Phytothérapie

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Phytothérapie
Phytothérapie
La phytothérapie, étymologiquement le traitement par les plantes, est une méthode
thérapeutique qui utilise l'action des plantes médicinales. Elle est probablement la Médecine
la plus ancienne.
Depuis la nuit des temps, la première préoccupation de l’Homme fut de satisfaire ses
besoins alimentaires. Puis il du lutter contre les maladies ou le mal être qui touchaient son
corps et son esprit.
Face à la maladie, il a cherché dans son environnement, les plantes, les animaux, les
minéraux qui pouvaient le soulager.
Par l’intuition, l’observation, l’expérimentation sur eux-mêmes ou sur des animaux,
les hommes sélectionnèrent les végétaux utiles, ceux qui nourrissent, ceux qui soignent, ceux
qui empoisonnent ou tuent et peuvent être utiles à la chasse ou à la guerre. Ainsi ils purent
observer les animaux qui utilisent des plantes précises quand ils présentent certains
symptômes.
Les hommes qui découvrirent les premières plantes efficaces eurent la reconnaissance
immédiate de leur entourage ; ce furent des guérisseurs.
Ensuite, les hommes essayèrent, à partir de cette expérience, de prévoir l’utilisation
médicale des plantes ; des théories explicatives du monde et plus particulièrement des
conceptions de la santé et de la maladie furent élaborées. Ils bâtirent alors des médecines
basées sur l’analogie, c’est-à-dire sur des relations entre ces plantes, l’environnement et le
malade.
En même temps, ils arrivèrent à améliorer l’efficacité de ces plantes par des
préparations qui en diminuent leurs aspects défavorables comme leur nocivité ou leur goût et
accroissent leur potentiel curatif.
Dans chaque région du monde s’est échafaudé un système cohérent de croyances et de
conceptions de la médecine -maladies du corps et de l’esprit- où sont décrits les causes de ces
maux et les principes thérapeutiques pour rétablir la santé.
La connaissance des plantes se transmet de génération en génération par un
apprentissage ou une initiation dans toutes les sociétés de tradition orale (certaines
populations de l’Afrique,, de l’Amérique , du Pacifique). Dans d’autres régions du monde,
l’écriture véhicule ces savoirs thérapeutiques et c’est ainsi que se développent les médecines
savantes grecque, indienne, chinoise et arabo-persane.
D’où certaines règles importantes concernant la phytothérapie qu’il ne faut jamais
oublier :
1) il n’y a pas une phytothérapie mais des phytothérapies en fonction des régions du
globe et des cultures locales.
2) La diagnose de la plante est très importante. Cela s’apprend.
3) Les plantes ne s’utilisent pas telles quelles ; elles doivent être préparées.
4) Les plantes peuvent guérir, aggraver ou tuer
Historique
Les Grecs furent les héritiers des connaissances médicinales de l’Egypte et de la
Mésopotamie. Des tablettes sumériennes donnent des indications sur l’utilisation de plantes
en médecine humaine et vétérinaire, de même dans des hiéroglyphes égyptiens.
Hippocrate, dès le IV e siècle avant J.C., appelé le “père de la médecine”, jette les base
d’une médecine scientifique qui se débarrasse des pratiques magiques ou religieuses. Il
élabore la théorie humorale, basée sur les quatre éléments constitutifs du monde : l’air, l’eau,
la terre et le feu et sur les quatre humeurs : le sang, la bile, l’atrabile et le phlegme, en rapport
avec quatre organes, respectivement le cœur, le foie, la rate et le cerveau. Ces éléments,
humeurs ou organes peuvent être affectés par le chaud, le froid, le sec et l’humide. Nous ne
sommes pas très éloignés de la Médecine Traditionnelle Chinoise ! Deux cent trente plantes
médicinales sont décrites dans le Corpus Hippocraticum .
Cette théorie humorale sera reprise par la médecine arabo-persane.
Les Arabes rencontreront les pratiques médicales des civilisations qui les ont précédés.
Des copistes et des traducteurs rassemblèrent à Damas les écrits des sciences de l’Occident et
de l’Orient, avec la traduction des ouvrages des médecines grecque et indienne
(ayurvédique).Ibn al Baytar rédigea le Traité des simples en décrivant 1500 drogues d’origine
végétale, minérale ou animale.
