L`UMPveut uncodepénal desmineurs
Transcription
L`UMPveut uncodepénal desmineurs
Le Monde Argent Quelles solutions pour financer la dépendance Supplément Mercredi 30 novembre 2011 - 67e année - N˚20795 - 1,50 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- L’UMP veut un code pénal des mineurs Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Erik Izraelewicz Johnny Depp, chantre du «journalisme gonzo» t L’acteur, héros de « Rhum Express », raconte son ami Hunter S. Thomson P. 21 t Le parti a présenté son projet « sécurité » pour 2012 t Robert Badinter attaque le bilan de M. Sarkozy L ’UMP tient, mardi 29 novembre, à Villeurbanne (Rhône), sa deuxième convention nationale, destinée à présenter le deuxième volet de son projet pour 2012 : après la compétitivité, la sécurité. Au triptyque républicain, le parti présidentiel accole, en effet, dans le « pacte » qu’il propose, la sécurité et la laïcité. L’UMP entend d’abord réformer la justice des mineurs. Elle veut « mettre désormais la priorité sur l’exécution de toutes les peines, en particulier pour les mineurs ». Aussipropose-t-elle l’élaboration d’uncode pénal spécifique « pour adapter la justice des mineurs aux nouveaux phénomènes de délinquance et lutter contre le sentiment d’impunité ». C’est, une nouvelle fois, l’ordonnance du 2 février 1945 sur laprotection de l’enfance qui est en ligne de mire. Au cœur de la réforme de la justice des mineurs voulue par l’UMP, la transformation du rôle du juge des enfants. Patrick Roger a Lire la suite page 11 Johnny Depp dans le film de Bruce Robinson. PETER MOUNTAIN/GK FILMS Confusion et exactions lors des élections en RDC Comment l’Eglise catholique Les mystères troublants des veutévangéliserleGrandParis deux Français enlevés au Mali Congo Des attaques meurtrières de bureaux de vote ont eu lieu lundi 28 novembre pendant les scrutins présidentiel et législatif. Le chef de l’Etat, Jospeh Kabila, était candidat à sa propre succession. Page 3 Religion L’Eglise catholique lance une série de grands chantiers pour adapter son implantation géographique aux transformations de l’Ile-de-France. Avec l’objectif d’« être au plus près du quotidien des gens ». Page 12 Lacriseest-ellelesésame del’extrêmedroiteenEurope? Incurable, le chômage de masse? UK price £ 1,50 X avier Bertrand a eu raison, en ces temps électoraux, de prendre ses précautions. Avant même la publication des chiffres du chômage d’octobre, le ministre du travail a prévenu qu’ils ne seraient « pas bons ». Avec 2 814 900 sans-emploi en France métropolitaine (+ 1,2 % sur un mois et + 4,9 % sur un an), on retrouve quasiment le plus mauvais niveau depuis douze ans, en décembre 1999. En ajoutant ceux qui ont exercé une activité réduite, il y a, pour la France entière, 4 459 400 demandeurs d’emploi. Nicolas Sarkozy, qui ambitionnait de ramener le chômage sous le seuil des 9% avant la fin de son mandat, n’y parviendra pas. Même en renouant avec le traitement social, que naguère il condamnait, il n’a pu enrayer la hausse du chômage de longue durée et l’explosion de la précarité. Avec la réces- sion qu’annonce l’Organisation de coopération et de développement économique, le pire est à venir. En 2012, où les crédits des politiques de l’emploi doivent baisser de 12 %, l’année devrait s’achever sur un taux de chômage de 10,4 %. Cette pathologie sociale a un nom : le chômage de masse. Ravivé par une crise qui a montré les limites de l’Etat-providence, ce chômage de masse s’est enkysté dans nos sociétés occidentales aussi riches qu’inégalitaires. Editorial Le mal sévit partout. Fin septembre, le taux de chômage harmonisé, calculé par Eurostat, s’établissait en moyenne à 10,2 % dans la zone euro et à 9,7 % dans l’Union européenne ; il était à 9,1 % aux Etats-Unis, ce qui constitue aussi Le regard de Plantu un échec pour Barack Obama. François Mitterrand avait dit un jour qu’on avait « tout essayé » contre le chômage. Et Lionel Jospin, qui avait pourtant réussi à le faire baisser un temps, avait expliqué que « l’Etat ne peut pas tout ». Le constat est là : le chômage de masse signe l’échec des politiques menées, par la gauche comme par la droite, depuis quarante ans. Même affaibli, l’Etat-providence a un rôle à jouer. Il assure une protection sociale minimale et il peut donner une impulsion. Mais c’est aux entreprises et aux salariés de prendre le taureau par les cornes. Dans les pays scandinaves, on a inventé le concept de « flexisécurité », qui mélange flexibilité et sécurité. En échange d’un assouplissement du droit de licenciement, les salariés sont mieux indemnisés et se voient offrir des formations pour retrouver un Terrorisme L’identité et les activités des deux Français enlevés dans le Sahel suscitent une multitude de questions. Parmi les hypothèses, la mise en place d’une milice secrète contre Al-Qaida. Pages deux et 19 emploi. Le système a produit des résultats. Le taux de chômage est de 7,8 % en Finlande, 7,3 % en Suède, 7,1 % au Danemark et inférieur à 4 % en Norvège. Il n’est pas transposable tel quel en France, ne serait-ce que parce que les syndicats ne jouent pas le même rôle. En France, la CGT et la CFDT ont avancé l’idée d’une «sécurité sociale professionnelle ». Il s’agit d’attacher à la personne des droits en matière d’orientation, de qualification, de formation et de mobilité avec un accompagnement à revenus constants. Le principe de la « sécurisation professionnelle » a été repris dans un accord interprofessionnel. Il n’est pas trop tard pour responsabiliser les partenaires sociaux et l’Etat autour d’un pacte pour l’emploi qui se donnerait les moyens de lutter contre cette pathologie sociale. p Débats L’arrivée de ministres d’extrême droite à Athènes est passée inaperçue sous prétexte qu’ils se sont rangés à l’orthodoxie financière. Deux chercheurs sonnent l’alarme sur l’abandon du politique. Page 19 Arrêts maladie: tous inégaux Santé L’annonce, puis le retrait, d’un quatrième jour de carence pour les salariés du privé a révélé les injustices de la couverture maladie. L’œil du Monde page 18 Lire pages 9 et 10 C’est fait, le pays tout entier est passé à la TNT L a télévision analogique s’est éteinte dans la nuit du lundi 28 au mardi 29 novembre dans le Languedoc-Roussillon. Avec cette dernière région, s’achève le processus de déploiement de la diffusion de la télévision numérique par voie hertzienne sur l’ensemble du territoire. En deux ans, tous les émetteurs de France ont été changés, et les Français se sont équipés d’adaptateurs TNT ou de téléviseurs compatibles. Cette révolution technologique s’est faite en douceur. Elle permet aujourd’hui d’avoir accès à 19 chaînes gratuites, et s’est accompagnée d’un chamboulement économique dans les groupes audiovisuels. FACILE LA VIE… Se tenir au courant 24h/24 avec i-veille pour ne pas perdre la partie. De quoi s’offrir un peu de liberté. Lire page 13 Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,50 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,50 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,50 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA, 0123 page deux Mercredi 30 novembre 2011 Un VRP de Sa Majesté nommé Bond, James Bond L e James Bond nouveau est arrivé. Il est représentant de commerce. Son ordre de mission ? Répondre au dernier défi du renseignement mondial : la cyberguerre. Le GCHQ (Government Communications Headquarters), le service secret britannique notamment chargé des écoutes, entend vendre son savoir-faire technologique au secteur privé pour lutter contre un ennemi inédit et polymorphe, les hackeurs, ces pirates de l’ère numérique capables de paralyser l’ensemble du réseau informatique. Officiellement, il s’agit d’aider les fleurons économiques britanniques – à l’instar des entreprises de défense, télécoms, pharmacie et énergie ainsi que les services financiers –, à se protéger des conflits sur le Net. En fait, cette agence fondée en tant que telle en 1946 entend surtout se procurer des revenus supplémentaires en ces temps d’austérité budgétaire. 1940-1941. En déchiffrant Enigma, la machine de cryptage de l’information allemande, Alan Turing était entré dans la légende. En 1954, l’inventeur de l’informatique et le pionnier de l’intelligence artificielle, persécuté pour son homosexualité, s’était suicidé. Traditionnellement, le GCHQ travaille en étroite collaboration avec les « cousins américains ». Le plan britannique s’inspire d’ailleurs de In-Q-Tel, la société de capital-risque liée à la CIA qui investit dans les start-up du secteur des technologies de l’information. Dans les années 1970, au plus grand désespoir de la balance des paiements du Royaume-Uni, les « grandes oreilles » de Sa Majesté n’avaient pas su tirer profit de l’une de leurs découvertes les plus retentissantes : un système de sécurité destiné à protéger les transactions financières en ligne. On peut aisément imaginer le pactole qu’aurait rapporté ce brevet au Trésor d’outre-Manche lors de l’explosion, une décennie plus tard, de la Bourse ! Dépendant du ministère des affaires étrangères, le GCHQ, dont le budget est secret, est placé sous l’autorité du Conseil national de sécurité. Cet organisme de l’ombre coordonne les différentes agences de renseignement du royaume et sert d’interface avec le 10 Downing Street. Et, à la grande surprise des Buckinghamologues, son directeur, William Nye, vient d’être nommé directeur de cabinet du prince Charles. C’est un fait, même transformé en VRP, l’indémodable « 007 » reste à la mode. p Un label vendeur Les écoutes sont un métier trop sérieux pour que tous leurs secrets soient divulgués sur la place publique. Pour cela, il y a les romans de John Le Carré. Une infime partie des renseignements obtenus par des matériels sophistiqués et traités par les linguistes, informaticiens et mathématiciens maison seront proposés aux entreprises. Rien n’a filtré sur les tarifs ou les options offerts aux clients. Une chose est claire, le label GCHQ est vendeur. Son prédécesseur, l’école de chiffrage et de décodage née en 1919 et installée dans le manoir de Bletchley Park, avait joué un rôle-clé dans la bataille de l’Atlantique en Marc Roche (Londres, Correspondant) Les indégivrables Xavier Gorce Récit Les deux Français enlevés la semaine dernière au Mali auraient eu, dans le passé, des liens avec des mercenaires ou des services secrets. Géologues, aventuriers ou barbouzes? Leur enlèvement suscite de nombreuses questions Au Mali, les mystères du rapt des otages français le lendemain à Tombouctou, à 200 km plus au nord. En plein jour, vendredi, juste à l’heure de la prière, plusieurs touristes (hollandais, suédois et sud-africains) sont attablés dans une auberge du centre, non loin de la « flamme de la paix ». Un groupe armé arrivé en 4 × 4 parvient à se saisir de trois d’entre eux. Un Allemand qui résistait est abattu. « Une balle dans le ventre, une balle dans la tête : ce ne sont pas des petits bandits », commente un élu de la «Une milice était en train d’être constituée en secret pour aller combattre AQMI», affirme une personnalité religieuse de la région L’hôtel Dombia, à Hombori (Nord du Mali), où les deux Français ont été pris en otages. SERGE DANIEL/AFP Johannesburg Correspondant régional M ême au regard des critères d’obscurité qui sont la règle dans les affaires d’enlèvements dans la région du Sahel, celle qui est en cours au Mali est remarquablement mystérieuse. Dans la nuit de mercredi 23 à jeudi 24 novembre, dans la ville de Hombori, deux hommes sont capturés dans leur chambre d’hôtel, puis emmenés par des hommes en armes. Les hommes d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), quiont fait de la prise d’otages un négoce pour financer leurs opérations et sont établis dans le nord du Mali, devraient être les destinataires logiques de cette opération, sans doute menée à ce stade par des bandits de la région. Seulement, il apparaît que l’identité et l’occupation des deux hommes qui affirmaient être en mission dans le cadre d’un projet de cimenterie – bien réel – de l’hommed’affaires malien Djibril Camara, soulèvent de nombreuses questions. Dans le nord du Mali, où quatre otages français étaient déjà détenus, circulent trafiquants, éleveurs, combattants d’AQMI et… quelques négociateurs français Société éditrice du « Monde » SA Président du directoire, directeur de la publication Louis Dreyfus Directeur du « Monde », membre du directoire, directeur des rédactions Erik Izraelewicz Secrétaire générale du groupe Catherine Sueur Directeurs adjoints des rédactions Serge Michel, Didier Pourquery Directeurs éditoriaux Gérard Courtois, Alain Frachon, Sylvie Kauffmann Rédacteurs en chef Eric Béziat, Sandrine Blanchard, Luc Bronner, Alexis Delcambre, Jean-Baptiste Jacquin, Jérôme Fenoglio, Marie-Pierre Lannelongue (« M Le magazine du Monde ») Chef d’édition Françoise Tovo Directeur artistique Aris Papathéodorou Médiateur Pascal Galinier Directeur du développement éditorial Franck Nouchi Conseil de surveillance Pierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président 0123 est édité par la Société éditrice du «Monde» SA Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 149 017 497 ¤. Actionnaire principal: Le Monde SA. Rédaction 80,boulevardAuguste-Blanqui,75707ParisCedex13Tél.:01-57-28-20-00 Abonnements partéléphone:de France32-89 (0,34¤ TTC/min);de l’étranger:(33)1-76-26-32-89 ouparInternet:www.lemonde.fr/abojournal La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0712 C 81975 ISSN 0395-2037 Président : Louis Dreyfus Directrice générale : Corinne Mrejen PRINTED IN FRANCE 80, bd Auguste-Blanqui, 75707 PARIS CEDEX 13 Tél : 01-57-28-39-00 Fax : 01-57-28-39-26 Imprimerie du Monde 12, rue Maurice-Gunsbourg, 94852 Ivry cedex Quelques mois plus tôt, le premier d’entre eux, Philippe Verdon avait rencontré Djibril Camara à Paris. Cet homme d’affaires ayant développé sa petite entreprise de bâtiment (Mandé Construction Immobilière) grâce à des marchés publics, cherche à installer une cimenterie au Mali, sans passer par les grands groupes qui se partagent le marché. Philippe Verdon semble avoir convaincu son partenaire malien qu’il possédait des compétences en géologie capables de mettre le projet en valeur pour des investisseurs potentiels. Le Philippe Verdon arrivé au Mali est-il le même que l’aventurier de ce nom qui a trempé dans des affaires véreuses, notamment aux Comores ou à Madagascar ? Dans le passé, il s’est aussi présenté comme un proche de Bob Denard, le chef mercenaire dont les actions de chien de guerre furent souvent conçues en bonne intelligence avec les services de renseignement français. Philippe Verdon, toutefois, ne participait pas aux tentatives de coups d’Etat.Bob Denard avaitdéclaré l’avoir rencontré à plusieurs reprises, mais disait de lui : « Ce n’est pas un soldat. » Voici donc un aventurier aux confins des genres, arrivé dans cette zone proche du nord du Mali où sont déjà détenus quatre otages français et où circulent trafiquants, éleveurs nomades, katibas (« unités ») d’AQMI et… quelques négociateurs français associés à des notables locaux. Un de ces négociateurs a été blessé la veille à un barrage de l’armée malienne. Qui étaitil ? Un nom a circulé, celui d’un ex-officier de l’armée française. Ce dernier, contacté par Le Monde, dément à la fois avoir été blessé et s’être trouvé au Mali à ce moment précis. Le deuxième homme enlevé à Hombori, et présenté comme un « ingénieur », est Serge Lazarevic, connu pour sa proximité avec des réseaux des Balkans proches de l’ex-DST françaises (aujourd’hui DRCI), notamment au sein d’un groupe paramilitaire baptisé Pauk (« araignée «) accusé d’avoir fomenté une tentative d’assassinat de l’ancien président serbe Slobodan Milosevic, ou encore d’avoir aidé au recrutement de mercenaires serbes partis faire la guerre pour le compte du maréchal Mobutu, dans l’ex-Zaïre. Les ravisseurs, arrivés dans un véhicule en pleine nuit, ont bénéficié de la complicité d’un homme descendu au même hôtel de Doumbia, et qui n’a pas rempli de fiche avec son nom. Depuis, des forces militaires françaises et maliennes ont tenté de donner la chasse aux ravisseurs, sans succès. AQMI n’avait pas revendiqué cet enlèvement mardi matin, 29 novembre. Cetteaccumulationdeparticularitésestellel’effetduhasard ?Unepersonnalitéreligieuse influente de la région du nord du Mali affirme qu’une « milice était en train d’être constituée en secret avec des ex-combattants maliens revenus de Libye pour aller combattre AQMI dans la région ». Selon la même source, très introduite dans les présidences de la région, «les deux Françaisauraientétéidentifiés commeresponsables de la formation et de l’encadrement de cettemilice. Les gens d’AQMIétaient au courant et sont venus les prendre ». Cette milice, organisée au cours des dernières semaines, aurait regroupé des combattants essentiellement touareg revenus de Libye au cours de la dernière période du régime de Mouammar Kadhafi. La même source conclut : « C’est un groupe monté par les services [secrets], sans doute de plusieurs pays, pour mettre en service un petit groupe armé capable d’aller faire la guerre à AQMI avec ses propres règles. » Ce n’est pas la seule explication sur la présence du « géologue et de l’ingénieur » à Doumbia. D’autres sources penchent pour un projet de négociation des quatre Français enlevés en 2010 au Niger encore détenus par AQMI dans le Nord du Mali, et qui aurait mal tourné. Pour compliquer l’affaire, un second enlèvement a lieu dès région, qui insiste sur les « complicités locales indispensables pour pouvoir quitter Tombouctou sans laisser de traces ». Cet élu local, joint par téléphone, demande qu’on respecte son anonymat de peur « qu’on finisse par [lui] couper la tête ». Il raconte les dérives de toute une région, où ont prospéré les trafiquants de drogue – résine de cannabis en provenance du Maroc et destinée à l’Egypte, ou cargaisons de cocaïne qui transitent par le Sahara sur la route vers l’Europe. « Il y a une mafia qui s’est développée, avec beaucoup de complicités. Ils cherchent tout ce qui peut rapporter de l’argent. Moi, j’avais un petit coopérant qui était chez moi, pour une mission de quelques semaines. Un de ces trafiquants m’a dit : “La tête d’un Blanc cela vaut 100 millions de francs CFA. Passele moi, je l’amène aux barbus, et on partage.” Jusqu’à ce jour il m’en veut encore d’avoir refusé. J’ai dit au coopérant : “Rentre dans ton pays et ne reviens jamais.” Il ne sait pas ce qui a failli lui arriver. » En plus de cette criminalisation, le nord du Mali est confronté à l’arrivée de combattants originaires du pays, qui fuient la Libye voisine. Plusieurs centaines, peutêtre près de deux mille hommes, ont quitté la Libye où ils servaient sous l’uniforme des troupes de Mouammar Kadhafi. Ils arrivent au Mali en passant par l’Algérie ou le Niger, avec leurs armes. A l’arrivée, certains des groupes ont été accueillis dans les règles lors de cérémonies « officielles », comme à Kidal en octobre, et ont promis de changer de vie. Parmi eux, d’ex-rebelles touareg qui ont quitté le Mali après les accords d’Alger (2009) pour se rendre en Libye. Ils y avaient retrouvé des compatriotes, intégrés parfois dans les forces armées libyennes depuis des décennies, ayant fait la guerre contre le Tchad dans la bande d’Aouzou. Une partie de ces hommes a finalement refusé de prendre part au dernier combat de Mouammar Kadhafi. C’était le cas d’Ibrahim Ag Bahanga, ex-leader charismatique de la rébellion touareg, de retour au Mali après avoir déclaré son soutien aux rebelles libyens du Conseil national de transition (CNT). Il est décédé dans des circonstances mal élucidées en août, mais ses hommes seraient à présent en train de rejoindre l’ébauche d’un nouveau mouvement armé, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui hésite encore à se déclarer en faveur de la lutte armée. Un responsable du MNLA, Moussa Ag Hacharatoumane, joint par téléphone, affirme que le mouvement « n’est pas une rébellion, mais essaye plutôt de faire une révolution » et s’est doté d’une branche armée et d’un état-major, à la tête duquel a été placé le colonel Mohamed Ag Najem, revenu, lui aussi, de Libye. Le MNLA affirme avoir envoyé « des lettres » au gouvernement pour faire part de ses revendications, tout en affirmant « poser comme préalable l’autodétermination de l’Azawad » (Nord du Mali). p Jean-Philippe Rémy Lire aussi la tribune de Serge Michailov sur la « Préoccupante afghanisation du Sahel » p. 19 international 0123 Mercredi 30 novembre 2011 3 Violences et confusion lors des élections en RDC Le scrutin en République démocratique du Congo a été marqué par de nombreuses irrégularités RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO R É P.C E N T R A F R I CA I N E CONGO Mbandaka Kinshasa SO U DA N Kisangani OUG. Bukavu R. B. Kananga Matadi Kikwit ANGOLA 400 km Mbuji-Mayi Lubumbashi ZAMBIE Reportage Kinshasa Envoyé spécial D ans un pays où tant de promesses n’ont jamais été tenues, le chef de l’Etat sortant, Joseph Kabila, a tenu sa parole : les élections présidentielle et législatives ont bien eu lieu, lundi 28novembre,enRépubliquedémocratique du Congo (RDC). Mais à quel prix? Celui d’une indescriptibleconfusion,associéeà desviolencesparfois meurtrièresmais localisées, qui soulève déjà la question de la crédibilité voire de la validité de ce scrutin pluraliste, le deuxième depuis l’indépendance de l’ancienne colonie belge en 1960 toujours traumatisée par deux guerres ravageuses de 1996 à 2003. A Kinshasa, lundi, dès l’aurore, des foules d’électeurs ont bravé les trombes d’eau qui noyaient les chaussées défoncées. Dans la cour de l’école Epelingomo du quartier surpeupléde Kingasani, ilsse bousculaient par centaines, hurlant devant les portes des bureaux de vote, leur carte d’électeurs brandie au-dessus de la tête. « Les Congolais n’aiment pas l’ordre », constatait dépité le président du centre de vote Israël Mbaya Tshimankinda. Si les Congolais n’aiment pas l’ordre, ils doivent alors aimer la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Kiala Faustin, un enseignant de 48 ans, peut en témoigner. « Comment je vais voter ? », se lamente-t-il. En juillet, il était venu dans cette même école pour s’inscrire. « On m’avait dit Chef de l'Etat Joseph Kabila Superficie 2 345 000 km2 Population (hab.) 67,8 millions Indice de développement humain 0,286 (185e sur 185 pays) PIB par hab. 224 euros Matières premières étain, diamant, or, cobalt, cuivre... Espérance de vie 48 ans SOURCE : BILAN DU MONDE 2011 que je voterais ici », se rappelle-t-il. Mais sur sa carte d’électeur figure un mystérieux collège Seneve où il est censé se rendre mais dont personne n’a jamais entendu parler, ici, dans ce dédale de ruelles sablonneuses grand comme une petite ville. « Erreur informatique ou bureau fictif ? », se demande-t-il. Avant le vote, on avait relevé de fausses adresses de bureaux sur la liste publiée par la CENI. L’oppositionyavaitvuunemanœuvrefrauduleuse de la part d’une CENI dirigée par un proche de Joseph Kabila.Aux bureaux fictifs, et donc sans électeursle jourduvote,correspondront des procès-verbaux comptabilisés en faveur du président sortant, s’alarmait l’opposition. En attendant d’en savoir plus, M. Mbaya Tshimankinda cherche surtout à éviter l’émeute dans sa cour d’école. Ses bureaux ont ouvert avec trois heures de retard, lorsqu’enfin la CENI lui a fait parvenir la liste électorale les bulletins, « en nombre insuffisant », ditil. Et il doit faire sans isoloir en carton – « ils m’ont expliqué qu’il n’y en a plus ». Les électeurs s’asseyent donc, certains pour la première fois, sur un banc d’école et transpirent à retrouver la photo de leur favori sur une liste de 1 329 candidats à la députation dans cette circonscription (pour 15 sièges) imprimée sur un bulletin de 53 pages. Il n’y a pas non plus de lampe pour le dépouillement dans ce quartier vivant souvent au rythme du soleil. Ni d’encre indélébile pour éviter les votes multiples. « Qu’est- A Kinshasa, le 28 novembre, un partisan du candidat de l’opposition Etienne Tshisekedi à la présidentielle. JÉRÔME DELAY/AP ce que ça doit être en province ? », soupire un observateur. Autre casse-tête : les « omis », ces Congolais détenteur d’une carte d’électeur affiliée à un bureau de vote mais qui n’apparaissent pas « C’est un fiasco total, que la communauté internationale a laissé faire » Un membre du comité technique électoral sur les listes. La CENI leur a permis au dernier moment de voter dans leur centre d’inscription. Ce qui ouvre le champ aux fraudes et à la contestation post-électorale. Ainsi, dans la salle numéro 4 du centre de vote du quartier Masina II ouvert dansles locauxd’uneparoissepres- bytérienne, la liste d’émargement de ces « omis » comporte déjà une trentaine de noms écrits à la main sur des feuilles volantes. S’y ajoute celle des votes par dérogation. Au total, près de 30 % d’électeurs supplémentaires qui, au soir du comptage, pourraient faire passer le taux de participation au-dessus des 100 %. Plus grave, peu de chose empêche un « omis » de se rendre dans un autre bureau de vote pour recommencer l’opération. Ceci dit, les onze candidats de la présidentielle à un tour – système imposé par Joseph Kabilapour battre une opposition divisée et compenser sa perte de popularité – sont sur un pied d’égalité. Une égalité démocratique devant le chaos que le chef de l’Etat partage avec « l’opposant historique » Etienne Tshisekedi (79 ans) et ses deux frères ennemis de l’opposition Vital Kamerhe (51 ans), ex-président de Un pillage systématique des richesses du sous-sol Johannesburg Correspondant régional Le scandale a éclaté quelques jours avant le scrutin. Un membre du Parlement britannique, Eric Joyce, chef de la commission interpartis consacrée à l’Afrique des Grands Lacs, a rendu public un rapport dans lequel il livre son estimation du montant des sommes détournées par le pouvoir congolais dans le cadre de cession d’actifs miniers : 5,5 milliards de dollars (4,2 milliards d’euros). Il met en ligne des contrats cachés jusqu’ici et décrit ce qu’il qualifie de « façon de procéder systématique, consistant à brader des actifs miniers congolais à des compagnies écran, presque toutes enregistrées aux Iles Vierges (…) avant de les céder à des proches ». Certaines de ces sociétés ont été associées à l’homme d’affaires israélien Dan Gertler, qui avait déjà reçu du père de l’actuel chef de l’Etat la concession de la commercialisation de l’ensemble des diamants congolais. L’estimation peut prêter à discussion, mais les contrats mis en ligne par M. Joyce appuient l’idée de son « modèle » de détournement. Le « pillage » des ressources de la République démocatique du Congo (RDC) n’est pas seulement le fait de bandes armées dans l’Est ou depuis les pays voisins. La question est d’autant plus aiguë que le pays a vu sa production minière augmenter depuis la fin de la seconde guerre du Congo (1998-2003). Depuis 2005, la production de cuivre a été multipliée par cinq. En 2010, la croissance de la RDC s’établissait à 7,2 %. Derrière la dimension politique de l’élection se dissimule un enjeu économique de taille. De nombreux observateurs se sont émus des conditions dans lesquelles des cessions d’actifs étaient faites à des entreprises immatriculées aux Iles Vierge (le député britannique en a recensé 45), et estiment que les bénéfices réalisés lors de ces cessions auraient servi à financer la campagne électorale. La Gécamines, l’ex-empire minier national tronçonné, a été particulièrement mise en cause. A Kinshasa, Albert Yuma Mulimbi, président du conseil d’administration de la Gécamines, reconnaît «28accords de joint ventures avec des étrangers dans lesquels nous sommes partenaires minoritaires», mais assure avoir «décidé de demander un audit de ces compagnies par un cabinet international», qui reste à identifier. Il remarque: «Depuis 2002, nous n’avons touché aucun dividende, ce n’est pas normal », tout en précisant qu’il ne compte pas demander la renégociation des contrats. C’est ce qui est arrivé à plusieurs sociétés, dont First Quantum Minerals qui avait investi 450 millions de dollars dans une mine de Kolwezi, avant de voir son contrat annulé en 2009 et la mine cédée pour 175 millions au groupe ENRC. «Le jeu de passe-passe avec les droits miniers est en contradiction avec les discours nationalistes du pouvoir. De plus, ce ne sont pas des pratiques nouvelles, mais de vieilles ficelles», note Thierry Vircoulon, le directeur Afrique centrale de l’International Crisis Group. La déréliction du système engendrée par ce pillage avait entraîné la fuite du maréchal-président Mobutu en 1997 tandis que l’Etat s’écroulait. « Scandale géologique » Joseph Kabila marche-t-il dans les traces de l’homme à la toque de léopard? Pour l’instant, note une bonne source: «Les investisseurs se bousculent encore, mais ce ne sont pas les plus grandes sociétés minières.» Environ 3 milliards de dollars ont été investis au Congo en 2010. Le qualificatif de « scandale géologique» appliqué au pays sonnait à l’origine comme un sifflement admiratif, en référence à l’importance des réserves de minerais ou pierres précieuses (cobalt, cuivre, coltan, diamants, uranium, etc.). Le Congo-Kinshasa a tous les atouts pour devenir un géant régional, même si son économie est peu diversifiée (73,7 % des exportations du pays sont constituées de métaux et 10,7% de diamants). Des contrats douteux avaient déjà été attribués avant le scrutin du retour à la paix de 2006, remporté par Joseph Kabila. Dans la foulée, il avait fallu faire le ménage sous pression des institutions financières internationales qui accompagnaient parallèlement le pays vers le point d’achèvement de l’Initiative PPTE (Pays pauvres très endettés). Atteint fin 2009, celui-ci allait permettre de bénéficier d’une réduction de la dette publique de 12,3milliards. Une « revisitation» de 61 contrats a donc eu lieu, assimilée par une bonne source à un «racket». Deux contrats seulement devaient être annulés, dont celui de First Quantum Minerals. Les responsables du Fonds monétaire international (FMI) avaient beau insister sur la nécessité de « renforcer l’Etat de droit ainsi que d’améliorer la gouvernance», les cessions d’actifs dans des conditions troubles se sont multipliées. Concernant le pétrole, la même opacité prévaut. La production congolaise est faible (23000 barils par jour). Mais plusieurs blocs très prometteurs situés au bord du lac Albert, dans le nord-est du pays, ont été découverts. Ils semblaient promis au groupe Tullow, mais ont été attribués à deux sociétés inconnues, Caprikat et Foxwhelp, dont le siège est aux Iles Vierges britanniques. A leur tête se trouvent Khulubuse Zuma, le neveu du président sud-africain, et un avocat de ce dernier. p l’Assemblée nationale et Léon Kengo (76 ans), président du Sénat. Devant une telle anarchie, c’est presqu’unmiraclesil’onnerapportait pas, mercredi matin d’incidents plus sérieux dans la capitale. Ce ne fut pas le cas à Lubumbashi, capitale du Katanga (sud-est), où au moins dix personnes ont été tuées lors d’une attaque d’un bureau de vote. Dans le Kasaï occidental, fief d’Etienne Tshisekedi, des bureaux de vote ont été incendiés après la découverte d’urnes déjà bourrées. Dans l’Est, des combats entre groupes armés ont conduit à la fermeture de bureaux. « Difficile de dire aujourd’hui quelle influence tout cela aura sur le résultat final », relativisait un observateur américain. Inquiet, il se demandait si le même chaos allait dominer les opérations de comptage et de centralisation des résultats. Beaucoup plus pessimiste, un membre étranger du comité technique électoral (un organe consultatif de la CENI) ne voyait pas comment « la CENI, qui affirmait dimanche, et contre toute évidence, être prête à 100 %, pourra déclarer ce vote transparent ». Il ajoutait : « C’est un fiasco total et pourtant prévisible que la communauté internationale a laissé faire. Et si cela dégénérait en guerre civile ? » Lundi soir sur les ondes de la radio Okapi, Franklin Tshamala, un cadre de la majorité présidentiel dont le candidat est donné favori au regard de sa force de frappe financière, administrative et sécuritaire, avait vu un vote « calme ». Du côté de Vital Kamerhe et de Léon Kengo, en revanche, on réfléchissait déjà à faire annuler le scrutin. Une option écartée par Etienne Tshisekedi qui, dès la fin du vote, lançait la bataille des chiffres, invérifiables, au sujet de sa large victoire dans l’est du pays. Les résultats de la présidentielle sont prévus avant le 6 décembre. Ceux des législatives, pas avant le mois de janvier. La RDC entre dans une zone de hautes turbulences. p Christophe Châtelot ALDO NAOURI ALDO NAOURI LES BELLES-MÈRES LES BEAUX-PÈRES, LEURS BRUS ET LEURS GENDRES LE LIVRE ÉVÉNEMENT Jean-Philippe Rémy n Sur le Web Ericjoyce.co.uk 320 p. 22,90 € 4 0123 international Mercredi 30 novembre 2011 Jour d’élections auCaire, où les Frères musulmans quadrillent les quartiers Le scrutin législatif égyptien s’est ouvert sans incident majeur, et la participation s’annonce massive Récit Le Caire Envoyés spéciaux L es premières législatives de l’après-Moubarak se sont ouvertes, lundi 28 novembre, dans un climat de tranquillité inespéré. Alors que bon nombre d’observateursredoutaient quedes violences ne viennent entraver le déroulement du scrutin, aucun incident majeur n’a été relevé, ce qui a conduit à une participation massive. A la sortie des bureaux de vote, les électeurs confiaient souvent leur fierté et leur émotion d’avoir participé au premier scrutin libre de l’histoire de l’Egypte. Les 498 sièges de l’Assemblée du peuple, la chambre basse du Parlement,seront attribuésdans un processusélectoral entroisphases,étalées jusqu’à la mi-janvier. Lundi, une première tranche de neuf gouvernorats (sur 27) était appelée au vote. Récit de la journée dans trois quartiers du Caire, où 1 539 candidats se disputent… 54 sièges. A Choubra, les combines des Frères musulmans Impossible de les rater. Les militants des Frères musulmans quadrillent les abords de tous les bureaux de vote du Caire. A Choubra, un quartier du nordest de la capitale doté d’une forte minorité copte, les partisans du mouvement islamiste ont dressé un stand en retrait de la rue principale. Officiellement, il ne s’agit que de guider les électeurs égarés. En quelques clics sur son ordinateur portable, Hussein, un jeune militant en T-shirt et coiffé d’une casquette beige, les oriente vers leur bureau de vote. « On a même des accompagnateurs et des voitures pour ceux qui ne veulent pas mar- cher », dit le jeune homme. Mais ces tracts qui récapitulent le programme du parti, grand favori du scrutin, et ces affichettes avec la bobine des candidats soutenus par les Frères ne seraient-ils pas une entorse à la réglementation qui interdit de faire campagne le jour du vote ? « Non, on rend juste service aux gens », se récuse Hussein. Un pur altruisme, voilà tout. Un peu plus loin, Mohammed, un trentenaire en veste de cuir, explique au profane le fonctionnement pyramidal de la confrérie. Au sommet, le guide (mourchid) et tout en bas, la famille (ousra), la plus petite unité dans la galaxie des Ikhwan (Frères). Composée d’une «Je n’ai jamais vu autant de femmes sans voile de ma vie», s’extasie, à Zamalek, unriverain assis sur untabouret demi-douzaine de membres, elle a pour tâche de veiller sur un bloc d’habitations au sein d’un quartier. « Ces derniers jours, mon rôle dans l’“ousra” a consisté à rencontrer les gens de ma zone, à lister ceux qui partagent nos valeurs et à prendre leur numéro de téléphone, explique Mohammed. Je les appellerai quelques heures avant la fermeture des bureaux de vote pour m’assurer qu’ils ont bien voté. » Chez les Frères, rien n’est laissé au hasard. Sur la place Tahrir, les états d’âme des révolutionnaires Les motivations des électeurs, elles, obéissent à des logiques dont les résultats sont parfois déroutants. Dans le quartier populeux de Bou- laq, un jeune homme élégant se dirige vers le bureau de vote avec entrain : « Je vais voter pour la liste des Frères musulmans et pour Gamila Ismaïl (une candidate libérale indépendante, concurrente des Frères). Pour les Frères parce qu’un de mes voisins qui a construit une clinique pour les pauvres dans mon quartier se présente avec eux, et pour Gamila parce qu’elle a été vraiment courageuse pendant la révolution. » Un peu plus loin, le long de la rue du 26-Juillet envahie d’affiches électorales, trois enfants s’acharnent sur le poster d’un candidat accroché à un lampadaire. « On a besoin de ce papier et celuilà, c’est pas grave, personne le connaît, il n’a aucune chance. De toute façon, c’est les Frères qui vont gagner. » Cet avis fait l’unanimité dans la rue, où un policier, assis sur une chaise au bord du trottoir, distribue nonchalamment des tracts à l’effigie du Parti de la justice et de la liberté, bras politique de la confrérie. « C’est pour labonne cause ! », s’exclame-t-il, hilare. A quelques kilomètres de là, sur la place Tahrir cernée par les militaires, les révolutionnaires qui maintiennent leur sit-in devant le siège dugouvernement ne cachent pas leur morosité. Beaucoup ont décidé de boycotter le scrutin, sans parvenir à empêcher nombre de leurs camarades de s’éloigner de la place pour aller mettre un bulletin dans l’urne. Rassemblés sous une effigie du maréchal Tantaoui pendue à un réverbère, les irréductibles ont tenté de persuader leurs compagnons de ne pas aller voter en chantant «Elections illégitimes ! Tantaoui illégitime !». Ils ont reçu le soutien de plusieurs mouvements révolutionnaires, dont le Groupe du 6 avril, et l’Union des jeunes coptes de Maspero. « Par égard pour le sang des martyrs innocents qui a inondé la place Tahrir ces derniers jours, nous demandons le report des élections », ont-ils déclaré, en référence aux victimes de la répression menée par le Conseil suprême des forces armées (CSFA) contre les manifestants depuis le 19 novembre, qui a fait plus de 40 morts. A Zamalek, la résignation de la gauche et l’espoir inquiet des libéraux De l’autre côté du Nil, dans le quartier aisé de Zamalek, des colonnes de femmes font au contraire la queue devant les grilles des écoles dans un brouhaha revigorant. « Je n’ai jamais vu autant de femmes sans voile de ma vie », s’extasie un riverain assis sur un tabouret. Les électrices ne cherchent pas pour autant à cacher leurs désillusions sur le scrutin. «Le CSFA nous a pris à la gorge et le moment est très mauvais pour tenir des élections, déclare Madiha Doss, militante au Parti socialdémocrate. Mais on n’a pas le choix, ilfautvotertoutencontinuantlesitin à Tahrir, c’est le seul moyen d’avoir une petite légitimité pour faire pression sur les militaires. » La perspective d’une forte participation réjouit en effet les islamistes. Croisé à la sortie d’un bureau de vote du quartier populaire de Mokattam, Ossama Yacine (célèbre représentant des Frères musulmans sur la place Tahrir) ne cache pas sa joie : « C’est extraordinaire, tout le monde est venu voter! Même les paralysés, même les vieux, les aveugles. Le taux de participation va être exceptionnel, plus de 70 % c’est sûr ! C’est un grand jour pour la démocratie, vive l’Egypte! » p Benjamin Barthe et Claire Talon Un mode de scrutin très complexe Calendrier électoral Les élections à l’Assemblée du peuple, la Chambre basse, doivent avoir lieu en trois phases, du 28 novembre au 11 janvier 2012. Chaque phase consiste en deux tours de deux jours chacun, espacés d’une semaine. Les élections à l’Assemblée consultative, la Chambre haute, se tiendront dans la foulée, en trois phases également, du 29 janvier au 11 mars. Le scrutin présidentiel est censé se dérouler d’ici au mois de juin. Observateurs Après s’être opposé à la venue du moindre observateur étranger, le conseil militaire qui gère le pays depuis le départ du président Hosni Moubarak a donné son feu vert à sept ONG internationales, dont le Centre Carter pour la paix, qui seront chargées de surveiller le déroulement des scrutins. Des électeurs consultent la liste des candidats à Choubra (Le Caire), lundi 28 novembre. GORAN TOMASEVIC/REUTERS Israëls’inquiète del’affaiblissement del’arméeenEgypte Le gouvernement craint la montée en puissance des islamistes et une instabilité au Sinaï Jérusalem Correspondant P ourIsraël, lesmotifs d’inquiétude liés à la situation égyptiennesemultiplient.L’attentat commis, lundi 28 novembre, contre le gazoduc acheminant le gaz égyptien vers Israël et la Jordanie (qui avait déjà subi une attaque à l’explosif le 25 novembre) illustre l’instabilitéde l’Egypteetlecaractère de plus en plus incertain de ses relations avec Israël, estime-t-on à Jérusalem. C’est la neuvième fois en dix mois que ce pipeline, qui alimente 43 % de la consommation de gaz des Israéliens et 80 % de celle des Jordaniens, est ciblé. Comme les fois précédentes, l’attentat s’est déroulé aux environs de la ville égyptienne d’Al-Arich (nord du Sinaï). Cette nouvelle action conforte les doutes des dirigeants israéliens quant à la capacité du maréchal Hussein Tantaoui de contrôler la situation, puisque le chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA) avait affirmé, le 5 octobre, que la zone du Sinaï était « sécurisée à 100 % ». Les chefs de Tsahal estiment que cette région est devenue un « trou noir » propice à toutes les activités de contrebande et de terrorisme. Une nouvelle preuve en a été fournie le 23 novembre, lorsque deux soldats égyptiens ont été tués à la frontière par des contrebandiers bédouins. Enfin, la manifestationtrèsanti-israélienne organisée,vendredi auCaire, parles Frères musulmans renforce la conviction des dirigeants israéliens que l’époque d’une relation relativement harmonieuse avec l’Egypte est révolue. Les slogans entendus à cette occasion – « Un jour nous tuerons tous les juifs ! » –, mis en exergue par la presse israélienne, sont de mauvais augure, estime-t-on à Jérusalem. Les autorités n’en tablent pas moins sur le maréchal Tantaoui, qu’elles considèrent commele meilleurgarant dumaintien du statu quo, et redoutent que celui-ci soit « lâché » par les EtatsUnis. « Avec les militaires égyptiens, la coordination en matière de sécurité se poursuit, nous avons des interlocuteurs, on se parle, même si tout est beaucoup plus difficile qu’avant», constate un diplomate israélien. « Nous recevons de leur part des assurances fermes que l’accord de paix [signé en 1979] ne sera pas remis en cause », assure-t-il. « Nous ne nous attendons donc pas à une rupture de nos relations, mais à un lent pourrissement de la situation », ajoute-t-il. Les dirigeants israéliens sont conscients desubirl’enchaînement des événements en Egypte. Sachant que toute initiative intempestive de leur part ne pourrait qu’envenimer la situation, la consigne est toujours d’éviter tout commentaire officiel. Pour s’en être affranchi en estimant que les militaires israéliens «commencent à réaliserque l’Egypte se dirige vers un conflit avec Israël », le député travailliste Benyamin Ben Eliezer s’est fait officiellement rabrouer. « Eviter un chaos général » La plupart des experts ne croient pas à un tel scénario, ne serait-ce qu’en raison du moyen de pressionqueconstitue l’aideaméricaine à l’Egypte. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, s’est borné à rappeler que la préservationdutraité depaix estdansl’intérêt des deux pays. Israël, a insisté le ministrechargé deladéfensepassive, Matan Vilnaï, continue de faire confiance au maréchal Tantaoui pour « éviter un chaos général ». Mais cette confiance est relative : les Israéliens savent que 54 % des Egyptiens se prononcent pour l’annulationdutraitéde paixet ilsdoutent désormais de la capacité des militaires à endiguer la vague des Frèresmusulmans et des salafistes. Ilscraignent,d’autre part,lesconséquencesd’unevictoire dela Confrérie lors des élections, qui entraînera un renforcement de ses liens avec le Hamas, issu de ses rangs. De ce point de vue, il sembleavéré que le Hamas attend de connaître les résultats du scrutin égyptien avant de s’engager plus avant dans la réconciliation avec le Fatah, principal parti de l’Autorité palestinienne : en cas de victoire des Frères musulmans, il espère se renforcer dans la perspective des élections palestiniennes prévues en mai. Disposant de peu de cartes pour influencer la situation de l’autre côté de sa frontière sud, Israël renforce celle-ci. Outre qu’il a été décidé d’installer une brigade de Tsahal dans la région d’Eilat, les travaux pour réaliser la barrière de sécurité qui doit courir le long des 240kmdela frontièreégypto-israélienne s’accélèrent : celle-ci devrait être achevée en octobre 2012, six mois plus tôt que prévu. Bardé de fibres optiques, de radars et de caméras, cet ouvrage était initialement destiné à donner uncoup d’arrêtàl’immigrationillégale. « Il ne s’agit pas d’arrêter des chars égyptiens, souligne un diplomateisraélien, maisavec la détérioration de la situation en Egypte, l’objectif de cette barrière est aussi de surveiller la frontière et d’empêcher l’infiltration de terroristes. » p Laurent Zecchini Un rapport commandé par l’ONU accuse la Syrie de «crimes contre l’humanité» Tueries, viols, tortures… Les témoignages réunis par la commission, qui n’a pas pu se rendre sur place, sont accablants pour le régime de Damas M issionnée par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, la commission d’enquête internationale indépendante sur la Syrie a conclu, lundi 28novembre,quelesforcesdesécurité avaient commis des « crimes contre l’humanité », sur ordre du régime,depuis ledébut du soulèvement syrien en mars 2011. Au terme de plus de deux mois de travail, cette commission, composée de trois membres, donne, dans son rapport de 40 pages, un aperçu d’ensemble des violations des droits de l’homme en Syrie. « Nous avons documenté tous les types de violations des droits de l’homme : tueries, torture, déten- tions arbitraires, disparitions, abus sexuels, atteintes aux enfants, détaille Yakin Ertürk, une des trois auteurs et spécialiste turque de la violence faite aux femmes. Ces violations sont massives et systématiques. Des Syriens de tous âges, de toutes origines sociales ou géographiques ont été visés. Nous avons aussi remarqué que, partout dans le pays, le pouvoir a mobilisé les mêmes moyens : des forces armées, des milices de civils armés (les “chabiha”). Rien de cela n’était sporadique. Il y a eu des ordres hiérarchiques, une chaîne de commandement et une stratégie destinée à mettre fin aux manifestations. » Lacommission n’a paspu se ren- dre en Syrie, faute de réponse à sa demande de visa. Damas n’a pas répondu non plus au questionnaire détaillé envoyé par les enquêteurs. Ceux-ci ont donc interrogé 223témoinsetvictimesdelarépression réfugiés à l’étranger. Plusieurs témoignages de déserteurs confirmentquelesordresdonnésauxsoldats étaient bien de « tirer pour tuer». Le rapportcite lecas d’un soldat présent à Lattaquié en avril. « Les manifestants lançaient des appels à la liberté, ils portaient des branches d’olivier et marchaient avec leurs enfants, raconte-t-il. Nous avions l’ordre de les disperser ou de les éliminer, y compris les enfants, nous avons ouvert le feu. » Des tireurs embusqués ont également expliqué avoir tiré sur ceux qui tentaient de secourir les blessés. Des soldats tirant volontairement en l’air racontent avoir été arrêtés et torturés. « 256 enfants tués » Deux aspects de ce rapport sont particulièrement inquiétants. Il s’agit de l’utilisation des hôpitaux comme lieux d’arrestation, voire de torture et d’assassinat des manifestants blessés. Ainsi, des membres des forces de sécurité déguisés en médecins ont pu agir à l’hôpital militaire de Homs. L’autre phénomène exceptionnel et révoltant est le nombre extrêmement élevé d’enfants tués. « Des sources fiables indiquent que 256 enfants ont été tués par les forces gouvernementales au 9 novembre », précise le Brésilien Paulo Pinheiro, président de la commission d’enquête. Le rapport cite le cas de Thamer Al-Chari, un jeune de 14ans, mort sous la torture à Saïda. Un homme raconte aussi avoir été témoin du viol d’un garçon de 11 ans par trois officiers. Les enquêteurs demandent l’arrêtde la répression,l’envoi d’observateurs, la libération des prisonniers et appellent à l’instauration d’un embargo international sur les ventes d’armes à la Syrie. Le rapport doit être examiné très pro- chainement par une session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, qui pourra décider de le transmettre à l’Assemblée générale des Nations unies, faute de consensus, pour l’instant, au Conseil de sécurité, où la Russie bloque toute résolution condamnant la Syrie. Sur le plan diplomatique, la Turquiea annoncé qu’elle appliquerait des sanctions économiques identiques à celles décidées, le 27 novembre, par la Ligue arabe. Mais elle a écarté, pour le moment, l’idée de corridors humanitaires avancée, le 23novembre, parle chef dela diplomatie française, Alain Juppé. p Christophe Ayad 6 0123 international & europe Mercredi 30 novembre 2011 BarackObama Royaume-Uni: vers la plus grande grève presselesEuropéens depuis 30 ans dans la fonction publique Le 30 novembre, deux millions de personnes devraient manifester contre les réformes et l’austérité derésoudre lacrisedeladette Londres Correspondance Reçus le 28 novembre à Washington, les dirigeants de l’UE s’agacent des pressions américaines Washington Correspondante L es Européens ont retrouvé leur sommet Etats-UnisUnion européenne (UE). En juin2010, Barack Obama avait boudé la réunion prévue à Madrid, estimant que ce genre de conférences n’était pas assez productif. Voilà un an, le sommet de Lisbonne n’avait duré que quelques heures, dans les couloirs du sommet de l’OTAN. Les Européens ont appris la leçon : lundi 28 novembre, pour le premier sommet à la Maison Blanche depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il y a deux ans, l’ordre du jour était fait de sujets qui intéressent les Américains, comme la sécurité énergétique, le commerce transatlantique et un nouveau groupe de travail de haut niveau sur l’emploi et la croissance. Mais c’est la crise de l’Eurozone qui a pris le pas sur le reste des discussions. Les Américains s’impatientent. « Le président a dit clairement qu’il voudrait voir des actions plus audacieuses, plus rapides et plus décisives », a précisé William Kennard, l’ambassadeur américain auprès de l’UE à Bruxelles. Barack Obama a paru légèrement plus ouvert qu’au G20 de Cannes sur une aide de Washington. Assis aux côtés du président de l’UE, Herman Van Rompuy, et du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, il a assuré que les Etats-Unis « se Fitch menace de dégrader la note des Etats-Unis Le statut d’emprunteur des Etats-Unis a été écorné, lundi 28 novembre, avec les menaces de l’agence de notation Fitch de faire perdre au pays leur note « AAA », si les responsables politiques américains ne s’attaquent pas au déficit budgétaire, ce qui risque de ne pas être le cas jusqu’à l’élection présidentielle de novembre 2012. Pour Fitch, il y a désormais « une probabilité légèrement supérieure à 50 % » de voir la note abaissée dans les deux années à venir. Fitch était la dernière des trois grandes agences à maintenir une perspective « stable » sur la note « AAA » attribuée à la dette de long terme des Etats-Unis. Elle est désormais « négative », comme chez ses concurrentes Moody’s et Standard & Poor’s. tiennent prêts à prendre leur part pour aider à résoudre » la crise. « Si l’Europe se contracte, si l’Europe est en difficulté, il sera bien plus difficile pour nous de créer des emplois ici », a-t-il justifié. « Demi-mesures » Ce n’est pas la première fois que les responsables américains perdent patience. Quelques jours avant le G20, l'un d’eux grommelait contre les « demi-mesures» prises en Europe. A Cannes, M.Obama avait reçu ce qu’il a appelé un « cours accéléré » en institutions européennes.Lundi,MM.VanRompuy et Barroso lui ont expliqué les étapes d’ici au Conseil européen du 9 décembre. « Parfois, les décisions prennent du temps », a avancé le président de la Commission. « Bien sûr que nous sommes inquiets, a indiqué M. Kennard. Mais le président Obama est conscient des réalités politiques et des difficultés auxquelles l’Europe est confrontée dans la recherche d’une solution. » Comme à Cannes, les responsablesaméricains se sont bornés, ontils assuré, à prodiguer « conseils et recommandations » à leurs partenaires. Ceux-ci ne cachent pas qu’il ne saurait en être autrement, compte tenu du palmarès des Américains eux-mêmes dans la réduction d’une dette qui approche les 100 % du PIB. A ce propos, MM. Van Rompuy et Barroso ont demandé à M. Obama ce qu’il comptait faire maintenant que le super-comité bipartite chargé de la réduction des déficits s’était séparé sur un échec, alors que le G20 de Toronto a inscrit la diminution de la dette dans les obligations des pays en déficit. Les Européens, selon le mot de l’un d’eux, s’inquiètent d’être « pris en otages » de l’élection présidentielle de novembre 2012 aux EtatsUnis. Dans le communiqué commun, ils ont fait inscrire qu’ils attendent « des actes des EtatsUnis en direction d’une consolidation budgétaire à moyen terme ». En privé, les responsables européens sont agacés par l’insistance de la presse américaine à souligner leurs tergiversations. « Les chiffres des Américains sont pires que les nôtres», glisse l’un d’eux. « Et combien de rapports sur la dette ? Combien de commissions de réduction du déficit pour un pays qui n’a que deux partis, un président et un Congrès. Multipliez ça par 27 !» p Corine Lesnes Israël Tirs de roquettes sur le nord d’Israël JÉRUSALEM. Aucune formation politique libanaise n’avait encore revendiqué, dans la matinée de mardi 29 novembre, la responsabilité du tir de plusieurs roquettes Katioucha (3 ou 4 selon les sources) qui sont tombées, dans la nuit de lundi à mardi, en Galilée. L’armée israélienne a répliqué par des tirs d’artillerie sur le territoire libanais. Cet échange de tirs n’a fait aucune victime et peu de dégâts du côté israélien. Israël a estimé qu’il s’agissait « d’un incident grave », qui relève « de la responsabilité du gouvernement et de l’armée libanaise ». Le dernier incident à la frontière libanaise remonte au 1er août, lorsque des militaires libanais et israéliens avaient échangé des coups de feu. p Laurent Zecchini Kosovo Nouveaux incidents entre OTAN et Serbes PRISTINA. De nouveaux heurts ont eu lieu, lundi 28 novembre, entre les soldats de la KFOR, la force de l’OTAN au Kosovo, et des Serbes. Vingt-cinq soldats ont été blessés, dont deux par balles, ainsi que cent manifestants serbes, selon Belgrade. Les incidents ont débuté lorsque la KFOR a démantelé une barricade serbe près de Zupce. Depuis des mois, les autorités kosovares tentent de prendre le contrôle des postes frontières avec la Serbie, dans une zone très majoritairement peuplée par des Serbes. – (AFP.) Emirats arabes unis L’émir gracie des militants ABOU DHABI. L’émir Khalifa Ben Zayed Al-Nahyane a gracié, lundi 28 novembre, cinq militants pro-démocratie condamnés à des peines de prison. Ils avaient été accusés d’avoir « humilié » les dirigeants de la fédération qu’il dirige. – (AFP.) P our la première fois de sa vie, Margaret Palmer va faire grève, mercredi 30 novembre. Mais c’est la mort dans l’âme : à 44 ans, cette spécialiste des soins psychologiques pour les enfants, qui travaille dans une clinique de Londres, n’a rien d’une militante. Elle estime cependant que l’heure est grave : « L’ensemble du secteur public subit une attaque majeure. Le gouvernement tente de faire retomber sur nous les conséquences de la crise financière, qui est pourtant la faute des banquiers. » Le 30 novembre, elle ne sera pas la seule à descendre dans la rue pourla première fois.Trente syndicats, essentiellement de la fonction publique, ont voté la grève. Environ deux millions de personnes sont attendues, ce qui en fera le plus grand mouvement social depuis janvier 1979, quand « l’hiver du mécontentement» avait immobilisé le Royaume-Uni. Pour certains syndicats, la décision est historique : celui des directeurs d’école appelle à la grève pour la première fois de son histoire de 114 ans. Unegrande partie desécolesseront fermées.Lesdouanes appelantégalement à arrêter le travail, le chaos est attendu dans les aéroports. L’ampleur de la colère est donc inéditedepuisune génération.L’explication vient de la réforme des retraitesde lafonction publique.Le gouvernement négocie depuis neuf mois un changement radical : les salariés devront augmenter de 50 % leur contribution (qui passe de 6 % de leur salaire à 9 %) ; ils toucheront une pension plus faible, basée sur la moyenne des salaires plutôt que sur les dernières années ; et l’âge de la retraite, qui s’étale actuellement entre 60 et 65 ans, va être augmenté à 65 ans pour tous en 2018, puis 66 ans dès 2020 et progressivement jusqu’à 68 ans d’ici une trentaine d’années. Jane Wilson, une collègue de Mme Palmer, a calculé qu’elle allait devoir contribuer d’environ 100 euros supplémentaires chaque mois pour toucher 100 euros de moins par mois quand elle sera àlaretraite:«Cetteréformeestidéologique et politique. » Préparation des manifestations du 30 novembre prévues en Grande-Bretagne. OLIVIA HARRIS/REUTERS Le gouvernement réplique que l’allongement de la durée de vie rend ces changements indispensables. De plus, il souligne que les retraites dans le secteur privé sont nettement moins généreuses : celles-ci fonctionnent sur la base de fonds de pension, dont la valeur s’est effondrée avec les différentes crises boursières. La colère de la fonction publique britannique va cependant bien au-delà des retraites. Le vaste plan d’austérité lancé par le gouvernement, en vigueur depuis le début de l’année, se fait sentir très fortement. Rien qu’au premier semestre, 150 000 emplois du service public ont été supprimés, sur un totalde six millions. Les collectivités locales sont les plus touchées, le gouvernement réduisant les transferts vers elles d’un quart en cinq ans. A Kaleidoscope, le centre de soins psychologiques pour mineurs du sud-ouest de Londres où travaille Mme Palmer, le budget a été réduit de 25 % cette année. Une dizaine d’emplois sur cinquante ont été supprimés. La conséquence sur la qualité des soins se fait sentir. En particulier, l’attente pour recevoir les enfants pour leur première visite est passée de trois à quatre mois en moyenne. « Le moral est très bas actuellement, estime Mme Palmer. Pendant longtemps, travailler dans la fonction publique apportait une garantie de l’emploi. Ce n’est plus le cas. Les retraites étaient le dernier avantage qu’on avait. » A la mairie de Westminster, à Londres, Jo, une assistante sociale, La colère de la fonction publique britannique va bien au-delà de la question des retraites raconte la même histoire. Elle aussi fait grève pour la première fois de sa vie. « Dans quelques semaines, on va perdre 20 % de nos effectifs. Concrètement, ça veut dire que je vais moins rendre visite aux gens dont je m’occupe, que je ne vais pas avoir le temps de bien les connaître. C’est pour eux que je me bats.» Si la colère est profonde, les syndicats prennent cependant un important risque avec cettegrande grève. Lesecteur privé ne suit pas le mouvement : les transports – gérés par des entreprises privées – fonctionneront presque partout pendant la mobilisation, par exemple. «Lessyndicats n’ont pas réussiàfaire passer le message que la bataille pour leur retraite était dans l’intérêt de tous », estime Paul Marginson,spécialiste desquestions sociales à l’université de Warwick. Pour l’instant, les Britanniques semblent solidaires : 61 % disent soutenir la grève, selon un sondage de la BBC. Mais dans un pays où les mouvements sociaux sont très rares depuis les années Thatcher, cette attitude est très fragile. L’opposition travailliste ne s’y trompe pas et ne sera pas dans les manifestations. Les grévistes eux-mêmes ne savent pas s’il s’agit du début d’un long mouvement social ou d’une action sans lendemain. « Cela va être une journée-clé, estime Mark Perry, un collègue de Mme Palmer. La grève peut galvaniser les énergies et lancer une vague de manifestations. Mais beaucoup de nos collègues disent qu’ils ne sont pas prêts à se mobiliser plus d’une journée.C’est sur cettefaiblesseque compte le gouvernement. » p Eric Albert «Le Pakistan n’est pas le complice des talibans» Selon le général Athar Abbas, les bavures de l’OTAN ont déjà coûté la vie à 70 soldats pakistanais Entretien prévenir en cas d’échanges de tirs ? L De nouveau se pose la question de vos liens avec les insurgés et notamment les talibans, qui pourraient être utilisés par le Pakistan comme un outil de politique extérieure dans la région ? e général Athar Abbas est le porte-parole del’armée pakistanaise depuis 2008. Ce pilier de l’establishment militaire au Pakistan était, lundi 28 novembre, de passage à Paris. L’OTAN vient de tuer 24 soldats pakistanais dans un poste frontière près de l’Afghanistan. Kaboul avait fait état de tirs provenant de cette zone, est-ce vrai ? Non. Les deux postes avancés bombardés par l’OTAN n’avaient rien de refuges de talibans. Ils sont établis sur des hauteurs et des drapeaux pakistanais y flottent de façon visible. De plus, l’activité insurgée est réduite depuis que nous avons repris cette zone dans l’agence de Mohmand. Il s’agit du huitième incident de ce genre et 70 soldats pakistanais ont perdu la vie à cause de l’OTAN. Nous attendons le résultat de l’enquête. Nous ne pouvons rester dans une situation où nous sommes sans arrêt désignés comme des complices de terroristes. C’est le Pakistan qui a perdu le plus d’hommes face aux insurgés. Deplus, à quoi servent les procédures d’alerte mises en place de part et d’autre de la frontière pour Ce discours est inexact. Notre armée est le premier ennemi des insurgés. Nos services de renseignement,l’ISI, ont perdu 300 hommes. Ensuite, évidemment que leur rôle est de savoir ce qui se passe dans les zones tribales frontalières et d’être au contact des talibans et autres groupes insurgés. Cela ne fait pas de nous des complices. De même, nous ne négocions pas en ce moment avec les talibans pakistanais, contrairement à ce qui a été dit. Quant à nos relations avec les talibans afghans, ce serait une erreur de croire que nous pourrions reproduire un schéma de relations identiques à celles qui prévalaient entre 1996 et 2001, lorsqu’ils dirigeaient l’Afghanistan. La guerre est passée par là. Nous ne pouvons pas parier sur le retour de tel ou tel groupe. Enfin, nous devons aussi faire face à une économie générée par la guerre qui fait vivre des groupes criminels, au Pendjab, en Inde, au Pakistan et en Afghanistan. Ceuxlà, souvent liés à la drogue, ne veulent pas la fin de la guerre. Cette frappe contre vos soldats ne risque-t-elle pas d’exacerber plus encore vos relations avec les Etats-Unis qui vous accusent souvent de double jeu ? Nos deux pays partagent le même objectif : s’opposer à la menaceterroriste,mais nousdivergeons visiblement sur la méthode. Nous n’avons aucun intérêt, de partet d’autre, à casser notre lien et nous voulons poursuivre notre coopération avec Washington. Dans les zones tribales, le seul recours à la force, notamment au Waziristan, ne peut fonctionner. Il faut s’appuyer sur les tribus qui, seules, peuvent tenir un territoire ravagé par la guerre et qui, seules, exercent une réelle autorité sur des populations pauvres, illettrées sans accès aux hôpitaux. Le raisonnement américain à l’adresse des insurgés consistant à dire « morts, capturés ou réintégrés » manifeste une profonde méconnaissance de cetterégion, essentiellementpachtoune. Ne pas prendre en compte cette dimension sociale et politique est suicidaire. Pour autant, nous avons repris pied dans quatre agences tribales sur sept, où cinq brigades sont à l’action. Reste le nord Waziristan, Orakzaï et Khyber à reprendre. Nous ressentons beaucoup d’ingratitude des Etats-Unis. Quel intérêt avait l’ISI de tout faire pour faire rentrer chez lui Raymond Davis, l’agent de la CIA arrêté à Lahore, en janvier, après avoir tué deux Pakistanais, alors que le pays tout entier voulait qu’il soit jugé ? Qu’avons nous eu en retour, si ce n’est des reproches ? Quel bilan faites-vous de ces dix ans de guerre afghane ? Qu’il est très facile de déclarer la guerre et qu’il est plus difficile de construire et de faire vivre les gens ensemble. D’ici le départ des troupes combattantes en 2014, les Américains doivent radicalement changerdeméthodeetremettrelapolitiquer au cœur de leur stratégie. Ils doivent parier sur la réconciliation en évitant de se disperser. Ils doiventsefocaliser sur unseul groupe, puis le mouvement fera tâche d’huile. Le Pakistan sera derrière eux, même après 2014, à condition qu’ils privilégient le développementetlesoutien auxforcesafghanesetnonla poursuited’unestratégie antiterroriste vaine. p Propos recueillis par Jacques Follorou planète 0123 Mercredi 30 novembre 2011 7 Le maïs transgénique de nouveau légal en France Le gouvernement cherche une riposte à la décision du Conseil d’Etat qui donne raison au semencier Monsanto L e Conseil d'Etat a tranché,lundi 28 novembre : la France ne peut pas décider, seule, d’interdire sur son sol la culture de semences génétiquement modifiées. Du moins pas de la façon dont le gouvernement s’y était pris en décembre 2007, en rédigeant un arrêté qui suspendait la commercialisation et l’utilisation du maïs MON810 puis en en interdisant la culture en février 2008. Cette céréale génétiquement modifiée (GM) du semencier américain Monsanto était la seule cultivée en France jusqu’alors. Critiquée par le Haut Conseil des biotechnologies, suspectée de toxicité pour les rongeurs, elle produit une toxine Bt destinée à éliminer les insectes. Monsanto et nombre de négociants et producteurs de semences avaient attaqué ces deux arrêtés du ministère de l’agriculture et de la pêche, arguant d’un « excès de pouvoir ». Ils viennent de remporter une manche dans la longue bataille des OGM : les décrets sont annulés. La ministre de l’écologie Nathalie Kosciusko-Morizet, s’est dite « plus déterminée et plus convaincue encore qu’en 2008 de la nécessité » d’obtenir à nouveau la suspension du MON810. Avec son homologue de l’agriculture, Bruno Le Maire, ils ont pris acte de la conclusion du Conseil d’Etat et uni leurs voix pour affirmer que des incertitudes persistantes conduisaient « le gouvernement à maintenir, sur le territoire français, son opposition à la mise en culture du maïs MON810 ». Pourtant, les deux ministres ne s’avancent guère sur les moyens d’y parvenir. Cette prudence pourrait permettre au chef de l’Etat d’avoir le privilège d’une annonce sur ce thème, auquel l’opinion publique est sensible. Nicolas Sarkozy devait se rendre mardi dans le Gers à la rencontre d’agriculteurs pour évoquer leurs conditions de vie et leurs moyens de production. Cette réserve ministérielle correspond peut-être aussi à un certain embarras face à cet imbroglio Un outil majeur dans les pays en développement Surfaces En 2010, selon l’International Service for the Acquisition of Agri-Biotech Applications, 19pays en développement et dix industrialisés ont cultivé 148 millions d’hectares de plantes OGM (maïs, coton, soja, colza, tomate, betterave, luzerne, etc.). Palmarès Si les Etats-Unis sont le plus gros cultivateur d’OGM (66,8millions d’hectares), suivis du Brésil (25,4), de l’Argentine (22,9) et de l’Inde (9,4), le potentiel est du côté des pays en développement. Plus de 90% des fermiers qui en utilisent sont des cultivateurs du Sud à faibles ressources. Europe 8 pays cultivaient des plantes OGM en 2010 : Espagne, Pologne, Slovaquie, Roumanie, Portugal (maïs Bt) ; République tchèque (maïs Bt et pomme de terre) ; Allemagne et Suède (pomme de terre). 7 Etats membres ont fait jouer la clause de sauvegarde contre le maïs MON810 : Allemagne, Autriche, France, Grèce, Hongrie, Luxembourg et Bulgarie. politico-juridique. Sur la question des OGM, la Commission et le Parlement européens sont plutôt favorables à la subsidiarité des Etats, ce qui leur permettrait de décider, chacun, de cultiver ou non des OGM. Mais faute d’accord entre les Vingt-Sept, cette voie n’a pas été retenue, pour l’instant. Une première réunion technique pour trouver une échappatoire s’est tenue à Matignon lundi. La décision du Conseil d’Etat n’est pas une surprise, reconnaît le ministre de l’agriculture. Elle était prévisible puisqu’elle découle de celle que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendue, le 8 septembre, en réponse aux questions préjudicielles posées par la haute juridiction française. Les juges européens ont stipulé qu’un Etat membre ne pouvait pas interdire un produit GM, sauf si celui-ci était « de toute évidence susceptible de présenter un risque grave pour (…) l’environnement », pour la santé humaine ou animale et à condition qu’il existe une urgence manifeste à agir. Le gouvernement n’a pas su «bien ficeler son dossier face à la puissance de feu d’un lobby tel Monsanto» Jean-Luc Bennahmias député Modem Au moment où la juridiction européenne rendait son avis, Nathalie Kosciusko-Morizet a déclaré que, si l’interdiction fran- çaise était annulée pour des questions de procédure, le gouvernement prendrait « une nouvelle clausede sauvegarde selonla procédure jugée adéquate par la CJUE, car les questions environnementales, elles, demeurent sans réponse. » Le dossier ne semble pas simple à boucler. Le risque existe de voir les promoteurs des OGM s’engouffrer dans la brèche juridique. « Nous accueillons de manière positive le fait que le droit reprenne le dessus, annonce Yann Fichet, directeur des affaires institutionnelles de lafiliale française de Monsanto. Depuis 2007, on refuse de laisser le choix aux agriculteurs, on les a privés des OGM dont bénéficient des millions d’agriculteurs sur des millions d’hectares dans le monde, depuis des années. » Autre partie requérante aux côtés de la multinationale, l’Association générale des producteurs de maïs « se félicite de constater que le droit a enfin prévalu sur des décisions arbitraires et démagogiques ». Céline Duroc, sa directrice adjointe, renchérit : « Le dossier de l’Etat est vide alors qu’une clause de sauvegarde est une initiative très encadréeau niveau communautaire. Ce ne serait pas raisonnable d’en prendre une nouvelle après la décision du Conseil d'Etat : nous l’attaquerions à nouveau et nous gagnerions à coup sûr. » Rappelant au passage que la France est le premier producteur européen et le principal exportateur mondial de semences de maïs, elle renvoie à la loi de mai 2008 et réclame la publication des décrets correspondants. Ce texte, lui-même transposé d’une directive européenne de 2001, était censé réglementer la coexistence entre cultures traditionnelles et OGM. Les réactions ne se sont pas fait attendre sur ce dossier extrêmement sensible. La Confédération paysanne, l’Union nationale des apiculteurs, les associations de défense de l’environnement, le député européen José Bové pressent le gouvernement d’obtenir une seconde interdiction du maïs transgénique avant les semis du printemps 2012. François Hollande et Corinne Lepage se sont joints aux critiques. Le député Jean-Luc Bennahmias (Modem) en profite pour épingler le gouvernement qui n’a pas su « bien ficeler son dossier face à la puissance de feu d’un lobby comme Monsanto. » p AU MOMENT OÙ le Conseil d’Etat annulait la suspension de culture de maïs OGM de Mosanto MON810 en France, lundi 28 novembre, les députés ont adopté une proposition de loi très controversée touchant au cœur de l’activité agricole. Ce texte relatif aux « certificats d’obtention végétale » instaure le versement d’une redevance pour l’utilisation des semences dites de ferme. Cette appelation désigne les semences que les agriculteurs réutilisent d’une année sur l’autre. Un tel mécanisme existe déjà pour le blé tendre : tout agriculteur qui livre sa récolte de blé tendre à un organisme collecteur doit verser une contribution de 5 centimes d’euro par quintal de blé livré. Le texte adopté prévoit donc de l’étendre à d’autres semences. La liste n’est pas arrêtée, mais vingt et une semences seraient concernées, en particulier les céréales. Quid des autres, comme les semences de légumes? Leur réutilisation pourrait alors se voir interdites. La pratique des semences de ferme «doit être autorisée, mais elle ne peut être libre de droit comme elle l’est aujourd’hui», a expliqué le ministre de l’agriculture Bruno Le Maire, qui défendait le texte. Cette proposition de loi, présentée par le sénateur UMP Christian Demuynck, avait été adoptée par le Sénat en première lecture le 8 juillet. Des syndicats d’agriculteurs comme la Confédération paysanne et la Coordination rurale sont montés au créneau pour dénoncer ce qu’ils qualifient de «privatisation des semences ». Selon Guy Kastler, de la Confédération paysanne : « Le vote à l’Assemblée, sans amender le texte pour qu’il soit définitivement adopté avant l’élection présidentielle représente un véritable passage en force. » A l’inverse, le Groupement national interprofessionnel des semences (GNIS) se félicite d’un texte qui « sécurise le financement de la recherche et donne aux sélectionneurs les moyens de développer durablement des programmes d’amélioration des plantes ». Même satisfaction du côté de syndicat agricole FNSEA. Pour son président Xavier Beulin, « il est normal que les agriculteurs participent au financement de la création variétale puisqu’ils en bénéficient ». Il souligne également que le montant des redevances sera discuté au niveau de l’interprofession. La Coordination rurale n’a pas manqué de souligner que M. Beulin est aussi à la tête du groupe Sofiprotéol, actionnaire de semenciers français comme Limagrain ou Euralis Semences. La balle est maintenant dans le camp de Bruno Le Maire, qui doit préciser les règles par décret. p Laurence Girard zegna.com * Vivre passionnément L’Assemblée taxe l’utilisation des semences Martine Valo Passion for Life* Maroquineries en veau imprimé et Cravates 8 0123 planète Mercredi 30 novembre 2011 En Belgique, victoire posthume Un quart des sols contre Eternit d’une victime de l’amiante mondiaux sont La multinationale devra verser 250000euros à la famille, décimée par des cancers de la plèvre très dégradés, selon les Nations unies Bruxelles Correspondant L a multinationale Eternit a subiune défaitejudiciairecinglante, lundi 28 novembre. La firme, qui possède aussi des branches suisse et française, a été condamnée par le tribunal civil de Bruxelles à verser 250 000 euros aux descendants d’une plaignante mortedu mésothéliome, un cancer de la plèvre causé par l’amiante. Le jugeadénoncéle«cynismeincroyable» et la « chasse au profit » de dirigeants qui ont longtemps nié leur responsabilité,avantde tenterd’invoquer la prescription des faits. Dès lundi, l’entreprise a fait savoir qu’elle ferait appel de cette décision, une première dans un pays qui a été longtemps le premier « consommateur » mondial d’amiante. Les juges se sont inspirés d’arrêts intervenus dans d’autres pays – dont la France. « Il est rassurant de voir que, face à une multinationale, une autre multinationale,celledesvictimesetdesjuristes, se met en place », commente Alain Bobbio, le secrétaire national d’Andeva, l’Association française des victimes de l’amiante. La nocivité de ce produit industriel « miracle », résistant à la chaleur et au feu, fut démontrée dès 1967. Il ne fut toutefois interdit qu’en 1998 en Belgique et en Europe. On estime qu’il tue aujourd’hui environ 100 000 personnes par an. Autorisé dans d’autres parties du monde et dans certains secteurs, l’amianteestaujourd’huiessentiellementproduitdansdespaysémergents, en Russie et au Canada. Ce dernier pays serait toutefois près de stopper sa production. Françoise Jonckheere était l’épouse d’un ingénieur qui travaillait à Kapelle-op-den-Bos, la principale unité belge d’Eternit. Son mari est mort d’un mésothéliome en 1987, elle a succombé treize ans plus tard. Refusant le dédommagement (42 000 euros) que lui proposait l’entreprise, elle a fait promettre à ses cinq fils de poursuivre soncombat. Deux d’entre eux sont morts, les trois autres craignent d’être frappés par une maladie qui se déclenche en général au bout de trente ans. Acet égard,letribunaldeBruxelles a formulé une précision importante, qui pourrait faire jurispru- La FAO appelle à une gestion plus raisonnée des ressources en terres agricoles et en eau U Le 24 octobre, devant le tribunal de Bruxelles, Eric Jonckheree (au centre), dont les parents sont morts d’un mésothéliome. Le père était ingénieur à Kapelle-op-den-Bos, principale unité belge d’Eternit. VIRGINIE LEFOUR/AFP dence.Ilacontesté laversiond’Eternit, selon laquelle l’affaire devait être prescrite puisque Mme Jonckheere avait été contaminée en 1958, moment de son installation à Kapelle-op-den-Bos. Le juge a estiméque laprescriptionne peut courir si la victime ignore son mal. Me Jan Fermon, l’avocat de la famille Jonckheere, en appelle désormaisau monde politique belge pour qu’il fasse en sorte que « le pollueur soit le payeur ». En vertu d’un accord conclu il y a quelques années, un fonds « amiante » indemnise les victimes et,en échange, ces dernières renoncent à toute poursuite. Me Fermon dénonce cette situation et le fait que les indemnisations soient acquittées par la collectivité et non par les industriels. Les ennuis judiciaires d’Eternit ne sont, en tout cas, pas terminés. A Turin, en Italie, le milliardaire suisse Stephan Schmidheiny, 62 ans, et le baron belge Jean-Louis Marie Ghislain de Cartier de Marchienne, 89 ans, respectivement ex-propriétaire du groupe Eternit et ancien actionnaire belge de la branche italienne de l’entreprise, sont poursuivis pour avoir provoqué une catastrophe environnementale et enfreint les règles de la sécurité au travail. Ils risquent vingt ans de prison, peine réclamée par le procureur. Le verdict est attendu à partir de février 2012. Lejugeadénoncéle «cynismeincroyable» etla«chasseau profit»dedirigeants quiontlongtempsnié leurresponsabilité «Les conditions de travail dans le groupe Eternit étaient les mêmes en Italie, en Belgique ou en France, explique Bruno Pesce président de l’Association des victimes de l’amiante de Casale Monferrato, dans le Piémont, siège de l’une des plus grandes usines de la multinationale dans la Péninsule. Eternit a toujours nié la dangerosité de ses produits. Qu’un tribunal belge ait reconnu sa responsabilité est une excellente nouvelle. » Dans son réquisitoire, en juillet, le procureur de Turin avait évoqué « une tragédie qui s’est déroulée sous une unique responsabilité en Italie et ailleurs, sans qu’aucun tribunaln’aitjamaisappelélesresponsables à répondre de leurs actes ». On estime à 3 000 le nombre des victimes en Italie, où, selon les experts, l’amiante devrait tuer jusqu’en 2020. Les deux prévenus n’ont jamais daigné se déplacer au tribunal pour affronter ce procès, le premier au pénal, ouvert en décembre 2009 et considéré comme le plus grand jamais organisé sur le drame de l’amiante. Au total, près de 2 900 parties civiles demandent réparation d’un préjudice estimé à 5 milliards d’euros. En France, quelque 15000 plaintes pour indemnisation ont déjà été déposées au civil et la plupart ont débouché sur des condamnations. Andeva espère surtout que la justice française se décidera, comme en Italie, à traduire enfin au pénal certains responsables, ce qui conclurait des procédures initiées il y a plus de quinze ans. p Jean-Pierre Stroobants avec Philippe Ridet (à Rome) n quart des terres mondiales est très dégradé ou affiche une forte tendance à la dégradation, alors que 46 % sont «peu ou moyennement dégradés », voire « en cours de bonification». Partant de ce constat, le dernierné des rapports de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), consacré à « L’état des ressources en terreset eneau dansle monde» et présenté lundi 28 novembre, dessine une voie censée permettre à l’agriculture mondiale de relever le défi qui l’attend d’ici à 2050 : nourrir plus de 9 milliards de personnes, ce qui nécessiterait une augmentation de 70 % de la production agricole, selon la FAO. « L’agriculture occupe déjà 11 % de la surface des terres émergées de la planète » et « utilise 70 % de toute l’eau tirée des aquifères, des cours d’eau et des lacs », rappelle le rapport. Cependant, le rythme de croissance de la production agricole et d’amélioration des rendements ralentit depuis quelques années. Rapport de cause à effet ? « Les gains de production ont été associés à des pratiques de gestion qui ont dégradé les systèmes d’exploitation de la terre et de l’eau dont dépend la production. » Toute la planète est concernée, selon la FAO, des hauts plateaux d’Amérique centrale détériorés par l’érosion à l’Europe occidentale, touchée par la pollution des terres et des eaux, mais l’Afrique et l’Asie sont les continents où la situation est la plus alarmante. Les experts de la FAO affirment que, d’ici à 2050, « il sera nécessaire de produire un milliard de tonnes de céréales et 200 millions de tonnes de produits animaux supplémentaires chaque année » pour nourrir une population de plus en plus nombreuse et aspirant à un certain standard alimentaire. « Plus des quatre cinquièmes de l’augmentation de la production agricoled’ici à2050 devraient résulter d’une amélioration de la productivité sur les terres actuelle- Le climat pourrait être légèrement moins sensible au dioxyde de carbone Le débat sur l’ampleur du réchauffement dû à la concentration atmosphérique en CO2 reste ouvert D eux degrés Celsius. Derrière l’objectif affiché de la communauté internationale – limiter à 2˚C le réchauffement du climat terrestre, par rapport à la période préindustrielle – se cache un épineux problème scientifique. Une question opportunément remise sur le devant de la scène par la revue Science alors que s’ouvrait, lundi 28 novembre à Durban (Afrique du Sud), la conférence des Nations unies sur le climat. De quoi s’agit-il ? Simplement de savoir à quel niveau de dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique correspond une élévation de la température moyenne de la terre de 2˚C… Cette question qui demeure ouverte n’est abordée par les scientifiques qu’en termes de probabilités. Les travaux menés par Andreas Schmittner (université de l’Etat d’Oregon,Etats-Unis)etmis àl’honneur dans la dernière édition de Science suggèrent qu’un doublement du CO2 dans l’atmosphère conduirait à une élévation probable (avec une probabilité supérieure à 66 %) de la température comprise entre 1,7˚C et 2,6˚C, la meilleure estimation tournant autour de 2,3˚C.Ce seraitdonc là,selon M. Schmittner et ses coauteurs, l’élévationlaplusprobable detempérature en réponse à une stabilisation du CO2 atmosphérique à 550 parties par million (ppm) – contre 275 ppm au XIXe siècle et environ 390 ppm aujourd’hui. Couverture nuageuse Cette nouvelle évaluation sonne comme une bonne nouvelle. En effet, dans son dernier rapport, publié en 2007, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) estimait – à partir de la douzaine d’études alors publiées sur le sujet – que le climat terrestre était légèrement plus sensible au CO2. Pour un doublement de ce dernier, l’élévation de température estimée probable était comprise, selon le GIEC, entre 2˚C et 4,5˚C. La meilleure estimation étant à environ 3˚C. Ces résultats, écrivent les chercheurs, « impliquent une probabilité plus faible qu’escompté jusqu’à présent, de l’imminence d’un changement climatique ». Pour autant, mettent en garde la dizaine de climatologues qui tiennent le blog RealClimate, « ces nouveaux tra- vaux » ne sont pas « automatiquement meilleurs que les précédents », pas plus qu’ils ne les « remplacent ». La méthode utilisée par M. Schmittner a été de rassembler les donnéespaléoclimatiques (températures, concentration de CO2…) du dernier maximum glaciaire, il y a 21 000 ans. Ils ont ensuite comparé ces données avec les résultats du modèle climatique canadien et ont observé la meilleure concordance entre les données et la simulation lorsque les paramètres du modèle confèrent au climat une sensibilité à un doublement du CO2 comprise entre 1,7˚C et 2,6˚C. Pour la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte, chercheuse (CEA) au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), « cette étude est intéressante en ce qu’elle utilise des données des climats du passé pour contraindre des modèles prédictifs ». Cependant, note la chercheuse, « le modèle utilisé est très simple et ne parvient pas bien, par exemple, à reproduire l’amplification polaire », ce phénomène qui provoque actuellement un réchauffement exacerbé dans la zone arctique. Un pas vers une taxe carbone sur le commerce maritime La Chambre internationale de la marine marchande (ICS) devait, dans une déclaration commune avec les ONG Oxfam et WWF, annoncer, mardi 29 novembre, à Durban, un accord de principe sur la taxation de ses émissions de CO2. ICS, qui représente 80 % de la flotte marchande mondiale, accepterait que des mesures fondées sur le marché soient mises en place pour inciter le secteur à réduire ses émissions. A l’instar du transport aérien, le commerce