Des commerçants sont en retard pour le payement du tiers

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Des commerçants sont en retard pour le payement du tiers
Des commerçants sont en r e t a r d pour le p a y e m e n t du tiers
provisionnel pour des r a i s o n s souvent indépendantes de leur
volonté. Vous n ' a v e z pas à leur faire u n procès d'intention.
M. le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques. J'ai le droit de leur faire u n procès d'intention quand ils
renvoient la feuille avec l ' i n d i c a t i o n : « Grève de l'impôt ».
M. Gilbert de Chambrun. Dans les cas que je cite, il s'agit
s i m p l e m e n t d ' u n retard ; a u c u n message n ' a été adressé au lise
indiquant qu'il s'agissait d ' u n e grève de l'impôt.
Même dans ce cas, le fisc bloque le double de la s o m m e due
au Trésor, c'est-à-dire la totalité de la somme, au compte cour a n t postal et ,1a totalité de la s o m m e au compte en b a n q u e .
Supposez qu'alors, le commerçant soit, en raison de cette intervention fiscale, r é d u i t à la cessation de ses p a y e m e n t s . Que lui
répondrez-vous s'il vous dit que, précisément," ce qui le réduit
à cette cessation de p a y e m e n t s ce n'est pas la somme exigible,
m a i s le fait que vous avez bloqué le double de cette somme ?
J ' e s t i m e qu'il y a là u n e première illégalité.
Enfin, dans de n o m b r e u x cas, des contribuables ont été dans
le passé en retard de trois mois parfois pour le p a y e m e n t de
l e u r tiers provisionnel : ils savaient alors qu'ils auraient à payer
u n e pénalité de 10 p. 100. Mais lorsque a u j o u r d ' h u i , sons recourir à l'arsenal de m o y e n s de r e c o u v r e m e n t que vous avez à
votre disposition, sans sommation ni c o m m a n d e m e n t , quinze
j o u r s après l'expiration du délai de v e r s e m e n t des tiers provisionnels, vous bloquez dans leur compte courant postal et leur
compte en b a n q u e la s o m m e qu'ils doivent au fisc, je déclare
s i m p l e m e n t , sans être l'avocat — et je ne le serai jamais — de
lu grève de l'impôt, que vous ébranlez la confiance que les
g e n s doivent avoir dans les comptes postaux et que, de plus,
vous risquez de les inciter à ne pas alimenter leur compte
bancaire, ce qui est contraire aux intérêts des particuliers, de
l'Etat et des collectivités.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux
finances et aux affaires économiques.
M. le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques. Je réponds à M. de Chambrun qu'à l'égard de commerçants qui se sont trouvés m o m e n t a n é m e n t gênés pour p a v e r
l e u r tiers provisionnel, il n ' e s t pas douteux que les services
d u Trésor p r e n n e n t les plus g r a n d s m é n a g e m e n t s comme ils
l ' o n t t o u j o u r s fait.
Mais s'il s'agit de commerçants qui, comme ce f u t le cas,
d a n s certains départements, n ' o n t pas payé leur tiers provisionnel suivant u n mot d'ordre qu'ils avaient reçu, le fisc a le
devoir d'agir pour faire r e n t r e r l ' a r g e n t . Quelle procédure suit-il
alors ? Bien sûr, il peut recourir à la procédure classique: sommations, c o m m a n d e m e n t s , des frais s ' a j o u t a n t d'ailleurs à la
s o m m e due par le contribuable. C'est g é n é r a l e m e n t la procédure suivie à l ' é g a r d de ceux qui sont gênés p o u r payer et à
qui on accorde ainsi des délais.
Quant à la pénalité de 10 p. 100, c'est u n e sanction qui n'a
jamais exclu le droit à r e c o u v r e m e n t . Celui qui n ' a pas payé
sa dette au fisc au jour déterminé doit la m a j o r a t i o n de
10 p. 100, mais le Trésor ne perd pas pour autant le droit de
récupérer i m m é d i a t e m e n t ce qui lui est dû.
Vous m e dites, m o n s i e u r de C h a m b r u n , qu'il bloque deux
fois la s o m m e . Je suis convaincu que t e c h n i q u e m e n t le prob l è m e ne se pose pas ainsi. En lait, il est probable que le percepteur envoie u n e opposition aux tiers détenteurs, à la fois à
la b a n q u e et au service des chèques postaux, parce qu'il ne
peut pas savoir d'avance si le créait dont dispose le contribuable
à la b a n q u e et au service des chèques postaux est égal ou supérieur au m o n t a p t de sa dette à l'égard de l'Etat. Ainsi il peut
arriver q u ' u n contribuable ait u n blocage double du m o n t a n t
des impôts qu'il doit si, dans les deux comptes, il a un crédit
s u p é r i e u r au m o n t a n t de sa dette. Mais alors, il lui suffit de
d e m a n d e r ce q u ' o n appelle en droit civil le c a n t o n n e m e n t et
de p a y e r i m m é d i a t e m e n t ce qu'il doit.
Le blocage n'affecte que le m o n t a n t de la somme due. Il
suffit que le contribuable ou que le tiers détenteur la paye
pour q u ' a u t o m a t i q u e m e n t cesse ie blocage.
Voilà, du point de vue technique, la procédure habituelle.