En Médecine Traditionnelle Chinoise, les plantes médicinales sont classées selon une
conception énergétique en rapport avec les principes de base de cette médecine. Les plantes
sont définies par leur saveur et leur nature. Il existe de nombreux ouvrages anciens de
phytothérapie chinoise.
En Europe, Charlemagne recommande dès le IX e siècle, la culture de 88 plantes
médicinales dans les monastères et les abbayes. Dès le déclin du monde arabe en Espagne, des
moines traduisent en latin des traités médicaux, comme le Canon d’Avicenne qui, pendant 800
ans, servira de référence à l’enseignement de la médecine dans toute l’Europe.
Au XVI e siècle, un médecin suisse Paracelse énonce la théorie des signatures qui stipule
que la plante, par sa morphologie ou sa couleur, son mode de vie, signe son indication
thérapeutique. Ainsi le latex jaune de la Chelidoine est bon pour la vésicule biliaire, car la bile
est jaune. Cette théorie sera reprise plus tard par Goethe, puis en partie par la médecine
anthroposophique.
C’est au cours du XIX e siècle que la chimie végétale fait des progrès considérables et
que les premières molécules des plantes sont isolées et identifiées. La strychnine est tirée en
1818 du vomiquier, la nicotine du tabac en 1828, la digitaline de la digitale en 1868. Les
plantes utilisées depuis des siècles sont testées chez l’animal pour vérifier leurs effets
physiologiques. La biologie confirme les observations cliniques ancestrales.
Au cours du XX e siècle, la plupart des médicaments sont tirés du règne végétal. Ainsi, ce
sont les champignons qui donnent les premiers antibiotiques.
Et aujourd’hui des laboratoires recherchent les principes actifs des plantes, selon des principes
pratiquement industriels.
Il faut souligner la continuité dans l’utilisation des plantes médicinales depuis les temps
anciens jusqu’à nos jours.
A la découverte des principes actifs
C’est d’abord vers les plantes toxiques, dont on avait pu constater l’activité sur les êtres
vivants, que ce sont orientées les premières recherches chimiques. Ces investigations ont
permis d’isoler, d’identifier puis éventuellement de synthétiser ou de modifier, des molécules
actives. Par exemple, l'acide salicylique, principe actif de l'aspirine, était fabriqué avec
l'écorce de saule. Il est à présent synthétisé par voie chimique, ce qui permet de mieux
contrôler la qualité, mais aussi d'épargner les saules pour subvenir à la consommation
mondiale.
C’est la découverte de la morphine en 1804, extraite du pavot à opium, qui est toujours
aujourd’hui le médicament de référence contre la douleur. 28 ans plus tard, les chimistes
identifient dans cette même plante la codéine, aux vertus antitussive et analgésique.
Depuis la recherche a fait d’énormes progrès avec des outils de plus en plus performants pour
identifier les molécules actives. En fonction de leur composition chimique, de leur
agencement dans l’espace, certaines sont sélectionnées puis testées sur des modèles in vivo
-animaux vivants- et de plus en plus in vitro -organes isolés, cultures cellulaires… -.
Par sa capacité extraordinaire à fabriquer des molécules originales, le règne végétal
fournit ainsi à l’industrie pharmaceutique la moitié de ses médicaments actuels obtenus par
extraction, hémi synthèse ou synthèse totale. Ainsi en cancérologie avec la pervenche de
Madagascar (Catharanthus roseus ) ou l’if ( Taxus baccata ).
Mais l’utilisation d’un seul principe actif issu d’une plante, est-ce de la phytothérapie ? Non !
Phytothérapie et notion de Totum
En phytothérapie, on essaye d’utiliser tout ou une grande partie de la plante ; après en
avoir éventuellement éliminé les parties les plus toxiques ou l’avoir traitée.
En phytothérapie , on n’utilise pas une seule molécule, mais un ensemble de
molécules, parfois plusieurs centaines. Et l’expérience pratique, confirmée par des études
biochimiques, nous indique que ces molécules ne s’opposent pas dans leur action ; elles ont
au contraire une action synergique. C’est-à-dire que l’efficacité thérapeutique de l’ensemble
est plus efficace que l’activité thérapeutique de chaque composant pris isolement ; c’est ce
que l’on peut appeler le Totum synergique. Comme si, l’ensemble des composants d’une
plante médicinale, tire l’organisme vers un - ou quelques- mêmes objectifs thérapeutiques.
