Reproductive Health Supplies Coalition

Transcription

Reproductive Health Supplies Coalition
Chaînes d'approvisionnement de
la santé dans les pays en
développement
ANALYSE DE SITUATION
ii
Remerciements
M. Paul Dowling du projet DELIVER/USAID est le principal auteur de ce rapport. L'auteur remercie les
personnes suivantes pour leur collaboration la relecture du projet de rapport : Kimberly Bardy et Kevin Pilz
de l'Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID), Maeve Magner de RTT, Andrew
Brown de l'Université of Canberra, Carmit Keddem et Naomi Printz de John Snow, Inc.
People That Deliver
La conférence intitulée “People That Deliver,” est une conférence mondiale destinée à améliorer les résultats
de la santé par la promotion de l'excellence de la main-d’œuvre dans la gestion de la chaîne
d'approvisionnement. Organisée par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la conférence est
principalement financée par USAID et la Reproductive Health Supplies Coalition (RHCS / Coalition pour les
Produits de la Santé Reproductive) par le biais de dons spécifiques attribués à Bioforce.
Référence
Dowling, Paul. 2011. Chaînes d'approvisionnement de la santé dans les pays en développement : analyse de situation. Arlington (Va) :
USAID | DELIVER PROJECT, Task Order 4.
Résumé analytique
Ce document examine la situation actuelle des chaînes d'approvisionnement de la santé dans les Pays à
Revenu Intermédiaire et/ou de la Tranche Inférieure (PRITI), la façon dont ces chaînes publiques et privées
sont organisées dans ces pays et comment elles opèrent par rapport à des indicateurs essentiels de
disponibilité et d'accessibilité. Ce document ne représente pas une analyse exhaustive de la façon dont la
performance des chaînes d'approvisionnement ou dont l'accès à la médecine peuvent être améliorés. Il s'agit
d'une large analyse de situation portant sur l’oranisation de ces chaînes d'approvisionnement à l'heure actuelle
et sur leurs résultats.
Photo en couverture : Pharmacies au Rwanda Prise par : Gary Steele, John Snow, Inc.
iii
Table des matières
INTRODUCTION...................................................................................................................................... 1
But ......................................................................................................................................................................... 1
Accès aux médicaments ......................................................................................................................................... 1
Champ d'application .............................................................................................................................................. 2
CHAINES D'APPROVISIONNEMENT DE LA SANTE DANS LES PAYS A REVENU
INTERMEDIAIRE, TRANCHE INFERIEURE (PRITI) : COMMENT SONT-ELLES
ORGANISEES ? ......................................................................................................................................... 4
Secteur public ........................................................................................................................................................ 4
Privé, à but non lucratif ......................................................................................................................................... 6
Privé, commercial .................................................................................................................................................. 7
LES CHAINES D'APPROVISIONNEMENT DES PRITI : ANALYSE COMPAREE ......................... 8
LE DEGRE DE PERFORMANCE DES CHAINES D'APPROVISIONNEMENT ........................... 12
Performance des chaînes d'approvisionnement dans les pays développés .......................................................... 12
Performance des chaînes d'approvisionnement dans les PRITI ............................................................................ 12
Problèmes de ressources humaines ..................................................................................................................... 14
INNOVATION DANS LES CHAINES D'APPROVISIONNEMENT DES PAYS A REVENU
INTERMEDIAIRE, TRANCHE INFERIEURE ................................................................................... 16
CONCLUSION ......................................................................................................................................... 17
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................... 18
Appendix A. Chaînes d’approvisionnement internationales ....................................................................... 20
iii
iv
Acronymes
3PL
prestataire logistique tierce partie
ARV
antirétroviral
ASC
agent de santé communautaire
MMC
dépots centraux de fournitures médicales
PEV
programme élargi de vaccination
OR
organisation religieuse
HAI
Health Action International
PRITI
Pays à Revenu Intermédiaire, Tranche Inférieure
SIGL
Système d'Information en Gestion de la Logistique
MDS
Ministère De la Santé
MSF
Médecins sans Frontières
ONG
Organisation Non Gouvernementale
MMR
dépôts régionaux de fournitures médicales
EMS
Entité de Marketing Social
TB
Tuberculose
UNICEF
Fonds des Nations Unies pour l'Enfance
USAID
Agence des États-Unis pour le Développement International
OMS
Organisation Mondiale de la Santé
v
vi
Introduction
Selon les estimations de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), environ un tiers de la population mondiale n'a pas
accès aux médicaments essentiels, ni aux systèmes de diagnostiques (OMS 2004). Dans les régions les plus pauvres
d'Afrique et d'Asie, ce chiffre se situe à 50%. Si le pourcentage de ceux qui n’ont pas accès aux soins a chuté de 1977 à
1997, le chiffre absolu lui est passé de 2,1 à 3,8 milliards (OMS 2004). L'amélioration de l'accès aux médicaments et aux
vaccins existants pourraient sauver quelques 10 millions de vies par an (OMS 2004i). L'accès aux médicaments reste l'une
des principales causes de mauvais résultats pour la santé et se répercute sur les capacités des pays à atteindre leurs
Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Si de nombreux facteurs influent sur l'accès aux médicaments,
les capacités des chaînes d'approvisionnement nationales à dresser des prévisions, passer des marchés et fournir des
médicaments essentiels et autres fournitures de santé restent une contrainte essentielle. Selon les prévisions, d'ici 2011 les
donateurs auront fournis quelque 10 milliards de dollars de médicaments aux pays en développement (Ballou-Aares
2008, Global Health 2008). L'impact de cet investissement sera déterminé en grande partie par les capacités des chaînes
d’approvisionnement à dresser efficacement des prévisions, à passer des marchés et à livrer ces fournitures là où elles
sont nécessaires.
But
Ce document examine la situation actuelle des chaînes d'approvisionnement de la santé dans les Pays à Revenu
Intermédiaire et/ou de la Tranche Inférieure (PRITI), la façon dont ces chaînes publiques et privées est organisée et
gérée dans ces pays et comment elles opèrent par rapport à des indicateurs essentiels de disponibilité et d'accessibilité. Ce
document n'est pas destiné à représenter une analyse exhaustive de la façon dont la performance des chaînes
d'approvisionnement ou dont l'accès à la médecine peut être amélioré. Il s'agit d'une large analyse de situation examinant
la façon dont ces chaînes d'approvisionnement sont organisées à l'heure actuelle et de leurs performances.
