibilité des réseaux d’affaires de l’alliance avec celui de la compagnie postulante. À cet égard, l’analyse en termes de réseaux sociaux contribue aussi à faire une prévision sur les différentes options possibles et sur la probabilité de réussite d’une nouvelle entrée dans une alliance. En partant de l’hypothèse que les mesures des réseaux sociaux sont des indicateurs permettant de « prédire » POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? Processus de fusion 177 Mesures des réseaux sociaux Démarrage de la fusion L'étude de l'environnement sectoriel, du droit aérien et du droit de la concurrence, permet-elle cette fusion ? Mesures morphologiques Mesures de positionnement Mesures relationnelles Préparation du document de notification à partir des études: - facteurs culturels , - facteurs humains - facteurs financiers (création de valeur actionnariale, EVA…) Notification acceptée sans condition ou Notification acceptée sous réserve de l'adoption de certaines mesures correctives Mesures topologiques Mesures de positionnement Mesures de positionnement Mesures relationnelles Schéma 10. Grille de lecture d’une fusion communautaire ou internationale et aide de l’analyse en termes de réseaux sociaux l’adhésion d’une nouvelle compagnie à une alliance, prenons plusieurs exemples dans l’actualité afin d’en tester la validité ou bien pour la réfuter. 1) La presse a annoncé récemment que la compagnie Japan Airlines intégrerait d’ici quelque temps l’alliance oneworld. Japan Airlines se trouve en grande difficulté actuellement bien qu’elle soit la première compagnie japonaise (ayant fusionné en 2004 avec Japan Air System), la neuvième au rang mondial avec près de 60 millions de passagers transportés. Elle souhaite réduire ses coûts et pour cela elle espère faire des économies en partageant avec les membres de oneworld les opérations de maintenance et d’assistance au sol mais aussi en participant à des achats communs. Le choix de Japan Airlines est-il purement politique c’est-à-dire qu’elle ne pouvait pas adhérer à Star Alliance parce que son principal concurrent national (All Nippon Airlines) y appartenait déjà ou a-t-elle réellement des affinités avec oneworld et qu’en est-il de ses relations avec Skyteam ? Effectuons une comparaison sur quelques indicateurs clés14, déjà utilisés dans l’étude de la fusion Air France/KLM (schéma 11 et tableau 7). D’après ces valeurs, Japan Airlines devait choisir entre rejoindre l’alliance avec laquelle elle a la plus grande création de valeur (Star Alliance) ou l’alliance 14. À partir des données 2005 de la revue Airline Business. 178 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Schéma 11. Le réseau d’affaires de Japan Airlines (2005) avec laquelle elle a le plus de contacts avec d’autres compagnies (oneworld). Il semble que la raison politique lui ait permis de trancher puisque oneworld n’a pas de compagnie asiatique. Cette adhésion offre à Japan Airlines une place centrale dans les relations intercontinentales vers l’Asie, lui permettant d’augmenter sa densité de réseau, jusqu’ici faible. De plus, elle ne pouvait pas stratégiquement rejoindre son concurrent national direct. Enfin, l’indice de connectivité Beta15 et le positionnement de la compagnie dans son cycle de vie, lui confèrent un profil similaire à celui de oneworld. 2) La presse a également annoncé l’adhésion prochaine d’Aeroflot à Skyteam. La compagnie aérienne russe, qui disposait d’un monopole à l’époque soviétique, cherche à reprendre le contrôle de cinq compagnies russes concurrentes. Parallèlement, elle a signé un protocole d’accord avec Skyteam, afin d’intégrer d’ici peu définitivement cette alliance. L’entrée d’Aeroflot « est un pari sur l’avenir ». L’alliance bénéficiera pleinement de cette adhésion lors de l’ouverture fin 2007 du terminal 3 15. Par rapport à la moyenne sur 4 ans (2002-2005), l’indice Beta moyen pour oneworld est égal à 3, pour Skyteam à 2,43 et pour Star Alliance à 4,3 alors que pour Japan Airlines