Ainsi, vous ne trouverez pas dans une plante, un composant qui ralentira le cœur et un autre
qui l’accélérera. De nombreuses recherchent nous indiquent que ces composants multiples de
la plante agissent le plus souvent à différents niveaux de l’organisme ; ce qui renforce
l’efficacité thérapeutique.
Nommer les plantes et connaître leur composition
Bien utiliser les plantes, c’est d’abord les reconnaître, les identifier et pour cela il faut
pouvoir les nommer et qu’il y ait un consensus général, universel.
Depuis 2000 ans, les hommes ont nommé les plantes dans plus de 5000 langues ou
dialectes qui n’ont de sens que dans les régions de culture et de langue communes.
Il fallait donc inventer un système international de nomination et de classification accepté et
reconnu de tous. On doit ce système au botaniste suédois Linné au XVIII e siècle qui proposa
de nommer -en latin- les plantes et les animaux par deux noms seulement : le genre et
l’espèce.
Le genre regroupe des plantes qui ont des ressemblances et des affinités. L’espèce est
une particularité du genre ; les espèces étant interfécondes.
Cette classification est toujours d’actualité. Elle permet que les botanistes, les biologistes, tous
les scientifiques du monde entier parlent la même langue quand ils nomment une plante.
Ainsi des recherches sont faites pour connaître la composition des plantes, des nombreux
constituants et de leurs effets biologiques favorables ou nocifs. Ces recherches peuvent être
faites partout à travers le monde, car la classification assure que l’on étudie bien la même
plante.
Il est intéressant de noter que l’on s’aperçoit alors que pour une même plante (dans la
classification), il y a des différences fines de composition en fonction des régions du globe où
elles poussent et même en fonction des années. Comme pour le vin !
Ainsi la composition d’un romarin varie légèrement de chaque côté de la Méditerranée.
Aussi, il est bon parfois d’indiquer, après le genre et l’espèce, le pays d’origine de la plante.
De plus, la composition d’une plante varie dans ces différents éléments anatomiques (racines,
tiges, fleurs, …) ainsi que durant son stade de développement. Comme, par exemple, l’ortie,
dont on utilise soit les parties aériennes soit les racines, dans des indications bien différentes.
Les industriels proposent des teneurs garanties en certains composants, quelque soient la
provenance ou l’année de récolte, pour essayer de maintenir une certaine constance dans la
qualité des produits malgré la variabilité naturelle.
Différents types de préparations
En fonction de l’effet thérapeutique recherché, l’usage traditionnel puis la recherche, ont
mis au point des procédés de traitement des plantes qui permettent de ne garder que les
molécules intéressantes, pour une utilisation locale, buvable ou injectable.
Dans les préparations, la composition d'un remède peut réunir différentes plantes. La
tisane, le cataplasme appliqué directement sur la peau, le sirop, les solutions alcoolisées ou
aqueuses, les essences et les huiles sont les formes les plus courantes de remèdes.
Nous évoquerons ici les principales formes galéniques disponibles, leurs origines de
fabrications.
* Les tisanes : Utilisation des plantes sèches
Les tisanes sont obtenues par macération, digestion, infusion ou décoction en utilisant de
l'eau.
# L'infusion :
Elle consiste à verser sur la plante de l'eau bouillante, couvrir et laisser refroidir 2 à 15
minutes. Elle convient aux plantes fragiles (fleurs et feuilles) .
# La décoction :
Elle consiste à maintenir la drogue avec de l'eau à ébullition pendant une durée de 15 à 30
minutes. Elle convient aux plantes "dures " (écorces, racines, fruits et certaines feuilles).
# La macération :
Il s'agit de maintenir la plante en contact avec l'eau (température ambiante) pendant 30
minutes à 4 heures.
# La digestion :
On maintient la plante en contact avec l'eau ( température inférieure à celle de l'ébullition,
mais supérieure à la température ambiante ) pendant 1 à 5 heures.
* Poudres :
Préparées par pulvérisation suivie d'un tamisage, elles entrent directement dans la
composition des gélules mais servent aussi à la fabrication d'autres formes galéniques comme
les extraits et les teintures.