Accès aux médicaments
Les causes des problèmes d’accès aux médicaments sont complexes et n'ont pas uniquement trait à la performance de la
chaîne d'approvisionnement. Le cadre OMS pour l'accès aux médicaments (figure 1) cite quatre facteurs / éléments
spécifiques qui doivent être en place pour garantir la disponibilité et l'accès.
Figure 1. Cadre OMS pour l'accès aux médicaments
1
Encadré 1. Médicaments essentiels
Éléments indispensables :
1.
Sélection et utilisation rationnelles des médicaments
2.
Prix abordable pour tous les acteurs, y compris les malades
3.
Mécanismes de financement viables
4.
Systèmes de santé et approvisionnement fiables pour la mise
à disposition des medicaments aux utilisateurs
Si tous ces facteurs sont important en soi, ils sont aussi liés les uns aux
autres et transversaux. Par exemple, une sélection rationnelle garantira
que les produits les mieux appropriés sont sélectionnés en termes
d'efficacité, de qualité et de rentabilité, permettant un financement
plus durable et une accessibilité accrue.
Champ d'application
Les médicaments essentiels sont ceux
qui remplissent les besoins de santé
prioritaires des populations. Ils sont
choisis en tenant compte de leur
pertinence pour la santé publique, les
preuves de leur efficacité et inocuité et
leur rentabilité comparée. Les
médicaments essentiels sont destinés à
être disponibles dans le contexte de
systèmes de santé opérants, en
constance, en quantités adéquates, selon
des posologies appropriées, de qualité
garantie et avec des informations
adéquates, à un prix abordable pour la
communauté et pour le client.
Source: OMS (2004)
Dans ce document, la gestion de la chaîne d'approvisionnement se définit comme étant "l'ensemble des activités faisant passer
un produit (ici, des médicaments, des systèmes de diagnostiques et autres fournitures de santé) et ses services connexes
du fournisseur ultime au client ultime" (Jacoby 2009). Pour plus de simplicité, ce document emprunte le terme
médicaments pour ce tout qui a trait aux médicaments essentiels (encadré 1) et autres fournitures vitales de santé
nécessaires aux prestations de services : produits consommables, systèmes de diagnostiques, préservatifs, vaccins, etc.
Les principales fonctions de la chaîne d'approvisionnement se décries à la figure 2.
Figure 2. Le cycle logistique
Ces fonctions sont : la sélection des produits, quantification (ou prévisions), passation de marchés et achats, gestion de
stock, entreposage et distribution. Un Système d’Information en Gestion Logistique (SIGL) assure la liaison entre ces
éléments. Toutes ces fonctions doivent opérer de concert pour que l'offre réponde à la demande. Ces fonctions sont
conduites à différents niveaux dans un pays : central, régional/district et points de prestation de service. De plus, il peut
exister plusieurs chaînes d'approvisionnement distinctes opérant verticalement dans un pays, avec plusieurs points
d'intersection et de chevauchement et un ensemble disparate de parties prenantes. Le financement est un élément
essentiel de la chaîne d'approvisionnement, car la disponibilité de resources financiers détermine quelles fournitures
2
seront achetées, où et quand elles pourront être distribuées. Dans ce document, le financement est étudié 1) en termes
de financement durable pour la mise en place et l'entretien de chaînes d'approvisionnement fiables et adéquates, et 2) en
termes de coordination entre les systèmes de chaînes d'approvisionnement et les flux de financement afin d'assurer une
performance optimum.
3
Chaînes d'approvisionnement de la santé dans les Pays à Revenu Intermédiaire,
Tranche Inférieure (PRITI) : comment sont-elles organisées ?
Nous examinerons tout d'abord la structure des chaînes d'approvisionnement des médicaments dans les PRITI, puis
nous comparerons brièvement les buts des chaînes d’approvisionnement élaborés dans les pays industrialisés.
Dans la plupart des PRITI, les médicaments sont distribués par le biais de trois systèmes :
Public ou d'État
Privé à but non lucratif
Privé à but lucratif
L'annexe 1 présente le schéma simplifié d'une chaîne d'approvisionnement des médicaments d'un pays en
développement.
Secteur public
Selon les estimations, la part de médicaments distribuée par le biais du secteur public en Afrique subsaharienne se monte
à 33,2% (Bennett, Quick et Velásquez 1997). Ces chiffres varient sensiblement selon les pays, allant de 16% au Sénégal à
50% au Zimbabwe (Foster 1991). Les estimations plus récentes vont de 70 à 90% au Malawi, à 15% au Mali et à 10% au
Ghana (McCbe 2009). Mais les estimations fondées sur la valeur seraient trompeuses, car une grande partie des
médicaments distribués par le secteur privé est sans doute des médicaments de marque et novateurs, donc plus onéreux,
ce qui amplifie la part du privé.
Le principal modèle d'approvisionnement du secteur public dans les PRITI comprend les organismes publics ou
parapublics chargés de la passation des marchés et de la distribution des fournitures de santé aux points de vente du
secteur public. Ce genre de structure est souvent appelée Dépôt Central de Fournitures médicales (DCF) ou encore
Pharmacie d'Approvisionnement (ou un nom analogue) dans les pays francophones. Pour plus de simplicité, nous
emprunteront le terme DCF. Dans certains pays du Pacifique, les services de pharmacie des ministères remplisent ce rôle.
Le degré d'autonomie des DCF varie (Govindraj et Herbst 2010). Certains DCF (par ex. Ghana, Malawi) sont
presqueentièrement publics, gérés à titre de divisions du Ministère de la Santé (MdS), alors que d'autres possèdent une
grande autonomie opérationnelle et financière, par exemple la Centrale d'Achats des Médicaments Essentiels Génériques
et des Consommables Médicaux au Burkina Faso dont la direction est indépendante, bien que des représentants de l'État
siègent au conseil de direction. Quels que soient leurs buts lucratifs ou non, les DCF sont censés jouer un rôle dans
l'amélioration de l'accès aux médicaments et de leur disponibilité.