maritime, qui est responsable de 3 % des émissions mondiales, n’est aujourd’hui soumis à aucune contrainte. L’argent recueilli pourrait, pour partie, servir à alimenter le Fonds vert destiné aux pays en développement. La taxation du commerce maritime est l’une des pistes privilégiées par le G20 dans le débat sur les sources de financements innovants. Les climatologues-blogueurs de RealClimate pointent pour leur part le fait que le modèle utilisé n’intègre pas les modifications possibles de la couverture nuageusequi pourrait accélérer le réchauffement au lieu de le freiner… De plus, ajoute Mme Masson-Delmotte, la base de données utilisée par les chercheurs « intègre plus de données océaniques que de données continentales, or nous savons que l’augmentation des températures est toujours plus forte au-dessus des terres émergées qu’au-dessus des océans ». Conclusion : « Du coup, il est normal que cette évaluation de la sensibilité du climat au CO2 soit plutôt dans la fourchette basse », estime la chercheuse. Lesspécialistess’accordentgénéralement pour estimer que l’augmentation minimale de température consécutive à un doublement du CO2 est d’un peu moins de 2˚C. Mais définir la limite supérieure est beaucoup plus compliqué. Certaines études situent celle-ci à plus de 5˚C. Une étude publiée en 2005 dans Nature n’excluait pas la possibilité que celle-ci soit légèrement supérieure à… 11˚C. p Stéphane Foucart ment exploitées », ajoutent-ils. La surface des terres cultivées a augmenté de 12 % au cours des cinquante dernières années, une progressionqui correspondau doublement des surfaces irriguées. Les pays qui devront augmenter le plus leur production sont également les plus touchés par la dégradation des sols, la surexploitation des ressources et le changement climatique. Dans ces pays à faible revenu, la surface de terre cultivée rapportée au nombre d’habitants est de 0,17 hectare, contre 0,37 pour les pays riches. « Il existe un lien étroit entre pauvreté et accès insuffisant aux ressources en terres et en eau », constatent les auteurs du rapport. Plan Marshall Pour améliorer la productivité de l’agriculture tout en ménageant des ressources dont l’usage risque de susciter des concurrences de plus en plus vives, la FAO recommande une gestion intégrée des ressources en terres et en eau, « l’inclusion systématique des droits d’usage coutumiers et traditionnels dans les lois nationales », une décentralisation du contrôle de l’irrigation, une réglementation plus efficace des retombées environnementales ou encore « une augmentation de la part des ressources publiques allouées à l’agriculture ». « Maintenir le statu quo, en apportant éventuellement quelques ajustements marginaux, ne suffira pas », prévient l’agence onusienne. Le rapport évalue à 750 milliards d’euros les investissements nécessaires entre 2007 et 2050 pour le développement et la gestion de l’irrigation dans le monde, auxquels s’ajouteraient 120 milliards d’euros « pour la protection et la mise en valeur des terres, la conservation des sols et la lutte contre les inondations ». Un véritable plan Marshall pour convertir l’agriculture mondiale à des pratiques plus durables, en somme. p Gilles van Kote Sahel Le Mali en crise alimentaire Les autorités maliennes cherchent à acquérir près de 46 000 tonnes de céréales pour pouvoir nourrir gratuitement 1,7million de personnes menacées par la crise alimentaire, a-t-on appris, lundi 28 novembre, à Bamako. Selon Yahya Nouhoum Tamboura, commissaire à la sécurité alimentaire, il faudrait 54 milliards de FCFA (plus de 82 millions d'euros) pour faire face à cette situation urgente, due à une faible crue du fleuve Niger, à une installation tardive des pluies et à un arrêt précoce des précipitations. « Le Sahel dans son ensemble, a-t-il ajouté, a connu une pluviométrie limitée et mal répartie dans le temps et l'espace. » De plus, les prix du riz – très consommé en Afrique de l’Ouest – sont élevés sur le marché international. –(AFP.) p Nucléaire Le convoi de déchets a atteint Gorleben Le convoi de déchets radioactifs a atteint, lundi soir 28 novembre, le site de Gorleben, dans le nord de l’Allemagne. Parti mercredi 23 novembre de Valognes (Manche), le convoi a été plusieurs fois paralysé par les adversaires de l'énergie atomique. – (AFP.) france 0123 Mercredi 30 novembre 2011 9 L’aggravation du chômage Lamutationdumarchédutravail,undéfipolitique Le chômage touche beaucoup les précaires, pourlesquelsles mesures pour l’emploisontpeu adaptées L es premières victimes de la nouvelledégradation du marché de l’emploi, annoncée lundi 28 novembre, sont les travailleurs précaires. Des employés dont certains avaient retrouvé un contrat à durée déterminée (CDD) ou une mission d’intérim à la faveur d’une embellie de courte durée. En octobre, les fins de CDD, en forte augmentation, ont représenté 26,6 % des entrées à Pôle emploi, les fins de mission d’intérim 6,3 % et les « autres cas » (dont les ruptures conventionnelles) 39,9%. Les licenciementséconomiques et les « autres licenciements » ne constituaient respectivement que 2,6 % et 8,4 % des motifs d’inscription au chômage. Conséquence de cette transformation du marché du travail, les outils traditionnels de la politique de l’emploi (comme les mesures figurantdanslesplansdesauvegarde de l’emploi, les contrats de transition professionnelle pour les licenciés économiques, etc.), deviennent en partie inopérants. Ces outils sont adaptés aux salariés en place – ceux qu’on appelle les « insiders » – et aux grandes entreprises.Ilsn’ontpas étéspécifiquement conçus pour les personnels des PME et des TPE, ni pour les précaires et les secteurs d’activité (services à la personne, secteurs associatifs…) moins bien protégés collectivement que l’industrie ou le BTP, qui connaissent à leur tour des difficultés. Pour la fin du quinquennat, le chômagepose undéfiaugouvernement et à son ministre du travail, Xavier Bertrand : il a augmenté de 1,2 % en octobre, soit 34 400 chômeurs de plus dans la catégorie A, qui sert de baromètre officiel. Le nombre des sans-emploi s’établit ainsi à 2 814 900 en France métropolitaine.C’estleplusmauvaischiffre depuis décembre 1999. En y ajoutant les personnes en activité réduite (catégories B et C), le nombre des demandeurs d’emploi a atteint 4 193 000 (et même 4 459 400 avec les Dom). De plus, les mois prochains s’annoncentrudesavecunnouveaurisque de récession. Dans ses prévisions semestrielles d’automne, l’Organisation de coopération etde développement économiques (OCDE) prévoit pour la France une contraction de l’activité au cœur de l’hiver, ainsi qu’une croissance très faible sur l’ensemble de 2012 : + 0,3 %, loin des 1 % des prévisions gouvernementales. Le taux de chômage monterait, selon l’institution internationale, à 10,4 % à la fin 2012. « Tant que la situation économique ne s’améliorera pas, je ne vois pas comment les chiffres de l’emploi pourront réellement s’améliorer », a reconnu M. Bertrand. Le ministre a admis, pour la première fois, que le taux de chômage ne repassera pas sous labarredes 9% avantla findu quinquennat. L’augmentation du chômage concerne toutes les classes d’âge, maiselle est particulièrement marquée chez les seniors (+ 13,8 % sur un an chez les hommes, + 17,6 % chez les femmes). Le chômage de trèslongue durée(deux ansetplus) est en forte hausse : + 16,9% sur un an pour les 367 500 personnes ayant entre deux et moins de trois ans d’ancienneté au chômage, et + 21,5% pour les 407 600 chômeurs depuis trois ans ou plus. Or, ce sont ces personnes qui, en perdant leur indemnisation à l’assurance-chômage, basculent dans les minima sociaux et la grande pauvreté. Et ce sont elles aussi qui sont les plus difficiles à ramener vers l’emploi. En un an, le chômage de longue durée est en forte hausse: +21,5% pour les 407600 chômeurs depuis troisans ou plus La timide reprise de 2010 et des premiers mois de 2011 n’a pas été suffisante pour que le pays retrouve ses niveaux d’emploi d’avant la crise (il en manque encore 225 000 postes). La récession, même légère, qui s’annonce, va donc frapper des territoires et une société qui ne se sont pas remis du choc précédent. L’OCDE l’a souligné lundi : « Le nouvel épisode de faiblesse de l’économie française survient alors que le marché du travail porte encore les stigmates de la récession de 2009 : le chômage de longue durée et la proportion de seniors au chômage ont continué d’augmenter rapidement. Le risque d’une augmentation du chômage structurel est donc fort. » Faut-il pour autant faire son deuil d’une amélioration de l’emploi en période de croissance faible ? Sûrement pas, assurent en chœur les syndicats, qui demandent au gouvernement de réagir et de mettre fin à la détaxation des heures supplémentaires. Cette disposition de la loi sur le travail, l’emploi et le pouvoir d’achat (TEPA) de 2007 est, en bas de cycle, contre-productive pour l’emploi, selon les économistes, et est fustigée par la gauche. Elle coûte4,5milliards d’euros à l’Etat, alors quelescréditsdel’emploivontbaisser de 12 % en 2012. Au-delà du développement de l’alternance, difficile à promouvoir en phase récessive, de la mobilisation des préfets sur l’emploi et de l’augmentation conjoncturelle du nombredescontratsaidés,leministre du travail assure qu’il veut s’occuper de la question de la soustraitance. Et avance l’idée de faire bénéficier les intérimaires d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI). A cinq mois de la présidentielle, l’opposition veut mener le débat sur le chômage et attaque Nicolas Sarkozy sur son bilan. « Réduction aveugle des dépenses publiques, subventions absurdes aux heures supplémentaires qui jouent contre l’embauche (…) : le gouvernement estentrainde fabriquerune nouvellerécessionpar unepolitiqueabsurde», a estimélapremièresecrétaire du PS, Martine Aubry. Il ne faut pas « travailler plus », mais « travailler davantage plus nombreux », a plaidé sur BFMTV-RMC, François Hollande,le candidat du PS à l’Elysée, tandis que Cécile Duflot (Europe Ecologie-Les Verts) proposait d’entamer « une véritable transition écologique de l’économie » plutôt que de « perfuser des industries entières ». p Une progression inégale selon les régions DEMANDEURS D’EMPLOI INSCRITS EN FIN DE MOIS À PÔLE EMPLOI (CATÉGORIES A, B, C), PAR RÉGION (en milliers) 750,4 366,5 NORD-PASDE-CALAIS 332,8 HAUTENORMANDIE 19,1 BASSENORMANDIE 138,9 750,4 PAYS DE LA LOIRE BOURGOGNE 161,3 103,3 POITOUCHARENTES ALSACE 151,1 CHAMPAGNEARDENNE CENTRE 238,6 114,2 FRANCHECOMTÉ 72,5 LIMOUSIN 117,5 83,9 44,1 394,6 AUVERGNE AQUITAINE De 0,6 à 3,5 LORRAINE ÎLE-DE-FRANCE BRETAGNE VARIATION SUR UN AN ENTRE OCTOBRE 2010 ET OCTOBRE 2011, en % PICARDIE 92,7 93,2 195,4 144,1 RHÔNEALPES 222,3 De 3,6 à 5 MIDI-PYRÉNÉES De 5,1 à 6,5 206,5 De 6,6 à 8,4 LANGUEDOCROUSSILLON 220,5 PROVENCE-ALPESCÔTE D'AZUR 366,5 16,3 GUADELOUPE 64,1 GUYANE 19,1 MARTINIQUE 45,1 CORSE RÉUNION 136,3 SOURCES : PÔLE EMPLOI, DARES Claire Guélaud Les coupes budgétaires dans les collectivités locales pèsent sur l’emploi L’INQUIÉTUDE est générale. Dans les régions industrielles, bien sûr, comme la Lorraine ou RhôneAlpes, qui n’en ont jamais fini avec les restructurations. Mais aussi dans les bassins d’emploi mono-industriels, comme de l’automobile. « Autour de l’usine Peugeot de Sochaux-Montbéliard, qui emploie jusqu’à 30 % d’intérimaires en période faste, les équipementiers de rang 2 et 3 sont en train de déposer leurs bilans », dit Noëlle Barberet, secrétaire générale de la CFDT Franche-Comté. Dans cette région peu diversifiée, l’Etat, le conseil régional et les partenaires sociaux s’apprêtent – comme en Lorraine – à réactiver le dispositif de formation mis en place au plus fort de la récession de 2009. Il a permis à 12 000 salariés de se former. Il est question aujourd’hui de l’ouvrir aux jeunes et aux intérimaires. «Les entreprises industrielles sont de nouveau en panne. Et elles n’ont pas les mêmes trésoreries qu’en 2008, témoigne Elisabeth Le Gac, de la CFDT Rhône-Alpes. Il y aura du chômage partiel chez Renault Trucks en décembre. La production baisse dans l’automobile. Nous avons des craintes sur Alstom et Areva. Et en Drôme-Ardèche, c’est la débandade avec des fermetures d’entreprises dans le matériel électrique, dans la papeterie, dans le textile. L’usine Lejaby est en dépôt de bilan alors que son dernier plan social date de neuf mois.» En Bourgogne, où 20 000 emplois ont disparu depuis 2008, ce sont surtout les intérimaires qui pâtissent de la situation. « La détérioration de la situation économique commence à peine à se faire sentir ailleurs. Les TPE et les PME perdent peu à peu le soutien de leurs banquiers. Elles sont en grande difficulté, et le climat social se tend dans les grands groupes », observe Joseph Battault, secrétaire général de l’Union régionale interprofessionnelle. « Dégringolade » Sommées par l’Etat de ralentir leurs dépenses, les collectivités territoriales revoient leurs budgets à la baisse. En ChampagneArdenne, une région vieillissante et déshéritée, les syndicats redou- tent les effets de la frilosité des investissements des collectivités sur les entreprises du bâtiment. Et s’inquiètent de la diminution des effectifs de la fonction publique territoriale en Haute-Marne. Les secteurs de l’action sociale et du médico-social, pourtant sollicités en temps de crise, commencent à souffrir. Dans les services à la personne, assure Laurent Berger, numéro 3 de la CFDT, 10000 emplois pourraient disparaître. En Haute-Normandie, les annonces de plans de sauvegarde de l’emploi se multiplient depuis le 1er octobre. Entre 1500 à 2 000emplois industriels sont menacés, les syndicats s’attendent à une « dégringolade» dans la banque, et l’aide à domicile connaît ses premières difficultés. Dans la région Provence-AlpesCôte d’Azur (PACA), tardivement rattrapée par la crise, les services, le tourisme, l’économie sociale et solidaire souffrent. Un grand centre mutualiste marseillais a de sérieuses difficultés financières. Les associations subissent de plein fouet la réduction des subventions de collectivités locales souvent plombées par leurs emprunts toxiques. Le chômage des jeunes et des seniors s’envole. Le nombre des demandes d’aides financières déposées par les familles auprès des caisses d’allocations familiales a bondi de 30 %, et le surendettement fait des ravages. p C. Gu. Tantôt souhaitées, tantôt subies, les ruptures conventionnelles sont en forte hausse Cette nouvelle procédure offre aux salariés des conditions de départ souvent avantageuses, mais permet aussi des licenciements déguisés A lors que le chômage augmente, le dispositif de la rupture conventionnelle connaît un succès sans précédent depuis sa création, en 2008. Tandis que certains syndicats reprochent à cette procédure de se substituer à des licenciements en bonne et due forme, 137 000 ruptures conventionnelles ont été officialisées au premier semestre 2011, soit 15 000 de plus que sur la même période de 2010. Le Monde a demandé à ses lecteurs de témoigner deleur expériencesur Lemonde.fr. La plupart font état d’un choixcertes assumé, maisqui comporte des contraintes. A 52ans, Michel (le prénom a été modifié) vend sa librairie, à Perpignan. Le repreneur ne pouvant maintenir l’emploi à temps partiel de sa vendeuse, Michel lui a proposé une rupture conventionnelle « pour la favoriser ». « Je l’emploie depuis dix ans et je suis très content de son travail. En tout, je lui ai versé 6 000 euros, qui vont permettre de compenser, pendant deux ans, la différence entre son salaire et les indemnités chômage », explique-t-il,jugeantcettesolutionsatisfaisante pour tous deux. « Il est plus pratique que son contrat se finisse avec moi, dans de bonnes conditions, plutôt qu’elle soit licenciée sans garantie par le repreneur », estime le libraire. AhmedB., 46 ans, a subi en 2010 une rupture conventionnelle qu’il dit ne pas avoir choisie. « Après un arrêt longue maladie, on m’a fait comprendre qu’on ne voulait plus de moi par des comportements vexatoires », raconte cet ancien cadredansuneassociationd’éducateurs spécialisés basée à Paris. « Après plusieurs mois de harcèlement, dit-il, le directeur m’a convoqué à un entretien préalable, au cours duquel il s’est dit prêt à m’inventer une faute grave pour justifierunlicenciement. Maisilm’a proposé une alternative : la rupture conventionnelle. » « Contraint et forcé » Usé, Ahmed B. accepte de partir avec trois mois de salaire pour deux ans d’ancienneté. Aujourd’hui, il dit «avoir un sentiment de culpabilité ». « Je songe désormais aux prud’hommes, parce qu’un employeur n’a normalement plus le droit de proposer une rupture conventionnelle alors qu’il a lancé une procédure de licenciement. » Arnaud (le prénom a été modifié), 57 ans, cadre dans un établissement de santé privé breton, a senti, lors de l’arrivée d’une nouvelle directrice, en août, qu’il n’était plus désiré dans l’entreprise. « Elle m’a envoyé des lettres pour me faire des reproches, puis convoqué pour un entretien pour les lister », raconte-t-il. Il préfère prendre les devants et propose une rupture conventionnelle. « Je n’avais pas envie de me battre avec une personnequiallaitme fairedéprimer », ditil. Avec deux ans d’ancienneté, il obtient trois mois de salaire. Satisfait de cette procédure, il observe néanmoins: « C’est contraint et forcé que j’ai proposé une rupture conventionnelle.Sinonc’était soitla démission, soit le licenciement. » Danscertainesgrandesentreprises, la rupture conventionnelle est intégrée dans les méthodes de ressources humaines. Bernard (qui a préféré voir son nom modifié), 46 ans, a quitté son poste de cadre dans unegrande multinationalede l’électroménager. « Au sein de l’entreprise, nous savons qu’il y a régulièrement des ruptures conventionnellesetquec’estunmoyendepousser les gens dehors. J’ai senti mon tour arrivé, assure-t-il. On m’a fait des courriers et des allusions pour me dire que mes résultats n’étaient plus satisfaisants. » Plutôt que de se battre, il préfère négocier sur le montant de ses indemnités et obtient deux fois plus que les indemnités légales de licenciement. « Les collègues qui sont allés devant les prud’hommes ont obtenu autant, mais après s’être battus plusieurs années. » Ces témoignages corroborent une étude menée par le Centre d’étude de l’emploi (CEE). « Souvent, les salariés ne sont pas à l’initiative de la rupture, mais sont contents de partir, car leurs conditions de travail se sont trop dégradées et que partir est la seule solution », explique Evelyne Serverin, directrice de recherche au CNRS, associée au CEE. Mme Serverin précise que « la rupture conventionnelle ne remplace pas les licenciements économiques », car « elle est trop complexe pour traiter de nombreux cas simultanément ». p Jean-Baptiste Chastand n Sur Lemonde.fr La synthèse de tous les témoignages 10 0123 politique Mercredi 30 novembre 2011 L’aggravation du chômage M.Hollandeajustesacampagne pourmieuxriposteràladroite Le candidat socialiste veut désormais cibler les catégories populaires et coordonner davantage la prise de parole dans son camp J Sandra Meunier (au centre), artiste-clown, dirige l’atelier « Expression et communication » à la Maison de l’emploi de Sucy-en-Brie. Elle travaille depuis dix ans dans les hôpitaux. ANTONIN SABOT / POUR LEMONDE.FR Blog ASucy-en-Brie, la Maison de l’emploi expérimente une thérapie originale pour accompagner la recherche d’un contrat de travail Lerirepourserécupérerquand lechômagevousdémolit Sucy-en-Brie (Val-de -Marne) D ans la salle de danse, aux murs recouverts de fresques naïves à la manière des artistes haïtiens, huit femmes s’essayent à l’expression corporelle entre deux éclats de rire, deux applaudissements, deux bougonnements parfois. Elles se prénomment Marie-Josée, Sandrine, Hélène, Dédé, Fatouma, Myriam, Kadiatou et Ghislaine, et ont entre 21 et 51ans. Elles partagent une certaine timidité dans le geste, une évidente difficulté à bouger leur corps, même en petit comité. Elles ont sont au chômage depuis deux à cinq ans. Myriam Martin travaillait à La Poste. Elle a enchaîné les CDD au guichet, avant d’être remerciée il y a deux ans. Hélène Abovici, titulaire d’un BEP depuis 2004, a essayé dedevenir auxiliairedepuériculture, mais a dû se contenter de vacations dans l’animation. MarieJosée Berthereau a fait mille boulots aux Galeries Lafayette ou dans la restauration. Son «dernier truc », dans une cantine, remonte à 2010. Depuis, pour ces femmes, c’est marée basse. « Marée très, très basse, vous pouvez le dire », opine Marie-Josée Berthereau. « C’est la galère totale, renchérit Myriam Martin. Au début, on se blinde, on est motivé. On multiplie les CV. Et puis rien,pas d’entretien,pas même deréponsesnégatives.Onsedemande ce qui cloche : est-ce que c’est le parcours, la lettre de motivation, l’âge [48 ans] ? Alors, peu à peu, on perd confiance en soi, on finit par s’enfermer dans sa coquille. » Dans un sursaut d’orgueil, Myriam Martin et les autres ont poussé la porte de la Maison de l’emploi, qui dépend de la mairie de Sucy-enBrie (Val-de-Marne). Amabela Johnson recueille ces naufragées du chômage, laminées par une inactivité subie qui ronge l’esprit et le corps. « Nous recevons des femmes de tous niveaux, mais ce sont souvent des personnes pas ou peu qualifiées. Certaines n’ont pas travaillé depuis si longtemps qu’elles ont peur de ne plus en être capables.» A ces « gueules cassées » delacrise, ellepropose des« formules d’accompagnement à l’emploi », dontunstagede deux moisetdemi baptisé « Objectif emploi». Mme Johnson les oriente vers un projet professionnel ou vers une voie conforme aux possibilités du marché du travail : auxiliaire en puériculture, agent de service, employée de restauration, etc. Des cours d’informatique, du conseil en image, des séances de relooking, de l’entraînement aux entretiens d’embauche et d’autres formations sont dispensés. Plus original, plus périlleux aussi, est l’atelier « expression et communication » dirigé par Sandra Meunier, 38ans, artiste professionnelle et clown de son état. Elle se décrit comme « arthérapeuthe ». «J’aide les gens en difficulté par des pratiques artistiques », explique-t-elle. Elle travaille depuis dix ans dans les hôpitaux, en aidant les malades du cancer, mais également les personnels qui les accompagnent. La douleur, Sandra Meunier la côtoie partout dans la société. Elle sait comment le rire peut être un indispensable onguent. Elle a convaincu la mairie de Sucy. «Les femmes qui sont ici ne souffrent pas seulement de la crise, mais d’un «Certaines femmes n’ont pas travaillé depuis si longtemps qu’elles ont peur de ne plus en être capables» Amabela Johnson de la Maison de l’emploi manque d’estime de soi, dit-elle. Elles sont magnifiques, mais ne le savent pas. » Le défi, la gageure, est de les en convaincre en cinq séances de deux heures. Comment leur faire reprendre confiance, abolir en si peu de temps des années d’inhibition, de rebuffades vécues sur le marché de l’emploi ? Sandra Meunier n’a qu’une arme à sa disposition : un nez rouge. « Le déguisement de clown est un média qui permet d’extérioriser ses sentiments, de dire des choses qu’on n’oserait pas dire autrement. Il révèle notre partie sensible. Il doit amener à une liberté de parole, de geste.» La quatrième séance portait ainsi sur l’amour de soi. Elle consistait à se complimenter les unes, les autres, puis à s’auto-congratuler. «Plus on sait les qualités qu’on a en soi, plus on va rayonner », assure SandraMeunier.Lesfemmesselancent,retrouventuneoncedenarcissisme. « Je suis dynamique et très gentille», tente l’une. «Je suis généreuse », ose une autre. Certaines se bloquent, se cabrent même. «Je n’arrivepasàfaireuncompliment, explique l’une d’elles. – Pourquoi ?, demande Sandra Meunier. – Je ne sais pas. –Est-ce que tu pourrais le mettre dans des gestes au moins? –Même ça, c’est difficile. –C’est pour ça que c’est plus facile avec ce nez rouge. On est des enfants. Ce n’est pas sérieux. –C’est compliqué de le dire. –Tu n’as qu’àdire “boum, boum” en mettant la main sur ton cœur. – J’y crois pas, c’est des conneries tout ça. – Plus vous prenez tout cela au sérieux, plus ce sera difficile. Il ne faut pas prendre la vie au sérieux. » La dernière séance consistait à mimer un entretien d’embauche, avec un déguisement. « Il faut dé-dra-ma-ti-ser », martèle l’arthérapeuthe. « Prenez l’entretien comme un jeu et ne considérez pas le résultat comme une catastrophe », insiste-t-elle. « Tu sais, toi, comment ça entre dans une pièce, un patron ?», plaisante une stagiairequi doit mimer ce rôle. « Ben non, j’ai jamais été patron », répond celle qui joue la candidate. Le jeu de rôle est parfois difficile àvivre, lesentiment du ridicule difficile à vaincre, et surtout ce fichu nez rouge difficile, très difficile à porter. « N’enlevez pas votre nez, il est sacré », insiste Mme Meunier. « Je ne respire pas avec ton tarbouif ! », tempête une stagiaire. Au début, les femmes sont arrivées à reculons. « J’étais très sceptique, explique Mme Berthereau. Et puis ça m’a plu. Je sors d’ici plus décontractée, plus maîtresse de mon corps, avec une plus grande confiance en moi. » «Au moins, on ne reste pas chez soi à se morfondre. Parce qu’une fois qu’on a fait les courses et le ménage… Ici, on rencontre des gens avec qui partager », assure Mme Martin. Mais le taux d’absentéisme est important. Sur la douzaine de personnes qui entament le processus, la moitié se perd en route. Aux autres,laMaisondel’emploipropose des emplois qu’elle déniche auprès d’employeurs locaux. De février à octobre, 74 postes ont ainsi été offerts, « tous pourvus », assure la responsable. A ceux qui ne comprennent pas la démarche, qui oublient que «le rire est le propre de l’homme », fût-il blessé, Sandra Meunier rappelle que Charlot fut un exutoire à la crise aux EtatsUnis dans les années 1930. « Le clown délivre toujours un message. C’est un philosophe. » p Benoît Hopquin n Sur Lemonde.fr Jusqu’à l’élection présidentielle de 2012, « Le Monde » pose ses valises dans huit coins de France. Des portraits et des histoires au jour le jour. Lire le blog Terminus Pavillon sur http://lemonde.fr/uneannee-en-france usque-là, il n’omettait jamais de souligner que l’avenir des jeunes était la priorité de ses priorités. Lundi 28 novembre, au terme d’une visite de deux heures de l’usine Placo-Saint-Gobain de Vaujours (Seine-Saint-Denis),François Hollande n’a pas oublié « l’enjeude la jeunesse», mais ne l’a mentionné qu’au troisième rang de ses « grandes priorités », derrière le « redressement financier et industriel » puis la « justice ». Après une séquence dominée par ses interventions au congrès du Mouvement de jeunes socialistes, le 19 novembre, au forum sur la jeunesse organisé par France Inter et Le Monde le 24 novembre, et au Salon de l’éducation, le 27 novembre, le candidat socialiste à la présidentielleestbeletbienentraind’infléchir son discours. « François Hollande va se battre sur un front sensible qui concerne les couches populaires, celui de l’industrie et de l’emploi»,indiquesondirecteurdecampagne, Pierre Moscovici. L’agenda a été pensé en conséquence.«L’idée, résumeuncollaborateur du candidat, est que François aille à la fois en bas, à la rencontre des gens, et en haut, où se prennent les décisions importantes. » Dans le premier cas, il s’agit de tirer profit du différentiel de popularité qui existe entre un François Hollande qui « a un rapport positif avec les Français » et un Nicolas Sarkozy qui « a besoin d’un cordon de CRS quand il se déplace », explique Vincent Peillon. Dansle second, ils’agit de polir la stature présidentielle du candidat, au moment même où le chef de l’Etat, comme l’indiquent les enquêtes d’opinion, profite de lacrise dela zoneeuropourse refaire une santé. Le déplacement prévu mercredi à Bruxelles obéit clairement à ce doubleobjectif:M.Hollandeyjouera à la fois la carte de la proximité, en rencontrant les salariés d’Arcelor-Mittal-Florange, et celle de la présidentialité, en s’entretenant avec José Manuel Barroso, le président de la Commission européen- ne. Le choix de la thématique – l’industrie – ne doit rien au hasard. Comme l’a montré le dernier sondage réalisé par l’institut BVA, les 18 et 19 novembre, c’est auprès des catégories populaires que le candidat du PS a le plus reculé. Avec 20 % d’intentions de vote auprès des ouvriers, il n’arriverait qu’en troisième position au premier tour, loin derrière Marine Le Pen(43 %)etmême, pourla première fois, derrière Nicolas Sarkozy (22 %). Preuve que la question est prise au sérieux : un séminaire de travail est prévu, jeudi 1er décembre, entre M. Hollande et les auteurs de Plaidoyer pour une gauche populaire (Le Bord de l’eau), un ouvrage paru le 22 novembre dans lequeldessociologuesetdespolitologues expliquent que « la capacité à renouer avec les couches populaires » est, pour la gauche, « la clé de son succès pour 2012 ». Soucieux de repositionner son discours sur le fond, M. Hollande a aussi pour dessein de l’ajuster sur la forme. « Il faut s’appliquer un Le candidat accepterait M. Bayrou dans sa majorité « S’il fait un choix (…) au second tour, il sera dans la majorité présidentielle qui se sera constituée autour du vainqueur du second tour », a répondu François Hollande, lundi 28 novembre, au micro de RMC, quand on l’a interrogé sur le cas du président du MoDem, François Bayrou. Cette position a été aussitôt dénoncée comme une « sinistre danse du centre » par le Front de gauche, qui estime que « François Hollande tire une balle dans le pied de la gauche ». Réponse de Pierre Moscovici, directeur de campagne de M.Hollande : « Cela ne mérite aucune forme d’émotion. Il ne s’agit pas d’une alliance avec le centre, mais d’une majorité présidentielle qui se construit autour de ceux qui rejoignent le candidat dans l’entre-deux-tours. » minimum de protocole et de discipline», avait plaidé Benoît Hamon, le porte-parole du PS, lors du bureau national du parti, le 22 novembre. S’il reste « quelques boulons à serrer », comme le concèdeunpoidslourd del’équipe,l’heure est désormais à une « coordination plus intense » des prises de parole des uns et des autres. Un calage a désormais lieu chaque jour, sous la houlette de Manuel Valls, responsable de la communication du candidat, avec les quatre porte-parole de M. Hollande ainsi qu’avec le sénateur de Paris, David Assouline, secrétaire national du PS à la communication, et Guillaume Bachelay, chargé dans l’équipe de campagne des argumentaires. « Marquées à la culotte » L’objectifdecette réunion quotidienne, qui aura lieu d’ici quelques jours dans le nouveau QG de campagnede M.Hollande, danslequartier de la Madeleine à Paris, est notamment de mieux ajuster la riposte face à une droite qui, concède un proche du candidat, « [les] a un peu pris de court par la violence de ses attaques ». Désormais, « tout doit être ramené à l’impasse dans laquelle Sarkozy a conduit la France », selon M. Valls. Plusieurs figuresdelamajoritéserontainsi«marquées à la culotte », comme François Fillon, Jean-François Copé, Alain Juppé, Xavier Bertrand et surtout Claude Guéant. «Ce qu’on leur réserve va en asseoir deux ou trois. Ils ne sont pas à l’abri. Il y a du biscuit», prévient M. Hamon. Outreles porte-parole de M.Hollande et les anciens candidats à la primaire, une poignée de personnalités socialistes seront sollicitées pour mener la riposte, tels Bertrand Delanoë, Laurent Fabius, Hubert Védrine, François Rebsamen, Jean-Marc Ayrault, Jean-Pierre Bel,Vincent Peillon et même LionelJospin,dont l’entourage du candidat indique qu’il pourrait intervenir prochainement. p David Revault d’Allonnes et Thomas Wieder Force ouvrière, très hostile à la «RGPP», remporte les élections professionnelles FO, qui a fait campagne contre les suppressions de postes, profite du recul de la FSU, ancien premier syndicat de la fonction publique d’Etat U n revers pour le gouvernement. Force ouvrière (FO) est désormais le premier syndicat dans la fonction publique d’Etat. L’organisation de JeanClaude Mailly devance de peu la FSU. Or, FO se veut le syndicat le plus hostile à la révision générale des politiques publiques (RGPP), conçue par Nicolas Sarkozy comme un grand plan de modernisation de l’Etat. Ce bouleversement découle des élections professionnelles qui se sont déroulées entre le 13 et le 20 octobre dans la plupart des ministères, des administrations et des opérateurs de l’Etat – puis le 22 novembre, à France Télécom et au ministère de la justice. Selon les données communiquées par plusieurs syndicats mais non encore validées par le ministère de la fonction publique, FO arrive en tête avec 17,8 % des voix, suivi de la FSU (17,1 %), la CGT (16,4 %), l’UNSA (15 %) et la CFDT (14,5 %). Largementmajoritaireàl’éducation nationale qui regroupe près de la moitié des fonctionnaires de l’Etat, la FSU rétrograde surtout à cause d’une participation plus faible que d’habitude des agents de ce ministère (40,4 %, contre 62 % en 2008).Une part importante du personnel n’a pas pu prendre part au vote électronique du fait de dysfonctionnements techniques. La FSU a dénoncé « les conditions désastreuses » du scrutin. Pourtant, indépendamment du recul de la FSU, FO a le vent en poupe. Par rapport aux scrutins précédents de 2008 à 2010, cette organisationenregistreuneforte progression (+2,41 %). Elle progresse au ministère de l’éducation nationale et à celui de l’écologie. Elle recule en revanche à l’agriculture et à la culture. Mais elle conserve la première place à la défense. Un « front plus large » FO est désormais pour l’Etat le premier interlocuteur syndical. Or contrairement à la FSU, « nous sommes présents partout, affirme Pascal Pavageau, secrétaire confédéral du syndicat. Nous opposons un front plus large face au gouvernement ». Dans un « livre noir » sur la RGPP réactualisé en octobre, FO calcule que 500 000 postes d’agents auront été supprimés entre 2007 et 2013 contre 150 000 selonle gouvernement. « Les résultats des élections montrent qu’une forte proportion de fonctionnaires se reconnaît dans nos critiques, », se félicite M. Pavageau. De son côté, la CGT reste troisiè- me mais améliore son score de 1,2%. La CFDT gagne3,2%. Cette dernière bénéficie toutefois des résultats des élections dans l’enseignement privé sous contrat qui votait pour la première fois en même temps que les agents de l’enseignement public. Hors secteur privé, la CFDT gagne globalement 1,8 %. Ce syndicat réformiste marque des points. A France Télécom, il est en seconde position avec 21,8 % des voix. Un résultat stable mais qui lui permet de devancer SUD, qui recule, et la CGT qui reste première mais régresse. Les 2,1 millions de fonctionnaires inscrits sur les listes électorales étaient appelés pour la première fois à élire directement leurs représentants aux comités techniques – équivalents des comités d’entreprise dans le privé – et non pas seulement les membres des commissions administratives paritaires qui examinent les situations individuelles. FO était hostile à cette réforme qui « nuit au pluralisme syndical » en édictant des critères plus exigeants de représentativité des syndicats habilités à négocier. Opposé àcetteréforme, FOenest paradoxalement, aujourd‘hui le principal bénéficiaire, dans les urnes. p Béatrice Jérôme 0123 politique Mercredi 30 novembre 2011 11 La répression des délinquants mineurs et l’exécution des peines, priorités de l’UMP Pour sa deuxième convention de synthèse, mardi 29novembre, le parti présidentiel met la sécurité et l’immigration au cœur de son projet aaa Suite de la première page La spécificité de la justice pénale des moins de 18 ans veut, en effet, que le président du tribunal des enfants puisse être celui qui a suivi le mineur pendant la phase de l’instruction. Dans l’esprit de l’ordonnance de 1945, cette continuité doit assurer une meilleure connaissance du jeune et permettre une réponse individualisée – éducative ou pénale – tenant compte de la personnalité du mineur. Elle lui garantit une protection supplémentaire, basée sur la recherche du « relèvement éducatif et moral ». « Nous voulons séparer ces deux fonctions, pour mieux protéger les mineurs victimes d’une part et sanctionner plus fermement les mineurs délinquants d’autre part », affirme l’UMP. Ce faisant, elle s’engouffre dans la brèche ouverte par une décision du Conseil constitutionnel du 8 juillet, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la composition du tribunal des enfants. Le projet de l’UMP va plus loin dans ce qu’il appelle l’« exemplarité de la sanction » pour les mineurs délinquants. Il veut que puissent être infligés, dès le premier délit et dès 12 ans, des « travaux de réparation des actes commis, avec l’autorisation des parents ». Il se prononce en outre, de manière plus attendue, pour « réserver » certains établissements publics d’insertion de la Le projet de l’UMP veut «des travaux de réparation» dès 12 ans et dès le premier délit défense(Epide) aux mineurs délinquants et pour l’augmentation des capacités des centres éducatifs fermés.L’UMP, en revanche,ne se prononce pas sur l’abaissement de la majorité pénale. Hors justice des mineurs, l’UMP met l’accent sur l’exécution des peines, en affirmant l’objectif d’« atteindre 80 000 places de prison en 2017 ». Ainsi souhaite-t-elle «confierdavantage la responsabilité de l’exécution des peines au parquet » ; le juge d’application des peines verrait sa mission « se concentrer sur le suivi des détenus et sur les contentieux entre le parquet et le condamné ». L’UMP entend également supprimer les remises de peine automatiques et les aménagements automatiques pour les peines de moins de deux ans, et interdire toute libération conditionnelle avant que la peine n’ait été purgée aux deux tiers. Elle étend les peines planchers pour les réitérant et plus seulement pour les récidivistes (ayant commis un délit ou un crime identique au précédent ou de même gravité). En matière de sécurité, le projet de l’UMP préconise la généralisation des « patrouilleurs » et une meilleure coordination de la police nationale, de la gendarmerie et de la police municipale, « véritable troisième force de sécurité ». Enfin, le « pacte républicain » de l’UMP se fait fort de « maîtriser les flux migratoires » et d’« affirmer sans faiblesse les valeurs républicai- Lors de la présentation du projet de l’UMP pour 2012, à Lambersart (Nord). O. TOURON/FEDEPHOTO/POUR LE « MONDE » nes ». L’UMP veut durcir les conditions du regroupement familial et conditionner strictement la délivrance de titres de séjour à l’entrée légale sur le territoire, c’est-à-dire mettre en pratique un principe de « zéro régularisation ». Outre l’augmentation des capacités des centresde rétentionadministrative, elle entend conditionner le nombre de visas délivrés et l’aide au développement à la coopération des pays d’origine pour le retour de leurs ressortissants. Enfin, elle veut « recentrer » le dispositif de l’aide médicale d’Etat (AME) pour les étrangers en situation irrégulière sur les seules situa- tions d’urgence sanitaire et les risques épidémiques. « Pas de naturalisation sans manifester sa volonté de devenir français », c’est-à-dire qu’un jeune né en France de parents étrangers et souhaitant acquérir la nationalité française doit en faire la demande; «pas de droit de vote etd’éligibilité sans citoyenneté française ou européenne » ; « mettre en place un parcours de citoyenneté, de civisme et de l’esprit de défense », tels sont les principes-clés de la « cohésion sociale » vue par l’UMP. L’UMP brandit de nouveau l’étendard de la « laïcité » et de la « lutte contre le communautaris- me ». Parmi ses « propositions », l’interdiction qu’une personne puisse récuser un agent de service public à raison de son sexe ou de sa religion, et l’extension des obligations de neutralité du service public aux structures privées chargées d’une mission de service public, en référence à l’affaire du voile dans la crèche privée Baby Loup. L’UMP souhaite enfin que les fonds étrangers destinés à la construction ou à l’entretien de lieux de cultes « transitent obligatoirement par une fondation nationale propre à chaque culte ». p Patrick Roger Robert Badinter: «Ne pas se satisfaire de proclamations, de slogans, d’impostures » Entretien La fondation Terra Nova, proche du Parti socialiste, a présenté mardi 29novembre un rapport sévère intitulé « L’imposture, dix années de politique de sécurité de Nicolas Sarkozy ». Deux magistrats, Valérie Sagant et Benoist Hurel, secrétaire général adjoint du Syndicat de la magistrature, et un avocat, Eric Plouvier, y démontent avec rigueur la politique du chef de l’Etat, l’ancien garde des sceaux Robert Badinter en a signé la préface et analyse la portée de l’ouvrage. Vous dénoncez « la charlatanerie » de l’exécutif. Que voulez-vous dire ? Le premier intérêt de cet ouvrage précis et rigoureux est de mettre au jour une mystification politique : faire croire au public à coups de proclamations définitives et de statistiques illusoires que le gouvernement a remporté des succès éclatants dans la lutte contre le crime et la délinquance. Il s’agit là d’une véritable charlatanerie, c’est-à-dire une exploitation délibérée de la crédulité publique. Sorbonne University International Law School www.sorbonne-university.com Vous souhaitez acquérir une formation de juriste de haut niveau spécialisé dans les grandes opérations et transactions internationales. Titulaire d’un master juridique ou d’un autre master complété par une expérience professionnelle d’au moins 4 ans, intégrez le nouveau LL.M. in International Business Law créé par l’Université Panthéon-Assas. Les enseignements, en anglais, se déroulent du 30 janvier au 30 juin 2012 à Paris et à Singapour (INSEAD Asia Campus). Coût de la formation : 15 000 euros. Inscriptions en ligne jusqu’au 15 décembre 2011 : http://llmapplication.sorbonne-university.com Contact : [email protected] Le droit des victimes est-il devenu une priorité ? Rien n’est plus émouvant que le malheur des victimes du crime. Le ressort le plus assuré de popularité est pour un politique de proclamer hautement qu’il est du côté des victimes. Ce qui sousentend que ses adversaires, eux, sont du côté des criminels : j’ai entendu ce refrain tout au long de la lutte pour l’abolition de la peine de mort, et à chaque fois que je défendais des principes fondamentaux de l’Etat de droit. Selon le garde des sceaux, vingt et une dispositions législatives ont été votées en faveur des victimes depuis 2002. Le législateur serait-il devenu à ce point incompétent qu’il lui faudrait sans cesse remettre sur le métier son ouvrage ? Les choses sont pour moi simples : il faut faire tout notre possible pour venir en aide aux victimes d’infractions, les traiter avec sollicitude et respect, il faut prendre en compte leur souffrance et veiller à ce que leurs préjudices soient rapidement et intégralement réparés. De 1981 à 1986, nous n’avons jamais cessé d’œuvrer en ce sens, et quand j’ai quitté la chancellerie, les droits des victimes avaient été portés au plus haut niveau des législations européennes. Mais je le dis fermement : la souffrance et le malheur des victimes ne sauraient devenir un fonds de commerce politique, pas plus que le procès pénal ne peut être l’instrument (très aléatoire) de leur deuil. La délinquance est-elle « revenue en 2009 à son niveau de 1997 », après « l’explosion des crimes et des délits » sous la gauche, comme l’indique l’Elysée ? L’ouvrage met en cause la sincérité des statistiques présentées par l’exécutif. La communication, première préoccupation du gouvernement, fait toujours état d’un chiffre global de « la » délinquance. Or parler d’une hausse ou d’une baisse de la délinquance est aussi trompeur que le serait un indice de « la » maladie. Il n’existe dans la réalité que « des » crimes et délits de nature et de gravité bien différentes, comme il n’existe que « des » maladies aussi diverses que le sida ou la grippe. Réunir dans le même indice global le meurtre de vieilles dames ou la consommation du cannabis est une aberration qui ouvre la voie à toutes les manipulations. Il suffit en effet de modifier le mode d’enregistrement des faits criminels ou délictueux, de les pénaliser ou non pour changer les statistiques. Sans doute des améliorations ont été apportées dans ce domaine, mais on entend toujours les responsables politiques se féliciter de la baisse de « la » délinquance, alors que si le nombre de voitures volées diminue grâce à l’amélioration des techniques de sécurité, au même moment, le nombre de personnes victimes d’agressions physiques s’accroît sensiblement. Et comment réunir dans une même appréciation globale le vol de portables avec les agressions de convoyeurs de fonds réalisées par des commandos ? «Il s’agit là d’une exploitation délibérée de la crédulité publique» Le chef de l'Etat assure pourtant que sa politique a permis d’« épargner des victimes »… Plus choquantes encore s’avèrent les déclarations fracassantes de l’exécutif, ses bulletins de victoire sur la délinquance, décomptée en terme de victimes épargnées. Ainsi en mars2007, M.Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, proclamait que, grâce à sa politique, depuis 2002, «1 553 000 victimes ont été épargnées». On demeure confondu devant une telle annonce. D’où vient ce chiffre si précis ? Il ne s’agit pas ici de faits constatés mais de victimes virtuelles qui ont pour première qualité de ne pas exister. De quelles infractions relèvent ces victimes virtuelles ? S’il s’agit des victimes des accidents de la route, on doit rappeler que, dans ce cas, la victime est souvent l’auteur de l’infraction, c’est-à-dire le conducteur. De surcroît, l’appréciation de l’évolution des crimes et délits en partant des victimes fait l’impasse sur les infractions graves en raison de leur coût social, comme la corruption ou les atteintes à l’environnement, qui ne causent pas de victimes directes. Mais qu’importe la complexité de la réalité, quand elle ne satisfait pas les exigences de la communication politique. Nous avons entendu M.Guéant répéter que la politique du gouvernement avait épargné 500 000 victimes ! Il est temps qu’en France l’établissement des données en matière d’infractions soit confié à une organisation indépendante du pouvoir politique, composée de spécialistes et de magistrats, et agissant sous le contrôle de la Cour des comptes. L’actuel Observatoire de la délinquance dirigé par un pro- che ami du chef de l’Etat, même s’il constitue un progrès, ne répond pas à ces exigences. Ce que nous reprochons à la politique de M. Sarkozy, c’est moins son échec relatif dans un domaine où l’action est difficile que l’arrogance et le triomphalisme d’un discours que rien ne justifie. La lutte contre les criminels et les délinquants aux multiples visages est une question trop complexe pour se satisfaire de proclamations, de slogans, de postures. p Propos recueillis par Franck Johannès 12 0123 société Mercredi 30 novembre 2011 L’Eglise lance de grands projets en région A Marseille, parisienne pour regagner de la visibilité des voleurs armés Huit constructions doivent permettre d’aller chercher les fidèles dans les nouveaux quartiers dekalachnikovs D éterminée à « aller chercher les gens là où ils habitent, là où ils travaillent, là où ils prennent leurs loisirs », l’Eglise catholique a entrepris de s’implanter dans les nouveaux quartiers d’affaires et de vie d’Ile-de-France. « C’est notre Grand Pari(s) à nous », sourit Bruno Keller, secrétaire général des Chantiers du cardinal, la structure qui finance une partie des constructions d’églises à Paris et en région parisienne. « Ce sont des lieux que l’on ne peut pas laisser vides », ajoute-t-il. Tout a été passé au crible : le nombre de logements prévus dans les prochaines années, la surface, en mètres carrés, des bureaux construits et planifiés, le nombre de personnes – résidents ou salariés – potentiellement concernées par le pôle d’activités, l’arrivée prévisible d’un centre des congrès… Même les « 17 millions de visiteurs annuels du parc Eurodisney » et les« 20 millions du centre commercial de Val d’Europe » (Seine-etMarne) ont été pris en compte. L’annonce, mardi 29 novembre, de « huit projets architecturaux d’envergure dans les huit diocèses d’Ile-de-France pour les huit prochaines années » coïncide avec les 80 ans des Chantiers du cardinal, lancés en 1931 par le cardinal Verdier. Alors que Paris et sa banlieue connaissaient une forte mutation démographique, l’archevêque de Paris affichait comme ambition de « construire des églises pour évangéliser Paris et sa banlieue et pour procurer aux ouvriers au chômage un travail ». Aujourd’hui, le « coup » marketing de ces diverses annonces est Deux suspects sont morts et un policier a été grièvement blessé lors de deux cambriolages D Le projet de chapelle à La Plaine-Saint-Denis des architectes Patrick Berger et Jacques Anziutti. BERGER/ANZIUTTI assumé ; il en va de la « visibilité » de l’Eglise catholique dans les nouveaux bassins de population. Et, par ricochet, de sa capacité à lever de nouveaux fonds. «A chaque fois que nous voyons un pôle d’activités se créer, nous nous interrogeons sur notre mode de présence sur place. On accompagne le développement urbain; c’est important que l’Eglise soit au plus près du quotidien des gens », indique Mgr Delannoy, évêque de SaintDenis, délégué aux Chantiers du cardinal. Récusant l’idée d’une désaffection croissante d’une gran- Les huit principaux chantiers en Ile-de-France Paris XVIIe Montigny-lèsCormeilles fin 2014début 2015 à l'étude VAL-D'OISE La Plaine-Saint-Denis 2013 BoulogneBillancourt 92 printemps2014 93 Val d'Europe PARIS Le Chesnay à l'étude 94 été 2013 Créteil printemps 2014 YVELINES Plateau de Saclay SEINEETMARNE 2014 ESSONNE 92. HAUTS-DE-SEINE 93. SEINE-SAINT-DENIS 94. VAL-DE-MARNE SOURCE : CHANTIERS DU CARDINAL 10 km de partie de la population pour l’Eglise, il souligne au contraire « une attente spirituelle forte » en région parisienne. L’implantation d’églises dans ces nouvelles zones entend donc « répondre aux nouveaux défis de l’évangélisation », avant même que la demande n’émane de potentielles communautés de fidèles. Lelancementdecesgrandschantiers – qui au final pourraient coûter plus de 25 millions d’euros –, lié au rapprochement entre deux structures jusque-là distinctes (chantiersinter-diocésainsetChantiers du cardinal) vise aussi à mobiliser les croyants. « Présenter des projets ambitieux, offrir aux fidèles des lieux, neufs ou rénovés, où ils se sentent bien, peut les inciter à donner plus », reconnaît M. Keller. Présence assumée Une urgence : entre 2000 et 2010, les Chantiers du cardinal ont perdu la moitié de leurs 20 000 donateurs. La tendance s’est inversée en 2011, assure M. Keller ; la structure dispose aujourd’hui d’un budget de 2,5 millions d’euros, mais l’Eglise évolue dans «un monde de ressources rares », insiste-t-il. « En raison du manque de ressources des communes ou des diocèses, 13égliseset8chapellessont misesen vente et 200 églises sont menacées au niveau national », tient à préciser l’institution dans son dossier de présentation des grands travaux. La mutualisation des dons est aussi censée réduire les déséquilibres entre les diocèses « historiques », plus riches, et les diocèses récents, qui ne peuvent compter sur les financements publics dus aux lieux de culte construits avant 1905. Ainsi, sur les 110 églises parisiennes, 82 sont à la charge de la Ville.UneproportioninverseenSeineSaint-Denis, où seules 42 des 116 églises bénéficient de fondspublics pour l’entretien et la rénovation, ou dans le Val-de-Marne, qui compte 48 lieux de culte communaux sur les 136 églises répertoriées. Les nouvelles réalités démographiques et sociologiques s’accompagnent aussi pour l’Eglise d’une adaptation au rythme de vie et aux besoins des fidèles potentiels. « Si l’on s’adresse à des gens qui travaillent, il faut des propositions de trois quarts d’heure, une heure, pas plus à l’heure de midi, souligne Mgr Delannoy. Qu’il s’agisse d’un temps de prière, d’une messe ou d’une formation. » Il évoque aussi «les petits-déjeuners après la messe du matin », comme ceux offerts à l’église Notre-Dame de Pentecôte, installée depuis dix ans dans le quartier d’affaires de la Défense. Même l’affichage des nouvelles constructions évolue. L’architecture des églises renoue avec une présence visible et assumée, en rupture avec certaines constructions des années1960 et 1970 enfouies dans le paysage urbain. Et, désormais, l’on construit moins des « églises » que des « maisons d’église », des « maisons des familles » ou des « centres ecclésiaux ». Une tentative pour attirer un public, au-delà du seul participant à la messe du dimanche. p Stéphanie Le Bars GérardBapt(PS)critiqueplusieursnominationsàl’Afssaps La moitié des candidats retenus a débuté dans l’industrie pharmaceutique, regrette le député D écidément, la réorganisation de l’Agence française desécuritésanitairedesproduits de santé (Afssaps) après le scandaleduMediator n’estpassimple. Lundi 28 novembre, le député socialiste Gérard Bapt a adressé un courrier à Dominique Maraninchi, le directeur de l’agence du médicament, dans lequel il critique les choix des douze « préfigurateurs », dont la mission est de réfléchir au fonctionnement futur des directions de l’agence. Déjà, la semaine passée,lanominationcomme«préfiguratrice » du docteur Catherine Rey-Quinio, chargée de l’Isoméride chezServier,avaitcréél’émoi. Celleci a finalement renoncé. M. Bapt, qui a contribué à l’éclatement du scandale du Mediator, se dit tout particulièrement choqué par une autre nomination, celle du docteur France Rousselle, chargée de la partie management de la qualité à l’agence. Il souligne qu’elle a intégré l’Afssaps en 1995 après avoir travaillé dans l’industrie pharmaceutique, et qu’elle a signé en 2001 une modification de l’autorisation de mise sur le marché du Mediator, auparavant refusée à Servier, ajoutant aux indications thérapeutiques celle d’adjuvant du régime adapté pour les diabétiques en surcharge pondérale. Critères de recrutement Plus largement, le député estime qu’il faut remettre à plat les choixopérés en modifiantles critères de recrutement. « Je suis frappé de constater que la moitié des préfigurateurs retenus a commencé sa carrière dans l’industrie pharmaceutique, donc y a été formée ; et frappé aussi qu’il ne soit pas indiqué dans la liste publiée par l’Afssaps dans quels laboratoires ils onttravaillé», explique-t-ilauMonde. Ce qui permettrait de savoir si certains sont passés chez Servier. Pour le nouveau directeur de l’Afssaps, nommé en février pour réformercette agence dont le manque de réactivité face au Mediator avait été pointé, il s’agit là d’une « fausse sonnette d’alarme ». M. Maraninchi rappelle tout d’abord que, pour toute signature, Mme Rousselle a forcément suivi des consignes de la direction générale. Il précise qu’elle a travaillé pour les laboratoires Roussel, Wyeth, SmithKline Beecham et Astra. Mais pas chez Servier.Aucun des autres préfigurateurs n’a travaillé pour le fabricant du Mediator, ajoute-t-il. Il avance que si cela est jugé nécessaire, des précisions sur les sociétés où chacun a travaillé pourraient être publiées. Les candidats ont été sélectionnés en fonction de leur capacité de management, dit-il. Mais, il le reconnaît, le contexte est particulièrement tendu, certains se sont retirés et des postes n’ont pas été pourvus. S’il se refuse « à une chasse aux sorcières de principe », il fait remarquer que d’anciens experts ont quitté l’Afssaps. Pour les choix futurs, il tient à rassurer : « Rien ne dit que ceux qui occupent ces postes de préfigurateurs seront par la suite nommés directeurs,etil n’y aura pas àl’agence de poste de responsabilité avec le moindre conflit d’intérêt, personnel ou familial. » Pour M. Maraninchi, « le doute ne doit pas être permis ». Avec l’affaire du Mediator, il s’est désormais légitimement installé partout. p Laetitia Clavreul euxmortsenuneseulejournée. En moins de vingt-quatre heures, Marseille et son agglomération ont été le théâtre d’actes de violence qui ont mis aux priseslesforcesdel’ordreetdes jeunes malfaiteurs. Dans les deux cas, les seconds, qui venaient de commettre des vols, étaient armés, notamment de kalachnikovs. A Vitrolles (Bouches-du-Rhône) dans la nuit de dimanche 27 à lundi 28 novembre, un malfaiteur a été tué, victime du tir de ses comparses qui tentaient d’échapper à quatre policiers de la brigade anticriminalité (BAC) d’Aix-en-Provence. Une autrefusilladesurvenuedanslasoirée de lundi à Marseille a provoqué la mort d’un homme qui venait d’attaquer un magasin de bricolage avec deux complices dans le quartier sensible de la Rose, situé au nord de la ville. Le trio, également armé de kalachnikovs, a été surpris par quatre policiersalorsqu’ilsortaitdumagasin. Les policiers, deux patrouilleurs en voiture et deux motards d’une compagnie de sécurisation, avaient été alertés par un adjoint de sécurité qui se trouvait à l’intérieur du magasin au moment du braquage. A l’issue de la fusillade, l’un des malfrats atteint d’une balle a succombé à ses blessures, malgré l’intervention des équipes de secours. Ses deux comparses, légèrement blessés, ont été admis dans un hôpital de la ville. Selon des sources policières, les trois hommes sont des jeunes gens âgés d’une vingtaine d’années. Cette fusillade s’est déroulée quelques heures après la visite du ministre de l’intérieur, Claude Guéant, qui s’était rendu au chevet d’un policier gravement blessé, après la fusillade survenue à Vitrolles. Atteint de trois balles de kalachnikov, deux à l’abdomen et une à la tête, le fonctionnaire, âgé de 37 ans, étaittoujours entre la vie et la mort, mardiendébut dematinée. Ce policier avait pris part à une coursepoursuiteentaméecontre unebande de cambrioleurs originaires de l’étang de Berre, qui écumait la région dans la soirée de dimanche. Avant d’être intercepté par deux voitures de la BAC dans la zone des Estroublans à Vitrolles, les malfaiteurs avaient dévalisé un supermarché à Saint-Martin-de-Crau, non loin d’Arles, et un magasin de produits surgelés à Venelle, près d’Aix-en-Provence. « Disproportion » Poursuivis par les BAC aixoises, ilsontétéstoppésparunehersedisposée en travers de la route. Selon les policiers, ils auraient alors ouvert le feu « à l’aveugle pour couvrir leur fuite », tuant par accident l’un des leurs. Celui-ci, un jeune homme d’une trentaine d’années, connu pour des faits de vols à mains armés, avait été arrêté à quarante et une reprises, la première fois alors qu’il avait à peine 15 ans. Mardi matin, ces trois complices, activement recherchés par la brigade criminelle de Marseille, restaient introuvables. «Ce qui est surprenant, c’est la disproportion entre l’objet et la violence de la réaction, a déclaré Claude Guéant, constatant l’utilisation d’armes automatiques puissantes». De leur côté, les syndicats de gardiens de la paix, Unité-SGP-Police etAlliance,ontexpriméleurinquiétude face à cette montée de la violence. Alliance, proche de l’UMP, a déploré que «des peines réellement incompressibles contre les meurtriers de gendarmes et de policiers n’aient pas été votées ». Unité-SGPPolice, majoritaire, a regretté que les équipes qui ont pris en chasse les malfrats de Vitrolles n’étaient constitués que de « deux fonctionnaires par voiture, là où auparavant on en comptait trois ». p Yves Bordenave Sécurité sociale Arbitrage pour compenser l’abandon du quatrième jour de carence Le gouvernement et le groupe UMP de l’Assemblée nationale se sont accordés, mardi 29 novembre, sur un bouquet d’économies destiné à compenser l’abandon du quatrième jour de carence pour les arrêtsmaladie des salariés du secteur privé. Le plafond de la Sécurité sociale pour les indemnités journalières (50 % du salaire brut) est ramené de 2,15 smics à 1,8 smic. Le jour de carence appliqué dans la fonction publique l’est aussi, de manière explicite, dans les régimes spéciaux. Le bénéfice découlant de l’application d’un jour de carence dans la fonction publique viendra en déduction des dépenses d’assurance-maladie. Enfin, une série de mesures diverses, pour un total de 50 millions d’euros, permettra d’arriver aux 200 millions d’euros d’économies que réclamait le premier ministre, François Fillon, qui avait dû reculer devant l’opposition des parlementaires de l’UMP à l’instauration de ce quatrième jour de carence (Le Monde du 24 novembre). p Patrick Roger Justice Bissonnet, condamné à vingt ans pour avoir commandité le meurtre de sa femme, est hospitalisé Jean-Michel Bissonnet, 62 ans, condamné le 24 novembre par la cour d’assises d’appel de l’Aude, à vingt ans de réclusion criminelle pour avoir commandité l’assassinat de son épouse, a été hospitalisé en urgence dimanche après avoir fait un malaise cardiaque. « Ses jours ne sont pas en danger», a déclaré Me Raphaële Chalié, avocate des deux fils Bissonnet. La cour avait réduit de dix ans la peine qui lui avait été infligée en première instance. Elle a confirmé la peine de vingt ans de prison pour Meziane Belkacem, qui avait avoué l’assassinat, et de huit ans de prison pour Amaury d’Harcourt, coupable de complicité (Le Monde du 25 novembre) Religion Des profanations de lieux de culte en forte progression depuis 2008 Le nombre de profanation de lieux de culte et de cimetières est passé de 304 en 2008 à 621 en 2010. Fin octobre, 509 affaires de ce type avaient déjà été enregistrées, selon le rapport, publié mardi 29 novembre, du groupe d’études sur la politique de lutte contre les profanations des lieux de culte. Les faits concernent des lieux chrétiens (308 églises et 214 cimetières en 2010), musulmans (50 mosquées et 7 cimetières) et juifs (30 synagogues et 12 cimetières). Les passages à l’acte, en majorité le fait de mineurs, se produisent en groupe après une consommation excessive d’alcool ou par désœuvrement. p S. L. B. économie 0123 Mercredi 30 novembre 2011 13 En hausse En baisse Les cours du jour ( 29/11/11, 09 h 47 ) l’australie – Déjà notée triple A par les agen- l’immobilier – Les ventes de logements ces Standard & Poors et Moody’s, l’Australie s’est vu conférer cette note d’excellence par Fitch Ratings en raison de sa dette faible, mardi 29 novembre. Elle est le quatorzième pays coté au maximum par les trois agences mondiales. neufs ont chuté en France de 12,9 % sur un an au troisième trimestre, selon les chiffres publiés, mardi 29 novembre, par le ministère du logement. En douze mois, les ventes ont reculé de 10,7 % par rapport à la même période de 2010. Euro Or Pétrole Taux d’intérêt Taux d’intérêt 1 euro Once d’or Lightsweet crude France Etats-Unis 1,3348 dollar (achat) 1 714,00 dollars 95,95 dollars 3,569 (à dix ans) 1,893 (à dixans) La TNT a bousculé le paysage audiovisuel Eric Besson, le ministre de l’industrie, devait éteindre, mardi 29novembre, le dernier émetteur analogique Les petites dernières, aux audiences insignifiantes en 2005, se sont désormais imposées La TNT conquiert audience et recettes publicitaires PART D’AUDIENCE ANNUELLE DES CHAÎNES (cible : individus de 4 ans et plus) 35 33,1 Apparition de la TNT Une nouvelle norme de diffusion : le DVB-T2 Pour diffuser davantage de chaînes par le biais de la télévision numérique terrestre (TNT), le gouvernement a notifié, en août, à Bruxelles un projet d’arrêté instaurant une nouvelle norme de diffusion : le DVB-T2. Une norme déjà adoptée en Grande-Bretagne et en Suède. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a lancé en octobre un appel à candidatures pour six nouvelles chaînes en haute définition qui pourraient être retransmises avec cette future norme. Mais les téléspectateurs devront s’armer de patience. Les premiers décodeurs numériques en DVB-T2 ne seront pas commercialisés auprès du grand public avant 2013. In fine, le DVB-T2 ne devrait être qu’une norme transitoire. Sa fin est déjà programmée. En 2016, si le calendrier est respecté, il devrait à son tour laisser la place à une nouvelle norme de diffusion numérique : le HEVC. France Télévisions 6,1 % M6 21,4 % TF1 44,3 % 30 3,6 TF1 25 37,2 1,8 W9 TMC 4,5 22,1 17,2 16,7 15 16,1 France 2 10 12,7 10,7 France 3 10,4 M6 5 4,1 3,7 3,7 i-Télé NRJ 12 0,4 France 3 4,2 France 5 NT1 2,6 19,7 TNT 20 France 2 M6 24,5 TF1 0,3 France 4 3,0 2,5 2,0 1,9 1,4 10,0 BFM TV Canal+ Gulli Direct Star Autres 3,1 Canal+ 0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 Direct8 2010 3,3 PART D’AUDIENCE ANNUELLE DES CHAÎNES (cible : individus de 4 ans et plus) 2009 3,0 2010 2,0 1,6 0,7 Depuis 2005, la TNT a profondément bouleversé le paysage audiovisuel. « Il y a eu une démultiplication de l’offre », indique Patrick Ballarin, président de Digitime, filiale commune de Médiamétrie et de Netgem. Les six télévisions historiques sont désormais dix-neuf sur la TNT. Les TF1, France 2, France 3, Canal+, M6 et France 5/Arte ont dû faire de la place aux TMC, W9, France 4, Direct 8, NRJ 12, NT1, Direct Star, Gulli, BFM TV, i-Télé, Public Sénat, LCP AN et France Ô. Surtout, les nouvelles chaînes ont fortement entamé l’audience de leurs ancêtres. TF1, qui pesait en moyenne 32,3 % de part d’audience en 2005, à l’arrivée de la TNT, n’en réunit plus, en novembre 2011 que 23,6 %. La dégringolade est de même ampleur pour France 2. La chaîne publique, qui valait encore 19,8 % de part d’audience en 2005, est tombée à 15 % six ans plus tard. Dans le même temps, les petites dernières, aux audiences insignifiantes en 2005, se sont désormais imposées. TMC, contrôlée par TF1, RÉPARTITION DES PARTS DU MARCHÉ PUBLICITAIRE DES CHAÎNES, en % 0,5 i-Télé 1,0 0,9 0,7 BFM TV est devenue la cinquième chaîne généraliste avec 3,5 % de part d’audience en moyenne. Elle est au coude-à-coude avec W9, filiale de M6, et avec France 5. Pourtant, malgré la progression inexorable de la TNT, les grands équilibres n’ont pas été totalement modifiés. Un temps ébranlées par la concurrence des petites chaînes, TF1 et M6 ont retrouvé toute leur superbe. Fin 2011, précise M. Paolini, TF1, renforcée par TMC et NT1, attire « à nouveau 29 % de part d’audience et même 33 % auprès des ménagères de moins de 50 ans », la cible la plus recherchée par les annonceurs. M6 fait mieux. Elle a dépassé France 3, et avec l’apport de W9, elle flirte avec les 15 % de part d’audience. Alors que l’ancien PDG de TF1, Patrick Le Lay s’était fortement opposé au déploiement de la TNT, son successeur, Nonce Paolini, s’en féliciterait presque. « Elle nous a amenés à diversifier nos ressources et à aller sur de nouveaux terrains de jeu», assure-t-il. « La chaîne TF1 reste un cas unique en Europe », se félicite Nonce Paolini. « Elle reste à un niveau d’audience que n’atteint aucune autre chaîne leader en Europe ». Pour faire pièce à la TNT, « le groupe TF1 s’est renforcé superbement », ajoute M. Paolini. Selon le PDG, « TMC et NT1 sont des escorteurs efficaces du navire amiral TF1 ». Mais cette dernière a payé cherce renfort. LaUne a dû débourser 422 millions d’euros pour racheter TMC et NT1 au Groupe AB. France Télévisions, pour sa part, s’en est moins bien sortie. Le groupe public n’a en effet pu lancer que France 4 sur la TNT, malgré ses nombreux projets. Aujourd’hui, c’est Canal+ qui veut renforcer son offre gratuite sur la TNT. La chaîne cryptée reprend les chaînes de la TNT gratuite Direct8 et Direct Star au groupe Bolloré. Un à un, les nouveaux entrants, Lagardère, Groupe AB, Bolloré, quittent la TNT. « Nouveaux 1,6 1,4 1,4 1,9 2,2 2,6 2,5 1,8 1,5 1,1 0,7 Direct Star France 4 entrants, premiers sortis », grince Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6. Requinquées côté audience, les chaînes historiques sont, en revanche, loin d’avoir retrouvé leurs niveaux d’antan en termes de recettes publicitaires. « L’arrivée de nouvelles chaînes ne crée pas de nouvelles ressources publicitaires », explique Dominique Delport,PDG de Havas Media France. Le gâteau publicitaire reste le même, calé entre 3 milliards et 3,4 milliards d’euros par an depuis l’an 2000. « Ce sont les parts qui sont de plus en plus fines », note M. Delport. Il note que, depuis 2005, « pour attirer les annonceurs, les nouvelles chaînes baissent leurs prix ». Selon Nicolas de Tavernost, le coût GRP [le coût pour les annonceurs qui veulent toucher 1 000 téléspectateurs] a déjà bais- NT 1 Direct8 sé de 40 %. Les Direct 8, NRJ 12 et consorts « ont provoqué une poussée déflationniste », admet M. Delport. Pour preuve, avance-t-il : « En 2005, le point d’audience générait 35 millions d’euros de recettes publicitaires. En 2010, il ne rapportait plus que 24 millions d’euros. » Selon lui, une seule chaîne a échappé à cette « pression déflationniste sur le marchéde la publicité à la télévision : Canal+ ». La régie publicitaire de la chaîne à péage a connu « une croissance à deux chiffres de ses recettes même pendant la crise », s’étonne M. Delport. Cette pression sur le marché publicitaire ne devrait pas s’atténuer car, indique M. Delport, les nouvelles entrantes de la TNT ont accumulé « 500 millions d’euros de pertes depuis six ans ». Il n’empêche, certaines ont déjà trouvé leur économie. « NRJ 12 sera NRJ 12 Gulli légèrement bénéficiaire fin 2012, avec un budget annuel de 70 millions d’euros » annonce son propriétaire, Jean-Paul Baudecroux. La chaîne d’information en continu, BFM TV, devrait également être à l’équilibre fin 2011. Après avoir franchi à lahausse le seuil du million de téléspectateurs, les championnes du numérique hertzien visent désormais la barre des deux millions. Direct 8 détient le record d’audience de la TNT, en 2011. Le 13 juillet, la diffusion de la finale de la Coupe du monde de football féminin entre la France et les Etats-Unis a attiré 2 325 000 téléspectateurs soit 16,7 % de part d’audience. Ce soir-là, Direct 8 a même enregistré un pic d’audience historique à 3 264 00 0 téléspectateurs lors des tirs au but. Le succès de la TNT s’appuie « sur les rediffusions de programmes forts des chaînes historiques », W9 TMC SOURCES : MÉDIAMAT-MÉDIAMÉTRIE ; KANTAR MÉDIA M ardi 29 novembre, la Télévision numérique terrestre (TNT) a achevé son déploiement. Le Languedoc-Roussillon, dernière région française encore desservie par la télévision analogique hertzienne, a basculé à son tour vers la nouvelle technologie. Pour le symbole, Eric Besson, ministre de l’industrie et de l’économie numérique, devait éteindre, ce mardi, à Montpellier, le dernier émetteur en analogique. Lancée en mars 2005, la TNT aura mis un peu plus de six années à s’imposer. Désormais, quel que soit son support de diffusion – câble, satellite, ADSL ou TNT –, la télévision se conjugue uniquement en mode numérique. Fin novembre, 97,3 % de la population sera couverte par la TNT. Les rares zones d’ombre reçoivent la TNT notamment via le satellite. explique M. Ballarin. La TNT fait son miel avec des films de catalogues et des compétitions sportives de second rang. Pour preuve, le cinéma rafle 7 des 10 meilleures audiences de la TNT en 2011. Mais cet âge d’or vit ses derniers jours. Désormais, les chaînes « seront à armes égales avec les télévisions historiques », indique M. Delport. « Programmes premium » des historiques contre « rediffusions » des nouvelles chaînes, signale M. Ballarin. La TNT n’a pour autant pas fini de grandir. En octobre, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a décidé de lancer un appel à candidatures pour six nouvelles chaînes en haute définition. Une vingtaine de candidats sont déjà dans les startingblocks. De TF1 à l’Equipe TV, tout le monde veut sa chaîne. La décision est prévue en mars 2012. p Guy Dutheil Une aide à l’équipement dans les zones non couvertes DANS LA NUIT du 28 au 29 novembre, la France a basculé définitivement de la télévision analogique à la télévision numérique terrestre (TNT). Les délais annoncés en 2005, lors des débuts des travaux, auront été tenus. Mieux, le basculement a eu lieu avec vingt-quatre heures d’avance. Autre motif de satisfaction : le coût. La facture a été diminuée par deux par rapport aux prévisions initiales, pour atteindre 150 millions d’euros. Seul bémol : il reste une fraction non négligeable de Français (environ 5 %) qui ne pourront accéder à cette TNT. Si l’on prend en compte les foyers mal couverts ou partiellement couverts pour des raisons essentiellement géographiques, la part de la population non concernée par la TNT est de 10 % à 15 %. Pour ces 2,5 à 3,8 millions de personnes, selon le GIP (groupement d’intérêt public) France Télé Numérique et le Conseil supérieur de l’audiovisuel, il faut envisager des abonnements au câble, à un satellite numérique, ou l’achat d’une box Internet ADSL. Car, avec ces solutions, le basculement total sur la TNT ne pose pas de problème majeur pour continuer à recevoir la télévision. En revanche, sont particulièrement concernés par le changement les foyers qui recevaient la télévision analogique via les satellites Atlantic Bird 3 (AB3) et Astra. Décodeur Ces derniers, qui diffusent à la fois des chaînes gratuites et des chaînes payantes accessibles par abonnement, ne le feront plus qu’en numérique. Pour continuer à les capter, il faut être équipé d’un décodeur Fransat pour AB3 et TNTsat pour Astra. Pour Fransat, le passage au numérique relève du jeu d’enfant : il suffit de remplacer l’an- cien démodulateur analogique par le pack décodeur Fransat sans rien changer à la parabole. Et adjoindre un décodeur à chaque téléviseur du foyer pour recevoir la TNT dans toute la maison. Tout cela a un coût : il faut compter de 100 euros à plus de 200 euros en fonction du modèle choisi et de ses performances techniques (possibilité d’enregistrer, haute définition, etc.). Mais un fonds spécial a été prévu. Pour les foyers non encore équipés en TNT, un système d’aide, plafonnée à 250 euros, a été mis en place dans le cadre d’une continuité de la réception. Les critères d’éligibilité sont les suivants : la demande doit concerner un seul poste de télévision de la résidence principale. Il faut habiter dans une zone non couverte par la TNT et n’avoir toujours reçu, avant l’entrée en service de la diffusion numérique, que six chaînes nationales, que ce soit par une antenne râteau ou une parabole orientée vers le satellite AB3. En outre, il faut présenter une facture des frais engagés pour les travaux ou les abonnements souscrits (ADSL, fibre). Enfin cette demande d’aide doit être la première et elle est limitée dans le temps : elle doit être adressée moins de six mois après le passage au tout-numérique. Il se peut aussi que, même dans une zone a priori couverte par la TNT, la réception soit mauvaise, voire quasi inexistante. Pas de panique ! Il existe aussi une aide dérogatoire à la réception. Les critères d’éligibilité sont pratiquement identiques à ceux requis pour l’aide normale, si ce n’est qu’il faudra prouver que l’installation n’est pas en cause dans la qualité de la réception. Une mauvaise réception attestée, en outre, par un antenniste professionnel. p François Bostnavaron 14 0123 économie Mercredi 30 novembre 2011 Avant même le lancement de son offre mobile, Free déstabilise le marché Le nouvel opérateur veut «changer le train de vie» de ses concurrents, Bouygues, Orange et SFR J amaisoffre detéléphoniemobile n’aura été tant attendue. Depuis l’annonce de sa future arrivée sur le marché, Free n’en finit pas de déchaîner les passions. Très secret sur les modalités et les caractéristiques de son offre, Xavier Niel, fondateur de Free (et actionnaire à titre personnel du Monde), n’a cessé de répéter que son forfait serait bien moins cher que celui des opérateurs historiques. Jusqu’à diviser la facture par deux. La communauté des « Freenautes » – ces adeptes de l’opérateur – et les médias spéculent sur la date de sortie et le prix des abonnements.Freearrivera-t-il surlesmarchés avant Noël, date où les opérateurs engrangent un quart de leur clientèle annuelle ? Son forfait sera-t-il « Sim only » ou proposera-t-il un téléphone subventionné ? Le premier prix débutera-t-il à 15 euros comme le dit la dernière rumeur ? « Ils ont la même stratégie de communication qu’Apple. Ils sonttrèssecrets, ce qui créede la tension et de l’attente. Sans oublier qu’ilsont unecommunautésimilaire de fans irréductibles », remarque Vincent Teulade, expert en télécoms au cabinet PWC. Selon l’analyste, Free n’arrivera peut-être pas à diviser par deux le prix des forfaits, car ils ont baissé depuis 2008, mais il devrait quand même être capable de réduire la facture, en renouvelant les formules magiques qui ont marché lors de la sortie de son offre Internet Freebox : une structure de coûts plus légère et une offre simplifiée et adaptée à ce que veut le client. Prévoyant de vendre ses forfaits uniquementsur Internet à l’exception de rares boutiques dans quelques grandes villes, l’opérateur devrait économiser sur le service et les charges salariales. A titre de comparaison, ses futurs concurrents disposent chacun d’un réseau allant de 800 à 1 200 boutiques en France. « Les opérateurs ont du mal à repenser les choses à partir d’une feuille blanche pour faire moins cher et c’est ce que s’apprête à faire Free d’autant qu’il y a de la marge ! », précise M. Teulade qui insiste sur la cherté des prix et notamment sur le SMS généralement facturé plusieurs fois « son prix de revient, qui est très faible ». «Ils se sont habitués à un certain train de vie et nous allons changer cela », dit une source interne chez Iliad, maison mère de Free. Et d’ajouter : « Nous voulons que notre offre soit la plus attractive possible, sur le prix mais aussi sur les modalités : nous serons transparents et flexibles, les clients sauront ce qu’ils payent. » Mais Free ne pourra pas casser les prix à l’infini, tempère un autre analyste qui souhaite garder l’anonymat. Car, si dans son « souci de transparence », il sépare le coût du téléphone portable de celui du forfait, le consommateur finira dans la plupart des cas par acheter un terminal et donc payer un peu plus cher que prévu. L’offre de subvention devrait alors se faire sous la forme d’un crédit à la consommation en partenariat avec Sofinco, anticipent les experts sans que Free confirme. Selon les analystes, l’opérateur ne pourrapas nonplus rogner éternellement sur ses marges car, comme le rappelle Hervé Collignon du cabinet At Kearney, « les marges des grands opérateurs français sont loin d’être les plus élevées d’Europe et sont par exemple en dessous de ce qui se passe en Italie ». Marge de manœuvre Pour autant, le cabinet de conseil crédite Free d’une part de marché de 8 % d’ici quatre ans, soit presque 6 millions de clients. Outre la fidélité des « Freenautes » qui lui est acquise et son agressivité sur les prix, Free devrait bénéficier du fait que le nombre de cartes sim par habitant est plus bas qu’ailleurs en Europe. « Contrairement à ce que l’oncroit, ilreste encore des gens à équiper », fait remarquer M. Collignon. Les statistiques le confirment : selon une étude du cabinet, en 2010 la pénétration du téléphone mobile était de 101 % en France, contre 120 % au RoyaumeUni ou encore 157 % en Italie. Pourtant, l’arrivée de Free commence déjà à bouleverser le marché.Bien, qu’ils comptent sur «l’accompagnementdu client et la supé- riorité de leur service en magasin », les opérateurs historiques ont déployé une série de mesures pour anticiper l’événement et la baisse des tarifs que cela ne manquera pas d’engendrer. SFR clame que sa nouvelle offre Eden n’a rien à voir avec le nouveauconcurrent. Il n’empêche,lancée en juin dernier, celle-ci prévoit la baisse du prix du forfait dès que le téléphone est payé. « Or c’est à ce moment-là qu’ils se font leur marge sur le terminal ! », souligne M. Colignon. Même chose pour les forfaits Red de SFR, Sosh d’Orange ou Be & you de Bouygues vendus très peu cher sur Internet. « Ces actions d’anticipation détruisent le marchéenle faisant baisser», explique l’analyste. Seul Orange a une marge de manœuvre. Selon une source proche du dossier, l’opérateur se verrait reverser près d’un milliard d’euros en trois ans par le nouvel arrivant en redevance pour l’usage de son réseau. A comparer avec un chiffre d’affaires de 10,8 milliards d’euros dans la téléphonie mobile en 2010. p Sarah Belouezzane En gardant ses modalités secrètes, Free attise la curiosité autour de sa nouvelle offre. THOMAS COEX/AFP Les prêts toxiques de Dexia coûtent cher au conseil général du Rhône Pour l’opposition PS, le surcoût est de 400millions d’euros, soit «treize ans de budget logement» U n surcoût de 400 millions d’euros, à ce jour la plus grosse facture de toutes les collectivités territoriales françaises ! Mardi 29 novembre, les élus d’opposition du conseil général du Rhône, présidé par le garde des sceaux Michel Mercier, devaient dévoiler leur estimation du coût des « emprunts toxiques » – assis sur des paramètres exotiques et des formules complexes risquant de faire exploser le coût de la dette – dans les années 2000. Une opération « vérité » sur les finances du département, dans un dossier où, estime Thierry Philip, conseiller général socialiste et maire du 3e arrondissement de Lyon, « M. Mercier fait preuve d’un manque de transparence et minimise les risques, au détriment de l’intérêt général.» Décidés à faire la lumière, à l’échelle du département, sur ce scandale des prêts risqués, les élus de gauche ont travaillé d’arrachepied pour évaluer la façon dont leur taux d’intérêt pourrait évoluer ainsi que le coût final pour la collectivité. Le chiffrage de 400 millions d’euros auquel ils parviennent a été élaboré avec un expert, Emmanuel Fruchard, conseiller municipal PS de Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) et ancien financier. C’est la somme que devra payer le Rhône pour rembourser sa dette au cours des dix-huit prochaines années. Et que Dexia demanderait auconseil généralsi celui-ci voulait « sortir » de ces crédits à hauts risques pour les convertir en prêts classiques à taux fixe, et sécuriser ainsi sa dette. « La grande inconnue, c’était la perte latente pour le conseil général du Rhône. On connait à présent la vérité, déclare M. Fruchard. Il s’agit d’une pénalité record ! » A titre de comparaison, dans une affaire où les risques sont fonction des marchésfinanciersetsontdonc trèsdifficiles à évaluer, le surcoût de ces crédits était évalué à 58 millions d’euros pour la ville d’Asnières (Hauts-de-Seine) fin 2010. « A bras-le-corps » Pour le Rhône, la facture a été accrue par la crise de la zone euro, qui a fait évoluer les paramètres des prêts d’une manière très défavorable et grimper les taux d’intérêts. « Les taux de certains crédits dépendaient de l’évolution du franc suisse contre l’euro et depuis la crise, le franc suisse a beaucoup monté », explique M.Fruchard. Sur 23 emprunts souscrits entre 1999 et 2010 pour 948,5 millionsd’euros, sept créditsreprésentant 483,9 millions seraient toxiques, dont cinq très toxiques. C’est 54 % de la dette sur cette période. « Il est temps pour M.Mercier d’ouvrir tous les livres et de prendre le problème à bras-le-corps », estiment les élus socialistes du Rhône, rangés derrière M. Philip. L’opposition souhaite que soit levée ce qu’elle qualifie « d’épée de Damoclès » sur les finances publiques, alors que, souligne-t-elle, « l’essentiel, des risques liés à ces prêts se matérialisera après 2014 ». Ces crédits ont en effet été conçus pour faire faire des économies aux collectivités mais après quelques années, au terme de cette bonification, leur taux s’envole et rapporte beaucoup d’argent à la banque. Au nom de l’opposition, M.Philip demande à M.Mercier de déposer une plainte contre Dexia : « 400 millions, c’est treize ans de notre budget logement, deux ans et demi du budget collèges ou encore deux ans de RSA ! », conclut-il. p Anne Michel Les Chinois sont prêts à investir leurs réserves financières en Europe Lou Jiwei, patron du fonds souverain China Investment Corporation, vise en particulier les projets d’infrastructures Shanghaï Correspondance L ’Europe, ses entreprises, ses infrastructures… Voilà les prochaines cibles de la Chine et de ses colossales réserves de change. En 2012, Pékin enverra une délégation d’investisseurs chinois pour « acquérir des entreprises européennes », a prévenu, lundi 28 novembre, le ministre du commerce, Chen Deming. « La Chine veut investir son important excédent commercial et ne veut pas détenir des milliards qui se déprécient », a-t-il argumenté. Le même jour, dans un entretien au Financial Times, Lou Jiwei, le patron du fonds souverain China Investment Corporation (CIC), s’est dit disposé à engager ses fonds dans les infrastructures en Europe et aux Etats-Unis, « qui ont sérieusement besoin d’investissement », et surtout au Royaume-Uni. « Les dépenses dans les infrastructures sont un important moyen de stimuler la consommation et encouragent la croissance économique », fait valoir Lou Jiwei Or, les Chinois souhaitent désormais « investir, développer et opérer les projets », alors qu’ils étaient jusqu’à présent confinés au rang de seuls prestataires. Lou Jiwei s’est déjà rendu à Rome, en septembre, pour étudier les opportunités. Mais l’Italie cherchait surtout à céder de la dette. Trop risqué pour le CIC et ses 410 milliards de dollars que Lou Jiwei est chargé de gérer en bon père de famille. Le fonds cherche du tangible. « Ils sont sous