* Extraits :
Les extraits sont obtenus en traitant la plante dans une solution vaporisable (éther, eau,
alcool,...) par divers procédés d'extraction (macération,digestion, infusion, digestion,
lixiviation) puis en évaporant ces solutions jusqu'à obtenir une consistance fluide, molle ou
sèche. On les classe donc selon leurs consistances.
* Teintures :
Elles sont obtenues à partir de poudres végétales sèches et leur titre alcoolique varie selon le
type de drogue. II peut être à 60° (principes actifs très solubles), à 70 ou 90° à 80°
(ex.produits résineux et huiles volatiles).
* Alcoolatures :
Ce sont des teintures préparées avec des plantes fraîches n'ayant donc pas subi les effets de la
dessiccation.
* Alcoolats :
Ils sont obtenus par distillation des principes volatils de substances végétales au contact de
l'alcool. Ils sont toujours incolores et inaltérables mais il faut les conserver dans des flacons
bien bouchés.
* Intraits :
Ils ne se justifient que dans le cas où les principes actifs d'une drogue (ex.: marron d'Inde,
valériane, sauge, colchique...) risquent d'être dégradés après la récolte, nécessitant une
opération de «stabilisation » (élimination des produits inactifs et/ou dégradants comme les
ferments) par des vapeurs d'eau.
* Huiles essentielles (HE)
Elles se présentent sous deux formes
# les HE solides, aussi appelées «camphres d'essence»,
# les HE liquides naturelles ou après dissolution (ex.: HE de rose).
Les HE officinales s'obtiennent par entraînement à la vapeur d'eau ou par expression ou par
incision. On les classe selon leur couleur (bleu, jaune, vert brun ou incolore) ou leur
composition chimique (HE hydrocarburées, sulfurées et oxygénées pour les solides).
Un petit test permet de les contrôler : sur du papier, les taches d'HE s'évaporent complètement
sans laisser de trace. De toute façon, il faut toujours exiger leur conformité aux normes
AFNOR ou Pharmacopée, de plus en plus exigeantes, donc garantes de sécurité et de qualité.
* Eaux distillées ou hydrolats
On obtient les hydrolats par distillation ( avec l'eau ) de poudre de plantes ou des parties de
ces plantes (fleurs, sommités fleuries).Les eaux distillées, ou hydrolats, sont très odoriférantes
parce que les HE se trouvent en suspension dans l'eau .
* SIPF
Dans les suspensions intégrales de plantes fraîches ( SIPF ), l'intégralité de la drogue est
préservée grâce à un procédé de conservation par le froid, puis de mise en microsuspension
dans un milieu hydroalcoolique qui permet un blocage transitoire des réactions enzymatiques
(rétablies au moment de l'emploi en diluant dans de l'eau).
*Les EPS
Ce sont des extraits fluides de plantes fraîches Standardisés, obtenus après congélation rapide
de plantes fraîches sélectionnées, puis cryobryage, puis extraction avec des degrés alcooliques
différents, puis évaporation et ajout de glycérine.Ces extraits permettent d’extraire un très
grand nombre de molécules actives de la plante, en minimisant les dégradations.
Au cabinet vétérinaire, nous utilisons principalement des Teintures Mères et des EPS
Dangers de la phytothérapie
Les plantes médicinales, remèdes naturels sont bien souvent très efficaces avec moins
d'effets secondaires reconnus que beaucoup de médicaments de synthèse mais peuvent
néanmoins être mortels ou toxiques pour l'organisme. Naturel et “bio” ne signifient pas
qu’elles soient dénuées de toxicité !
Parmi les plantes les plus toxiques et qui peuvent agir à une certaine dose comme
poison citons la Belladone (de la famille des Solanacées) et la Digitale, ces deux plantes
peuvent être utilisées pour des pathologies cardiaques, mais seulement suite à un diagnostic
médical et en utilisant des préparations à base de plantes contrôlées par les autorités.
A côté de plantes mortelles lorsqu'elles sont mal utilisées, il existe des plantes, qui bien
qu'elles ne tuent pas, peuvent fortement endommager un organe ou mener à des allergies.