Le rôle et les responsabilités des DCF varient tout autant. La fonction classique d'un DCF consiste à stocker et à distribuer les
médicaments, à partir d'un site central, au niveau suivant de distribution, d'ordinaire au niveau régional ou de district, bien que
certains DCF exploitent aussi des dépôts régionaux (DRF), qui entreposent et distribuent les produits aux établissements de
santé. Le Malawi a trois DRF, alors que le Sénégal en exploite huit. Dans certains pays, les DRF sont chargés des passations de
marché et achats, dans d'autres il s'agit d'une Centrale d'achats distincte relevant souvent du MdS, alors que dans d'autres
encore, les achats sont tout ou partie décentralisés aux échelons inférieurs (par ex. au Ghana, la décentralisation est partielle, aux
Philippines, quasi totale).
Le processus de distribution est généralement piloté par le processus de commandes, régulières, soit mensuelles ou
trimestrielles, selon les instructions du MdS du pays. La visibilité est souvent restreinte quant à la demande réelle des
patients, aux stocks disponibles et à la façon dont les produits sont gérés dans ces établissements. Ces derniers sont
souvent sous la responsabilité d'un département de pharmacie distinct, au sein du MdS. Ces structures sont censées
mesurer la performance de ces établissements em matière de gestion de leurs médicaments. Toutefois, elles manquent
souvent de ressources, d'outils et de la capacité nécessaire pour s'acquitter de ces responsabilités.
Bien que les données soient restreintes, selon de nombreux commentateurs, un certain degré d'autonomie par rapport au
MdS est à l'avantage des DCF (Ballou-Aares 2008, Govindraj et Herbst 2010). Ceux qui ont moins d'autonomie par
rapport au secteur public sont confrontés aux difficultés suivantes :
attirer et conserver les professionnels pour cause de mauvais salaires et manque d'incitations
4
absence d'actionnaires, donc responsabilisation moindre
Le contre-argument ? Des DCF plus autonomes perdent leur fonction de service public et seraient davantage tentées de
se concentrer sur des activités lucratives au lieu de l'accès aux médicaments essentiels. Les DCF sont chargés de fournir
des médicaments aux établissements de santé publique. Ceux-ci passent leurs commandes directement au DCF ou elles
sont passées en leur nom par un niveau intermédiaire (par ex. au Malawi, les commandes des établissements sont
présentées aux districts qui les vérifient et les transmettent à l'un des trois DRF). Les chaînes d'approvisionnement du
secteur public suivent souvent des structures administratives ou bureaucratiques où les commandes sont souvent passées
aux échelons provinciaux et/ou de district et non pas aux là où la performance et la rentabilité pourraient être
optimisées. Les modèles de distribution sont soient en flux poussés où le DCF ou le MdS détermine le volume des
expéditions et leur échéance soit en flux tirés lorsque les établissement sanitaires , déclenchent les demandes de
commande et déterminent eux-même les quantitiés.
L'assemblage de « kits «, où des articles individuels et séparés sont conditionnés et expédiés ensemble en quantités
prédéterminées, reste la caractéristique de certaines chaînes d'approvisionnement dans les PRITI. Si ce système est
approprié dans les situations d'urgence où la rapidité est essentielle et où la demande ne peut être qu’estimée et les
déperditions tolérées. Mais pour les chaînes d'approvisionnement régulières, il n'est ni utilisé, ni approprié.
Alors que les pays s'orientent vers la décentralisation, la fonction des DCF pourrait changer ou même disparaître. Aux
Philippines, il n'y a pas de DCF. Les autorités locales achètent des médicaments directement aux fournisseurs locaux à
l'exception d'une quantité limitée de médicaments "prioritaires", y compris pour des programmes tels que le programme
élargi de vaccination (PEV) et pour la tuberculose (TB) qui sont approvisionnés par le ministère national de la Santé. Les
Philippines possèdent un réseau développé de distributeurs commerciaux. Si les achats locaux ont des avantages de délais
courts, et donc de moindres stocks, le morcellement de ces achats aboutit souvent à des coûts d'achat élevés. Un robuste
système d'enregistrement national des médicaments et d'assurance de qualité est également nécessaire pour garantir la
qualité des médicaments disponibles.
De nombreux programmes amplifient la gamme de leurs services et leur portée. Par exemple, ils encouragent les services
de santé communautaires, avec un encadrement composé d'Agents de Santé Communautaires (ASC) pour la prestation
de services dans leurs communautés. Au Pakistan, Lady Health Workers desservent les communautés locales, et en
Éthiopie, les « Health Extension Workers (HEW) » (agents de vulgarisation de la santé) travaillent à partir de
dispensaires communautaires ou postes de santé. Dans la plupart des cas, les ASC sont détachés par un établissement
central de santé auprès des formations sanitaires, ce qui ajoute un échelon supplémentaire à la chaîne
d'approvisionnement. Au Kenya, le nombre de sites offrant le conseil volontaire et dépistage du VIH est passé de 200 en
2003 à 4.000 en 2009, d'où de nouvelles difficultés pour ces chaînes d'approvisionnement déjà fragiles.
Vaccins/programme élargi de vaccination
L'acheminement des vaccins dans les PRITI passe d'ordinaire par une chaînes d'approvisionnement surtout verticale,
gérée par les programmes nationaux de PEV, souvent avec un appui technique du Fonds des Nations Unies pour
l'Enfance (UNICEF) et l'OMS. Cela en raison des caractéristiques uniques de produits (ici, les impératifs de la chaîne du
froid), bien que la nature de la distribution des vaccins (des campagnes de vaccination) est aussi un facteur. Les chaînes
d'approvisionnement de vaccins subissent de nouvelles pressions (Optimize 2009).
Des vaccins nouveaux, nettement plus onéreux, sont introduits.
Les caractéristiques de présentation des nouveaux produits, destinées à diminuer les déchets, par ex. les flacons
jetables et les seringues pré-remplies, prennent davantage de place dans les camions et les réfrigérateurs.