il est égal à 2,8. POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 179 Tableau 7. Japan Airlines (2005) Nombre d’arêtes avec oneworld 5 Indice de création de valeur avec oneworld 2,8 Nombre d’arêtes avec Skyteam 4 Indice de création de valeur avec Skyteam 3,36 Nombre d’arêtes avec Star Alliance 2 Indice de création de valeur avec Star Alliance 7,5 Membre asiatique de oneworld 0 Indice de connectivité Beta du réseau Japan Airlines 2,8 Membre asiatique de Skyteam 1 Indice connectivité Gamma du réseau Japan Airlines 0,28 Membre asiatique de Star Alliance 1 Phase du cycle de vie croissance Tableau 8. Aeroflot (2005) Nombre d’arêtes avec oneworld 2 Indice de création de valeur avec oneworld 3 Nombre d’arêtes avec Skyteam 3 Indice de création de valeur avec Skyteam 3,3 Nombre d’arêtes avec Star Alliance 2 Indice de création de valeur avec Star Alliance 5 Membre de l’Est de oneworld 2 Indice connectivité Beta du réseau Aeroflot 2,46 Membre de l’Est de Skyteam 1 Indice connectivité Gamma du réseau Aeroflot 0,41 Membre de l’Est de Star Alliance 4 Phase du cycle de vie croissance de l’aéroport moscovite de Cheremetievo qui fournira un système de correspondances performant vers l’ensemble des pays de l’Est, tout en contrant son rival Star Alliance. Mais Aeroflot aurait-elle pu faire autrement ? (tableau 8). D’après ces valeurs, Aeroflot était face au même choix que Japan Airlines. Elle devait arbitrer entre rejoindre l’alliance avec laquelle elle a la plus grande création de valeur (Star Alliance) ou l’alliance avec laquelle elle a le plus de contacts avec d’autres compagnies et qui a le moins de compagnies des pays de l’Est (Skyteam). Le contexte appuie la solution Skyteam puisque qu’elle permet à Aeroflot de ne pas être en concurrence directe avec d’autres compagnies des pays de l’Est tout en lui permettant de devenir la plaque tournante de l’alliance dans cette région du monde. Elle pourra dés lors augmenter sa densité de réseau, jusqu’ici faible. Enfin, les indices de connectivité Beta16 et le positionnement de la compagnie dans son cycle de vie, lui confèrent un profil similaire à celui de Skyteam. CONCLUSION Pour conclure sur la fusion d’Air France et de KLM, nous avons montré les signes forts de la réussite de cette entente. Quels sont donc les éléments annonciateurs sur lesquels nous nous sommes appuyés et que l’on retiendra comme étant prédictibles de la fusion Air France/KLM ? Leurs réseaux sont plus complémentaires que similaires et les relations que les deux compagnies entretiennent avec leurs 16. Par rapport à la moyenne sur 4 ans (2002-2005), l’indice Beta moyen est pour oneworld égal à 3, pour Skyteam à 2,43 et pour Star Alliance à 4,3 alors que pour Aeroflot il est égal à 2,46. 180 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 partenaires sont souvent de même nature, expliquant que l’intégration se soit faite par rationalisation. En tant que fusion internationale on comprend qu’elle soit synonyme d’intégration, puisque les deux compagnies poursuivent plusieurs objectifs : création de la valeur pour l’actionnaire, création d’une identité commune qui vise à augmenter la chaîne de valeur, élaboration d’une nouvelle stratégie et concrétisation de nouveaux projets porteurs et propres à l’entité fusionnée. À ce propos, l’étude du réseau d’affaires de Skyteam et du rôle d’Air France au sein de celui-ci dévoile des éléments essentiels. Tout d’abord la stratégie de Skyteam et celle d’Air France sont liées, ensuite elles sont de nature expansionniste justifiant la recherche de partenaires extérieurs et l’importance des liens de coopétition caractéristiques de Skyteam et de la logique qu’elle suit. De plus la structuration médiane de l’alliance KLM/NW a contribué à la possibilité d’une fusion, qui aurait été plus complexe, avec un autre partenaire. Enfin, le fait que KLM soit un pont au sein de son alliance était bien le signe que si un seul élément devait être retiré de l’alliance KLM/NW, ce ne pouvait être