Ainsi des plantes à base de pyrrolizidine (principe actif qu'on trouve dans certaines plantes)
comme le tussilage ou le séneçon peuvent mener à des pathologies hépatiques.
Le raisin d'ours (Uva orsi) peut également mener à des complications hépatiques si la prise se
fait sur une longue période.
Un autre exemple bien connu consiste en l'application externe d'Arnica qui peut mener à des
risques d'allergie; rappelons aussi que la prise interne répétée d'Arnica en Teinture Mère est
toxique.
Quelques plantes et leurs indications principales fréquemment utilisées au cabinet
vétérinaire
Ces plantes sont souvent utilisées en mélange.
L’Alchemille (Alchemilla vulgaris) dans les diarrhées aiguës ou chroniques.
L’Aubépine (Ctaegus laevigata) dans les insuffisances cardiaques et certains troubles
ducomprtement
Le Cassis (Ribes nigrum) a -entre autre- une action immunomudulatrice et antiinflammatoire
Le Curcuma (Curcuma longa), dans les colites.
Le Cyprès (Cupressus sempervirens) a une activité anti-virale
L’Echinacée (Echinacea purpurea) a une action immunostimulante dans les affections
bactériennes et accélère localement la cicatrisation des plaies suppurées.
Le Ginkgo (Ginkgo biloba) est un oxygénateur cérébral intéressant chez l’animal âgé.
La Mélisse (Melissa officinalis) dans les colites par stress.
Le Millepertuis (Hypericum perforatum) dans les troubles du comportement avec anxiété.
L’Orthosiphon (Orthosiphon stamineus) dans les insuffisances rénales.
L’Ortie (Urtica dioïca) partie aérienne, comme reminéralisant, diurétique, protecteur des
articulations, des tendons et des phanères ( poils, …).
L’Ortie (Urtica dioïca) racines, dans les hypertrophies de la prostate.
La Piloselle (Hieracium pilosella) dans les affections bactériennes urinaires
Le Pissenlit (Taraxacum Officinale) comme draineur hépatique, dans les colites, dans les mal
digestions.
Le Plantain (Plantago lanceolata ) dans les allergies.
La Pervenche de Madagascar (Vinca rosea), comme vasodilatateur et oxygénateur cérébral.
La Prêle (Equisetum arvense) comme reminéralisant.
Le Radis noir (Raphanus Niger) dans les bronchites et certaines pathologies de la vésicule
biliaire.
La Reine des prés (Spirea ulmaria) comme anti-inflammatoire et diurétique
La Réglisse (Glycerrhiza glabra ) dans les gastrites.
La Valériane (Valeriana officinalis), comme calmant ; souvent très apprécié des chats.
Cas particulier du Viscum album
(par Richard Blostin)
Les extraits aqueux de viscum album fermenté – le gui européen- sont utilisés
traditionnellement en cancérologie chez l’homme dans de nombreux pays européens dont
l’Allemagne et la Suisse.
Médicament issu de la
médecine anthroposophique, son utilisation actuelle a aujourd’hui dépassé le cadre strict de
cette médecine.
Depuis une vingtaine d’année, la recherche sur le viscum album fermenté (VAF) s’est
développée de façon importante, tant sur le plan clinique que fondamental et les publications
dans les revues scientifiques sont très nombreuses. Il suffit, pour le vérifier, de chercher sur
un moteur de recherche informatique ou dans “Pubmed” ;
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/entrez/query.fcgi?db=PubMed avec viscum album ou Iscador
(nom du médicament en Allemagne ) comme mots clefs.
Préparation et composition du VAF
Le VAF est préparé de façon très originale. Le VAF consiste en un mélange d’extraits aqueux
fermentés de gui d’hiver et de gui d’été. Le mélange s’effectue sur un plateau, tournant à très
grande vitesse ; la rencontre des 2 extraits se faisant au cours d’une véritable “explosion” qui
n’est pas sans rappeler la dynamisation des remèdes homéopathiques.
Ensuite le VAF est proposé à différentes concentrations, sous forme buvable ou injectable. En
France, c’est principalement le Laboratoire Weleda qui distribue le VAF.
Le VAF est donc un remède phytothérapique qui peut être considéré comme très hautement
dynamisé. Ce mode de préparation semble indispensable à l’efficacité du VAF.
