ils le font dans votre journal
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« Prenez le pouvoir » Durant tout le week-end, une centaine de jeunes ont pris les commandes de votre quotidien. Ils l’ont écrit de A à Z et sont allés interroger le candidat du Front de gauche. PAGE 2 VILLEPINTE Lors de son meeting, Sarkozy a bien compris le FN... P. 6 LIBERTÉS Ikea réprime les syndicalistes qui révèlent l’envers du décor. P. 8 3:HIKKLB=UUVYU\:?a@n@b@c@k; SYRIE La diplomatie de Kofi Annan n’arrête pas le massacre. P. 15 BD BELGIQUE 1,50 € PORT. CONT. 2 € ANTILLES-RÉUNIONGUYANE 2 € ITALIE 1,90 € ESPAGNE 1,90 € GRÈCE 1,90 € MAROC 14 DH SYRIE 2,15 € LUXEMBOURG 1,50 € Annonces légales et judiciaires en page 14. Mœbius/Giraud. Un mort, deux orphelins, l’Incal et Blueberry. P. 21 L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . N ° 2 0 8 7 4 . 1 , 4 0 € Les photos des jeunes correspondants de l'Humanité ont été réalisées par Bruno Arbesu et Caroline Doutre. ILS LE FONT DANS VOTRE JOURNAL M 00110 - 312 - F: 1,40 E Pierre Pytkowicz Jean-Luc Mélenchon aux jeunes : 2 Éditorial L’Humanité, une idée toujours jeune Événement ILS ONT RÉALISÉ L’ENTRETIEN ET ILS RACONTENT LEUR FRONT DE GAUCHE FAIROUZ GUEDOUAR, LUDOVIC BERTON, CASSANDRE CLERBOUT ALESSAN VITULLO 23 ans. 21 ans. 22 ans. 23 ans RENCONTRE AVEC LE CANDIDAT. RÉMI ZANNI, 24 2 ans, 23 2 ans. L e numéro de l’Humanité de ce matin est un peu spécial : il a été entièrement écrit par une centaine de jeunes, comme une fois l’an, pendant l’opération Libres échanges, unique en Europe. Nous avons débarqué rue Ambroise-Croizat, non comme la meute dangereuse médiatiquement décriée mais comme une force d’avenir. Nous avons, gracieusement, remplacé vos journalistes habituels et servi de porte-voix à une génération trop souvent oubliée des médias, trop souvent sujette du discours public sans en être actrice. Et ça marche ! Encouragés par Jean-Luc Mélenchon lors de l’entretien qu’il a bien voulu nous accorder, dans le contexte politique chargé de la campagne présidentielle, nous avons apporté une vision différente de l’actualité : écologie, féminisme, luttes sociales et syndicales, éducation, travail, banlieues… Nous prenons Nous avons collectivement notre place dans le assumé une position flot des générations, progressiste aux antipodes de l’actuel président dans l’histoire candidat, de son meeting du combat pour « de la dernière chance » à Villepinte et de cette l’émancipation. France des « trop » : trop bling-bling, trop au service de la bourgeoisie et de la finance, trop impopulaire, trop antisyndicale, trop autoritaire. Puisque nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, sur nos luttes, pour mettre fin au règne des gros et des gavés, à cette logique capitaliste, la France qui se bat constitue la matière première de nos articles – gageons que nos aînés n’y trouveront rien à redire. Nous, jeunes, en sommes le futur. Il nous appartient de reconstruire un pays, un continent, dont les institutions, les sociétés, les écosystèmes, ont été dévastés par au moins dix ans de néolibéralisme effréné. Certes, nous ne sommes pas seuls : nous prenons notre place dans le flot des générations, dans l’histoire du combat pour l’émancipation. Nous savons que nous aurons à réinventer la République, non comme modèle préétabli à imposer mais comme idéal à construire avec tous ceux qui sont aujourd’hui pieds et poings liés. Pari commun pour l’avenir L’expérience est unique. Un quotidien national écrit de A à Z par plus de cent jeunes choisissant les sujets, les hiérachisant, les rédigeant, appuyés par des journalistes mués en assistants techniques. Cette expérience s’est déroulée cette année avec pour toile de fond des débats passionnés sur les élections présidentielle et législatives. Parmi ces jeunes reporters, il n’y avait pas de supporters de Nicolas Sarkozy. C’était Jean-Luc Mélenchon qu’ils voulaient interviewer. Mais ils ont eu envie d’aller voir à Villepinte pourquoi diable des jeunes pouvaient se retrouver dans ce candidat. Ce week-end est une démonstration qu’il n’y a pas de fossé infranchissable entre l’information – trop souvent embrigadée dans une pensée unique –, la presse écrite et les jeunes, pour peu que la première donne sa place aux colères et aux espérances des seconds. C’est aussi un pari commun. Qui engage l’Humanité à satisfaire les milliers de nouveaux lecteurs qui la découvrent en ce moment, notamment dans le cadre de l’opération Libres échanges. PATRICK APEL-MULLER DIRECTEUR DE LA RÉDACTION L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 « Il existe un bien commun de l’humanité » Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à l’élection présidentielle,nous a reçus à son QG,aux Lilas,pour partager son projet politique. Au moment où sa campagne décolle, il a saisi l’occasion de notre rencontre pour faire passer à la jeunesse un message d’optimisme. P ourquoi ne consacrezvous pas plus de place à l’écologie dans la campagne ? Vous annoncez un référendum sur le nucléaire, quelle est la stratégie du Front de gauche ? J EAN -L UC M ÉLENCHON . d’abord, il faut sortir des énergies carbonées, qui sont à la source de l’effet de serre et de la bifurcation climatique qui aura bientôt un cours catastrophique. J’ai bien conscience qu’il s’agit là d’un gigantesque défi technique mais nous sommes des êtres humains : rien n’est au-delà de notre portée, rien ne peut nous arrêter ! L’esprit humain est capable de résoudre tous les problèmes, c’est donc une source d’optimisme et d’enthousiasme. Ensuite, vient la question de l’énergie nucléaire, de très L’écologie occupe chez nous une place qu’elle n’a jamais occupée dans aucun programme de la gauche traditionnelle. Vérifiez : le programme économique du Front de gauche est construit autour du concept de planification écologique. Il y a une intuition du communisme qui est vérifiée par l’écologie politique, à savoir qu’il existe un bien commun de l’humanité. Si nous réfléchissons seulement à ce qui est bon pour nous, nous allons juxtaposer les corporatismes, mais si nous réfléchissons à ce qui est bon pour tous, alors nous avons une chance de mettre la main sur une solution efficace. C’est cela qui fonde la République : la chose commune, ce qui est bon pour tous. Ainsi l’écologie politique est le paradigme refondateur du communisme, du socialisme, de l’universalisme humaniste. Nous portons ses idées parce que nous sommes les porte-parole de la classe sociale qui, par ses conditions matérielles d’existence, n’a pas d’intérêt particulier qui ne soit l’intérêt général. J EAN -L UC M ÉLENCHON . Tout Front de gauche. Enfin, nous pouvons développer les énergies alternatives abondantes, celle des mouvements de la mer et la géothermie de la Terre. Avec la géothermie, on produit plus de chaleur qu’on ne sait en utiliser. Qu’est-ce qu’on fait du reste ? On peut organiser du chauffage urbain, des serres, pour planter des légumes et des fruits qui poussent à contresaison, et ainsi ne plus avoir besoin de les amener du bout de la terre. On peut faire pousser des fraises en Moselle en plein hiver… C’est donc un double gain écologique. Mais pour arriver à ce résultat, il faut créer des compétences dans beaucoup de domaines, il faut des XÉNOPHOBIE w IL A DIT... me Pen est un grave « La névrose obsessionnelle xénophobe de M Len d’être secourue : besoi a Elle coup. beau plains la je déséquilibre et étrangers. Ce ce n’est pas normal d’être à ce point anxieux desdans son assiette e trouv se qui ce de peur ir d’avo al n’est pas norm un bifteck. » et de voir de l’islam ou du judaïsme dissimulé dans grande importance, qui pose un problème de sécurité et qui fait réfléchir tout le monde. La question est celle de l’évaluation du danger. C’est pourquoi nous sommes partisans d’un référendum. Quiconque pense qu’il faut en discuter peut voter ingénieurs, des architectes, des centrales, etc. Comment comptez-vous renationaliser les entreprises privatisées ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Pourquoi devons nous le faire ? Parce Pierre Pytkowicz ALESSANDRA VITULLO, que depuis la privatisation les prix de l’énergie électrique se sont envolés (presque 30 % d’augmentation). Or, nous préférons une baisse des prix à la consommation fondée sur la baisse du prix de l’énergie plutôt que celle des salaires. Nous envisageons donc de constituer un pôle public afin de faire sortir du marché ce qui ne peut pas être raisonnablement conçu comme un bien dépendant de la loi de l’offre et de la demande. En pratique, nous pouvons proposer un vote sur la nationalisation. Nous pouvons aussi convoquer les représentants de l’État au sein des conseils d’administration des entreprises privatisées (EDF, GDF Suez…) et leur donner une consigne : cette année, on ne distribue pas de dividendes. L’année prochaine non plus, l’année d’après non plus. C’est-à-dire que pendant les cinq ans du mandat il n’y aura pas de dividendes. Que se produit-il normalement ? Ceux qui ont mis de l’ar- « En France aussi, la sécurité du nucléaire questionne : Un an après, les effets de la le Front de gauche propose un référendum catastrophe nucléaire de Fukushima que l’UMP, le FN et le Parti socialiste refusent. durent toujours. JEAN-LUC MÉLENCHON. » NDRA O, . 80 % des smicards « sont des smicardes. Voilà un droit des femmes concret » à conquérir, explique Jean-Luc Mélenchon. MARTA SILVA, GABRIEL JOIGNANT, ANASTASIA TYMEN, LUDOVIC TEYSSEIRE, JULIEN PUCHERCOS, 24 ans. 22 ans. 22 ans. 19 ans. 22 ans. 3 L’intégralité en vidéo de l’entretien mené par les jeunes correpondants sur Pour Jean-Luc Mélenchon, « le Front de gauche est une force nouvelle qui se construit dans une bataille commune ». PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE : POURQUOI ? Jean-Luc Mélenchon définit la planification écologique comme une « réorientation de la demande en fonction de nos besoins ». Selon son programme, cette politique « permettra de préciser les orientations et les investissements publics nécessaires pour enclencher une transition écologique et promouvoir un développement humain durable, créateur d’emplois et facteur d’égalité sociale ». Elle s’appuiera sur « un plan écologique débattu et voté au Parlement, assorti d’une loi de programmation financière ». « La finalité est écologique, la méthode est la planification : l’organisation et la prévision, l’introduction du long terme là où la finance privilégie le court terme. » gent privé là-dedans s’en vont. Parce qu’ils ont placé de l’argent non par idéologie ou parce qu’ils s’intéressent à l’énergie, mais parce que ça rapporte. Donc ils s’en vont, et les cours baissent : c’est le bon moment pour nationaliser. Voilà la façon dont je m’y prendrai. Mais j’ai d’autres astuces dans ma botte… Comme certains le disent, êtes-vous un rabatteur de voix pour François Hollande ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Ce sont les socialistes et l’extrême droite qui mettent cette idée en circulation, mais personne n’est le rabatteur de personne. Le Front de gauche est une force nouvelle qui se construit dans une bataille commune dont l’objectif est de concourir au succès de la révolution citoyenne qui est inéluctable dans notre pays. Nous sommes dirigés par une élite politique subjuguée par des situations qu’elle ne maîtrise plus parce qu’elle est incapable de penser au futur. C’est le PMU politicien auquel continuent à croire les belles personnes de notre pays, les médiacrates et les caciques politiques. Ils ne se rendent pas compte du gouffre qui s’est ouvert sous leurs pieds. Pour le reste, que le meilleur l’emporte ! Ce qui ne sera pas fait maintenant devra être fait après de toute façon. Car il n’y a pas de Monsieur et Madame « plus » au Front de gauche. Nous nous basons sur la vie des gens. Il n’y a pas un petit peu Hollande et un peu petit peu plus avec Mélenchon. Non, il y a un grand mieux avec Mélenchon et le Front de Gauche et rien avec Hollande. Que pensez-vous du soutien de Robert Hue à Francois Hollande ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Je trouve cela désolant. Cela fait beaucoup de peine à de nombreux communistes. Est-ce que vous avez un problème avec les femmes ? Durant votre débat avec Mme Le Pen, Je suis le seul homme qui copréside un parti avec une femme. Le Front de gauche est la seule structure politique strictement paritaire. Ses huit porte-parole sont quatre hommes et quatre femmes. Je pense que nous sommes le front du féminisme. Cela ne veut pas dire que les autres ne le sont pas, mais ils ont beaucoup de progrès à faire pour être aussi féministe que le Front de gauche. Quand on demande qui est favorable à la création d’un ministère du Droit des femmes, tout le monde répond oui avec enthousiasme. Quand je demande qui est favorable au Smic à 1 700 euros, on me répond que cela n’a rien à voir. Je leur réponds que 80 % des smicards sont des smicardes. Voilà un droit des femmes concret. Le droit à un salaire décent. De la même façon, 85 % des précaires sont des femmes. Avec ces propositions, où sont passés les enthousiastes ? Jean Michel Aphatie, qui travaille pour RMC et le Grand Journal, a vu dans l’utilisation du terme « démente » la preuve de ma misogynie. Eh bien, je suis au regret de dire qu’il y a des déments et des démentes. La névrose obsessionnelle xénophobe de Mme Le Pen est un grave déséquilibre et je la plains beaucoup. Elle a besoin d’être secourue : ce n’est pas normal d’être à ce point anxieux des étrangers. Ce n’est pas normal d’avoir peur de ce qui se trouve dans son as- EMPLOI w IL A DIT... ina aussi « On fait des problèmes entre Françoise et Yasm quand il y a Mais deux. pour oi empl qu’un a n’y qu’il longtemps , on prend tout trois emplois pour deux, il n’y a plus de problèmes discriminations des bien vité, l’acti çons relan nous Si (...) e le mond voleront en éclats. » auriez-vous été aussi courtois si le candidat avait été un homme ? siette et de voir de l’islam ou du judaïsme dissimulé dans un bifteck. JEAN-LUC MÉLENCHON. Vous êtes un peu comme Monsieur Le Pen, vous pensez qu’une femme n’est pas capable de se défendre toute seule ? Ce soirlà, je n’ai pas polémiqué avec une femme, j’ai polémiqué avec le chef du Front national. Si j’étais tombé sur une buse masculine, j’aurais agi de la même façon. D’ailleurs, à la distribution des prix, le père en a pris autant que la fille. Quelle est la stratégie du Front de gauche pour convaincre les citoyens issus des banlieues ? Qu’est-ce qui vous différencie du Front national ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Le Front de gauche a l’avantage sur le Front national d’être réellement dans les banlieues. J’ai passé vingt ans dans une banlieue. Mme Le Pen, elle, a passé l’essentiel de sa vie dans humanite.fr un palais payé par son père. Nous parlons aux banlieues comme nous parlons à tous les êtres humains. Nous n’acceptons pas la territorialisation de l’existence humaine. Les politiques des banlieues sont toutes des questions transversales. Dans une banlieue on a besoin d’écoles, d’instituteurs, de centres de santé, ce sont des questions de dépenses publiques. Beaucoup de gens confondent la banlieue avec les quatre ou cinq loustics que tout le monde voit. Ceux qui portent des cagoules et ont des battes de base-ball. Ceux-là sont des bouffons. On n’a rien à leur dire. Nous pensons à tous les autres qui veulent vivre dignement de leur travail. Nous pensons à ceux « qui ont les boules » parce que leurs familles se sont sacrifiées pour qu’ils fassent des études, qu’ils ont un diplôme mais qu’ils ne trouvent pas de travail parce qu’ils n’ont pas la bonne adresse. Comment pouvonsnous régler ces problèmes ? D’abord idéologiquement, en menant la guerre politique. Ensuite, on fait des problèmes entre Françoise et Yasmina aussi longtemps qu’il n’y a qu’un emploi pour deux. Mais quand il y a trois emplois pour deux, il n’y a plus de problème, on prend tout le monde. J’ai connu cette situation en 2001, en Loire-Atlantique, sur le chantier naval de Saint-Nazaire. À ce moment-là, nous avions 2,5 % de croissance. Les patrons allaient à la porte des chantiers se disputer les ouvriers. Voilà comment nous réglerons le problème. Si nous relançons l’activité, bien des discriminations voleront en éclats. La solution à la plupart de nos problèmes se résume en un seul mot : le fric. Du fric, il y en a. Dans votre programme, vous évoquez le droit à la ville, vous souhaitez restaurer la mixité sociale. Quels instruments soutiendront cette démarche ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Pour avoir dessiné un quartier à Massy, c’est quelque chose que je connais : mélanger les gens, ça tient. Vous mettez les riches ensemble, c’est mortel, on s’ennuie à mourir. Ils mettent Suite page 4 L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 4 Événement Suite de la page 3 des digicodes partout, ils sont barricadés chez eux en montant des murs avec des barbelés dessus, ils se payent des vigiles. Personne ne veut vivre dans le 6e ou le 7e arrondissement. Moi j’habite dans le 10e, un arrondissement normal, les gens sont de toutes les couleurs, c’est sympa, c’est vivant. Si vous mettez tous les pauvres ensemble, c’est le même scénario : il n’y a que de la misère à partager. Donc, vous commencez à voir des gens qui tiennent les murs, à voir toute la détresse psychologique qui ressort de la misère sociale. Par exemple, en Nouvelle-Calédonie, il y a les Kanak d’un côté et les caldoches de l’autre. Personne ne se mélange, résultat, c’est la pelée depuis un siècle et demi. Donc, le principe de mixité sociale, c’est un principe de vie. Si quelqu’un est capable de me décrire une autre forme de bonheur, j’attends qu’il me la raconte. Est-ce qu’on peut influer sur la mixité sociale d’un quartier par une politique volontariste ? La réponse est oui. En ce qui concerne les licenciements collectifs, on voit de plus en plus d’entreprises partir à la dérive. Que comptez-vous faire ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Pour lutter contre les licenciements collectifs, il faut « arrêter l’hémorragie » et pour cela des outils politiques existent et sont à mettre en place d’urgence : interdiction des licenciements boursiers, droit de veto dans les CE pour la représentation ouvrière, droit de préemption des ouvriers sous forme de coopérative. Dans « IL EXISTE UN BIEN COMMUN DE L’HUMANITÉ » un second temps, d’autres mesures urgentes sont à prendre : la réquisition, la sanction et punition des traîtres à leur pays car on trouve toujours normal de courir après les voleurs de mobylettes… mais moi je trouve normal de punir aussi les tricheurs et fraudeurs en col blanc. Parlez-nous de votre projet de régularisation des sanspapiers ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Pour nous, la régularisation des travailleurs sans papiers est une mesure antidumping social et une mesure humainement juste. On ne peut pas laisser JEAN-LUC MÉLENCHON. Le droit du sol, la naturalisation et l’acquisition de la nationalité sont des mesures dont le Front de gauche est partisan. Le droit du sol existe depuis François Ier mais c’est redevenu apparemment très nouveau. L’histoire nous apprend que les mêmes tantôt réquisitionnent tout le monde parce qu’il y a des guerres qui arrivent, tantôt veulent jeter tout le monde dehors parce que nous avons été battus ou parce qu’il y a des difficultés extérieures. Le mot « français » m’ennuie un peu parce qu’il donne une définition ethnique CULTURE w IL A DIT... la France, « J’aimerais aussi des mesures qui singularisent TVA à 5,5 % la que t plutô livres les comme la TVA à 0 % pour -à-dire six fois sur la restauration, qui a coûté 3 milliards, c’est (diminution RGPP la à liées mies ce que rapportent les écono du nombre de fonctionnaires). » vivre les gens dans la peur. Notons qu’avec les réformes de Sarkozy, on a transformé une partie des gens qui avaient des papiers en sans-papiers. Nous mettons au défi quiconque de nous dire comment on procède à l’expulsion immédiate de tous les clandestins. Aujourd’hui, 25 000 clandestins sont expulsés par an, or on suppose qu’il y en a 250 000. C’est-à-dire que pendant les dix prochaines années nous allons continuer à courir les portes des écoles pour capturer les gens ? Pourquoi, dans votre programme, les étrangers n’ont le droit de vote qu’aux élections locales ? de la nation française. Je considère que ce qui décrit la nationalité française c’est la citoyenneté. La thèse qui l’emporte entre toutes celles qui s’affrontent au sein de notre coalition, c’est la citoyenneté locale. Une fois que l’on aura fait cela, la suite sera plus simple. Une grosse bêtise a été dite : Guéant a affirmé que, s’il y avait la citoyenneté locale, les communautés exigeraient tel ou tel type de nourriture. C’est stupide. Il y a déjà 500 000 compatriotes juifs, dont certains mangent casher, et l’islam est la deuxième religion des Français. Une réponse existe depuis 1905, c’est la laïcité. Front de gauche est dangereux pour le capitalisme, «maisLe pas pour l’économie du pays. » J -L M . EAN UC ÉLENCHON Qu’est-ce que vous comptez faire à propos d’Hadopi ? JEAN-LUC MÉLENCHON. Nous n’acceptons pas Hadopi. Il y a une violence, une commission peut s’introduire dans votre ordinateur, on peut vous sanctionner sans juge au départ et le budget de tout cela est considérable. Ils vous coupent, mais ils ne vous privent pas seulement d’accéder à de la musique ou de la littérature, ils vous privent également du fait d’accéder à votre compte d’impôt, compte bancaire, de pouvoir recevoir les relances de Pôle emploi : c’est une violation d’une dizaine de droits dont vous êtes privés. Les droits d’auteur sont une invention de la République. La diffusion gratuite pose donc un aussi problème. Mais, dans le cadre du régime de la propriété privée de la rémunération de la création, on peut se demander si on accepte la rémunération des créateurs par le paiement à l’acte et le paiement sans limite. Je suis d’accord pour respecter le droit d’auteur. Une réponse a été trouvée : la licence globale. Une autre est possible ? Parlons-en ! Mais la propriété privée n’est pas tout ! Nous avons donc envisagé de mettre à contribution les fournisseurs. Nous avons imaginé un pôle public de routage. J’aimerais aussi des mesures qui singularisent la France, comme la TVA à 0 % pour les livres, plutôt que la TVA à 5 % sur la restauration, qui a coûté 3 milliards, c’est-à-dire six fois ce que rapportent les économies liées à la RGPP (suppression du nombre de fonctionnaires). Le candidat fait une entrée remarquée C ’est un QG à la fois électrique et éclectique qu’on découvre lorsqu’on entre au 8, rue Chassagnolle, aux Lilas (Seine-SaintDenis), siège de campagne de Jean-Luc Mélenchon. L’endroit : une usine désaffectée. À gauche, des affiches placardées sur les murs décrivent le programme du Front de gauche. À droite, pardon, à gauche, des militants fument devant un café en répondant aux questions d’une journaliste de Marie-Claire. À l’étage et à l’écart, la salle de réunion. Les murs sont recouverts de pense-bêtes géants rappelant les principaux thèmes de la campagne électorale. Après une installation minutieusement calculée – nous sommes neuf tout de même –, nous attendons l’arrivée du candidat à l’élection présidentielle. Sa récente percée dans les sondages a créé un intense fourmillement médiatique. Au bout de la passerelle menant à la salle de réunion, Jean-Luc Mélenchon est escorté par des journalistes de France 3. La ten- sion monte : dans la pièce, c’est l’effervescence. De longues minutes s’écoulent… Le candidat à l’élection suprême fait une entrée remarquée : exhibant fièrement les unes de l’Humanité des 8 et 9 mars sur la récente montée du Front de gauche et les exilés fiscaux, il affiche un large sourire : « Ceux-là, je vais les encadrer ! » Jean-Luc Mélenchon porte une attention particulière sur chacun d’entre nous : il s’intéresse à notre parcours universitaire. À un élève de l’Institut d’études politiques de Rennes, il fait la moue : « Vous êtes de gauche au moins ? » À un autre, étudiant en philosophie contemporaine, il propose d’échanger ses coordonnées : aurait-il déniché un éventuel collaborateur ? Quand on lui parle de sa relation avec les femmes, notre ton moralisateur l’irrite et il nous qualifie de « petits bourgeois friands de Grand Journal », l’émission non cryptée de Canal Plus. Le candidat est à l’aise : décontracté, il embraye sur la planification écologique. Il s’exprime avec sa verve habituelle. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Dans un discours structuré, il explique son programme avec une rare cohérence, affirmant néanmoins qu’il ne peut pas s’empêcher de convaincre et de polémiquer. Ses propos, bien que théoriques, ne s’arrêtent pas à de vaines spéculations. Ses inspirations lui viennent autant de l’humanisme, des Lumières, que des grandes figures socialistes du XXe siècle, avouant même sa préférence pour Jean Jaurès. Au même moment, dans les entrailles de l’ancienne usine, les « ouvriers » de la campagne du Front de gauche s’activent pour accueillir ce soir-là Didier Porte, le journaliste humoriste qui apporte son soutien à Jean-Luc Mélenchon. À peine perturbé par la cohue constante dans le QG, le candidat poursuit l’entretien à un rythme de croisière jusqu’à la fin, dépassant largement le temps qui nous était imparti. Authentique, animé du désir de transmettre ses idées humanistes, conscient que les présidentielles ne sont qu’une étape dans la dynamique enclenchée par le Front de gauche. Photos Pierre Pytkowicz C’est impressionnés, fébriles, concentrés, curieux que nous avons franchi les portes du QG de campagne du candidat du Front de gauche. Voici nos impressions post-entretien. 5 4 C’est, en nombre de kilomètres, la longueur réservée au stationnement des cars affrétés pour venir à la Bastille, le 18 mars. Briser la vitrine du FN à Hénin UGO BERNALICIS, 22 ans. PAULINE DENIS, 23 ans. Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), envoyés spéciaux. e Front de gauche ne veut plus que le Front national soit présenté comme le parti défenseur du peuple, qu’on se le dise. L Pour faire tomber le nuage de fumée démagogique derrière lequel le parti d’extrême droite se cache, il organisait vendredi soir à Hénin-Beaumont une conférence débat pour démonter les « mensonges du front national » dans une ville hautement symbolique. Laurent Maffeis et Alexis Corbière, animateurs de la campagne de Jean-Luc Mélenchon, sont venus décrypter le programme du Front national, face à 120 Héninois. C’est peu ? Sur Internet, 1 200 personnes supplémentaires suivaient la réunion en streaming. Une mesure phare du FN consiste à augmenter les salaires de 200 eu- Olivier Touron La stratégie nationale de « désenfumage » du programme de Marine Le Pen par le Front de gauche se décline aussi localement,comme dans le Pas-de-Calais,où elle veut s’implanter. Hénin-Beaumont, vendredi. En plus de la centaine de participants, plus d’un millier de personnes ont suivi sur Internet le débat organisé par le Front de gauche pour démonter « les mensonges du FN ». Laurent Maffeis et Alexis Corbière sont venus décrypter le programme du FN. ros : « Cette augmentation, basée sur la baisse des cotisations sociales, va entraîner un déficit de 20 milliards d’euros dans les caisses de la Sécurité sociale, et ce sont les salariés qui devront au final payer. » Dans un bassin d’emploi où un habitant sur cinq est au chômage, cet argument fait mouche comme Le 18 mars, tous à la Bastille! L’engouement est déjà constaté : plus de 8 000 personnes recensées pour les bus et trains en provenance de tous les départements. UGO BERNALICIS, 22 ans, MANON COLEOU, 19 ans, PIERRE TRIBOUT, 27 ans. E n fin de semaine, la campagne officielle pour la présidentielle commence. Le Front de gauche souhaite marquer les esprits. Dans la continuité de juin dernier, avec le meeting en plein air place Stalingrad à Paris, il invite à la réappropriation populaire de l’espace public en appelant à une grande marche vers la place de la Bastille, le 18 mars prochain. En choisissant cette date, le Front de gauche rend hommage à la Commune de Paris. Le 18 mars 1871, les Parisiens se soulevèrent et soixante-douze jours durant, les communards écrivirent les bases de la République sociale : réquisition des logements vacants, instauration d’un système de protection sociale, création d’une école laïque et gratuite… La Bastille! Place symbolique de l’insurrection populaire, où furent abolis les privilèges monarchiques. Or, comme le dit Jean-Luc Mélenchon : « Il nous faut abolir les privilèges de notre temps, ceux des oligarques. » Plusieurs dizaines de milliers de personnes s’apprêtent à envahir de nouveau la Bastille, ce dimanche, pour une VIe République. Selon les mots de Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, il s’agit à la fois de construire « une démocratie pleine et entière » tout en « donnant plus de pouvoirs aux salariés dans l’entreprise ». Une telle manifestation de gauche durant une campagne présidentielle s’inscrit dans « des formes inédites de campagne » que le Front de gauche entend impulser, selon Pierre Laurent. En laissant la « place au peuple », le Front de gauche mise sur un rassemblement populaire et joyeux pour défaire la « monarchie présidentielle » de la Ve République. Au vu de l’affluence constatée dans les meetings, François Delapierre, directeur de campagne du Front de gauche, espère pouvoir réunir jusqu’à 50 000 participants. DISCOURS ET CONCERTS POUR UNE VIe RÉPUBLIQUE Les festivités débuteront à 13 h 30, place de la Nation, à Paris, pour accueillir les manifestants avec le concert du groupe Alee. La marche démarrera vers 14 heures avec au menu : cortèges thématiques (Front des luttes, éducation, santé…), scène mobile avec concerts et discours, « commandos culturels », diffusion de matériel militant, animant ainsi le défilé jusqu’à la Bastille. À son arrivée, vers 16 h 30, nouvel accueil musical, avec notamment Cheik Tidiane Seck et Ridan. À 17 h 30, le discours du candidat du Front de gauche viendra clôturer les festivités. chez Hayatte, une jeune sympathisante du Douaisis, qui avoue avoir trouvé la mesure séduisante au premier abord. Ce n’est pas le seul paradoxe qui a été relevé ce soir-là, puisque la conseillère régionale (communiste, Front de gauche et apparentés), Laurence Sauvage, expliquait que tout en demandant à l’Assemblée de voter une motion en faveur de l’accès aux soins, les élus du Front national votaient contre l’instauration d’une complémentaire santé gratuite pour les jeunes. Dans cette ville où le FN a récolté 43 % des suffrages aux dernières cantonales, sur fond d’abstention, et où la majorité municipale s’est encore déchirée cette semaine – une partie des élus ayant claqué la porte du conseil municipal – le Front de gauche a décidé de taper fort aux législatives de juin, en envoyant Hervé Poly, secrétaire fédéral du PCF du Pas-de-Calais, « montrer que le monde du travail, c’est nous ». Il a notamment salué la présence à ses côtés de Brigitte Petit, une an- cienne salariée de l’usine Samsonite licenciée économique en 2007. C’est d’ailleurs aux portes des usines de la région que le Front de gauche a choisi de faire connaître l’assemblée citoyenne de vendredi soir. Dans la salle, militants et anonymes sont venus chercher des arguments contre cette force politique qui les met mal à l’aise : bien décidés à faire de leur ville un laboratoire d’idées, les militants frontistes surfent sur la discorde des partis républicains pour s’implanter. Avec 47,62 % des voix aux dernières élections municipales de 2009, Steeve Briois et Marine Le Pen comptent fortement sur la présidentielle pour préparer une victoire aux municipales de 2014. Elle avait d’ailleurs déclaré, lors de l’émission Des paroles et des actes, que pour son premier « voyage officiel », elle irait « à Hénin-Beaumont, pour leur dire que tout va changer ». C’est compter sans les militants du Front de gauche qui sont bien décidés à riposter. Brahim, un habitant venu chercher un argumentaire contre le FN, déplore le manque de dialogue entre politiques et citoyens : « L’initiative du Front de gauche a le mérite de rétablir un dialogue avec les habitants, de nous proposer une réflexion. » OPÉRATION DÉCOUVERTE Vous découvrez aujourd’hui un numéro exceptionnel de l’Humanité écrit entièrement par des jeunes ce week-end. Vous souhaitez continuer à lire le journal. Inscrivez-vous vite pour le recevoir gratuitement pendant quelques jours. Nom……………………..........……….................................................................................... Prénom……………...…....................................................................................................... Adresse……………………………………...........………………………........................................ Ville.................................................................................................................................... Code postal.................................................................................................................. Téléphone……………………............................................................................................. Mail…………………………...........………………..................................................................... À renvoyer à l’Humanité service diffusion militante, 164, rue Ambroise-Croizat, 93528 Saint-Denis Cedex. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 6 Politique ÉLECTIONS Sarkozy a prononcé un discours «pleinNicolas de caricatures mais vide de propositions. HARLEM DÉSIR (PS). » Nicolas Sarkozy : le meeting de la dernière chance ? Les militants UMP, malmenés par les sondages, espéraient beaucoup de la grand-messe de Villepinte. Derrière l’engouement pour leur candidat, ils avaient cependant du mal à cacher leurs divisions sur la stratégie de leur leader A N A LY S E Sarkozy mise sur l’international pour échapper à son bilan SIRYA CHIKHDENE, 21 ans. MAXIMILIAN AZARIAN, Philippe Wojazer/Reuters 18 ans. À Villepinte, la photo de famille était de rigueur, pourtant les divergences, voire les contradictions, sur la ligne stratégique sont réelles. MAXENCE MAILLARD, 17 ans. CYRILLE CRESPY, 19 ans. R edonner confiance aux militants. À quarante-deux jours du premier tour, les supporters de Nicolas Sarkozy espéraient que le meeting de Villepinte représenterait un « tournant dans la campagne », au moment où le président sortant ne décolle pas dans les sondages. Depuis des semaines, l’UMP s’était mobilisée en masse pour assurer la présence des militants. L’enjeu de cette démonstration de force était de rassembler la droite derrière son candidat. Près de 40000 personnes étaient présentes, scandant « Sarkozy président ». Des dizaines de TGV spéciaux ainsi que 700 cars avaient été affrétés pour l’occasion. « J’espère des précisions sur le contenu réel du programme de Nicolas Sarkozy », nous confie un jeune cadre de l’UMP. « On voulait que ce rendez-vous soit celui d’une droite unie derrière notre candidat », affirme une jeune sympathisante qui, comme la majorité des militants présents, minimise l’importance des sondages, citant l’exemple du premier tour de l’élection présidentielle de 2002. RALLIER L’ÉLECTORAT FN L’absence de Jean-Louis Borloo apparaît comme un non-événement aux yeux des sympathisants présents sur place. Son ralliement annoncé la veille, lors du congrès du Parti radical, est considéré comme bien plus important que sa présence au meeting. « Chacun a ses idées, moi je suis quelqu’un de simple, quand je m’engage avec quelqu’un, je viens », a ironisé Gérard Longuet, ministre de la Défense. Si tous affichent leur soutien au président sortant, les divergences d’appréciation sur la ligne stratégique du candidat se font malgré tout sentir. Si tous souhaitent un programme clair, les attentes sont diverses, voire contradictoires. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Le mot « rassemblement » est dans toutes les bouches, mais tous les militants n’en ont pas la même conception. La stratégie politique, notamment adoptée par Jacques Chirac, du « cordon sanitaire » entre l’UMP et le FN serait toujours nécessaire pour certains. C’est notamment le cas de Jean-Marie Bockel, qui sert, avec son courant de la Gauche moderne, de caution sociale au sein de la droite. Certains sympathisants affichent leur volonté d’un rapprochement plus marqué avec notamment le Parti radical et le Nouveau Centre. Cependant, d’autres personnes souhaitent, tout au contraire, se tourner vers le Front national. « Il faut comprendre et rallier les électeurs du FN », affirme un jeune militant des Ardennes, tout en souhaitant une alliance de l’extrême droite jusqu’au centre gauche. La mise en scène du meeting visait à donner l’image d’une droite rassemblée derrière la personne de Nicolas Sarkozy. En témoigne le ralliement de certains anciens candidats qui, comme Christine Boutin et Hervé Morin, avaient pourtant juré d’aller jusqu’au bout de leur candidature. Boutin avait même ajouté à sa promesse la menace folklorique de lâcher une « bombe atomique », en détaillant a posteriori qu’il aurait été question d’une « grève de la faim ». Nicolas Sarkozy aura-t-il répondu à l’énorme attente des militants UMP, qui espéraient un programme précis pour entamer la dernière ligne droite de la campagne présidentielle, et inverser la tendance dans les sondages ? Les prochaines enquêtes d’opinion dévoileront leur verdict sur la portée de ce meeting, qui se voulait un tournant dans la campagne du président sortant. S’imposer en rassembleur de la droite. C’était l’objectif de Nicolas Sarkozy devant les dizaines de milliers de militants UMP rassemblés hier à Villepinte, qui attendaient beaucoup de la prestation de leur candidat. Celui-ci a tenté de justifier son bilan lors d’un discours plus tourné vers le passé qu’orienté vers un nouveau projet de société. Une nouvelle fois, le président candidat s’est posé comme celui de « l’antisystème », qui critique les méfaits de la spéculation tout en oubliant qu’il a ouvert la France aux marchés financiers et aux agences de notation. Parmi les idées fortes annoncées, celle de la révision du traité de Schengen visant à renforcer les frontières dans l’intention de limiter l’immigration, pour ne pas « subir les insuffisances de contrôle aux frontières extérieures de l’Union européenne ». Le candidat de la droite a tenté ouvertement de séduire l’électorat du Front national, tout en cherchant à unifier et à remobiliser les diverses tendances de son parti. En effet, celui qui disait qu’il n’y avait pas de « France de droite, de France de gauche et de France du centre » ne cesse d’attaquer la gauche et prouve ainsi son envie d’imposer ses thèmes de campagne, de placer le débat politique à droite. Attaquant les syndicats et les associations, qu’il accuse de « conservatisme », il a notamment remis en cause les trente-cinq heures et multiplié ses attaques à l’encontre de son adversaire socialiste. Alors que Nicolas Sarkozy prétend défendre et rassembler les Français en se posant comme le candidat du peuple, il a dénigré les organisations qui sont censées le représenter. « Assistanat », « immigration »… Le président sortant a une nouvelle fois cherché à diviser les Français au lieu de les réunir. Dans une posture internationale, Nicolas Sarkozy s’est présenté comme le seul candidat capable de « sauver la France » face à la crise économique. « Un président des riches » qui aurait, selon lui, appris l’humilité ; mais qui n’a pu s’empêcher de mettre en avant la valeur de la fonction présidentielle. Un paradoxe symptomatique d’un candidat qui devra pourtant faire face à son bilan. L’IMMIGRATION AU CŒUR DE LA CAMPAGNE Malgré un discours faible en propositions, l’une d’entre elles a concerné la « révision » des accords de Schengen. Ceux-ci instaurent un espace de libre circulation entre 27 États européens. Nicolas Sarkozy étend sa volonté de réduire l’immigration. Selon lui, celle-ci renvoie l’image d’une Europe aux frontières trop perméables. Ce qui, dans sa logique, mettrait en danger « notre système de protection sociale ». Une proposition qui relève d’un effet d’annonce. Sarkozy et Berlusconi avaient, le 26 avril 2011, proposé une « reformé de l’espace Schengen » face à « l’afflux de clandestins » attendus au lendemain des révolutions arabes. Le président sortant veut illustrer sa détermination en menaçant de « suspendre la participation de la France aux accords » dans le cas où il ne serait pas entendu par ses partenaires dans les douze mois. Dans ce discours annoncé comme « fondateur », il persiste et signe dans sa stratégie d’appel du pied aux électeurs du FN. Une tactique qui semble lasser de la droite dite républicaine et pousser des électeurs frontistes à préférer l’original à la copie. 7 470 C’est en euros le montant annuel par habitant du budget de la Défense. Borloo, le grand absent à Villepinte L’ancien ministre de l’Écologie prend ses distances avec Sarkozy. La Défense selon François Hollande POINTS CHAUDS Jean-Pierre Chevènement tombe d’accord avec François Hollande Le Mouvement républicain et citoyen (MRC) de Jean-Pierre Chevènement met fin au vrai-faux suspens qui laissait entendre un possible soutien au candidat du Front de gauche, en trouvant un accord « pour un contrat de législature » avec le Parti socialiste. L’accord qui comprend neuf circonscriptions pour le MRC et quelques points politiques n’est pas sans rappeler celui, électoraliste, passé fin 2010 entre le PS et Europe Écologie-les Verts. Attaqué par l’UMP sur sa carrure d’homme d’État,le candidat à la présidentielle a répliqué par une vision « rééquilibrée » de la sécurité. HOLLANDE ET LA FIN DE LA « RACE » 21 ans. DANIA KADDUR, ]げ#0=1=7#Ny; 7;} c#⁄„ 7⁄ }#y[j́ }c; げぐ"ぁだぶ"な"1jd "I; Wど ラキ" ; W "SWぶ"な" ;c;d "な"}¤y; =" ふ Y Wミ キラミ"SWぶ"な"} d7N1# }"な" #„;"vyjE;}}Njdd;]];"な }⁄y;d7; F: 6,00 E M 04491 "ノ;ぶ"な"c=yN ;"ふ ラキ "Sげぶ"ど" #7d"な"#EFK#dN} LE BILAN DU PRÉSIDENT DES RICHES #d"な"#FyN1j];" ふI キ Wぶ"ど ;"な"7Nc#d1K;"な" キマW"; ぶ"な"cNd;⁄y}"な"cNdNc⁄c"ふ W キIWぶ"な y; y#N ;}"な"y; ;d⁄"7;"}j]N7#yN ="#1 N ;"な"yFvv"な"yNF⁄;⁄y"な ;yyN jyN#]"ふIラミ WキノノW ぶ"な" j #]"な" y# #N]"な" #"}j1N#]; 3:HIKOOJ=VU[UUW:?a@c@m@a@p; ;キ Y"SWぶ"な y# #N]"な"1jcv= N N N ="な"1jd" ふた"#ノラ vyN}jd"な"vyN =;"ふYIラノWぶ"な"vyjFy#cc;}"}1j]#Ny;}"な"v⁄0]N1N ="な"y#N]"な"y;1K;y1K;"な"y= ;d Njd"ふIWミ ]j1#];"ふSYマラI ; "Wぶ"な"]jF;c;d "ふI キ W"S ぶ"な"]jvv}N"ヲ"な"c#]な]jF=}"な"c# j ;"な"c=7;1Nd;"7⁄" y# #N]"な"c;7N# jy"な" Ej⁄x⁄; げ}"な"Ey#d6#EyNx⁄;"な"Ey#⁄7;}"な"E⁄[⁄}KNc#"な"F" ふΒ"W "ヲヰぶ"な"F#d7y#dF;"な"F#́"7;"Ey#d1;"な"F=jyFN;"な - 220 H - RD c=7N ;yy#d=;"ふ⁄ミキラミ" ラ vj⁄y" x⁄げN]" 7=F#F;" ;dENd EY キW "ヲヰヱヲ ;N]"ふテ; Sキミ "Sげぶ"な"E#0yN}"ふdW ぶ"な"E;cc;}"な"Ejyc# Njd"な"Ej⁄"な キミIW W"SWぶ"な"1j7;"7⁄" ラ Wぶ"な"1jv="ふミキIエWぶ"な"7#[#y"な"7=v;d7#d1;"な"7; Fy#d7";cvy⁄d "な"Fy;dj0];"な"K#7jvN"な"K;⁄y;}"}⁄vv]=c;d #Ny;}"な" yN]#d1;"な"yjc}"な"}1K;dF;d"な"}1j]#Ny;"ふI; Wぶ"な"}cN1"な"}j1N#]"ふノラェWマWミ ぶ"な"}jNd}"ふ;IIX "; ぶ"な" 1]< ;}" ふ 1jd ;d Njdd;]];"ふ cj];„"な"cmx⁄; "ふF ぶ"な"d#cNdF"な"djcNd# Njd"な"jy"ふ XェノW"Sげぶ"な"j #d"な"j⁄ ;y ⁄y;"な"v#y];c;d "な N" ふノW ぶ"な"1jd y# }"#N7=}"な" ###"な"#11N7;d =な;"7⁄" y# #N]"な"#1K# " ふ Kjcj};„⁄;]な];}"な"KmvN #]"な"N7;d N ="d# Njd#];"な"NccNFy# Njd"1KjN}N;"な"Nd =y;}};c;d "な"Y;⁄d;}"な"Y⁄} N1;"な S amedi avaient lieu, à Paris, les « assises sur la France en danger », organisées par Nationalité, Citoyenneté et Identité (NCI) et le Bloc identitaire, deux formations d’extrême droite. Pour « la sauvegarde de notre identité », les intervenants se sont succédé, développant des discours xénophobes tels ceux de Jared Taylor, écrivain américain prônant une lutte des races pour une sauvegarde des droits de la race blanche. Ces mouvements identitaires enrobent de bons sentiments le racisme pour faire accepter celui-ci comme une évidence. ヲヰヰΑなヲヰヱヲ ];"0N]#d ;7 NF;"な";F#]N ="vyjE;}}Njdd;]];"な"=cNFy# Njd"N]]=F#];"な";cv]jN"ふvレノWぶ"な";d};NFd#d }"な";d Nyjdd;c;d "ふF WミWノノW"SW"ノげぶ"な 22 ans. Les femmes de militaires manifestaient, samedi 10 mars. Contournant habilement l’interdiction qui en est faite aux militaires, elles réclamaient les retards de soldes qui touchent des milliers de soldats. Cet incident, dont la cause serait un dysfonctionnement d’un nouveau logiciel informatique, est minimisé par le porte-parole de la Défense, Gérard Gachet, qui parle d’un problème « en voie d’être résolu » alors que cet incident perdure depuis plusieurs mois. Les propos des responsables ministériels n’ont pas vraiment convaincus. JQTU/U¡TKG À l’ordre du jour de ces assises : la sauvegarde des droits de la race blanche VICTOR BALLU, Les femmes de militaires réclament la solde de leurs maris Commandez notre nouveau hors-série Le nationalisme de l’extrême droite Fabrice Robert, du Bloc identitaire, enflamma la salle en demandant aux candidats à la présidentielle un durcissement du Code de la nationalité, considérant que pour devenir français il faudrait renoncer à sa nationalité d’origine, ce qui pour lui « exclurait bon nombre de musulmans » (!), justifier d’un emploi non aidé, d’un casier judiciaire vierge en France et à l’étranger. Une autre intervenante plaidant pour la mise en place dans la Constitution d’une distinction entre nationalité et citoyenneté. Cette conférence a aussi été l’occasion pour la frange extrême de la droite de s’ouvrir à l’Europe en faisant cohabiter les thèses nationalistes, voire régionalistes, avec l’idée d’« une grande Europe identitaire ». La candidate de Lutte ouvrière (LO), Nathalie Arthaud, qui a déjà déposé ses 500 parrainages, tenait un meeting à Argenteuil (Val-d’Oise) devant un public d’environ 600 personnes, le cœur des sympathisants locaux s’étant « un peu élargi », d’après un participant. Elle allie à l’affirmation de sa politique « communiste révolutionnaire » une critique des autres forces politiques, du Front de gauche au FN. Elle continue également à s’estimer « seule candidate communiste ». il a souhaité plus de contrôles publics sur les groupes privés, tout en assurant : « Je veux une industrie de défense forte. » En matière budgétaire, enfin, il y aura des économies « dans les mêmes proportions » que pour le reste de l’État. Bonne idée de vouloir consulter régulièrement le Parlement en cas d’engagement de soldats français. Sera-ce un simple débat ou un vote solennel ? Le candidat est resté, comme l’armée, une grande muette. #N7;"c=7N1#];"7げ= # "な"#]]j1# Njd}"な"#dy⁄"な"#yc=;"な"#}}j1N# Njd"ふS ラキ "Sげぶ"ど"#⁄} =yN ="}#]#yN#];"な"#⁄ jな;d y;vy;d;⁄y"な ce congrès houleux, les adhérents du Parti radical ont finalement voté, sous conditions, à 76 %, la motion de soutien à Nicolas Sarkozy. Cette résolution avait des opposants : Rama Yade, ancienne secrétaire d’État, indignée face à la droitisation du candidat président Nicolas Sarkozy, confiant sur le Monde. fr son sentiment d’avoir le « pistolet du FN sur la tempe ». Jean-Louis Borloo, peu enthousiaste, rejoint Rama Yade en fustigeant le débat sur l’identité nationale ou le discours de Grenoble, tout en valorisant le président sur nombre de ses réformes telles que le RSA ou l’autonomie des universités. Ce soutien mesuré envers Sarkozy illustre la stratégie de Borloo, partisan d’un partenariat et non d’un ralliement à l’UMP, qui garantirait l’indépendance et la visibilité de son parti dans le paysage politique. La stratégie de droitisation menée par Nicolas Sarkozy et son équipe effraie le Parti radical. D’où une certaine prise de distance et un soutien sans conviction, quoique, à Nicolas Sarkozy. Visiblement, les différentes familles de la droite ont du mal à assumer publiquement tout leur bilan. L’appel lancé par Sarkozy à la « France unie » risque de se heurter aux ambitions politiques des différentes composantes de la droite. deux axes (l’aviation et les sous-marins). Pas de rupture non plus quant à la célébration 11-Novembre, transformée par Nicolas Sarkozy en commémoration indistincte de tous les combattants. Mais, contrairement au chef de l’État, François Hollande a déclaré vouloir accélérer « dans les meilleures conditions possible de sécurité, le retrait de (nos) forces combattantes en Afghanistan pour que, fin 2012, nos soldats soient rentrés ». Il a émis des doutes quant au projet de défense antimissile européenne porté par Nicolas Sarkozy, c’est-à-dire le bouclier que les États-Unis comptent déployer. S’agissant des industriels de l’armement, visant Dassault sans le nommer, }jd7#F;}"な"}j⁄EEy#d1;}"#⁄" y# #N]"な"}v=1⁄]# Njd"な Les composantes de la droite ont du mal à assumer publiquement tout leur bilan. A v#⁄ y; ="v# }#d"な"v;Nd;}"v]#d1K;y}"な"vj} ;"な"vy;}};"な"vyNc;"な « lors que Nicolas Sarkozy tenait son grand meeting de campagne à Villepinte (Seine-Saint-Denis), François Hollande s’est attaqué au domaine réservé du président et a ainsi voulu montrer sa stature internationale. Pas de rupture avec Nicolas Sarkozy sur bien des points. En effet, malgré son opposition au retour de la France dans le commandement intégré de l’Otan, retrouvé en 2009 après quarante-trois années d’absence, François Hollande a tenu à ce qu’elle y reste. « On ne baissera pas la garde », a-t-il également déclaré, en termes de dissuasion nucléaire. Le candidat s’est aussi prononcé pour la non-prolifération des armes en pointant du doigt les recherches militaires iraniennes. Il a mis en exergue l’effet de dissuasion de l’armement militaire français, dont il compte développer les Y⁄F;"7げNd} y⁄1 Njd"な"Y⁄y="vjv⁄]#Ny;"な"[#7K#EN"な"]# y#d"な"]N}0jdd;"ふ J e ne souhaite pas être à Villepinte. » C’est en ces termes que JeanLouis Borloo, ancien ministre de la Ville, avait annoncé sa décision au congrès du Parti radical, tenu à huis clos le 10 mars à Paris. Cette décision mettait un terme aux spéculations sur sa présence et illustre le souhait de celui-ci de rester « vigilant » et « indépendant » vis-à-vis de l’UMP. Durant 0#d]N;⁄;"な"0;ヱ7"な"0; ;d1j⁄y "な"0]NdF"ふどHノキミェぶ"ど"0j⁄1]N;y"EN}1#]"な"0⁄yx#"な"1#y0jd;"ふ ; Wぶ"ど"1KNEEy;"な 20 ans. 22 ans. Nathalie Arthaud dépose ses signatures et tient meeting « Il n’y a pas de place dans la République pour la race. Et c’est pourquoi je demanderai (…) au Parlement de supprimer le mot de notre Constitution. » Le candidat PS s’est exprimé ainsi lors d’un meeting consacré à l’outre-mer. En 2003, déjà, le député communiste Michel Vaxès avait proposé une loi supprimant le mot « race » de notre législation. La droite avait refusé la disparition d’un « outil juridique » qui permet la répression des infractions. ;I W" ラ "ノげぶ"な"= ANTOINE CHEVALIER, ;v#7"な";⁄yj"ふ SIRYA CHIKHDENE, ヶヴ ;d"v#y ;d#yN# " # ;1"]げK⁄c#dN = W ラミミ;ノキ Y " Y ミキW " ; " ノ;"EラミS; "ラミ" 1ラ W ミキI"SYI Wミ " Iキミ ";ミ "SW"マWミ ラミェW が" SW"I; W" ラIキ;ノW"W " SW"SYミキ"SYマラI ; " W" キノラ Y " ; "ノW" Y キSWミ " SW " キIエW く" Soixante-quatre acteurs du mouvement social décryptent, de A à Z, cinq ans de sarkozysme. 6 euros Je souhaite recevoir le hors-série L’ABÉCÉDAIRE DES MAUX DU SARKOZYSME, ZYSME au prix de 6 € + 1 € de frais de port (valable uniquement pour la France métropolitaine) par exemplaire, soit : .....................€ x ..................... = ..................... euros. Nom............................................................................ Prénom........................................................... Adresse............................................................................................................................................... Ville................................................................................. Code postal................................................ Téléphone.............................................Adresse e-mail....................................................................... Renvoyer impérativement ce bulletin accompagné du règlement (chèque à l’ordre de l’Humanité) à : l’Humanité/Service diffusion militante, 164, rue Ambroise-Croizat, 93528 Saint-Denis Cedex. Téléphone : 01 49 22 73 47 (42). Vous pouvez également acheter ce hors-série en ligne sur www.humanite.fr L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 8 Social-éco COMMERCE gens ont peur. (…) “Ils” ont des moyens «de Les pression. (…) La chasse aux sorcières a commencé. TARIQ, ÉLU FO AU MAGASIN IKEA DE THIAIS. » Ikea ouvre la chasse aux syndicalistes Deux militants syndicaux FO et CGT du magasin Ikea de Thiais (Val-de-Marne) sont menacés de licenciement.Ils avaient notamment témoigné dans l’Humanité, vendredi dernier. LOUISE ET RÉMI ZANNI, 13 ans et 24 ans. V endredi 9 mars, Benamar Mokkedem, délégué syndical CGT, élu au CE, employé au restaurant d’Ikea Thiais, un magasin franchisé, était convoqué par la direction. Le lendemain, ce fut au tour de Tariq, trente et un ans, délégué syndical FO, employé à l’espace « bonnes affaires » du même magasin et trésorier de l’Association de défense des victimes d’Ikea. Ils ont dû répondre d’absences injustifiées – chacune d’entre elles ayant pourtant été expliquée par les deux employés. Par exemple, une des absences de Benamar s’expliquait par sa présence en réunion du comité d’entreprise. Le délégué est par ailleurs attaqué pour des prises de « pauses trop courtes » (sic) et des abus d’heures de délégation. Pour sa part, Tariq s’est vu reprocher des « problèmes de badgeage » et d’« insubordination » envers la hiérarchie. La direction veut faire porter à Tariq le rôle du « méchant ». Les dirigeants de l’entreprise les ont menacés de multiples sanctions, telles que des baisses de salaire ou plusieurs amendes – tout cela pouvant aller jusqu’au licenciement. Ces deux entretiens se sont déroulés dans une ambiance pesante ; d’après Benamar, « les cadres ne disent même plus bonjour ». Ils avaient en commun d’avoir, entre autres, témoigné dans l’édition de l’Humanité du vendredi 9 mars au sujet de l’affaire d’espionnage du personnel et de clients en litige avec Ikea. Ils rapportaient aussi les retards de salaires dont sont régulièrement victimes les employés du géant de l’ameublement suédois, les licenciements injustifiés, les « démissions douteuses » de certains employés et la pression constante de la hiérarchie… SON SOI-DISANT CODE ÉTHIQUE EXEMPLAIRE Les deux responsables syndicaux sont ressortis de leurs entretiens respectifs profondément choqués par ces accusations, et « en colère ». Tariq s’insurge contre le fait que, pour la direction, « la condescendance doive faire partie de l’action syndicale », « elle veut me faire passer pour une terreur » ! D’après les deux syndicalistes, « la direction d’Ikea n’a pas compris ». Ikea est en effet actuellement sous l’œil de la justice (lire ci-après). L’entreprise veut « faire payer aux employés la mise au grand jour de l’affaire d’espionnage, révélée par le Canard enchaîné » GRÈVE À L’IKEA DE BREST Samedi, environ 80 salariés du magasin brestois d’Ikea ont manifesté ; plusieurs dizaines de personnes (sur 210 employés) ont débrayé. Les délégués du personnel se disent « déçus et en colère » après le récent scandale d’espionnage. « Profondément choqués d’apprendre ces révélations », ils exigent avec leurs collègues des réponses à leurs questions. Par cette manifestation, ils ont voulu, disent-ils, montrer leur « déception » face à une entreprise prétendant défendre « des valeurs importantes ». Un appel à la grève dans les magasins logistiques d’Ikea a été lancé pour aujourd’hui, portant, notamment, sur des questions salariales et des conditions de travail. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 dans ses éditions du 29 février et du 7 mars, scandale qui l’a privée de toute crédibilité vis-à-vis de ses clients par rapport à son soi-disant code éthique exemplaire. Les deux syndicalistes déplorent que leurs collègues soient « fatalistes et très pessimistes » face aux agissements des dirigeants de l’entreprise : « on ne peut rien faire », « la liberté de parler n’existe plus »… Les problèmes sont loin d’être terminés pour les deux délégués ; afin de les surmonter, ils ont décidé de se battre. Ils vont prévenir la presse, et contacter l’inspection du travail. Il semble que, d’après Tariq, « chez Ikea, la chasse aux syndicats soit officiellement ouverte ». Selon un porte-parole de la direction, ces deux convocations auraient été prévues depuis février, « avaient été repoussées » et n’ont « strictement rien à voir » avec l’affaire d’espionnage en cours. Une entreprise, plusieurs scandales Depuis quelque temps déjà, l’image de marque d’Ikea se fissure. La communication de l’entreprise apparaît en complet décalage avec ses actes douteux. RÉMI ET LOUISE ZANNI, 24 et 13 ans. D epuis le 29 février, jour où le Canard enchaîné a publié ses premières révélations, l’image d’Ikea, la grande marque suédoise, a été sévèrement écornée. En effet, le journal satirique dévoilait l’histoire de Virginie Paulin, cadre supérieure espionnée par le groupe. Cette femme, atteinte d’une maladie grave, avait pris pendant presque toute l’année 2008 un congé maladie et était partie, avec l’accord de son médecin et de la Cnam, se reposer dans sa maison au Maroc. Pourtant, Jean-Louis Baillot et Claire Hery, deux responsables de l’entreprise, se disent persuadés que la maladie est illusoire et que Virginie voulait abuser de ses droits sociaux. Ils ont alors fait appel à Jean-François Fourès, un détective engagé à plusieurs reprises depuis 2003 pour fouiller le passé des salariés. Cela s’est soldé, en 2009, par un licenciement abusif, selon la décision des prud’hommes de Versailles en 2010. Mediapart (article publié le mardi 6 mars 2012) a pu avoir accès à une partie des échanges électroniques entre le détective et les deux zélés accusateurs. On y apprend que Jean-François Fourès espionne les faits et gestes de la malade, notamment par le biais de certaines informations puisées dans le Stic (Système de traitement des infractions constatées) et dans le fichier des cartes grises – ces derniers ne sont pourtant habituellement accessibles qu’aux forces de l’ordre. Ces exécuteurs des basses œuvres sont même allés jusqu’à l’usurpation d’identité pour tenter de confirmer leurs fantasmes. Ce n’est malheureusement pas la seule affaire d’espionnage ourdie par la direction : le Canard enchaîné a montré, dans sa dernière édition, l’étendue du scandale en cours. La curiosité de la multinationale suédoise est sans limites. Tout le monde y passe : employés, clients en litige, voire des personnes ayant l’audace de s’approcher un peu trop des entrepôts Ikea. La direction de l’entreprise n’a pas fait amende honorable, choisissant la violence et l’intimidation pour couvrir ses présumés méfaits (voir article ci-dessus). Tout juste a-t-elle consenti à « mettre en disponibilité » ses dirigeants impliqués par les articles du Canard enchaîné. La riposte est cependant en marche: des salariés brestois ont débrayé samedi (voir encadré). De plus, pour contrer la puissance d’une transnationale, il fallait un outil de lutte international : une vingtaine de syndicats d’employés d’Ikea se sont ainsi réunis mardi 6 mars, à Istanbul, afin de symboliser leur soutien au syndicat Koop-Is, qui a vu plusieurs de ses membres démissionner sous la pression de la filiale turque de l’entreprise. « 9 La direction n’a pas voulu entendre raison. Le protocole de sortie de crise qui nous a été présenté ne comprenait aucune avancée. ÉDOUARD MARTIN, RESPONSABLE CFDT D’ARCELORMITTAL À FLORANGE, VENDREDI. La filiale de la SNCF s’est portée acquéreur. À condition que Bruxelles n’exige plus le remboursement des aides publiques versées au Sernam. La moitié des emplois est menacée. » Geodis, seul candidat à la reprise du Sernam Pour un observatoire des suicides Le cabinet Technologia lance un appel à signatures pour la création de cet outil. STEPHEN GAPTEAU, 32 ans. V MEHDI BOUDIAF, 27 ans. LE CHIFFRE 826 C’est le nombre d’emplois que Geodis se propose de garder, sur les 1 600 du Sernam. Frédérick Florin A près le retrait des groupes Caravelle et Heppner, Geodis, filiale de la SNCF, reste seul en lice pour la reprise du transporteur Sernam. L’information a été confirmée vendredi. Geodis a toutefois conditionné son offre au refus de supporter le remboursement des aides que l’État français avait octroyées au Sernam entre 2005 et 2011. Des aides jugées illégales par la Commission européenne, qui exige leur remboursement. Cette dernière, qui avait retoqué en 2004 un apport public de 41 millions d’euros Le Sernam, en redressement judiciaire depuis la fin du mois de janvier, reviendrait finalement dans le giron de la SNCF. au Sernam, a reproché aux autorités françaises d’avoir « manqué à leur obligation » de les recouvrer. Il incomberait, selon Bruxelles, au Sernam de « rembourser cette somme ainsi que toutes les autres aides dont Sernam a bénéficié, soit un total de plus de 642 millions d’euros ». Le gouvernement a fait savoir, vendredi, qu’il étudiait « la possibilité d’un éventuel recours ». La reprise par Geodis aura pour conséquence la destruction de 769 emplois au Sernam et 57 chez BMV (Bourgey Montreuil Virolle), soit la moitié des emplois existants (1 600 postes). Ainsi, le Sernam, en redressement judiciaire depuis la fin du mois de janvier, reviendrait finalement dans le giron de la SNCF, qui s’en est séparée en 2005 par le biais d’une privatisation et de l’entrée dans le capital du fonds d’investissement Butler comme actionnaire majoritaire, à 80,32 %. Butler espérait réaliser une opération financière en rachetant le Sernam avant de le revendre en dégageant une plus-value. Son plan a échoué. Rappelons que le précédent plan de reprise de 2005 a eu pour conséquence la destruction d’une partie des emplois du Sernam. Un sentiment de « déception et de dégoût », selon Patrice Clos, syndicaliste FO, prévaut maintenant chez les travailleurs, qui estiment que l’État cherche à tout prix, depuis la privatisation en 2005, à se débarrasser d’eux. Les syndicats FO Transports et CGT ne comptent bien évidemment pas en rester là et promettent de se faire entendre auprès du ministère des Transports. Ils appellent à un rassemblement des salariés le 15 mars devant le ministère, pour contraindre la puissance publique à assumer sa responsabilité. Selon le Sernam, le tribunal de commerce de Nanterre pourrait examiner le dossier de reprise « fin mars ou début avril 2012, ou selon les délais utiles à la levée de toutes les conditions ». À Toulouse, les ex-SFR obtiennent justice La cour d’appel de Toulouse a condamné SFR et Teleperformance à indemniser 200 anciens salariés. En 2007, SFR avait cédé un centre d’appels à Teleperformance, qu’il avait chargé de mettre en place un plan social. LUCAS BAUDRY, 19 ans. V endredi, la cour d’appel de Toulouse a donné raison à 200 anciens salariés de SFR et Teleperformance qui avaient porté plainte, s’estimant victimes d’un plan social déguisé. La cour a confirmé le jugement des prud’hommes de Toulouse du 6 juillet 2010 en condamnant les deux sociétés à verser des indemnités allant de 4 000 à 30 000 euros par salarié, reconnaissant une « collusion frauduleuse » entre SFR (filiale de Vivendi) et Infomobile, repris depuis par Teleperformance. En 2007, SFR a cédé à Infomobile son centre d’appels de Toulouse, lui laissant le soin de mettre en place un plan de départs volontaires et de pousser les salariés à quitter l’entreprise du fait de conditions de travail dégradées. Selon l’avocat, Me Romain Geoffroy, SFR avait versé 100 millions d’euros à Infomobile pour « s’exonérer de ses obligations en matière de plan de sauvegarde de l’emploi ». Cette décision récompense un combat douloureux des anciens salariés, qui a commencé dès le début des transferts, il y a quatre ans. Éric Denjean, ancien délégué central adjoint CFDT du groupe SFR et délégué central Teleperformance, souligne que « pour les anciens salariés, l’aspect financier n’égale pas la reconnaissance de la justice. Ils aimaient leur « SFR MACHINE À CASH » Le groupe Vivendi a réalisé sur l’année 2011 un chiffre d’affaires de 28,813 millions d’euros. SFR, sa principale filiale, représente 57,71 % du chiffre d’affaires, soit 12,183 millions d’euros. Le résultat opérationnel du groupe s’est élevé à 5,860 millions d’euros pour Vivendi, dont 2,278 millions d’euros pour SFR (61,13 %). L’expression « machine à cash » prend tout son sens au regard de la trésorerie dégagée par SFR : 2,032 millions d’euros sur les 4,694 millions d’euros de Vivendi (soit 56,71 %). métier et leur entreprise, et ont été trahis. Certains n’ont toujours pas retrouvé de travail. Pour les mieux lotis, qui ont retrouvé un emploi, il est difficile de reprendre confiance ». Le délégué parle d’un « traumatisme » qui s’est traduit par « une tentative de suicide à Poitiers ». Au-delà de ces 200 premiers cas, l’affaire concerne 1 877 salariés au total. D’autres vagues de jugements, sur 500 dossiers environ, sont attendues à Toulouse, à Lyon et à Poitiers. Cette victoire ouvre la voie aux salariés d’autres grands groupes ayant les mêmes pratiques. endredi, le cabinet Technologia, en partenariat avec l’association France Prévention Suicides et à l’initiative de 44 personnalités, a lancé un site Internet (1) destiné à recueillir 44 000 signatures pour la création d’un observatoire des suicides. L’objectif est de « mettre la question de la prévention du suicide à l’ordre du jour et d’en faire une priorité de santé publique ». Avec 11 000 morts par an, le suicide est devenu une question dramatique qui touche toutes les professions et toutes les générations. Mais le manque et l’éparpillement des données rendent difficile la mise en place de mesures de prévention, note Technologia. Le 23 février, c’était une infirmière qui tentait de se suicider à l’hôpital de Roubaix. Selon un délégué SUD de l’hôpital, cette tentative est liée « Faire du suicide une priorité de santé publique » aux mauvaises conditions de travail. Le 15 septembre 2011, c’était une salariée de La Poste âgée de cinquante-deux ans qui mettait fin à ses jours. L’inspection du travail a mis en cause pour homicide involontaire le PDG, Jean-Paul Bailly. Le 25 février, c’était un jeune cadre de vingt-huit ans qui se défenestrait à La Poste de Rennes alors qu’il venait de faire l’objet de plusieurs changements d’affectation dans les deux derniers mois. Selon un rapport qui critique l’organisation du travail à La Poste cité dans le Monde, « les formations sur le stress et sa gestion accréditent l’idée que faire face à une telle organisation du travail est avant tout une histoire d’adaptation personnelle »... Autrement dit, ces formations remettent en cause l’individu et non le contexte professionnel. Aujourd’hui, les entreprises demandent aux employés de travailler plus avec de moins en moins de moyens, en mettant l’accent sur la mobilité et la flexibilité. Le milieu professionnel est donc un facteur prédominant. (1) www.observatoiresuicides.fr L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 10 Social-éco demandons le réexamen du budget 2012, qui prévoit la suppression de 1 500 emplois dont «198Nous pour la maintenance, la modernisation du réseau et la limitation du travail de nuit (...) » CGT CHEMINOTS. Accident mortel à la SNCF: la sécurité mise en cause POINTS CHAUDS SNCF et RATP : l’Unsa en justice contre le jour de carence Les syndicats Unsa de la RATP et de la SNCF ont engagé des actions judiciaires contre la journée de carence en cas d’arrêt maladie pour les fonctionnaires instaurée le 1er janvier 2012. Ils ne l’estiment pas valide au vu de leurs régimes spéciaux, car les salariés de la SNCF t de la RATP ne cotisent pas à la Sécurité sociale mais à la caisse particulière des cheminots, qui ne fonctionne pas sur le même modèle. Selon eux, aucune modification de statut n’a été effectuée, ce qui rend inapplicable cette journée de carence. Un jeune cheminot travaillant à la réparation des voies a perdu la vie,la semaine passée, dans la région de Tours. Pour la CGT, les conditions de travail sont à revoir. ArcelorMittal Florange : échec d’une ultime négociation entre la direction et les syndicats Les syndicats de l’aciérie ArcelorMittal de Florange (Moselle) menacent de durcir le mouvement à la suite de l’échec, vendredi, de négociations avec la direction. Selon Édouard Martin (CFDT), le protocole de sortie de crise proposé ne comprenait « aucune avancée ». Bien que Nicolas Sarkozy ait annoncé avoir obtenu de Lakshmi Mittal le déblocage de 17 millions d’euros « immédiatement et sans conditions de reprise économique » pour les travaux de maintenance, le rallumage du haut-fourneau, à l’arrêt depuis plusieurs mois, n’est pas garanti, selon M. Gaillard de Lavernée, préfet de Lorraine. ALIX-DOS SANTOS, 22 ans. JEAN-PHILIPPE LEBLANC, N ouveau drame à la SNCF. Dans la nuit du 8 au 9 mars, Anthony Ledon, jeune cheminot de vingt-deux ans, happé par un train, a trouvé la mort sur un chantier de travaux près de Toury (Eure-et-Loir). Une enquête du CHSCT statuera sur les raisons de l’accident. Cependant, la CGT cheminots pense que, sur ce chantier, les conditions de sécurité n’étaient pas toutes réunies. Dans un communiqué de presse, le syndicat met en avant plusieurs causes : le cheminot décédé, dont l’expérience professionnelle était très courte (cinq mois d’ancienneté), « travaillait dans un environnement bruyant, donc à hauts risques ». Selon nos sources, l’équipe se trouvait à 50 mètres du dispositif d’annonce servant à prévenir de l’arrivée d’un train. Mais la distance et le bruit assourdissant des travaux ne permettaient pas d’entendre le signal sonore. Bruno Arbesu 24 ans. PSA Sevelnord : de nouveaux débouchés prévus par PSA Les représentants de PSA ont annoncé jeudi au ministère de l’Industrie la mise en place d’une activité complémentaire de transformation de véhicules sur son site de Sevelnord. La production d’utilitaires restera la principale activité, mais serait complétée par la transformation d’utilitaires en camping-cars pour remplacer en partie la production de monospaces Fiat, qui s’arrêtera en 2017. Depuis le début de l’année, le nombre d’accidents du travail recensés à la SNCF est en hausse. Les diktats du profit et de la rentabilité prévalent sur la vie des salariés. De plus, la CGT souligne que ce chantier « se déroulait en six nuits, ce qui est préjudiciable en matière de rythme et de conditions de travail ». Le jeune cheminot en était à la sixième nuit et son équipe aurait dû travailler de jour, mais pour des raisons inconnues, la rotation n’aurait pas été effectuée. Et la fatigue accumulée aurait joué un rôle majeur dans ce drame. Enfin, le syndicat constate « l’augmentation exponentielle de l’accidentologie sur la région de Tours ». Cet énième accident met une fois de plus en avant un réel problème au niveau de la sécurité. En effet, depuis le début de l’année, le nombre d’accidents du travail recensés à la SNCF est en hausse ; trois ont été mortels. Soyons réalistes, les diktats du profit et de la rentabilité prévalent bien souvent sur la vie des salariés. « À l’équipement, quand un cheminot prend son service, il se met en danger », déclare Thierry Nier, du service de presse de la CGT cheminots. Plusieurs facteurs en sont responsables : les suppressions d’emplois, les cadences infernales entre les changements jour-nuit, les formations des agents écourtées pour cause budgétaire, l’équipement vieillissant, et ce, dans un contexte d’ouverture à la concurrence. Pour finir, un syndicaliste CGT nous dit : « La SNCF n’a pas besoin de se suicider pour mourir. » Si la direction ne change pas de politique, nous allons droit au « déraillement », autant pour les cheminots que pour les usagers. Nos dernières pensées vont à la famille du défunt. Le CV vidéo, vecteur de discrimination ? Le CV via webcam ou caméra est à la mode. Mais il comporte des risques. Un référendum en forme de pied de nez à Nicolas Sarkozy « Une chômeuse doit-elle accepter un emploi de strip-teaseuse ? » C’est la question provocatrice soumise aux élues de Lorraine par un collectif de demandeurs d’emploi. ALEXANDRA BRUGALÉ, 18 ans. P renant le contre-pied du référendum sur l’indemnisation des chômeurs proposé par Nicolas Sarkozy, le collectif de chômeurs la Ligne Thionville-Philadelphie (LTP), à Thionville (Moselle), lance un contre-référendum iro- nique, aujourd’hui. Inspiré par le cas d’une chômeuse de cinquante-trois ans à qui Pôle emploi a proposé un travail de strip-teaseuse, le collectif souhaite poser cette question aux femmes élues du département, voire de toute la Lorraine : « Cette chômeuse doit-elle accepter cet emploi de strip-teaseuse ? » Une démarche originale pour mieux montrer l’absurdité de la politique du gouvernement en matière d’emploi, et notamment de cette idée de référendum qui L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 vise à réduire l’indemnisation des chômeurs. Si le gouvernement persiste dans l’amalgame « les chômeurs sont tous des profiteurs », son initiative est un moyen supplémentaire de monter les salariés contre les sansemploi. Pour Gilbert Nucera, un des trois représentants du mouvement, « ce qui se passe est complètement irréaliste. Par ce vecteur humoristique, nous voulons que l’on prenne au sérieux la question du chômage ». Le collectif dénonce aussi les problèmes de fonctionnement de Pôle emploi. Il revendique plus de moyens financiers contre la « violence administrative ». « Des conseillers peuvent se retrouver avec 150 dossiers et ne peuvent en suivre concrètement aucun », constate Gilbert Nucera. C’est pour tout cela que la Ligue interpelle directement les élues féminines sur la stigmatisation des chômeurs. En parallèle, la LTP a rencontré presque tous les candidats à la présidentielle. Les bulletins seront dépouillés le 31 mars. ALIX DOS SANTOS, 22 ans. JEAN-PHILIPPE LEBLANC, 24 ans. LUCAS BAUDRY, 19 ans. L a nouvelle formule de CV à la mode est le CV vidéo, qui consiste à se présenter brièvement, par le biais d’une webcam ou d’une caméra. Le CV vidéo peut-il être efficace contre les discriminations à l’embauche ? Si le CV anonyme permettait de ne pas présenter son lieu habitation et son origine, donc de garantir une équité dans le choix des candidats, au contraire, l’apparition physique de la personne dans le CV vidéo peut induire une discrimination lors de son visionnage. Le fonda- teur du cabinet Mozaïk RH, Saïd Hammouche, prétend que le CV vidéo, au contraire du CV anonyme, permet aux postulants « souffrant de représentations négatives » de « fabriquer une image positive ». Or, une enquête du Bureau international du travail (BIT) avait montré en 2007 que près de quatre fois sur cinq, un employeur préférait embaucher un candidat d’origine « hexagonale ancienne » plutôt qu’un autre d’origine maghrébine ou noire africaine ! SOS racisme ajoute « rester très réservé » quant au CV vidéo « tant qu’il n’existera pas d’enquêtes sérieuses ». Pôle emploi souligne que d’autres voies existent (recrutement sans CV ou questionnaires de compétences) qui seraient en mesure de garantir l’accession à des entretiens d’embauche équitables. Après avoir été porté par le gouvernement comme l’outil antidiscrimination, le CV anonyme n’est plus une priorité. Pas sûr que la généralisation du CV vidéo aboutisse à une meilleure égalité des chances. Société BANLIEUES jeunes de banlieue ont les mêmes capacités que les autres, «maisLesdoivent fournir plus d’efforts pour atteindre les mêmes objectifs. HAROON MANDJOURSSA, ADJOINT À LA JEUNESSE À LA COURNEUVE. » 11 ANIL CIFTCI ET ERKAN TASLIGOL, 19 ans et 22 ans. L a politique est volontairement complexifiée pour la garder hors de portée des jeunes des banlieues », dit Tony, vingt-trois ans, étudiant à la faculté de Paris-XII et animateur à la maison du peuple Guy-Môquet. Il est venu au Forum Jeunes organisé par la mairie de La Courneuve, samedi dernier (voir encadré), pour encourager des jeunes à participer à la vie politique. Force est de constater que, à quarante jours du premier tour de l’élection présidentielle, la question des quartiers populaires n’engendre pas autant d’engouement qu’en 2007. La mode ne serait pas aux banlieues mais plutôt aux usines et aux ouvriers, trop souvent délaissés ces dernières années. Il aura fallu une opération coup de poing du collectif AClefeu, qui a investi un hôtel parisien, pour « mettre la banlieue et ses 8 millions d’habitants sous les projecteurs » des médias pendant quarante-huit heures. « On observe la volonté manifeste de la plupart des candidats à l’élection présidentielle de ne pas se mouiller sur le « problème des banlieues ». Cyril, étudiant en master de droit, participe au forum car il s’est « senti concerné et ce genre d’événement est l’occasion de faire valoir la voix des jeunes en politique ». Il incarne cette jeunesse issue des quartiers populaires, ambitieuse et qui croit en « un avenir meilleur pour ces jeunes ». Pour lui, toutes les occasions sont bonnes pour faire entendre son opinion. On est loin de l’image des jeunes de banlieue qui nous est généralement présentée. Sarah, présidente de l’ONG Gobal Potential, concède que « le forum est un exemple » mais se désole que ce genre d’événement « reste encore trop rare ». La présence massive est bien la preuve que les jeunes s’intéressent à la politique quand on leur donne la parole. Menad, seize ans, joueur de football américain à La Courneuve (Le Flash), dit se sentir « concerné par la politique, c’est notre quotidien mais on n’est pas représentés ». LE PLAN MARSHALL DE SARKOZY Le problème de la représentativité des jeunes et en particulier de ceux issus de l’immigration et des banlieues est une question qui revient dans beaucoup de discours politiques. Le plan Marshall des LES ÉLUS FACE AUX JEUNES Lancé par la ville de La Courneuve, l’objectif du Forum Jeunes est de leur donner la parole afin d’interpeller les élus sur leurs attentes et leurs difficultés quotidiennes. « Ce doit être un point d’appui pour la collectivité afin de lui permettre d’être plus utile aux jeunes », a expliqué Gilles Poux, le maire communiste, en guise d’introduction. Avec plus de 200 participants, cette assemblée a montré que les jeunes des quartiers populaires saisissent l’opportunité de s’exprimer lorsqu’elle se présente. Sécurité, logement, famille, éducation, loisirs… les thèmes abordés ont été multiples lors de cette assemblée populaire qui a ravivé la confiance des jeunes en la politique. Une initiative louable mais encore bien trop rare. banlieues promis par Sarkozy n’aura jamais abouti, faute de financement. Il ne s’agit pas de résoudre la question des quartiers populaires en signant les différents appels des collectifs et de les oublier le moment venu. Les habitants des quartiers populaires ne croient plus dans ces politiques qui leur ont promis monts et merveilles pendant des années sans pour autant répondre à leurs difficultés. À gauche, on aborde une autre stratégie que celle suivie en 2007, « sortir du droit d’exception pour faire entrer dans le droit commun » les quartiers populaires, selon Nordine Nabili, directeur du Bondy blog. Fini les discours où les politiques accordaient une place spécifique aux habitants des banlieues, leurs problématiques essentielles se juxtaposent à celles des autres citoyens : emploi, éducation, sécurité… Patrick Nussbaum Le Forum Jeunes s’est tenu à la mairie de La Courneuve. Le but : rétablir le dialogue entre les jeunes issus des quartiers et les élus municipaux. Pari ambitieux et encourageant. Lucile Casanova Pour rompre avec le fatalisme… Sécurité, logement, famille, éducation… les thèmes abordés ont été multiples lors du Forum Jeunes organisé par la mairie de La Courneuve, samedi. Pierre Laurent et Jean-Luc Mélenchon au QG du Front de gauche aux Lilas (Seine-Saint-Denis), vendredi dernier. Les banlieues enfin dans la campagne ! Le collectif Nous ne marcherons plus ! a été reçu, vendredi, par des représentants du Front de gauche pour débattre de cinq propositions en faveur de l’égalité. LOUIS LECOQ, 21 ans. L ’ambiance est au désordre organisé. Les écrans d’ordinateur sont dispersés aux quatre coins, entourés d’affiches, de slogans et de sièges où domine le rouge. À l’Usine, QG du Front de gauche aux Lilas (Seine-Saint-Denis), la campagne fait rage et chacun s’attelle à sa tâche. Une campagne où la banlieue semble bien aphone. Pour lui rendre sa voix, le collectif Nous ne marcherons plus !, mené par l’élu marseillais Nassurdine Haidari (PS), a préféré le bruit des mots à celui des pas, vingt-neuf ans après la Marche pour l’égalité et contre le racisme en 1983. Si, en cette période électorale, « la question des quartiers populaires est peu entendue », ses stigmates n’en ont pas pour autant disparu. Pierre Laurent (PCF), président du comité de campagne de Jean-Luc Mélenchon, est présent pour entendre les cinq propositions du collectif. Parmi celles-ci, un ministère de l’Égalité contre la discrimination sociale, raciale et territoriale, non spécifique à la banlieue. Car, pour Nassurdine Haidairi, « le problème des quartiers populaires n’est pas isolé ». Tout en acceptant le principe, Pierre Laurent rappelle que le ministère de la Ville a déjà été prétexte à des politiques d’exception pour les quartiers populaires, et qu’il serait plutôt favorable à une « politique d’égalité entre les territoires ». D’autres pistes sont ouvertes : les contrôles au faciès, récurrents, seraient empêchés par un suivi rigoureux des contrôles d’identité ; les dossiers de loge- ment, rendus anonymes, et les logements sociaux, mieux répartis sur le territoire. Sur ce point, Pierre Laurent dénonce le « lourd héritage légué par la droite » dans la ville de Paris. Autre proposition, « faire remonter les talents » en limitant à trois le nombre de mandats électifs successifs. Mais cette ambition de « diversité » ne se cantonne pas aux frontières, en s’étendant à une représentativité diplomatique conforme à l’image de la France. Enfin, l’État devra mettre un cadre aux entreprises en conditionnant l’attribution des marchés publics à un engagement réel contre les discriminations. En acceptant ces propositions, le FG marque une avancée vers l’égalité, dont l’expression passe aussi par la présence des quartiers populaires dans le paysage politique actuel. Si, pour Nassurdine Haidari, « le combat, on le gagnera ensemble », le silence de nombreux partis face aux propositions du collectif semble, lui, dire l’inverse. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 12 Société POINTS CHAUDS SNCF : on n’a pas fini d’être en retard Hier, à la suite d’un incendie qui a causé d’importants dégâts sur des installations d’alimentation électrique à Gagny, en Seine-Saint-Denis, le trafic du RER E et du Transilien au départ de la gare de l’Est à Paris a été interrompu. Malgré les prévisions d’amélioration de la SNCF, la circulation des trains a été stoppée entre les gares de Noisy-le-Sec et de Vaires-Torcy. 11 670 C’est le nombre d’expulsions locatives effectives en 2010, soit 10,1 % de plus que l’année précédente. Tout le monde dehors, les expulsions reprennent Samedi, 4 000 personnes ont défilé à Paris contre la fin de la trêve hivernale, fixée à mercredi, tandis que des manifestations similaires se déroulaient dans 27 autres villes. Un enfant retrouvé asphyxié Le village de Saint-Julien-sur-Suran divisé par le projet de prison Hier, les 312 électeurs de Saint-Julien-sur-Suran étaient appelés à se prononcer par voie de référendum sur la construction d’un centre de détention. Le projet avait soulevé une vive polémique au sein du village. Si, pour les uns, une prison est une occasion de relancer l’économie locale, pour d’autres, il n’est pas question de vivre à côté d’une prison. Nucléaire : jamais deux sans trois Un réacteur de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle) s’est arrêté automatiquement samedi, sans « conséquences sur la sûreté des installations », a indiqué la direction. Il s’agit du troisième arrêt constaté ces dernières semaines. Cet événement n’aurait pas eu non plus de conséquences « sur la sécurité du personnel, ni sur l’environnement », a ajouté la direction. CLÉMENT SMADJA, 23 ans. C haude ambiance dans les rangs, où la rage des manifestants n’a pas entamé leur espoir. Au rythme des fanfares et des groupes de musique de tous bords, dans une ambiance de fête, ils sont venus dénoncer la fin de cette trêve, qui court du 1er novembre au 15 mars et interdit les expulsions de locataires ne pouvant plus payer leur loyer. Mêlant personnes solidaires et menacées d’expulsion, une foule multiculturelle entonne en chœur : « La loi Dalo, c’est bien, mais sans logements, ça vaut rien ! » À l’appel de la Plateforme logement des mouvements sociaux, le cor- (Publicité) Francine Bajande Dans le Val-d’Oise, un enfant de douze ans a été retrouvé mort dans son lit, asphyxié par un sac en plastique mercredi dernier. Le père a découvert son fils au moment du réveil. L’asphyxie, confirmée par l’autopsie, exclut également tout autre acte de violence. Une enquête a été confiée à la sûreté départementale. À l’appel de la Plateforme logement des mouvements sociaux, le cortège a marché de la Bastille à la place du Palais-Royal, samedi. tège a marché de la Bastille à la place du Palais-Royal, derrière une banderole : « Non aux expulsions, un toit c’est un droit ! » Une femme prend la parole au nom des mal-logés du 9e arrondissement de Paris. Elle témoigne de la « peur de se marginaliser », chaque jour un peu plus présente. Un sentiment que connaît aussi une militante du comité d’action logement, mère de cinq enfants, qui vit dans un appartement insalubre depuis onze ans. Sa famille n’a aucune intimité. Elle a bien été relogée plusieurs fois, mais « à chaque fois, c’était pire ». Avec la fin de la trêve hivernale, toutes deux craignent pour leur avenir. « Plus de 100 000 familles sont potentiellement expulsables », lâche Serge Incerti, président de la Confédération « Plus de 100 000 familles sont potentiellement expulsables. » nationale du logement (CNL), qui promet de tout mettre en œuvre pour « s’opposer à ces expulsions, même physiquement s’il le faut ». Odile Barral, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature, rappelle que les magistrats sont aussi « bien placés pour observer la précarisation de la société. On voit de plus en plus d’expulsions de familles sans propositions de relogement ». Les expulsions locatives, menées par la force publique, ont en effet augmenté de 10,1 % en 2010, à 11 670, contre 10 597 l’année précédente. De plus en plus d’intérimaires et de travailleurs en contrat à temps partiel sont concernés. La présence d’un agent d’entretien confirme cette progression de la pauvreté, largement imputable au montant des loyers. Malgré son emploi, il est contraint de vivre en chambre d’hôtel, un « taudis » loué chez un marchand de sommeil. Zouina, elle, est venue par solidarité… et « pour faire changer la loi ». « Chaque humain, chaque citoyen doit avoir accès à un toit. Il y a un grand malaise de voir que la cinquième puissance mondiale ne donne pas de logement à tout le monde ! » s’indigne-t-elle, préconisant les réquisitions et la baisse des loyers. Marie, soixanteneuf ans, s’est déplacée depuis 18e arrondissement. « Il faut recréer du tissu social, construire du logement social, arrêter d’opposer les ghettos de riches aux ghettos de pauvres », renchérit cette ancienne enfant des rues. Malheureusement, à ce jour, l’ensemble des associations et des partis présents lors de ce rassemblement ont de quoi s’inquiéter. Malgré leur engagement, les derniers sondages montrent que le logement n’est pas encore la première préoccupation des Français. Pour Éric Coquerel, du Front de gauche, il est grand temps de prendre conscience que « la question du logement est bien plus essentielle dans la campagne présidentielle que de débattre sur l’abattage halal ». APOSTROPHE L’urgence aussi pour les travailleurs sociaux JULIEN GARES, 25 ans. Une exposition de 13 affiches au format 50x70 cm, plastifiées 142 rue Rateau, 93120 La Courneuve. tel : 01 48 35 01 07 mail : [email protected] L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Lorsqu’on interroge les travailleurs sociaux sur leur quotidien, un sentiment d’« injustice sociale », d’« abandon », de « stigmatisation du public » ressurgit. Confrontés à des populations très touchées physiquement et psychologiquement, bon nombre d’éducateurs, de médecins urgentistes, d’assistantes sociales, d’animateurs ne se retrouvent pas dans le battage médiatique lié au logement. Cette campagne semble oublier la frange de la population la plus précaire. Elle ignore les étapes de resocialisation indispensables lorsqu’il s’agit de retrouver un logement durable. Les équipes sont débordées par la demande quotidienne d’écoute, d’aide et d’orientation et n’ont plus les moyens de proposer des solutions adaptées. La sectorisation des services a creusé le fossé entre les services médicaux, psychiatriques et culturels. Il est urgent de créer des passerelles afin de mener à bien toutes nos missions. La situation catastrophique de l’urgence sociale devrait être un des thèmes principaux de la campagne présidentielle. Mais qui osera proposer une augmentation du nombre de places d’hébergement d’urgence, et pas seulement disponibles en période hivernale ? Qui osera se confronter à ce public qui a perdu toute confiance dans la classe politique ? Qui osera rencontrer cette France des oubliés, lui proposer des solutions et lui donner une chance de s’en sortir ? Cette « populace » n’est pas un corps électoral, mais elle fait partie de la France que vous voulez diriger. maintien d’un modèle social protecteur n’est pas menacé «parLel’immigration. ’A »M H , ARTIN IRSCH PRÉSIDENT DE L 13 GENCE DU SERVICE CIVIQUE. Pourquoi on nous appelle les pions… Étudiants, un avenir à vendre? Source d’angoisse pour beaucoup de jeunes, l’orientation fait salon à la porte de Versailles. ARMELLE CLOTEAU, 21 ans. I Dans les collèges, on les appelle désormais « assistants d’éducation ».Un terme flatteur qui cache un travail ingrat.Témoignage. 21 ans. L e souhait de me familiariser avec l’enseignement m’a décidé, pour financer mes études de philosophie-lettres modernes, à travailler dans mon ancien collège de l’Essonne. J’ai pu voir l’envers du décor et obtenir la réponse à ma question de collégienne : « Pourquoi sommes-nous si méprisés par les surveillants et le personnel administratif ? » Dans une journée type, il nous est demandé à toutes les heures de surveiller les élèves, mais aussi de les accompagner dans leurs difficultés de vie scolaire, de prendre contact avec leurs parents, et ce, tout en assurant nos fonctions sur chaque poste au sein de l’établissement : l’ouverture et la fermeture du portail, l’accueil des élèves en vie scolaire, celui des parents, la surveillance dans la cour, les couloirs, les coins, les toilettes, etc. Le descriptif de notre fonction, rédigé et donné par les conseillères principales d’éducation (CPE), explique que « politesse et courtoisie sont des pré-requis essentiels : on s’arme de son plus beau sourire et on se regonfle de patience ». Indispensable en effet, lorsque, dans une journée de dix heures, nous étions seulement quatre surveillants Les enjeux éducatifs n’étaient finalement que de « surveiller et punir » les élèves. pour côtoyer sept cents élèves, avec en tête ces exigences, précisées dans le même formulaire officiel : « Le collège est notre territoire, pas celui des élèves. Et c’est par notre présence en tous lieux et inopinée que nous le marquons. » Cette brochure de formation, qui surnomme aussi les élèves « les monstres », montre à quel point le terme d’« éducation » est ambigu. En effet, à quoi devons-nous éduquer les enfants, sinon à subir le mépris des adultes, qui sont Myr Muratet/Fedephoto HÉLÈNE ALLAIN, ci, on trouve de tout », résume un groupe de lycéennes. À peine entré dans le Parc des expositions de la porte de Versailles (Paris, 15e), la surenchère des exposants est partout : études longues, courtes, maquillage, commerce, sciences politiques, fonction publique… Ce Salon généraliste, organisé par le magazine l’Étudiant, qui réunit 600 exposants et attend 200000 visiteurs, a lieu deux fois par an. L’édition du printemps précède de peu la clôture des admissions dans le supérieur. D’où une certaine tension. Malgré Internet, les jeunes se trouvent toujours sous-informés sur leurs possibles orientations. Ils évoquent un manque de structure compétente ou d’interlocuteurs pertinents. « Si j’avais un don humanitaire à effectuer en direction de la France, j’organiserais un lâcher de conseillers d’orientation formés ! », lance une exposante étrangère. « Sur les brochures, chaque école essaye de se vendre. Le seul moyen de se faire un avis, ce sont les témoignages des étudiants », dit un jeune homme. Certains s’avouent désemparés. Voire fatalistes. « Sur ce salon, à moins de 6000 euros l’année, on ne trouve pas de formation. » Un père regrette la faible présence des écoles publiques. « Faudra-t-il acheter l’avenir de nos enfants? », interroge-t-il. « Assistance d’éducation au collège Léonard-de-Vinci, à Witry-les-Reims (Marne). contraints d’agir la plupart du temps dans l’urgence et par réflexe ? La duplicité de la hiérarchie qui exigeait des pions d’être efficaces dans la discipline mais qui ne les contrôlait ni ne les accompagnait humainement transforme l’idée vertueuse que l’on se fait de notre travail d’« assistant d’éducation » : il devient celui du chien de garde. Comment l’éducation nationale conçoit-elle l’« éducation » lorsque dans les faits, elle contraint chacun à désap- prendre le respect de l’autre ? Les enjeux éducatifs n’étaient finalement que de « surveiller et punir » les élèves. Notre corps devient le « panoptique » du système carcéral que Michel Foucault décrit dans Naissance de la prison. Si je parle au passé, c’est que cette aventure auprès des adolescents a pris fin quelques mois plus tard. À l’occasion de mon changement d’emploi du temps, en milieu d’année, la principale est même allée jusqu’à me sug- gérer de sécher certains cours à l’université pour travailler au collège. C’était ça ou je n’avais qu’à démissionner. Voilà comment l’emploi de surveillant se passe d’« éducation ». Dans un système perverti par le manque de moyens, où les mots ont perdu une bonne partie de leur signification, mon ambition de travailler comme professeur plus tard se trouve aujourd’hui remise en question. À moins d’un changement profond de politique éducative. Devant l’hôpital Tenon, bataille autour de l’IVG Sous l’œil des CRS, plusieurs centaines de pro et anti- droit à l’avortement se sont rassemblés samedi, à Paris. MATTHIEU MORTELETTE, 27 ans. S amedi, 10 h 30, aux abords de l’hôpital Tenon (Paris 20e). Une ambiance de marché sympathique, mais il y a un hic. On se demande ce que fait cette procession catholique en plein Paris, violant la laïcité en pratiquant des prières en plein espace public, le tout accompagné par un élu de la République – en l’occurrence Charles Berthollet, maire de la petite ville de Rouvray, dans l’Yonne. « Nous avons aboli la peine de mort mais pas l’avortement », « Droit de s’opposer à la mort d’un enfant », lit-on sur les banderoles. Un cordon de CRS sépare les cortèges des pro et anti-IVG. Les défenseurs du droit des femmes à disposer de leur corps arrivent avec une fanfare et des slogans provocateurs : « Si Marie avait connu l’avortement, on n’aurait pas tout ces emmerdements! » La mobilisation est large (Front de gauche, PS, les Verts, NPA, CGT, SUD, Solidaires, Attac, militants libertaires et associatifs), le Parti communiste est représenté par l’élu du 20e, Pierre Mansat. Les militant(e)s échangent expériences et souvenirs personnels. « Moi, j’ai eu recours à l’avortement dans les années 1970. Et j’ai attrapé une septicémie à cause des mauvaises conditions d’hygiène imposées par la clandestinité », raconte une sexagénaire, qui ajoute : « La pression morale était forte. » « L’avortement pour les majeurs n’est remboursé qu’à 80 %. Or, l’IVG a un coût moyen de 300 euros », rappelle Jeanine Leroux, membre du collectif de Tenon, à l’origine de la manifestation. Le nombre d’IVG pratiquées en France est de 220 000 en moyenne par an. Mais c’est un droit menacé : « 179 centres d’IVG ont été fermés en dix ans, notamment sous l’impulsion de la loi Bachelot », ajoute Jeanine Leroux. UN LIEU TRÈS SYMBOLIQUE Le centre IVG de l’hôpital Tenon avait fermé en juillet 2009 dans le cadre de la réorganisation des soins dans les hôpitaux parisiens, avant de rouvrir en avril 2011, à la suite de la mobilisation du collectif. Devenu une sorte de symbole de cette lutte pour le droit des femmes, il a été l’objet de multiples rassemblements des anti-IVG depuis le mois de septembre 2011. Deux d’entre eux avaient donné lieu à des « débordements violents » avec des contre-manifestants, selon la police. Avec la manifestation de samedi, c’est la sixième fois que les anti IVG (représentés par SOS tout-petits, Laissez-les vivre ou Civitas) se rassemblent devant l’hôpital Tenon. Et ils promettent déjà de remettre cela le 31 mars. « Ils vivent la réouverture du centre IVG Tenon comme un échec », analyse Jeanine Leroux. Dans le cortège d’en face, une catholique offusquée par ces prières de rue témoigne : « Garder un enfant pour le délaisser, l’abandonner, à quoi ça sert ? » D’autres adoptent un discours plus imagé encore : « Le plumard, c’est pas l’usine. » w Voir sur www.humanite.fr le reportage photo d’Antoine Ligier. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É scolarisé, ça coûte cher. » «J Un enfant B , (UMP) R . 14 Société ACQUES AUMANN MAIRE DE UBELLES Avec les privés d’école de Rubelles Dans cette petite ville (UMP) de Seine-et-Marne, des familles demandeuses d’asile n’arrivent pas à faire scolariser leurs enfants, otages d’un conflit administratif entre la mairie et l’inspection académique. MARGOT CIMIC, 21 ans. L ors de l’émission Parole de candidat, le 5 mars 2012 sur TF1, un citoyen s’interrogeait : « Comment se faitil, alors que l’école en France est obligatoire jusqu’à seize ans, qu’on voit des enfants de dix ans faire les poches dans le métro ? » On aurait pu lui répondre que les familles demandeuses d’asile en France ont bien du mal à scolariser leurs enfants. C’est le cas d’une demi-douzaine d’entre elles, qui vivent à Rubelles, en Seine-et-Marne, et ne savent plus comment s’y prendre pour faire entendre leurs droits. Les mères de famille mènent solidairement, depuis huit mois, un combat qui dépasse les barrières linguistiques. D’origine sri lankaise, kurde, tchétchène, géorgienne et roumaine, elles se disent toutes très fatiguées par les interminables démarches administratives. Elles logent dans un hôtel qui fait office d’hébergement d’urgence. Dans sa chambre, une mère tchétchène se dirige vers le placard : « Voilà ! Ça fait six mois que les cartables attendent de pouvoir aller à l’école. » La mairie refuse de procéder à l’inscription de leurs enfants. Selon le premier adjoint de la commune, Michel Dreano (UMP), l’école de Ru- belles ne disposerait pas des moyens nécessaires pour accueillir des enfants ne parlant pas français. Pourtant, d’après l’inspection académique, un instituteur spécialisé est prêt depuis plusieurs mois à recevoir ces jeunes élèves. Manque de moyen ou refus d’accueillir des enfants étrangers ? Il semblerait que la mairie multiplie les obstacles à ces inscriptions. Ce n’est pas faute pour les parents de chercher des moyens pour s’en sortir. Sans téléphone et sans Internet, toute démarche administrative implique un déplacement à Paris. Malgré l’aide des travailleurs sociaux de la Cafda (Coordination de l’accueil des familles demandeuses d’asile) de Paris, ces mères passent beaucoup de temps à chercher des aides alimentaires et médicales : « Nous mettons près d’une heure en bus pour aller chercher des couches à l’hôpital de Melun », dit l’une d’entre elles. À l’intérieur de l’hôtel, les familles essaient tant bien que mal de tenir les enfants, cantonnés à quelques mètres carrés. Au lieu de bénéficier de ce droit fondamental qu’est l’école, ils passent leur journée enfermés dans leurs chambres. Pendant combien de temps encore ? L’immigration, une richesse Plaidoyer d’un ancien sans-papiers contre les discours de haine. WAGI KANOUTÉ, 39 ans. L ’élection approche et le thème de l’immigration est de nouveau brandi par Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen, stigmatisant les immigrés en situation irrégulière comme régulière. Pourtant, l’immigration est une richesse. Elle donne plus à la France qu’elle ne prend. Les immigrés sans papiers travaillent, ils ne font pas de la charité. En France depuis 2002, j’ai moi aussi travaillé, payé des impôts, cotisé à la Sécurité sociale, comme tout citoyen français. Et je n’ai eu ma régularisation qu’en mai 2011. Heureusement, les Français ne sont pas dupes du discours du pouvoir. Durant nos luttes, ils étaient à nos côtés, apportant soutien moral et matériel. Car les Français resteront toujours aux côtés de ceux qui souffrent. L’Humanité est officiellement habilité pour la publication des annonces judiciaires et légales dans les départements : 91 (arrêté 2011-PREF/DCSIPC/BAGP n° 94) 5,11 euros HT/ligne, 92 (arrêté CAB/SDCI n° 2011-864) 5,48 euros HT/ligne, 93 (arrêté n° 2011 - 3290) 5,43 euros HT/ligne, 94 (arrêté n° 2011/4239) 5,41 euros HT/ligne. La ligne se définit par 40 caractères, signes ou espaces de corps 6. SARL ABS Au capital de 10 000 euros Siège social : 28, avenue Édouard-Vaillant 93500 Pantin RCS Bobigny 523 072 106 Suite à l’AGE du 31 janvier 2012, les associés décident la dissolution anticipée de la société, à compter du 31 janvier 2012. Liquidateur : M. MJAIED Faouzi, demeurant 20, rue du Rhin, 93110 Rosny-sous-Bois. Siège de liquidation : 28, av. Édouard-Vaillant, 93500 Pantin. Par AGE du 31 janvier 2012, clôture des opérations de liquidation et quitus de son mandat au liquidateur. Radiation de la société du RCS de Bobigny. SARL ATM Au capital de 2 000 euros Siège social : 69, avenue de la Division-Leclerc 93700 Drancy RCS Bobigny 531 136 455 Aux termes d’une délibération de l’AGE en date du 24 février 2012, il a été décidé de nommer en qualité de gérant de la société ATM, M. KARAKURT Ahmet, demeurant 69, avenue de la Division-Leclerc, 93700 Drancy, en remplacement de M. KARAR Tahir, démissionnaire, à compter du 24 février 2012. L’article 12 des statuts a été modifié en conséquence. Mentions faites au RCS de Bobigny. SARL B.O.1 Au capital de 7 000 euros Siège social : 145, rue Marc-Sangnier 94700 Maisons-Alfort RCS Créteil 529 071 805 Suivant P.-V. de l’AGE en date du 15 février 2012, les associés ont décidé de changer l’objet social qui devient : plomberie, électricité, isolation, peinture, petite maçonnerie, climatisation chaudfroid, chauffage et tous travaux de rénovation de bâtiment. Mention faite au RCS de Créteil. 6, place Jean-Bart, 93330 Neuilly-surMarne. Immatriculation au RCS de Créteil. BIGEST DISCOUNT Sigle : BD SAS au capital de 100 000 euros Siège social : 34, av. des Champs-Élysées 75008 Paris RCS Paris 529 822 256 Par AGE en date du 1er février 2012, il a été décidé de transférer le siège social au 20, rue de l’Hôtel-de-Ville, 92200 Neuilly-sur-Seine, à compter de ce jour ; de nommer en qualité de gérant M. PADONOU Fulbert, demeurant 3, place des 3-Frères-Lebeuf, 92400 Courbevoie, en remplacement de Mlle Leila OUKHABOU, démissionnaire, à compter du 1er février 2012, et de modifier la dénomination sociale qui devient : BIGGEST DISCOUNT, à compter du même jour. CECAF SARL au capital de 12 000 euros Siège social : 89, rue Heurtault 93300 Aubervilliers RCS Bobigny 509 666 822 Par AGE en date du 1er septembre 2011, les associés ont décidé, à compter du 1er septembre 2011 : - de nommer M. MAKRAT Hicham, demeurant 100, rue Saint-Honoré, 75001 Paris, en qualité de gérant, en remplacement de M. ENYEGUE Jacques Bounoungou, gérant démissionnaire ; - de modifier la dénomination sociale, qui devient : WEB COM et de supprimer le nom commercial de la société ; - de modifier l’objet social comme suit : régie publicitaire on-line, conseil en web marketing, net affiliation, E-mailing, E-réputation, veille média on-line ; web agency, création de supports de communication on-line, sites internet, intranet, applications informatiques sur tout support, référencement de sites internet, création graphique. Mentions en seront faites au RCS de Bobigny. AVIS DE CONSTITUTION Par acte SSP, en date du 21 février 2012, constitution de : Dénomination : BBA 34 COIFFURE. Forme : SAS Unipersonnelle. Capital : 1 000 euros. Siège social : 94, rue Roger-Salengro, 94500 Champigny-surMarne. Objet : la coiffure homme, femme ; l’achat et la revente de produits capillaires, de beauté, cadeaux, et bijouterie fantaisie. Durée : 99 ans. Président : M. KHERIFI Amar, demeurant AVIS DE CONSTITUTION Dénomination : CIPAVI BAT. Forme : SARL. Capital : 7 500 euros. Siège social : 77, avenue du Président-Wilson, 93210 La Plaine-Saint-Denis. Objet : électricité, peinture, bâtiment général. Durée : 99 ans. Gérance : M. Yaqoob MUHAMMAD, demeurant 77, avenue du Président-Wilson, 93210 La PlaineSaint-Denis. Immatriculation au RCS de Bobigny. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 DECO’LUX SARL au capital de 7 500 euros Siège social : 43, av. du Président-Salvador-Allende 93100 Montreuil RCS 491 357 786 Aux termes de l’AGO du 15 février 2012, les associés ont approuvé les comptes définitifs de liquidation, déchargé M. LECLERCQ Franck de son mandat de liquidateur, donné à ce dernier quitus de sa gestion, ont constaté la clôture de la liquidation à compter du 31 décembre 2011. La société sera radiée du RCS de Bobigny. AVIS DE CONSTITUTION Par acte SSP, en date du 12 février 2012, constitution de : Dénomination : ÉCOLE DE CONDUITE RÉVOLUTION. Forme : EURL. Capital : 2 000 euros. Siège social : 20, rue Fontaine, 93200 Saint-Denis. Objet : établissement d’enseignement de la conduite auto et moto. Durée : 99 ans. Gérance : M. HAMMAMI Nibel, demeurant 4, passage de Jouy, 93200 Saint-Denis. Immatriculation au RCS de Bobigny. ÉDITIONS GANG SARL au capital de 10 000 euros Siège social : 101, rue Victor-Hugo 94200 Ivry-sur-Seine RCS Créteil 522 538 800 Suivant le procès-verbal en date du 15 décembre 2011, l’assemblée générale extraordinaire a pris en compte la démission de M. LE MINTER Gaël, en qualité de cogérant, à compter du 15 décembre 2011. Mention faite au RCS de Créteil. décidé de transférer le siège de la société au 25 A, rue Jean-Jaurès, 93200 Saint-Denis, à compter du 1er janvier 2012, et de modifier en conséquence l’article 4 des statuts. Il a été décidé de nommer M. Jean-Pierre BOUANHA, demeurant 15, rue des Montiboeufs, 75020 Paris, en qualité de cogérant de la société. M. Jean-François PARENT, demeurant 18, rue de Strasbourg, 93200 Saint-Denis, reste cogérant de la société à compter du 1er janvier 2012, et de modifier en conséquence l’article 33 des statuts. Il a été décidé de changer la dénomination de la société qui devient : JEAN-FRANÇOIS PARENT, JEANPIERRE BOUANHA & ASSOCIES, à compter du 1er janvier 2012, et de modifier en conséquence l’article 3 des statuts. AVIS DE CONSTITUTION Par acte SSP, en date du 1er mars 2012, constitution d’une société présentant les caractéristiques suivantes : Dénomination sociale : KENZA KAFTAN & LES DÉLICES DE SHERAZADE. Sigle : K.K & LDDS. Forme juridique : SAS. Capital social : 2 000 euros. Siège social : 15, rue Henri-Dunant, 93800 Épinay-sur-Seine. Objet social : wedding planner, organisateur en événementiel mariage ; traiteur en salle ; vente, location et import-export de caftan, textile et décoration divers, achat, vente, location, import, export de véhicules terrestres à moteur tous tonnages. Durée : 99 ans. Présidente : Mme EDDOUCH Fatima, demeurant 15, rue Henri-Dunant, 93800 Épinay-sur-Seine. Immatriculation au RCS de Bobigny. AVIS DE CONSTITUTION AVIS DE CONSTITUTION Dénomination : G.H INVEST. Forme : SAS. Sigle : OR DE FRANCE. Capital : 10 000 euros. Siège social : 90, rue Pierre-Semard, 92320 Châtillon. Objet : conseil, négoce, expertise de tous objets en métaux précieux. Durée : 99 ans à compter de l’immatriculation au RCS de Nanterre. Président : M. Antoine GADAUD, demeurant 11, rue Neuve-SaintGermain, 92100 Boulogne, nommé pour une durée indéterminée. Dénomination : SARL KRM. Forme : SARL. Capital : 4 000 euros. Siège social : 74, avenue de La République, 93300 Aubervilliers. Objet : travaux de rénovation intérieure : peinture, enduit, revêtement de sol et murs. Durée : 99 ans. Gérance : M. ELDAHMA Rabia, demeurant 74, avenue de La République, 93300 Aubervilliers. Immatriculation au RCS de Bobigny. JEAN-FRANÇOIS PARENT & ASSOCIÉS SARL au capital de 7 622,45 euros Siège social : 62, rue Gabriel-Péri 93200 Saint-Denis RCS Bobigny 432 656 890 Aux termes du procès-verbal de l’AGO en date du 20 décembre 2011, il a été LES QUATRE COIN DU MONDE SARL au capital de 4 000 euros Siège social : 4, rue Chevreul 92230 Gennevilliers RCS Nanterre 531 368 033 L’AGE du 30 janvier 2012, a décidé de nommer M. El Mostafa BENACHLIOU, demeurant 54, avenue Gabriel-Péri, 92230 Gennevilliers, en qualité de gé- rant, en remplacement de M. Driss MOUTACHAKER, et la nomination de M. Abdelmajid NAKAD, demeurant 6, rue Henri-Dunant, 94370 Sucy-enBrie, en qualité de cogérant. Mentions faites au RCS de Nanterre. AVIS DE CONSTITUTION Par acte SSP, en date du 21 octobre 2011, constitution de : Dénomination : S’AHFIR. Forme : SARL à capital fixe. Capital : 2 000 euros. Siège social : 26, boulevard MaximeGorki, 93240 Stains. Objet : pizzas en livraison et à emporter ; vente de boissons non alcoolisées. Durée : 99 ans. Gérance : M. Mohamed CHERGUI, demeurant 41, rue de Chantilly, 93200 Saint-Denis. Immatriculation au RCS de Bobigny. AVIS DE CONSTITUTION Dénomination : SARL SUNDY. Forme : SARL. Capital : 1 000 euros. Siège social : 77, rue Léopold-Rechossière, 93300 Aubervilliers. Objet : achat, vente et fabrication de vêtements. Durée : 50 ans. Gérance : M. KEO Bun Thoeun, demeurant 50, rue du Disque, 75013 Paris. RCS de Bobigny en cours. AVIS DE CONSTITUTION Par acte SSP, en date du 23 février 2012, constitution de : Dénomination : TULIP. Forme : SARL. Capital : 600 euros. Siège social : 1, rue Henri-Barbusse, 93300 Aubervilliers. Objet : achat, vente de tous produits textiles et de tous produits non réglementés ; travail à façon et fabrication donnés en sous-traitance. Durée : 99 ans. Gérance : M. Omer Faruk TANIS, demeurant 12, rue de Paris, 93800 Épinay-sur-Seine. Immatriculation au RCS de Bobigny. WSM PEINTURE SARL au capital de 8 000 euros Siège social : 82, rue Championnet 75018 Paris RCS Paris 539 734 848 00010 L’AGE en date du 27 février 2012, a décidé de transférer le siège social au 8 bis, Villa-Briffault, 92600 Asnières-surSeine, à compter de ce jour. La société sera désormais immatriculée au RCS de Nanterre. Règles typographiques des annonces judiciaires et légales SURFACES CONSACRÉES AUX TITRES, SOUS-TITRES, FILETS, PARAGRAPHES, ALINÉAS FILET • Chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un filet 1/4 gras. L’espace blanc compris entre le filet et le début de l’annonce sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de l’annonce et le filet séparatif. L’ensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de l’annonce par des filets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le filet sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. TITRES • Chacune des lignes constituant le titre principal de l’annonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera l’équivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs d’interligne séparant les lignes de titres n’excéderont pas l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. SOUS-TITRES • Chacune des lignes constituant le sous-titre de l’annonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera l’équivalent d’une ligne de corps 9 points Didot, soit arrondi à 3,4 mm. Les blancs d’interlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points Didot, soit 1,5 mm. PARAGRAPHES ET ALINÉAS • Le blanc séparatif nécessaire afin de marquer le début d’un paragraphe ou d’un alinéa sera l’équivalent d’une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces définitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans l’éventualité où l’éditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi. Monde J’ai exhorté le président (Bachar Al Assad) à tenir compte du proverbe «africain qui dit: “si tu ne peux pas changer le sens du vent, alors retourne ’ONU D ta voile”.» K A , SYRIE OFFI NNAN EX SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L EN VISITE À 15 AMAS Entre violences sur le terrain et bras de fer diplomatique Sur fond de nouvelle effusion de sang dans le nord-ouest du pays, Kofi Annan, l’ex-secrétaire général de l’ONU, a fait ce week-end le voyage de Damas, alors que les pays du Golfe accentuent la pression en vue d’une intervention militaire. A N A LY S E Les « Occidentaux » prêts à jouer la carte de l’éclatement SABINE BÉZIER, 21 ans, ET MOHAMED DRIDI, 21 ans. Bulent Kilic/AFP Photo L À Idleb (notre photo) on déplorait, ce week-end, plus de 90 morts à la suite d’une offensive lancée par les soldats du régime syrien. MOHAMED DRIDI, 21 ANS. L ’émissaire spécial de l’ONU, Kofi Annan, a été reçu ce week-end par le président Bachar Al Assad. L’ancien secrétaire général des Nations unies a proposé des solutions concrètes pour la résolution de la crise. Elles impliquent un arrêt immédiat des violences, un accès à l’aide humanitaire et la libération de prisonniers, tout en promettant la non-ingérence des instances internationales dans les affaires syriennes. À l’issue de cette rencontre, Kofi Annan s’est déclaré optimiste malgré la difficulté à trouver un consensus entre les différentes parties. De son côté, le chef de l’État syrien reste sur la même ligne de conduite depuis le début de la crise. Il estime qu’un dialogue ne peut être amorcé qu’en « cas de cessation des violences » par les groupes qu’il qualifie de terroristes. Au même moment, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a rencontré ce samedi au Caire les ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe. Ces derniers réclament le départ de Bachar Al Assad, l’arrêt immédiat des violences, ainsi que l’instauration d’un dialogue entre l’opposition et le gouvernement pour discuter de la crise syrienne. Mais plusieurs dirigeants arabes ne cachaient pas espérer un changement de position de la Russie quant à une éventuelle intervention militaire. Les pays du Golfe, le Qatar et l’Arabie saoudite à leur tête, ont même réitéré, de leur côté, leurs positions va-t-en-guerre. MOSCOU OPPOSE TOUJOURS SON DROIT DE VETO Jusqu’ici, Moscou a usé de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU pour opposer son veto à toute condamnation induisant une intervention armée visant à renverser le pouvoir en place. Et il continue aujourd’hui à s’y opposer de la même façon. Si une résolution devait être votée, la Russie souhaite qu’elle mentionne la responsabilité de l’opposition dans les affrontements armés. Sergueï Lavrov, a déclaré : « Nous protégeons le droit international, l’objectif immédiat est de faire cesser la violence, d’où qu’elle provienne. » LE CONFLIT A FAIT PLUS DE 8500 MORTS Quant à la Chine, qui s’oppose également à une intervention militaire et à un traitement unilatéral contre le président Al Assad, elle a aussi envoyé son émissaire en Arabie saoudite pour rencontrer le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe, Abdellatif Zayani. Pékin reste inflexible lui aussi. Aujourd’hui, les chefs de la diplomatie des pays occidentaux et de la Russie se rencontrent au siège des Nations unies, à New York, pour discuter d’éventuels compromis. Sur cette réunion, Alain Juppé, le ministre français des Affaires étrangères, a exprimé son pessimisme quant au vote d’une résolution condamnant les autorités syriennes. Pendant ce temps, le conflit continue entre l’armée régulière syrienne et les forces d’opposition, prenant en otage toute une population civile. À Idleb, ville du nordouest du pays, on déplorait, ce week-end, plus de 90 morts à la suite d’une offensive lancée par les soldats du régime syrien. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, basé à Londres, on dénombrerait aujourd’hui plus de 8 500 morts depuis le début de ce conflit. a probable chute du régime de Bachar Al Assad ne risque-t-elle pas de déboucher sur l’éclatement de la société syrienne ? Composée à 90 % de musulmans (à majorité sunnite et de minorités chiite, alaouite et kurde), la population comprend aussi 10 % de chrétiens (maronites, arméniens, orthodoxes…). Ainsi, cette société est une mosaïque multiculturelle. La laïcité prônée par le parti Baas, au pouvoir depuis 1963, garantissait, vaille que vaille, la cohabitation intercommunautaire. Aujourd’hui, la communauté kurde localisée dans le nord de la Syrie pourrait être la première à revendiquer son indépendance, accentuant les prétentions des Kurdes de Turquie et d’Irak. Ensuite, la communauté alaouite, dont est issu le président syrien, risque des représailles d’une partie de la population sunnite. De même, les chrétiens, qui n’étaient pas les plus réfractaires au régime, puisque ce dernier assurait leur protection, pourraient être forcés à l’exil comme les chrétiens d’Irak. Enfin, une éventuelle prise du pouvoir par la majorité sunnite pourrait pousser la communauté chiite à réclamer une province autonome, voire indépendante. Ainsi, les responsabilités de l’opposition sont énormes. Si elle ne parvient pas à établir un projet national commun, on court le risque d’une « balkanisation » de la société. Si l’on s’en réfère à la situation libyenne actuelle, de nombreuses similitudes apparaissent. En effet, les divisions en Libye, étouffées par la poigne de fer du régime du colonel Kadhafi, resurgissent encore plus fort aujourd’hui. Les réserves pétrolières de la Cyrénaïque (où la révolte a débuté) poussent maintenant certaines des tribus et des groupes armés de cette province à faire sécession. D’où l’interrogation sur l’intervention intéressée de l’Otan dans le conflit libyen et son possible rôle en Syrie aujourd’hui. Compte tenu des enjeux économiques et géostratégiques qu’ils représentent aux yeux des grandes puissances occidentales, celles-ci sont prêtes à jouer la carte de l’éclatement de ces deux pays. LES PÉTROMONARCHIES À L’ŒUVRE Alors que Kofi Annan s’entretenait avec Bachar Al Assad samedi, le Qatar a estimé qu’un cessezle-feu serait insuffisant. Dénonçant un « génocide systématique », le chef de la diplomatie qatarienne a appelé de nouveau à l’envoi de forces arabes et internationales en Syrie. Il est difficile de croire que le soutien du Qatar et de l’Arabie saoudite à la rébellion syrienne se base sur des préoccupations démocratiques, ces régimes ayant peu de leçons à donner en la matière. Le conflit syrien s’inscrivant dans un cadre géopolitique plus large, les agissements des deux pétromonarchies réconciliées sont en lien avec les grandes manœuvres de refondation de la région entreprises par les États-Unis à travers leur plan du Grand Moyen-Orient. Par l’intermédiaire de ses alliés arabes, la puissance nord-américaine peut agir à couvert et éviter une politique d’ingérence trop brutale. La Syrie étant un partenaire privilégié de l’Iran dans la région, une déstabilisation de ce pays pourrait avoir des conséquences à terme sur l’équilibre régional. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 16 Monde Mobilisés depuis dix ans contre le projet de TGV Lyon-Turin, les Italiens ne sont pas près de céder. ALESSANDRA VITULLO, 23 ans, TRISTAN USTYANOWSKI, 20 ans. L eslie était de l’autre côté des Alpes, fin février, le jour où « plus de 75 000 personnes » criaient leur colère contre le projet de TGV LyonTurin. Elle a pu constater par elle-même que cette construction « rendrait le quotidien des gens invivable ». Contrairement à la partie française, la vallée de Suse comprend « des villes importantes avec déjà de nombreuses infrastructures ». Médiatiquement invisible en France, la fronde contre le projet (le mouvement NO TAV) a pris une grande ampleur en Italie. Le camp d’occupation du chantier (Baita) a été sévèrement réprimé et un manifestant est aujourd’hui toujours dans le coma à la suite de ces événements. « Beaucoup d’Italiens considèrent ce projet comme inutile. » Beaucoup d’Italiens considèrent ce projet comme inutile et qu’il suffirait d’améliorer les infrastructures existantes. Ils s’insurgent également contre la destruction du paysage qui s’ensuivra, le risque de contamination toxique que suscite le creusement du tunnel et l’ombre de la Mafia sur la réalisation des travaux. Paolo Ferrero, secrétaire du Partito della Rifondazione Comunista, nous confie :« Ce mouvement est un phénomène de mobilisation citoyenne qui s’inscrit dans un long processus de construction des consciences depuis le début la présentation du projet. » Et il estime que les violences « sont des faits marginaux » et que « la mobilisation continue d’une manière pacifique ». Répondant à notre question sur le manque de sensibilisation en France, Ferrero parle d’une « conception différente du développement, à l’instar de la victoire du “non“ au référendum sur le nucléaire, l’année dernière, en Italie ». Malgré cela, « il y a l’apparition de petits groupes de solidarité, notamment en Savoie », ajoute-t-il. net en Bulgarie, contre 1 800 au Luxembourg. Consensus pour une fuite en avant fédérale à Sciences-Po La conclusion de la quatrième édition des états généraux de l’Europe a eu lieu ce samedi dans les locaux de l’école, rassemblant diverses personnalités, chercheurs et organisations de la société civile. CHARLOTTE MARTINS, 19 ans, EVA YILMAZ, 18 ans. A ucun retour en arrière et un mouvement nécessaire vers davantage de fédéralisme; telle est la ligne générale ressortant de cette quatrième édition des états généraux de l’Europe. Les seuls choix seraient, selon les organisateurs, l’impuissance nationale ou la puissance européenne, et la question à se poser dès lors serait ce que l’on fait de cette puissance européenne. La question des frontières de l’Europe a aussi fait débat; l’élargissement le plus plausible aujourd’hui serait celui vers l’Est et les Balkans. Ont été évoquées la nécessité de soigner les relations avec les pays du sud de la Méditerranée et avec la Turquie, l’idée d’élargissement de l’espace Schengen et de la zone euro, ou encore l’obligation pour les pays désireux d’intégrer l’UE de reconnaître les autres pays européens. Pour redonner un visage à l’Europe sur la scène internationale, Eva Joly avance l’idée de la création d’ambassades communes et celle d’un renforcement du pouvoir du Parlement euro- Georges Gobet/AFP Photo TGV Lyon-Turin : l’opposition reste italienne 123 C’est le montant en euros du Smic mensuel Eva Joly avance l’idée de la création d’ambassades communes et celle d’un renforcement du pouvoir du Parlement européen. péen, qui ne doit pas être réduit à une chambre d’enregistrement. Jacques Rupnik, professeur de sciences politiques à SciencesPo et au Collège d’Europe, regrette que la voix de l’Union européenne à l’étranger n’arrive pas à être entendue en raison de la lutte de légitimité entre le président de la Commission et le président du Conseil, et propose alors une fusion des deux en une seule entité. Il rappelle également que chaque élargissement fut historiquement accompagné d’un approfondissement, allant à l’encontre de l’idée d’une incompatibilité entre les deux. Michel Barnier, commissaire européen au Marché intérieur et aux Services, parle quant à lui d’un véritable président de l’Union européenne. Une manière de parachever une fuite en avant fédérale. LE DÉSAMOUR DES CITOYENS Interrogée sur les raisons du désamour des Européens vis-à-vis de l’Europe, Eva Joly répond qu’un effort pédagogique est nécessaire : croire que l’Europe est responsable de la crise actuelle serait ignorer que les politiques ultralibérales qui dominent actuellement l’Europe sont à l’origine de l’austérité. Il faudrait, dit-elle, redonner confiance au « peuple d’Europe » et l’impliquer davantage dans les enjeux européens. Franziska Brantner, députée européenne allemande, propose, elle, de créer un droit d’ingérence citoyen dans les affaires européennes. Le feuilleton grec loin d’être terminé Le succès de la restructuration de la dette a rempli d’aise les dirigeants de l’UE mais les problèmes demeurent. HENRI LACOUR, 27 ans. E n évitant la faillite de justesse, la Grèce offre un bol d’air aux… dirigeants européens. Quatre-vingt-quatre pour cent de ses créanciers privés ont accepté d’effacer 105 milliards d’euros de l’ardoise d’Athènes sur une dette totale de 360 milliards vendredi 9 au matin. « La page de la crise financière est en train de se tourner », a fanfaronné aussitôt Nicolas Sarkozy. Pour le président du Conseil européen, Herman Von L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Rompuy, « nous allons vers une mer plus calme ». En fait le feuilleton est bien loin d’être terminé. Même dans l’immédiat puisque l’Association internationale chargée de gérer swaps et produits dérivés (International Swaps and Derivatives Association, Isda) a autorisé, samedi, les créanciers à déclencher leur Credit Default Swaps (CDS), ces titres très spéculatifs censés les assurer contre un défaut de paiement. Les capitales européennes ont pourtant tout fait pour éviter que la restructuration de la dette grecque soit considérée comme un « événement de crédit ». Peine perdue semble-t-il, et le déclenchement des CDS pourrait coûter des milliards d’euros au secteur financier. La restructuration de la dette auprès des créanciers privés d’Athènes autorise un déblocage de 130 milliards d’euros de la part de l’UE dont une première enveloppe de 35,5 milliards a été dégagée hier. Ceci moyennant un nouveau plan d’austérité drastique. Ce qui ne va rien arranger sur le front macroéconomique. La situation grecque demeure marquée par un niveau d’endettement restant très élevé et surtout une récession marquée (7,5 % au dernier trimestre 2011 en rythme annuel). Dans ces conditions, on voit mal comment l’objectif de la troïka des bailleurs de fonds (UE, BCE, FMI) de ramener le niveau d’endettement à 120 % du PIB d’ici à 2020 pourrait être réellement atteint. À moins de vendre les entreprises du pays à un rythme effréné et de compresser, si c’est encore possible, les derniers pans du service public grec. Comme pour rajouter une nouvelle fois de l’huile sur le feu, l’agence de notation financière Moody’s a indiqué vendredi qu’elle considérait que la Grèce avait fait défaut sur sa dette, et elle a maintenu la note C qu’elle attribue à un pays dans cette situation. Voilà qui conduit les observateurs sans doute les plus avisés à estimer que, dans les trois années à venir, Athènes pourrait avoir encore besoin d’un chèque de 50 milliards d’euros pour être « crédible sur les marchés financiers ». Aux élections législatives anticipées du 29 avril prochain, les sondages anticipent une forte poussée en faveur de la gauche radicale qui, réunie, pourrait dépasser les 40 % de vote. Le Parti socialiste (Pasok) a enregistré, lui, samedi, la démission de son leader historique, Georges Papandréou. 19 C’est le nombre minimal de Palestiniens tués depuis vendredi, selon un chiffre officiel. Soit le plus lourd bilan depuis l’attaque de Gaza en 2008-2009. Dangereuse escalade israélienne à Gaza POINTS CHAUDS Fukushima, un an après Depuis vendredi après-midi, la bande de Gaza est sous le feu de bombardements israéliens qui ont fait plusieurs dizaines de morts et de blessés. GUILLAUME DEMARQUAY, 21 ans. JULES RONDEAU, T out est parti, vendredi, des « éliminations ciblées » de deux cadres des comités de résistance populaire de Gaza. Tel-Aviv leur reprochait l’organisation d’attaques dans le sud d’Israël, le 8 août 2011, ce que les CRP avaient démenti. Israël les accusait également de préparer de nouvelles initiatives, sans en apporter la moindre preuve. Ces exécutions sommaires en territoire palestinien ont déclenché la colère des Gazaouis. En représailles, plusieurs dizaines de roquettes ont été tirées vers le territoire d’Israël. Les États occidentaux renvoient les deux parties dos à dos. Samedi, le Quai d’Orsay condamnait « les tirs de roquettes et les conséquences humanitaires de ces violences » et appelait « instamment à un retour au STR/AFP Photo 21 ans. Dimanche dernier, deux civils dont un enfant de douze ans ont été victimes des frappes aériennes israélienne. « 60 à 75 % des victimes (mortes et blessées) étaient des civils. » calme », sans toutefois préciser que les hostilités avaient été déclenchées par Israël. L’Association France-Palestine Solidarité parle de peines de mort extrajudiciaires pratiquées régulièrement par Israël contre des Palestiniens, « en toute impunité ». Les victimes ne semblent pas toutes être des « activistes », comme l’annon- çaient dans un premier temps les communiqués de l’armée israélienne. Dimanche, deux civils, dont un garçon de douze ans, ont été victimes des frappes aériennes. Contacté par téléphone, Ziad Medoukh, responsable du département français à l’université Al-Aqsa, nous a indiqué que « 60 à 75 % des victimes (mortes et blessées) étaient des civils » et que ce bilan humain s’accompagnait de dommages matériels très lourds, « des destructions massives d’immeubles et d’infrastructures civiles ». La ville subit 17 effectivement de nombreuses coupures d’électricité. Au-delà des prétextes antiterroristes toujours avancés mais jamais démontrés, ces raids militaires traduisent la fébrilité de l’État israélien, un peu plus isolé sur la scène internationale et contesté par ses citoyens. Pour Ziad Medoukh, « Israël essaye de provoquer les factions palestiniennes et veut montrer que, malgré le printemps arabe, l’armée peut encore tuer et bombarder qui elle veut ». Samedi, la Ligue arabe dénonçait une « dangereuse escalade ». Celle-ci vise sans aucun doute à déstabiliser les efforts de réconciliation interpalestinienne. Julien Salingue, doctorant à l’université Paris-VIII, estime ainsi qu’« Israël a tout intérêt à pousser à la radicalisation du Hamas pour empêcher les efforts de réconciliation avec le Fatah ». Les Japonais ont marqué hier le premier anniversaire du séisme et du tsunami qui ont provoqué la mort de près de 20 000 personnes et engendré à Fukushima le plus grand accident nucléaire depuis celui de Tchernobyl, en 1986. Dans les régions dévastées par le pire désastre enduré par le Japon depuis la guerre, les survivants ont allumé des milliers de bougies à la mémoire des victimes. Les efforts dans les zones irradiées se poursuivent lentement, alors que 326 000 personnes sont toujours sans habitation. Espagne : appel à la grève générale le 29 mars Les deux principaux syndicats espagnols (Ccoo et UGT) ont lancé un appel à la grève générale pour le 29 mars, exprimant leur rejet de ce qu’ils appellent « la réforme la plus régressive de l’histoire de la démocratie ». Cette attaque du gouvernement de Mariano Rajoy remet en cause les accords collectifs de branche qui favorisent les licenciements et réduisent considérablement les indemnités de départ dans un pays qui connaît un taux de chômage de 23 %. Le centre gauche emporte les élections législatives en Slovaquie Le parti social-démocrate Smer-SD a recueilli 44,41 % des voix lors des élections législatives de samedi, obtenant ainsi 83 sièges sur 150 au Parlement. La formation, qui présente un programme proeuropéen, remporte pour la première fois dans l’histoire du pays la majorité absolue. Ces élections anticipées font suite à la mise en minorité, en octobre dernier, par le Parlement, du cabinet de centre droit, au pouvoir depuis 2010. Notre nouveau hors-série + DVD JQTU/U¡TKG Cxge"ng"FXF" Rgwrng"gp"octejg Wp"Þ"no"fg"Tgpfi"Xcwvkgt Florence Cassez,arrêtée pour enlèvement en 2005 et condamnée à soixante ans d’emprisonnement,pourrait être libérée prochainement. JULIE BERTHO, 19 ans. JULIE DURAND, 21 ans. MATHIEU GRAND, 25 ans S uivant une procédure engagée par la Cour suprême mexicaine, le juge rapporteur Arturo Zaldivar vient de proposer la libération absolue et immédiate de Florence Cassez. La décision finale sera rendue le 21 mars. Comme le souligne Georges Couffignal, professeur de sciences politiques à IHEAL – Paris-III –, « c’est une décision qui met en cause la politique du président Calderon ». Le candidat à la présidentielle du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), formation historique, Enrique Nieto, se place en opposition à l’actuel chef d’État issu du Parti action nationale (PAN), d’inspiration néolibérale. Pour lui, la proposition de sentence avancée par le juge fait valoir le droit d’une personne « supposée victime du non-respect de ses droits », remettant ainsi en cause la procédure viciée dont a fait l’objet Cassez. Dans un pays où six juges sur dix sont achetés par les narcotra- fiquants, la lutte contre les cartels de la drogue est un enjeu primordial de l’élection présidentielle de juillet prochain. Ce sont les choix politiques sécuritaires qui sont ici remis en question. Depuis 2006, le président Calderon s’est lancé dans une « guerre » contre le narcotrafic, aidé par les ÉtatsUnis à travers le plan Merida provoquant une militarisation du conflit. L’administration américaine a fourni le financement et les armes nécessaires au gouvernement mexicain pour mener sa « campagne » contre les cartels. Pourtant, cette lutte se révèle inefficace. Et les souffrances des populations s’intensifient: les violences liées au trafic de drogue ont causé la mort de 45000 personnes entre 2006 et 2011… 10 euros Mg{uvqpg Le Mexique face à ses choix sécuritaires Egpvtg"cwfkqxkuwgn"fÔCnigt Rgwrng"gp"octejg Gp"dqpwu" Ngu"eqwtvu/ofivtcigu" Vgejpkswgogpv" uk"ukorng." nc"Ectcxgnng" gv"nc"Nqk"fw"ukngpeg0 Cnifitkg 72"cpu" fÔkpffirgpfcpeg Octu"42340 M 02302 - 305 H - F: 10,00 E - RD 3:HIKMNA=WVUUUU:?a@n@a@p@f; 19 MARS 1962 LA FIN D’UNE SALE GUERRE Reportages, entretiens, témoignages sur un demi-siècle d’une histoire encore incandescente. Je souhaite recevoir le hors-série ALGÉRIE 50 ANS D’INDÉPENDANCE, au prix de 10 € + 1 € de frais de port (valable uniquement pour la France métropolitaine) par exemplaire, soit : .....................€ x ..................... = ..................... euros. Nom................................................................................. Prénom................................................ Adresse......................................................................................................................................... Ville.............................................................................. Code postal............................................. Téléphone................................................. Adresse e-mail............................................................ Renvoyer impérativement ce bulletin accompagné du règlement (chèque à l’ordre de l’Humanité) à : l’Humanité/Service diffusion militante, 164, rue Ambroise-Croizat, 93528 Saint-Denis Cedex. Téléphone : 01 49 22 73 47 (42). Vous pouvez également acheter ce hors-série en ligne sur www.humanite.fr L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 18 Sports sport spectacle ne doit pas prendre le dessus «surLel’aspect éducatif du sport. » D L , , F POLITIQUE ENIS ANGLOIS ENTRAÎNEUR ET EX MARCHEUR OLYMPIQUE SOUTIEN DU RONT DE GAUCHE DU SPORT. À gauche, on joue collectif… Insuffler un nouvel élan dans le sport, c’est l’ambition du Front de gauche,qui tenait un forum à ce sujet,samedi,à Ivry-surSeine (Val-de-Marne). Passage en revue du projet présidentiel. 