La grande distribution et le projet de rforme de la loi

Transcription

La grande distribution et le projet de rforme de la loi
XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
Les premiers résultats relatifs à l’application de la Loi
Dutreil en France : une approche contractuelle au travers du
cas d’une centrale d’achat de la grande distribution
alimentaire
Mevel Olivier, Maître de Conférences
Université de Bretagne Occidentale, Laboratoire ICI
IUT de BREST, Département GACO
Quai du Léon, 29600 MORLAIX
Tel : + 33 (0) 2 98 15 10 36
[email protected]
Leray Yvan, Maître de Conférences
Université de Bretagne Occidentale, Laboratoire ICI
IUT de BREST, Département GACO
Quai du Léon, 29600 MORLAIX
Tel : + 33 (0) 2 98 15 10 36
[email protected]
Résumé
En France, les relations entre producteurs et distributeurs ont, de longue date, nécessité un
équilibrage par l'intervention de la puissance publique. Le nouveau cadre réglementaire instauré
par la loi Dutreil du 2 août 2005 vise à faire baisser les prix pratiqués dans les grandes surfaces.
La loi cherche ainsi à clarifier la relation industrie-commerce. En cela, le dispositif Dutreil vient
renforcer le rôle des conditions générales de vente et redéfinir le seuil de revente à perte en
s’attachant, du moins en théorie, à limiter les pratiques abusives et tout particulièrement la
croissance des marges arrière.
Le papier aborde trois thèmes très liés : les effets des lois Galland et Dutreil sur les coûts de
transaction, sur l’évolution des prix et sur la reconfiguration de la chaîne de valeur. Nous avons
voulu vérifier l’impact de la nouvelle législation en menant directement des observations in vivo
sur le terrain dans le cadre d’une monographie exploratoire menée auprès d’une centrale d’achat
régionale de la grande distribution. Les principaux résultats ont trait au fait qu’il s’agit bien pour
le distributeur, dans une période transitoire, de conserver une part des acquis relatifs à l’ancienne
législation dont un volant de marge arrière suffisant pour assurer la rentabilité économique des
magasins tout en redistribuant l’autre partie par réintégration dans le prix de vente au
consommateur. Cette phase d’apprentissage s’avère d’autant plus nécessaire que la centrale
d’achat doit apprendre à gérer en terme de marges avant c’est à dire apprendre à négocier le prix
triple net dans des conditions suffisamment clairvoyantes pour s’assurer une rentabilité
convenable à partir de la nouvelle réglementation. Cependant, paradoxalement, les marges arrière
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du distributeur ont encore augmenté alors même que les marges globales de ce dernier ont
pourtant diminué. Si la loi Dutreil a partiellement rendu sa place au contrat en autorisant le
recours aux conditions particulières de vente (CPV) et autres services distincts, il n’en reste pas
moins que cette loi n’est sans doute qu’une nouvelle étape vers l’instauration d’une liberté totale
des prix en France.
Mots clés : Loi Dutreil, relation industrie-commerce, oligopole bilatéral à frange concurrentielle,
marge arrière, coûts de transaction, services distincts.
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INTRODUCTION
En l'espace de seulement quarante ans, la grande distribution a créé en France un secteur à la
puissance économique et financière considérable (Chain et Gian, 1998 ; Moatti, 2001). Après
avoir conquis l’ensemble du secteur de l’alimentation, la grande distribution entend dorénavant
conquérir le marché de la parapharmacie, de l’informatique, des fleurs, du vin, de la billetterie, de
l’Internet, du sport et même tout dernièrement celui de la téléphonie mobile. L’hégémonie des
grandes surfaces sur le commerce de détails1 s’est aussi accompagnée ces dernières années d’une
augmentation du niveau général des prix qui semble, de plus en plus, contrarier aujourd’hui non
seulement l’opinion publique mais aussi l’ensemble des acteurs de la relation industriecommerce.
Le format actuel régissant, aujourd’hui en France, les relations entre industrie et grande
distribution est régi par le contenu de la loi Dutreil du 2 août 2005 et par sa circulaire
d’application en date du 8 novembre 2005. C’est ce format impératif qui pose aujourd’hui
grandement question. En ne laissant plus le contenu du contrat à la liberté des parties, la loi
Galland avait déjà puissamment contribué à sanctuariser2 tout un secteur. La loi Dutreil a pour
premier objectif de sortir progressivement la relation industrie-commerce d'un encadrement des
prix qui a durablement généré une inflation élevée des produits de marques en grande
distribution. La question de recherche a trait au fait de comprendre quels sont les premiers
résultats tangibles, tant qualitatifs que quantitatifs, émergeant relativement à la mise en œuvre de
la loi Dutreil au sein d’une organisation de distribution.
Le papier aborde trois thèmes très liés : les effets des lois Galland et Dutreil sur les coûts de
transaction, sur l’évolution des prix ainsi que sur la reconfiguration de la chaîne de valeur. Notre
approche part d’abord d’un constat prévisible à savoir qu’un contexte législatif, juridique et
commercial explosif préfigure à la régulation des relations industrie-commerce en France (Partie
1). Il importe de décrire tous les aspects de la relation industrie-fournisseur marquée à la fois par
un interventionnisme historique du législateur et par la production de textes abondants. L’article
établit un constat de la situation juridique des entreprises ex ante la promulgation de la loi
Dutreil afin d’aider à circonscrire les conséquences inattendues générées par la loi Galland sur la
1
Selon l’INSEE, en France, plus de 70 % du commerce de détails était réalisé en 2006 en grande distribution
alimentaire (supermarchés, hypermarchés et grandes surfaces d’alimentation générale)
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En faire un espace inviolable, sacré. Mais pour le plus grand profit de quels acteurs ?
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qualité de la relation. Les aspects théoriques y sont abordés sous un angle juridique et
commercial tandis que la théorie des coûts de transaction soutient nos propos relativement à
l’établissement d’un point de vue économique et gestionnaire.
Nous présentons (Partie 2) le cas empirique d’une entreprise de grande distribution alimentaire,
une centrale régionale d’achat, fortement impliquée et engagée dans des négociations
commerciales avec des producteurs sur la période 2006/2007. Pour ce faire, nous avons resserré
notre champ d’expérimentation autour d’un travail monographique in vivo de cette organisation.
Si des coûts de transaction élevés continuent de grever au final le prix des produits, les
observations menées sur le terrain nous amènent également à dégager des résultats importants qui
soulignent le paradoxe qu’il y a à voir la loi Dutreil continuer à produire des effets amplificateurs
négatifs sur le consommateur final en terme d’évolution du niveau général des prix. En
conclusion, nous offrons quelques perspectives qui amènent à questionner sur l’évolution du
format juridique et législatif qui permettrait de déboucher rapidement sur la liberté totale des prix
en France.
PREMIERE PARTIE : UN CONTEXTE EXPLOSIF
Nous aborderons ici successivement les aspects historiques ayant conduit à l’adoption de la loi
nouvelle ainsi que certains aspects théoriques relevant plus directement de la relation industriegrande distribution alimentaire.
1- ASPECTS HISTORIQUES
Le contexte économique dans lequel baignent les relations industrie/commerce reste avant tout
porteur d’une forte complexité juridique. On ne peut pas envisager tirer un premier bilan de la loi
Dutreil sans évoquer les différentes circulaires, décrets et lois qui ont historiquement structuré les
relations industrie-commerce.
1.1- Un interventionnisme historique marqué par la production de textes abondants
De l'instauration du contrôle des prix3 en juin 1945 à la circulaire Fontanet du 31 mars 1960
sanctionnant le refus de vente, en passant par l’ordonnance Balladur du 1er décembre 1986
supprimant le contrôle des prix, et jusqu’aux lois Dutreil I et II, le droit français de la concurrence
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le 30 juin 1945 exactement
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a toujours suscité une importante production législative ou administrative. Le canal productiondistribution-consommation en est à sa septième réforme depuis 1986.
En France, pendant des décennies, l’encadrement des prix a donc toujours été imposé à la grande
distribution. En effet, l’ordonnance du 1er décembre 1986 vise déjà à réguler les conditions de
l'échange commercial entre les deux parties et affirme la liberté des prix déterminés par le jeu de
la concurrence tout en reconnaissant l'existence de secteurs ou de zones où la concurrence est
limitée. Aujourd’hui, les prix ne sont toujours pas libres. La meilleure preuve en est que
l’ordonnance Balladur de 1986, qui a instauré la liberté des prix, n’a tenu en fait que dix ans
avant que le législateur ne lui substitue brusquement la loi Galland. Traditionnellement en
France, l’environnement économique du secteur du commerce de détail a donc toujours été
régulé et dominé par le législateur mais aussi par le pouvoir exécutif. Au fil des années, les lois et
circulaires gouvernementales se sont empilées (loi Royer, loi Raffarin4 en juin 1996, loi Galland
en janvier 1997, loi Dutreil I en 2001, circulaire Dutreil en 2003, loi Dutreil II en 2005).