très forte visibilité, car sur les blogs on lit souvent que les réserves sont l’argent du peuple », constate un étranger en contact avec le CIC. Les premiers investissements du fonds – officiellement lancé en 2007 – furent d’ailleurs malheureux. CIC avait placé 3 milliards de dollars dans le « hedge fund » américain Blackstone, puis 5 milliards dans la banque d’affaires américaine Morgan Stanley, deux sociétés qui ont enregistré de lourdes pertes avec la crise de 2008-2009. Lou Jiwei et ses subalternes avaient alors été accusés d’avoir fait des folies avec l’argent des Chinois. Aujourd’hui, Lou Jiwei, 60 ans, semble destiné à de nouvelles responsabilités dans le domaine des finances. Cela devrait se faire lors de la passation de pouvoir au sommet de l’Etat-parti, fin 2012. «La Chine veut investir son important excédent commercial» Chen Deming ministre du commerce chinois Nicholas Lardy, spécialiste de l’économie chinoise au Peterson Institute, décrit Lou Jiwei comme un « technocrate financier », au même titre que le gouverneur de la banque centrale, Zhou Xiaochuan. « Que ces décideurs soient choisis pour leurs talents plus que leurs connexions politiques est un signe de progrès de l’administration », juge-t-il. Formé à la prestigieuse université de Tsinghua, en 1978, Lou Jiwei a ensuite étudié l’économétrie à l’Académie des sciences sociales, institution qui lui garantit une passerelle dans l’administration. Il a été nommé en 1988 à la commission des réformes de Shanghaï. Le maire de la ville, à l’époque, est le futur premier ministre Zhu Rongji, qui fait de Lou Jiwei un de ses protégés. Dean LeBaron, l’investisseur de Boston, devenu un ami à cette période, se souvient d’un homme curieux et pragmatique, qu’il sort au restaurant lorsqu’il vient aux Etats-Unis au début des années 1990 : « Il voulait essentiellement rencontrer les vraies gens, savoir comment ils vivent. » Envoyé ensuite faire ses classes à la campagne, dans la province du Guizhou, Lou Jiwei explique alors à un correspondant du Washington Post que le Parti doit présenter des résultats économiques, ou alors le peuple, ouvert sur le monde extérieur, se retournera contre lui. Un constat qui sera plus que jamais d’actualité lorsqu’il sera placé, en 2007, à la tête du CIC, chargé d’obtenir de meilleurs rendements que les simples bons du Trésor américain. Pour Lou Jiwei, la priorité doit donc aller au tangible : infrastructures, mais aussi ressources naturelles. Le 10 août, CIC et GDF Suez ont ainsi annoncé un accord par lequel le fonds souverain a acquis 30 % des activités d’exploration et de production du groupe français. Selon Gérard Mestrallet, PDG de GDF Suez, les critères d’implica- tion de CIC sont de nature à rassurer : participation minoritaire, investissement amical, présence de long terme, guidée par la logique du marché. « L’accord avec CIC est un label disant que nous sommes des alliés de la Chine, nous avons été sélectionnés et certaines concrétisations pourraient se faire hors de Chine », souligne M. Mestrallet, qui connaît Lou Jiwei depuis 2007 et ne tarit pas d’éloges à son sujet : intelligent, doté d’une hauteur de vue, pas arrogant. p Harold Thibault 0123 économie Mercredi 30 novembre 2011 15 Shiseido veut devenir un «acteur mondial représentatif de l’Asie» Hisayuki Suekawa, PDG du groupe de cosmétique, vise 50% des ventes hors du Japon en 2017 Entretien Tokyo H isayuki Suekawa, 52 ans, PDG de Shiseido, cinquième groupe mondial de cosmétiques (45 000 employés, 6,4milliardsd’euros de chiffre d’affaires), dévoile sa stratégie. La manière de consommer des Japonais a-t-elle été modifiée par la catastrophe du 11 mars ? Après ce séisme majeur, les consommateurs ont continué à acheter, même des produits chers. Cette tendance, observée avant le 11 mars, s’est même accentuée. A-t-il fallu rassurer les consommateurs ? Pour nous, la fonction d’un produitde beautécompte,mais c’est la valeur de la marque qui fait acheter. Depuis les années 1990, les consommateurs ont été confrontés à plusieurs incidents dans la chaîne agroalimentaire, avec des produits périmés ou des origines falsifiées.Ilssedemandent àquifaire confiance. Là, c’est encore plus vrai avec les risques de radioactivité liés à la centrale nucléaire. Il a fallu les rassurer. Vos usines au Japon fonctionnent-elles normalement ? Oui. Le site qui était dans la zone sinistrée a été remis en marche quinze jours après le sinistre. Depuis 2008, le groupe essaie de s’internationaliser davantage, mais le chiffre d’affaires reste majoritairement réalisé au Japon. Quels sont vos objectifs ? Depuis 2008, le chiffre d’affaires de Shiseido a baissé dans l’Archipel. C’est la raison pour laquelle nous devons rétablir notre activité sur notre marché. Nous sommes présents en Chine depuis trente ans. La croissance y est énorme mais la concurrence sévère. Enfin, dans la zone asiatique, hors Japon et Chine, la hausse du revenu moyen des consommateurs est devenue une réalité. Désormais, nous souhaiterions cibler des clients qui consomment des produits « mass-tige », entre les produits de masse et le prestige. Pour ce segment de marché, nous avons les marques Za, Senka et Tsubaki, présentes en Chine ou dans les pays asiatiques. Dans le programme triennal adopté en 2011, nous visons une augmentation annuelle de 10 % du chiffre d’affaires à l’international. A plus long terme, en 2017, notre objectif est d’atteindre 50 % du chiffre d’affaires à l’international (contre 42,9 % aujourd’hui). Notre objectif est de devenir l’acteur mondial représentatif de l’Asie dans dix ans. Ce n’est pas évident, chaque groupe a sa stratégie. Notre groupe est né voici presque 140 ans et est imprégné de culture japonaise. Nous ne pouvons pas concurrencer L’Oréal ou Procter & Gamble en termes de ventes ou de capitalisation boursière. Quel est l’impact d’un yen très fort pour Shiseido ? En fait, l’impact est léger puisque notre groupe n’est pas exportateur. Nous fabriquons aux EtatsUnis pour le marché américain ; en Chine pour le marché chinois ; au Vietnam pour le reste de l’Asie. Dans le parfum, vous allez perdre la licence de Jean Paul Gaultier en 2016. Comment comptez-vous compenser ce manque ? Nous maintiendrons nos efforts pour bien les vendre jusqu’à cette date. En juillet, nous avons lancé le premier parfum du couturier Elie Saab. Nous pensons réitérer ce genre de lancement, obtenir d’autres marques et aider les efforts de développement de BPI (la filiale parfum basée à Paris). Après deux années de baisse, en2008 et 2009, quand retrouverez-vous une croissance forte ? Nous avons constaté en 2010 une reprise du volume d’affaires en dehors du Japon. Depuis avril, malgré l’impact négatif du séisme qui nous a beaucoup affectés, nous essayons de rétablir les ventes sur notre marché domestique. En 2011, nous prévoyons – 0,5 % sur le marchéjaponais,tandisquenousattendons + 3,9 % à l’international. Au total, nous visons une croissance de 1,4 % (à 680 milliards de yens). Olympus est au cœur d’une crise de gouvernance. Cela incite-t-il Shiseido à modifier son propre fonctionnement ? L’organisation actuelle de notre conseil d’administration a été mise en place en 2006. Tous les administrateurs, dont deux extérieurs, sont très actifs. Ils n’hésitent pas à donner leur opinion. Ils sont loin d’être « trop gentils ». p Propos recueillis par Philippe Mesmer (correspondance) et Nicole Vulser JÉRÉMIE SOUTEYRAT POUR « LE MONDE » Le nombre d’acheteurs de produits cosmétiques en Chine a-t-il dépassé celui du Japon ? C’est bien possible. La population « cosmétique » en Chine a franchi les 100 millions de personnes en 2010. Les prévisions font état de200millions de consommateurs potentiels en 2015 et de 350 millions en 2020. Le label « made in Japan » est-il important ? C’est rassurant. Surtout en période de crise. Même si la production se fait en Chine ou aux Etats-Unis, les dix centres de recherche et développement dans le monde bénéficient toujours de l’appui technique des équipes japonaises. Après le rachat de la marque californienne Bare Escentuals, en 2010, êtes-vous prêt à de nouvelles acquisitions ? Nous envisageons activement d’acheter d’autres sociétés, si elles correspondent à des segments qui nousmanquent,sil’onpeutenvisager des synergies et si ces marques peuvent être développées. Quand le rouge à lèvres redonne estime et courage Tsuneyuki Abe, professeur de psychologie de l’université Tohoku de Sendai, ignorait que ses travaux allaient être expérimentés dans des conditions extrêmes, après le tremblement de terre du 11mars. Cet universitaire assurait que le fait de prendre soin de sa peau avait un effet apaisant et pouvait agir comme antidote au sentiment de malheur. Il s’était aussi attaché à démontrer que le geste de se maquiller peut donner du courage aux femmes. C’est ce qu’a vérifié sur le terrain Miyako Okamoto, la maquilleuse la plus cotée de Shiseido. Celle qui s’occupe habituellement d’embellir stars ou mannequins pour les publicités ou les défilés de mode, a participé, comme 359 bénévoles du siège à Tokyo, aux actions d’aide aux victimes du tsunami mises en place par le groupe. Miyako Okamoto est partie sur les lieux «fin avril. Nous sommes arrivés dans des paysages dévastés», raconte-t-elle. Les bénévoles ont d’abord proposé aux réfugiés des massages des mains et du visage. «Ils habitaient dans des refuges, des écoles, des gymnases. Des cartons leur servaient à s’isoler, trouver un peu d’intimité », dit-elle. Shiseido avait envoyé massivement des produits d’hygiène de première nécessité dans les régions de Fukushima, Iwate et Miyagi. Des produits à utiliser sans eau, comme 10 000 bouteilles de shampooing sec, autant de flacons de savon liquide et de désinfectant pour les mains. Avant de faire parvenir aux sinistrés une seconde donation de 90000 démaquillants, des milliers de tubes de crème pour les mains… Miroirs «Un mois après le séisme, les femmes ne pensaient pas à se maquiller, ce n’est qu’après qu’elles ont souhaité retrouver ces gestes de soins quotidiens, dit Miyako Okamato. Il faisait froid et les réfugiées portaient des masques. On ne voyait donc que leurs yeux et leurs sourcils, que nous avons maquillés. C’est la partie du visage la plus importante pour les Japonaises.» Un peu plus tard, les femmes qui travaillaient de nouveau ont recommencé à mettre du rouge à lèvres. Cela leur donnait du courage. A leur demande, les sinistrées ont aussi reçu des miroirs. «Le fait de se maquiller permettait aux femmes de retrouver une estime d’ellesmêmes et rassurait aussi leurs enfants, qui retrouvaient le visage familier de leur mère», assure Miyako Okamoto. Mi-novembre, 71 565personnes n’avaient toujours pas regagné une maison et restaient dans des logements précaires. Neuf cent trente étaient encore abritées dans des refuges, selon les autorités. p N. V. LÚon confLuence Laboratoire de renaissance eXPosition du 30 novembre 2011 au 29 janvier 2012 / entrée Libre Cité de l’arChiteCture & du patrimoine palais de Chaillot - 7 avenue albert de mun paris 16 - m o troCadéro - CiteChaillot.fr © HdM MDP - JP Restoy - Conception : Guillaume Lebigre Tokyo Envoyée spéciale 16 0123 économie Mercredi 30 novembre 2011 Pertes & Profits | Chronique Par Stéphane Lauer Point de non-retour En Afghanistan, l’Inde concurrence la Chine dans l’exploitation minière Un consortium a remporté un appel d’offres pour une mine de fer située à l’ouest de Kaboul Facebook I ra. Ira pas. Pas un mois ne s’écoule sans que l’hypothèse d’une introduction en Bourse de Facebook ne soit évoquée dans les médias. Dernier épisode en date : le Wall Street Journal annonce, mardi 29 novembre, que le réseau social pourrait être coté à New York entre avril et juin 2012. Cette rumeur n’est pas la première, mais pourrait être… l’une des dernières. Car plus le temps passe, moins Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, aura de marge de manœuvre pour retarder encore ce qui s’annonce comme l’une des plus grosses introductions en Bourse de l’histoire. Pourtant, les raisons d’hésiter ne manquent pas. La faible visibilité qu’offrent les marchés n’incite guère à se lancer dans l’aventure. Et quand on regarde le parcours de ceux qui ont essuyé les plâtres ces dernières semaines, il n’y a, de fait, pas de quoi pavoiser. Groupon, le site d’achat sur Internet, après s’être envolé dans la foulée de son introduction, s’est effondré de 36 % au cours de la semaine de Thanksgiving. LinkedIn, le réseau social professionnel, connaît aussi un sérieux coup de mou boursier, même si son cours reste encore supérieur à son prix d’introduction. Mais comparaison n’est pas raison. D’autant que Facebook ne peut plus tellement reculer. D’ici àla fin de l’année, la start-up comptera plus de 500 actionnaires. Or la Securities and Exchange Com- mission, le régulateur des marchés financiers américains, oblige les sociétés, au-delà de cette limite, à une publication plus approfondie de leurs informations financières, notamment celles qui concernent la rentabilité. Pour Facebook, l’obligation doit s’appliquer à partir d’avril 2012. Bien sûr, Mark Zuckerberg, qui pendant longtemps n’a pas caché ses réticences à introduire sa société en Bourse, peut se plier à ces obligations légales sans aller jus- Toute la planète financière fantasme sur l’entrée en Bourse du réseau social qu’à Wall Street. Le problème est qu’il aurait tous les inconvénients de la transparence financière, sans en avoir les avantages. Facebook est valorisé 100milliards de dollars (75 milliards d’euros). Même si l’entrée en Bourse ne portait que sur environ 10 % du capital, cela ferait beaucoup d’argent. Aujourd’hui, toute la planète financière fantasme sur cette opération. Malgré les vicissitudes des marchés, la magie opère encore. Une fois ses comptes publiés, Facebook arrivera-t-il à entretenir son propre mythe ? Comme disait Georges Clemenceau : « Le meilleur moment de l’amour, c’est quand on monte l’escalier. » p Retrouvez Pertes & Profits sur le Net : lauer.blog.lemonde fr Le Conseil d’Etat contraint le gouvernement à relever les tarifs du gaz cet hiver La haute juridiction, saisie par des concurrents de GDF Suez, a jugé le gel des prix illégal I l arrive que l’Etat ne respecte pas une règle qu’il a édictée et que le Conseil d’Etat soit làpour le rappeler à l’ordre. C’est ce que la haute juridiction administrative a fait, lundi 28 novembre. Saisie en référé par l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie(Anode),regroupantles fournisseurs alternatifs (Direct Energie, Poweo, Altergaz…), elle a émis « un doute sérieux sur la légalité » du gel des tarifs du gaz. Décidé au printemps, après la hausse de 5,2 % intervenue au 1er avril, ce blocage s’est appliqué au 1er juillet et a été confirmé au 1er octobre. La haute juridiction a donné un mois à l’Etat pour revoir sa copie. Le ministère de l’industrie a immédiatement répondu que le nouvel arrêté tarifaire sera «conforme à la décision du Conseil d'Etat », sans dire s’il augmenterait les prix. Coûts d’approvisionnement Certes, syndicats et associations de consommateurs dénoncent des hausses (+ 60 % depuis 2005) qui entraînent une montée alarmante de la précarité énergétique. Mais on voit mal comment le gouvernement pourra y échapper. Même si c’est en plein hiver et à quelques mois de l’élection présidentielle. Le Conseil va d’ailleurs dans le même sens que la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Celleci estime que les prix payés par les 9,7 millions de foyers utilisant le gaz naturel auraient dû augmenter – de 8,8 % à 10 % – au 1er octobre pour refléter les coûts d’approvisionnement des fournisseurs. Lemontant de la facture des particuliers dépend des termes des contrats à long terme. Le prix payé par GDF Suez au norvégien Statoil, au russe Gazprom ou à l’algérien Sonatrach est largement indexé sur les cours du pétrole. Il dépend peu (10 %) des prix du gaz à court terme (spot), plus favorables depuis 2009. En mars, la CRE avait proposé de porter cette part à 30 %, afin de limiter la hausse des tarifs. En septembre, elle suggérait même, au nom de la concurrence, d’abandonner les tarifs réglementés, tout en accroissant le nombre de bénéficiaires des tarifs sociaux. Gérard Mestrallet, le PDG de GDF Suez, réclame « une règle du jeu claire ». Le blocage a entraîné un manque à gagner de 398 millions d’euros en 2011 pour le groupe. Et il affecte le cours de Bourse de la société : au printemps, l’action avait décroché après l’annonce du gel ; lundi, elle a engrangé 7,72 % (à 19,53 euros) après la décisionduConseild’Etat,dansunmarché en forte hausse (+ 5,46 %). Cette perte, considérable, ne menace pas la survie de ce quasimonopoleconservant plus de 90 % du marché. Cela explique que, tout en déposant aussi un recours devant le Conseil d’Etat, mi-octobre, GDF Suez n’a pas jugé bon de suivre la procédure d’urgence du référé. Le groupe était même prêt à transiger : limiter la hausse d’octobre à 5 % et porter de 400 000 à 1,5 million le nombre de foyers bénéficiant des tarifs sociaux. En revanche, le Conseil d’Etat a jugé qu’en affectant la marge des petits concurrents de GDF Suez, le blocage des tarifs « compromet leurprésence sur lemarché de la distribution de gaz » et « l’objectif public d’ouverture de ce marché à la concurrence », généralisée le 1er juillet 2007. p Jean-Michel Bezat New Delhi Correspondant régional U n consortium de sept entreprises indiennes, mené par l’entreprise publique State Authorityof India Ltd (SAIL),a remporté, lundi 28 novembre, l’appel d’offres pour l’exploitation, en Afghanistan, d’une mine de fer située à Hajigak, dans la province de Bamiyan, à 130 kilomètres à l’ouest de Kaboul. Cette « percée » indienne sur les mines afghanes est une première. Elle survient quatre ans après que la compagnie publique chinoise Metallurgical Corporation of China (CMC) avait enlevé la concession sur la mine de cuivre d’Aynak, à 40 kilomètres au sud de Kaboul. Ces deux contrats sont les premiers d’une série d’investissements miniers sur lesquels le gouvernement afghan compte beaucoup pour élargir son autonomie financière, alors que le retrait, prévu en 2014, des troupes de l’OTAN va se traduire par un assèchement des subsides internationaux. Selon une évaluation du Pentagone, l’Afghanistan est riche d’un potentiel minier – fer, cobalt, cuivre, or, chromite, lithium, pierres précieuses (lapis-lazuli…) – évalué à 1 000 milliards de dollars (750 milliards d’euros). Les autorités locales évoquent la somme de 3 000 milliards de dollars. Ces richesses minérales, à ce jour inexploitées du fait de l’insécurité et de l’absence d’infrastructures, attisent l’appétit des puissances régionales, parmi lesquelles la Chine et l’Inde sont les plus actives. Le succès indien vient rééquilibrer une « lutte » qui a jusqu’alors tourné à l’avantage de la Chine. «C’estlapremière foisqu’unconsortium indien remporte un [appel d’offres] sur une mine d’importance », écrivait, mardi 29 novembre, le quotidien indien The Economic Times. Le journal se félicitait qu’un tel gain « renverse [la] tendance déprimante de ces dernières années, où les candidats indiens échouaient à acquérir des actifs à l’étranger, perdant principalement contre les groupes chinois ». En mettant la main sur les trois « blocs » d’Hajigak, l’Inde aura accès à un gisement de 1,8 milliard de tonnes de minerai riche d’un taux de fer de 62 %. Un quatrième bloc a été remporté par la firme canadienne Kilo Goldmines. La réserve est considérée comme l’une des plus importantes au monde. Le montant de l’investissement n’a pas été rendu public, mais le ministère afghan des mines mentionne « des milliards de dollars ». Certaines sources évoquent 6 milliards de dollars, soit plus que l’investissement chinois (4 milliards de dollars) sur la mine de cuivre d’Aynak. Considérations stratégiques Les Indiens n’ont pas ménagé leurs moyens pour séduire Kaboul, regroupant les forces de sept entreprises, publiques et privées. S’inspirant de la méthode utilisée par les Chinois, le consortium va investir sur l’extraction, mais aussi sur des infrastructures et équipements annexes. Il s’est ainsi engagé à financer une fonderie – d’une capacité de production de 7 millions de tonnes d’acier – et un réseau de chemin de fer. Selon certaines sources, celui-ci serait long de 900 kilomètres et permettrait d’exporter le minerai ou l’acier vers l’Iran. La décision de Kaboul doit beaucoup à des considérations stratégiques. L’Afghanistan cultive une amitié politique ostensible avec l’Inde dans le but d’alléger la pression du Pakistan, soupçonné de soutenir en sous-main l’insurrection des talibans afghans. Cepari stratégiquepourrait aussi aboutir à hypothéquer les ambitions indiennes. Le site d’Hajigak se situe en effet à la charnière de deux provinces, celles de Bamiyan etdeWardak.Si la premièreestrelativement pacifique, la seconde est un bastion des talibans. Dans un contexteoùtoute formede présenceindienne en Afghanistan inquiète le Pakistan, le risque de voir les installations d’Hajigak visées par des attaques des talibans ne doit pas être sous-estimé. p Frédéric Bobin Conjoncture et vie des entreprises Consommation Les ventes de détail sont en hausse au Japon Finance Les ventes de détail au Japon ont progressé en octobre de 1,9 %, portées par un bond des achats de véhicules motorisés (+22,7 % par rapport à octobre 2010). – (AFP.) NEW YORK. Le juge new-yorkais Jed Rakoff a récusé un accord amiable entre la Securities and Exchange Commission (SEC, contrôleur des marchés financiers américains) et Citigroup. En 2007, la banque avait placé auprès d’investisseurs un produit financier hypothécaire pour 1 milliard de dollars (750 millions d’euros), alors qu’elle misait en Bourse sur la chute de son cours. Ses clients avaient perdu 700 millions de dollars quand Citigroup en avait gagné 160. La SEC avait négocié un abandon des poursuites contre un versement de 285 millions de dollars. L’accord n’est « ni juste, ni raisonnable, ni adéquat, ni au service de l’intérêt public » et il «empêche l’opinion de connaître la vérité », a tranché le juge accusant Citigroup d’être un « récidiviste ». Depuis 1999, la banque, accusée à huit reprises de fraude par la SEC, était parvenue à un accord amiable. Cet arrêt «place la SEC en position difficile », juge Robert Brown, professeur de gouvernance d’entreprise à Denver (Colorado). p Sylvain Cypel Finance Nomura a réduit son exposition à la dette italienne Le groupe japonais de services financiers Nomura a annoncé, lundi 28 novembre, avoir réduit de 83 % son exposition à la dette de l’Italie entre fin septembre et fin novembre. Nomura, qui détenait 2,81 milliards de dollars (1,7 milliard d’euros) d’obligations en Italie, n’en possède plus que 467 millions de dollars, et a amoindri son exposition aux obligations espagnoles et grecques. – (AFP.) La justice américaine tance la SEC ont annoncé, lundi 28 novembre, des pertes sur neuf mois dues à la décote des obligations d’Etat grecques (– 575 millions d’euros pour la première et – 566 millions d’euros pour la seconde). – (AFP.) Lourdes pertes pour deux banques grecques Transports Echec de la médiation chez SeaFrance Les deuxième et troisième banques grecques Eurobank et Alpha Bank, qui vont fusionner en 2012, Le médiateur nommé dans le dossier SeaFrance, société en liquidation judiciaire, n’a pas réussi, lun- Marchés di 28 novembre, à mettre d’accord administrateurs judiciaires et syndicats qui réclament une reprise des traversées vers l’Angleterre. Cet accord devait permettre de réaliser un bilan technique des navires de la compagnie d’ici au 12décembre, afin qu’ils puissent reprendre la mer. Ce sera au juge des référés du tribunal de Paris de trancher; il doit prendre une ordonnance le 6 décembre. – (AFP.) Le groupe français d’électronique de défense Thales a décidé d’exercer l’option qui lui permet de monter de 25 % à 35 % dans le capital de la société de construction navale militaire DCNS, selon LaTribune du 29 novembre. Un conseil d’administration convoqué pour le 15décembre pourrait donner son feu vert à l’opération. Distribution Non-respect du smic : Carrefour est débouté en cassation La Cour de cassation a rejeté un pourvoi de Carrefour qui avait été condamné pour non-respect de la réglementation sur le calcul du smic. L’arrêt, rendu le 22 novembre et porté à la connaissance du public lundi 28 novembre, « consacre le fait que l’incorporation du temps de pause dans le salaire de base constitue (…) une infraction pénale», a déclaré Me Bertrand Salquain, l’avocat de la CFDT à l’origine de la procédure. – (AFP.) Retrouvez l’ensemble des cotations sur notre site Internet :http://finance.lemonde.fr LES BOURSES DANS LE MONDE 29/11, 9h47 VALEURS DU CAC40 Mardi 29 novembre 9h45 Valeur Défense Thales pourrait monter à 35 % dans le capital de DCNS Pays Dernier cours Cours préc. ACCOR .........................◗ 19,04 AIR LIQUIDE .......................◗ 89,26 ALCATEL-LUCENT ...........◗ 1,22 ALSTOM ............................◗ 23,70 ARCELORMITTAL................ 12,42 AXA ....................................◗ 9,72 27,48 BNP PARIBAS ACT.A ........◗ BOUYGUES .......................◗ 23,20 CAP GEMINI ......................◗ 25,86 CARREFOUR .....................◗ 18,52 CREDIT AGRICOLE ............◗ 4,24 DANONE ............................◗ 47,34 21,23 EADS ...................................◗ EDF ......................................◗ 19,26 ESSILOR INTL ....................◗ 51,54 FRANCE TELECOM ............◗ 12,12 GDF SUEZ ...........................◗ 19,33 LAFARGE ...........................◗ 24,55 L’OREAL ............................◗ 77,22 LVMH MOET HEN. ............◗ 112,25 MICHELIN...........................◗ 44,80 PERNOD RICARD...............◗ 68,15 PEUGEOT............................◗ 12,94 PPR .....................................◗ 104,60 PUBLICIS GROUPE ...........◗ 33,35 RENAULT............................◗ 25,74 SAFRAN ..............................◗ 21,55 29,11 SAINT-GOBAIN..................◗ SANOFI ...............................◗ 49,73 SCHNEIDER ELECTRIC .....◗ 38,78 SOCIETE GENERALE .........◗ 16,61 STMICROELECTR. .............◗ 4,47 SUEZ ENV. ..........................◗ 9,16 TECHNIP.............................◗ 66,80 TOTAL .................................◗ 36,52 UNIBAIL-RODAMCO ........◗ 130,85 VALLOUREC .......................◗ 44,64 VEOLIA ENVIRON. .............◗ 8,77 VINCI...................................◗ 30,67 VIVENDI ..............................◗ 16,05 19,22 90,15 1,24 24,07 12,67 10,01 28,52 23,28 26,16 18,89 4,44 47,39 21,36 19,40 51,48 12,25 19,53 25,03 77,36 111,50 45,03 67,97 13,12 105,45 33,54 25,98 21,36 29,29 50,33 39,09 17,35 4,57 9,43 67,22 37,01 132,85 44,98 8,86 30,98 16,23 % var. /préc. % var. 31/12 Plus haut -0,96 -42,84 -0,99 -5,68 -1,13 -43,85 -1,52 -33,82 -1,97 -53,93 -2,86 -21,90 -3,66 -42,29 -0,37 -28,09 -1,18 -25,98 -1,96 -31,26 -4,44 -55,39 -0,09 0,69 -0,63 21,73 -0,72 -37,25 0,12 6,98 -1,06 -22,28 -1,02 -28,01 -1,94 -47,69 -0,18 -7,05 0,67 -8,81 -0,51 -16,56 0,26 -3,14 -1,45 -54,47 -0,81 -12,10 -0,57 -14,49 -0,94 -40,83 0,89 -18,70 -0,60 -24,39 -1,20 3,92 -0,77 -30,74 -4,27 -58,70 -2,17 -42,27 -2,78 -40,68 -0,62 -3,33 -1,32 -7,89 -1,51 -11,59 -0,74 -43,21 -1,09 -59,92 -1,02 -24,61 -1,05 -20,52 36,20 100,65 4,47 45,32 28,55 16,16 59,93 35,05 43,38 31,98 12,92 53,16 25,39 32,75 57,72 16,65 30,05 48,76 91,24 132,65 68,54 72,78 33,60 132,20 41,84 50,53 30,50 47,64 56,82 61,83 52,70 9,73 15,99 78,14 44,55 162,95 89,58 24,30 45,48 22,07 Plus bas Divid. net Code ISIN 17,82 0,62 T FR0000120404 80,90 2,35 T FR0000120073 1,11 0,16 T FR0000130007 21,82 0,62 T FR0010220475 10,46 0,16 S LU0323134006 7,88 0,69 T FR0000120628 22,72 2,10 T FR0000131104 20,88 1,60 T FR0000120503 21,98 1,00 T FR0000125338 14,65 1,08 T FR0000120172 3,98 0,45 T FR0000045072 41,92 1,30 T FR0000120644 17,55 0,19 T NL0000235190 17,71 0,58 S FR0010242511 46,60 0,83 T FR0000121667 11,12 0,60 A FR0000133308 17,65 0,83 A FR0010208488 22,29 1,00 T FR0000120537 68,83 1,80 T FR0000120321 94,16 0,80 A FR0000121014 40,20 1,78 T FR0000121261 56,09 0,77 S FR0000120693 11,60 1,10 T FR0000121501 90,50 3,50 T FR0000121485 29,10 0,70 T FR0000130577 22,07 0,30 T FR0000131906 20,18 0,50 T FR0000073272 26,07 1,15 T FR0000125007 42,85 2,50 T FR0000120578 35,00 3,20 T FR0000121972 14,31 1,75 T FR0000130809 3,96 0,09 A NL0000226223 8,84 0,65 T FR0010613471 52,85 1,45 T FR0000131708 29,40 0,57 A FR0000120271 123,30 2,70 D FR0000124711 38,34 1,30 T FR0000120354 8,02 1,21 T FR0000124141 28,46 1,15 S FR0000125486 14,10 1,40 T FR0000127771 Cours en euros. ◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'animation. Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2011. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité. Indice ROYAUME UNI ETATS-UNIS JAPON % var. Maxi 2011 Mini 2011 PER CAC 40 2978,47 29/11 -1,14 4169,87 16/2 2693,21 23/9 DAX Index 5708,03 29/11 -0,65 7600,41 2/5 4965,80 12/9 9,50 FTSE 100 index 5291,29 29/11 -0,40 6105,77 21/2 4791,01 9/8 8,50 FRANCE ALLEMAGNE Dernier cours 9,30 Dow Jones ind. 11523,01 29/11 2,59 12876,00 2/5 10404,49 4/10 11,20 Nasdaq composite 2527,34 29/11 3,52 2887,75 2/5 2298,89 4/10 15,80 Nikkei 225 8477,82 29/11 2,30 10891,60 17/2 8135,79 25/11 13,30 PER - Price Earning Ratio (ou cours/bénéfice) : cours de Bourse divisé par le bénéfice par action estimé pour l'exercice courant. PER : FactSet JCF Estimates ; données : la Cote Bleue. n/d : valeur non disponible. (Publicité) SICAV ET FCP 0123 LA BOUTIQUE SÉLECTION publiée sous la responsabilité de l'émetteur Dernier cours connu le 29/11 à 9h Valeur Cours en euro date valeur CM-CIC EUROPE 19,62 25/11 Du lundi au vendredi 9 h 30 à 18 h Samedi 10 h à 14 h Fonds communs de placements CM-CIC EURO ACTS C 15,13 25/11 CM-CIC SELECT.PEA 6,29 25/11 CM-CIC MID EUROPE 17,16 25/11 CM-CIC TEMPERE C 161,05 25/11 CM-CIC DYN.EUROPE 28,33 25/11 CM-CIC FRANCE C 25,16 25/11 CM-CIC EQUILIBRE C 64,81 25/11 CM-CIC DYNAM.INTLE 24,24 25/11 CM-CIC OBLI C.T.D 131,84 28/11 CM-CIC MID FRANCE 28,23 25/11 ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ ........................................................................................ 80, boulevard Auguste-Blanqui - 75013 Paris 01 57 28 29 85 - http://boutique.lemonde.fr/ 0123 décryptages ENQUÊTE Mercredi 30 novembre 2011 17 Stéphanie Le Bars D ’abord il y eut des rumeurs, puis des soupçons. La vérité sur la vie sexuelle débridée du fondateur des Béatitudes, Gérard Croissant, dit Ephraïm, finit par sourdre. On découvrit aussi des pratiques de « guérisons psycho-spirituelles », assez proches de la manipulation mentale. A mots couverts, la communauté bruissa encore des dérapages liés à la promiscuité entre les religieux et les familles. En 2008 enfin, l’année où « Ephraïm » fut contraint de quitter ses ouailles, le frère Pierre-Etienne Albert, chantre respecté des Béatitudes durant des décennies, passa aux aveux. Livré à la justice par des membresde la communauté – immédiatement ostracisés – il a reconnu 57 agressions sexuelles sur mineurs entre 1975 et 2000. Pour ces faits, l’ancien religieux, 60 ans, comparaît mercredi 30 novembre et jeudi 1er décembre devant le tribunal correctionnel de Rodez. Ce procès sera celui d’un homme et de ses perversions. Mais il devrait aussi souligner l’aveuglement d’une communauté créée en 1973, dans l’euphorie post-soixante-huitarde du « renouveau charismatique », vanté alors par l’Eglise. Et questionner l’institution catholique qui n’a pas su mettre un terme aux débordements d’une aventure lancée par une poignée de croyants « touchés, disaient-ils, par la grâce ». Sans garde-fous ni formation. Marie L., entrée dans la communauté voilà vingt-sept ans, s’affaire dans la cuisine collective de l’ancien couvent SainteCatherine-de-Sienne, à Blagnac (HauteGaronne), un ensemble de pierres rosées construit au XIXe siècle, à quelques kilomètres de Toulouse. Sous le regard du pape Benoît XVI, dont le portrait orne les murs, cette mère de famille de 54 ans affirme « n’avoir rien su » des turpitudes commises. «Appelée par le Seigneur à vivre une vie chrétienne », elle est chargée de nourrir la quarantainedemembresdelacommunauté des Béatitudes qui vivent dans la « maison ». Cette propriété des dominicains hébergeaussiladirectiondelacommunauté, la plus importante des dix-sept encore aux mains des Béatitudes en France. Cetteancienneinfirmière,sonmari,rencontrédans la communauté,et leurdernière fille partagent avec les six prêtres, les treize frères, les huit sœurs et la quinzaine de laïcs du lieu, les déjeuners, les repas du week-end et au moins trois heures de priè- «On n’est plus face à des pervers, mais plutôt face à un mode de gouvernement tyrannique, par la peur» Frère Henry Donneaud dominicain chargé par le Vatican de réformer les Béatitudes resquotidiennes.C’est aussiavec eux qu’elle fait front aux révélations qui éclaboussent la communauté. Le choc est d’autant plus rude que cette « association de fidèles» fut, jusqu’en 2007, adoubée et confortée par le Vatican. En France, les membres des « maisons » gérées par des « bergers », religieux ou laïcs, ont tous croisé Pierre-Etienne Albert, qui,en sa qualité de chantre, passait de lieu en lieu. Marie L., mère de trois enfants, regardait « avec jalousie » les familles dont les enfants prenaient des cours de chant avec cet homme « très doué » pour la musique. Aujourd’hui, elle condamne « les péchés mais pas les hommes». « Quand on donne sa vie à Dieu, on est dans une relation de confiance envers les autres », confie sœur Marie de la Visitation, membre LesBéatitudesen redressement spirituel Au monastère Sainte-Catherine-de-Sienne, communauté des Béatitudes de Blagnac (Haute-Garonne), le 28 novembre. GUILLAUME RIVIÈRE POUR « LE MONDE » depuis vingt ans d’une communauté qui lui a fait « goûter le ciel ». « Et si on a pu entendre des choses, on a parié sur le fait qu’il s’agissait d’une chute passagère. » Les premièresdénonciations des agissements du religieux auprès de responsables de la communauté remontent à 1998. « Dieu se sert aussi des pécheurs », commente la religieuse, voilée et vêtue d’une aube blanche couverte d’une chasuble marron. Une conviction, ou une manière de relativiser les faits, qui n’empêche pas cette ancienne journaliste belge de s’interroger. « Je ne sais pas pourquoi l’Eglise n’a pas réagi. » Frère Henry Donneaud, le dominicain chargé par le Vatican en 2010 de remettre de l’ordreaux Béatitudes, avance des hypothèses. En dépit d’une politesse tout ecclésiale, il remet en question l’attitude de la hiérarchiecatholique : « Je m’étonne queles Béatitudes n’aient pas eu un accompagnement plus fort des évêques. » Sur ce point comme sur l’ensemble du dossier, l’épiscopat français, réticent à s’exprimer, renvoie sur… frère Donneaud. Disert et précis, le religieux, qui reçoit dans une petite pièce de l’imposant couvent des dominicains, à Toulouse, poursuit : « Le fait est que l’Eglise n’est pas toujours réactive,pas toujours armée et, enl’occurrence, elle n’a peut-être pas voulu casser une dynamique. » Face à la crise des vocations qui, dès les années 1970, menaçait de durer, il était tentant de laisser s’épanouir « l’idéal monastique », « la ferveur », « les vocations» des Béatitudes. D’emblée, des clivages sont pourtant apparus entre les évêques qui se méfiaient de ces communautés nouvelles et ceux qui y croyaient. « Ces derniers les ont peut-être protégées au risque de ne pas prendre la mesure des problèmes », avance le frère Donneaud. Quant aux agressions sexuelles, « infiniment regrettables », elles doivent être replacées « dans le contexte général d’impréparation, voire d’aveuglement des esprits et de la société, face au drame de la pédophilie avant l’affaire Cette communauté, créée en 1973, est confrontée au procès d’un de ses membres, accusé d’agressions sexuelles sur mineurs. L’Eglise, qui a tardé à réagir aux scandales et aux dérives sectaires, tente aujourd’hui de remettre de l’ordre d’Outreau », précise le religieux. Concernée au premier chef par cet « aveuglement », Solweig Ely, victime des attouchements de Pierre-Etienne Albert lorsqu’elle avait 10 ans, en 1990, conserve, elle, un souvenir précis de l’homme et de ses gestes. Dans un livre, Le Silence et la Honte (Michel Lafon, 261 p., 17,95 euros), elle détaille aussi le climat « d’enfermement et de culpabilité » de la « maison » où elle a vécu durant un an avec sa famille. «On vivait dans l’idée que le monde extérieur était dangereux et que la communauté nous protégeait, explique la jeune femme qui témoignera au procès. Pierre-Etienne disait “le Seigneur est amour” ; un câlin, un baiser, c’était normal et si je n’aimais pas cela, c’est que j’étais une mauvaise chrétienne.» Une croyance adoptée par ses parents, qui l’ont emmenée chez un exorciste. Certains, qui aujourd’hui veulent croire à la survie de la communauté, passée en quelques années de 1 500 à 640 membres à travers le monde, reconnaissent des erreurs de jugement. « On était immatures, on vivait les uns sur les autres ; il y a eu clairement un manque de prudence », estime sœur Thérèse, entrée aux Béatitudes en 1983, avant de partir en mission à l’étranger. « Notre fonctionnement était voué à l’échec », souligne-t-elle dans une allusion à l’emprise du « berger », responsable à la fois de l’organisation de la vie matérielle des fidèles et de leur accompagnement spirituel. « Il y avait une infantilisation dans les rapports humains et dans le rapport avec Dieu, témoigne Solweig Ely. Mes parents demandaient l’autorisation au berger pour nous amener chez le médecin ! » Marie L. a traversé toutes ces années avec l’impression que le « bon sens » finissait par l’emporter. « Au début, les familles vivaient au milieu des autres dans un bout de couloir, puis on a eu notre lieu de vie à l’écart ; et, quand mon mari a voulu retravaillerpour que l’on ait des revenus autonomes, cela s’est fait naturellement », assure-t-elle. Aujourd’hui, Marie L. travaille toujours bénévolement. Sa famille verse une dîme à la communauté mais jouit d’une maison indépendante sur le terrain du couvent. La dépendance matérielle a constitué l’un des éléments d’emprise sur les nouveaux adeptes, appelés à se dépouiller de leurs biens. Aujourd’hui, les plus anciens, religieux ou laïcs, restent liés bon gré mal gré à la communauté pour des raisons financières. Muriel Gauthier, « dénonciatrice » de Pierre-Etienne Albert, installée dans l’ancienne « maison » de Bonnecombes, vit aujourd’hui « de la générosité d’un ami », en compagnie de deux autres fidèles. Ceux-ci, assure-t-elle, « touchent le RSA aprèsplus devingt-cinq ans passés auxBéatitudes » sans avoir jamais été ni salariés ni déclarés. Pour d’autres, psychologiquement fragiles, la communauté fut et demeure un refuge, dont ils ne peuvent guère sortir. Sœur Anna-Katarina, venue d’Allemagne pour seconder le frère Donneaud, reconnaît que les « maisons » ont été « trop accueillantes à des gens blessés et fragiles. Le déclin actuel est sain car au final les choses seront plus claires ». E n 2007, le Vatican a enfin réagi et exigé une stricte séparation entre les frères, les sœurs et les laïcs ainsi que la fin de la confusion entre spirituel et psychologique. Les pratiques de guérison psycho-spirituelles, mâtinées de mysticisme et de diabolisation, « c’est fini », assure Henry Donneaud. S’il ne nie pas l’éclosion dans plusieurs diocèses de telles pratiques inspirées de la communauté, il tient à en démarquer les Béatitudes. L’Eglise, aujourd’hui comme hier, s’acharne à sauver cette petite communauté pour «les beaux fruits » qu’elle a donnés, selon le frère Donneaud. Parmi les séminaristes inscrits à la faculté de théologie de Toulouse, une bonne partie est encore aujourd’hui composée de frères des Béatitudes quise destinent à la prêtrise… Fermer la communauté reviendrait aussi à reconnaître l’échec des nouvelles formes d’engagement apparues dans les années 1970. Le processus actuel « d’assainissement » est « la dernière chance » des Béatitudes, estimele dominicain. Unargument à l’usage de ceux qui demeurent réticents à la normalisation en cours. « La plupart des fidèles sontloyaux et nesouhaitent pasfonder une “contre-secte” », dit-il. Mais d’anciens responsables s’arc-boutent sur leurs prérogatives. « On n’est plus face à des pervers, analyse-t-il, mais plutôt face à un mode de gouvernement tyrannique, par la peur. » Une conséquence de l’enfermementdans lequel s’est complue la communauté durant des années. En février 2012, elle devrait élire de nouveaux responsables. Sauf si le ménage entrepris pas Henry Donneaud n’est pas achevé. p 18 0123 décryptages l’œil du monde Mercredi 30 novembre 2011 Pour un même salaire, des indemnités très variables Le Monde a choisi de comparer la situation d’un travailleur à temps plein, payé 2 000 euros bruts. Voici, en fonction de quatre statuts différents, la rémunération d’une personne qui doit s’arrêter un mois pour maladie. Un salarié protégé Un fonctionnaire d’Etat Un salarié peu protégé Un précaire en CDD Salarié en CDI d’une grande entreprise de l’industrie pétrolière Enseignant Salarié en CDI d’une PME depuis plus d'un an Salarié en CDD avec moins d’un an d'ancienneté 2000 1900 1490 887 € Accord d’entreprise très favorable, qui prévoit la prise en charge intégrale de la rémunération le premier mois. L’employeur compense la carence des trois premiers jours, puis complète les indemnités de la Sécurité sociale les jours suivants. € L’Etat prend en charge l’intégralité du traitement les trois premiers mois, mis à part certaines primes liées à l’activité, qui restent marginales dans l’éducation nationale, mais peuvent représenter bien plus dans d’autres corps. L’instauration d’un jour de carence, votée par les députés le 16 novembre, fait toutefois perdre un jour de traitement. € Le salarié ne bénéficie d’aucun accord d’entreprise ni de convention collective plus favorables que la loi. Aucune rémunération pendant les trois jours de carence, puis 50 % du salaire brut du 4e au 7e jour sont versés par l’assurance-maladie. Les indemnités journalières sont ensuite complétées par son employeur du 8e au 30e jour, pour atteindre 90 % du brut. € Le salarié ne bénéficie d’aucun accord d’entreprise ni de convention collective plus favorables que la loi. Avec cette ancienneté, l’employeur n’est pas tenu de verser un complément. Les indemnités journalières de la Sécurité sociale ne sont versées qu’à partir du 4e jour et représentent 50 % du brut. SOURCE : ESTIMATION LE MONDE INFOGRAPHIE LE MONDE Arrêtsmaladie:tousinégaux! En voulant ajouter un quatrième jour de carence aux salariés du privé, le gouvernement a mis le nez dans un système complexe et injuste L a mesure passera-t-elle cette fois-ci ? Après avoir reculé sur la baisse du montant des indemnités journalières, puis sur la création d’un quatrième jour de carence pour les salariés du privé, la majorité doit dire, mardi 29 novembre, où elle va trouver 220 millions d’euros à économiser sur les dépenses de santé, principalement surles arrêtsmaladie. Le groupe des députés UMP avait une semaine pour trouver des pistes et faire ses propositions au gouvernement. Les deux précédents reculs donnent l’impression d’un pilotage à vue du côté de la majorité. Revenons fin septembre. En présentant lebudget dela Sécuritésociale pour 2012, Xavier Bertrand, ministre de la santé, avait annoncé un changementdu modedecalculdesindemnitésdecongésmaladie,etglissé au détour d’une phrase qu’il s’agissait d’une « simple mesure d’harmonisationducalculdesindemnitésjournalières [qui devait] se traduire par une perte d’à peine plus d’un peu plusd’uneuroparjourpourunepersonne au smic ». Mais patatras. A quelques mois de l’élection présidentielle, et des législatives, cette décision a aussitôt été jugée injuste, y compris par une bonne partie des députés de la majorité. Un euro par jour en arrêt maladie : c’est en fait près de 40 euros par mois amputés sur la déjà faible indemnité de 680 euros perçue par un smicard. Le gouvernement a beau rappeler que la plupart des entreprises couvriraient la différence, il ne peut qu’admettre queles salariés précaires, sans ancienneté ou travaillant dansles PME, seraient, eux,directement touchés. Face à la fronde des députés, Xavier Bertrand accepte une solution de repli. Plutôt que de toucher aux indemnités, pourquoi ne pas ajouter un quatrième jour de carence, non pris en charge par la Sécurité sociale. L’avantage ? « Il touche davantage les arrêts courts et répétitifs, plus souvent signe d’abus, et préserve les arrêts longue maladie », défend alors Yves Bur, député UMP rapporteur du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Pour faire accepter plus facilement la mesure aux salariés du privé, le gouvernement fait même voter par les députés la création d’un jour de carence chez les fonctionnaires. Mais il n’empêche, les salariés du privé n’ont pas tous la chance d’être couverts par leur entreprise. La bonne idée va d’ailleurs tourner court. Quatre jours pour le pri- vé, un jour pour les fonctionnaires ? L’effet d’affichage est désastreux sur l’électorat UMP, très rapidement relayé par les députés de la droite du parti, qui crient « au maintien d’une distorsion injustifiée ». La réalité a beau être plus complexe – l’Etat ne compensant pas ce jour de carence quand 56 % des entreprises du privé payent les trois jours à leurs employés –, le gouvernement doit une nouvelle fois reculer. Une cacophonie dont les députés UMP et le gouvernement se rejettent mutuellement la responsabilité. Désormais, ils assurent vouloir trouver une mesure qui épargne les plus pauvres. Car l’enchaînement des polémiques aura révélé une réalité : les travailleurs sont inégaux devant les arrêts maladie. Pour la contourner, le gouvernement a tenté de mettre l’accent sur la fraude et les abus, en justifiant ses mesures par la hausse des dépenses : « Les indemnités journalières maladie, qui représentent 6,6 milliards d’euros, progressent à un rythme élevé et difficilement justifiable (+ 3,9 % en 2010, après + 5,1 % en 2009) », argumentait le gouvernement le 15 novembre pour justifier l’ajout d’un jour de carence. Mais les dépenses liées aux arrêts maladie sont en fait plutôt maîtriséesdepuis2004,grâceàl’extension des contrôles des patients et des médecins par l’Assurancemaladie. La hausse s’explique principalementparl’augmentation des EVOLUTION DES MONTANTS REMBOURSÉS EN INDEMNITÉS JOURNALIÈRES POUR LES SOINS DE VILLE, indice base 100 en 1999 Montants remboursés Montants remboursés déflatés de l’évolution du salaire moyen 170 Renforcement des contrôles par l’assurance maladie auprès des patients et des médecins 160 150 140 L’essentiel de la hausse après 2003 correspond à l’augmentation des salaires 130 120 110 100 90 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 SOURCE : ASSURANCE MALADIE salaires, sur la base desquels sont calculées les indemnités versées, et également par le vieillissement de la population active. En moyenne, les plus de 55 ans s’arrêtent en effet moins souvent, mais plus longtemps. D’ailleurs, la hausse des dépenses est peu imputable aux 75 % d’arrêts de courte durée, mais surtout aux congés de longue durée, et notamment ceux liés aux troubles ostéo-articulaires comme les lombalgies. Pas forcément bien vue par les patients, la stigmatisation des arrêts maladies orchestrée par le gouvernementest aussi fortement critiquée par les médecins, qui insistent sur le fait que, médicalement, l’arrêt de travail est aussi nécessaire que la prescription de médicaments. Si les praticiens ne nient pas les abus, des patients comme des médecins eux-mêmes, ils estiment que les refus d’arrêts maladie pour éviter une baisse de revenus sont plus nombreux. Pistes inexplorées D’autres moyens existent pourtant pourréduire les dépenses d’arrêts maladie, sans toucher au porte-monnaie des malades, ni creuser les inégalités. L’assurancemaladie avait avancé une autrepiste en juin : la mise en place de recommandations du nombre de jour à prescrire, pathologie par pathologie, pour guider les médecins. Une mesure qui permettrait de réduire les fortes hétérogénéités des jours prescrits d’un praticien à l’autre. Des économies non négligeables peuvent ainsi être attendues. Mais pas avant plusieurs années, car cela implique une appropriation par les médecins. Dans sa logique de rigueur, le gouvernement a fait le choix de ne pas attendre. p Jean-Baptiste Chastand et Laetitia Clavreul 4,6 millions de salariés du privé ont été arrêtés par leur médecin en 2010 Selon la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), l’année précédente, le chiffre s’élevait à 4,9 millions. En 2007, on en comptait 4,7 millions. 