19, 21 et 21 ans. I l paraît que notre programme sportif est le plus avancé par rapport aux autres candidats, mais je n’y suis pour rien ! », reconnaissait Jean-Luc Mélenchon, samedi, à Ivry-sur-Seine. Invité à clore le Forum national du Front de gauche destiné au monde du sport, le candidat à la présidentielle, qui se définit comme le « prototype de l’intello », a salué le « véritable travail collectif » dont fait preuve son équipe de campagne. Une réflexion a été engagée autour de cinq thèmes avec des personnalités politiques, comme l’ex-ministre des Sports (PCF) Marie-George Buffet et Éric Coquerel, secrétaire général du Parti de gauche. Mais aussi avec des sportifs pros, des professeurs d’éducation physique ou des dirigeants de club, dont Lydia Martins-Viana, qui préside la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT). « Un budget ambitieux Les discussions ont rappelé l’importance des fonds publics pour soutenir la pra- Au service du public Renforcer l’accessibilité et la diversité des pratiques sportives pour tous, voilà la conclusion du groupe de travail consacré au « service public du sport ». Au centre des préoccupations : la place de l’État et des services publics dans la sphère sportive. Notamment à travers la gestion des installations sportives (voir encadré). Le sport scolaire Aujourd’hui, les professeurs des écoles prennent eux-mêmes en charge l’enseignement sportif, une tâche à laquelle ils s’estiment insuffisamment initiés. Le Front de gauche propose un renforcement de leur formation et une collaboration accrue avec des professionnels. Quant au secondaire et à l’université, le recrutement de 2000 professeurs d’EPS est revendiqué. Éducation et bénévolat Alors que le manque d’infrastructures et de personnel À « FONDS » LES STADES… Dans son programme, le Front de gauche insiste également sur sa volonté d’abolir les partenariats public-privé (PPP), type de financement privilégié pour l’Euro 2016 de football en France. La solution? Créer un fonds national afin de soutenir les collectivités pour la rénovation et la réalisation d’infrastructures, en adéquation avec les besoins de la population. Autre proposition: mettre fin au nommage, mode de sponsoring permettant à une entreprise de baptiser un stade à son nom. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 multiplie les barrières sociales, beaucoup militent pour un sport de proximité opposé au consumérisme et pour une vie associative au-delà de la performance. Pour y remédier, des mesures fortes sont proposées : la mise en place d’un plan national de soutien aux clubs, la valorisation du bénévolat et une présence féminine à développer. Un sport égalitaire Une proposition a recueilli l’approbation appuyée de tous les participants : si le Front de gauche arrive au pouvoir, les sportifs français ne seront autorisés à intégrer leurs équipes nationales que si leur domicile fiscal se situe en France. Un salaire maximal serait aussi instauré. Ces mesures ne seront efficaces que si elles sont appliquées à l’échelle communautaire. Une idée à creuser d’ici les élections européennes de 2014 ? Patrick Nussbaum JULIEN BÉTANT, MARINE MARCK ET ADRIEN MARET, tique sportive. Le Front de gauche entend ainsi porter les sommes consacrées au sport à 1 % du budget de l’État. Sous Nicolas Sarkozy, ce pourcentage n’a jamais dépassé la barre des 0,2 %… Pour faire mieux, Éric Coquerel précise les moyens d’y parvenir : « Si l’on accroît la taxe Buffet sur les retransmissions télévisées et qu’on prélève 1 % sur les bénéfices des équipementiers, nous pourrions augmenter le budget de moitié. » Jean-Luc Mélenchon, samedi, invité à clore le Forum national du Front de gauche destiné au monde du sport. « Il paraît que notre programme sportif est le plus avancé par rapport aux autres candidats ». « Le sport, une question politique! » L’ex-ministre des Sports Marie-George Buffet réaffirme la nécessité d’assainir les finances du monde sportif. Et prône une plus grande démocratie dans les instances sportives. JULIEN BÉTANT, ADRIEN MARET ET MARINE MARCK, 19, 21 et 21 ANS. ENTRETIEN Vous appelez à la définanciarisation du sport, qu’entendez-vous par là ? MARIE-GEORGE BUFFET. Avec la loi actuelle, les clubs professionnels deviennent des sociétés anonymes de droit commun, et certains groupes financiers possèdent des actions dans plusieurs d’entre eux. Comme dans la santé, la finance s’est emparée du sport professionnel pour faire du profit. Il faut revenir à des règles strictes. La loi-cadre de 2000 limitait les dérives, mais tout a été détricoté par la droite. Le premier travail d’une majorité de gauche sera de rédiger une nouvelle loi-cadre. Le financement du ministère des Sports lui-même pose problème. L’argent issu des paris sportifs est aujourd’hui majoritaire dans son budget. Sur ce point, le manque de démocratie dans les instances sportives est-il en cause ? MARIE-GEORGE BUFFET. Les sportifs ne sont pas associés aux décisions prises par leurs fédérations en matière d’orientation sportive et de choix prioritaires. Un grand débat à l’intérieur des fédérations est nécessaire, et il faudrait revenir à un licencié égale une voix. Le sport est un droit, il est indispensable que ses acteurs aient leur mot à dire. La mobilisation ne se fera que par les licenciés eux-mêmes. Cessons d’avoir une vision du sport comme celle de l’armée, la Grande Muette, où on ne fait pas de politique et où on n’a d’avis sur rien. La revalorisation du budget des sports est-elle réellement possible ? MARIE-GEORGE BUFFET. Le sport aujourd’hui, c’est 0,15 % du budget de l’État. Passer à 1 %, c’est une nécessité ! La gauche doit se donner les moyens de répondre aux besoins populaires en matière de sport. Allons chercher les moyens pour financer les investissements publics grâce à une réforme fiscale, une relance de l’emploi et l’instauration d’un pôle financier du crédit soutenant les investissements sportifs des collectivités. 11 Face à la France, samedi prochain, les Gallois, invaincus, viseront le onzième grand chelem de leur histoire dans le tournoi des Six-Nations. 19 Le XV de France vient de dépasser les Bleus du football lors des dernières mesures d’Audimat.Désintérêt profond pour le ballon rond ou véritable amour du rugby ? Décryptage après France-Angleterre. THÉOTIME PELLÉ, 19 ans. L e rugby est-il en train de détrôner le football dans le cœur des Français ? Depuis plusieurs années, le ballon ovale connaît une progression en terme d’audience, professionnalisation oblige, mais restait derrière le ballon rond jusqu’il y a peu. Mais, le 4 mars dernier, le match du tournoi des Six-Nations, France-Irlande (6,7 millions de téléspectateurs avec un pic à 8 millions lors des dernières minutes), a devancé à l’Audimat la rencontre amicale de football entre l’Allemagne, vice-championne d’Europe, et les Bleus (6,5 millions), du 29 février. Assiste-t-on à une passion nouvelle pour le jeu à la main où à la désaffection du grand public pour le ballon rond depuis le fiasco du Mondial 2010 ? Un peu des deux, certainement… Ce n’est pas la première fois que le rugby affiche des audiences record. Lors de la dernière Coupe du monde, le XV de France attirait 9 millions de téléspectateurs en moyenne et surtout 15,4 millions (part d’audience de 84 %) pour la finale FranceNouvelle-Zélande. L’équipe de France n’est pas la seule à susciter un tel engouement, puisque les autres rencontres du tournoi des Six-Nations ont gagné 600 000 téléspectateurs en moyenne (soit 2,7 millions contre 2,1 millions). Il y a fort à parier que le choc entre le XV de France et l’Angleterre (lire notre encadré), hier, au Stade de France, a accru encore cette différence. À entendre ses supporters présents à SaintDenis, cet accroissement de la popularité du rugby n’a rien d’anormal ou d’éphémère. Pour Clément, vingt-deux ans, de Mont-de-Marsan (Landes), il y a certes « un effet Coupe du monde au regard du parcours des Bleus, mais cela devrait s’inscrire dans la durée ». Pour Patrick et Jean-Luc, qui sont venus assister au « crunch » afin de fêter leur cinquantième Franck Fife/AFP Face au football, le rugby joue à gagne-terrain… Les Bleus concèdent leur première défaite du tournoi, la première sous l’ère Philippe Saint-André. anniversaire, cette popularité est avant tout due au fait que « l’ambiance est bien meilleure qu’au foot, où c’est chacun pour soi ». Contrairement au foot, où il n’est plus ce qu’il était, l’esprit du rugby n’a pas changé. On peut tout à fait assister à un match en famille, ce qui donne un côté convivial à l’événement. Flora, accompagnée de trois amis, est plus crue dans son discours envers les footballeurs, qu’elle estime « tellement nuls et payés à faire des galipettes sur le terrain ! » Renaud Lavillenie sur une orbite dorée avant les JO de Londres Mathieu, venu de Gap (Hautes-Alpes) du haut de ses quarante années d’expérience rugbystique, nous explique que « le rugby a gardé son esprit d’antan, et ce, malgré le professionnalisme. Il est toujours fondé sur le respect entre joueurs mais aussi entre supporters, avec lesquels on peut se retrouver pour la 3e mi-temps ». Pour beaucoup, le rugby est donc en train de s’ancrer dans le paysage sportif français, reste à savoir si le fameux « effet Coupe du monde » durera jusqu’à la prochaine édition, en 2015, en Angleterre… LES BLEUS BATTUS Les Français se sont inclinés face aux Anglais (22-24), hier au Stade de France. Un dernier drop raté de François Trinh-Duc n’y a rien changé. Dans les autres rencontres de cette 4e journée du tournoi des Six-Nations, l’Irlande a battu l’Écosse (32 -14). Le Pays de Galles, quant à lui, a dominé l’Italie (24-3) et tentera de décrocher son 11e grand chelem au Millennium Stadium de Cardiff contre le XV de France, samedi prochain. Marseille s’enfonce dans la panade L’OM ne gagne plus depuis quatre De retour de blessure, le perchiste français a décroché le titre de champion du monde rencontres. Le début d’une nouvelle crise ? tième position au classement. indoor du saut à la perche, avec un saut maîtrisé à 5,95 m, samedi à Istanbul. À cela s’ajoute le manque d’efGWENDOLINE BLOT, R enaud Lavillenie s’impose enfin dans un championnat du monde ! Ce weekend, c’est en Turquie, dans l’Atakoy Arena d’Istanbul, que le perchiste français s’est envolé avec un saut à 5,95 m. À vingt-cinq ans, ce petit bonhomme (1,77 m pour 69 kg) décroche son premier titre mondial en salle devant l’Allemand Bjorn Otto et l’Américain Brad Walker (5,80 m). Présenté comme l’un des favoris du concours, tout n’était pourtant pas joué d’avance. Blessé en décembre dernier à cause d’une perche brisée, main gauche fracturée (sept semaines d’arrêt), des questions survien- Kai Pfaffenbach/Reuters 21 ans. À cinq mois des jeux Olympiques de Londres, le perchiste français a posé un jalon pour la médaille d’or. nent : Lavillenie sera-t-il prêt psychologiquement et physiquement pour les compétitions importantes? Autant de doutes qui se sont envolés en Turquie. Le Clermontois a assumé son statut de leader en gérant intelligemment son concours, tandis que l’autre Français, Romain Mesnil, s’arrêtait à 5,70 m (8e). À la tête d’une délégation française restreinte (onze athlètes seulement) avec l’absence, notamment, de Christophe Lemaitre (sprint) et Teddy Tamgho (triple saut), Lavillenie représentait la meilleure chance de médaille. Pression sur les épaules et forte concurrence, autant d’éléments qui l’ont poussé à se dépasser. Toujours présent lors des grands championnats, il affiche une réelle régularité avec deux médailles de bronze aux championnats du monde en plein air (2009 à Berlin, 2011 à Daegu) et deux médailles d’or aux championnats d’Europe en salle et en plein air (2010 à Barcelone, 2011 à Paris). Quand d’autres athlètes craignaient la blessure à cinq mois des jeux Olympiques, le perchiste n’a pas fait preuve d’autant de snobisme. « Ça fait depuis 2009 que j’attends d’être champion du monde. Même si c’est en salle, c’est quand même un titre de champion du monde. Ça fait du bien le travail qui paye. » Félicité et admiré par le tsar du saut à la perche, Sergueï Bubka, le Français se concentre dorénavant sur sa saison d’été. Cette victoire à Istanbul lui apportant confiance, il ne se considère tout de même pas comme l’homme à abattre. Deux objectifs pour Londres : l’or olympique et une barre à 6,10 m. Tout ce qu’on lui souhaite ! MÉLANIE PAROLA ET ROMAIN LAMBIC, 22 et 23 ans. L ’argent ne fait pas le bonheur. Habitué des joutes européennes, l’OM, troisième budget de L1 (140 millions d’euros) connaît une saison difficile. Après un début de championnat catastrophique, l’OM a connu trois mois d’invincibilité (16 matchs toutes compétitions confondues), parvenant ainsi à recoller au peloton de tête de la L1. Seulement, depuis la défaite (0-1) face à Brest, fin février, Marseille n’y arrive plus. Toulouse, Évian, Ajaccio… le club phocéen enchaîne quatre défaites consécutives en L1, ce qui n’était plus arrivé depuis novembre 2006. Marseille se retrouve actuellement en hui- ficacité : les Marseillais n’ont plus trouvé le chemin des filets depuis quatre matchs. Cette période creuse coïncide avec les blessures de Rémy et Valbuena, les deux hommes forts du club. Malgré son retour contre Ajaccio en deuxième période, vendredi dernier, Marseille n’a pas brillé. « Je pense qu’ils ont fait ce qu’il fallait », analyse Didier Deschamps. Les Marseillais devront hausser le niveau pour se qualifier en quarts de finale de Ligue des champions, demain, face à l’Inter de Milan. Vainqueurs 1-0 à l’aller, ils sont en bonne posture. Cependant, les Intéristes, qui subissaient le même sort en série A, ont su faire preuve de réalisme ce week-end pour battre le Chievo Verone (2-0). Un réalisme dont devrait s’inspirer l’OM. Encore en lice en Coupe de France et surtout en Coupe de la Ligue (finale face à l’OL prévue le 14 avril), les Olympiens ont encore la possibilité de relancer leur saison. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 100 20 Sports Comme le nombre de buts inscrits par Didier Drogba pour Chelsea. Fillofoot : « fête » place au jeu, s’il vous plaît ! POINTS CHAUDS Biathlon : Fourcade encore en or Le Catalan Martin Fourcade a décroché, hier, le titre de champion du monde de mass-start aux Mondiaux de biathlon disputés à Ruhpolding (Allemagne). Il avait déjà remporté l’or du sprint et de la poursuite. Fourcade en profite pour creuser l’écart avec son rival norvégien Hegle Svendsen, 18e de la course, en tête du classement général de la Coupe du monde. « Les femmes sont l’avenir du foot », c’est Michel Platini qui l’affirme. Confirmation avec ces féminines, qui s’affrontent une fois par mois lors du Fillofoot, un tournoi pour les 6-12 ans. MARINE MARCK ET AMAËL FRANÇOIS, 21 et 23 ans. R ecord battu ! Elles étaient 108 footballeuses sur la pelouse du stade Didot (14e arrondissement de Paris), hier. Seize équipes venues du dépar- tement des Hauts-de-Seine ont participé au tournoi Fillofoot, sous les yeux d’une centaine de parents et d’accompagnateurs. Licenciées ou non, membres de clubs féminins ou d’équipes mixtes, les joueuses s’affrontent « pour de rire ». Ici, on ne compte pas les points. L’objectif de Fillofoot, créé il y a huit ans, est ailleurs : « Inciter les clubs à entrer dans une logique fédérale, permettre aux joueuses de se rencontrer et ainsi, créer un effet d’aspiration vers nos associations sportives », explique Jean-Marc Rodolphe, conseiller technique départemental (CTD), qui coordonne l’événement. Et ça marche ! Depuis quelques années, et particulièrement depuis la belle Coupe du monde des Bleues l’été dernier, de plus en plus de filles de tous âges se tournent vers les districts. « Avant, il n’y avait pas d’actions concrètes, il n’y avait que des effets d’annonce. Maintenant, on valorise et on encourage vraiment le foot féminin ! », se félicite le CTD. Du côté d’Issy-les-Moulineaux, on a compris dès 1997 JUVISY S’INCLINE DANS LE DUEL FRANCILIEN Pour la première édition de la Coupe de France féminine, qui a succédé au Challenge de France, le choc francilien des 8es de finale entre les filles de Juvisy, premières du championnat de France de D1, et le PSG (4e), aura vu s’imposer les Parisiennes après la séance des tirs aux buts (0-0, 3 t.a.b à 4). Les deux équipes s’étaient auparavant neutralisées au cours d’un match très accroché. Plusieurs autres formations de l’élite étaient aussi en lice hier : l’Olympique Lyonnais, champion d’Europe, contre SaintRomain Sanne (DH) et Montpellier face à Rodez. Football : fin de saison pour Govou L’attaquant d’Évian-Thonon s’est gravement blessé au tendon d’Achille gauche lors de la défaite de son équipe face à Sochaux (3-2), samedi lors de la 27e journée de Ligue 1. Il devrait être absent pour une durée d’au moins trois mois. l’intérêt de féminiser le sport. Christine Aubère, responsable du club et ancienne joueuse du PSG, annonce même fièrement: « Nous avons 180 licenciées, réparties dans huit équipes, plus l’école de foot. On participe à tous les championnats. » Interrogée sur la perception du grand public devant des petites filles crampons aux pieds, elle sourit : « Les barrières sont en train de tomber. » Les papas, comme Jimi, sont d’ailleurs plutôt fiers : « C’est vrai que dans la cour de l’école, les garçons ne laissaient pas jouer ma fille. Mais ici, c’est superconvivial. » L’ambiance plaît tellement aux jeunes filles qu’il est impensable de rater le rendez-vous. Quitte à réveiller les parents de bon matin… Khalfa, la maman de Maïssa, confirme volontiers: « Pour ma fille, c’est le foot d’abord, la famille ensuite ! » Voile : une Transat très solidaire Départ, hier, de Saint-Nazaire, de la deuxième édition de la Solidaire du chocolat, transat en double reliant le Mexique. Les onze monocoques engagés empruntent la route maritime du chocolat, tout en se plaçant sous le signe de « la solidarité et du partage ». Chaque bateau parraine une association. COURSES HIPPIQUES B A S E S C H A N C E S AVEC P. ROSSO Lundi Compiègne Mardi Saint-Cloud R1 - 1è course à 13h50 Plat - 16 part. - 1.600m. 1. GARDE SLICKLY 8. ULDIKO 11. UPSIDE DOWN CAKE 3. SINGAPORE JOY 2. PINTURICCHIO 5. SUN SEA BIRD 9. CAT MELODY 10. CAT SPIRIT R1 - 2è course à 13h50 Plat - 16 part. – 2.400m. 3. RENAISONE 7. GOMEZ ADAMS 1. DARJANI 14. GREEN BANANAS 2. ANEMOS 5. LE BOSPHORE 6. LUCKY HARRY 15. GRAN AKBAR B A S E S C H A N C E S Le bon favori: Uldiko Le bon favori : Gomez Adams Le repéré : Upside Down Cake L’outsider repéré: Darjani L E S P R I N C I PA U X R É S U LTAT S D U W E E K - E N D JASON LAMY-CHAPPUIS TRIPLE LA MISE Samedi, à Oslo, en Norvège, le Français Jason Lamy-Chappuis a remporté pour la troisième fois consécutive la Coupe du monde de combiné nordique. Le champion olympique a devancé son principal rival, le Japonais Akito Watabe. Dans cette spécialité, il est le 3e skieur à remporter trois globes de cristal consécutivement. Alexis Pinturault, le jeune prodige du ski alpin français avec ses vingt et un ans, a obtenu samedi un quatrième podium cette saison en Coupe du monde de ski, prenant la deuxième place du slalom géant de Kranjska Gora (Slovénie), entre l’Américain Ted Ligety et l’Autrichien Marcel Hirscher. Le skieur de Courchevel devient un habitué de ce classement. Sur ses cinq podiums en Coupe du monde, il est monté à quatre reprises sur la deuxième marche. LE CHIFFRE 27 L’invasion du Camp des Loges de jeudi coûtera des interdictions de stade aux 27 supporteurs du PSG, qui ont occupé le centre d’entraînement du club et manifesté leur mécontentement face au traitement qui leur est infligé par la mise en place du plan anti-violence de Robin Leproux, censé « pacifier et restaurer l’image du club ». EX-PROPRIÉTAIRE DU PARIS SG. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Remy Gabalda/AFP Stéphane de Sakutin/AFP SÉBASTIEN BAZIN, FRANCK CAMMAS MAÎTRE À BORD CHEZ LES KIWIS Le skipper Franck Cammas à bord de Groupama 4, a remporté samedi la 4e étape de la Volvo Ocean Race, course autour du monde en équipage avec escales, à Auckland (Nouvelle-Zélande). L’ H I S T O I R E JEANNESSON D’EXCEPTION LA PHRASE « IL N’Y A AUCUN TABOU. LA DÉMOLITION DU PARC DES PRINCES EST UNE ALTERNATIVE QUE L’ON PEUT PARFAITEMENT ENVISAGER. DANS L’ABSOLU, C’EST MÊME POSSIBLE, MAIS EST-CE VRAIMENT RECOMMANDABLE ? C’EST UNE VRAIE QUESTION QUI VA SE POSER. PAR CONTRE, LA SEULE OPTION À LAQUELLE JE ME REFUSE TOTALEMENT DE TRAVAILLER, C’EST UNE INSTALLATION DE L’ÉQUIPE DU PARIS-SAINT-GERMAIN À SAINT-DENIS, AU STADE DE FRANCE ! » Ian Roman/Volvo Ocean Race/AP Terje Bendiksby/Scanpix LA PERF’ PINTURAULT À PAS DE GÉANT TOULOUSE REMPORTE LE « DERBY DU CASSOULET » Lors de la 20e journée, Toulouse a remporté in extremis sa 27e victoire consécutive à domicile en Top 14, en ne laissant que le bonus défensif à Castres (34-27). À seulement vingt-six ans, Arnold Jeannesson, coureur cycliste à la FDJ-BigMat, réalise un Paris-Nice plein de promesses avec une 6e place finale. Formé au sein de l’équipe Auber93, où il se fait remarquer en terminant sur le podium du Tour de l’avenir 2008, le Parisien enchaîne les bonnes performances chez les professionnels. Dès son premier Tour de France, en 2011, il parvient à se faire une place parmi les meilleurs et termine 14e au classement général (4e Français derrière Voeckler, Rolland et Coppel). Il arrive sur ce Paris-Nice sans objectif précis, mais avec une envie de bien faire. Et il impressionne tout le monde lors de la 5e étape (Onet-le-Château-Mende) en réalisant une excellente ascension lors de la Montée Laurent-Jalabert. Ce Paris-Nice plutôt réussi laisse présager d’autres bons résultats dans les prochaines semaines et notamment au Critérium international. On peut aussi penser qu’il a déjà dans un coin de la tête la prochaine édition du Tour de France : « Je rêve de monter sur le podium d’un grand Tour. » À suivre… WES ANDERSON 21 Moonrise Kingdom sera présenté en ouverture du 65e Festival, le 16 mai. Tourné sur une île de Nouvelle-Angleterre, le nouveau film du réalisateur raconte l’histoire tourmentée et étonnante d’enfants et d’adultes pendant des jours de tempête à l’été 1965. Le film sortira le même jour en salles. Frazer Harrison/Getty Images/AFP Culture FESTIVAL DE CANNES DISPARITION Alain Jocard/AFP Mœbius devant une fresque tirée de l’un ses albums, en février 2008. Mort de Giraud alias Mœbius, alien de la BD Émotion dans le monde de la BD et des arts graphiques à l’annonce de la disparition de l’artiste. Sa notoriété était mondiale. CAMILLE SANCHIS, 21 ans. J e an Giraud, plus connu sous le nom de Mœbius, est mort samedi à Paris. Né en 1938 à Nogent-surMarne, il s’était fait connaître sous le pseudonyme de Gir en dessinant le célèbre lieutenant Blueberry. Happé très tôt par le monde du dessin, il y restera fidèle sa vie durant, donnant ses lettres de noblesse à l’art de la bande dessiné en misant sur une qualité exceptionnelle du dessin au même titre qu’Hugo Pratt ou Enki Bilal. Il fréquentera deux ans l’École des arts appliqués de Paris et publiera très vite ses premiers dessins dans divers périodiques. Sa notoriété vient avec Blueberry, publié pour la première fois par le journal Pilote en 1963. Le lieutenant, type même de l’antihéros de western, tranche alors avec le conventionnel Lucky Luke, publié par le même hebdomadaire. C’est en qualité de dessinateur « schizophrène » que Jean Giraud passe des Indiens de son enfance et du lieutenant Blueberry à la science-fiction, avec sa participation au magazine Métal hurlant. Gir se dédouble alors en Mœbius, pseudonyme sous lequel il crée les éditions des Humanoïdes Associés – aux côtés, entre autres, de Philippe Druillet –, qui devient la revue symbole de toute une génération et donne ses lettres de noblesse à la bande dessinée pour adultes. Loin des conventions du journal Pilote de ses débuts, la revue aux auteurs à l’esprit novateur publie notamment Arzach (1976), des nouvelles dans lesquelles le dessin a déjà une place prépondérante, les personnages n’échangeant aucun dialogue. SON ŒUVRE MÊLE À LA FOIS ONIRISME ET ÉSOTÉRISME Mœbius acquiert très vite une renommée dans le monde de la science-fiction, si bien que le 7e art se tourne vers lui. Il collabore alors à de nombreux décors de films tels Alien, de Ridley Scott, ou encore le Cinquième Élément, de Luc Besson. Dans les années 1980, Mœbius parcourt le monde, des États-Unis au Japon. Il devient même membre d’une secte zen à Tahiti. Ses différentes expériences influenceront profondément son œuvre, qui mêle à la fois onirisme et ésotérisme. On retrouve ce pan mystique dans le Monde d’Edena, cycle débuté en 1983 et dont le titre fait clairement référence au jardin d’Éden. Outre ses propres créations, il illustre de grandes œuvres de la littérature sur des thèmes similaires, telles que l’Alchimiste, de Paulo Coelho. L’œuvre de Mœbius a récemment fait l’objet d’une exposition à la Fondation Cartier – preuve s’il en est de l’émancipation de cet artiste et d’une reconnaissance de son œuvre pour sa qualité intrinsèque –, en revenant sur toute la profondeur du travail du dessinateur concernant la métamorphose. Moebius est parti. Sûr qu’il est juché quelque part, « sur l’étoile », à nous observer de son œil vif. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 22 c’est un champ-contrechamp, pas un type qui observe «un Untypefilm, ; ça, c’est la télé. » T G , . Culture ONY ATLIF CINÉASTE Indignados, voyage dans une Europe en crise 22 ans. I ndignados, ce sont d’abord des images colorées, le ciel, la route, les cris, les mots, les champs de blé à perte de vue, la galère, des gens sous les ponts, des portraits de visages marqués et soucieux, une clameur grondante… Nous suivons Betty, immigrée clandestine qui rejoint l’Europe pour gagner sa vie et aider sa famille. Elle arrive en Grèce, pays douanier de l’Europe, qui recense les clandestins en saisissant l’empreinte de leurs dix doigts. Betty continue vers l’Espagne, puis la France. L’Europe qu’elle découvre n’est pas celle qu’elle espérait trouver. C’est une Europe abîmée, salie par les puissants, où « il vaut mieux être un animal qu’un être humain illégal ». Le voyage de Betty ressemble à celui de tant d’autres immigrés du continent africain. Sa trajectoire est le fil conducteur qui nous emmène à la rencontre de ces popula- ELSA BRAOUEZEC, 24 ans. Q tions européennes qui se révoltent face à un système qui ne les prend pas en compte. Tony Gatlif a mis en images les mots de Stéphane Hessel, qui apparaissent par bribes sur les paysages et se superposent aux campements des sans-abri, retentissent comme un appel à l’indignation. Le spectateur est pris à témoin dans ce patchwork de séquences. À lui de les Avec son film documentaire,Tony Gatlif nous livre le témoignage d’une époque de masses en perdition. organiser, d’entendre ce qu’il a envie d’entendre. N’est-ce pas l’essence même du mouvement des Indignés, où la parole est donnée à tous et à chacun ? Plus qu’un film documentaire sur ce mouvement, Tony Gatlif nous livre le témoignage d’une époque de masses en perdition, sans se priver d’évocations symboliques. En témoigne cette image des oranges qui dévalent les rues de Sidi Bouzid, Films du Losange LOUISE LEFAUX, L’exposition un brin nostalgique mais passionnante sur le « ventre de Paris » connaît un vif succès. Films du Losange Indignados, inspiré d’Indignez-vous, de Stéphane Hessel, et réalisé par Tony Gatlif, est sorti en salles mercredi.Retour sur le film. Les Halles sous le regard de Doisneau Parmi les formules peintes sur les murs : « Nous ne sommes pas armés, nous sommes indignés. » en mémoire au marchand de fruits qui s’immolait par le feu en Tunisie, le 17 décembre 2011. Plus loin, une canette de soda brinquebalante, comme étourdie, poussée par le vent, entreprend une course rapide dans des rues vides, tandis que des chaussures orphelines semblent nous questionner et nous effraient. À qui sont-elles ? Où se trouve la deuxième ? Parmi les formules pacifistes détonantes, peintes sur les murs et accrochées aux échafaudages : « Nous ne sommes pas armés, nous sommes indignés. » Indignados est une mise en images de l’inquiétude ambiante. Le film nous rappelle qu’il est en train de se passer quelque chose : l’éveil de tous ces oubliés. C’est-àdire ceux qui ne sont pas pris en compte, ceux qui ne sont pas écoutés car ils n’auraient rien à dire. Aujourd’hui le petit manifeste de Stéphane Hessel continue à faire le tour du monde, quelques Indignés prennent la route pour éveiller de nouvelles consciences. Le film s’arrête sur une note d’espoir avec ces derniers mots de Betty : « Ça ira… ça ira… ça ira… » On l’espère aussi. uartier incontournable au cœur de Paris, les Halles continuent de susciter l’intérêt des habitants de la capitale. En témoigne l’engouement pour l’exposition présentée à l’Hôtel de Ville, qui propose de (re) découvrir son histoire mouvementée, depuis les années 1930 jusqu’au trou béant creusé lors de sa destruction, dans les années 1970, à travers le regard d’un artiste, Robert Doisneau. Grâce à la qualité des photographies noir et blanc et de quelques tirages en couleur, on s’imagine se promenant dans l’ancien marché des Halles, au milieu des étals des bouchers, des poissonniers ou des fleuristes. On est attristé par sa démolition et son déplacement à Rungis (Val-de-Marne), en 1969, laissant derrière lui un vide qu’on mettra longtemps à combler. Nombreux sont les passants à venir observer le « trou » des Halles et s’intéresser aux projets de reconstruction. Et comme l’histoire se répète, à notre tour, aujourd’hui, de découvrir le nouveau projet du quartier, la gigantesque canopée conçue par Patrick Berger et Jacques Anziutti. Quelques photos des Halles actuelles sont également présentées, car si Robert Doisneau n’est plus, huit jeunes photographes ont suivi ses traces et s’exposent sur les verrières du Forum des Halles. Studio 21 bis, dans le carton, tout est bon ! Derrière Studio 21 Bis, deux artistes, Romain Demangeon et Laurent Lacotte. Ils ont eu l’idée de redonner une vie à nos vieux cartons. ALEXIS TREBOIT, 18 ans. Studio 21bis D Cadenas, une sculpture surprenante réalisée en février 2011. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 e puis 2007, Romain Demangeon et Laurent Lacotte sillonnent les rues de Paris mais aussi l’ensemble du territoire en réalisant des œuvres éphémères, ludiques, subversives qui amusent autant qu’elles dérangent. Toutes leurs sculptures – appelons-les comme ça – sont en carton. Du carton récupéré dans la ville au hasard de leurs promenades. Dans un premier temps, ils se font connaître par la création d’abris pour ceux qui n’en ont pas, histoire de dénoncer le nombre sans cesse croissant de personnes qui dorment dans la rue. Très vite, nos deux artistes ont expérimenté d’autres thématiques. Toutes leurs créations les ont conduits vers des réalisations chaque fois plus gigantesques, extravagantes, drôles. Ainsi de ce cadenas géant pour sécuriser l’entrée d’une maison, de cette prise de courant et de son récepteur comme symbole pour rassembler deux quartiers d’une même ville qui s’ignoraient. Que penser de ces immenses colonnes de tubes de cartons dressées les unes contre les autres et formant l’ondulation des ondes dans l’espace ? C’est étrange, c’est beau, on perd tous ses repères dans cet espace silencieux. Que dire de plus que cette barrière douanière face à la mer aux reflets étranges, sobrement intitulée Sangatte qui dit, plus que tout, l’absurdité des frontières humaines et revendique l’air de rien la liberté de circuler pour tout être humain. Et cette balançoire avec son nœud de pendu dans ce lieu vide faisant perdre le sens enfantin du jeu… Les artistes du Studio 21 bis créent des alliances avec des établissements scolaires afin de transmettre aux jeunes leur savoir et leur expérience en réalisant avec eux des projets sur le travail des cartons. Un petit coup d’œil sur studio21bis.org vous permettra d’apprécier leurs travaux. le bonheur n’est-il que dans les gares ? » «G Peut-être P , . EORGES POINTS CHAUDS Ravi que Shankar ne soit pas mort ! Vendredi matin, plusieurs sites Internet annonçaient la mort de Ravi Shankar… Mais pas du bon ! Le disparu est en effet Ravi Shankar Sharma, compositeur de musiques de films bollywoodiens. Quant au légendaire joueur de sitar, âgé de quatre-vingt-douze ans, il a dû être surpris d’avoir lu sa propre nécrologie dans l’avion qui le ramenait aux États-Unis, où il se rendait pour un concert. La drôle de vie de Calamity Jane, héroïne du Far West Clémentine Célarié et Yvan Le Bolloc’h jouent dans Calamity Jane, au Théâtre de Paris, jusqu’au 25 mars. Une pièce drôle et émouvante qu’on vous conseille vivement ! Les lucioles aussi aiment le rock The Missing Fireflies (Les lucioles s’aiment peutêtre encore). Le 4 février est sorti le nouveau CD d’un des groupes majeurs de rock progressif italien, Locanda delle Fate. Ce nouvel opus, conçu comme la continuation logique de l’album mythique, Forse le lucciole non si amano più (Peut-être que les lucioles ne s’aiment plus), en 1977, inclut quatre nouveaux enregistrements en studio inédits et trois bonus comprenant les extraits d’un live enregistrés au théâtre Alfieri, d’Asti, peu avant la dissolution du groupe, à la fin des années 1970. Désormais réunifiés, les musiciens de Locanda delle Fate nous offrent ici une prestation musicale d’une grande qualité, réalisée, pour la partie en studio, avec des instruments d’époque, ce qui rend les sonorités presque identiques à celles de leur album de 1977. Les extraits en live restituent l’atmosphère des concerts de l’âge d’or du rock progressif. Locanda delle Fate, The Missing Fireflies… Altrock Productions, 2012, CD disponible sur www.altrock.it 23 EREC ÉCRIVAIN MARIE-ALVINA TOUCHET, 17 ans. C alamity Jane… Ce nom, on le connaît tous. Il reste profondément associé à la légende du Far West, à la conquête, aux grands espaces, aux cow-boys, aux Indiens… Beaucoup de mystère et d’in- certitudes autour du personnage de Calamity Jane, l’une des rares héroïnes féminines de cette histoire. On ne sait pas très bien sa date de naissance : 1850, 1852 ou 1856. En revanche, tout le monde est à peu près d’accord sur celle de sa mort : le 1er août 1903. Calamity est une jeune femme qui ne s’accommode pas de la vie rangée de bonne épouse, de bonne mère à laquelle elle était destinée. Elle aime monter à cheval, les grands espaces, elle n’a pas peur de se servir d’une arme à feu et, par-dessus tout, elle aime la liberté. Calamity Jane est une aventurière, une nomade, une amoureuse, une battante, bref, une légende. Pour être libre, elle se déguise en homme, seule solution peut-être pour qu’on lui fiche la paix. Ce qui ne l’empêchera pas de se marier deux fois et d’avoir une fille, à qui elle écrira de 1877 jusqu’à sa mort, à travers un journal intime qui restitue l’époque, Après son succès outre-Manche, Ed Sheeran, jeune Anglais de vingt et un ans, sort son premier album, +, en France. Après quelques passages remarqués sur les plateaux agités du Grand Journal ou de Taratata, ce jeune éphèbe semble voler vers le succès. Les jeunes Françaises l’ont déjà adopté et poussent de grands cris d’admiration sur son passage. On aime entendre les histoires pleines d’authenticité de l’auteur-compositeur accompagné de sa guitare acoustique. Ed peut faire preuve d’humour en racontant son aventure dans l’industrie musicale (You need me, I don’t need you) ou être plus sérieux et touchant en traitant des difficultés rencontrées par une jeune sans-abri (The a Team). De même, il nous transporte entre mélodies folks et rythmes plus proches du hip-hop. Un album riche en émotions ! Pascal Gely/CDDS Enguerand La nouvelle révélation britannique débarque au pays des grenouilles Célarié incarne une Calamity Jane amoureuse du justicier soliataire Wild Bill Hickok (Le Bolloc’h). une certaine vérité des faits. « Ma chérie, ainsi débute son récit, ceci n’est pas censé être un journal, et il se peut même que ça ne te parvienne jamais, mais j’aime penser à toi en train de le lire, page après page, un jour dans les années à venir, après que je serai partie. J’aimerais t’entendre rire en regardant ces photos de moi. Je suis seule dans ma cabane ce soir et fatiguée. » Clémentine Célarié incarne Calamity Jane aux côtés d’Yvan Le Bolloc’h. Tous deux forment un duo remarquable. On doit la mise en scène à Alain Sachs, qui procède par ellipses, laisse la part belle au jeu des acteurs. Pour ceux qui éprouveraient encore quelques réticences, un bon conseil : n’hésitez plus. Voilà une pièce intéressante, drôle, émouvante, sans temps morts. On est touché par le personnage de Calamity Jane, par sa vie agitée, dure mais assumée. Son combat pour son indépendance nous semble toujours d’actualité, hélas ! Calamity Jane est une féministe avant l’heure, une pétroleuse qui n’a jamais eu froid aux yeux. Elle force notre admiration. Elle mérite notre respect. Poésie burlesque en roue libre CAMILLE SANCHIS, 21 ans. C ’est la poésie pure, les mots, rien que les mots ! » Voilà brièvement résumée l’Oral et Hardi, pièce qui se jouait l’autre soir au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers dans le cadre du quatorzième Printemps des poètes. Un homme entre sur scène, bégayant, nous annonçant que la représentation va bientôt commencer… mais on est déjà en plein dedans ! « Je vous dem… demande de… de laisser vos portables allumés, si vous voul… voulez communi- « quer, échanger. » Et l’échange se fait, magique. Sur des textes de Jean-Pierre Verheggen, Jacques Bonnaffé jongle avec les mots, donnant vie à ceux du poète belge comme personne, tout en conservant une vraie liberté d’interprétation. Dans des tirades-marathon, il nous montre toute l’étendue de son art de comédien, et toute la force de la poésie de Verheggen qui fait tomber, un à un, les clichés sur le genre dans des textes engagés et subversifs. Jacques Bonnaffé descend l’Académie (Jean d’Ormesson en prend clairement pour son grade, ce qui vaut un entartage en règle au grand Jacques), qualifiant de « cadavres » les immortels et se plaçant résolument dans la tradition de poètes contestataires. Bon- naffé nous fait partager son panthéon, de Baudelaire à Artaud, en passant par Perec, peut-être la référence la plus parlante au vu des énumérations loufoques mais magiques, évoquant l’écrivain de l’Oulipo. Dans son pat- Dans des tiradesmarathon, il nous montre toute l’étendue de son art de comédien. chwork de morceaux choisis dans l’œuvre de Verheggen, auxquels s’ajoutent ses propres personnages, Bonnaffé réussit ainsi à la perfection l’union entre une culture populaire et une culture considérée, à tort, comme élitiste. Les mots, rien que les mots donc, mais teintés d’un engagement certain. Dès le début, le spectacle met les pieds dans le plat avec une parodie de discours d’inauguration par un élu, plutôt ridicule et qu’il a dénichée dans… Spirou! « La grande poésie doit toujours avoir l’air ridicule », scande ironiquement Jacques Bonnaffé. La présence de Cafougnette, personnage populaire bien du « ch’Nord » ancré dans l’imaginaire des gens du coin, permet à Jacques Bonnaffé de jouer sur tous les registres, du sérieux au comique des plus débridés. Alors vous aussi, à l’instar de Bonnaffé, grimpez à bord du Rimbaud Warrior et naviguez sur les vers de ce poète hors norme, qui fait un bien fou au paysage poétique francophone. Benoîte Fanton/Wikispectacle Au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers, Jacques Bonnaffé a présenté l’Oral et Hardi dans le cadre de la quatorzième édition du Printemps des poètes. Jacques Bonnaffé jongle avec les mots, donnant vie à ceux du poète belge Jean-Pierre Verheggen. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 24 Médias &TV Mobilisation mondiale contre la cybercensure À l’heure où l’information est de plus en plus relayée par Internet,citoyens et ONG luttent contre l’oppression et organisent une journée internationale pour la liberté d’expression. STÉPHANIE PETIT, 26 ans. Fethi Belaid/AFP Q uelque 75 % des Français surfent sur le Net. Ils sont 41 millions à être aujourd’hui équipés d’un ordinateur et d’une connexion à Internet. Il est temps de distribuer les bons points… et les mauvais ! C’est Reporters sans frontières (RSF) – qui a pour mission, entre autres, de veiller à la défense de la liberté d’expression – qui s’y attelle. L’ONG, qui dispose également d’un statut consultatif auprès des Nations unies, lance pour l’occasion un appel à la mobilisation contre la cybercensure. Qui sont ces ennemis d’Internet ou, plus précisément, ces opposants à la liberté d’expression ? Et qui sont ces citoyens, qui, à travers le En 2011, Lina Ben Mhenni a reçu le prix de la meilleure blogueuse décerné aux militants des droits de l’Homme. monde, doivent déjouer les obstacles politiques et se confronter à leurs censeurs ? Autant de questions qui devraient trouver leurs réponses en fin de journée puisque RSF dévoilera un rapport et une carte de la cybercensure 2012. L’association décernera également, à l’occasion de cette édition, le troisième prix du POINTS CHAUDS Facebook : de nouveau accessible au Tadjikistan Facebook a retrouvé ses internautes au Tadjikistan, à la suite d’appels de différentes ONG. Le réseau social et des sites d’information indépendants n’étaient plus accessibles depuis le 3 mars. L’ordre de coupure a été émis par le gouvernement d’Emomali Rakhmonov, au pouvoir depuis 1992. Des organisations non gouvernementales avaient déjà pointé du doigt la pression du régime sur les médias. Si le réseau Facebook a été rétabli, d’autres médias indépendants ne sont toujours pas consultables. Ainsi l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) s’est émue de la situation, le 7 mars, et a jugé « ce développement inquiétant ». Réseaux sociaux : fuites à l’élection présidentielle À l’heure des réseaux sociaux, les résultats partiels de l’élection ne peuvent être dévoilés avant la fermeture des bureaux de vote, délit puni en France d’une amende de 75 000 euros. Empêcher ces divulgations est quasiment impossible, d’autant que les médias étrangers ne sont pas soumis à cette loi. Ces informations risquent-elles d’influencer le choix des électeurs ? Se voulant rassurant, le directeur de l’institut de sondage Ipsos, Brice Teinturier, affirme, lui, que « pour qu’il puisse y avoir un véritable effet, il faudrait un nombre colossal d’électeurs qui se surmobilisent dans la dernière heure en faveur d’un seul candidat ». L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 Net-citoyen. Un prix qui a vu le jour en 2010. L’an dernier, c’est le blog du collectif tunisien Nawaat (créé en 2004) qui avait su séduire un jury indépendant composé de journalistes et de personnalités. Le blog s’était imposé lors du printemps tunisien. Des révolutions arabes à la récente escalade militaire en Syrie, l’accès à l’information ne cesse de se raréfier. On se souvient bien des difficultés des militants égyptiens ou encore tunisiens à continuer d’utiliser les réseaux sociaux comme moyen d’action contre le pouvoir en place, notamment par le biais de manifestations denses et d’alertes aux médias. D’où l’intérêt de cette journée mondiale contre la cybercensure, particulièrement dans une période qui voit se succéder les échéances électorales dans le monde. Cette année, six nominés sont en lice pour le prix du Net-citoyen, de l’Amérique latine à l’Asie en passant par l’Égypte ou encore la Russie. Des citoyens qui ont pour point commun d’avoir tous affronté leur régime, malgré le danger omniprésent, pour pouvoir transmettre l’information. Au travers de cette nouvelle édition et de la remise de ce prix, l’organisation « dénonce la répression dont sont victimes de nombreux blogueurs et cyberdissidents, ainsi que la censure pratiquée par des pays qui souhaitent contrôler l’accès à l’information en ligne de leurs concitoyens ». Une opération dont tous les détails figurent sur le site 12mars.rsf. org/fr/. Depuis le 2 janvier, RSF dénombre déjà onze journalistes tués, majoritairement en Syrie et en Somalie. La propagande des va-t-en-guerre Des chroniqueurs n’hésitent pas à étaler leurs pulsions bellicistes dans les médias. VIVIEN REBIÈRE, 20 ans. A lors qu’en Syrie le conflit s’intensifie, des voix se font entendre dans les médias français pour légitimer le principe d’une éventuelle intervention occidentale au Proche-Orient. Illustration : dans une chronique du Monde parue le 25 février, Caroline Fourest affirme, en s’appuyant sur un média inféodé au pouvoir saoudien, Al-Arabiya, que l’Iran aurait fourni au gouver- nement syrien un four crématoire. Assimilant au passage la Syrie à l’Allemagne nazie, elle accrédite l’idée d’un « islamofascisme ». Un cas qui n’est pas isolé. Dans son bloc-notes du Point, publié le 1er mars, Bernard-Henri Lévy, quant à lui, appelle ouvertement à une intervention militaire. « La bataille pour la Syrie est aussi une bataille de propagande. Le régime l’a perdue depuis longtemps, tant ses affirmations sont souvent grotesques, ses mensonges patents et ses pratiques barbares », explique Alain Gresh dans le Monde diplomatique. Pour autant, une intervention militaire étrangère est-elle la seule issue ? A N A LY S E Acta : des internautes sous surveillance informatique RAYMOND KARGAR, 23 ans. 14 h 30, ce samedi, sur l’esplanade de Beaubourg à Paris. Quelque 400 militants des libertés individuelles, numériques et d’accès à la santé s’étaient donné rendez-vous pour attirer l’attention du public sur l’Acta (Anti-Counterfeiting Trade Agreement, accord commercial anti-contrefaçon)… Une maigre mobilisation au regard de l’importance des enjeux. Négocié en secret entre 2007 et 2010, cet accord sort de l’ombre à laquelle les gouvernements l’avaient condamné, et les lourds problèmes qu’il soulève se retrouvent sous le feu des projecteurs : violation de la confidentialité des internautes via l’obligation faite aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de traquer le piratage, filtrage du Web, définition particulièrement extensive de la contrefaçon englobant médicaments génériques (avec de probables désastres sanitaires dans les pays du Sud), semences, etc. Bien que le sujet brasse large, le gros des troupes présentes ce samedi restait constitué de militants des libertés sur Internet, tels les fameux Anonymous, dont beaucoup arboraient l’emblématique masque. Les intervenants ont dénoncé pêle-mêle la disposition rendant illégale toute tentative de briser le DRM d’une œuvre numérique, « menottes informatiques » empêchant par exemple la numérisation d’un CD, même acheté légalement (on ne possède plus ce que l’on achète !), les embûches tendues aux développeurs de logiciels libres (logiciels gratuits se substituant aux produits très onéreux de certains ogres du numérique), « dont énormément ne se connaissent que par le Web », le contexte général de limitation des droits des internautes au prétexte de la lutte contre le piratage avec la loi Hadopi… Non loin, une banderole rappelle que, avec l’obligation faite aux FAI de surveiller les activités de leurs clients, « le facteur lira votre courrier ». Autant de raisons de rejoindre les rangs de la mobilisation, d’autant que celle-ci porte ses fruits, de nombreux pays ayant déjà retiré ou suspendu leur signature, comme la Pologne, l’Allemagne, la République tchèque ou l’Autriche. Mais pas la France, où la mobilisation reste en grande partie cantonnée aux militants des libertés sur Internet. Malgré une « ouverture », laissant « le micro à ceux qui voudraient parler d’autres problèmes : le générique, les brevets… », les interventions se suivent, qui, dans leur grande majorité, prennent pour objet... les libertés numériques. Voir notre reportage sur humanite.fr Fondateur : Jean Jaurès. Directeur : Patrick Le Hyaric. Société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Société nouvelle du journal l’Humanité (SA 99 ans à compter du 1er janvier 1957). Capital social : 2 500 000 euros. Siège social : 164, rue Ambroise-Croizat, 93528 Saint-Denis CEDEX. Tél. : 01 49 22 72 72. Service diffusion (fax) : 01 49 22 73 37. Service aux abonnés : 01 55 84 40 30 [email protected]. Vente commerciale : 01 49 22 73 31. Vente militante : 01 49 22 73 47. Publicité : Comédiance. Tél. : 01 49 22 74 43 (commerciale)/ 01 49 22 74 53 (annonces classées)/ 01 49 22 74 89 (annonces légales). Directoire : Patrick Le Hyaric, président et directeur de la publication ; Patrick Apel-Muller, directeur de la rédaction ; Marc Brunstein, secrétaire général ; Lin Guillou, co-directeur de la publication ; Silvère Magnon, directeur de la diffusion, du développement, des projets et des études ; Pierre Touchet, directeur financier et administratif. Conseil de surveillance : Michel Laurent (président), Claude Baudry (Société des personnels), Lydie Benoist, Denis Cohen, Martine Durlach, Soraya Frémaux (Société des personnels), Alfred Gerson (Société Humanité Investissement Pluralisme), Dominique Grador, Jean-Paul Magnon, Henri Malberg (Société des lectrices et lecteurs de l’Humanité), Nicolas Marchand, Jean-Charles Nègre, Jean-Raymond Pacouret (Société des lecteurs et lecteurs de l’Humanité), Ernest Pignon-Ernest (Société des Amis). Impression : POP (La Courneuve), Mop (Vitrolles), Nancy-Print, Ouest Print. Numéro ISSN : 0242-6870. Dépôt légal : date de parution. Commission paritaire : 0510 C 79615. Tirage du jeudi 8 mars 2012 : 64 577 exemplaires. Services 25 Notre choix Les Conti, France 3, 0 h 10. LES AUTRES TÉLÉS... LES PROGRAMMES TÉLÉ DU LUNDI TF1 F2 F3 CANAL+ F5-ARTE M6 13.00 Journal 13.45 Météo 13.55 Les feux de l’amour14.55 Une coupable idéale 16.35 B rothers & Sisters 17.25 Quatre mariages pour une lune de miel 18.20 Une famille en or 19.05 Money Drop20.00 Journal20.40 Après le 20h, c’est Canteloup 13.50 Consomag 14.00 Toute une histoire 15.15 Comment ça va bien !16.15 Le jour où tout a basculé 17.10 Seriez-vous un bon expert ? 17.55 On n’demande qu’à en rire18.55 N’oubliez pas les paroles 19.45 Météo 220.00 Journal 13.30 Edition de l’outre-mer 13.45 En course sur France 3 14.05 Inspecteur Derrick 15.00 Division criminelle 16.40 Slam 17.25 Des chiffres et des lettres 18.10 Questions pour un champion 19.00 Le 19/20 20.00 Tout le sport20.10 Plus belle la vie 12.20 La nouvelle édition14.00 Sans identité. Thriller 15.50 National Geographic 16.40 L’assaut. Thriller 18.15 Les Simpson 18.45 Le JT 19.10 Le grand journal 20.05 Le petit journal 20.30 Le grand journal, la suite 14.35 Allô, docteurs ! 15.05 L’Amérique à vélo 15.35 Prédateurs de la préhistoire 16.35 Philippines, la piste jeepney 17.30 C à dire ?! 17.45 C dans l’air 19.00 Ibériquement vôtre19.45 Arte journal20.05 28 minutes 11.50 Desperate Housewives 12.45 Le 12.4513.00 Scènes de ménages13.40 Alexandra : disparue 16.15 P è re malgré lui 17.40 Un dîner presque parfait 18.45 100% Mag 19.45 Le 19.45 20.05 Scènes de ménages EMISSION POLITIQUE SÉRIE DIVERTISSEMENT MAGAZINE FILM TÉLÉRÉALITÉ C DANS L’AIR Magazine présenté par Laurent Bazin. FRANCE 5, 22 H 20. L’actualité est particulièrement dense, de quoi fournir de la matière au magazine d’infos. DÉMINEURS Film de Kathryn Bigelow, avec Jeremy Renner. CANAL PLUS, 22 H 35. LA GUERRE DE L’OR NOIR Film documentaire de Joachim et Dieter Schroeder. HISTOIRE, 20 H 35. TETRO 20.35 Incroyables expériences 20.55 Spécial investigation Série de Kevin Bray (USA, 2009). Avec Kathryn Morris, Danny Pino, Danièle Watts. Saison 7. Entre les lignes. L’équipe revient sur le meurt re d’une adolescente, assassinée en 1991. 21.30 Sur la route. Saison 5. 22.10 Les petits mots. Saison 1. Présenté par Nathalie Simon et Jamy Gourmaud. Nathalie Simon et Jamy Gourmand se lancent dans de nouvelles expériences sportives et gastronomiques. 22.35 Esprits criminels 22.55 Mots croisés Série. Avec Joe Mantegna, Thomas Gibson. Saison 6. Indigne de confiance. 23.20 20 ans après... Saison 1. 0.05 Coupables victimes. Saison 1. Débat. Yves Calvi propose aux téléspectateurs un magazine politique où les grands sujets de société font l’objet d’un débat e n t re invités venus d’horizons divers. 23.10 Une histoire du terrorisme 1.10 Au Field de la nuit2.05 Voitures de tourisme : Championnat du monde FIA WTCC. 0.15 J o u rnal de la nuit 0.30 Symphonie n° 9 de Mahler. LA MÉTÉO DU JOUR 7/17 STRASBOURG PAR CHÈQUE : 5/13 un an postal 455 € TOURS BORDEAUX 4/16 22.35 Chercheurs de soleil 23.40 Un dîner presque parfait Film de guerre de Kathryn Bigelow (USA, 2008). 1h45. Avec Jeremy Renner, Anthony Mackie, Brian Geraghty. Mélodrame de Konrad Wolf (All, 1958). 1h50. Avec Ulrike Germer. En 1949, en Allemagne, une femme condamnée pour prostitution part travailler dans une mine : elle est courtisée par le contremaître, un ancien SS. Jeu. Périgueux. Cinq habitants de la ville de Périgueux, en Dordogne, s’invitent à tour de rôle pour un repas convivial. Chaque convive attribue une note pour l’ambiance, une pour la décoration et une pour le repas servi. 0.30 Mutinerie2.00 Metropolis 2.30 M6 Music / Les nuits de M6 0.40 Mensomadaire 1.10 Le mytho, Just Go With It. Comédie 3.05 Mes parents sont homosexuels4.10 Canal NBA 6 mois postal 230 € un an au portage 495 € PAR PRÉLÈVEMENT MENSUEL : LYON abonnement postal 29 € abonnement au portage 34 € Tarif spécial : chômeur, étudiant et moins de 26 ans (justificatif obligatoire) postal 21 € 5/18 PAR CHÈQUE : 70 km/h 5/19 un an postal 350 € TOULOUSE 5/14 MARSEILLE BASTIA 4/18 5/21 6/18 TEMPS PREVU LUNDI 12 MARS DEMAIN. Matin généreusement ensoleillé après la dissipation de rares brouillards en fond de vallée. Sec et ensoleillé l’après-midi. Ambiance printanière au programme. Soirée calme et sèche. PIF 22.35 Démineurs e ABONNEMENT À L’HUMANITÉ QUOTIDIENNE, DU LUNDI AU SAMEDI 6/16 CLERMONT FERRAND BIARRITZ Présenté par Stéphane Rotenberg. Episode 7. Lors de l’épreuve «coup de feu» de cette septième semaine, les sept candidats toujours en lice doivent sublimer un produit du Sud : le chorizo. Trois spécialistes basques sont présents pour les juger. abonnement postal 38 € abonnement au portage 41 € Tarif spécial : chômeur, étudiant et moins de 26 ans (justificatif obligatoire) postal 27 € PARIS 7/14 NANTES Film de guerre de Gillo Pontecorvo (Ita/Alg, 1965). 