Un exemple de production administrative récente concerne la circulaire Dutreil, entrée en vigueur
au début de l’année 2003, qui entendait rapidement mettre un terme à la dérive continuelle des
marges arrière. Ces marges arrière5 qui sont devenues de facto, depuis la promulgation de la loi
Galland, la principale ressource financière pour ne pas dire l’unique source de bénéfices des
distributeurs. Ces derniers ont rapidement renoncé aux marges officielles (les marges6 avant) sur
la vente des produits de grandes marques, revendus quasiment au prix net facturé, le seuil de
revente à perte (SRP), en dessous duquel la loi Galland interdit de revendre. Avec la mise en
oeuvre de la loi Galland, les marges arrière ont augmenté parallèlement aux tarifs présentés par
les industriels dans leurs conditions générales de vente (C.G.V). L’existence des primes de
référencement et donc des marges arrière n'est pas anormale en elle-même lorsqu’il s'agit de la
rétribution d'un véritable service. Le problème étant que depuis la promulgation de la loi Galland
4
La loi Raffarin du 5 juillet 1996 dite « loi sur le développement et la promotion du commerce et de l'artisanat » a
aménagé un numerus clausus pour contrecarrer le développement anarchique des enseignes de grande distribution.
5
Les marges arrière sont les montants versés par les fournisseurs aux distributeurs au titre de la coopération
commerciale en échange d’avantages marketing pour une mise en avant de leurs produits en magasins (campagnes
d'affichage, distribution de prospectus, mise en valeur du produit en tête de gondole, animation des étalages,
publicité radio, fêtes et anniversaires,…). Ces marges arrières peuvent osciller entre 20 % et 80 % du prix de vente
hors taxe du produit.
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La marge avant est donc la différence entre le prix de vente d’un produit au consommateur et le prix net facturé par
le fournisseur au distributeur après différentes remises (remise sur volume, remise de gammes,…).
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en 1996, cette pratique connaît une véritable dérive, puisque les marges arrière atteignent en
moyenne aujourd’hui 35 % du prix d’achat, cas unique en Europe (Ferrier, 2007).
Dès lors, toutes les conditions sont réunies pour que les prix du commerce de détails flambent en
France, car les fournisseurs tendent à augmenter leurs propres prix pour pouvoir verser les primes
de référencement. Et à leur tour, les distributeurs doivent répercuter ces hausses pour éviter la
vente à perte. Rien donc d’étonnant à ce que ces pratiques qui érodent le pouvoir d’achat du
consommateur (-0,5% par unité de consommation en 2003) finissent par enfin interpeller le
gouvernement français. L’écart de prix entre les différents pays européens est de ce point de vue
révélateur et « les Français payent plus cher leurs produits de grandes marques que leurs voisins
européens » (Chatel, 2005). Le rapport Chatel soulignant en outre, selon des sources ILEC, que
les marges arrière n’ont cessé d’augmenter ces dernières années : la coopération commerciale
représentait 21.9 % du prix net facturé (tous produits de grande consommation de marque
nationale) en 1998, 30.7 % en 2002 et 32 % en 2003. Cette situation ne peut pas demeurer sans
conséquence sur l’ensemble des acteurs du canal. Lorsqu’un distributeur exige de son fournisseur
une hausse des marges arrière, celui-ci doit augmenter d’autant son prix sur facture pour
maintenir sa propre marge : le seuil de revente à perte et le prix pour le consommateur
augmentant d’autant (Rey et Tirole, 2000). Ce phénomène nourrit la mécanique inflationniste et
la hausse continuelle des prix des grandes marques constatées depuis 1997. Lors de la table ronde
ministérielle du 2 juin 2004, réunie sous l’égide du Ministre des Finances, dans le cadre d’un
projet d’accord global sur les prix, les industriels7 se voient priés de baisser leurs tarifs à
destination des distributeurs alors que ces derniers se voient aussi priés dans le même temps de
répercuter immédiatement les baisses de tarifs sur les consommateurs dans des proportions allant
de 3 % du prix d’achat à court terme à 5 % à moyen terme.
Les institutions nationales ont démontré, pendant ces trente dernières années, leur volonté de
réguler un secteur d’activité réputé sensible mais, ce faisant, ces mêmes institutions sont
directement à la source d’un puissant bruit de fond qui perturbe le cycle respiratoire de
l’économie du pays. En ce sens, l’instabilité juridique institutionnelle reste une source chronique
et critique d’inefficacité économique parce qu’elle complique la reconfiguration des processus et
la modulation de la chaîne de valeur des industriels et des distributeurs.
7
Représentés par des lobbies tels que l’institut de liaisons et d’études des industries de consommation (ILEC) et
l’association nationale des industries alimentaires (ANIA).
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1.2- La situation juridique ex ante la promulgation de la loi Dutreil : l’impact de la loi
Galland sur la grande distribution
Pour comprendre l’impact de la loi Galland sur les relations industrie/commerce, il faut bien
mesurer ce qu’a représenté, hier, la loi Galland pour les entreprises de ces deux secteurs. La loi
Galland a profondément modifié l’environnement du distributeur et celui du producteur.
La loi du 1er juillet 1996, relative à la loyauté et l’équilibre des relations commerciales, dite « loi
Galland », du nom d’Yves Galland, alors ministre délégué aux finances du gouvernement Juppé,
a modifié très substantiellement l’ordonnance Balladur de décembre 1986 qui avait ouvert le
monde de la distribution à la concurrence. La loi cherchait à lutter contre le déséquilibre
économique en faveur des distributeurs qui s'amplifiait et contre les pratiques abusives à
l'encontre des fournisseurs qui se multipliaient. Le législateur a donc renforcé la protection des
fournisseurs face aux grands distributeurs moins nombreux et plus puissants en instaurant la
notion de « prix abusivement bas8 » dans son article 5 et notamment afin de lutter contre les prix
« prédateurs » pratiqués par les grandes surfaces tout en précisant par ailleurs la notion d’abus de
position dominante. Dans son article 11, la loi a également interdit la revente à perte9.
La loi Galland a aussi considérablement réduit le champ de la négociation entre les parties en
introduisant une distinction formelle entre les réductions de prix et la coopération commerciale
puisque la rémunération des services au titre de la coopération commerciale est exclue du calcul
du seuil de revente à perte. La coopération commerciale est négociée et facturée par les
distributeurs, au titre de prestations réelles ou supposées, telles que la présence des produits dans
les catalogues, les promotions, la mise en avant des articles en tête de gondole. La coopération
commerciale constitue donc l’essentiel des marges arrière des distributeurs qui ne peuvent
cependant pas l’utiliser pour baisser les prix.
8
« Sont prohibées les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport
aux coûts de production, de transformation et de commercialisation ».
9
« Le fait, pour un commerçant, de revendre ou d’annoncer la revente d’un produit en l’état à un prix inférieur à son
prix d’achat effectif est puni de 500.000 francs d’amende…Le prix d’achat effectif est le prix unitaire figurant sur la
facture ».
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Seules les réductions de prix, proposées dans le cadre des conditions générales de vente (CGV)
dites impératives car établies unilatéralement par les fournisseurs en accord avec la loi, peuvent
être intégralement reportées sur la facture du distributeur. Ces réductions de prix peuvent être
répercutées aux consommateurs parce que l’industriel en conserve la maîtrise. Ce faisant, c’est
aussi l’ensemble de son canal marketing que l’industriel parvient à contrôler par l’entremise de la
loi. La loi Galland fixe impérativement le seuil de revente à perte à partir du prix de cession porté
par l’industriel sur la facture émise à destination du distributeur. En conséquence, les
distributeurs ne peuvent pas afficher des prix de vente à destination des consommateurs qui
soient inférieurs aux prix officiels des industriels.
Le SRP était calculé au prix pied de facture (tarif diminué des remises promotionnelles et des
remises sur facture) de l'industriel. La loi Galland imposait donc aux fournisseurs de publier un
tarif officiel valable pour tous les distributeurs (voir ci-dessous le modèle d’application de la loi
Galland au coût d’achat réel d’un produit sur la période 1996/2005). Les produits les plus
consommés ont fini par être vendus au même prix dans toutes les enseignes, avec une marge
avant de zéro pour le distributeur. De l’avis des industriels ou des distributeurs, l'ensemble du
secteur s'était fait une spécialité de contourner la loi pour développer les marges au détriment du
consommateur (Mevel, 2004). En raison du phénomène de rareté des linéaires organisé par la loi
Raffarin et devant l'accroissement du nombre de produits mis sur le marché chaque année par les
industriels, ces derniers ont été tentés de gonfler les marges arrière offertes aux distributeurs afin
d’assurer la présence de leurs produits en magasin. Les marges arrière s’envolant, les industriels
ont augmenté leurs prix pour maintenir leur rentabilité, à tel point que les prix à la grande
consommation avaient connu une très forte inflation en France, bien supérieure à celle de nos
voisins européens.