La tolérance aux déchets est moindre (pour certains vaccins, l'OMS cite des déchets allant jusqu'à 50%), les chaînes
d'approvisionnement des vaccins doivent donc être plus agiles avec une automatisation accrue. Mais sous un angle
positif, certains nouveaux vaccins n'ont pas besoin de réfrigération et leurs doses simples sont jetables, à l'inverse des
multipacks antérieurs, d'où une nette réduction des déchets. L'impératif d’efficacité accrue et d'une performance
améliorée ont conduit les responsables des chaînes d'approvisionnement du PEV à proposer une fusion entre ces
chaînes d'approvisionnement et celles des médicaments essentiels. Un programme pilote d'Optimize au Sénégal fait la
distribution des vaccins avec d'autres fournitures du programme (Dicko 2011).
Autres programmes verticaux
Si dans la plupart des pays, un DCF est chargé de la distribution des médicaments essentiels et autres fournitures, il peut
aussi exister plusieurs chaînes d'approvisionnement verticales, notamment pour certains programmes qui ne sont pas par
5
le DCF. Par exemple, dans de nombreux pays, les antirétroviraux (ARV) et autres fournitures pour le VIH/SIDA sont
distribués par une chaîne d'approvisionnement verticale. Dans de nombreux cas, les motivations de l'établissement
gérant ces chaînes d'approvisionnement verticales proviennent des préoccupations quant à la faiblesse de des chaînes
d'approvisionnement existante. Il s’agit aussi de la nécessité d’améliorer la performance de ces chaînes
d’approvisonnement et de la responsabilité en terme de priorités du programme, souvent établies et financées
directement par un donateur. L'attention et les ressources supplémentaires que reçoivent ces chaînes
d'approvisionnement signifient souvent une meilleure performance que dans le cas des médicaments essentiels Quelques
exemples de "verticalité" :
Au Malawi, les ARV sont distribués aux sites du secteur privé par une société de distribution commerciale
tierce sous-traitante de l'UNICEF.
Au Nigeria, les contraceptifs sont distribués par une chaîne d'approvisionnement verticale, exploitée par le
programme de santé de la reproduction, au niveau fédéral, régional, de district et local.
Dans de nombreux pays, certaines fonctions essentielles des chaînes d'approvisionnement (par ex. les
prévisions) sont exécutées séparément par des programmes (par ex. certaines fonctions sont verticales, d'autres
sont plus "intégrées").
Privé, à but non lucratif
Il existe souvent des chaînes d'approvisionnement de médicaments à but non lucratif, privées et autonomes, opérant
dans les PRITI. Par exemple, des systèmes exploités par des Organisations Religieuses (OR) et des Organisations Non
Gouvernementales (ONG) humanitaires et de développement, internationales ou locales, par ex. Médecins sans
Frontières (MSF), les filiales d'International Planned Parenthood, Save the Children, etc.. De plus, les Entités de
Marketing Social (EMS)1 peuvent exploiter des chaînes d'approvisionnement ou passer par des chaînes
d'approvisionnement commerciales pour distribuer une gamme restreinte de médicaments et de produits. Dans de
nombreux pays, les OR se sont regroupées pour exploiter des chaînes d'approvisionnement coopératives, par exemple
les Churches Health Associations (CHA) au Malawi, Ghana et Zambie. Au Ghana, la CHA fournit près de 30% des
soins par un réseau de 152 institutions (Ballou-Aares 2008) et exploite un dépôt central qui se procure les produits
localement auprès de distributeurs privés ou du DCF.
Ces organisations à but non lucratif achètent souvent les produits à l'étranger par des agences d'achat, par exemple la
fondation IDA ou Mission Pharma. Leurs achats de médicaments se font souvent sur les fonds de donateurs ou des
dons en nature (par ex. l'UNICEF, le FNUAP, et Agence des États-Unis pour le Développement International
(USAID). Alors que les donateurs s'orientent vers un appui budgétaire direct aux gouvernements (par ex. fonds
sectoriels), ils s'appuient de plus en plus sur les fonds de l'État ou sur l'accès aux médicaments du secteur public. Ils sont
d'ordinaire tributaires du recouvrement des coûts quant à une partie de leur financement et s'efforcent de garder des prix
abordables. L'accès au financement des achats est parfois difficile, car le pouvoir d'achat des bénéficiaires restreint la
viabilité du recouvrement des coûts. Les installations des OR sont parfois affiliées au secteur public (par ex. Malawi), les
ONG peuvent gérer des installations du secteur public (Liberia) ou les EMS peuvent approvisionner les établissements
publics (Philippines), ce qui brouille d'autant plus la distinction entre les filières publiques et privées. Il existe peu de
donnée sur les résultats de performance de ces chaînes d'approvisionnement. Les ONG internationales telles que MSF
sont connues pour leurs capacités logistiques, alors que des organisations nationales telles que Church Health
Associations souffrent d'un manque de ressources.
1
Le marketing social est l'application des techniques de marketing commerciales pour promouvoir des
comportements visant à améliorer la santé publique. Les EMS distribuent des médicaments subventionnés (par ex.
préservateurs, moustiquaires, sels de réhydratation orale) soit par leurs propres chaînes d'approvisionnement ou
par des distributeurs commerciaux existants.
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Privé, commercial
La structure et l'importance des chaînes d'approvisionnement commerciales pour les médicaments varient selon les pays.
Mais le pouvoir d'achat du public limite leur importance dans tous les PRITI. Les exemples ci-dessous illustrent la
disparité des modèles commerciaux existants.
Au Mali, le marché commercial des produits pharmaceutiques est nettement consolidé : deux grossistes contrôle environ
80% du marché (McCabe 2009). Ils approvisionnent environ 400 pharmacies indépendantes sur tout le territoire, avec
des livraisons quotidiennes directes à celles de Bamako et les distributeurs indépendants dans le reste du pays. En
revanche, le marché commercial au Ghana est plus morcelé : 60 importateurs et 166 grossistes qui approvisionnent
environ 700 pharmacies et plus de 11.000 officines.2 Au Malawi, il y a 22 importateurs/grossistes. L'UNICEF distribue des ARV
aux établissements du secteur privé par le biais d'un réseau commercial. Ce système est exploité par une société de fret et
l'UNICEF assure l'encadrement pharmaceutique.
Dans de nombreux pays, les établissements du secteur privé achètent leurs fournitures auprès du secteur commercial.
Souvent, comme par exemple au Malawi et au Ghana, ce n'est permis qu'en cas de rupture de stock du DCF pour
l'article en question. Mais l'application de cette règlementation est douteuse. En outre, les chaînes d'approvisionnement
du secteur public peuvent approvisionner les points de vente commerciaux ou autres, privés.