0123 décryptages débats Mercredi 30 novembre 2011 19 L’extrême droite, passager clandestin de l’«orthodoxie financière» Dominique Linhardt Chercheur au CNRS Cédric Moreau de Bellaing Maître de conférences à l’Ecole normale supérieure D irigé par l’ancien vice-président de la Banque centrale européenne (BCE) Lucas Papadémos, le nouveau gouvernement grec compte dans ses rangs, outre des membres des formations majoritaires de la gauchesocialiste et de la droite conservatrice, deux ministres issus du parti Laïkos Orthodoxos Synagermos (LAOS) [Alerte populaire orthodoxe]. On ne peut qu’être frappéparle registreeuphémiquequiaservi à décrire ce retour de l’extrême droite aux affaires de l’Etat, lorsqu’il n’a pas tout simplement été ignoré. Le LAOS a en ligne de mire le scrutin national prévu en février 2012 et cherche dans le surplus de légitimité queconfère la participation gouvernementale, un tremplin pour renforcer sa position électorale. Que le calcul s’avère juste ou non, reconnaissons qu’il s’agit d’une stratégie de conquête du pouvoir. Le président du parti annonçait au moment de sa création en 2000 que sa formation ne comportait pas de «communistes », de « francs-maçons », d’« homosexuels» et de «juifs ». Ce mélange de racisme et d’homophobie, de négationnisme et de conspirationnisme, on le retrouve aussi chez Adonis Georgiadis, le nouveau ministreadjointaudéveloppementetàlamarine marchande.Récemment,ilaaccuséle«peuple juif [de contrôler] le système bancaire mondial », en n’oubliant pas, au passage, d’assimilerlesmusulmansàdes«déchets». Le scandale que représente l’entrée de l’extrême droite dans ce gouvernement se démultiplie par l’accueil qui a été réservé au nouvel exécutif : il a été salué par la plupart des responsables et des commentateurs autorisés. C’est que le gouvernement Papadémos montre patte blanche : il fait preuve de « sagesse », il adhère à la rigueur réclamée par l’UE, la BCE et le Fonds monétaire international, il « rassure les marchés ». Surlefrontdel’établissementdesa«crédibilité », le parti LAOS n’a pas été en reste. Dès le premier plan de sauvetage de la Grèceenmai 2010, lefondateur du LAOS,Geor- ges Karatzaferis, a mis un zèle particulier à jouer le jeu du « réalisme ». La promesse de la poursuite brutale du démantèlement de l’Etat social et de la dégradation des conditions de vie des Grecs valait bien, après tout, que l’on tienne pour négligeable l’entrée de l’extrême droite au gouvernement. Mais il est possible de tirer une conclusion plus générale de cette situation. Elle Le scandale que représente l’entrée de l’extrême droite dans le gouvernement grec se démultiplie par l’accueil qui a été réservé au nouvel exécutif indique une profonde transformation de la légitimité politique : la conformation aux injonctions du réalisme financier en est le critère principal. Ce n’est certes pas la première fois dans l’histoire que des gouvernements se heurtent à des contraintes économiques et infléchissent leur politique.Maislanouveautérésideencequel’appel au réalisme devient une position politique à part entière. Si on les présente volontiers comme les fruitsabstraitsdudeusexmachinadumarché, les contraintes financières sont portées comme un argument par des groupes et des organisations qui y trouvent leur compte. Nulle main invisible, nulle loi d’airain du marché, mais des mobilisations d’acteurs qui jouent la carte des contraintes du marché pour promouvoir des intérêts particuliers – ceux des banques et des multinationales, ceux des fonds de pension et des agences de notation, ceux des spéculateurs et des investisseurs. La grande trouvaille est de laisser croire que cette politique n’en est pas une. Or, il est difficile de trouver plus politique que l’action actuelle des agences de notation. Non qu’elles prendraient directement part aux décisions politiques (encore qu’elles sachent repérer où, dans le spectre politique, se trouvent leursintérêts). Le montage estplussubtil:souslesatoursdel’objectivité et de la neutralité, elles alimentent ceux qui, dans le champ politique, jouent la carte du one best way (« une et une seule voie») économique. Le compteur de la dette publique (debt clock) est érigé en un instrument semblable au sismographe. Qui prétendrait contrôler les mouvements de l’écorce terrestre ? De la même manière, on ne pourrait que se soumettre aux mouvements de la finance mondiale. La supercherie réside dans la négation de la différence qui sépare les phénomènes naturels des institutions sociales. Et jusqu’à preuve du contraire, les marchés et leurs mécanismes appartiennent aux secondes. Les naturaliser, c’est accepter une altération du sens que la notion de politique a acquis avec l’avènement des démocraties modernes : la formulation d’une volonté souveraine portée par le peuple représenté. Et dans le même mouvement, c’est accepterles effets sociaux dévastateurs des politiques d’austérité. Lorsque les représentants, en dépit de toutes les dénégations, deviennent les simples relais des contraintes économiques et financières,ladémocratiesevidedesasubstance.Lapertedelafacultédejugerduscandale de l’entrée dans le gouvernement d’un Etat européen d’acteurs politiques pour qui Auschwitz est un « mythe » en est plus qu’unsigne:uncorollaire.LeLAOSenprofite, en passager clandestin des « forces du marché». L’ironie amère de cette situation est que la démocratisation de la société grecque, après la chute de la dictature des colonels (1967-1974), est allée de pair avec le projet d’adhésion à l’UE. Aujourd’hui qu’elle en fait partie, ce sont les dirigeants européens qui en viennent à saluer la formation d’un gouvernement comportant des représentants d’un parti qui cultive la nostalgie sordide de cette même dictature. p Préoccupante afghanisation du Sahel Pour un nouveau modèle Cequedémontrentlesprisesd’otagesauMali énergétique français Il faut un choix raisonnable Serge Michailof Professeur à Sciences Po et consultant pour la Banque mondiale L ’enlèvement de deux de nos compatriotes jeudi 24 novembre, cette fois-ci au Mali, près de Mopti, fait suite à une série d’enlèvements de nos ressortissants survenus au Niger en septembre 2010 et en janvier 2011. Il souligne la dégradation de la sécurité dans ces régions, où les touristes et les ONG évoluaient il y a peu en toute tranquillité. Ces enlèvements signifient-ils que le nord du Sahel est en voie d’afghanisation, comme l’évoquait en 2010 le quotidien algérien El Watan ? Ou avons-nous affaire à une nouvelle forme de banditisme dans laquelle les ressortissants occidentaux seraient devenus un gibier hautement monnayable, tout comme les navires au large de la Somalie ? Bamako oùs’affirme aujourd’huiune nouvelleclasse de jeunes entrepreneurs n’est certes pas Kaboul ; heureusement, aucun pays de la région ne joue le rôle déstabilisateur du Pakistan en Afghanistan. Mais ce parallèle avec l’Afghanistan ne doit pas être traité à la légère.Danslesdeux cas,eneffet,lescarencesdel’appareild’Etatdansdesrégionsoù historiquementsemanifestait de longue date un farouche irrédentisme ont provoqué l’apparition puis l’extension de zones grises où le pouvoir central ne peut pas exercer ses fonctions régaliennes. Dans les deux cas, l’extension des zones grises est accélérée par une crise malthusienne induite par l’écart croissant entre ressources et population. Dans les deuxcas, face au chômage des jeunes et à l’absence d’alternatives, se développent tous les trafics. En Afghanistan, la culture du pavot, extrêmement rentable, est la réponse logique à une crise agraire provoquée dans les vallées montagneuses, par la destruction des systèmes d’irrigation traditionnels. C’est là une conséquence de la « guerre des Soviétiques » puis du manque d’entretien et du désintérêt des donateurs. Dans un contexte de très forte démographie, le retour du Pakistan de 4 millions d’émigrés a fait déborder le vase à partir de 2002. La reprise de contrôle par les talibans est d’abord le produit de l’absence totale d’Etat en zone rurale, c’est-à-dire de justice et de police. Elle répond aussi à la crise agraire et à la nécessité de protéger les activités liées au trafic de l’opium, seule solution pour sortir de la misère. Alors, attention à ces zones subsahariennes. Déjà ces régions sont devenues au fil des sécheresses, faute d’Etatetfauted’alternativeséconomiquespourlesjeunes, des zones de non-droit en proie à tous les trafics : cocaïne latino-américaine en transit pour l’Europe, comme l’a révélé l’affaire du Boeing détruit en 2009 sur une piste clandestine du Mali, faute d’avoir pu décoller après avoir livré sa cargaison ; trafic d’essence, de cigarettes et de biens de consommation pour profiter des différences de prix, de subventions et de tarifs douaniers entre l’Algérie et les pays voisins ; trafic de véhicules volés en Europe revendus dans tous les pays côtiers; trafic de travailleurs migrants clandestins en route vers les pays du Golfe et l’Europe. LaguerreenLibyeafaitrefluerversleSaheldesdizai- nes de milliers de travailleurs désormais sans emploi et soupçonnés de collusion avec l’armée libyenne. Elle fait aussi refluer des armes en grand nombre. Or, au-delà de la frange subsaharienne particulièrement déshéritée, on peut aussi s’interroger sur la viabilité à terme de pays à très faible potentiel agricole comme le Niger, dont la population explose : 4 millions à l’indépendance en 1960, 16 millions aujourd’hui,58 millions en 2050, selon les démographes. Peu importe par conséquent qu’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), avatar du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien représente très peu de choses en termes militaires : peut-être une centaine de combattants dispersés et quelques centaines de sympathisants actifs ? Peu importe que les responsables des enlèvements de nos compatriotes soient des gangs mafieux agissant ou non pour le compte d’AQMI. Il s’agit de toute façon de brandons enflammés qui circulent au-dessus d’un tonneau de poudre ! Dans un tel contexte, retenons les enseignements que l’on peut retirer du désastre occidental en Afghanistan. En premier lieu, retenons que l’approche sécuritaire qui ne se fonde pas sur la reconstruction des institutions régaliennes nationales et sur la construction d’institutions de gouvernance locale démocratiques est vouée à l’échec. Jean-Louis Bal Président du Syndicat des énergies renouvelables R Peu importe que les responsables des enlèvements de nos compatriotes soient des gangs mafieux agissant ou non pour le compte d’AQMI En second lieu, que des programmes de développement massifs sont indispensables pour espérer stabiliser les régions proches des zones grises ; or de tels programmes sont d’autant plus difficiles à conduire que l’économiesubsahariennefondéesurunélevagetranshumant et une petite agriculture d’oasis s’est largement effondrée, que les conditions naturelles sont difficiles, les solutions techniques parfois incertaines, et les populations dispersées sur de vastes territoires. Pourtant difficile ne veut pas dire impossible. La recherche agronomique et les agences de développement qui étudient ces régions depuis un demi-siècle ont de multiples propositions dans leurs cartons pour relancer le développement agricole et pastoral des régions arides. Il est possible d’organiser un retour de l’eau par des aménagements fonciers fondés sur des terrasses, des reboisements, des aménagements de mares temporaires. Une formation technique aux métiers de base du bâtiment et de la mécanique permettrait aux jeunes de ces régions, où de toute façon une forte émigration régionale est incontournable, d’échapper aux petits boulots dégradants de livreur d’eau ou de gardiens qu’ils exercent dans les villes du Sud. La France, dont l’expertise en matière de développement de ces régions est reconnue, pourrait utilement prendre le leadership des partenaires externes multilatéraux dont les financements sont indispensables en ce domaine. Encore faudrait-il qu’elle ait pour cela, comme les Britanniques en d’autres régions, une politique de coopération cohérente et des instruments financiers appropriés. Mais c’est là un autre sujet… p ¶ Serge Michailof est l’auteur des « Apprentis sorciers du développement » (Economica, 1987) et de « Notre maison brûle au Sud » (Fayard, 2010) amener le débat énergétique à la seule question du nucléaire est très réducteur, alors que la question majeure est celle du mix énergétique et de ses impacts environnementaux et économiques. Le débat actuel crispe les positions sur deuxvisionsmanichéennes:sortirenquelques années d’une filière nucléaire désormais vouée aux gémonies ou rester accroché ad vitam aeternam à un modèle monolithique du siècle passé. Entre ces choix extrêmes, nous pourrions suivre des chemins médians plus crédibles, plus souhaitables, et permettant de conserver la possibilité de faire de vrais choix à l’horizon 2030. Mais pour rédiger une feuille de route ambitieuse et réaliste, encore faut-il revenir sur la longue liste des préjugés qui entourent les énergies renouvelables. Comme le nucléaire, les énergies renouvelablessontprisonnièresd’unelogique du tout ou rien nourrie par les intégristes des différentes chapelles. La réalité est pluscomplexeetseprêtemalauxchoixguidés par l’idéologie. La réflexion sur notre avenir énergétiquedoitêtrepréciseetrationnelle.Lesbénéficesattendusconstituentlecahierdescharges que le bouquet énergétique devra remplir. Nous devons donner la priorité à quatre préalables pour construire un mix énergétique performant: 1. Garantir un taux élevé d’indépendance énergétique et un haut niveau de sécurité d’approvisionnement. 2. Prémunir tous les consommateurs de fortes hausses de prix. 3.Préserverl’environnementparledéveloppementdeproductions propres et sûres dont les risques sont maîtrisés. 4. Assurer la sûreté du système énergétique et garantir l’équilibre entre l’offre et la demande. Lesénergiesrenouvelablespeuventreleverenpartiece défi,mêmesielles nerépondrontpasseules,àcourtterme,àcesexigences, dans la mesure où : 1.Elles sont produites localement et peu sujettes à une quelconque tension géopolitique. 2.Leurs coûts diminuent avec leur développementetleurexploitation.C’estleprincipe des systèmes aux coûts d’investissement élevés et aux coûts d’exploitation fai- bles.Ellessuiventunecourbed’apprentissage inverse de celle des énergies conventionnelles dont le coût ne cesse d’augmenter. 3.Les énergies renouvelables ne produisent ni CO2 ni déchet. Leur réversibilité est avérée. Quoi de plus simple que de démonter un parc éolien ou solaire? 4.Leurintermittenceest gérable,selon le réseau de transport d’électricité, d’autant que des progrès dans le domaine du stockage et des réseaux intelligents sont déjà une réalité. 5. Les équipements domestiques utilisant une source de chaleur renouvelable, chauffage au bois, chauffage solaire ou pompe à chaleur performante diminuent, en hiver, l’appel de puissance et réduisent les importations d’électricité. Ne considérons pas avec arrogance les pays qui ont déjà fait le choix de s’engager dans la voie des renouvelables, mais tironsen des leçons des retours d’expérience. J’ajouterai que le développement d’un mix énergétiqueperformantdoitcontribueràla réindustrialisation de notre pays, à l’heure Comme le nucléaire, les renouvelables sont prisonnières d’une logique du tout ou rien nourrie par les intégristes des différentes chapelles où, quels que soient les choix énergétiques qui seront faits, nous devrons investir dans lerenouvellementdesoutilsdeproduction. Le décrochage industriel, souligné par Patrick Artus dans son dernier ouvrage, ne fait plus débat. Il est urgent de construire de nouvelles filières industrielles. Les énergies renouvelablesnousoffrentcetteopportunité.Avecdéjà 100000 emplois,et desprojections à 250 000 emplois en 2020, elles répondentàcetenjeuetentrentdanslacatégorie des filières industrielles d’avenir. Ce sont des filières technologiques où PMI et grands groupes peuvent jouer un rôle majeur sur les produits haut de gamme. Elevons le débat pour que nous puissions jouir des bénéfices de ces énergies. La guerre de religion à laquelle se livrent les pourfendeurs des renouvelables d’un côté et du nucléaire de l’autre ne permet ni de convaincre nos concitoyens ni d’arbitrer de façon sensée un choix de société qui nous engagera pour plusieurs décennies. Nous devons construire un nouveau modèle énergétique, basé sur une consommation rationnelle, dans une Europe exemplaire dans la préservation du climat. C’est autour de cet enjeu que le débat doit s’articuler. p 20 0123 décryptages analyses Mercredi 30 novembre 2011 Conseils d’entreprises aux Etats A vec la crise, il est devenu patent qu’un Etat pouvait être au bord du dépôt de bilan,voirfairefaillite. Commeuneentreprise. Clair aussi qu’un gouvernement devrait avoir une stratégie économique qui tienne compte de la concurrence – des pays émergents en particulier –, des barrières à l’entrée sur un marché – telle l’existence d’une main-d’œuvre qualifiée. Comme une entreprise. Les cabinets de conseil en stratégie, comme les américains Boston Consulting Group (BCG) et Bain, et l’allemand Roland Berger, qui conseillent les dirigeants des grands groupes de la planète sur leur stratégie et sa mise en œuvre, ont donc multiplié les occasions de faire savoir qu’ils pouvaient appliquer leur expertise à la définition de stratégies gouvernementales, un marché qui fait partie de leur propre… stratégie. « Beaucoup de débats sont menés par des financiers, des économistes, des responsables politiques. Nous voulons apporter un regard d’entreprise », explique ainsi Stéphane Albernhe, codirecteur général du cabinet allemand Roland Berger, du nom de son fondateur. Celui-ci serait très écouté de Wolfgang Schäuble, ministre des finances allemand, et de la chancelière Angela Merkel. Les Etats-Unis, la France, la Commission européenne, les pays du Golfe, d’Amérique du Sud jouxtent les noms des plus grandes entreprises dans les portefeuilles de clients des cabinets de consultants en stratégie. Ils n’avaient pas attendu la crise pour s’en occuper. En Grande-Bretagne, tout d’abord. En France plus tardivement. Car « la haute fonction publique française avait une expertise solide », explique Agnès Audier, directrice associée du BCG à Paris. Les conseils aux gouvernements représentent désormais 5 % à 10 % de leur chiffre d’affaires. Sans compter les avis prodigués pro bono, c’est-à-dire gratuitement, par les consultants, en leur nom propre ou au nom de leur cabinet. Par civisme et (ou) intérêt bien compris. Pour asseoir leur notoriété, avoir un accès privilégié auxentreprises et aux gouvernements,influencer,« prendre sa part dans le débat public », com- Analyse p ar An n ie Ka hn Service Economie me le formule Stéphane Albernhe. Les sujets abordés sont divers. Par exemple, appliquer à la Grèce le modèle mis en œuvre pour l’ex-Allemagne de l’Est. Le projet Eureca, présenté dès septembre par le cabinet Roland Berger au gouvernement allemand, consiste à confier aux institutions européennes la création d’une société holding, qui achèterait des actifs de l’Etat grec pour 125milliards d’euros, les restructurerait, puis les vendrait au privé à un prix non bradé,ce quiserait probablement le cas s’ilsétaientvendusenl’état.Cettesolutionréduirait la dette grecque, relancerait l’économie du pays, créerait des centaines de milliers d’emplois à terme, affirment ses promoteurs. Lesconseils aux gouvernements représentent désormais 5% à 10% de leur chiffred’affaires. Sans compter les avis prodigués «pro bono» par les consultants Ce modèle est une transposition de celui de la Treuhand, adopté lors de la réunification allemande pour la privatisation des actifs de l’exAllemagne de l’Est, et auquel le cabinet Roland Berger avait beaucoup participé. Créer une agence de notation européenne sous la forme d’une fondation. Cet autre projet de Roland Berger, également présenté aux Allemands en septembre, préconise la création d’une agence de notation européenne. Elle aurait le statut d’une fondation – un modèle d’entreprise fréquent en Allemagne. Les institutions financières en seraient les fondateurs. Et sonfonctionnementserait« transparent», etéliminerait tout conflit d’intérêts, à la différence Ecologie | Chronique par Hervé Kempf de la situation actuelle, disent ses concepteurs. Réindustrialiser l’Europe en centrant l’effort sur des secteurs sélectionnés. L’étude du BCG « Made in America, à nouveau. Quelles industrieset pourquoi ? » metle projecteur surles secteurs industriels pour lesquels l’importance des coûts de transport et la faiblesse relative des coûts de main-d’œuvre pourraient justifier une relocalisation aux Etats-Unis. Roland Berger estime qu’il faut surtout persévérer sur les secteursoù l’UE esten position de force : aéronautique, ferroviaire, pharmacie, nucléaire, et secteur du luxe. Ne pas céder au protectionnisme. Même si lesdroits de douane sont encore 2,2fois plus élevés dans les pays émergents, même si les baisses des tarifs douaniers de ces pays sont largement hypocrites, il ne faut pas céder au protectionnisme sous peine de rétorsion immédiate. Comme la Chine a commencé de le faire en retardant l’achat d’une dizaine d’Airbus A380, pour contrer une directive européenne visant à faire payer les émissions de CO2 des avions afin de lutter contre le changement climatique (Le Monde du 8 octobre). En début d’année, le cabinet Bain était sollicité par le gouvernement français pour l’éclairer sur l’image queles investisseurs internationaux ont de la France. Rapport confidentiel, dont l’objectif est de faciliter l’arrivée d’investisseurs étrangers sur le territoire. Le type de sujet que le cabinet connaît pour avoir étudié un dossier similaire… pour des pays du Golfe soucieux d’attirer des industries pérennes et des emplois dans l’ère de l’après-pétrole. Les pôles de compétitivité, qui réunissent entreprises françaises et étrangères, laboratoires de recherche, ont ainsi été créés pour améliorerl’efficacitédusystèmederechercheetd’innovation français ; mais aussi pour attirer des laboratoires de recherche et des entreprises étrangères sur le territoire. Pour « structurer une offre visible sur l’innovation », comme l’explique Agnès Audier. Un vrai langage de consultant! p [email protected] Après les neiges d’antan L e sommet de Durban sur le climat? Oh, c’est loin, et puis ça concerne les îles du Pacifique, non? D’ailleurs, les inondations, il y en a en Indonésie ou en Chine – c’est bien triste, mais enfin, ce n’est pas chez nous. De toute façon, vous ne croyez pas qu’il y a plus urgent à résoudre que le réchauffement, comme problème, avec la crise, les banques, la croissance en berne? Alors le climat, bonjour! On osera imaginer que de telles pensées ont parcouru le cerveau de quelques-uns des organisateurs de Jardin des neiges, une manifestation qui s’est tenue à Lyon du 23 au 26 novembre. Des mètres cubes de neige artificielle y ont été apportés à grands frais pour donner envie aux petits Lyonnais d’aller skier. Admirable idée! Mais cette opération publicitaire a exigé de la neige artificielle, car de neige naturelle sur les montagnes, il n’y a pas plus que de cheveux sur la tête à Mathieu… Les bulletins d’enneigement des stations de ski indiquent que la dernière neige est tombée en mars. La saison s’annonce mal – comme de plus en plus souvent. Aussi les stations fourbissent leurs armes, c’est-à-dire des canons à neige, qui vont puiser dans des réserves d’eau rares – la sécheresse a touché aussi les montagnes – tout en consommant moult énergie, provoquant l’émission de 2 à 8 tonnes de gaz carbonique par hectare. Pas question ici de céder à la peur moyenâgeuse, ni de revenir à la bougie… Neige il n’y a pas ? Neige il y aura, foi de progressiste ! En fait, ce qui se passe dans nos massifs montagneux est une première manifestation du changement climatique. Comme l’a constaté le projet de recherche Scampei sur le climat des zones de montagnes, dont Météo France a publié la conclusion, lundi 28novembre, «les résultats s’accordent sur une diminution significative de la couverture neigeuse au-dessous de 2 000 m d’altitude dès les prochaines décennies ». De son côté, l’Observatoire savoyard du changement climatique observe Deneige naturelle sur les montagnes, il n’y a pas plus que de cheveux sur la tête à Mathieu… que «les zones de montagne seront les premières touchées par de longues sécheresses des sols à partir de la moitié du siècle ». Les montagnards sont notre avant-poste face au changement climatique. Leur économie s’est développée depuis quarante ans sur le tourisme de ski. Celui-ci, du fait du réchauffement, commence à se contracter. Le choix ? Continuer aveuglément, jusqu’à la dernière goutte d’eau. Ou réfléchir maintenant, et engager la transition écologique. p [email protected] Livre du jour Tous minoritaires ! Riche de 200 cartes, cet atlas retrace la longue histoire des « minorités » à travers le monde. Depuis les quatre systèmes dominants (européen, musulman, indien et chinois) jusqu’aux populations contemporaines (la communauté bio, les homosexuels…), en passant par les populations autochtones (Kurdes, Pachtouns…) ou issues des migrations (Roms, Palestiniens…), cet ouvrage de référence nous conduit à ce constat : nous faisons tous partie d’une minorité. Une «remondialisation» vertueuse? D ¶ Jean-Michel Severino est l’ancien directeur général de l’Agence française de développement, et Olivier Ray est économiste 200 cartes 188 pages ans ces temps où les populismes se font bruyants, Le Grand Basculement, de Jean-Michel Severino, ex-directeur général de l’Agence française de développement, et d’Olivier Ray, économiste, tranche par son humanisme. Leur livre commence par faire froid dans le dos quand il rappelle les grands déséquilibres qu’a engendrés notre humanité depuis la révolutionindustrielle.Basculementdémographique : d’un milliard en 1800, nous seronsneufmilliardsen2050,dontlamajorité au Sud. Basculement économique : les bas salaires de la Chine et de l’Inde et leur «tout-export »leurontvaluunecroissance qui a ravagé les industries occidentales et fait glisser le centre de gravité de la planète. Le Grand Basculement Jean-Michel Severino et Olivier Ray Ed. Odile Jacob, 300 p., 25,90 ¤ Basculement environnemental : l’eau, l’air et la terre s’épuisent sous notre fringale insatiable. L’homme était rare et précieux ; il est devenu innombrable et jetable. La nature était inépuisable ; elle est devenue chiche et hors de prix. Mais ces basculements ne poussent pas les auteurs à l’emporte-pièce. « Notre monde est d’une telle complexité que les meilleures grilles d’analyse ne sont guère que les moins mauvaises », écriventils. Qui dit complexité dit ambivalence. Plus d’hommes sont sortis de la pauvreté depuis cinquante ans qu’entre l’ère de notre cousin de Neandertal et le milieu du XXe siècle, ce qui n’empêchera pas le nombre des personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour d’enfler d’un à deux milliards durant ce siècle. Il est légitime de s’interroger sur la croissance, tout comme sur la capacité des peu- ples à supporter les « trente soucieuses » auxquelles nous sommes promis jusqu’à ce que les salaires asiatiques aient rejoint les nôtres. Pas question pour les auteurs de succomberaurepliouau protectionnisme. Sinousvoulons«cohabiterdemanièreheureuse», il nous faut bâtir une «remondialisation vertueuse », c’est-à-dire que le Nord et le Sud, les riches et les pauvres, doivent faire converger leurs politiques. Le local ne doit plus s’opposer au global. Il faut taxer la nature et détaxer l’homme, autrement dit imposer les émissions de carbone pour alléger les cotisations sociales. Le social doit être réhabilité dans nos économies et enfin respecté dans les pays émergents. Il conviendrait de créer un filet mondial de sécurité pour assurer une dignité minimale, afin d’aller plus loin que les Objectifs du millénaire de l’ONU contre la pauvreté. «Les sommes qui ne seront pas investies en préventif, prédisent les auteurs,serontdépenséessurunmodecuratifaucentuple »,pour contrer lesdégâts des terrorismes, de l’immigration sauvage et des fascismes. Mêmesi cela est aride, « il fautapprendre à aimer la gouvernance globale (…) pour la convergence progressive des visions qu’elle permettra d’obtenir ». Utopie? Peut-être la seule pour résoudre l’un des nombreux dilemmes de notre temps, celui qui a donné aux auteurs l’envie d’écrire leur livre : dans une grande banque, les administrateursn’arriventpas àsedécidersurlefinancement d’un investissement dans un pays du Maghreb, car il risque de détruire des emplois en France. Jusqu’à ce que l’un d’eux demande : «Les Arabes, vous les voulez où ? Chez eux ou à Marseille ? » Réponse impossible,saufsil’écouteprécèdele partage pour corriger nos « basculements». p Alain Faujas Rectificatifs&précisions EN PARTENARIAT AVEC CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX Edition Laurence Biava, qui a fait entrer Maxime Brunerie au jury du Prix littéraire du savoir et de la recherche qu’elle a créé (Le Monde daté 20-21novembre 2011), a publié son livre aux éditions InOctavo, à compte d’éditeur et non à compte d’auteur. Radioactivité L’ACRO n’est pas l’Association pour le contrôle de la sûreté nucléaire, comme écrit par erreur (Le Monde du 24novembre), mais l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest. culture 0123 Mercredi 30 novembre 2011 ppp excellent ppv à voir pvv pourquoi pas 21 vvv à éviter JohnnyDepp:«Sescendresretombèrentsurnous» L’acteur évoque la vie, la mort et les funérailles de son ami l’écrivain Hunter S.Thompson Rencontre H unter S. Thompson se distingue de l’immense majorité des journalistes par sa capacité d’absorption (d’alcool, de stupéfiants), par son statut de personnage de fiction (il est le héros de deux longs-métrages, et une figure récurrente de la bande dessinée américaine Doonesbury) et surtout par son talent hors du commun. Dans les années qui ont précédé sa mort, le 20 février 2005, à 57 ans, il a trouvé en Johnny Depp un admirateur et une âme sœur. «Cet homme élégant, ungentleman sudiste, très moral, très chevaleresque, avait uncôté très sauvage, il se consumait» L’acteur l’a incarné une première fois dans Las Vegas Parano, de Terry Gilliam (1998). Il a ensuite fait publier un roman inédit, Rhum Express (Gallimard) avant d’en produire et interpréter l’adaptation. L’acteur raconte son amitié pour le père fondateur du journalisme gonzo. Je me trouvais à Aspen, Colorado, en décembre 1994, je crois. Un type que je connaissais m’a demandé de me trouver à la Wood Creek Tavern à minuit en me disant “Hunter viendra”. J’étais là à minuit, et vers une heure et demie, Hunter est arrivé. La porte du bar s’est ouverte et je n’ai vu que des étincelles. Il a fendu la mer des clients, dans sa main gauche il tenait un aiguillon électrique pour bestiaux d’un mètre de long et dans sa main droite un Taser. Avec Hunter, j’ai senti un lien difficile à expliquer. Tous les deux, nous sommes nés et nous avons grandi dans le Kentucky. Quand on grandit au pied des Appalaches, on baigne dans cette culture baptiste intense qu’il a combattue dans sa jeunesse comme je l’ai combattue. Dans le Kentucky, on distillait du Moonshine (de l’alcool de contrebande), c’est propre à l’Etat, on en trouve peut-être dans le Tennessee, pas ailleurs. Les Y Dans « Rhum Express », petite virée dans les bas-fonds de Porto Rico pour Johnny Depp et ses copains. PETER MOUNTAIN/GKFILMS armes à feu en font aussi partie. Depuis que j’ai 5 ou 6 ans, je tire sur des trucs, c’est normal. Un de mes grands-pères faisait passer du Moonshine du Kentucky en Virginie-Occidentale. De ce point de vue, nous nous sommes reconnus. La nuit où je l’ai rencontré, après avoir quitté le bar, nous sommes allés chez lui. J’ai fait une remarque sur une très belle carabine nickelée de calibre 12 qui était au mur. Et il m’a demandé : “Tu veux tirer ?” Il était trois heures du matin et il a ajouté : “On fabrique une bombe et on tire dessus”, ce que nous avons fait parce que ça avait l’air drôle, impulsif, insolent. Cet homme très élégant, un gentleman sudiste, très moral, très chevaleresque, avait un côté très sauvage, il se consumait. Ce fut une amitié instantanée, très rapidement nous sommes devenus très proches. Ensuite, on m’a demandé de tenir son rôle dans le livre sur Las Vegas. Je redoutais, si je réussissais à bien le jouer, de mettre à mal notre amitié. C’était un personnage extrême, et je sentais la nécessité de jouer au plus près de cette dimension. J’avais peur que ça le trouble, comme de se regarder trop longtemps dans la glace, mais il savait exactement qui il était. J’ai trouvé le manuscrit de Rhum Express dans une caisse chez lui. Je préparais Las Vegas Parano, et nous fouillions dans des cartons, il y avait des serviettes de restaurant, des étuis d’allumettes. Hunter était surpris, il n’avait jamais pensé à le finir, juste fourré dans un carton. Nous nous sommes assis par terre, nous l’avons lu. C’était très bon, de toute évidence il fallait le publier. Dès le début du livre, il y a un côtéCasablanca,Le Port de l’angoisse. Pour Hunter, en 1959, il s’agissait d’écrire le “grand roman américain”. Voilà un homme qui avait littéralement recopié mot pour mot, à la machine à écrire, Gatsby le Magnifique, et plus d’une fois. C’était un grand fan de Nathaniel West et bien sûr d’Hemingway. A ce moment de sa vie, Une balade enivrante au cœur du journalisme gonzo ppv © Marcos Lopez «Amanda», 2005. Galerie mor.charpentier. Johnny Depp, coproducteur du film, rêvait depuis longtemps d’adapter Rhum Express, un roman de son regretté ami Hunter S. Thompson, créateur du journalisme gonzo. Le livre, rédigé au début des années 1960, s’inspire des méthodes d’investigation iconoclastes de Thompson qui conjuguaient alcool, stupéfiants, enquête de terrain, plume incisive et ultrasubjective, sans oublier l’engagement politique. Rhum Express se déroule à la fin des années 1950. Lassé de sa vie new-yorkaise, Paul Kemp (Johnny Depp), un journaliste qui aime bien abuser de la bouteille, débarque à Porto Rico pour travailler dans un quotidien local et tomber sous le charme de Chenault, la fiancée de Sanderson, un homme d’affaires TONEELGROEP AMSTERDAM IVO VAN HOVE Hedda GaBler 1er > 3 DEC 20H00 LUK PERCEVAL dIsGraCe 15 > 17 MARS 21HOO © Jan VersweyVeld Rhum Express qui se propose de bâtir une station balnéaire de luxe sur une petite île des environs. Kemp se retrouve face à un dilemme : mettre sa plume au service de cet homme d’affaires corrompu, ou dénoncer publiquement ses sordides trafics… Transposer à l’écran le style flamboyant et halluciné de Thompson est un exercice périlleux. Terry Gilliam s’était déjà heurté à cette difficulté avec Las Vegas Parano. Bruce Robinson (Withnail et moi), qui n’avait pas tourné depuis près de vingt ans, souffre de l’inévitable comparaison avec le film de Gilliam : adaptation d’un livre du même auteur, même interprète – Johnny Depp – dans les rôles des alter ego de Thompson. Alcoolisme fonctionnel Rhum Express n’évite pas toujours les longueurs, édulcore la charge du roman de Thompson, si bien que l’on cherche parfois l’âme du journaliste sous l’intrigue immobilière. Mais, s’il est imparfait dans sa tentative de recréer la folie sarcastique de Thompson, Rhum Express se regarde avec jubilation, comme une visite guidée et alcoolisée dans les bas-fonds du Porto Rico, à la fin des années 1950. Le récit un peu décousu, les images vaporeuses (le film a été tourné en 16 mm), le font décidément tomber sous le coup des textes réprimant la mise en scène en état d’ébriété. Mais la plus grande réussite du film, la jubilation irrémédiable qu’il procure, est due à ses personnages et aux acteurs qui les interprètent. Johnny Depp est parfait dans ce rôle d’antihéros, enveloppé de vapeurs d’alcool, qui sort de son état d’anesthésie générale grâce à un sursaut moral. Il est aussi très bien entouré : Aaron Eckhart prête à merveille sa plastique froide à un entrepreneur américain sans scrupules, Michael Rispoli et Giovanni Ribisi donnent chacun une version convaincante de l’alcoolisme fonctionnel, et la sublime Amber Heard apporte une touche de beauté dans cet univers poisseux et enfumé. A la fin du film, on est pris d’une irrésistible envie de boire un verre de rhum avec Johnny Depp et ses comparses. Bon d’accord, surtout avec Johnny Depp. p on voit Hunter lutter pour se hisser au niveau de ses héros. Je comprends son départ. Puisqu’il avait dicté les conditions de sa vie, il fallait qu’il dicte celles de son départ. Tous ceux qui l’ont connu savaient qu’il ne serait jamais le