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Application de la loi Galland au coût d’achat réel
produit (1996-2005)
: 5 tracts = 15%, 10 têtes de gondole = 10%,
• Coopération
l
communications
radio = 5%, Bons d’achat et tickets Leclerc =
• Ristourne pour bon : 1%
: 2%
• Ristourne
d
: 35% du prix net
des marges
• Total
détachable
ou
hors
facture
lingettes
: 10
ƒ Prix unitaire net
Remise
sur
assortiment
2%
ƒ
ƒ Remise sur entrepôt :- 1,5%
- 10%
ƒ Remise promotion
Prix net net : 8,68
SRP : 8,68
non
détachable
ou
sur
facture
Qui est responsable ? Au sens du rapport Canivet (2004), trois éléments se combinent pour
expliquer la hausse des prix : un degré élevé de concentration de la grande distribution, un
environnement réglementaire très protecteur et la hausse de la coopération commerciale.
Sommairement, industriels et distributeurs se sont entendus pour partager la rente. Aujourd’hui
encore, les acteurs du secteur, qu’ils soient industriels, distributeurs ou pouvoirs publics,
continuent de se renvoyer la balle en matière de responsabilité dans la hausse continuelle des prix
des produits depuis 1997. Pour autant, c’est la loi Galland qui a empêché les grandes surfaces
françaises de revendre en dessous du prix d’achat officiel mais qui leur a aussi refusé la
possibilité de répercuter les marges arrière sur le prix du produit exposé en magasins. Les marges
arrière vont donc directement dans les caisses des enseignes sous l’effet de la loi. Afin de
retrouver une compétitivité-prix vis à vis des enseignes de hard discount, certaines grandes
enseignes ont demandé depuis longtemps la suppression de la loi Galland et la régularisation de
la pratique des marges arrière. À l'inverse, de nombreux producteurs et industriels sont restés
favorables à un durcissement de cette loi et à la suppression des marges arrière. Il convient alors,
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pour la clarté de notre propos, de bien analyser la portée des aspects théoriques relevant des
rapports industrie-commerce.
2- ASPECTS THEORIQUES DES RAPPORTS INDUSTRIE-GRANDE DISTRIBUTION
Nous envisageons ici d’analyser les rapports industrie-commerce sous un angle transactionnel
mais aussi d’un point de vue économique et gestionnaire.
2.1- D’un point de vue juridique et commercial
Deux philosophies politiques s’affrontent quant il s’agit d’envisager les relations entre les
industriels et la grande distribution alimentaire : la liberté des prix sous réserve des pratiques
abusives et déloyales telle que la discrimination et la réglementation des prix au nom de l’ordre
public économique. L’état est alors garant de l’ordre public économique et, à ce titre, il
réglemente l’économie car il estime que les partenaires, en l’état des relations industriecommerce, ne font pas un bon usage de leur liberté. Cette philosophie légitimant à son tour
l’interventionnisme étatique. Ces deux philosophies s’épanouissent, d’une part, au travers du
modèle américain de distribution mais aussi au travers du modèle français.
En France, la loi et les circulaires d’application définissent et règlent, non seulement le prix des
produits et des marchandises, mais aussi le degré de l’intensité concurrentielle que le législateur
juge acceptable d’instituer entre producteurs et distributeurs. C’est à l’Etat et au législateur qu’il
revient de fixer les règles du jeu au travers de la construction d’un SRP qui est alors envisagé
comme un levier juridique et financier ex post au service du contrôle de la loi. Dès lors, la
définition et la fixation du niveau de seuil du SRP devient un enjeu critique pour tous les acteurs
des branches de l’industrie et du commerce. A grands traits, cela signifie que la définition et la
fixation du SRP peuvent cristalliser les rancœurs des grands acteurs du commerce de détail dès
lors qu’il fait peser la charge juridique de la preuve sur le distributeur. Depuis l’introduction de la
loi Galland en 1997, force est de constater que le mode de calcul du SRP transfère l’incertitude et
son corollaire, le risque juridique, sur le seul distributeur. La loi Galland, en généralisant un SRP
hors marge arrière, n’a pas fait disparaître de facto la nouvelle science comptable très créative
apparue au sein des organisations.
Cette comptabilité créative, communément appelée « facturologie » par les professionnels des
deux secteurs, s’est progressivement imposée à partir des années 90 pour justifier de l’ensemble
des avantages consentis par l’industriel au distributeur hors facture. De par les conséquences
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mécaniques qu’entraînent sa mise en œuvre juridique, l’application législative du concept de SRP
aux seules relations industrie/commerce consacre la primauté de la loi sur la négociation et le
contrat. Le législateur et la loi ont ainsi quasi-institutionnalisé la pratique des marges arrière en
France.
Aux Etats-Unis, le législateur a choisi de renverser la perspective juridique puisque la charge de
la preuve incombe à l’industriel et non plus au distributeur. La loi fédérale, le Robinson Patman
Act (1936), vient consacrer la tolérance zéro en matière de politique de discrimination tarifaire
menée par les industriels (Davidson et al., 1988). Tous les distributeurs, grands ou petits, intégrés
ou indépendants, achètent au même prix. Le principe de non-discrimination tarifaire a été élevé
au rang de dogme aussi bien par les industriels que par les distributeurs eux-mêmes. Le nonrespect de la loi, matérialisé par le comportement opportuniste d’un acteur industriel, restant
sévèrement sanctionné par les tribunaux fédéraux. En l’état, les seules discriminations tolérables
ne peuvent être que des contreparties offertes en réponse à une proposition portant sur des
éléments tangibles et mesurables par les parties prenantes au contrat tels que des éléments
logistiques par exemple. Aux Etats-Unis, les marges arrière sont donc très marginales par rapport
à la situation que nous connaissons en France.
En France, la relation industrie-commerce s’apparente à une situation d’oligopole bilatérale à
frange concurrentielle entre un ensemble d’une trentaine de grands producteurs et six grands
distributeurs tous liés par les contraintes de rareté des linéaires imposée par la loi Raffarin (1996).
Nous distinguons seulement une frange concurrentielle au sein du marché, c’est à dire, qu’il n’y a
pas de véritable concurrence sur les prix entre les six grandes enseignes de distribution mais
ponctuellement des opérations commerciales engagées concomitamment par les producteurs et
les distributeurs à destination des consommateurs.
La loi Dutreil se veut régulatrice et normative de la relation industrie-commerce. Le pouvoir
exécutif a construit un bouclier juridique susceptible d’autoriser la baisse des prix des produits de
grandes marques tout en préservant les PME dans leurs rapports, jugés déséquilibrés10, avec la
grande distribution. Si légalement en France, les prix sont libres et les ententes interdites, l’état
vient pourtant s’immiscer dans le duel permanent qui oppose les industriels aux grandes surfaces.
En autorisant la réintégration dans le SRP d’une partie des avantages acquis lors de la négociation
10
En s’exprimant sur les pratiques des marges arrière par la grande distribution, le Ministre des Finances, Nicolas
Sarkozy, déclare « je voudrais qu’on résolve ce problème » (la Tribune du 12/04/2004).
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dans la limite de 40% de leur montant lorsqu’ils sont supérieurs à 20% du prix net facturé, la loi,
par effet mécanique, tente d’abaisser le niveau du seuil de revente à perte tel qu’il est défini dans
la loi Galland (voir ci-dessous le modèle d’application de la loi Dutreil au coût d’achat réel d’un
produit en 2006 pendant la phase transitoire). Ce faisant, le législateur souhaite faire abandonner
par les industriels et les distributeurs le principe de « facturologie » (généralisé par la loi
Galland).