2
Les officines sont des points de vente qui ne sont pas exploités par des pharmaciens brevetés, et sont autorisées
à vendre uniquement un nombre restreint de médicaments.
7
Les chaînes d'approvisionnement des PRITI : analyse comparée
Il existe plusieurs façons de se pencher sur les chaînes d'approvisionnement afin d’en évaluer leur performance. Ce
document opte pour deux méthodes afin d'analyser les caractéristiques de ces chaînes d'approvisionnement de
médicaments : la première par une analyse des différentes fonctions de la chaîne d'approvisionnement et la seconde en
examinant les caractéristiques idéales de chaînes d'approvisionnement performantes.
La comparaison entre les chaînes d'approvisionnement des PRIT et des pays industrialisés est inclue à titre
d'information. Il convient de noter que l'organisation et le financement des chaînes d'approvisionnement des PRITI et
des pays développés sont diamétralement différents. La chaînes d'approvisionnement aux États-Unis se caractérisent par
une forte automatisation et une utilisation importante de la technologie, une haute performance en termes de
disponibilité, de stocks dégraissés (stocks mesurés en jours), de hauts niveaux d'efficacité, de livraisons quotidiennes ou
plus fréquentes ainsi qu d’un accent croissant mis sur la sécurité, l'assurance qualité et un degré élevé de participation du
secteur privé et commercial. La visibilité des niveaux de stocksest très élevée. La chaîne d'approvisionnement des
médicaments aux États-Unis bénéficie de bonnes ressources, les fournitures sont d'ordinaire disponibles pour répondre à
la demande, la plus grande partie de la chaînes d'approvisionnement est externalisée ou directement exploitée par le
secteur commercial, et la gestion des chaînes d'approvisionnement est considérée comme une fonction commerciale
essentielle.
Comparaison des fonctions des chaînes d'approvisionnement
Le tableau 1 présente un synopsis comparé de la situation des chaînes d'approvisionnement des pays industrialisés et de
celles des pays en développement, classé par fonctions des chaînes d'approvisionnement.
Tableau 1. Comparaison des chaînes d'approvisionnement des médicaments des pays
développés et des PRITI
Fonction
Sélection
Développé
Réglementé par des organisme
decontrôle des médicaments pouvant
être distribués et/ou commercialisés
Les praticiens médicaux peuvent
prescrire, mais les payeurs tiers
jouent un rôle par le biais des
politiques de remboursement
(couverture sociale / assurance
maladie)
PRITI
Capacité limitée d'application des politiques et des
réglementations nationales
Prépondérance de la liste nationale des médicaments
essentiels (pour le secteur public) avec toutefois de
nombreuses exceptions
Directives de traitement standard : éléments déterminants
importants
Prévisions
Conduites par les fabricants pour
planifier la production
Exécution par des acheteurs nationaux (DCF) ou par les
programmes eux-mêmes, mais sous contraintes du fait du
manque de données sur la demande ou de la difficulté à
estimer la demande véritable en raison d'une offre limitée
Achats
Contrats-cadre avec plusieurs
distributeurs, permettant une
captation de volume variable selon la
demande en temps réel
Achats de volume fixe fondés sur les prévisions de la demande
et/ou le financement disponible, d'ordinaire annuel
Capacité restreinte d'achats d'urgence
Achats publics sur des fonds de partie tierce, relevant souvent
des règlements de la Banque mondiale (prêts)
Achats souvent morcelés entre le gouvernement et (plusieurs)
8
Fonction
Développé
PRITI
donateurs
Recours éventuel à des agents d'achat
Qualité des
médicaments
Autorisations réglementaires exigées
Degré élevé d'assurance qualité
Nouvelle technologie déployée pour
contrer la contrefaçon
Les parties tierces imposent des impératifs sévère des
autorités de réglementation, ou sinon aval réglementaire
national
Essais sur des lots à étoffer
Capacités limitées ou non accréditées des laboratoires
nationaux à tester les medicaments et produits
Pharmacovigilance limitée
Contrefaçons, détournement de produits et problèmes de qualité
Entreposage
Capacité élevée
Capacité limitée, souvent mauvaises conditions de stockage
Distribution
Livraison quotidienne (ou plus
fréquente)
Fréquence de livraison : mensuelle ou trimestrielle
La collecte n'est pas pratiquée
normalement
Dans le secteur public, les échelons inférieurs doivent souvent
collecter
Gestion des
stocks
Niveaux minimum, maximum des
stocks mesurés en jours, d'où des
systèmes très éfficaces, taux de
roulement élevés
Systèmes automatisés
Capacité limitée de transport
Niveaux minimum, maximum des stocks mesurés en mois,
d'où des systèmes peu éfficaces, stocks onéreux, taux de
roulement peu élevés
Systèmes surtout manuels, automatisation éventuelle à
l'échelon central ou parfois aux niveaux intermédiaires
PRITI
Haut degré d'automatisation d’où
visibilité en temps réel ou quasi-réel
des données de l'offre et de la
demande
Degré limité d'automatisation d’où visibilité restreinte des
données, mauvaise qualité des données ou obsolescence
Coordination
Haut degré de coordination, facilité
par les données visibles et les
relations étroites entre les systèmes
d’information
Coordination limitée, doublons fréquents et pertes
Partenaires multiples fournissant souvent la même chaînes
d'approvisionnement, avec partage de données et visibilité
limités, d'où problèmes
Comparaison des caractéristiques des chaînes d'approvisionnement
Une autre comparaison des chaînes d'approvisionnement consiste à voir dans quelle mesure elles présentent des
caractéristiques souhaitables (USAID/Projet DELIVER 2011). Une chaîne d'approvisionnement intégrée ou
transparente, où les liens et les jonctions entre les fonctions, niveaux et partenaires sont réduits au minimum dans le but
ultime de rapprocher l'offre de la demande, est considérée idéale. Les caractéristiques souhaitables d'une chaîne
d'approvisionnement, définies ici, sont les suivantes :
Clarté des rôles et des responsabilités de la chaîne d'approvisionnement : les rôles, responsabilités et procédures
sont-ils clairement documentés et compris ?