genre de type à s’écrouler dans sa soupe, à table. Il s’en occuperait avant que ça arrive. Il savait très bien qu’en raison de sa prodigieuse faculté d’absorption, il risquait de vivre trente ans de trop. Quand c’est arrivé, nous l’avons maudit, mais nous avons compris qu’il ne pouvait pas en être autrement. Je savais quelle était sa dernière volonté… Quel animal. Il voulait que ses cendres soient tirées dans les airs d’un canon de 153 pieds de long en forme de poing. Je n’avais pas lechoix. Donc nous avonsorganisé une cérémonie avec des amis, des gens qu’il avait rencontrés au fil des années, John Kerry, qui aurait dû être président des EtatsUnis. Douglas Kennedy, qui avait été son rédacteur en chef au San Juan Star, à Puerto Rico. Nous avons joué la musique que Hunter aimait, Sympathy For the Devil, Spirit In the Sky, Mr. Tambourine Man. Et nous l’avons fait. Il a fallu beaucoup de travail pour construire ce poing à deux pouces, mais nous l’avons fait, nous l’avons projeté dans le ciel au son de Mr. Tambourine Man et ses cendres sont retombées sur nous. J’avais envoyé les cendres de Hunter du Colorado à travers le pays. Deux amis ont transporté Hunter jusqu’à une fabrique de feux d’artifice. Il est devenu trente projectiles géants, il est devenu un chargeur de munitions. Pour quelqu’un qui aimait tant les armes, il y a de la beauté, de la symétrie. » p Propos recueillis par Thomas Sotinel D’où vient cette impression devant Je disparais, mis en scène par Stéphane Braunschweig, d’assister à la naissance d’une écriture neuve, dérangeante et captivante à la fois ? Fabienne Pascaud – Télérama. de Arne Lygre mise en scène Stéphane Braunschweig du 4 nov. au 9 déc. 2011 Sophie Walon Film américain de Bruce Robinson avec Johnny Depp, Richard Jenkins, Aaron Eckhart, Amber Heard, Giovanni Ribisi et Michael Rispoli. (1 h 50). www.colline.fr - 01 44 62 52 52 22 0123 cinéma Mercredi 30 novembre 2011 ppp excellent Papa, maman, les films et moi Mathieu Demy puise chez Jacques, son père, et Agnès Varda, sa mère, la matière d’une œuvre à lui Americano I pvv pourquoi pas vvv à éviter Magistral final pour Béla Tarr Le cinéaste hongrois porte à son paroxysme la radicalité hypnotique de son cinéma ppv maginez que vous vous appeliez Mathieu Demy. Imaginez que votre père, Jacques, ait été le cinéaste le plus enchanteur du cinéma français. Que votre mère, AgnèsVarda,photographepuis réalisatrice, ait contribué de son côté, parallèlement à la Nouvelle Vague, àl’émergencede lamodernitécinématographique. Imaginez qu’au lieu de choisir tout autre métier qui se présentera, vous deveniez acteur de cinéma. Puis, non content de frayer dans les mêmes eaux que vos géniteurs, vous décidiez de leur emboîter le pasenréalisantvotre premierlongmétrage. Ce serait déjà amplement suffisant. Eh bien non ! Imaginez pour finir que vous interprétiez le rôle principal de ce film, dont l’histoire met en scène, cerise sur le gâteau, un fils qui doit faire lepoint sur sa situation familiale à l’occasion de la mort de sa mère… Ne seriez-vous pas suspect, eu égard à la problématique toujours un peu irritante des « fils et filles de » et souscouvertd’autofiction, d’aggraver considérablement votre cas ? Face à une telle démarche, deux réponses critiques sont possibles. La première consiste à refuser tout net le miroir aux alouettes de l’autofiction. A faire comme si de rien n’était et à considérer le film au même titre que n’importe quelle fiction : la mise en scène d’un récit avec des acteurs. Americano serait alors l’histoire d’un jeune type irrésolu qui s’appelle Martin (Mathieu Demy), qui vit à Paris avecunejoliefillequis’appelle Claire (Chiara Mastroianni), à deux doigts de la séparation. Un coup de fil nocturne la suspend in extremis : la mère de Martin vient de mourir à Los Angeles. Il y part aussitôt pour s’occuper des formalités administratives, pour retrouver en réalité un autre chapitre suspendu de sa vie : son enfance solitaire en Californie, aux côtésd’unemèredépressivedélaissée par son père (Jean-Pierre Mocky, distant mais aimant), lequel finira par faire revenir son fils à Paris. ppv à voir Le Cheval de Turin ppp U Dans un bar louche avec Martin (Mathieu Demy) et Lola (Salma Hayek). RONALD MARTINEZ/LES FILMS DE L’AUTRE Tout cela lui revient par vagues, à travers les plans mélancoliques d’un film tourné alors qu’il était enfant,danscelieuoùildoitaujourd’hui assumer en même temps que liquider l’héritage de son enfance. L’image lointaine d’une fillette mexicaine dont il partageait les jeux, et à laquelle sa mère a légué une partie de ses biens, réapparaît aussi. Mais Martin ne pense qu’à fuir cette soudaine résurgence du passé. L’accomplissement des dernières volontés de sa mère en sera le prétexte. Un road-movie commence, au volant d’une Mustang décapotable rouge,àlarecherchedecettemystérieuse Lola, localisée à Tijuana. Le passage de la frontière mexicaine signale l’entrée du film dans une zone plus incertaine, plus irréelle, pour le personnage comme pour le film. Voiture désossée par les enfants des rues, perte des papiers d’identité, incarnation de Lola (Salma Hayek) en bombe sexuelle d’un bar louche (l’Americano), hostilité fuyante de la jeune femme qui prétendêtre une autre, passage à tabac du héros opiniâtre… On entre ici de plain-pied dans le domaine du conte initiatique, avec cette belle métaphore qui consiste à opérer la psychanalyse du héros sur le lit de Lola et au tarif desa passe. Gardonssecrètela résolution de l’énigme, pour constater que le voyage de Martin s’apparente lointainement à celui d’Œdipe, qui accomplit son destin en croyant le fuir. Mathieu Demy est, d’une certaine manière, le fils de leurs œuvres avant d’être celui de ses parents C’est la raison pour laquelle il serait stupide d’ignorer la part profondément personnelle de ce film, avec ce jeu de piste filial qu’il met plus ou moins explicitement en œuvre. Mathieu Demy emprunte à la fois au cinéma de son père et à celui de sa mère. Le film dans le film, dont les extraits font office de retours en arrière, est une citation de Documenteur, réalisé en 1981 par Agnès Varda. La famille Demy se trouve alors à Los Angeles, pour un projet de Jacques qui ne verra jamais le jour. La réalisatrice y met en abyme sa situation en confiant à Sabine Mamou, sa monteuse, le rôle de l’assistante délaissée d’un cinéaste, et à son propre fils Mathieu, 8 ans, celui de son fils, baptisé Martin. C’est bien ce jeu vertigineux entre réel et fiction que reconduit Mathieu Demy en réincarnant le personnagede Martin.Dès qu’Americano franchit la frontière, on passe sur le territoire de Jacques Demy. Celui de la fable, de la variation sur le cinéma de genre, de la transfiguration du réel. Le personnage de Lola y renvoie non seulement au film homonyme réalisé par Jacques Demy en 1961, dans lequel Anouk Aimée incarne une chanteuse de cabaret abandonnée par le père de son enfant, mais plus encore à Model Shop, le seul film tournéparJacquesDemy auxEtatsUnis, en 1969, à Los Angeles. Au point qu’Americano peut être vu comme un remake implicite de ce film méconnu, qui voit un jeune homme en bisbille avec sa fiancée partir sur les routes en décapotable (verte) et s’amouracher au passage de Cécile (Anouk Aimée encore), une Française qui pose pour des photos érotiques sous le nom de Lola, et qui se languit de son fils resté en France. Un enfant en rade gît dans chacun des films dont s’inspire Mathieu Demy. Comme ils ont été réalisésparses parents,ilssontaussi pour lui des films de famille, une mémoire documentaire, intime, de sa vie. Tel est sans doute le vrai sujet d’Americano, qui nous suggèrequeMathieuDemyest,d’unecertaine manière, le fils de leurs œuvres avant d’être celui de ses parents. Un enfant-cinéma, en exil de la vraie vie, qui ne peut espérer sortir du cercle magique qu’en y entrant à son tour, pour tenter de devenir, au moins, fils de ses propres œuvres. Il y a suffisamment de courage et d’élégance dans Americano pour penser que ce rêve n’est pas vain. p Jacques Mandelbaum Film français de Mathieu Demy. Avec Mathieu Demy, Salma Hayek, Chiara Mastroianni, Géraldine Chaplin, Carlos Bardem, Jean-Pierre Mocky (1 h 45). Exposition au Musée de la musique jusqu’au 15 janvier 2012 Du mardi au samedi de 12h à 18h Le dimanche de 10h à 18h Billet coupe-file sur www.citedelamusique.fr/klee Cité de la musique www.citedelamusique.fr | 01 44 84 44 84 ISABELLE GIORDANO 11h - Les Affranchis Avec tous les mercredis la chronique de Sandrine Blanchard du journal franceinter.fr n cinéaste fait toujours le même film, dit-on. Entre son premier long-métrage, Nid familial, réalisé en 1977, et Le Cheval de Turin, qui sort aujourd’hui (tous sont visibles à Paris à partir du 3 décembre, dans le cadre de la rétrospective qu’organise le Centre Pompidou), le Hongrois Béla Tarr est certes passé de l’ère communiste à celle d’après, de la ville à la campagne désolée, du gros plan à l’épaule aux larges travellings à la grue… Pour autant, comme le souligne Jacques Rancière dans Béla Tarr, le temps d’après (éd. Capricci, 2011, 96 p., 7,50 euros), ses films tracent inlassablement le même mouvement, « un voyage avec retour au point de départ ». Lors de sa présentation à Berlin en février, le cinéaste a annoncé que Le Cheval de Turin serait le dernier film de sa carrière. Avec le générique de fin, on comprend pourquoi. Après avoir déployé ce mouvement, dont parle Rancière, avec une ampleur symphonique dans Satantango ou Les Harmonies Werkmeister, il travaille ici son motif au plus près de l’os. Qui a vu ses films sait à quel point on en sort terrassé, le souffle coupé par l’extraordinaire puissance d’évocation de ses plans-séquences en noir et blanc et par le pessimisme absolu avec lequel il dépeint l’humanité. La folie terrifiante du Cheval de Turin tient au fait que l’auteur y pousse sa logique jusqu’à un point de non-retour, radicalisant une démarche artistique qui passait pour le parangon de la radicalité cinématographique. A l’exception de la séquence d’ouverture, l’espace est réduit ici à une cuvette enclavée, dominée par un arbre mort battu par le vent, et au fond de laquelle vivent, dans une cabane, un vieux cocher et sa fille. Reprenant des acteurs avec qui il a déjà travaillé (Jànos Derzsi, le jeune homme de Sonate d’automne, et Erika Bók, la petite fille dans Satantango), reproduisant certains plans caractéristiques de son style, le cinéaste donne l’impression de verrouiller à double tour une boucle qui ne pourra plus jamais s’ouvrir. Le film commence pourtant par une note d’humour. Noir, certes, mais qui sert à concentrer l’attention sur une anecdote, laquelle, pour être grave, n’en est pas moins amusante. Il s’agit d’un incident qui aurait bouleversé la vie de Friedrich Nietzsche. Alors qu’il effectuait un trajet en calèche, le cheval a cessé d’avancer. Incapable de le remettre en marche, le cocher a battu la bête, ce qui suscita chez le philosophe un élan de compassion. Nietzsche se pendit au cou de l’animal et passa ensuite les dix dernières années de sa vie dans un état de démence légère. Quant au cheval, on ne sait pas ce qu’il est devenu, conclut une voix off. Alors, à l’image surgit d’un épais brouillard un homme conduisant une voiture à cheval. Le plan s’étire, happant le spectateur, sans qu’aucune parole ait besoin d’être prononcée. L’homme, le cheval, le mouvement de la charrette, la campagne brumeuse, archaïque et post-apocalyptique, et ce prologue, qui suggère que le mal est là, précédant toute histoire à venir… Voilà qui suffit à Béla Tarr pour faire naître un monde sous nos yeux. Pendant les deux heures et demie qui suivent, il ne nous laissera pas nous en échapper. On en sort terrassé, le souffle coupé par l’extraordinaire puissance d’évocation Les journées se répètent à l’identique, rythmées par les mêmes gestes, mécaniques, effectués dans le même ordre, sans qu’une parole soit échangée entre le père et sa fille. En contrepoint, une phrase musicale très simple redouble ce rythme métronomique. Dans ces longs plans-séquences hypnotiques,lamoindrevariationdeson,le moindre écart de geste se chargent d’une intensité explosive. Aussi le surgissementd’unebandedeTziganes qui dévalent la pente de la colline dans une danse macabre est-il porteur des plus sombres augures. L’inquiétante troupe disparaît aussi vite qu’elle est arrivée, non sans avoir semé sur son passage un poison mortel qui va tout engloutir. C’est sur le cheval, véritable héros du film, comme en atteste un sidérant gros plan qui continue de vous hanter après la fin de la projection, que se manifestent les premiers signes de la malédiction. Opposant à l’homme sa subjectivité muette et le mystère de son irréductible altérité, l’animal cesse de s’alimenter. Ce refus opaque résonne avec l’histoire de Friedrich Nietzsche, suggérant la vanité de toute volonté de puissance, et par là, de toute entreprise humaine. Comment après cela Béla Tarr pourrait-il faire un autre film ? p Isabelle Regnier Film hongrois de Béla Tarr. Avec Janos Derzsi, Erika Bók, Mihaly Kormos, Riscsi (2 h 26). 0123 cinéma Mercredi 30 novembre 2011 ppv à voir pvv pourquoi pas vvv à éviter Humour juif et amour filial Les films de la semaine nRetrouvez l’intégralité de la critique sur Lemonde.fr Quand un fils éclipse son père, cela donne une comédie brillante, drôle et amère à la fois pppexcellent Footnote U Le Cheval de Turin ppv ne comédie intello vraiment drôle ? Succédant à Woody Allen et aux frères Coen, Joseph Cedar en livre avec Footnote un bel exemple, après avoir été révélé par Beaufort, un film de guerre sur l’occupation israélienne au Liban qui lui avait valu l’Ours d’argent du meilleur réalisateur à la Berlinale 2007. Le cinéaste confirme son originalité avec ce quatrième long-métrage, une plongée drôle et grinçante dans le monde étroit de l’érudition universitaire, qui a reçu le Prix du scénario en mai au Festival de Cannes. Dans la famille Shkolnik, où l’on est chercheur de père en fils, Eliezer et son fils Uriel partagent le même champ d’étude : le Talmud, ce commentaire de la Bible hébraïque qui constitue l’un des textes fondamentaux du judaïsme. Mais leur relation souffre lourdement de la différence de reconnaissance dont ils jouissent dans le monde académique : alors qu’Uriel, avec ses thèses novatrices, accumule les récompenses universitaires, Eliezer, lui, attend toujours de voir son travail reconnu. Gros plans grimaçants Travailleur acharné, il a voué sa vie à l’examen des textes, mais il a toujours joué de malchance. Eliezer n’a jamais obtenu d’autre gloire qu’une mention dans une note de bas de page dans l’ouvrage de référence d’un autre chercheur, qu’il soupçonne de lui avoir volé ses propres découvertes… Amer, Eliezer vit coupé de sa famille, enfermé dans son bureau. Film hongrois de Béla Tarr (2 h 26). ppvà voir Film français de Mathieu Demy (1 h 45). Footnote Film israélien de Joseph Cedar (1 h 45). Rhum Express Film américain de Bruce Robinson (1 h 54). nGros-pois et petit-point Jusqu’au jour où il reçoit un appel : l’académie a décidé de lui décerner le plus grand prix israélien en matière scientifique. Mais très vite, sonfilsUrielestconvoquéauministère, où les jurés du prix lui annoncent qu’une secrétaire s’est trompée de prénom, que c’est en fait à lui que le prix est attribué. Que doit faire Uriel ? Préférer la compassion en laissant à son père le titre prestigieux qui lui était dû ou bien privilégier la vérité et recevoir le prix au risqueque ce nouveaucoup du sort soit fatal à son géniteur ? Ce quiproquo fait de Footnote une farce noire et amère, à l’image des nombreux gros plans, sombres et grimaçants, que multiplie Joseph Cedar sur le visage d’Eliezer. Tragi-comédie familiale, le film traite avec humour et amertume de la rivalité sournoise entre un père et son fils en même temps que de l’hystérie des mœurs universitaires. La virulente jalousie du père à l’égard de son fils, dont il méprise les travaux universitaires,témoigne ainsi du désarroinarcissique de cet homme en manque de reconnaissance,comme le montre la réjouissante scène d’ouverture, où Eliezer assiste, le regard morne, à la remise d’un prix (encore un !) à son fils. Uriel, lui, tente désespérément de plaire à son père, qu’il admire. Ironiquement, malgré leur connaissance érudite du langage, les deux seront incapables de communiquer… Quantàl’étroitessedumicrocosme universitaire, Cedar en offre uneimagesaisissantedansunescène où Uriel discute avec d’autres professeursdumalheureuxquiproquo dans une salle bien trop étroite pour contenir tous ces ego… L’ironie mordante de cette comédie, qui évoque parfois A Serious Man des frères Coen, donne à ce film où le cérébral le dispute au grotesque un aspect résolument divertissant. p Sophie Walon Film israélien de Joseph Cedar. Avec Lior Ashkenazi, Shlomo Bar-Aba, Aliza Rosen et Micah Lewensohn (1 h 45). «Vienne pour mémoire», de la fuite au retour via l’exil Le scénariste Georg Stefan Troller revient sur les souvenirs de guerre qui ont inspiré sa trilogie S ept ans, ce peut être une éternité. Entre 1938 et 1945, pour un jeune juif autrichien qui avait fui l’antisémitisme de ses compatriotes, puis échappé de justesse à l’avance de la Wehrmacht en France, avant de revenir à Vienne sous l’uniforme américain, il y avait assez de jours pour vivre plusieurs vies. De quoi aussi écrire plusieurs films. Georg Stefan Troller, bientôt 90 ans, est l’auteur des scénarios des trois longs-métrages qui composent la trilogie Vienne pour mémoire (en allemand Wohin und zurück, approximativement « aller et retour ») que réalisa Axel Corti entre 1980 et 1986. Né en 1933, élevé en France, Corti est mort en 1993. Si Welcome in Vienna, le dernier volet, présenté à Cannes en 1986, est sorti en salles en France et y a rencontré le succès, les deux autres films ont été diffusés à la télévision et rarement projetés. Pour tirer le portrait de cette petite fraction de la population juive germanophone qui a échappé à l’extermination, au prix de l’exil et de deuils innombrables, Troller et Corti ont eu recours à la fiction. Les incidents qui ont marqué la fuite, l’exil américain et les campagnes en Europe du scénariste ont été réarrangés. Dans son apparte- ment parisien, Georg Stefan Troller se souvient de ce moment, au début des années 1980, où, pour la première fois, il a raconté son histoire, « que personne ne [lui] avait demandée » jusqu’alors. Les télévisions autrichienne et suisse commandèrent à Corti et Troller (qui avaient déjà travaillé ensemble) un film sur l’émigration. « Je me suis “outé” », dit en riant le vieil homme à la barbe impeccablement taillée. Il veut dire qu’à ce moment personne ne savait que Georg Stefan Troller, journaliste vedette de la télévision allemande, était un juif autrichien. Il habitait en France, d’où il présentait un « Journal parisien » très populaire. Ses spectateurs le prenaient pour un Français et lui jouait le jeu, se faisant passer pour alsacien. L’écriture de Dieu ne croit plus en nous, le premier film de la trilogie, l’a fait replonger dans son histoire. Cette première partie dépeint la fuite sans fin, de pays en pays, à la recherche de papiers, de visas, toujours refusés. Une foule de personnages se croisent et se perdent au gré des catastrophes. C’est une œuvre de fiction faite de souvenirs irréfragables. Détenu neuf mois dans des camps d’internement français, Troller a bien entendu le commandant du der- nier d’entre eux annoncer aux détenus juifs qui demandaient à être libérés avant l’arrivée des nazis : « Vous allez retrouver vos compatriotes. » Diffusé en 1982 sur les chaînes allemande et autrichienne, Dieu ne croit plus en nous a rencontré un écho suffisant pour qu’une suite soit mise en chantier. Santa Fe met en scène ce moment de l’exil où les forces viennent à manquer. Les personnages apprennent les Fuite sans fin, de pays en pays, à la recherche de papiers, de visas toujours refusés suicides de Walter Benjamin et de Stefan Zweig, peinent à vivre, eux qui sont arrivés à survivre. Les exilés se sont installés à New York, que Freddy (Gabriel Barylli), l’alter ego de Troller, rêve de quitter pour le Nouveau-Mexique. Ce séjour new-yorkais a été filmé à Vienne et à Trieste. « Axel Corti était un génie pour faire beaucoup avec peu de moyens », se souvient Troller. Cette frugalité n’a pas empêché le cinéaste de voir plus grand pour Welcome in Vienna, le troisième volet du triptyque. Tourné en 35 mm (les précédents films l’avaient été en 16 mm), le film était destiné au cinéma. Ce récit du retour tragique de Freddy dans sa ville natale a été froidement accueilli en Autriche. « Le Kronen Zeitung [quotidien populaire viennois] a écrit que messieurs Troller et Corti allaient se faire beaucoup d’argent avec le malheur des réfugiés », raconte le scénariste. On est en 1986, après l’élection controversée de Kurt Waldheim à la présidence autrichienne. Welcome in Vienna montre des Viennois adressant à des réfugiés juifs de retour des reproches comme : « Vous avez eu de la chance de partir, alors que nous avons souffert pendant la guerre. » Troller : « Je n’ai jamais vu ailleurs cette apitoiement sur soi-même. » Cette lumière crue éclaire aussi bien les victimes que les bourreaux. Le petit monde de l’émigration est dépeint sans concessions, sans refuser le risque de la comédie. « Kafka riait en lisant ses textes », rappelle Georg Stefan Troller. p Thomas Sotinel Dieu ne croit plus en nous (1982, 1 h 50), Santa Fe (1985, 1 h 55), Welcome in Vienna (1986, 2 h 01), films autrichiens d’Axel Corti. SHAME MICHAEL FASSBENDER CAREY Documentaire anglais de Sue Bourne (1 h 35). Tourné lors du 40e championnat du monde de danse irlandaise, en mars 2010 à Glasgow, Jig met en scène 6 000 jeunes danseurs, leurs familles et professeurs. Sue Bourne insuffle à son documentaire un vrai sens du suspense. p S. W. nKidnappés Americano Papa Shkolnik (Shlomo Bar-Aba, à droite) et son fils (Lior Ashkenazi). LEON SOKOLETSKI/RAN MENDELSON nJig Film d’animation suédois d’ Uzi et Lotta Geffenblad (43 min). Ce moyen-métrage d’animation, à la fois pédagogique et onirique, fera le bonheur des petits. On suit les deux personnages à travers leurs expériences ludiques : redécorer leur salon, imaginer des dessins en reliant les étoiles, construire un bateau… Ils donneront aux enfants une foule d’idées pour occuper leurs samedis après-midi. p S. W. nHara-kiri : mort d’un samouraï Film japonais de Takeshi Miike (2 h 05). Cette tragédie féodale est mise en scène avec une retenue étonnante de la part d’un cinéaste aussi excessif que Takeshi Miike. Cette modération formelle donne plus de force à une critique sans pitié du code d’honneur samouraï, mis en pièces par l’égoïsme des privilégiés face à un chevalier désargenté qui aspire au suicide rituel. p Jean-Luc Douin nTerritoire perdu Documentaire belge de Pierre-Yves Vandeweerd (1 h 15). Trente-cinq ans après le début du conflit entre les Sahraouis du Front Polisario et l’armée marocaine, Pierre-Yves Vandeweerd filme les camps de réfugiés et la barrière érigée par le Maroc dans le Sahara. Ces images sont accompagnées de récits de guerre et d’exil. Et la combinaison de ces vues presque hiératiques et de cette parole presque épuisée à force d’avoir été répétée sans être entendue donne un film qui met en scène la vie dans l’oubli du reste du monde. p T. S. pvvpourquoi pas nJe m’appelle Bernadette Film espagnol de Miguel Angel Vivas (1 h 22). Une famille bourgeoise est agressée à son domicile par trois cambrioleurs qui retiennent la mère et la fille en otage pendant que l’un d’entre eux emmène le père vider les distributeurs. Sur un schéma rappelant Funny Games (1997) de Michael Haneke, Miguel Angel Vivas joue avec les nerfs des spectateurs et force ceux-ci à s’interroger sur un plaisir sadique suscité par un pur ressentiment de classe. p Jean-François Rauger nLa Vie murmurée Documentaire français de Marie-Francine Le Jalu et Gilles Sionnet (1 h 42). Osamu Dazai est un écrivain japonais révéré dans son pays, autant pour son œuvre, qui exalte la faiblesse de l’homme, que pour son destin, conclu tragiquement sur son suicide en 1948, à 39ans. L’originalité de ce documentaire consiste à montrer à quel point l’œuvre de Dazai résonne encore dans la société japonaise. Sa faiblesse est de ne pas éclairer suffisamment la nature de cette œuvre. p J. M. nLe Chat potté Film d’animation américain de Chris Miller (1 h 30). Sans doute dans l’espoir qu’il sera au marché hispanique ce que le panda fut au marché chinois, le studio Dreamworks a offert un long-métrage au chat à l’accent espagnol. Il aurait été sage de lui offrir aussi un scénario, plutôt qu’un collage de contes et de comptines qui ne servent qu’à justifier des effets de relief pour parcs d’attractions. p T. S. nLes Lyonnais Film français d’Olivier Marchal (1 h 42). La célèbre saga du gang des Lyonnais, groupe phare du grand banditisme des années 1970, revue et romancée par Olivier Marchal, policier passé cinéaste. La reconstitution de leurs hauts faits se mêle donc au retour inattendu du vieux Edmond Vidal (Gérard Lanvin) aux affaires, dans un récit tragique d’amitié et de trahison. Une partition un peu mécanique. p J. M. nThe Lady Film français de Jean Sagols (1 h 49). En 1858, à Lourdes, la Vierge apparaît plusieurs fois à Bernadette, jeune fille pauvre et illettrée. Les autorités religieuses et politiques s’alarment bientôt du désordre causé par cette jeune fille tenace… Jean Sagols brosse un portrait complexe et convaincant de Bernadette Soubirous incarnée avec force par Katia Miran. p S. W. Film français de Luc Besson (2 h 07). Portrait de la dirigeante birmane Aung San Suu Kyi (Michelle Yeoh), The Lady témoigne du respect que Luc Besson lui porte. Mais ce respect va jusqu’à le paralyser, le laissant incapable de mener à bien son projet: montrer le combat politique de l’opposante à la junte militaire à travers le regard de son mari, l’universitaire britannique Michael Aris (David Thewlis). p T. S. « Intouchables » approche les dix millions d’entrées Pour la quatrième semaine consécutive, Intouchables est en tête du classement dans les cinémas français. Le film d’Olivier Nakache et Eric Toledano avait réuni 9 556 950 spectateurs le 27 novembre, selon les chiffres d’Ecran total. Parmi les films sortis le 23 novembre, on remarque la bonne tenue du film de science-fiction américain Time Out, avec près de 370 000 entrées, des Adoptés, le premier film de Mélanie Laurent (81 256 entrées sur 152 copies), et de L’Art d’aimer, d’Emmanuel Mouret, qui a réuni plus de 70 000 spectateurs. Résultat plus décevant pour L’Or noir, de Jean-Jacques Annaud, avec 122 596 entrées. p MULLIGAN FESTIVAL DE VENISE 2011 PRIX D'INTERPRÉTATION U N F I L M D E STEVE MCQUEEN AU CINÉMA LE 7 DÉCEMBRE Design : Benjamin Seznec / TROÏKA • Crédits non contractuels. ppp excellent 23 & vous 24 0123 Mercredi 30 novembre 2011 S’asseoir dans la cour des grands Ces chaises et ces fauteuils sont signés Andrée Putman, Sylvain Dubuisson, Alberto Pinto, Philippe Starck, Jean-Michel Wilmotte, Christophe Pillet… Seize designers ont conçu des sièges qui ont pour point commun d’avoir été réalisés dans la plus ancienne manufacture de ce type de mobilier en France, à Liffol-le-Grand (Vosges), où l’on est depuis six générations maîtres menuisiers, ébénistes, sculpteurs et tapissiers. Loin de l’idée que l’on se fait parfois des manufactures, Henryot & Cie, labellisée entreprise du patrimoine vivant, donne vie aux créations des plus grands designers et a créé sa propre ligne de design, la ligne H. La galerie parisienne Snart 7 expose quelques-unes de ces pièces dans une mise en scène en noir (pour les ossatures des sièges) et blanc (pour les assises), les deux couleurs de la charte graphique de la manufacture. p Mélina Gazsi (PHOTOS DR) « 16 chaises/16 designers », Galerie Snart 7, 17, rue Duvivier, Paris 7e. Du mardi au samedi de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 19 heures. Jusqu’au 2 janvier 2012. Snart7.com L’abus d’alcool inquiète les parents Les familles estiment que les adolescents s’enivrent de plus en plus jeunes Retard de sommeil: attention danger Santé De plus en plus de personnes souffrent de désynchronisation de leur horloge biologique L ’alcool chez les jeunes est un sujet de préoccupation majeur pour les parents. Pour 83 % d’entre eux, il est « une source d’inquiétude », selon un sondage réalisé par OpinionWay auprès de 557pères etmères d’enfantsscolarisés pour l’Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (entretiens effectués sur Internet entre les 19 et 28 octobre) et rendu public mardi 29 novembre. Les trois quarts des parents estiment que la consommation d’alcool par les filles a augmenté par rapport à la leur, et 59 % qu’elle a grimpé pour les garçons. Le plus inquiétant, de leur point de vue, est le fait que « les jeunes consomment de plus en plus souvent de l’alcool de façon excessive, jusqu’à l’ivresse » (40 %), « le fait qu’ils boivent de plus en plus jeunes » (28 %) et « qu’ils ne puissent plus envisager une soirée entre amis sans qu’il y ait de l’alcool » (20 %). En revanche, quand il s’agit de leurs propres enfants, les parents sontplus confiants.Seulement14 % des parents d’enfants âgés de 12 ans ou plus estiment que leur consommation a augmenté par rapport à la leur au même âge. «Le foyer appa- raît comme un rempart, commente OpinionWay. Reste à savoir si ce rempart constitue une réalité ou une illusion qui freine leur prise de conscienceetrenddefaitplusdifficile l’efficacité des campagnes.» Dans les services des urgences, les jeunes seraient de plus en plus nombreuxàarriverencomaéthylique. Xavier Pommereau, psychiatre et responsable du centre aquitain de l’adolescence au CHU de Bordeaux, s’inquiète à double titre : il constate un rajeunissement considérable des jeunes qui s’enivrent et une proportion de fillesde plus en plus forte. « Ces jeunes sont de tous milieux et ne se limitent plus aux 15 % de ceux qui vont mal. Dès 11-12 ans, ils se livrent à des ivresses répétées; les 13-16 ans organisent des fiestas qui sont de véritables beuveries. Chaque weekend, en moyenne, deux jeunes filles de moins de 15 ans arrivent aux urgences du CHU de Bordeaux en état d’ébriété avancé ou en coma éthylique », commente-t-il. Cessoirées alcooliséescommencent dès le jeudi soir avec les étudiants, puis le vendredi soir, avec les lycéens et – fait nouveau – les collégiens. On débute à la bière, avant de passer à la vodka. Les jeunes choisissent cet alcool parce qu’il rend ivre très vite, qu’il est incolore et qu’on peut le cacher dansdes bouteillesd’eau. Pouraugmenter ses effets, les jeunes prennent des boissons énergisantes. Les fiestas sont l’occasion de jeux à base de questions, de charades, où celui qui se trompe doit boire cul «Dès 11- 12 ans, les jeunes se livrent à des ivresses répétées» Xavier Pommereau psychiatre secun verre d’alcool fort. «Dans ces fiestas, les adolescents retrouvent le monde de l’insouciance, font des batailles de polochons. Mais quand ils sont ivres, ils se lâchent, comme ils disent, peuvent avoir des rapports sexuels non protégés, se mettre en danger en rentrant en deuxroues », raconte Xavier Pommereau. Le psychiatre « déconseille très fortement aux parents de laisser seuls des adolescents de moins de 16 ans faire une fiesta à la maison. Si le comportement de leur enfant les inquiète, il faut qu’ils en parlent avec lui sans le braquer ». Par ailleurs, en cas de sortie, il incombe aux parents de prévoir un retour sécurisé, quitte à prendre un taxi. Philippe Batel, psychiatre, chef du service d’addictologie de l’hôpital Beaujon à Clichy-sur-Seine (Hauts-de-Seine), plaide pour une prévention précoce. « Il faut ouvrir ledialoguedèsl’âge de 10ansetparler aux enfants des problèmes de drogue, de tabagisme et bien sûr d’alcool. » Les études, ajoute-t-il, montrent que les jeunes qui ont connu des ivresses répétées entre 15 et 20 ans développent une sensibilité aux addictions de toutes sortes (alcoolisme, toxicomanie…), y compris vingt ans après. « Je suis frappé de voir que les parents nous amènent leur ado parce qu’ils ont trouvé un joint dans sa chambre, mais qu’ils ne réagissent pas quand il rentre ivre le samedi soir », déplore le spécialiste. Selon l’enquête HBSC (Health Behaviour in School-Aged Children) publiée en 2008, l’ivresse a fortement augmenté entre 2002 et 2006 : 41 % des jeunes de 15 ans déclarent avoir été ivres, contre 30 % en 2002. Ces ivresses touchaient davantage les garçons que les filles : 9 % des garçons de 11 ans pour 4 % des filles du même âge et, à 15 ans, 44 % contre 38 %. p Martine Laronche Santé INDISPENSABLE! Le guide Hi-Fi pour faire le bon choix Les médecines naturelles séduisent Les Français sont de plus en plus préoccupés par leur santé. C’est ce qui ressort d’une étude du groupe de protection sociale Malakoff Médéric et de l’institut Médiascopie, présentée lundi 28 novembre et réalisée auprès de 800 personnes. Interrogées sur l’univers de la santé, les personnes se montrent inquiètes au sujet des maladies, au premier rang desquelles le cancer, et celles liées à l’âge comme la maladie d’Alzheimer. « L’étude montre une perception positive des nouvelles approches telles que les médecines naturelles ou la télémédecine », souligne Isabelle Hébert, directrice de la stratégie et du marketing de la branche santé de Malakoff Médéric. p Pascale Santi U ne personne sur trois se plaint de son sommeil. Un phénomène qui n’est certes pas nouveau mais qui s’amplifie. Ces troubles « encore imparfaitement prévenus et traités » peuvent avoir des conséquences parfois dramatiques, ont rappelé, le 25novembre, les Académies nationales de médecine et de pharmacie. En cinquante ans, le temps de sommeil moyen a diminué de 1 h 30 pour s’établir à 6 h 58 en semaine et à 7 h 50 le week-end, selon l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV). Favorisés par les nouvelles habitudes de vie – notamment le temps passé devant les écrans, surtout chez les jeunes –, les troubles du sommeil entraînent fatigue et troubles de l’humeur. Plus grave, ils peuvent causer la somnolence au volant. Sans parler de l’absentéisme ou des difficultés scolaires. La dette de sommeil pourrait aussi être à l’origine de maladies cardio-vasculaires, voire de cancers. Les Académies de médecine et de pharmacie préconisent de « faire du sommeil de l’enfant et de l’adolescent une question de santé publique ». Ceux-ci, qui « se couchent de plus en plus tard, ont une dette de sommeil de plus en plus importante, qui entraîne une grande fatigue, laquelle peut avoir des effets sur leur vigilance et leur performance », constate le professeur Yvan Touitou, chronobiologiste, membre de l’Académie de médecine. En cinquante ans, le temps de sommeil moyena diminué de 1 h 30 Or un enfant ou un adolescent se plaignant régulièrement d’être fatigué doit être écouté, souligne le professeur Touitou. Les parents ont l’impression qu’il suffit de dormir plus pendant le week-end. Or il faut se coucher et se lever à heures régulières, y compris le week-end, insistent les spécialistes. Conséquence de cette dette de sommeil : de plus en plus de personnes souffrent de désynchronisation de leur horloge biologique (avance ou retard de phase des rythmes circadiens). Si l’on ne fait rien, l’enfant ou l’adolescent se retrouvent dans une situation de retard de phase qui peut se transformer en troubles du sommeil. p Pascale Santi Détaillant-grossiste vend aux particuliers les grandes marques ”au meilleur prix” MATELAS - SOMMIERS CANAPÉS - SALONS - CLIC-CLAC * Voir conditions sur www.mobeco.com CONVERTIBLES POUR COUCHAGE QUOTIDIEN AVEC LE GUIDE Réglez en 10 fois sans frais * 50 av. d’Italie 75013 PARIS UN CD EXCEPTIONNEL En kiosque actuellement TRECA - TEMPUR - SIMMONS - PIRELLI D U N LO P I L LO - BU LT E X - E P E DA - E TC . . . Livraison gratuite sur toute la France BelleVille 2011 OFFERT DIVA - CASANOVA - BUROV - DESIGNERS GUILD NEOLOGY - NICOLETTI - LELEU - MARIES CORNER - ETC ... 247 rue de Belleville 75019 PARIS 01 42 08 71 00 7j/7 Escale Mexique offre spéciale billet coupe-file sur www.slpj.fr 148 av. Malakoff 75116 PARIS www.seine-saint-denis.fr www.mobeco.com leader de la vente en ligne 0123 disparitions Mercredi 30 novembre 2011 Pionnier de la télévision et défenseur de la littérature Batteur de jazz et compositeur Pierre Dumayet I I l se voyait comme un « artisan » du petit écran. Il restera comme l’un des pères de la télévision moderne etl’inventeur des émissionslittéraires sur le petit écran. Producteur, réalisateur, scénariste, journaliste et écrivain, Pierre Dumayet, mort, jeudi 17 novembre, à l’âge de 88 ans, s’est frotté à tous les genres cathodiques et littéraires. Né en 1923, Pierre Dumayet a 24 ans quand, licence de lettres en poche, il entre à la Radio-Diffusion, l’ancêtre de Radio France, où il collabore au service livres de Jean Lescure. Deux ans plus tard, en 1949, il collabore aux premiers journaux télévi- 24 février 1923 Naissance à Houdan (Yvelines) 1949 Premiers journaux télévisés 27 mars 1949 Lancement de « Lectures pour tous » 9 janvier 1959 Premier numéro de « Cinq colonnes à la une » Juin 1968 Sabordage de l’émission après les événements de Mai 1968 1990 Emission « Lire et écrire » 17 novembre 2011 Mort à Paris sés de la France d’après-guerre. Le 27 mars de la même année, il lance « Lectures pour tous », la première émission littéraire, et se fait ainsi connaître du public, du moins de ceux qui possèdent alors un poste, et dont le nombre, en 1953, ne sera encore que de 60 000. Chaque mercredi soir, après la « Piste aux étoiles » – cravate, costume trois pièces et petites lunettes –, Pierre Dumayet reçoit Colette, Marguerite Duras, Raymond Queneau, François Mauriac… Une télévision et des conversations respectueuses de la parole et des silences de ses invités. « C’est que les téléspectateurs n’étaient pas considérés comme des clients. Ils étaient, plutôt, des lecteurs d’un genre nouveau. Des lecteurs de visages », commente-t-il dans son Autobiographie d’un lecteur (Pauvert), publiée en 2000. A la fin des années 1950, après avoir créé avec Claude Barma « Agence Nostradamus », le premier feuilleton télé, ce défricheur devient une figure populaire et l’une des personnalités les plus marquantes du petit écran. Sur les postes de l’époque, toujours en noir et blanc, on ne peut voir qu’une seule chaîne et à peine cinquante heures de programmes par semaine. Parmi elles, « Cinq colonnes à la une », dont le premier numéro est diffusé le 9 janvier 1959. Un choc : produite par Pierre Lazareff, Pierre Desgraupes et Pierre Dumayet – les « 3 P » – et réalisée par Igor Barrère, l’émission popularise le grand reportage télévisé. Le public peut enfin observer et sentir le monde vibrer devant ses yeux. La guerre d’Algérie, le Vietnam, mais aussi Edith Piaf ou Johnny Hallyday s’invitent dans les foyers grâce à cette émission hors normes qui captive jusqu’à 80 % de l’audience. Les couleurs du journalisme Portant haut les couleurs du journalisme malgré la censure du ministère de l’information et la faiblesse de ses moyens techniques, « Cinq colonnes à la une » est née avec le gaullisme. Elle mourra aussi avec lui. Avant de disparaître de l’antenne en décembre 1968, l’émission se saborde pendant la contestation étudiante. En juin 1968, dansune tribune publiéedansLe Monde, Pierre Dumayet justifie la grève de l’ORTF : « Les coupables sont les membres des gouvernements et de leurs délégués qui inlassablement, depuis bientôt plus de dix ans, ont œuvré pour que la télévision françaisedonneaupublicuneversiondel’actualité conforme à leurs besoins politiques. » Deux ans plus tard, en septembre 1970, les « 3 P » et Igor Barrère se retrouveront pourtant pour faire « Information Première », un nouveau magazine conçu sur le modèle de « Cinq colonnes à la une ». Touche-à-tout, toujours animé d’une farouche volonté de faire passer l’intelligence des deux côtés du téléviseur, Pierre Paul Motian l a joué avec Bill Evans, Coleman Hawkins, Thelonious Monk, Stan Getz, Paul Bley, Charlie Haden, Keith Jarett… Musicien en mouvement, qui déployait une approche aussi maîtrisée que déstructurée, hors de la ponctuation classique, Stephen Paul Motian est mort, le 22 novembre, à Manhattan (New York), à l’âge de 80 ans, d’une affection maligne de la moelle osseuse. Si le jazz d’aujourd’hui sonne comme il sonne, il le doit en partie à ce musicien, batteurmélodiste etcoloriste, maisaussicompositeur. Il avait commencé à jouer en 1955 25 mars 1931 Naissance à Philadelphie 1943 Début à la batterie 1959-1961 Dans le trio de Bill Evans 1972 Premier album en leader 22 novembre 2011 Mort à Manhattan Pierre Dumayet chez lui, en Normandie, en 2000. JEAN-FRANÇOIS JOLY Dumayet produit alors des émissions aussi bien pour Antenne 2 et FR3 que pour TF1. Il enchaîne les scénarios de fictions (Monsieur Bais en 1978, Malevil en 1981) et les séries culturelles ambitieuses bien que confidentielles. Les titres de ses émissions – « Lire c’est vivre » (1976), « Des millions de livre écrits à la main » (1975), « Lire et écrire » (1990) – soulignent combien la lecture reste pour lui au premier plan. « Le livre est quelque chose qui doit circuler entre l’auteur et l’interviewer, disait-il. Et cette circulation doit être perceptible par les téléspectateurs. Ladite circulation ne concerne pas l’histoire qui se met en avant dans le livre, mais des détails qui nous permettent d’entrer (ou d’en avoir l’impression) dans la personnalité de l’auteur. » Passionné par Gustave Flaubert, Pierre Dumayet consacrera plus d’une vingtaine d’émissions à l’auteur de Madame Bovary. « Si j’ai longtemps persévéré dans le discours dit culturel, c’est aussi par indignation contre ce qui se fait communément en la matière, déclarait-il au Monde en 1975. Pour démontrer, qu’au-delà des penseurs à la petite semaine dont la médiocrité galon- née inonde notre télévision, pensent un Roland Barthes, un Michel Serres. » Sur RTL puis sur Antenne 2, Pierre Dumayet sait aussi se faire canaille. Il lance au milieu des années 1970 la mode des questions décalées avec « Questions sans visages ». « Vous ne trouvez pas regrettable que les seins et les fesses d’une femme ne se trouvent pas du même côté ? » Du Ardisson avant l’heure. « J’en avais marre des questions sur mesure », dira-t-il. Dans les années 1990, l’arrivée de la télé privatisée et des animateurs-producteurs l’éloigne peu à peu du petit écran. Face à cette télévision qui ne prend plus le temps d’écouter, Pierre Dumayet devient spectateur. A Bages, dans sa maison de l’Aude, il écrit. La Nonchalance (Verdier, 1990) ; La vie est un village (1992) ; Le Parloir (1995) ; La Maison vide (1996)… Dans son autobiographie, il revient sur ses années de jeunesse et son apprentissage de la lecture. « Je n’avais pas compris que lire servait à apprendre. Je croyais que lire servait à lire exclusivement. Je crois n’avoir pas changé. » p Guillaume Fraissard Sulfureux réalisateur britannique Ken Russell R ien ne réjouissait autant Ken Russell que de susciter la fureur:cellesdes censeursbritanniqueslorsqu’il miten scène deux hommes nus (Oliver Reed et Alan Bates) enlacés dans Love (1969) ; celle de l’Eglise catholique qui demanda l’interdiction des Diables (1971), film inspiré de l’affaire des possédés de Loudun; celles des mélomanes, furieux 3 juillet 1927 Naissance à Southampton (Royaume-Uni) 1969 « Love », d’après D. H. Lawrence 1975 « Tommy », d’après les Who 27 novembre 2011 Mort à l’hôpital de voir Tchaïkovski présenté sous les traits d’un homosexuel refoulé (Music Lovers, 1970) ou Franz Liszt sous l’habit d’une rock star(Lisztomania,1975).Cegoûtdelaprovocation a parfois masqué le talent de ce cinéaste singulier qui est mort dans son sommeil, la nuit du dimanche27 au lundi 28novembre. Il avait 84 ans. Ken Russell est né le 3 juillet 1927 à Southampton. Après avoir été marin et aviateur, il est embauché à la BBC où on lui confie rapidement la réalisation de documentaires biographiques. Ses méthodes peu orthodoxes (il utilise des séquences jouées par des comédiens dans un film consacré à Elgar) suscitent l’intérêt des producteurs de cinéma. Ses deux premiers En 1985. LEBRECHT/RUE DES ARCHIVES longs métrages (French Dressing, 1964, et Un cerveau d’un milliard de dollars, en 1967 d’aprèsun roman d’espionnagede Len Deighton) attirent moins l’attention que les films qu’il continue de réaliser pour la télévision, qu’ils évoquent Isadora Duncan ou le douanier Rousseau. La sortie de Love, adapté de Femmes amoureuses, de D. H. Lawrence, déclenche en revanche une polémique immédiate. Russell suit à la lettre le programme érotique du romancier, développant en images les métaphores sexuelles, dévêtant ses per- 25 sonnages au risque d’encourir les foudres de la censure. Au passage, le cinéaste offre à son quatuor d’acteurs (Glenda Jackson, Vanessa Redgrave, Oliver Reed et Alan Bates) des rôles d’anthologie. Glenda Jackson remporte d’ailleurs l’Oscar pour son interprétation. Les Diables, inspiré du livre qu’Aldous Huxley avait consacré à l’affaire de Loudun, va encore plus loin dans la provocation.Russellmontredanstoutesadimension érotique la possession démoniaque d’un prêtre, incarné par le fidèle Oliver Reed, et des religieuses qui l’entourent. La version intégrale du film devrait sortir en 2012auRoyaume-Uniàl’occasionducentenaire de la commission de censure cinématographique. Fasciné par le motif du créateur réprimé, Russell a utilisé le langage du rock pour évoquer des musiciens classiques. Il a confié le rôle de Liszt à Roger Daltrey,lechanteurdes Who,aprèsavoiradapté Tommy, l’opéra rock du groupe en 1975. Pendant cette période chaotique de grande célébrité, il alterne les échecs, comme une biographiedeRudolfValentino(1977)interprétée par Rudolf Noureev, et les succès comme Au-delà du réel (1980), avec William Hurt, dont la thématique psychédélique a fait un film culte. Dans les années 1980, Kenn Russell se consacre à la mise en scène d’opéra. Il revient aucinéma en1989 avecGothic, film d’horreur qui raconte la conception de Frankenstein par Mary Shelley. Si sa tendance au grotesque s’est un peu émoussée, son talent pour découvrir de nouveaux acteurs ne se dément pas : Gabriel Byrne, NatashaRichardsonsontau génériquependantque son film suivant, Le Repaire du ver blanc, révèleHugh Grant.Le succèsdécroissant de ces longs métrages l’avait contraint à produire lui-même des films de format variable, qu’il réalisait parfois dans son jardin. Dernier scandale, il avait participé en 2007 à l’émission de télé-réalité Celebrity Big Brother, qu’il avait quittée avec fracas au bout de quatre jours. p Thomas Sotinel avec le pianiste Bill Evans, puis, à partir de 1959, avec le contrebassiste Scott LaFaro, formant ainsi, jusqu’à la mort accidentelle de ce dernier, en 1961, un trio historique où la répartition des rôles était totalement réinventée : l’interaction devint à la fois le moyen et l’objectif, là où traditionnellement le pianiste vedette était flanqué de ses deux accompagnateurs. Peu de musiciens auront autant suscité des comparaisons picturales. « Il avait des pinceaux au bout des mains », souligne son confrère Aldo Romano. Selon lui, « Motian pratiquait le silence à la Jankélévitch, la poésie du silence, l’ombre de la note. Il était plus moderne par son attitude que par son jeu, assez linéaire et avec un sensde laponctuation sans influences afrolatines. » ROBERT LEWIS/ECM RECORDS D’origine arménienne, Paul Motian avait d’abord joué de la guitare avant d’adopter la batterie à l’âge de 12 ans. Il se fixe à New York après avoir servi dans la Navy et mutiplie les collaborations musicales. Après le trio d’Evans, une longue relation musicale va notamment l’unir à deux autres pianistes, Paul Bley (à partir de 1963) et Keith Jarrett (depuis 1967) et au contrebassiste Charlie Haden. Motian joue avec son style personnel, souvent qualifié d’abstrait, dont l’évolution se poursuivra au fil des décennies, au gré de son goût pour l’aventure musicale. Paul Motian savait aussi bien trouver sa place au sein d’un grand orchestre que se lancer dans d’intrépides duos sans filet, commeceux qu’il enregistra avec le pianiste italien Enrico Pieranunzi (Doorways, 2004). Il n’avait jamais figé sa musique à une étape de son évolution, afin d’avoir toujours quelque chose d’autre à jouer demain. En septembre, il se produisait encore dans son club fétiche à New York, le Village Vanguard. p Paul Benkimoun Sur 0123.fr Sena Jurinac, représentante de l’âge d’or de l’opéra viennois, par Marie-Aude Roux. David Messas, « l’âme de la communauté juive de Paris », par Stéphanie Le Bars. Isaac Celnikier, peintre et graveur rescapé de l’extermination, par Philippe Dagen. Guy Dejouany, ancien PDG de la Compagnie générale des eaux, par Isabelle ReyLefebvre. Henri Karayan, avant-dernier survivant de l’« Affiche rouge », par Dominique Buffier. 