Application de la loi Dutreil au coût d’achat réel d’un
produit en 2006 (phase transitoire)
• Total des marges arrière :
Au moins 20% du prix net facturé dans la
limite de 40% du montant des marges arrière
• Dans notre cas les marge arrière représentent 35% du prix net facturé
• La part des avantages financiers excèdant 20% du prix net facturé est
réintégrable
9(35% - 20%) = 15% soit 1,5 euros
• Le montant minorant le SRP ne peut excéder 40% des marges arrière
9(3,5*40%) soit 1,4 euros
détachable
ou
hors
facture
lingettes
ƒ Prix unitaire net
ƒ Remise sur assortiment
ƒ Remise sur entrepôt
ƒ Remise promotion
: 10 euros
: - 2%
: - 1,5%
: - 10%
Prix net net : 8,68 euros
Marge arrière réintégrable : 1,4 euros
Prix net net net facturé
: 7,28 euros
SRP : 7,28 euros
non
détachable
ou
sur
facture
A compter du 1er janvier 2007, le nouveau dispositif retient que le montant des marges arrière
excédant 15% du prix net facturé est réintégrable dans le le SRP11. Les marges arrière sont
progressivement plafonnées puisque au-delà d'un certain seuil, elles peuvent venir en déduction
du prix de revente (voir ci-dessous le modèle d’application de la loi Dutreil au coût d’achat réel
d’un produit en 2007). Le SRP Dutreil ne ramène donc pas le seuil de revente à perte au niveau
du prix dit « triple net »: net de ristourne, net de rabais et net de toutes les marges arrière comme
l’envisageait pourtant le rapport établi par la commission dirigée par le Président de la Cour de
Cassation, Guy Canivet (2004). L'idée centrale du rapport Canivet étant alors de ramener le seuil
11
Si un industriel facture au tarif net de remise de 100 en accordant 30 % de marges arrière, le seuil de revente à
perte sera de 100 - (30 - 15) = 85. Avant, le SRP Galland était seulement de 100.
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de revente à perte au niveau du prix dit « triple net »: net de ristourne, net de rabais et net de
marges arrière. Cela signifie, pour les distributeurs, avoir la possibilité de répercuter les marges
arrière sur les prix de vente des produits afin d’en faire bénéficier les consommateurs.
La loi Dutreil redonne de la liberté aux distributeurs tout en leur attribuant la responsabilité
corrélative de faire baisse les prix de vente aux consommateurs. Ce nouveau mode de calcul du
SRP va donc conditionner les tactiques commerciales des industriels et des distributeurs.
Application de la loi Dutreil au coût d’achat réel d’un
produit en 2007
• Total des marges arrière : 35 % du prix net facturé
• Le montant des marges arrière excédant 15% du prix net facturé est
réintégrable
9(35% -15%) = 20% soit 2 euros
détachable
ou
hors
facture
lingettes
ƒ Prix unitaire net
ƒ Remise sur assortiment
ƒ Remise sur entrepôt
ƒ Remise promotion
: 10 euros
: - 2%
: - 1,5%
: - 10%
Prix net net : 8,68 euros
Marge arrière réintégrable : 2 euros
Prix net net net facturé
: 6,68 euros
SRP : 6,68 euros
non
détachable
ou
sur
facture
En 2006 et pour la période de transition qui s’ouvre vers le triple net, le but du législateur est de
limiter la baisse des prix (d’où la double limite des 20/40). On réincorpore mais pas trop. En
2007, le législateur plafonne les marges arrière à 15% du prix net facturé. On réincorpore un peu
plus. La seule question qui se pose finalement est de savoir si l’adoption du triple net Dutreil
préfigure l’abandon de l’interdiction de la revente à perte à terme. Dans ces conditions, seule la
concurrence entre les grandes enseignes permettrait d’éviter un gonflement des marges des
distributeurs et une baisse des prix. C’est le scénario idéal qui a guidé le législateur et les
pouvoirs publics jusqu’à aujourd’hui.
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
2.2- D’un point de vue économique et gestionnaire
Du fait d’un faible nombre de distributeurs (6 super centrale d’achat) et de producteurs (une
trentaine de multinationale) et puisque l’information n’est pas transparente sur le marché, la
concurrence organisée autour de la seule discrimination par les prix demeure nécessairement
imparfaite (Robinson, 1975). Du point de vue des sciences de gestion, la théorie des coûts de
transaction mais aussi la théorie de la dépendance des ressources (Baudry, 2003) favorisent la
conceptualisation d’une forme d’interdépendance entre les industriels et les distributeurs. La
bibliographie (Freeman, 1984; Coriat et Wenstein, 1995; Charreaux et Desbrières, 1998) explique
cette forme d’interdépendance entre les parties au travers d’un processus d’affrontement ou de
coopération entre les firmes. L’approche contractuelle analyse la relation industrie-commerce
comme une évolution de la gouvernance d’entreprise correspondant à un déclin du modèle
actionnarial (shareholder model) au profit d’un modèle partenarial (stakeholder model).
Les théories de la firme qui participent de l’approche contractuelle, en l’occurrence la Théorie
des droits de propriété, la Théorie de l’agence et la Théorie des coûts de transaction, se focalisent
sur la dimension institutionnelle de l’entreprise, en réduisant les rapports sociaux à de simples
rapports (bilatéraux) contractuels, de marchandage (économique, politique et social) (Mitchell et
al., 1997). L’approche par les coûts de transaction permet de comprendre l’absence de tout
processus d’intégration verticale aujourd’hui à l’œuvre entre les industriels et la grande
distribution (Coase, 1937). La relation industrie-commerce peut être utilement analysée à l’aune
des théories contractuelles puisque le cadre d’analyse reste en effet centré sur l’échange et que la
Théorie des coûts de transaction s’intéresse peu à la production (Freeman et Evan, 1990).
Depuis les tout premiers pas de la grande distribution en 194912, le marché est resté le lieu
principal de la réalisation des transactions sachant que la coordination des échanges y est assurée
par un mécanisme de prix. A l’origine, les grands distributeurs se sont affrontés à partir d’un
mode de compétition qui visait à rechercher la différenciation au travers de cinq critères : la
politique de prix, la structure de l’assortiment, la localisation des points de vente, la politique de
communication et la politique de services (Thil, 1983; Jalais, Orsoni et Fady, 1994). La relation
industrie-commerce a donc échappé à l’intégration des chaînes de valeur par un seul et même
12
Edouard Leclerc ouvre à Landerneau
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
entrepreneur assurant la coordination des activités au sein de la firme sans intervention d’un
mécanisme de prix (Colla et Dupuis, 1997).
L’utilisation d’un mécanisme de prix reproduit à volonté un coût non négligeable : le coût de
transaction (Williamson, 1975). Effectuer des transactions entraîne des coûts et les coûts de
transaction « correspondent aux coûts de fonctionnement du système, c’est à dire aux coûts de
coordination et de motivation » (Milgrom et Roberts, 1999). Ces auteurs caractérisent les
transactions en distinguant cinq critères : la spécificité des investissements nécessaires pour
aboutir à la transaction, la fréquence et la durée des transactions de même type, la complexité et
l’incertitude quant à la performance requise, la difficulté de mesurer la performance de la
transaction et enfin la connexité entre une transaction et des transactions tierces. Un actif
spécifique est un investissement spécifique réalisé dans le but de satisfaire à un contrat. Les
transactions nécessitant des actifs spécifiques ne se font pas sans un contrat protégeant les
investisseurs contre la résolution de ce dernier ou contre une renégociation opportuniste des
termes de la relation. Selon notre hypothèse, dans un environnement aussi contractuelle et
formaliste que celui présidant à la relation industrie-commerce, l’application de la loi Dutreil est
potentiellement porteuse d’une modification des coûts de coordination et des coûts de motivation
supportés par les firmes. C’est en ce sens qu’il nous apparaît comme intéressant de mobiliser la
théorie contractuelle afin d’analyser plus finement la relation producteurs-distributeurs et tout
particulièrement afin de comprendre les tenants de l’évolution de cette relation sous l’impact de
la loi nouvelle.
Dans la relation, l’importance des coûts de transaction s’explique principalement par les besoins
des distributeurs de réunir l’information disponible avant toute signature d’un contrat de
référencement à l’occasion de négociations coûteuses pour chacune des parties. On comprend
aussi mieux que le temps des négociations soit aussi le moment où l’opportunisme des acteurs
s’exprime le mieux. On peut toujours s’étonner du non-recours à l’intégration verticale et à une
relation d’autorité qui éviterait les négociations ainsi que des asymétries d’information entre les
parties (Akerlof, 1970). Pour autant, les marques de distributeurs s’inscrivent aujourd’hui dans
une forme d’intégration verticale partielle par laquelle les distributeurs s’appuient sur le savoirfaire des PME pour concevoir et réaliser leurs produits. Les MDD comptent aujourd’hui pour
40% des transactions en valeur sur certains assortiments. L’internalisation de certaines
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
transactions par intégration verticale partielle des MDD permet aujourd’hui aux acteurs
d’économiser des coûts de transaction.
C’est le recours au marché qui crée des coûts de transaction, c’est à dire des coûts de recherche
d’information mais aussi des coûts de sélection des produits ou des matières premières chez les
uns ou les autres, autrement dit des « coûts de contrats » ou encore des coûts de « face à face».