Processus rationalisés : Les systèmes sont-ils optimaux ? Les échelons et procédés non productifs sont-ils
éliminés ?
Confiance et collaboration : Les partenaires se font-ils confiance ? Collaborent-ils ? Coordonnent-ils et partagentils les données ?
9
Agilité ou souplesse : La chaîne d'approvisionnement peut-elle réagir rapidement aux changements de l'offre et
de la demande ?
Visibilité : Les données de la chaîne d'approvisionnement (offre, demande, financement) sont-elles visibles de
bout en bout de la chaînes d'approvisionnement, pour tous ?
Alignement des objectifs et des incitations : Les partenaires partagent-ils les mêmes objectifs et existe-t-il des
incitations en place pour faire ce qu'il faudrait faire pour améliorer la performance ?
Le tableau 2 récapitule ces caractéristiques pour les chaînes d'approvisionnement des pays développés et des pays en
développement.
Tableau 2. Caractéristiques des chaînes d'approvisionnement des pays développés et des
pays en développement
Caractéristique
Visibilité
Développé
Bonne visibilité intérieure et extérieure3
PRITI
Mouvance de la visibilité interne, mais médiocre en
général, visibilité extérieure mauvaise
Données souvent de mauvaise qualité, incomplètes
et inopportunes
Importance des relevés périodiques
Alignement des
incitations/objectifs
Maximum
Concurrence faisant office d'incitation
Surveillance régulière faisant office
d'incitation
Confiance et collaboration
Clarté des rôles et des
responsabilités
Nombre élevé de partenaires et d'organisations
concernés entraîne des difficultés d'alignement
L'absence de données sur les performances n’incite
pas les acteurs à l’amélioration du système
Degrés élevés de confiance entre les
partenaires de la chaîne
d'approvisionnement
Peut-être peu de confiance
Partage de données en temps réel
Pénuries et ruptures de stock, d'où perte de
confiance
Systèmes et rôles documentés et
clairement compris
Systèmes faibles, rôles mal définis, procédures
souvent ad hoc
Personnel bien formé
Personnel dénué des compétences nécessaires
Réticence au partage de données
La mobilité importante du personnel aggrave les
difficultés
Responsabilités dévolues à plusieurs organismes
et/ou personnes, d'où perte de focalisation
Agilité/souplesse
Systèmes très souples pouvant réagir
rapidement à la demande réelle
Systèmes rigides aux longs délais, livraisons peu
fréquentes, données médiocres
3
Dans une enquête auprès des partenaires pharmaceutiques aux États-Unis, la grande majorité des personnes
interrogées déclarait pouvoir obtenir des informations de la chaîne d'approvisionnement dans les trois jours
ouvrés : 19% ont déclaré avoir des données en temps réel, et 66%, des données en temps réel mais devoir les
agréger à la main.
10
Caractéristique
Rationalisation
Développé
Systèmes très rationalisés, conception
fondée sur l'optimisation des
ressources et de la performance
PRITI
Systèmes très inefficaces, multistrates, nombreuses
étapes bureaucratiques
Réseaux de chaînes d'approvisionnement souvent
fondés sur des structures bureaucratiques lourdes
aboutissant à l’inefficacité
11
Le degré de performance des chaînes d'approvisionnement
Cette section se penche sur la performance des chaînes d'approvisionnement dans les PRITI, à partir des résultats :
disponibilité et accessibilité
Performance des chaînes d'approvisionnement dans les pays développés
Pour donner une certaine perspective sur la performance des chaînes d'approvisionnement, il est utile d'examiner la les
indicateurs de performance des pays développés. La plus courante est celle du taux d'exécution des commandes : le
pourcentage de commandes exécutée en un laps de temps précis. Aux États-Unis, le taux d'exécution des commandes
d'une pharmacie par un distributeur en 24 heures est de 95%. Les taux d'exécution des détaillants pour leurs clients sont
supérieurs à 99% (supérieurs parce que le détaillant possède aussi des stocks) (Healthcare Distribution Management
Association 2004). Selon un sondage dans les pays de l'Union européenne, 96% des commandes passées sont exécutées
dans les 45 minutes qui suivent (Clement, Tuma et Walter 2005). En raison du grand nombre d'articles en stock (45.000
unités d'inventaire dans un point de vente type) et de leur coût, les points de vente aux États-Unis ont des stocks
restreints et les commandes sont fréquentes, parfois plusieurs fois par jour. Les niveaux des stocks se mesurent en jours,
par opposition aux pays en développement où ils sont mesurés en mois en raison des cycles de commande peu fréquents
et des longs délais. Pour les chaînes d'approvisionnement de médicaments des pays développés, la disponibilité est un
quasi-acquis, la performance porte sur l’éfficacité et la qualité. Aux États-Unis, les distributeurs de gros signalent que
leurs coûts nets représentent dans l'ensemble moins de 2% de la valeur totale délivrée (Healthcare Distribution
Management Association 2004).
Performance des chaînes d'approvisionnement dans les PRITI
L'évaluation de la performance des chaînes d'approvisionnement des PRITI se heurte à plusieurs facteurs : 1) absence de
données sur la performance, et 2) présence de plusieurs facteurs de confusion ayant une incidence sur la disponibilité des
médicaments, notamment le financement.
Données de performance : De nombreuses chaînes d'approvisionnement nationales ne surveillent, ni ne rendent
compte régulièrement de leur performance.. En soi, c'est un indicateur important de performance sous-optimale. Si
surveillance il y a, elle se fonde souvent sur des données de relevé périodique, pour un nombre d'indicateurs restreint.
Facteurs de confusion : Il est souvent difficile de dire si la performance (disponibilité des médicaments) est tributaire
des facteurs de la chaîne d'approvisionnement ou d'autres facteurs, notamment un financement insuffisant des
fournitures.
Les taux d'exécution des commandes des PRITI sont rarement disponibles. Au Cameroun, le taux d'exécution des
commande du DCF sur 6 mois était de 69,5%, et pour le DCF au Sénégal, de 65% en 2005 et de 49% en 1995. La
mesure la plus courante de la performance des chaînes d'approvisionnement dans les pays en développement reste le
taux de rupture de stock : la proportion de sites en rupture de stock d'un article donné, le jour du sondage. Les
établissements sont réapprovisionnés peu fréquemment (des mois s'écoulent entre les livraisons) et les options pour les
malades sont limitées, une rupture de stock peut donc avoir des conséquences profondes pour la santé. Les ruptures de
stock sont d'ordinaire évaluées sur un nombre restreint d'articles (ou traceurs), choisis en raison de leur importance
sanitaire.