Il n ' y avait jamais eu, j u s q u ' à présent, a u c u n incident. S'il
s ' e n est produit, m o n s i e u r de C h a m b r u n , ce n ' e s t certainement
pas à propos de commerçants qui, m o m e n t a n é m e n t gênés,
a u r a i e n t été dans l'obligation de retarder le p a y e m e n t de leur
tiers provisionnel de quinze jours ou de trois semaines. Il
s'agissait certainement de contribuables qui avaient r e n v o y é
leur feuille d'impôt au percepteur en précisant qu'ils ne paveraient p a s et envers lesquels on a été obligé de p r e n d r e ^es
m e s u r e s d'opposition entre les m a i n s des tiers détenteurs.'
Quant au dernier a r g u m e n t que vous avez i n v o q u é , . m o n s i e u r
'de Chambrun, croyez-moi, entre le risque que court l'Etat .ie
voir porter a t t e i n t e ' à son crédit, pai ce blocage inopiné de fonds
déposés dans des b a n q u e s ou a-ux comptes de cheques postaux
et, d'autre part, la crainte de l'Etat de voir se développer cette
grève de l'impôt, nous avons choisi délibérément.
M. Gilbert de Chambrun. Nous nous, réservons de • d e m a n d e r
l ' o u v e r t u r e d ' u n débat sur la question.
M. le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économ i q u e s . Quand vous voudrez I Au cours de la discussion de
la loi de finances, par exemple.
M. le président. La parole est à M. Denais.
M. Joseph Denais. Je ne p e u x pas m e rallier à la thèse de
M. le secrétaire d'Etat aux finances.
Il est inadmissible que, pour u n e dette éventuelle, il y ait
blocage des comptes, que ce soit aux b u r e a u x de chèques
postaux ou ailleurs.
Certes, l'administration a tendance à agir avec quelque b r u talité pour h â t e r les r e c o u v r e m e n t s des impôts, mais à m o n
sens il ne peut pas y avoir blocage d ' u n compte si toutes les
règles de procédure n ' o n t pas ét-é suivies à l'égard du contrib u a b l e p r é s u m é récalcitrant.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous considérez c o m m e un acte
de mauvaise volonté délibéré du contribuable le fait d'avoir
renvoyé une feuille d'impôt à la préfecture. Mais vous n e
pouvez pas, de ce chef, conclure que le fisc est autorisé à
e n f r e i n d r e les lois et les usages r é g u l i è r e m e n t suivis en m a t i è r e
de recouvrement des impôts.
Le s y s t è m e du p a y e m e n t par tiers provisionnel est u n procédé u n peu anormal, que l'on a toléré en raison des difficultés
de trésorerie.
M. le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques. Pourquoi, anormal ?
M. Joseph Denais. Il est anormal parce q u ' o n ne devrait p a s
avoir à payer les impôts d'avance.
M. le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques. Le fisc ne les fait pas payer d'avance.
M. Joseph Denais. On les paye d'avance. De plus, c o m m e
vous-même l'avez admis, celui q'ui ne paye pas u n tiers provisionnel dans les premiers jours de février subit u n e pénalité
de 10 p. 100; vous admettez donc que c'est là la sanction
normale et suffisante d ' u n retard qui doit être considéré c o m m e
pouvant atteindre un certain n o m b r e de jours sinon de
semaines.
D'après ce que vous avez dit tout à l ' h e u r e , il semble q u e
vous vouliez abolir ces délais et que vous entendiez t o u t de
s u i t e , . p a r c e que le contribuable aura r e m i s la feuille d ' i m p ô t
à la préfecture, le considérer comme u n délinquant du point
de vue fiscal.
Là, vous dépassez la loi et vous commettez, au surplus, u n e
très grave erreur. Si les comptes de chèques postaux sont
considérés par l ' i m m e n s e m a j o r i t é des déposants comme u n
piège dans lequel ils peuvent être pris et se trouver victimes d u
lise, vous aboutirez tout simplement à ce résultat que ïes versements aux comptes de chèques postaux diminueront sensiblement.
Est-ce cela que vous désirez ? C'est tout à fait contraire à
la politique générale du Gouvernement.
M. Jean-Michel Fiandin. Très juste !
M. Joseph Denais. Vous cherchez à obtenir u n e trésorerie
a b o n d a n t e . Ne laites donc pas f u i r les déposants volontaires.
Vous feriez bien de donner à vos services des instructions
pour qu'ils n'aient pas la m a i n aussi lourde. Je ne crois d'ailleurs pas que les m e s u r e s prises soient t o u j o u r s p a r f a i t e m e n t
légales, lin tout cas, elles sont, à m o n sens, maladroites n o n
seulement à l'égard des intéressés, mais aussi à l'égard de la
trésorerie de l'Etat.
Il ne f a u t pas être trop dur envers le contribuable. Nous
n o u s sommes soumis à u n e fiscalité excessive quant aux t a u x
pratiqués, plus excessive encore quant aux procédés de recouvrement.
Sans doute les taux de la fiscalité correspondent-ils à des
besoins que je ne nie pas, mais il serait nécessaire d'assouplir
au moins la manière dont les impôts sont recouvrés. Il suffirait de très peu de chose pour que, entre les contribuables et
l'administration des finances, s'établisse u n climat de b o n n e
volonté indispensable tout d'abord à l'Etat.
[Applaudissements
à
droite.)
M. le président. La parole est à M. Tourtaud.
M. Auguste Tourtaud. Mesdames, messieurs, après la r é p o n s e
de M. le secrétaire d'Etat à la question posée par M. de Chamb r u n , n o u s sommes fixés sur les intentions du Gouvernement*