que KLM. Dés lors, nous pouvons avancer que l’efficacité collective des réseaux des compagnies aériennes Air France et KLM, suite à leur fusion, sera plus à rechercher dans leur ouverture via des stratégies d’interactions que dans la similitude de l’ensemble de leurs stratégies actuelles. Ces stratégies sont confirmées en 2005, puisque le groupe Air France/KLM a augmenté sa capacité de 5,6 % (en RPK) sur le réseau long-courrier, notamment sur l’Asie, l’Amérique latine et le Moyen-Orient. Sur le réseau moyen-courrier international, sa capacité a augmenté de 6,3 % (en RPK), tirée par l’Europe de l’Est, l’Europe du Sud et l’Afrique du Nord. C’est ce que P. Bernand et J. Vincente (2000) traduisent dans les termes suivants : [ce sont] « les raisons qui font que les clusters refermés géographiquement sur eux-mêmes et fortement spécialisés, ont du mal à s’adapter aux modifications de l’environnement alors que les autres types de structures plus ouverts géographiquement possèdent de meilleures capacités d’adaptation et de réaction ». Or cette constatation s’adapte parfaitement à la fusion. KLM est bien un cluster fortement spécialisé (qui n’avait d’autre choix que de trouver un partenaire) et Air France est bien un cluster ouvert. Enfin, au travers de cette étude et de celle de Japan Airlines et Aeroflot, nous espérons avoir convaincu le lecteur de l’utilité d’une analyse en termes de réseaux sociaux. Nous pouvons donc en conclure que l’analyse en termes de réseaux sociaux est un outil complémentaire aux études juridiques et financières classiques, puisque c’est la seule approche possible pour appréhender le positionnement et le rôle des compagnies postulantes au sein de ces réseaux d’affaires. REMERCIEMENTS Tous mes remerciements aux rapports anonymes pour leurs remarques constructives. POUVAIT-ON PRÉDIRE LA FUSION AIR FRANCE/KLM ? 181 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Airline Business Review, « Survey of Airlines Alliances », July, 2002. Airline Business Review, « Survey of Airlines Alliances », July, 2003. Airline Business Review, « Survey of Airlines Alliances », July, 2004. D’AVENI R. (1995). L’Hyper compétition. Paris : Vuibert. BERTRAND P., VICENTE J. (2000). « Modèles décentralisés d’interactions et coexistence spatiale des modes de coordination ». Revue d’économie industrielle, n° 93, p. 95-116. DEGENNE A., FORSÉ M. (1997). Les Réseaux sociaux. Paris : Arman Colin. FAN T. et al. 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New York : Cambridge University Press. 182 NETCOM, vol. 20, n° 1-2, 2006 Annexe : Résultats Variables topologiques (2002-2003/2004) Date de création Star Alliance oneworld Skyteam NW/KLM 1997 1999 2000 1998-2003 Nombre de sommets 16/16/15 8/8/9 6/6/9 4/4/- Nombre d’arêtes 70/61/66 22/21/32 13/14/23 5/4/- Distance géodésique 1/1/1 1/1/1 1/1/1 1/1/0 Diamètre 2/3/2 1/2/2 2/2/2 2/2/0 Représentativité des continents 4/4/4 3/3/4 3/3/3 3/3/- Indice µ 55/46/52 15/14/24 8/9/15 2/1/- Indice α 0,029/0,03/0,03 0,071/0,07/0,05 0,121/0,12/0,06 0,33/0,33/- Indice β 4,385/3,81/4,40 2,75/2,62/3,56 2,167/2,33/2,56 1,250/1/- Indice δ (densité) 0,58/0,51/0,63 0,786/0,75/0,89 0,867/0,93/0,64 0,833/0,67/- Taux de clustering 0,89/0,79/0,79 0,91/0,83/0,91 0,93/0,96/0,80 0,92/0,92/- Indice de centralité du réseau 16,53/8,22/7,67 8,16/4,08/4,53 6,10/3,02/4,55 4,8/2,07/- 1/1/2 LUF/LUF/LUF +ACanada 3/1/3 Brit+AerL+Finnair/Brit/ Brit+AerL+AmericanA 3/4/1 AF+Delta+Alit/ AF+Delta+Korean+ CSA/Delta 2/1/KLM+NW/- -1,38/-2,54/-2,62 -0,52/-0,94/-0,47 -0,35/-0,18/-0,89 -0,29/-0,60/- 0,77/0,81/0,60 1/1,38/1,22 3/3/1,33 1/1/- Taux de coopétition 10/13/9 8/11/11 18/18/12 4/4/- Taux de création de valeur 9,07/12,54/10,03 6/8,33/5,84 8,54/9,43/11,70 23,40/27/- Participation financière intra alliance 5/5/6 3/3/3 2/2/5 0/0/6 Participation financière inter alliance 0/0/0 1/1/1 1/11/1 0/0/- 21,7/21,2/20,83 14,5/16,8/15,4 12/11,9/19,1 6/7,4/- Firme-Pivot Indice de périphéralité du réseau Taux d’exclusivité Part de marché