L'OMS et Health Action International (HAI) ont élaboré une méthodologie standardiséee pour évaluer l'accès aux
médicaments à partir de sondages sur les prix, la disponibilité et l'accessibilité. Les médicaments suivis / étudiés comprennent
une liste standard de médicaments essentiels, choisis pour refléter les traitements de troubles aigus et chroniques courants dans
un pays, et qui contribuent sensiblement à la morbidité et à la mortalité. Les sondages sont réalisés à partir d’un échantillon
représentatif d'établissements publics et privés. L'analyse secondaire de 45 enquêtes utilisant cette méthodologie (A. Cameron,
M. Ewen, D. Ross-Degnan, D. Ball, R. Laing 2008) révèle que (figure 3) :
Pour un panier de médicaments essentiels, la disponibilité moyenne dans le secteur public allait de 38,2% en
Afrique subsaharienne, à 57,7% en Amérique Latine et dans les Caraïbes.
Dans le secteur privé, elle allait de 44,5% en Asie de l'Est, du Sud-Est et du Sud, à 79,4% en Asie Centrale.
La disponibilité moyenne d'ensemble était plus élevée dans le secteur privé (63,2%) que dans le secteur public
(34,9%).
12
Figure 3. Disponibilité des paniers de médicaments, secteurs publics et privés
100
90
81
80
70
100
95.1
74.9
64.3
60
58.9
52.5
50
40
88
61.5
57.7
53.8
69.2
65.1
60.9
75
85
79.4
71.2
61.1
Minimum
44.5
38.6
38.2
20
17.9
10
37.5
13.6
Public
Maximum
10
3.3
0
Privé
Moyenne
32.9
21.2
0
Public
80
70
30
0
98.2
Privé
Public
Privé
Public
Privé
Public
Privé
0
0
Public
Privé
Afrique du Nord
Afrique
Amérique latine Asie centrale Asie de l'Est, du Asie de l'Ouest
subsaharienne et les Caraïbes
Sud-Est et du
Programme élargi de vaccination/immunisation
Sud
Les données sur la performance des chaînes d'approvisionnement des vaccins sont limitées. Mais il est claire que nombre
des faiblesses des chaînes d'approvisionnement des médicaments essentiels sont également celles des chaînes
d'approvisionnement des vaccins. Selon une étude en Gambie sur les opportunités manquées de vaccination, les pénuries
de vaccins sont la principale raison de la non vaccination (Gambie 2004). Une intervention de VillageReach au
Mozambique signale des ruptures de stocks de vaccins (2002) à hauteur de 80%, dans une province (VillageReach 2011).
En 2011, certains districts en Ouganda signalent des ruptures de stocks de vaccins allant jusqu'à trois mois, y compris les
vaccins importants : polio, TB, diphtérie, tétanos, rougeole et coqueluche (Vision Reporters 2011). Parallèlement, le MdS
signale que les ruptures ne sont pas le résultat de pénuries mais de problèmes de distribution. Une récente analyse de 42
évaluations de gestion des dépôts de vaccins, réalisée entre 2003 et 2007 (Optimize 2008) indique de nombreuses
carences dans plusieurs domaines critiques : mauvaise gestion des arrivées de vaccins, mauvaise planification de
l'entretien du matériel, absence de transports et mauvais inventaires. Selon cette analyse, la plupart des problémes se
situaient dans la gestion.
Disponibilité des fournitures de programme
Comme indiqué ci-dessus, il existerait des programmes spéciaux pour le secteur public doté de chaînes
d'approvisionnement verticales en partie. Ces chaînes d'approvisionnement font peut-être l'objet d'une attention
particulière, et de davantage de ressources, et le nombre d'articles géré est d'ordinaire restreint, d'où une performance
meilleure que celle des autres médicaments essentiels. Par exemple, de nombreux programmes du VIH ont une
excellente disponibilité (tout du moins dans les limites de l'enveloppe de financement disponible (par ex. le nombre de
malades en traitement). C'est pour cette raison que les enquêtes OMS/HAI ne tiennent pas compte de ces articles de
"programme" car la performance n'est pas évaluative de celle de l'ensemble du système.
Accessibilité
L'accessibilité (en terme de prix) est un autre indicateur courantde l'accès aux médicaments. Les résultats concernant les
prix, dans les enquêtes OMS/HAI, sont présentés de la manière suivante:
13
- Ratio du prix médian d'un médicament dans les points de vente par rapport à celui du prix de de référence moyen
international de Management Sciences for Health pour l'année précédant l'enquête.
Si dans de nombreux systèmes du secteur public, les médicaments sont gratuits ; dans les systèmes payants, le ratio de
prix médians pour un panier de 15 médicaments allait de 3,18 aux Amériques à 11,95 dans les pays du Pacifique Ouest.
Dans le secteur privé, les ratios moyens de prix (pour les génériques les moins onéreux disponibles) étaient plus élevés,
allant de 8,69 en région européenne à 25,21 aux Amériques (OMS 2004ii) (figure 4).
Figure 4. Ratios de prix médians des prix d'achat du secteur public et les prix des génériques
les moins onéreux dans les secteurs public et privé, par région OMS
Ratio de prix médian au prix de référence international du MdS Générique au prix le plus bas (GPB)
Les marges sont élevées, les médicaments sont souvent inabordables et si la disponibilité dans le secteur privé est
supérieure à celle du secteur public, ce facteur positif est contrebalancé par des prix plus élevés, ce qui réduit l'accès.
Une évaluation de l'accessibilité dans les pays développés ne relève pas du champ de ce document. Si les médicaments
sont onéreux, il existe de nombreux barèmes de paiement, et les dépenses directes des ménages ne sont d'ordinaire
qu'une fraction du prix.
Problèmes de ressources humaines
Une prise de conscience se fait sur la nécessité de porter une plus grande attention aux impératifs de ressources
humaines dans les chaînes d'approvisionnement de santé.