2h00. Avec Brahim Haggiag, Jean Martin, Yacef Saadi, Samia Kerbash. En octobre 1957, un militant du FLN sur le point de se faire arrêter se remémore son combat contre l’occupation française, engagé depuis trois ans. PAR PRÉLÈVEMENT MENSUEL : BREST 6/15 0.10 Les Conti 1.05 Chabada 2.00 Soir 32.25 Plus belle la vie 2.50 Spéciale Claude François Présenté par Stéphane Haumant.Catastrophesnucléaires : histoires secrètes. Après Tchernobyl en 1986 et Three Mile Island, aux Etats-Unis, en 1979, Fukushima est la troisième centrale nucléaire qui échappe au contrôle de ses concepteurs. e ABONNEMENT COUPLÉ L’HUMANITÉ QUOTIDIENNE, DU LUNDI AU VENDREDI, AVEC LE MAGAZINE L’HUMANITÉ DIMANCHE, CHAQUE JEUDI 4/12 5/13 Documentaire de Michaël Prazan (Fr, 2011). 50mn.Acte 2 : les années de poudre (19701989). 20.50 Top chef ABONNEMENTS LILLE CHERBOURG 22.40 Soir 3 20.35 La bataille d’Alger 6 mois postal 180 € un an au portage 410 € Nom................................................................................ Prénom................................................................. Adresse.......................................................................................................................................................... Code postal............................... Localité...................................................................................................... Téléphone....................................... Adresse e-mail...................................................................................... Joindre obligatoirement un RIB ou le règlement à ce bon et retourner le tout à : l’Humanité, « service aux abonnés », B.P. 580, 60732 Sainte-Geneviève. D’APRÈS C. ARNAL CINÉ PLUS CLUB, 17 HEURES. LE DISCOURS D’UN ROI Film de Tom Hooper, avec Colin Firth, Helena Bonham Carther, Geoffrey Rush. CANAL PLUS CINÉMA, 20 H 45. LES COMBATTANTS DE L’OMBRE Film documentaire de Bernard George. TOUTE L’HISTOIRE, 15 H 20. DONNIE BRASCO Film de Mike Newell, avec Al Pacino, Johnny Depp, Michael Madsen. RTL9, 20 H 40. LA BATAILLE D’ALGER Film de Gillo Pontecorvo avec Brahim Haggiag. ARTE, 20 H 35. MOTS CROISÉS N°20 874 PAR MARTIAL DUBOIS HORIZONTALEMENT VERTICALEMENT 1. Qui dénote un très bon état physique. 2. Passent très près. Un écrivain américain. 3. Un polyèdre à vingt faces. 4. Remplis une obligation vis à vis d'un État. Authentiques. 5. Plante purgative. Poids parfois lourds à porter. 6. Avons le courage. Ordinateur. 7. Sucerai avec délectation. 8. Un pianiste français. Souvent provoqué par une forte fièvre. 9. Mèche rebelle de cheveux. Convergeait. 10. Insecte acarien, parasite des oiseaux. Patrie de Zénon. I II III IV V 1 I. Trembler légèrement. II. Liées. Une bonne pomme. III. Ville du Chili. Régurgitation spasmodique d'air chez le cheval. IV. Éprouve vivement. V. La mémoire du cinéma. Drap fin et uni. VI. Évalua le volume d'une coupe de bois. Semblable. VII. Vignette utilisée en typographie. VIII. Plus tard. Unité monétaire du Yémen. IX. Chanson populaire. Met en jeu. X. Ferrure. Même de renommée mondiale, elle peut être anonyme. VI VII VIII IX X 2 3 4 5 6 7 8 9 1O SOLUTION DES MOTS CROISÉS VERTICALEMENT. I. Frissonner. II. Lacées. Api. III. Osorno. Tic. IV. Ressent. V. I.N.A. Sedan. VI. Stéra. Tel. VII. Dentelle. VIII. Après. Rial. IX. Noël. Parie. X. Té. Société. Présenté par Laurence Ferrari. Invité : Nicolas Sarkozy.Nicolas Sarkozy. Pour son quatrième rendez-vous politique en prime time, Laurence Ferrari reçoit et interroge Nicolas Sarkozy. Dans un premier temps, Nicolas Sarkozy répond aux questions de quatorze Français. 20.35 Cold Case, affaires classées HORIZONTALEMENT. 1. Florissant. 2. Rasent. Poe. 3. Icosaèdre. 4. Sers. Réels. 5. Séné. Ans. 6. Osons. P.C. 7. Téterai. 8. Nat. Délire. 9. Épi. Allait. 10. Ricin. Élée. 20.50 Parole de candidat Film de Francis Ford Coppola, avec Vincent Gallo. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É 26 TRIBUNES & IDÉES QUEL DIAGNOSTIC PORTER SUR L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EN FRANCE, APRÈS LES RÉFORMES ? Quand apprendre n’est plus une fin mais un moyen pour le marché LUDOVIC BERTON, 21 ans. D epuis son entrée en campagne, il semblerait – pour notre plus grand malheur – que le président candidat fasse de la question de l’éducation une de ses grandes priorités, en demandant, par exemple, davantage de présence aux enseignants dans les structures scolaires ou en prônant une généralisation de l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur. Soyons clairs, lorsque Nicolas Sarkozy et ses quelques prosélytes prêchent leur petit catéchisme en litanie, ils ont raison sur un point : l’éducation, en particulier l’enseignement supérieur, est une priorité. Pourtant, si l’enjeu est capital, il est malheureusement victime de la plus funeste ignorance. La série des « réformes courageuses » n’a été en définitive qu’une multitude de coups lâches et meurtriers portés à ce qui a fait la grandeur de l’esprit universitaire français, car en inoculant le bacille du « marché », cette maladie du sang, à la source de l’intelligence, le gouvernement a confondu deux entités qui observent, en réalité, une radicale différence de nature. La conséquence directe de cette mésalliance est qu’en France, l’enseignement supérieur a perdu ce qui était son but et les moyens de l’atteindre. Que l’éducation, l’intelligence supérieure de l’esprit soit le but pour soi, selon l’intuition fondamentale de l’humanisme de la Renaissance qui veut que l’homme soit l’artiste de luimême, cela on l’a oublié (ce qui est navrant compte tenu de la névrose identitaire qui est l’apanage du gouvernement au pouvoir) au profit de l’obsession du chiffre, qui nuit à la recherche. Bien sûr, on nous répondra qu’il y avait urgence, nécessité à entamer les « réformes » et, par conséquent, qu’il fallait un « courage » inouï pour les accomplir. En réalité, ce mauvais syllogisme confond la cause et la conséquence : le « courage » n’est aucunement au principe des « courageuses réformes », mais, bien au contraire, ces dernières ne sont que la triste conséquence d’une stratégie utilitariste, d’économie politique qui découle des exigences propres au paradigme libéral en place. Bref, il y a deux morales qui s’entrechoquent et entraînent, mécaniquement, deux politiques opposées : celles des esclaves du marché, qui confond les lois humaines avec les lois de la nature, et celle des esprits libres, qui pensent que le propre de l’homme est précisément de pouvoir briser les plus rigoureux déterminismes. C’est, en somme, ce qui distingue l’intelligence de l’instinct, et l’homme de l’animal. Or, ces dernières années, nos universités, à leur corps défendant, sous le coup de l’idole financière, deviennent progressivement les serres propices à un dressage brutal et contraint d’une masse de bêtes de somme, exploitables à souhait, dont la contamination par la morale des esclaves et l’idéologie dominante entraînent la cécité sur ses propres conditions matérielles d’existence. Tout devient « normal » et, le chiffre étant normatif, il détruit sous sa règle universelle ce qui fait la singularité irréductible de chaque individu, en faisant de ce dernier une « réalité » statistique, sans corps ni âme. L’université promise, c’est celle des animaux du troupeau, de l’instinct grégaire et, progressivement, dans les limites étroites du marché et de la spécialisation ? Ce qui a fait la force et le mérite de l’université, c’est, selon le mot du philosophe Bergson, dans un discours de circonstance le 3 août 1882, qu’elle « se préoccupe simplement d’élever l’esprit en le fortifiant ». On l’aura compris, la soumission de l’université aux lois économiques est un nihilisme qui retire à la vie ce qui en fait la grandeur et le prix. Sans doute, pour paraphraser l’essayiste « Ce que nous voulons garder à l’université, ce sont des professeurs, des esprits supérieurs et nobles, qui enseignent avec patience, dans la parole et le silence. » simultanément, de la spécialisation à outrance, dans la mesure où le nouvel impératif catégorique semble être « l’insertion » dans le « marché ». Entendons-nous bien : si, bien sûr, il est toujours heureux d’obtenir un emploi, la mission de l’université est d’abord et avant tout de former les esprits. Autrement dit, l’université est une fin en soi, et non un moyen au service d’une règle qui, par nature, est différente d’elle. Ce que nous voulons garder à l’université, ce sont des professeurs, des esprits supérieurs et nobles, qui enseignent avec patience, dans la parole et le silence, loin de cette hâte généralisée qui sied si bien aux malappris. L’université est aussi vaste que la vérité dont elle est l’expression. Comment admettre que l’intelligence se rétrécisse et s’atrophie, Renaud Camus, sommes-nous entrés, en France, dans une phase de grande dés-intellectualisation. Ce que nous aimons est en passe de disparaître. L’horizon se ferme. Il y a sur nous la chape d’un triste jour d’hiver. Un jour viendra où il nous sera impossible de reconnaître ce qui a fait la grandeur de notre culture intellectuelle, dans la mesure où ce qu’il nous reste d’intelligence risque d’être aspiré dans l’opéra grandiose de l’exploitation financière. Mais ne désespérons pas. Gardons notre sérieux et notre hauteur. Il reste certaines forces formidables, sauvages et originelles, des forces nouvelles, profondes et nobles, tout à fait impitoyables et radicales. Il suffit de tendre l’oreille : j’entends le bruit et la fureur, le tumulte et le fracas… À QUOI ASPIRE LA JEUNESSE ALGÉRIENNE, CINQUANTE ANS APRÈS L’INDÉPENDANCE ? Le droit de se construire un avenir SARAH CHELAL, 22 ans, stagiaire à l’association Citoyen des rues international. C inquante ans après l’indépendance de l’Algérie, quelle est la situation de la jeunesse et ses perspectives d’avenir ? Au printemps 1962, un espoir naissait pour l’ensemble de la population algérienne. Les combattants pour une Algérie libre voyaient dans l’indépendance un meilleur avenir pour leurs enfants. Mais l’espoir d’un État fort, autonome, où la jeunesse aurait toute sa place ne semble pas avoir porté ses fruits. Un bilan sur les déceptions et les espoirs de cette jeunesse s’impose. Rappelons qu’en 2012, un Algérien sur deux a moins de vingt ans et que le taux de fécondité est de 2,3 enfants par femme. La jeunesse apparaît donc comme un enjeu pour l’Algérie. L’ H U M A N I T É . L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 D’ailleurs, depuis son indépendance, l’Algérie a investi d’importantes ressources afin de garantir à l’ensemble de la population un accès équitable à la scolarisation, aux soins et à la protection sociale. Mais aujourd’hui encore, la jeunesse algérienne rencontre de nombreuses difficultés. 25 % des jeunes sont au chômage (chiffre de la Banque mondiale, 2010). Ces jeunes ont besoin d’exprimer leurs frustrations, leur sentiment de ne pas être écoutés mais aussi leurs inquiétudes. La situation de cette jeunesse devient préoccupante entre chômage et errance. Une grande partie se tourne vers le secteur informel. Ils bricolent, vendent des cigarettes de contrefaçon à la sauvette. La jeunesse algérienne est désemparée et ne voit comme seule perspective d’avenir que l’immigration vers l’Europe. En effet, un grand nombre de ces jeunes tentent de quitter le pays afin d’échapper à un horizon d’avenir bien pauvre. La France reste pour eux un eldorado, ces jeunes brûlent leurs papiers afin de ne pas être renvoyés en Algérie, on les appelle les harragas (« brûleurs » en arabe). Au chômage vient s’ajouter l’ennui. En Algérie, les lieux de socialisation sont presque inexistants. Selon une étude de l’Unicef réalisée en 2010, la jeunesse algérienne pâtit d’un manque d’opportunité de participation à la vie politique et citoyenne, d’accès aux loisirs et aux infrastructures fondamentales pour la santé ou l’éducation. Dans ce contexte, les micro-émeutes et les immolations de jeunes deviennent de véritables faits sociaux, toutes les opportunités sont utilisées pour revendiquer des droits. Par ailleurs, une autre problématique est à prendre en compte sur la situation des jeunes en Algérie. Ce sont les enfants des rues. Le phénomène des enfants des rues en Algérie a pris une ampleur considérable depuis quelques années. Dans les plus grandes villes d’Algérie, comme Alger, Oran ou encore Annaba, il n’est pas surprenant de voir des enfants âgés d’à peine cinq ans vivre dans les rues. Selon une enquête réalisée en 2006 par la Fondation nationale de promotion de la santé et du développement de la recherche (Forem), les enfants des rues seraient plus de 20 000 à travers le pays et leur nombre ne cesse d’augmenter. L’Observatoire des droits de l’enfant révèle que 61 % de ces jeunes vivent de la mendicité, 15 % de vol et 2 % de la prostitution. Les raisons de mise à la rue de ces enfants sont nombreuses : conflits familiaux, précarité ou encore maltraitance. La pauvreté et la violence qui caractérisent l’existence de milliers de jeunes Algériens résultent des lacunes des politiques de l’État algérien dans la protection de l’enfance et de l’adolescence. Malgré tout, cette jeunesse continue à rêver… Mais à quoi rêve-t-elle ? Elle ne rêve à rien d’autre que pouvoir répondre à ses besoins les plus élémentaires : se loger, travailler, manger à sa faim, pouvoir se divertir et surtout se construire un avenir. Et les plus jeunes espèrent enfin pouvoir étudier et ne plus être obligés de travailler pour subvenir aux besoins de leur famille. La jeunesse algérienne ne veut pas d’une société imposée, elle désire pouvoir être actrice de sa vie, de son avenir, et ainsi construire SA propre société. parce que nous aurons besoin de toute votre intelligence. » «A Instruisez-vous, G , ’O , 1919. NTONIO RAMSCI L UTILISER LE SALAIRE POUR DÉPASSER LE CAPITALISME ? La cotisation sociale, arme contre le capital THÉOPHILE ROUALLAND, 26 ans ENTRETIEN B ernard Friot, vous êtes chercheur et animateur du Réseau Salariat, vous venez de publier l’Enjeu du salaire (Éditions La dispute). Contre une tradition qui voudrait l’abolition du salariat, vous en revendiquez au contraire l’extension ? BERNARD FRIOT. Oui, mais il faut voir ici le salariat comme l’ensemble des institutions qui se sont créées autour du conflit sur le salaire et en particulier autour de la cotisation sociale et de la qualification. En ce sens, le salariat est un mode d’organisation de la société susceptible de se substituer au capitalisme, de remplacer (par la cotisation sociale et la qualification) à la fois le marché du travail et la propriété lucrative. La cotisation est un enjeu fondamental. D’une part, elle subvertit les institutions que l’impôt légitime. Si on taxe le capital pour financer la Sécu, réduire les profits financiers revient à réduire les rentrées de la Sécurité sociale, alors que la cotisation sociale ponctionne directement le profit et s’ajoute au salaire. D’autre part, la cotisation permet de fonder la citoyenneté non pas sur les ressources, mais sur la reconnaissance d’une qualification, d’une capacité à produire de la valeur économique. Dans cette perspective que pensez-vous du débat sur la TVA sociale ? BERNARD FRIOT. Remplacer la cotisation par de la TVA ne serait pas difficile à combattre, car la TVA est un impôt antiredistributif. Mais c’est la bagarre contre la CSG qu’il faut mener et réfléchir à l’opposition qu’il y a entre cotisation et impôt. Je propose de remplacer l’impôt par la cotisation : on supprime l’impôt moyennant une hausse de la cotisation sociale jusqu’à 100 % de la valeur ajoutée, qui se répartirait entre salaire et investissement. Les salaires directs seraient donc payés par une caisse de cotisation et soustraits au pouvoir de l’employeur. « Je propose de remplacer l’impôt par la cotisation : on supprime l’impôt moyennant une hausse de la cotisation sociale jusqu’à 100 % de la valeur ajoutée. » Mais est-ce que ça ne risque pas de faire fuir les fameux investisseurs ? BERNARD FRIOT. Il faut qu’ils s’en aillent, il faudra d’ailleurs les chasser, car ils ne voudront pas partir. Ils n’existent que par la ponction qu’ils opèrent sur notre travail. On veut nous faire croire que l’accumulation financière accumule de la valeur, alors que le rendement d’une action n’est fondé que sur le travail. Ce dogme s’accompagne d’un recul idéologique, si bien que lorsque Sarkozy propose la taxation des revenus financiers, la seule chose que Hollande lui oppose c’est la taxation à 75 % des revenus supérieurs à 1 million d’euros. La réforme fiscale semble avoir remplacé la revendication de l’appropriation des moyens de production… BERNARD FRIOT. Oui, et c’est dramatique. C’est pour cela que l’une des difficultés fondamentales est que nous ne savons pas lire la cotisation sociale et la qualification dans ce qu’elles ont de subversif. Quel est cet aspect révolutionnaire de la qualification ? BERNARD FRIOT. Dans la fonction publique, par exemple, avec le grade, le salaire est attaché non à un poste de travail, mais à la qualification d’une personne. Instituer un salaire à vie dépendant de la qualification est une façon de sortir du marché du travail. Ce statut dans la fonction publique doit donc être étendu à tous dans la société. Si tout le monde est assuré d’un salaire à vie, qui acceptera de faire encore les travaux pénibles ? BERNARD FRIOT. D’abord, ceux qui ne sont pas nécessaires, on les supprimera, les autres, soit on les mécanisera, soit on créera un service civique. À partir du moment où l’économie ce n’est plus « ils » mais « nous », nous devenons les maîtres de la valeur et nous pouvons assumer les tâches que nous ne faisions que sous le joug de la contrainte. Depuis les années 1980, malgré les résistances, nous subissons, réforme après réforme, des reculs sociaux… BERNARD FRIOT. La posture de résistance, c’est toujours une façon de ne pas être révolutionnaire. À cette posture, j’oppose une posture révolutionnaire qui s’appuie sur des éléments du réel : la cotisation sociale est déjà expérimentée à grande échelle et c’est dans sa généralisation que l’on peut envisager la sortie du capitalisme. COMMENT LE SYNDICALISME PERMET-IL DE RÉSISTER ? Appel à la jeunesse : s’indigner ne suffit pas, syndiquez-vous ! ALIX DOS SANTOS, 22 ans. S e syndiquer est la meilleure façon de faire valoir ses droits, de porter son exigence au sein d’une entreprise. C’est la meilleure façon de résister au patronat tout-puissant, de ne pas être considéré comme une machine et de rappeler au patron que derrière les profits, il y a des êtres humains. Même s’il existe une discrimination syndicale, il faut se rappeler qu’en descendant les marches de l’escalier, nous risquons aussi de tomber. Trop de personnes croient que le syndicat décide à leur place, ce qui est faux, car ce sont les syndiqués qui font le syndicat et qui décident de leurs revendications communes. Les jeunes ont de bonnes raisons de se syndiquer ! Ils ont démontré pendant la bataille du CPE qu’ils pouvaient se battre pour leurs conditions de salariés et la défense de leurs conditions de vie et de travail, c’est pour cela qu’il faut être optimiste. Il existe une discrimination envers la jeunesse de notre pays, il suffit de regarder le taux de chômage des jeunes ! Encore une bonne raison de se battre pour faire une loi qui obligerait les entreprises à embaucher les jeunes. Et aussi le préapprentissage non rémunéré, qui constitue une sorte d’esclavage de l’apprenti. (Tout travail mérite salaire, c’est une question de principe !) 27 RDINE NUOVO Donc, les jeunes ont tout à gagner à se syndiquer. Nous sommes la relève ! Nos anciens se sont battus, ont résisté (parfois au prix du sang) et ont obtenu les plus grands acquis sociaux de notre histoire. Aujourd’hui, le capital tente de tout reprendre. Nous devons prendre exemple sur nos aînés du courage dont ils ont fait preuve et des risques qu’ils ont pris pour arracher ces acquis au capital. La crise actuelle est celle du capitalisme, nous n’en sommes pas responsables, nous ne voulons pas payer leur crise, et c’est en continuant le combat de nos aînés que nous conserverons et surtout étendrons nos droits sociaux et serons dignes de nos aînés. L’ETHNOLOGIE, UNE SCIENCE DU PRÉSENT ? De l’apport de l’anthropologie dans les conflits VINCENT LAVENU, 25 ans. E n Afghanistan mais également au Yémen, les tensions sont toujours très vives malgré une situation politique plus ou moins stable. Les conflits intercommunautaires se multiplient, mais derrière ces combats acharnés, se cache la volonté de chaque communauté de revendiquer son territoire afin qu’il ne soit plus bafoué. Mais comment appréhender l’étude de ces phénomènes ? L’ethnologie et l’anthropologie sont des sciences qui étudient les visions du monde des divers groupes humains. Par le biais de catégories anthropologiques telles que la notion de parenté, la religion, l’art ou la politique, nous pouvons comprendre comment tel ou tel peuple fait société. Toute culture repose sur un socle de traditions, cependant la tradition ne doit pas être vue comme un agrégat de mœurs et de valeurs fixes. Celle-ci change et se remodèle au fil de l’histoire. Ainsi, l’ethnologie apporte tout son savoir dans la compréhension de ces conflits en insistant sur le rôle des structures tribales et claniques sur l’échiquier politique de ces différents pays. Prenons pour exemple l’Afghanistan. Depuis 2003, un gouvernement « L’ethnologie nous apprend par exemple que le tribalisme n’est pas un concept qui entre en contradiction avec la création d’un État-nation. » intermédiaire présidé par Hamid Karzaï tente d’unifier les diverses tribus présentes dans le pays, en vain. Nous constatons que la tribu majoritaire géographiquement et démographiquement, c’est celle des Pachtouns, or, le président Hamid Karzaï est issu du groupe lignager Durrani popalzaï. Du fait de leur importance, les Pachtouns ne se reconnaissent donc pas dans ce nouveau gouvernement intermédiaire et souhaiteraient tenir une place prépondérante dans la gestion de l’État. L’ethnologie nous apprend également que le tribalisme n’est pas un concept qui entre en contradiction avec la création d’un État-nation, en témoigne la situation politique yéménite. Après trente-trois ans de règne sur le Yémen, le président Ali Abdallah Saleh cède sa place. Cette transition ne se sera pas effectuée sans heurts. Il y eut un fort mouvement contestataire étudiant dans les villes de Sanaa, Taëz et Aden. Le pouvoir de Saleh fut ébranlé lorsque le chef de la confédération tribale des Hached exigea le départ du président. Les différentes tribus yéménites se sont alors ralliées à la cause révolutionnaire, invoquant plus d’égalité et souhaitant la création d’un État-nation. Cela prouve que les tribus peuvent cohabiter au sein même d’un État-nation à partir du moment où l’on reconnaît leur lignage et leurs propriétés foncières. L’ethnologie nous montre qu’il est indispensable de se pencher sur l’étude de ces sociétés tribales afin de mieux comprendre leur fonctionnement et de respecter la vision qu’elles se font de leur territoire. La science anthropologique n’est pas l’apanage de l’étude de sociétés passées. Comme nous avons pu le constater à travers nos deux exemples, l’ethnologie est au cœur des débats actuels. Il serait bon que les politiques de par le monde se penchent sur le regard ethnologique afin d’éviter l’ethnocentrisme, et surtout qu’ils humanisent leurs rapports face aux autres peuples. L’ethnologie ayant pour vocation de faire dialoguer les cultures, prenons alors le temps de nous pencher sur ce qu’elle nous révèle. L U N D I 1 2 M A R S 2 0 1 2 . L’ H U M A N I T É Des jeunes chez Jaurès Les jeunes correspondants de Libres Échanges ont été aux manettes de votre quotidien, ce weekend, expérience unique en Europe et qui trouve toute l’année des prolongements dans nos pages. RAYMOND KARGAR, 23 ans, LOLA BENGHIAT, 17 ans, GUILLAUME SOYEUX, 16 ans, MARIUS CAILLOL, 19 ANS. U ne centaine de jeunes debout un samedi matin, un tour de force pour l’Humanité. Certains se sont levés avant l’aube pour arriver à 8 h 30 devant les bureaux dionysiens du journal. Dehors, on déguste déjà son café-clope, les langues endormies se délient peu à peu. On apprend à se connaître : « D’où viens-tu ? Que fais-tu ? » Les premières interrogations fusent sur la journée à venir. « Vous savez si la bouffe est bonne ici ? » Chacun est convié à entrer dans la salle de réunion, l’attention est à son comble. Les Les textes des Points Chauds (brèves) ont été réalisés par Hélène Allain (21 ans), Lucas Baudry (19 ans), Julie Bertho (24 ans), Elsa Braouezec (19 ans), Margot Cimic (21 ans), Cyrille Cressy (19 ans), Mathieu Grand (25 ans), Julien Gares (25 ans), Romain Lambic (23 ans), Louis Lecoq (21 ans), Mélodie Parola (22 ans), Théotim Pellé (19 ans), Stéphanie Petit (26 ans), Vivien Rebière (20 ans), Paolo Stuppia (27 ans). membres de la rédaction sont présentés tour à tour. Lorsque la responsable « de la politique de droite et du tapage sur Sarkozy » apparaît, elle est vivement applaudie par l’assemblée. Les rires éclatent, le ton de la journée est donné, la bonne ambiance est de mise. « On va bien se taper des barres. » Politique, Société, Sports, Monde ou Médias, le choix de la rubrique semble cornélien, pourtant tous semblent savoir quoi faire, où aller. « C’est mort, je fais la politique ou je me taille. » Direction les bureaux des rédactions, sept étages plus haut. La foule jeune et dynamique, section Sports comprise, se rue vers les ascenseurs, tandis que certains courageux, les « geeks » de la section Web, tenteront les escaliers. Commence alors le fameux brainstorming. À la rubrique Société, les quelques silencieux, encore dubitatifs sur le choix de leur sujet, sont rapidement éclipsés par les plus déterminés. « Il faut défendre son bifteck ! » prévient le chef de rubrique. L’escarmouche interne pour les sujets précède la terrible bataille des pages. Lorsque la conférence de rédaction commence, les rapporteurs se préparent. Ces derniers, représentant leur rubrique, doivent convaincre l’ensemble de la rédaction de l’importance de leur papier. La photo du Forum à La Courneuve en page 11 a été réalisée par Lucile Casanova (19 ans) ; les dessins des pages 8 et 14 ont été réalisés par Julien Guttières (22 ans). Les négociations sont âpres, mais l’entente est rapide. « Nous, on veut que deux pages, on est modestes. » Sujet en main, la centaine de journalistes d’un week-end s’en vont à leurs tâches. Les premières pages sont brouillonnées quand les premiers reporters se précipitent. Dans le cocon du journal s’attellent des dizaines de passionnés, bâtissant avec ferveur le corps de l’Humanité, leur Humanité. Alors que tous peaufinent leur papier, chacun a hâte de voir le fruit de son travail. On arrive enfin dans le « money time », le moment fatidique des dernières retouches avant l’envoi à la mise en pages. D’autres ont fini leur travail et se comparent : « T’as fait combien de signes ? Perso, 3 000 ! » « Mytho, t’en as même pas fait 300. » Au détour d’un couloir, on peut croiser les membres véritables et vénérables du quotidien. « Nous, on est la saison 7 du Libre Échange ! » À la rubrique Politique, on débat hardiment sur le choix des mots du titre, alors qu’un autre regarde l’air pensif le Stade de France de la fenêtre. Peu à peu, les bureaux de l’Humanité se vident, l’ambiance redevient calme et studieuse, mais reste cette sensation, cette empreinte d’une rédaction jeune et éphémère, fière du travail accompli.