Au sens de Williamson, les coûts de transaction (ou de contractualisation) reposent sur la
conjonction de quatre facteurs caractérisant le comportement des acteurs de la relation et il
revient au management des organisations de distribution de circonscrire ces coûts. En France,
l’incertitude juridique et économique caractérise et limite le terme de la relation industrieldistributeur, la rationalité limitée pèsent sur la qualité des décisions mais aussi sur l’engagement
et de consentement des acteurs (Simon, 1977) tandis que l'accumulation des lois favorise
l’opportunisme de certaines entreprises au détriment des autres (pressions, menaces,
« facturologie », coopération commerciale, marges arrière,…). Enfin, dans le cadre distinctif des
relations industrie-commerce que nous connaissons en France, la spécificité technologique et
industrielle relative aux actifs mis en œuvre dans la relation nécessite des investissements
toujours plus onéreux de la part des firmes (actifs physiques logistiques, systèmes d’information
en réseau,…) mais aussi du capital humain (Becker, 1981).
Des plates-formes d’expédition dernière génération des industriels aux nouvelles plates-formes
de cross-docking des distributeurs, de la construction d’usines plus efficaces à l’agencement de
magasins pensés pour le client final, les coûts de transaction explosent au titre des actifs dédiés
que nécessite l’entretien de la relation. Nous entendons par actifs dédiés des actifs spéciaux qui se
transformerait en surcapacité productive ou distributive sans avantage acquis au moment de la
rupture de la relation.
Pour le distributeur, cela peut aussi prendre la forme d’investissements souvent pratiquement
irrécouvrables en terme de construction d’un sourcing (réseau fiable de fournisseurs de qualité) et
de formation de ses mêmes fournisseurs aux méthodes de travail évolutives de la grande
distribution alimentaire en matière de management logistique et des systèmes d’information. Pour
les fournisseurs, cela implique des investissements potentiellement irrécouvrables en terme de
cahiers des charges des produits mais aussi en terme de connaissances de l’offre du distributeur et
de sa clientèle. Les actifs spécifiques contribuent à valoriser la continuité de la relation industriecommerce en quasi-rente pour l’une ou l’autre des parties prenantes au contrat. La quasi-rente
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
obtenue contractuellement peut parfois être assimilée tour à tour par l’industriel ou le distributeur
comme un hold-up. Sous la loi Galland auparavant ou sous la loi Dutreil aujourd’hui, lors des
négociations, la quasi-rente s’apparente au volume de marge avant (de l’industriel) ou de marge
arrière (du distributeur), c’est-à-dire le montant qu’une des parties peut exiger sans qu’il soit
profitable à l’autre partie de rompre la relation et de chercher un autre partenaire commercial.
Parfois, les liens entre l’industriel (souvent une FMN) et le distributeur sont si robustes que l’on
s’approche d’une relation de monopole bilatéral excluant toute idée de concurrence puisque
aucune des parties n’a intérêt à une rupture complète de la relation. Les activités de production et
de distribution s’apparentant alors à une négociation de Nash (1951) en situation de monopole
bilatéral dans laquelle le profit est partagé en deux parts égales (résultat de Nash). Aucun
distributeur ne peut se priver de Coca-Cola light ou d’Evian et Coca tout comme Danone ne peut
se priver des linéaires des six membres de l’oligopole de la distribution française (Auchan,
Carrefour, Cora, Intermarché, Leclerc, Système U).
Si aucune des parties n’a intérêt à une rupture définitive de la relation (disparition des bénéfices
liés aux investissements spécifiques), il n’est pas non plus étonnant de voir se développer
différentes formes de l’opportunisme (Williamson, 1985) chez les acteurs du canal de
distribution. La recherche d’intérêt personnel s’exprime alors au travers d’un opportunisme13 ex
ante, la sélection adverse développée par les distributeurs vis-à-vis des industriels mais aussi d’un
opportunisme ex post, l’aléa moral que fait peser le comportement des industriels sur la relation
tout au long de l’exécution du contrat de référencement. Le problème étant qu’avec les lois
Galland ou Dutreil, une des parties a tout intérêt à anticiper le hold-up sur la valeur en modifiant
ex ante ses décisions d’investissement (qualité des produits commercialisés par l’industriel,
nombre de gammes référencé par le distributeur) et ce pour limiter et contingenter les risques de
tentative de hold-up émanant du partenaire commercial. L’incomplétude des contrats doublé de
l’incertitude juridique que fait peser la loi et son application par la DGCCRF ne sont pas aussi
incitatives pour les industriels que pour les distributeurs. Cette situation génère des
comportements sous-optimaux pour le consommateur puisque les parties renoncent à une part
13
Au sens de Williamson (1994), l’opportunisme est à la base de l’incertitude comportementale et se définit comme
« la recherche d’intérêt personnel qui comporte la notion de tromperie » y compris la mauvaise foi (mentir même si
l’on sait que l’autre ment).
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
d’investissement spécifique ce qui, au final, diminue la valeur de l’échange et augmente son coût
de transaction.
Si la théorie économique (Guerrien, 1992) relève généralement quatre situations d’imperfection
du marché, la relation industrie-commerce se situe d’emblée dans le cas où l’équilibre du système
de prix ne pourrait être obtenu en raison de l’existence même des coûts de transaction. Dans le
cadre d’une relation contractuelle, industriels et distributeurs ne disposent pas nécessairement des
mêmes informations à tout moment. Cette situation asymétrique, du point de vue de l’information
disponible, intervient à chaque étape de la relation commerciale (négociations du référencement
en centrale d’achats, mise en œuvre du référencement, renouvellement du référencement…).
Dans le cadre spécifique de la relation industrie-commerce et en considérant le mode particulier
de gouvernance des grandes entreprises industrielles et des GMS, les asymétries d’informations
misent en œuvre entre les parties contractantes apparaissent d’autant plus vives que les relations
entre les propriétaires des firmes et la technostructure chargée de gérer l’entreprise dans l’intérêt
des actionnaires sont tendues. La théorie de l’agence (Jensen et Meckling, 1976) vient ici
renforcer les effets attendus des relations asymétriques engagées entre distributeurs et industriels
sur un plan informationnel. Nous abordons maintenant les aspects empiriques relatifs à notre
travail.
DEUXIEME PARTIE : ASPECTS EMPIRIQUES
Dans cette seconde partie, nous justifions nos choix en matière d’observations menées in vivo sur
le terrain au sein d’une organisation de distribution et nous présentons également les différents
résultats afférents à nos travaux monographiques.
3- LES OBSERVATIONS SUR LE TERRAIN
A ce stade, nous présentons ici notre plan de recherche ainsi que l’organisation de distribution qui
a tenu lieu de terrain d’expérimentation.
3.1- Présentation du plan de recherche
Faire de la recherche en distribution nécessite d’établir un certain nombre de pré-requis
notamment en ce qui concerne la procédure de construction du plan de recherche et du choix des
conditions d’accès au terrain expérimental au sein du canal (Filser, 2000). L’absence de travaux
de référence en Sciences de Gestion sur les résultats relatifs à l’application de la loi Dutreil,
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
notamment en ce qui concerne la façon dont la loi a substantiellement modifié les relations entre
industriels et distributeurs, nous a incité à reprendre des observations lourdes sur le terrain dans le
cadre d’une monographie exploratoire. En effet, les premiers échanges menés dans l’entreprise
nous ont rapidement laissés à penser que les praticiens ne se sont pas encore complètement
emparés des effets et résultats liés à l’application de la loi Dutreil. Du moins pour que nous
puissions envisager mener une démarche expérimentale in vitro qui s’appuierait sur la soumission
d’un questionnaire fermé unique auprès d’un échantillon de distributeurs.
La monographie exploratoire s’impose, dès lors que notre plan de recherche tente de clarifier les
influences et les conséquences liées à la mise en œuvre de la loi au sein de l’organisation système
et « c’est donc en se plaçant à l’intérieur du système que l’on pourra comprendre sa logique
interne ainsi que les interactions continues avec son environnement, à la fois comme
perturbations et comme transformations structurelles » (Langrand-Escure et Thiétart, 1997).