Les questions suivantes : insuffisance des effectifs et de la formation, isolement géographique et professionnel dans des
régions rurales et éloignées, absence de supervision et de contact avec les niveaux supérieurs, qualité médiocre des
installations professionnelles et personnelles, salaires, conditions et charge de travail, sont toutes importantes et ont une
incidence sur la satisfaction des personnels de santé, et de leur capacité à s'acquitter de leurs fonctions de façon
satisfaisante (Hawthorne et Anderson 2009, OMS 2010). Pour les personnels chargés de la chaîne d'approvisionnement,
les problèmes sont encore plus prononcés en raison d'un manque généralisé d'attention accordé aux compétences en
matière de chaîne d'approvisionnement. De ce fait, les personnels de santé n’ont pas la capacité, ni les connaissances
pour gérer et maintenir les chaînes d’approvisionnement. De plus, ces professionnels n’ont pas pratiquement pas de
14
perspective d’avancement ou de promotion dans les MdS. De plus en plus dans de nombreux pays, l'on comprend que
l’amélioration des systèmes de santé passe par la necéssité de porter attention à ces problèmes de main-d'œuvre et de
personnel. Le premier Forum mondial des ressources humaines pour la santé, qui s'est tenu en Ouganda en 2008, a
avalisé la déclaration de Kampala et le programme d'action mondiale dans ce domaine. Le deuxième Forum des
ressources humaines s'est tenu en 2010 à Bangkok et a maintenu l'accent sur l'importance du développement des
ressources humaines. L'initiative People that Deliver 4 centre les intérêts, les concepts et les ressources des partenaires du
développement sur les questions spécifiques de ressources humaines pour la gestion des chaînes d'approvisionnement de
la santé.
4
Cf. www.peoplethatdeliver.org/.
15
Innovation dans les chaînes d'approvisionnement des pays à revenu intermédiaire,
tranche inférieure
Si l'innovation est limitée, il existe pourtant un certain nombre de développements importants dans les chaînes
d'approvisionnement de médicaments dans les pays en développement :
Santé mobile : Plusieurs pays renforcent le compte-rendu de données logistiques par le biais de technologies mobiles et
en particulier des portables (USAID/Projet DELIVER 2010). L'utilisation généralisée de portables permet d'améliorer la
qualité et l'opportunité des rapports de données logistiques et autres.
Modèles de stocks gérés par les fournisseurs : au Zimbabwe pour certains produits de planning familial et pour le
VIH (USAID/Projet DELIVER 2008) ainsi qu’au Sénégal par Optimize pour le PEV et les fournitures de programme,
plusieurs fonctions logistiques sont confiés à des prestataires de service, de la meme manière que dans le secteur
commercial/privé. Ce "transfert de tâches" réduit la charge de travail du personnel de la santé, mais ne serait viable que
pour un nombre restreint de médicaments.
Système de gestion informatique : Les SGIL sur l’internet, avec des rapports de données logistiques en ligne (par ex.
au Bangladesh pour les contraceptifs) permettraient d'améliorer la visibilité des données, caractéristique essentielle de
chaînes d'approvisionnement fonctionnelles. Le projet Supply Chain Management Systems informatise les systèmes
d'entrepôts de nombreux DCF.
Intégration des produits : La réussite des efforts de l'amélioration de la performance des programmes verticaux (par
ex. pour de nombreux programmes pour le VIH) a également permis de mettre en relief les points faibles de la chaîne
d'approvisionnement d'ensemble des médicaments essentiels. L'accent est renouvelé aujourd'hui sur le renforcement
d'ensemble des chaînes d'approvisionnement de la santé, pour tous les médicaments et sur l’intégration de tout ou partie
des systèmes verticaux pour en améliorer l’éfficacité.
Partenariat avec le secteur privé/externalisation : Le partenariat et la sous-traitance de certaines fonctions logistique
par des prestataires logistiques (3PL) sont considérés comme les meilleures pratiques dans les cadres commerciaux et
dans les pays développés. Mais leur application dans les pays en développement, pour les médicaments, est limitée. Les
capacités du secteur privé à fournir des services de qualité et les capacités du secteur public pour gérer ces contrats sont
restraintes. De plus, ces deux parties hésitent souvent à passer des contrats. Néanmoins, il existe plusieurs exemples :
l'UNICEF sous-traite la distribution des ARV au Malawi à un 3PL. Au Bangladesh et au Nigeria, les unités de planning
familial externalisent à des 3PL la distribution de leurs produits.
Achats souples : Les chaînes d'approvisionnement doivent disposer de mécanismes agiles, et souples d'achats, pouvant
fournir des produits de qualité à un coût abordable et au moment voulu. Plusieurs initiatives de renforcement des achats
nationaux, y compris des achats groupés (par ex., le Voluntary Pooled Procurement Mechanism du Fonds mondial,
Global Drug Facility pour les médicaments contre la TB) utilisent des contrats-cadre et une externalisation, et font
l'objet d'une attention accrue.
16
Conclusion
La non disponibilité des médicaments est un facteur important dans les mauvais résultats de santé des PRITI. Si les
causes en sont complexes (ressources humaines inadéquates, systèmes de santé faibles, mauvais accès aux services,
manque de financements), toutefois la faible performance des chaînes d'approvisionnement est à l'évidence un handicap
majeur. Un investissement accru des donateurs et des pouvoirs publics dans la passation de marchés des médicaments
doit s'accompagner d'investissements dans les chaînes d'approvisionnement et dans les personnels des PRITI pour
mettre sur pied des chaînes d'approvisionnement performantes, plus souples et transparentes. Cela signifie qu'il faut
renforcer les chaînes d'approvisionnement existantes, investir dans l'infrastructure, introduire de nouvelles technologies
et de nouveaux systèmes de financement, innover, élargir le rôle du secteur privé et intégrer intelligemment les systèmes
actuels verticaux. Tous ces efforts seront fondés sur des capacités de ressources humaines accrues. Les chaînes
d'approvisionnement de médicaments sont des chaînes d'approvisionnement pour les êtres humains et sont tributaires
des intrants financiers et techniques, certes, mais aussi du renforcement des capacités des personnels qui les gérent.
17
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19
Appendix A. Chaînes d’approvisionnement internationales
20