26 météo & jeux < -10° -5 à 0° -10 à -5° 0 à 5° 5 à 10° Mercredi 30 novembre Faibles pluies du Pays Basque à l’Alsace 10 à 15° 45 km/h Cherbourg 11 13 50 km/h 99 5 6 9 Strasbourg Rennes 5 12 4 10 7 12 Dijon Poitiers 7 10 10 17 Montpellier Marseille 9 15 7 15 10 15 Alger Aujourd’hui D Front froid 10 14 Occlusion Thalweg Jérusalem Le Caire Etats-Unis Toujours doux et assez ensoleillé 7 17 Lever 12h16 Coucher 22h53 Jeudi Le front froid perdra de son activité, apportant quelques pluies des Pyrénées à l'Alsace surtout le matin. De larges éclaircies résisteront à l'avant sur les régions du sud-est. D'autres se développeront de la façade atlantique au Bassin Parisien, alors que quelques ondées arroseront la Normandie et le Nord-Pas-de-Calais. Les thermomètres conserveront un niveau élevé pour la saison. Tripoli Tripoli Dépression Front chaud Ajaccio 20 km/h Lever 08h20 Coucher 16h55 Saint André Coeff. de marée 70/65 Anticyclone Beyrouth Rabat En Europe Températures à l’aube 1 22 l’après-midi Athènes Tunis Tunis 9 11 11 11 9 12 13 14 5 13 6 14 9 16 8 13 8 16 9 17 Amsterdam Athènes Barcelone Belgrade Berlin Berne Bruxelles Bucarest Budapest Copenhague Dublin Edimbourg Helsinki Istanbul Kiev La Valette Lisbonne Ljubljana Londres Luxembourg Madrid Moscou Nicosie Oslo Prague Reykjavik souventdégagé 9 largementdégagé 9 beautemps 12 beautemps 0 souventdégagé 1 éclaircies 3 largementdégagé 5 largementdégagé 0 beautemps -3 souventdégagé 8 souventdégagé 8 6 souventdégagé 6 trèsnuageux 8 beautemps largementdégagé 1 aversesmodérées 16 9 beautemps largementdégagé 0 6 souventdégagé aversessporadiques 4 3 beautemps -2 éclaircies souventdégagé 11 aversesmodérées 8 1 souventdégagé -8 éclaircies Riga Rome Sofia Stockholm Tallin Tirana Varsovie Vienne Vilnius Zagreb 10 14 17 6 6 9 10 7 3 8 11 10 7 12 4 18 16 5 12 7 14 0 18 10 5 0 2 6 8 15 -1 11 5 7 4 7 6 16 0 6 -1 3 1 3 1 6 souventdégagé beautemps beautemps souventdégagé souventdégagé largementdégagé souventdégagé largementdégagé souventdégagé beautemps Dans le monde Alger largementdégagé Amman souventdégagé Bangkok souventdégagé Beyrouth largementdégagé Brasilia risqueorageux Buenos Aires largementdégagé Dakar largementdégagé Djakarta risqueorageux Dubai largementdégagé Hongkong largementdégagé Jérusalem souventdégagé Kinshasa souventdégagé Le Caire souventdégagé Mexico beautemps Montréal aversesmodérées Nairobi averseslocales 13 1 26 15 18 13 24 26 23 21 5 22 12 5 10 14 18 13 33 19 24 22 28 30 28 26 13 30 20 21 11 23 New Delhi New York Pékin Pretoria Rabat Rio de Janeiro Séoul Singapour Sydney Téhéran Tokyo Tunis Washington Wellington largementdégagé largementdégagé beautemps souventdégagé beautemps risqueorageux fortespluies risqueorageux risqueorageux beautemps averseslocales averseslocales largementdégagé beautemps 14 25 10 14 -3 5 17 26 10 21 22 29 6 8 26 29 21 28 1 8 11 17 15 20 5 11 11 18 Cayenne Fort-de-Fr. Nouméa Papeete Pte-à-Pitre St-Denis largementdégagé largementdégagé éclaircies averseslocales largementdégagé averseslocales 25 27 24 26 24 25 Outremer 31 28 26 28 29 28 Météorologue en direct au 0899 700 703 1,34 € l’appel + 0,34 € la minute 7 jours/7 de 6h30-18h Jours suivants Vendredi Samedi Dimanche Nord-Ouest 5 10 9 12 7 11 Ile-de-France 8 10 4 6 8 11 Nord-Est 9 9 4 5 5 8 Sud-Ouest 9 12 3 10 11 14 Sud-Est 12 13 5 10 5 14 sez quelques photos pour un pêle-mêle original. » Je ne traîne pas ma souris sur quelque site de personnalisation d’agendas, non ! Sur celui d’un objet ? Oui, vous brûlez !… Je suis sur fire-design.fr, qui « habille » les extincteurs, joignant l’utile à l’agréable. Pourquoi gloussez-vous devant celui qui semble emballé dans du papier journal ? (tinyurl.com/7754sfu). C’est pourtant le modèle que j’aurais volontiers préconisé à notre comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ! Et, voyez celui aux allures d’un jéroboam d’un bordeaux supérieur de 2005 « élevé en fût de chêne » (tinyurl.com/7dfvfhu). Enivrant ! Mais ne perdons pas de vue l’usage premier de cet objet. Car, en France, un incendie domestique se déclare toutes les deux minutes, un sur deux dans la cuisine, un sur quatre en raison d’une installation électrique défectueuse, et à 70 % la nuit (tinyurl.com/d83gt8j). Si votre demeure était en feu, quels objets sauveriez-vous des flammes ? Plutôt matérialiste ou sentimental(e) ? Quelques victimes poten- Ankara 1025 Séville Nice Perpignan 10 15 Istanbul Madrid 4 12 A Bucarest Sofia Rome Barcelone Barcelone A Biarritz Odessa Zagreb Belgrade Lisbonne Lisbonne 9 16 Toulouse Budapest Berne A 7 12 Kiev Munich Vienne Paris Lyon Moscou 1020 Londres -2 8 Bordeaux St-Pétersbourg Minsk Amsterdam Berlin Varsovie 1025 Prague Bruxelles Dublin Grenoble 30 km/h Helsinki Riga Chamonix H 8 12 « Laissez libre court à votre imagination… Créez, dessinez ou choisis- 1015 Copenhague Milan Clermont-Ferrand Limoges Au feu! 985 1005 8 10 5 11 25 km/h D D 101 5 10 20 Besançon 102 7 11 5 Orléans Nantes 10 05 8 9 C’est tout Net! Marlène Duretz > 35° 975 995 Edimbourg Metz Votez pour votre île préférée et tentez de gagner un séjour au Village Club Med Columbus Isle aux Bahamas. Sur voyage-bahamas.lemonde.fr * Les îles des Bahamas tielles ont déposé leurs biens les plus précieux au pied de l’objectif du photographe Robert Holden (theburninghouse.com). Pour Erin Schubert de Chicago, styliste de 25 ans (tinyurl.com/d78p4pu), ce serait son tee-shirt préféré, ses vieilles baskets, le collier de sa grand-mère, mais aussi une pelle à tarte, son passeport et une boîte de cigares cubains. E. István, 22 ans et étudiant en génie civil à Cluj, en Roumanie, emporterait sa Bible, sa guitare, ses pinceaux et son chevalet (tinyurl.com/78f5yxc). Dans la précipitation, Carla Bertomeu, lycéenne de 16 ans à Barcelone, se saisirait de ses brosses à dents et à cheveux – « J’en ai besoin », justifie-t-elle – mais aussi de son ours en peluche, d’un livre dédicacé par son auteur préféré, d’une boule à neige d’Allemagne que lui a offert son père (tinyurl.com/869urr5). Une galerie touchante et intimiste où convolent objets à valeur pécuniaire et sentimentale. p Courriels Assemblée nationale Trop de députés ! Il est un sujet dont les Français n’ont pas conscience, parce que la presse le considère comme acquis, c’est celui de la création de 12 sièges de députés pour les Français de l’étranger (…) et d’un ministère spécialisé (…). Un ministre a dit que cela ne coûterait rien puisqu’on supprime en même temps 12 sièges en métropole. Cela est absurde car, si on peut supprimer 12 sièges dans l’Hexagone, il ne faut surtout pas les remplacer et descendre à 565 députés, ce qui nous laisse encore avec une représentation pléthorique. En période de finances catastrophiques, ce n’est pas le moment de rajouter des dépenses : il faut supprimer l’utile pour ne garder que l’indispensable (…) et en ajoutant un ministère spécialisé alors que le candidat Sarkozy avait dit, en 2007, qu’il n’aurait que des ministères restreints ! Un tel sujet, sans être capital pour nos finances, est emblématique et montre que nos gouvernants se moquent du monde (…) pour se faire réélire (…) car ils espèrent que ces 12 sièges iront à la majorité. Robert Drouard, Paris Les soirées télé Les jeux Mots croisés n˚11-285 Sudoku n˚11-285 Solution du n˚11-284 Mardi 29 novembre TF 1 1 2 Mercredi 30 novembre 2011 965 Oslo Stockholm 4 9 6 10 5 11 9 13 D 30 à 35° 30.11.2011 12h TU T Châlonsen-champagne PARIS Caen Brest 25 à 30° www.meteonews.fr 5 9 5 10 20 à 25° Reykjavik Amiens Rouen 15 à 20° En Europe Lille 5 10 0123 écrans 3 4 5 6 7 8 9 10 1 1 12 7 I 3 5 II 1 9 III 3 2 IV 6 7 9 4 3 1 8 6 4 9 5 7 2 7 4 9 2 5 8 1 6 3 6 2 5 3 1 7 9 8 4 1 7 3 9 6 2 4 5 8 8 9 4 5 7 1 2 3 6 5 6 2 4 8 3 7 9 1 4 8 6 1 9 5 3 2 7 2 5 1 7 3 6 8 4 9 9 3 7 8 2 4 6 1 5 Facile 5 Complétez toute la grille avec des chiffres allant de 1 à 9. 4 9 6 2 Chaque chiffre ne doit être utilisé qu’une 9 2 5 seule fois par ligne, colonne et par 5 1 4 7 3 par carré de neuf cases. Réalisé par Yan Georget (http://yangeorget.blogspot.com) V VI VII VIII 20.50 Les Experts : Manhattan. Série. Ce qui est fait est fait. L’Heure de la vengeance (saison 7, 20 et 21/22, inédit) U ; Des secrets au placard (S5, 22/25) U. Avec Gary Sinise. 23.20 Un homme de loi. Magazine U. 0.55 Harry Roselmack derrière les portes du pénitencier (110 min) U. FRANCE 2 Loto X Résultats du tirage du lundi 28 novembre. Horizontalement Verticalement 1, 2, 11, 15, 24 ; numéro chance : 9. I. Délicieusement craquante et croquante. II. Bien diminué. Laissa aller son imagination. III. Vénéneuse herbe de saint Christophe. Amoureusement déposé. IV. Dangereuse rencontre. Altéré et dégradé. V. Préposition. Amoureusement contée. VI. Vous fera sortir de vos gonds. Cœur de miche par la droite. VII. Lourd souvenir d’une Allemagne disparue. Franchit le pas. Ouverture scolaire. VIII. Quand les mots ne viennent pas. Cadeau du ciel. Réponse enfantine. IX. Chaton en campagne. On le croit à gauche. X. Premier choix. 1. Une domination qui n’est pas du goût des puristes. 2. Homme à charge. 3. A régler à la fin. Entre les mains du pêcheur. 4. Opposés aux Gibelins. Préposition. 5. Ne rumine plus aujourd’hui. Fait très mauvaise impression. 6. Conjonction. Les hommes chez Barack O. Accord de la France d’en haut. 7. Grand ouvert. 8. Trentedeux sur la rose. Sur la touche. 9. Mise sous tension. Diane y attendait Henri. 10. Balance un peu. Un grand chez les lourds. 11. Prière. Mauvaise habitude. Saint régional. 12. N’importe qui. Rapports : Philippe Dupuis Solution du n° 11 - 284 Horizontalement Verticalement I. Illustrateur. II. Nouveautés. III. Oq. Enter. Cas. IV. Fureta. Emois. V. Feu. Inusable. VI. Etirées. Ta. VII. Nénés. Up. Rye. VIII. Suée. Prou. Sn. IX. Ise. Alpins. X. Festivalière. 1. Inoffensif. 2. Loqueteuse. 3. Lu. Ruinées. 4. Uvée. Rée. 5. Senties. Aï. 6. Tatane. PLV. 7. Rue. Usurpa. 8. Atres. Poil. 9. Té. Mat. Uni. 10. Escobar. Se. 11. Ail. Ys. 12. Rassérénée. 5 bons numéros et numéro chance : 7 000 000,00 ¤ ; 5 bons numéros : 57 246,50 ¤ ; 4 bons numéros : 570,30 ¤ ; 3 bons numéros : 6,60 ¤ ; 2 bons numéros : 4,10 ¤. Numéro chance : grilles à 2 ¤ remboursées. Joker : 0 838 280. Les résultats du Loto sont publiés dans nos éditions datées dimanche-lundi, mardi, mercredi et vendredi. Tous les jours Mots croisés et sudoku. Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13 Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ; télécopieur : 01-57-28-21-21 Courrier des lecteurs : par télécopie : 01-57-28-21-74 ; Par courrier électronique : [email protected] Médiateur : [email protected] Abonnements : par téléphone : de France 32-89 (0,34¤ TTC/min) ; de l’étranger : (33) 1-76-26-32-89. Sur Internet : www.lemonde.fr/abojournal/ Tarif 1 an : France métropolitaine : 394 ¤ Internet : site d’information: www.lemonde.fr finances : http://finance.lemonde.fr Emploi : www.talents.fr/ Immobilier: http ://immo.lemonde.fr Documentation : http ://archives.lemonde.fr Collection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40 Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60 TF 1 20.50 Mentalist. Série. Père et flic (saison 3, 21/24, inédit) ; Combat de chefs. Fils prodige (S2, 15 et 10/23). 23.20 Chase. Série. Recherche mère célibataire U. Double face V (S1, 14 et 10/18, inédit). Avec Kelli Giddish. 0.55 24. Série (saison 6, 1 et 2/24, 100 min). FRANCE 2 20.35 Louis XVI, 20.35 Fais pas ci, fais pas ça. l’homme qui ne voulait pas être roi. Documentaire. Thierry Binisti (France, 2011). 22.05 Versailles, le rêve d’un roi. Documentaire (France, 2007). 23.45 FBI : portés disparus. Série. Le Protecteur. Partir (S5, 9 et 11/24, 104 min). Série. Qui a envie d’être aimé. Emmerdements durables (saison 4, 5 et 6/8, inédit). 22.20 Avant-premières. Invités : Bernard-Henri Lévy, Patrick Bruel, Claude Askolovitch, Eddy Mitchell, Laurent Lafitte, Narjiss Nejjar et Lulu Gainsbourg. 0.25 Journal, Météo. 0.45 Des mots de minuit (90 min). FRANCE 3 20.35 Louis la Brocante. IX Mercredi30novembre Série. Louis mène l’enquête. Avec Victor Lanoux, Evelyne Buyle, Etienne Durot (France, 2010). 22.20 et 2.40 Soir 3. 22.45 Ce soir (ou jamais !). Présenté par Frédéric Taddeï (120 min). CANAL + 20.55 The Reader Film Stephen Daldry. Avec Kate Winslet, Ralph Fiennes, David Kross (EU - All., 2008) U. 22.55 Amore p p Film Luca Guadagnino. Avec Tilda Swinton, Flavio Parenti, Edoardo Gabbriellini (It., 2009) U. 0.50 Concert privé Kasabian (60 min). ARTE 20.39 Thema - Poussière mortelle. 20.40 Le Grand Procès de l’amiante. Documentaire. Niccolo Bruna et Andréa Prandstaller (2011). 22.05 Débat. Invités : Annie Thébaud-Mony, Pierre Pluta, Bernd Eisenbach. 22.30 Havana - Miami. Les temps changent. Documentaire (Fr., 2010). 23.30 ARTE Lounge. Invités: Giora Feidman, Casper, Nils Mönkemeyer... 0.35 Die Nacht/La Nuit (55 min). FRANCE 3 20.35 Histoire immédiate. Le Diable de la République. 40 ans de Front national. Documentaire. Jean-Charles Deniau. 22.10 Débat. Présenté par Samuel Etienne. 23.20 et 1.35 Soir 3. 23.45 Doc 24. Documentaire (55 min). CANAL + 20.55 Happy Few pp Film Antony Cordier. Avec Marina Foïs, Nicolas Duvauchelle, Roschdy Zem (France, 2010) V. 22.35 Inside Job pp Film Charles Ferguson (EU, 2010, v.o.). 0.20 Je ne dis pas non Film Iliana Lolic. Avec Sylvie Testud (Fr., 90 min). ARTE 20.40 Les Mercredis de l’Histoire. De Garibaldi à Berlusconi. [1 et 2/2] 150 ans d’histoire de l’Italie. Documentaire (2011). 22.40 Le Dessous des cartes. Magazine. 22.55 Cœur animal p Film Séverine Cornamusaz. Avec Camille Japy, Olivier Rabourdin (France - Suisse, 2009). 0.25 La Lucarne - Armando et la politique. Documentaire (v.o., 135 min). M6 M6 20.50 Maison à vendre. Magazine. 22.30 On ne choisit pas ses voisins. 20.50 La France a un incroyable talent. Sommaire : Anastasia, Linda et Jonathan... 0.30 Recherche appartement ou maison. Télé-réalité (55 min). Deuxième demi-finale. Divertissement. 23.05 « La France a un incroyable talent », ça continue. Divertissement (70 min). 0123 carnet Mercredi 30 novembre 2011 Michèle Egreteau, Ses enfants Et ses petits-enfants Et toutes leurs familles, Le Carnet Faites part de vos événements par téléphone : 01 57 28 28 28 par e-mail : [email protected] par fax : 01 57 28 21 36 Tarifs 2011 (prix à la ligne) Naissances, Anniversaires de naissance, Mariages, Fiançailles… : 18 TTC Décès, remerciements, Avis de messe, Anniversaires de décès, Souvenirs : 24 TTC Thèses : 15 TTC Réduction abonnés ont le chagrin de faire part du décès de Gaston EGRETEAU, survenu le 27 novembre 2011, à Paris. La cérémonie religieuse sera célébrée le vendredi 2 décembre, à 14 h 30, en l’église d’Haimps (Charente-Maritime), suivie de l’inhumation dans le caveau de famille. La famille ne souhaite ni plaques ni fleurs artificielles. 10, rue du Général-Delestraint, 75016 Paris. Le Moulin du Cluzeau, 17160 Haimps. Sceaux. Châtillon (Hauts-de-Seine). Lyon. Annecy. Paris. Un justificatif d’identité sera demandé. AU CARNET DU «MONDE» Décès Evelyn Askolovitch, son épouse, Claude Askolovitch et Myriam Ohayon, ses enfants, Felix Askolovitch, son frère, Camille, Theo, Noa, Amnon et Yael, ses petits-enfants, Annie Sulzbach, sa belle-mère, Isabelle Crevoulin et Maurice Askolovitch, ses neveux Et tous leurs proches, ont la tristesse d’annoncer le décès de Roger ASKOLOVITCH, dit Roger ASCOT, écrivain, journaliste, français et juif, sioniste et homme de gauche, le 27 novembre 2011. L’enterrement aura lieu le mercredi 30 novembre, à 15 heures, au cimetière parisien de Bagneux. La famille recevra au 39, rue des Batignolles, Paris 17e. Sans fleurs ni couronnes. On nous prie d’annoncer le décès de Helen AVATI, née WEINSTEIN, survenu à Paris, le 23 novembre 2011, dans sa quatre-vingt-huitième année, au terme d’une longue maladie. Journaliste de nationalité américaine, spécialisée dans les questions énergétiques, elle était l’épouse de Mario AVATI, peintre-graveur, décédé le 26 février 2009. Seule la mort a pu les séparer depuis leur mariage il y a soixante-deux ans. Seule la maladie a fait renoncer Helen à ses articles qu’elle a continué à rédiger jusqu’à la fin de l’été. ! " # $ %& ' ! " #$%& ' ()* + , -./ "% *)() %' *)( ))*( Les obsèques auront lieu le mercredi 30 novembre, à 15 h 30, au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e. Cet avis tient lieu de faire-part. Bernard Agop BEYLERIAN, chevalier du Mérite de l’ordre du Saint-Sépulcre, s’est endormi dans la Paix du Seigneur, le 25 novembre 2011, à l’âge de soixante-quinze ans. La messe sera célébrée le jeudi 1 er décembre, à 10 heures, en l’église Notre-Dame de Versailles. De la part de Marie-Danielle, son épouse, Boris, Marie et Ludovic, ses enfants, Jean, son frère, Marie-Jeanne et Yvan, sa sœur et son beau-frère, Michelle, Yanne, ses belles-sœurs, Tous ses neveux, nièces et filleuls, Des familles Schneider et Pagenaud Et de ses nombreux amis. Il a rejoint dans la Paix, son fils, Fabrice, ses frères, Jacques et Michel, ses parents, Sarkis et Germaine. Cet avis tient lieu de faire-part. Jean et Marie-Françoise Faisandier, Marie-Thérèse de Nomazy et Pierre de Nomazy, Yves Faisandier et Lise Bérégovoy, ses enfants et leurs conjoints, Ses sept petits-enfants, Ses dix-sept arrière-petits-enfants, ont la tristesse de faire part du décès de Mme Georgette FAISANDIER, née LE MOAL, survenu à Sceaux, dans sa quatre-vingt-quatorzième année. Elle a rejoint son époux, Jacques décédé en 2004. Le service religieux sera célébré le jeudi 1er décembre 2011, à 10 heures, en l’église Saint-Jean-Baptiste de Sceaux, 1, rue du Docteur-Berger. Ni fleurs ni couronnes mais des dons à l’association Valentin Haoüy. Nous avons la tristesse d’annoncer le décès de M. Gérard HARDIN, professeur agrégé d’anglais, ancien président de l’APLV et de la FIPLV, survenu le 25 novembre 2011, à Paris. Les obsèques auront lieu le jeudi 1 er décembre, à 14 h 30, au cimetière de Pléneuf-Val-André (Côtes-d’Armor). De la part des Familles Hardin, Delbove et Grosrichard. Annik Hardin, 27, rue des Martyrs, 75009 Paris. Philippe et Nathan Lévy, Cécile Perrier, Yvette Negrel, Suzanne Lévy, Les nièces et les neveux, Les « peupliers et les silex » de Pierrefeu, ont la tristesse d’annoncer le décès du docteur Jean-Louis LÉVY, survenu le 26 novembre 2011, à Paris, à l’âge de quatre-vingt-onze ans. Ses obsèques auront lieu le mercredi 30 novembre, à 15 heures, au cimetière parisien de Bagneux, à Montrouge. Jean-Louis Lévy, chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur, petit-fils du capitaine Alfred Dreyfus, eut à cœur toute sa vie de rétablir l’humanité de Dreyfus masquée par la force symbolique de l’Affaire. Résistant puis médecin généraliste pendant plus de quarante ans dans le 12e arrondissement de Paris, c’était un homme d’une grande culture et d’une rare capacité d’écoute. Ami de René Char et de tant d’autres, il avait collaboré à de nombreuses reprises au journal Le Monde dans des « Libres Opinions » et entretenu une correspondance avec Hubert BeuveMéry, son fondateur. Cet avis tient lieu de faire-part. 3, rue de la Terrasse, 69004 Lyon. 15, avenue Berthollet, 74000 Annecy. 28, avenue Bugeaud, 75016 Paris. David Finkelstein, son neveux, Peter Livaudais, son filleul, ont la grande tristesse d’annoncer le décès de Janet FINKELSTEIN, ingénieur du CNRS, survenu le 25 novembre 2011. Ses amis et ses proches pourront lui témoigner leur affection au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, le vendredi 2 décembre, à 16 heures. Pierre Franco et Elizabeth Guerlot et leurs enfants, Marie-Charlotte, Ulysse, Alice, Monique, sa femme, Denise Taïeb, sa sœur, ses enfants et petits-enfants, Les familles Dana, Bessis, Sefar, Nous rappelons à votre souvenir sa sœur, Madeleine, déportée, ses filles, Françoise et Madeleine, sa femme, Janine, son frère, Etienne. « La seule signature au bas de la vie blanche, c’est la poésie qui la dessine. » René Char. 19 bis, rue du Tapis-Vert, 93260 Les Lilas. On nous prie de faire part du décès de Simone OURBAK, née BOSSY, survenu à Saint-Servan, le 28 octobre 2011. L inhnumation aura lieu à Fribourg (Suisse). Elisabeth Ourbak-Mauchand, La Ville Es Loing, 22550 Ruca. ont la tristesse de faire part du déces de Victor Haï FRANCO, « Bébé » pour ses amis du lycée Carnot de Tunis, survenu le 24 novembre 2011, à Bardos (Pyrénées-Atlantiques), dans sa quatre-vingt-deuxième année. Cet avis tient lieu de faire-part. Catherine Garet, son épouse, Jean-Michel et Marie-Catherine Garet, son fils et sa belle-fille, Frédérique, Lucile, Paul, ses petits-enfants, Julien, Rémi, Clara, Maceo, ses arrière-petits-enfants, Pierre Tauzias et sa famille, La famille Bellanger, La famille Bellettre, Tous ses proches et amis, font part avec tristesse du décès, le 26 novembre 2011, à l’âge de quatre-vingt-quinze ans, de Jean-Louis GARET, docteur es Lettres, ancien professeur au collège Sainte-Barbe. La levée de corps aura lieu le mercredi 30 novembre, à 9 h 15, à l’hôpital Cochin. La cérémonie religieuse se déroulera le 1er décembre, à 14 h 15, au funérarium de Bayonne, suivie de l’inhumation au cimetière Saint-Léon. Catherine Garet, 37, boulevard Saint-Germain, 75005 Paris. Jean-Michel Garet, [email protected] Jean PERRET est mort le lundi 23 novembre 2011, accompagné jusqu’au bout de sa maladie d’Alzheimer par Framboise, sa compagne de trente ans de vie commune, de Caroline, Dominique et Jenny Chabannais et de son groupe d’amis l’entourant de tendresse, de rires, de fêtes, d’amour et d’amitié profondes. Il a eu une belle vie riche, directeur général de la SCOOL pendant vingt-cinq ans, militant depuis toujours, conseiller national d’Amnesty international et créateur de la commission « Droits de l’Enfant ». Poète, il a publié dans de nombreuses revues et anthologies. Son dernier livre Au hasard de l’homme paru aux éditions « Le Dé bleu ». De la part de Marie-Françoise Chabannais, dite « Framboise », sa compagne, La famille Chabannais Et de la chaîne des 30 Amis de Jean (dont Christian et Patrick Lecoq, ses amis de toujours). « Quand il est mort le poète... quand il est mort le poète, tous ses amis, tous ses amis pleuraient... » Quentin, Claire et Thibaud Pontillon, ses petits-neveux, ont la tristesse de faire part du décès de Eliane PONTILLON, survenu le 22 novembre 2011. Laurent Przyswa, son mari, Aron et Leonard, ses enfants Marc et Silvia Autran, ses parents Estelle Blanc, Sébastien Autran, sa sœur et son frère et leur famille, Cécile Autran, sa grand-mère, Jean-Marc et Liliane Przyswa, ses beaux-parents, 27 Elsa, sa femme, Valerio et Emma, ses enfants, Salvatore d’Acunto, son beau-fils, Alice et Ottavia, ses petites-filles, ont la très grande douleur de faire part du décès survenu à Bruxelles, le 18 novembre 2011, de Armando TOLEDANO LAREDO, ancien directeur au service juridique de la Commission européenne, Toute sa famille Et ses nombreux amis fraternels, ont l’immense douleur de faire part du décès brutal de leur très chère fidèle lecteur du Monde. Débat Delphine PRZYSWA, née AUTRAN, SOS Ecole Billancourt organise un débat avec Anne-Marie Châtelet, professeur à l’université de Strasbourg, autour du thème: « Architecture et pédagogie : 130 ans dans les écoles Ferry », le 3 décembre 2011, de 9 h 30 à 11 h 30, au lycée Etienne-Jules Marey 154, rue de Silly, 92100 Boulogne-Billancourt. survenu le 25 novembre 2011, dans sa trentième année. La cérémonie d’adieu se déroulera en l’église Sainte-Marie des Batignolles, Paris 17e, le mercredi 30 novembre 2011, à 13 heures. Rouiba l’Alma. Ladapeyre (Creuse). Larrivière-Saint-Savin (Landes). Exposition Jeanne-Marie, son épouse, Laurent et Alexandra, ses enfants, Clément, son petit-fils chéri, Christian, son frère, Les familles Riera, Gornes, Ses cousins, Ses amis, Rétrospective de l’œuvre de Deverne à l’hotel Frison, 37, rue Lebeau, à Bruxelles, du 3 au 23 décembre 2011. Communications diverses Le Centre communautaire de Paris : jeudi 1er décembre 2011, à 19 h 30, leçon « Les intellectuels contemporains face à la question juive » par Eric Marty. Tél. : 01 53 20 52 52. PAF. www.centrecomparis.com. ont l’immense tristesse de faire part du décès du colonel (h) Yves PURTSCHET, né le 3 novembre 1941 à l’Alma (Algérie), chevalier de la Légion d’honneur, officier de l’ordre national du Mérite, croix du combattant volontaire, croix du Mérite agricole, officier de l’ordre du Mérite centrafricain. Université populaire du quai Branly à Paris Saison 2011-2012 Prochains rendez-vous du théâtre Claude Lévi-Strauss Ses obsèques religieuses auront lieu le mercredi 30 novembre 2011, à 15 heures, en l’église de Larrivière-Saint-Savin. Histoire mondiale de la colonisation Jeudi 1er décembre, 18 h 30, Nasser, par Antoine Sfeir, journaliste, directeur des Cahiers de l’Orient. L’inhumation se fera au cimetière de Courbiac, à Villeneuve-sur-Lot (Lotet-Garonne), le jeudi 1 er décembre, à 10 heures. Jeudi 15 décembre, 18 h 30, Léopold Sédar Senghor, par Souleymane Bachir Diagne, philosophe sénégalais, professeur à l’Université Columbia. 220, route de Saint-Sever, 40270 Larrivière-Saint-Savin. Pierre et Christine Romestain, Michel et Marie-Thérèse Romestain, Suzanne et Pierre Denuelle, ses enfants, Ses petits-enfants, Ses arrière-petits-enfants, Grand Témoin Vendredi 16 décembre, 18 h 30, Charles Malamoud, directeur d’études honoraire des religions de l’Inde à l’Ecole pratique des Hautes Etudes : l’Inde millénaire et les Védas. ont la tristesse de faire part du décès de Entrée libre dans la limite des places disponibles. Renseignements : 01 56 61 70 00. www.quaibranly.fr Mme Madeleine ROMESTAIN, née DURAND, survenu le 13 novembre 2011, à l’âge de quatre-vingt-dix sept ans. Soutenance thèse La cérémonie religieuse a eu lieu le jeudi 17 novembre en l’église de Scionzier (Haute-Savoie), suivie de l’inhumation au cimetière de SaintGervais-les-Bains. Damien Degeorges, doctorant en science politique, jeune chercheur à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM), soutiendra une thèse sur « Le rôle du Groenland dans les enjeux de l’Arctique », le mercredi 30 novembre 2011, de 14 heures à 17 heures, à l’université Paris Descartes, Faculté de Droit, salle des Actes. www.legroenland.fr Cet avis tient lieu de faire-part. 201, boulevard Malesherbes, 75017 Paris. * ! $ 2 #1 "" $ ) 3 * 44 5 6 66 * + 7 ! !!" # $ ! ! % " &' % % ! $ ( ) %! ) * ) + ) , ) -! ) ./ ) 444. 9:;9+; %!# (0 ) . " ) 8 1 1 ) "" ! "1 ' # 1 ) <"" = 4>4>44 4 ? ! @+3 % ; A 74 B , ' !/ ! $ !!' ' $ ' " 3 C ' / 28 0123 0123 Mercredi 30 novembre 2011 La filière française du diamant Lettre de la City Marc Roche I l ne s’est jamais occupé de mines ni de gemmes. Il est né en France et non pas en Afrique du Sud, là où, un matin de 1866, un jeune garçon avait découvert un diamant de 21,25 carats qui avait déclenché la plus formidable ruée d’aventuriers mus par l’espoir insensé d’une fortune. Et, pourtant, le Français Philippe Mellier est celui que la famille Oppenheimer, l’Anglo American et le gouvernement du Botswana, les trois actionnaires de la De Beers, ont absolument voulu pour diriger la première compagnie diamantaire au monde. Il est vrai que ce Lyonnais de 56ans s’était forgé une image à la fois d’industriel et de gestionnaire de marque. Pourquoi cette vénérable compagnie, non cotée en Bourse, qui a inventé la filière diamant et continue de l’incarner, a-t-elle choisi un outsider ? « Le directeur général devait avoir un profil de manager international, au fait des négociations avec les gouvernements. Il devait aussi avoir une expérience de la production comme de la commercialisation… Par ailleurs, dans ma vie professionnelle antérieure, j’ai éprouvé les coups de tabac, les cycles, la rude concurrence. Je cochais beaucoup de cases », répond l’intéressé, qui a choisi de donner sa première interview depuis sa prise de fonctions en juillet 2011 au Monde. Le ton égal et l’allure tranquille surprennent, tout comme la simplicité d’un chef d’entreprise qui vous reçoit en bras de chemise. Notre interlocuteur semble un peu perdu dans les fastes immenses mais glacés de l’empire sud-africain des brillants. Pourtant, dans son bureau d’angle du 17Charterhouse Street, l’ambiance est chaude. Des toiles colorées des plus grands maîtres contemporains que l’intéressé a choisies dans la collection de la De Beers égayent le lieu. Des maquettes illustrent les étapes pivots de son parcours professionnel. Deux poids lourds Renault Magnum et Premium, les gammes de la Régie qu’il a fait évoluer lors de ses trois années à la tête de Renault VI puis de Renault Trucks. Le tramway de Lyon et le train du record du monde de vitesse, les trophées de sa présidence durant huit ans d’Alstom Transport. « Chaque train est unique… Mais on peut standardiser leur fabrication et il y a des leçons à tirer pour l’industrie minière», déclare celui qui se présente comme « un touche-à-tout ». En revanche, pas la moindre trace à la ronde d’un diamant DFlawless blanc, c’est-à-dire de la meilleure qualité. Lesdites marchandises sont enfermées dans les coffres du sous-sol de cet immeuble austère gardé comme Fort Knox. D’un directeur général d’une compagnie qui contrôle toute la chaîne diamantaire, de la mine à la bijouterie à l’exception de la taille et du polissage, on attend un grand mince au costume sur mesure, chemise blanche impeccable et cravate assortie. Son langage serait inévitablement châtié et les louvoiements seraient de règle. Philippe Mellier, lui, est un costaud aux larges épaules. Il est aussi direct, carré et méthodique, comme il sied à un diplômé de l’Ecole nationale supérieure des techniques avancées et de l’Institut européen d’administration des affaires de Fontainebleau. L’intéressé apparaît plus motivé par les pelleteuses, excavatrices et camions qui broient et transportent la kimberlite, la terre bleue diamantifère déchiquetée à coups d’explosifs, que par les pierres de légende des monarques et des stars. Reste que trois mois seulement après sa nomina- Le Français PhilippeMellier estcelui que les trois actionnaires de la DeBeers ont absolument voulu pour diriger la première compagnie diamantaire au monde tion surprise, à l’issue d’une tournée de toutes les mines du groupe en Afrique du Sud, en Namibie, au Botswana et au Canada, cet homme sort de l’ombre. Ainsi, le fils d’un directeur d’une entreprise de travaux publics montre avec une fierté désarmante la photo de la dernière découverte de la De Beers : un diamant exceptionnel de 198 carats sorti de la mine de Snap Lake, dans le Grand Nord canadien. Un « mastercutter » doit transformer cette pierre fabuleuse défiant la raison et le temps en brillants prêts à être sertis par les plus grands joailliers. « Sur 300 tonnes de minerais, on peut extraire, si on est chanceux, 60 grammes de diamants. On s’aperçoit de la complexité du processus qui demande humilité et passion. La détermination du prix – il n’existe pas de cours mondial – est un processus aussi complexe que de positionner une nouvelle voiture avec toutes ses options dans le marché automobile mondial. » L’establishment diamantaire, pour qui le nouveau venu n’avait pas tout à fait le genre de la maison, le reconnaît en bougonnant: «Philippe a vite appris. » Mais le premier producteur mondial en valeur, avec 35% du marché planétaire, a besoin d’un nouveau plan de bataille. Le groupe, qui a trop longtemps vécu sur sa réputation, s’est fait tailler des croupières par ses concurrents, le russe Alrosa ou l’anglo-australien Rio Tinto. Surtout, la vente au conglomérat minier Anglo American, le 4 novembre, par la famille fondatrice Oppenheimer de sa participation dans la De Beers a bouleversé la donne. Mellier avait été personnellement sélectionné par le président de De Beers, Nicky Oppenheimer. Au terme de la cession, qui devrait être conclue à l’été 2012, la De Beers deviendra une filiale d’« Anglo ». Philippe Mellier a l’intuition de la nécessité d’un renouvellement et en a les recettes. Anglo American lui en donnera-t-il les moyens ? p [email protected] C’est tout vu ! | Chronique télé par Isabelle Talès Braqueurs en série L es gyrophares tournent. D’un flash à l’autre, de chaîne en chaîne. Et quand l’un s’éloigne, un autre s’allume. Samedi 26 novembre, braquage mortel à Cannes; lundi matin, course-poursuite mortelle à Vitrolles ; lundi soir, braquage mortel à Marseille. Des reporters parlent devant une bijouterie, des entrepôts, un magasin de bricolage. Derrière eux, des scènes de crime, un pare-brise criblé de balles. Sur le plateau du « 20 heures » de France 2, David Pujadas s’interroge : « Faut-il parler de série noire ou de montée en puissance des braqueurs ? » Les gyrophares tournent. D’un prime time à une deuxième partie de soirée, de chaîne en chaîne. Et quand un film ou une série s’achève, un documentaire commence. Sur RTL, Braquage, de David Mamet (2001), histoire d’un as du cambriolage; sur Canal+, la saison 2 de « Braquo », série plus que noire; sur Jimmy, « Les Rois du casse», retour sur les fric-frac d’un autre siècle. On s’interroge aussi : faut-il parler de loi des séries ou de montée en puissance du braqueur, du flic, du voyou, voire du flic-voyou, dans notre imaginaire? Les films de hold-up sont vieux comme les hold-up eux-mêmes. On demande à l’histoire de compter autant de tiroirs qu’un coffrefort de combinaisons, mais sans être aussi hermétique qu’une banque helvétique ; on exige des braqueurs de cinéma qu’ils soient seulement des cerveaux et n’aient jamais de sang sur les mains. A ces scénarios sophistiqués – comme celui de David Mamet –, s’opposent les histoires simples qu’ont racontées les envoyés spéciaux : ultraviolence, armes de guerre, butins dérisoires. A cet égard, on a peut-être mieux compris, grâce aux « Rois du casse », pourquoi l’histoire du gang des Lyonnais est devenue un film de cinéma. Policiers, ex-braqueur et journalistes ont reconstitué minutieusement, pour le documentaire passionnant de Florence Nicol, le casse de la poste de Strasbourg, en juin1971. «Je suis admiratif, avoue le commissaire Charles Pellegrini. Avec du sang, des dégâts collatéraux, on n’aurait pas dit la même chose. Là, c’est un job bien fait. Pas moral, mais bien fait.» Pour toutes ces affaires, son ex-collègue Olivier Marchal, Les gyrophares tournent. D’un prime time à une deuxième partie de soirée, de chaîne en chaîne auteur du film Les Lyonnais, est sans doute le meilleur témoin. Dimanche soir, dans le journal de France 2, il a tenu à marquer la différence entre les voyous des années 1970 et ceux de 2011 : «C’est pas du tout ma came, ce genre de décérébrés qui tirent à tout-va. » On pourrait lui rétorquer que sa série « Braquo» est pleine de déprimés, de déglingués, de détraqués qui… tirent à tout-va. Et on a tellement l’habitude à chaque épisode de regarder les hommes, les femmes et les limites tomber qu’on s’est déjà surprise à imaginer le pire, qu’il arrive, et qu’on n’en soit pas fière. Pourtant, les images de vidéosurveillance montrant des braquages réels, diffusées dans les journaux lundi, nous ont paru plus violentes, plus dérangeantes encore. « Braquo », après tout, on peut l’éteindre. Dehors, les gyrophares continuent de tourner. p CONTREHISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE « Une histoire parallèle de la pensée qui réhabilite la tradition hédoniste et matérialiste, ressuscitant gnostiques, libertins baroques, Ultras des Lumières, socialistes dyonisiaques, hérétiques, libres esprits et autres illuminés. » Robert Maggiori, Libération (à propos des Sagesses antiques et du Christianisme hédoniste) « L’art de la philosophie buissonnière. » Aude Lancelin, Art Press (à propos des Libertins baroques) « Bonheur et violence de la pensée. » Franck Delorieux, L’Humanité (à propos des Sagesses antiques et du Christianisme hédoniste) « Un des rares auteurs à avoir le génie de sortir durablement la philosophie des salles de classes. » Stéphane Floccari, Le Magazine Littéraire (à propos des Sagesses antiques et du Christianisme hédoniste) A ne pas manquer sur 0123.fr a Environnement Sommet de Durban La 17e conférence de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques s’est ouverte à Durban (Afrique du Sud), le 28 novembre, pour deux semaines. Les représentants de 193 pays sont réunis pour lutter contre le réchauffement climatique. Suivez pendant toute la quinzaine l’évolution des négociations sur Lemonde.fr, en séquence Planète. (PHOTO : AFP) http://www.lemonde.fr/planete/ pTirage du Monde daté mardi 29 novembre 2011 : 365 627 exemplaires. 1 2 3 Michel Onfray Grasset