Nous avons donc envisagé nous positionner résolument au cœur d’une centrale d’achat de la
grande distribution alimentaire afin de mesurer les premiers résultats liés à l’application de la loi
Dutreil dans le canal. Les entretiens semi-directifs ont été complétés par des observations directes
sur le terrain. L’analyse thématique des verbatims a été rendue possible par la retranscription
intégrale des textes des répondants. A ce stade, la preuve est dans l’action et il n’y a pas d’autres
moyens que d’observer un acteur de la relation industrie/commerce in vivo. La méthode est
dialectique mais elle s’attache à recueillir des données empiriques pour ensuite tenter une
explication des faits sociaux, « une façon de déblayer la voie » au sens de Gurvitch (1953) sans
pour autant verser dans une analyse abstraite du concret. Cette recherche s’inscrit dans un
paradigme phénoménologique pour lequel le chercheur doit observer chaque situation
relationnelle, essayer de comprendre les résultats liés à la manifestation du phénomène mais aussi
se concentrer sur son sens afin de développer des idées par induction en partant des seules
données (Usunier, 2000). Ces réflexions ont confirmé notre volonté de retenir une démarche
scientifique ontologique constructiviste répondant à une logique qualitative plutôt qu’à une
logique quantitative et positiviste.
La mise en oeuvre du plan de recherche suppose alors de multiplier les observations et la prise de
notes sur le terrain afin de construire les premières analyses susceptibles d’ouvrir la voie à des
perspectives conceptuelles nouvelles liées à l’application de la loi. Le plan de recherche qui guide
notre travail est la conséquence de notre « posture épistémologique » mais il demeure aussi le «
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
fruit d’ajustements fins successifs » dont le but a été d’adapter nos travaux aux contraintes de
notre environnement (Baumard, 1997). Cette méthode de travail autorise une analyse des données
collectées in vivo à chacune des phases critiques du travail.
3.2- Présentation du terrain
Nous avons recherché une organisation qui, en tant qu’entité finalisée au sens de Livian (1998),
regroupe des composantes (structure, actifs physiques, capital humain, système de gestion et de
pilotage) et des activités dans un fonctionnement défini ex post et ex ante la promulgation de la
loi Dutreil. Il s’agit en l’occurrence une centrale d’achat de la grande distribution alimentaire
dont le rapport à l’application de la loi Dutreil est très robuste en raison de son positionnement
marqué au sein du canal production-distribution-consommation.
La centrale d’achat qui nous a intéressés est une société coopérative implantée régionalement.
Cette coopérative assure des fonctions multiples auprès des magasins du groupement mais sa
vocation principale est d’approvisionner des magasins commerçants détaillants indépendants afin
de compléter l’offre nationale de produits par une offre régionale de biens plus spécifique sur son
espace géographique. Pour la centrale d’achat, il s’agit d’affiner la politique de référencement
national par la prise en compte des particularités régionales et des attentes spécifiques des clients
sur un territoire donné. En cela, la coopérative assure une double interface (à la fois régionale et
nationale) pour le compte de chacun de ses magasins distributeurs tout en soutenant
une
politique commerciale régionale sur trois départements.
La superficie14 de la quarantaine de magasins membres oscille entre mille cinq cent mètres carrés
et dix mille mètres carrés. La première mission de la centrale d’achat est de contribuer au
développement du chiffre d’affaires et aux performances globales des magasins par la mise en
place d’organisations et de moyens communs gérés par, avec et pour les adhérents et leurs
équipes (en magasin ou en centrale). Ainsi, le conseil d’administration de la coopérative
détermine et met en oeuvre la stratégie de l’entreprise ainsi que celle de l’enseigne au niveau
régional dans l’intérêt général de l’ensemble des magasins. Pour autant, le président de la centrale
d’achat reste un adhérent élu par ses pairs administrateurs et le directeur assure dans le cadre de
ses fonctions de management la définition et la conduite du projet stratégique des adhérents.
14
En moyenne, la superficie d’un magasin avoisine les trois mille cinq cent mètres carrés
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
L’effectif global de la coopérative est de cent quatre vingt dix-neuf collaborateurs pour un âge
moyen du salarié qui évolue autour de trente cinq ans et pour un chiffre d’affaires qui s’élève à
un peu plus de sept cent cinquante millions d’euros ce qui représente environ 50% de l’ensemble
des achats des magasins des adhérents en 2006. Les trente huit centres distributeurs dépendant de
la centrale ont réalisé un chiffre d’affaires global avoisinant un milliard sept cent cinquante
millions d’euros (dont 15 % de carburant) l’année dernière. Sur sa zone de chalandise, la
coopérative détient, en 2006, une part de marché d’environ 33% du total univers produit tous
circuits (Source TNS Secodip 2006).
La centrale d’achat peut se définir comme une organisation de support à la chaîne de valeur des
magasins et du groupement. Elle s’apparente, peut-être plus encore aujourd’hui, à un nœud de
communication qui interface les structures collectives du mouvement avec les magasins et le
marché des consommateurs. En cela, son rôle dépasse le rôle traditionnel dévolu à une simple
centrale d’achat de la grande distribution intégré. Même si l’activité principale de la centrale
d’achat consiste toujours à concevoir et à mettre à disposition des magasins une offre
commerciale compétitive, l’organisation a aussi développé d’importantes capacités à traiter les
informations qui émanent de son environnement. Toutes les données et informations qui ont trait
aux premiers résultats relatifs à la mise en oeuvre la loi Dutreil sont traitées dans le cadre d’une
organisation de la connaissance des relations industrie-commerce. En ce sens, cette organisation
est apprenante puisque la centrale d’achat opte largement pour une priorisation à la fois de
l’information et des relations de service (sur des aspects logistiques avec un recours important à
l’externalisation) mais aussi des connaissances et des compétences de ses salariés.
4- LES PREMIERS RESULTATS RELATIFS A L’APPLICATION DE LA LOI DUTREIL
Il s’agit de comprendre comment la loi Dutreil a pu contribuer à modifier ou à réduire l’impact
des coûts de transaction ex ante et ex post sur la signature des contrats de référencement avec les
fournisseurs.
4.1- Les coûts de transaction grèvent le prix final des marchandises en magasin
Le management de l’entreprise estime que dans l’histoire de la grande distribution, en se laissant
dicter sa conduite, le distributeur a toujours été finalement placé en position d’infériorité par le
fournisseur. Selon Michel Glais (2006), il n’existe que deux paradigmes en matière de relation
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
fournisseur-distributeur. Le premier paradigme fait état d’un distributeur qui est un agent du
fournisseur. Autrement dit, le distributeur devient en quelque sorte une simple plate-forme
commerciale mandatée par l’industriel ou, tout au plus, une simple courroie de transmission entre
producteurs et consommateurs. C’est le modèle dominant, directement issue de la Théorie de
l’Agence, que l’on rencontre déjà en distribution sélective mais qui constitue progressivement
l’orthodoxie pour certaines GMS en matière de management de la relation commerciale avec les
fournisseurs.
La centrale d’achat régionale se considère volontiers comme plutôt tenante d’un second
paradigme qui participe d’une logique hétérodoxe et qui attribue une fonction écran au
distributeur dans le cadre d’une stratégie d’approche indépendante du consommateur vis-à-vis de
l’industriel. Ce positionnement souligne le rôle essentiel du distributeur qui va jouer le rôle d’un
intermédiaire responsable à son endroit en apportant une plus value à la relation commerciale de
par sa connaissance du consommateur. L’ensemble de la stratégie de la centrale d’achat est alors
envisagé dans le cadre d’un rôle plus ambitieux, à l’interface de celui de l’industriel et des
consommateurs, mais aussi dans un cadre juridique plus libertaire. C’était le modèle des
pionniers de la grande distribution et cela reste encore aujourd’hui celui de certains commerçants
indépendants. Cette posture amène la coopérative à rechercher des espaces de liberté dans son
environnement avec le risque de se positionner d’emblée dans une logique de confrontation avec
la loi et des industriels qu’elle ne peut s’empêcher de considérer comme particulièrement
favorisés par cette dernière. Pour autant, cette posture, même si elle favorise des négociations
plus âpres voire plus tendues, n’exclue en rien la conclusion de partenariats objectifs définis
auprès des fournisseurs sur des objectifs commerciaux communs.
La mise en œuvre de la loi Dutreil n’a pas détourné la centrale d’achat d’un objectif tactique
essentiel à savoir la collecte de l’information la plus complète possible sur les fournisseurs.
L’incertitude sur les conditions d’exécution des contrats a semblé vive et la complexité de mise
en œuvre des engagements des parties ont souvent empêché l’entreprise de prévoir de manière
fiable la performance souhaitée. En outre, la rédaction des contrats s’est compliquée à partir de
2006 et nous avons noté une sensible augmentation des tentatives de description des droits,
obligations et procédures liées à la bonne exécution ex post de ces derniers. La lutte contre
l’incomplétude des contrats a continué à mobiliser beaucoup d’énergie dans les services
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XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique
juridiques sans doute au détriment de la description des normes de performance à atteindre chez
chacun des partenaires engagés dans la relation.
Ainsi, le recensement des différents états possibles de la nature de la relation à venir avec les
industriels s’avère toujours aussi coûteux pour l’entreprise de distribution sous la loi Dutreil.
Dans la relation transactionnelle, les coûts de transaction ex ante ont d’ailleurs continué à
progresser puisque l’incertitude juridique, c’est à dire la charge de la preuve au sens de la loi
Dutreil, reste du domaine du seul distributeur. Dans ce cadre spécifique, tout comme sur un
échiquier, la tentation est alors grande pour l’organisation de distribution de raisonner et de
prendre ses décisions uniquement en univers de rationalité complète. Au mois de novembre 2005,
les négociations commerciales s’ouvrent dans une période de très grande incertitude économique
et juridique liée à la rupture à venir consécutivement au passage de la loi Galland à la loi Dutreil
au mois de janvier 2006. La centrale d’achat se comporte alors telle une organisation apprenante
qui tenterait de rassembler, en même temps et dans un même lieu, tous les éléments d’un puzzle
juridique, économique et managérial.
De façon procédurale, avant toute rédaction et signature du contrat, la coopérative traite et
analyse toutes les informations, contingences ou états de la nature à sa disposition à propos de
chaque industriel. Le temps passé à rassembler l’information (et à trouver le meilleur prix) influe
donc très fortement sur les coûts de transaction associés au problème de coordination résultant
lui-même du besoin de la centrale d’achat de déterminer finement les prix ainsi que tous les
autres détails liés à la transaction. La décision de travailler avec tel ou tel industriel semble alors
relever uniquement de la quantité et de la qualité des informations pertinentes mises à disposition
parfois par le fournisseur lui-même. Sous Dutreil, l’entreprise de distribution demeure toujours et
encore une organisation apprenante qui doit s’appuyer sur les comportements passés, présents et
futurs de ses fournisseurs, des enseignes concurrentes et des institutions avant toute prise de
décision. Pendant cette période, la centrale d’achat a donc poursuivi et accentué l’édification d’un
processus décisionnel qui s'adosse, à la fois, sur la collecte et l’accumulation des informations
opérationnelles courantes sur l’industriel ainsi que sur le traitement de l’information stratégique
en provenance de l’ensemble de son environnement.
Dès février 2006, le sentiment d’incertitude et de complexité juridique qui prévaut sur les contrats
signés avec les fournisseurs est doublée du phénomène d’une plus grande rationalité limitée de la
centrale d’achat vis à vis de ses derniers ce qui vient mécaniquement renforcer l’impression
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d’incomplétude des contrats chez le distributeur. Du fait de la fixation d’un seuil limité à 20% du
montant de la facture pour les marges arrière, les coûts ex post ont là aussi tendance à augmenter
puisque la loi exclue toutes possibilités de renégociation et de marchandage sur les prix pour
corriger les éventuelles divergences d’appréciation entre les parties pendant l’exécution du
contrat.
Lorsque surgit une contingence que le contrat et la loi Dutreil ne prévoient pas, il faut négocier à
nouveau ce qui libère les tentations opportunistes et ce d’autant plus que nous sommes en
présence d’organisations qui possèdent des actifs spécifiques très lourds (immobilisations
physiques, coût des compétences des fonctions d’expert) dédiés à l’exécution de la transaction.
Les coûts de motivation associés au caractère incomplet et asymétrique de l’information
disponible pèsent alors beaucoup sur les contrats de distribution car le producteur comme le
distributeur peinent à déterminer si les termes d’un accord sont acceptables ou pas pour les deux
parties et surtout s’ils seront réellement respectés. Cela engendre des coûts de transaction ex post
importants car les industriels et la centrale d’achat, craignant d’être lésés, conclus des
arrangements coûteux pour se prémunir contre les comportements opportunistes.
Face à l’incertitude, les fournisseurs et la centrale d’achat réagissent en incluant les frais de
recours en cas de conflit ainsi que les coûts d’établissement d’engagements sûrs (avocats, experts
juridiques,…) comme des éléments à part entière de la négociation commerciale. Quant aux coûts
de motivation associés à une obligation imparfaite des parties, ils explosent du fait de l’incapacité
du producteur et du distributeur de s’en tenir à leurs exigences initiales et à faire respecter leurs
engagements. Comme il n’y pas non plus d’économie possible ex ante du fait de l’incertitude de
l’environnement qui nuit à l’efficacité de la relation, les contrats sont considérés comme
incomplets tant par les industriels que par la coopérative d’achats. En ce sens, la loi Dutreil vient
confirmer le fait que les coûts de transaction ex ante mais aussi les coûts de surveillance de la
bonne exécution des contrats, les coûts de transaction ex post, sont alors supportés encore et
toujours par le seul consommateur puisque le distributeur ne peut pas se soustraire aux conditions
générales de vente que lui impose l’industriel.
4.2- Evolutions des prix des produits au sein de la centrale d’achat
Les négociations commerciales 2006 ont été finalement très rigides entre les très gros industriels
(une trentaine de multinationales), les huit mille PME/PMI et les six grands distributeurs. Dès les
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premiers mois de 2006, la centrale d’achat à reçu les hausses de tarifs qu'ont envoyé à ses
acheteurs les industriels des grandes marques (Danone, Nestlé, Coca-Cola, Unilever...). Les
acheteurs ont reçu des fournisseurs des hausses assez importantes de leurs tarifs (de 4 à 6 % en
moyenne), et jusqu'à 12 % d'augmentation dans le secteur des cosmétiques-hygiène-beauté
(Procter, Unilever, Gillette, L'Oréal...).
Le constat est que nous faisons est que les gros fournisseurs peuvent encore augmenter leurs
tarifs et accorder des marges arrière conséquentes (+20%) afin de conserver de bonnes relations
avec le distributeur. En effet, le nouveau SRP Dutreil réclame l’adaptation des industriels au
calcul d’une simple règle de trois. A grands traits, l’industriel qui a versé 500.000 euros au titre
des marges arrière à la centrale d’achat, soit 30% du prix net des produits vendus au distributeur,
doit augmenter ses tarifs de X% afin de lui verser encore 500.000 euros en 2006 et 2007 avec
seulement respectivement 20 % et 15% de marges arrière. Nous avons aussi observé que
transitoirement quelques grandes marques nationales et internationales n’ont pas adopté une
tactique coopérative. Les tentations opportunistes se sont donc multipliées chez quelques
industriels afin de laisser la grande distribution financer seule la baisse des prix de vente au
consommateur. Les règles juridiques ayant changé : la complexité a été au rendez-vous des
négociations commerciales.
Face à la hausse des tarifs trop importants des grandes marques au 1er janvier 2007, la centrale
d’achat dispose de plusieurs possibilités pour éviter de les endosser directement notamment en
resserrement son offre de grandes marques. Puisque la loi Dutreil ne limite pas les marges arrière
et qu’elle se contente de rendre possible la répercussion dans les prix de vente de la fraction
dépassant 15% du prix unitaire net, la tentation reste grande pour la coopérative de distribution de
continuer à négocier un maximum de marges arrière. En effet, alors que le système des marges
arrière est aujourd’hui reconnu par tous comme l’un des facteurs essentiels ayant conduit à une
augmentation inconsidérée des prix des produits de marque au cours de ces dernières années, le
législateur a choisi de légitimer cette pratique, qui plus est en la fixant à un niveau qui n’est
aujourd’hui même pas atteint dans certains secteurs par la centrale d’achat (en fruits et légumes
notamment). Les marges arrière15 demeurent comme l’un des trois facteurs clés de compétitivité
15
Par exemple, la coopération commerciale représente encore 85% du prix unitaire de vente d’une boîte de cirage en
2007…
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des distributeurs tout comme le fait d’acheter avec les prix les plus bas possibles et le fait
d’obtenir les délais de paiement les plus long possibles.
Pour autant, aujourd’hui la négociation commerciale a considérablement évolué sous l’influence
du formalisme. Deux axes majeurs se dégagent. Un premier axe comprenant les conditions de
vente (l’offre) et un second axe concernant les prestations de services rendues par le distributeur
aux fournisseurs (coopération commerciale et services distincts). Si sur l’axe des conditions de
vente, les conditions générales de vente demeurent la base de la négociation, les producteurs ont
aussi décliné leurs offres en conditions catégorielles et particulières de vente. Trois rangs de
négociation sont apparus lors des négociations 2007. Cela concerne les conditions générales de
vente (l’offre globale), les conditions catégorielles de vente (différenciation vis-à-vis des canaux
de distribution) ainsi que les conditions particulières de vente (différenciation vis-à-vis d’un
client spécifique). En ce qui concerne l’axe de des prestations de service, la firme de distribution
propose toujours de la coopération commerciale (promotions) mais elle insiste également sur la
possibilité qu’elle a dorénavant de fournir des services distincts (informations statistiques sur les
ventes,...) dans le cadre des conditions particulières de vente que peut lui octroyer le producteur.
Il semble également que certains services distincts se soient transformés en conditions
particulières de vente (remises, ristournes,…) à la demande du distributeur parce qu’il y a là
moins de justificatifs à apporter en cas de contrôles formels par les autorités. Cependant la
structure de l’offre continue de gouverner la structure du prix et la concurrence sur les prix
restent faibles chez les distributeurs. C’est pourquoi la centrale d’achat reporte sa négociation sur
la coopération commerciale et sur les services distincts. L’obtention des sur-profits que nous
avons appelés marges arrière restent à l’ordre du jour pour le distributeur. Les marges arrière
augmentent encore mais passent progressivement de la coopération commerciale vers les services
distincts. Ce faisant, la négociation commerciale conserve toujours autant d’opacité.
Les prix baissent mais la guerre des prix n’a pas eu lieu malgré la réforme puisque personne n’y a
finalement intérêt. Tout au plus, le distributeur insiste-t-il auprès des producteurs pour ouvrir la
discussion sur les services distincts tout en formalisant l’aspect contractuel par peur du contrôle.
Pourtant, il apparaît très vite au travers des interviews des dirigeants de la centrale d’achat que la
complexité liée au contrôle de l’application de la loi est une réalité qui débouche, pour l’instant,
sur la quasi-absence de contrôle de la part de la DGCCRF.
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Avec le nouveau texte, le distributeur a peut-être plus intérêt à faire dorénavant appel aux
PME/PMI. Selon les dirigeants de la coopérative d’achat, la loi Dutreil modifie profondément la
donne là où la loi Galland avait cristallisé deux effets pervers : la supérette comme l'hyper
proposaient à la vente des produits de grandes marques au même prix ce qui a eu pour effet de
rapidement légitimer l'explosion du hard discount auprès des consommateurs. Et les grandes
surfaces dégageaient finalement plus de taux de marge à favoriser telles ou telle firmes
multinationales plutôt que des PME/PMI, car les volumes et les rotations de leurs produits en
magasin leur garantissaient des marges considérables. En venant permettre à la centrale d’achat
régionale de réinjecter de la marge arrière dans les prix de vente, la nouvelle loi tend à faire
redevenir le distributeur responsable de la totalité de son prix de vente en magasin. L'intérêt
économique pour lui de faire appel aux produits des PME augmente donc d’autant.
La loi Dutreil ne fait finalement que constater un effet cliquet à minima de 15% alors que les
marges arrière évoluent à des niveaux supérieurs à 30% du montant hors taxe des achats. La
logistique devient alors un élément différenciant des conditions générales de vente. A ce titre,
depuis janvier 2007, la relative baisse des prix des grandes marques est soutenue par la volonté
des industriels de repasser à des tarifs incluant la livraison franco (rendue) chez les industriels. Là
où, depuis la promulgation de la loi Galland, les distributeurs avaient mis la main sur le canal
logistique, il semble que la loi Dutreil incite les industriels à reprendre pied sur toute la supplychain.
Par exemple, le groupe LDC (volailles) a considérablement fait évoluer ses CGV à l’endroit de la
logistique depuis l’entrée en vigueur de la loi Dutreil. Avant la loi, les approvisionnements des
magasins étaient massifiés en amont sur la plate-forme d’éclatement du prestataire de services
logistiques de la centrale d’achat. La démassification des flux étant assurée par le transport aval
des marchandises jusqu’aux magasins par le prestataire. L’optimisation logistique opérée par la
centrale d’achat était devenue un élément de différenciation concurrentielle vis à vis des autres
enseignes c’est à dire un avantage tactique susceptible d’être transposé au niveau des prix de
vente des produits LDC dans les magasins. Désormais, en raison du maintien du caractère
impératif des CGV dans la loi Dutreil, l’ensemble des livraisons est facturé franco de port à la
coopérative de distribution. Nous constatons donc que la loi Dutreil lisse et écrase la performance
organisationnelle du distributeur au profit des grandes marques industrielles qui renforcent ainsi
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leur mainmise sur le canal marketing par des prix identiques ou très faiblement différenciés chez
les distributeurs. Ceci est rapporté dans le tableau ci-dessous.
Evolution de la facturation du transport des produits en Scarmor en fonction du type de linéaires considéré avant et
après le 1er janvier 2006
Types de produits
concernés
Epicerie
Avant la loi Dutreil
Franco historiquement
(marché dominé par les
majors)
Départ historiquement
Liquides
DPH
Bazar
Frais
Textile
Franco historiquement
(marché dominé par les
majors)
Marché de marque
Technique pratiquant des prix départ
(téléphonie,…)
Marché de grand sourcing
saisonnier (camping,..)
Marché de gros (Blanc,…)
organisé en prix départ par
permanent
le GALEC au niveau
national
Ultra-frais, crémerie,
charcuterie, volaille, fruits
et légumes, poissons en
prix départ suite à la
volonté de l’organisation
de maîtriser la filière
départ pour des raisons de
fraîcheur, de quantités et de
prix.
Après la loi Dutreil
Franco avec hausse des marges arrière
Franco avec le choix du prestataire
pour le distributeur en période
transitoire et avant reprise en main
complète du transport par les majors à
partir de 2007
Franco avec hausse des marges arrière
Distribution sélective (un opérateur par
circuit) facturant franco avec hausse
des marge arrières
La performance logistique reste la
source possible d’un avantage
concurrentiel
Marché de spécialistes où la loi Dutreil
demeure favorable aux grossistes
facturant franco
Franco pour les Majors avec hausse
des marges arrière.
Prix départ pour les PME (coût de
transport à l’avantage du distributeur,
les remises d’enlèvement sont
supérieures au coût de transport)
La performance logistique reste la
source possible d’un avantage
concurrentiel
Là encore, la plupart des fournisseurs cherchent à transformer le distributeur en simple agent
commercial ou logistique de leur supply chain. Etant donné que la loi Dutreil redonne un espace
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de liberté au distributeur, le fournisseur réagit en la limitant et en s’accaparant au tant que
possible la maîtrise de la supply chain. C’est l’exemple même du comportement opportuniste
influencé par la loi. Le fournisseur reprend la main logistique tout en élevant ses tarifs et il annule
les remises commerciales de livraison sur plates-formes. La négociation va reprendre toute sa
place avec l’obligation, pour la centrale d’achat, de se différencier sur le produit, le prix et les
conditions d’achat. Toutefois, lors des entretiens, de nombreux acheteurs ont exprimé un certain
nombre de regrets vis-à-vis de la loi Dutreil. Cela concerne le fait que le gouvernement comme
les parlementaires aient complètement oublié l’objectif premier de la réforme à savoir faire
bénéficier les consommateurs de plus de concurrence entre distributeurs et entre fournisseurs afin
de leur rendre une partie du pouvoir d’achat confisqué par le développement inconsidéré de
marges non « répercutables » sur les prix.
CONCLUSION
En recourant pendant des décennies à la loi et en sanctuarisant ainsi de fait, sur le territoire
national, les relations industrie-grande distribution alimentaire, l’état français s’est partiellement
défaussé du reste de l’économie mondiale. La loi Dutreil a partiellement rendu sa place au contrat
en autorisant le recours aux conditions particulières de vente (CPV) et aux services distincts.
Cependant, les marges arrière du distributeur ont encore augmenté alors même que les marges
globales de ce dernier ont diminué. La relation industrie-commerce semble relever actuellement
d’une situation transitoire dans laquelle il s’agit bien, pour un distributeur, de conserver une part
des acquis relatifs à l’ancienne législation dont un volant de marge arrière suffisant pour assurer
la rentabilité économique des magasins tout en redistribuant l’autre partie aux consommateurs par
réintégration dans les prix de vente. Cette phase d’apprentissage s’avère globalement nécessaire
avant que l’organisation de distribution puisse envisager un pilotage uniquement par la marge
avant. La grande distribution doit apprendre à négocier le prix (triple net) dans des conditions
suffisamment clairvoyantes et susceptibles de lui assurer une rentabilité convenable face à la
nouvelle réglementation. La loi Dutreil est donc une étape essentielle avant l’instauration d’une
liberté totale des prix. Pour autant, il semble que la loi Dutreil profite d’abord aux acteurs les
mieux organisés du secteur surtout en ce qui concerne les distributeurs. On reste malgré tout très
loin de la guerre des prix entre les enseignes que certains anticipaient dès l’annonce de la
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législation Dutreil. Une perspective de recherche future concernerait utilement la description de
la relation producteur-distributeur à l’aune des évolutions des chaînes de valeur des uns et des
autres dans le même contexte législatif.
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