Il est possible de penser que l’efficacité du VAF est lié à la fois à sa composition
phytothérapique ( = aspect moléculaire classique ) , mais aussi à la très haute dynamisation
(= aspect homéopathique) .
Nous ne nous intéresserons qu’à l’aspect phytothérapique.
Une centaine de composants a été retrouvée dans les extraits de VAF. Nous avons donc un
produit très complexe.
Cette complexité s’accroît encore dès lors que l’on sait que la composition chimique du VAF
change en fonction de l’arbre hôte du gui.
Pour simplifier : on sépare les composants actifs du VAF en 2 grands groupes de protéines ,
les lectines et les viscotoxines. La teneur en lectine et viscotoxine dépend de la qualité de la
fermentation qui baisse le ph ; elle varie aussi en fonction de la variété d’arbre hôte.
En effet le gui est un arbuste semi-parasitaire (il utilise l'eau de son hôte, mais fait sa propre
photosynthèse) qui croît sur certains arbres dont le chêne, l'orme, le pommier, le pin, le sapin,
le saule pleureur, le peuplier, … des forêts tempérées d'Europe. Lors d’une prescription, le
nom de VAF doit toujours être suivi de celui de l’arbre hôte ( en latin ! ) ex : VAF pini .
Ces modifications quant à la composition du VAF en fonction de l’arbre hôte semblent
confirmer les utilisations cliniques conseillées traditionnellement pour l’utilisation de chaque
VAF : pour tel type de cancer, tel variété de VAF ( Mali, Pini, …).
A côté de ces lectines et viscotoxines, les VAF contiennent de nombreux acides amines, des
polysaccharides et des lipides, qui à ce jour sont moins bien étudiés. Des résultats récents
montrent qu’ils ont aussi une activité antitumorale.
Le viscum étant un produit phytothérapique, sa composition est susceptible de changer, en
fonction des années ou des lieux de production. Il est aujourd’hui possible de trouver du VAF
avec un taux de lectine garanti par le laboratoire.
Il est à noter que les principaux composants du VAF sont détruits dans l’estomac. Pourtant la
voie buccale donne de bons résultats dans la clinique ( par exemple dans le fibrosarcome
chez le chat ). A t’on une absorption sub-linguale ?
De nombreuses questions restent encore posées, tant sur la composition exacte du viscum que
sur sa préparation originale. Mais il semble que pour que le viscum ait le maximum
d’efficacité, il faut qu’il soit administré dans son Totum intégral.
Recherche clinique chez l’homme.
Le viscum étant utilisé depuis des décennies, notamment en Suisse et en Allemagne, comme
traitement adjuvant ou palliatif, le but de beaucoup d’études a été de vérifier statistiquement
l’impression des cliniciens et des malades. De nombreuses recherches récentes vont dans ce
sens.
Au cours d'un essai avec placebo mené en Russie auprès de 272 femmes traitées pour un
cancer du sein, on a observé une augmentation significative du nombre des lymphocytes chez
les femmes qui recevaient un extrait de gui normalisé en lectine, ce qui devrait, selon les
auteurs, contribuer à l'efficacité globale du traitement.
Au même moment, des chercheurs allemands publiaient les résultats d'un essai sans groupe
placebo qui indiquaient que le même type d'extrait avait produit des résultats similaires chez
12 sujets atteints de divers types de cancers.
Les résultats d'une étude comparative menée en Chine auprès de 233 sujets souffrant d'un
cancer du sein ou du poumon ont indiqué qu'un extrait normalisé de gui était plus efficace
que le lentinan pour atténuer les effets indésirables de la chimiothérapie et qu'il améliorait
significativement la qualité de vie des patients . (Le lentinan, une fraction purifiée du
champignon shiitake, est reconnu au Japon comme un médicament anticancéreux. Il est
administré par injection, en combinaison avec les traitements classiques de chimiothérapie.)
Les résultats d'une étude épidémiologique rétrospective récemment menée en Allemagne
auprès de 689 femmes opérées pour un cancer du sein indiquent que les 219 patientes qui
avaient reçu un extrait normalisé en lectines avaient moins souffert des effets indésirables des
traitements anticancer classiques, et qu'elles avaient bénéficié de plus longues périodes de
rémission .
Une autre étude publiée en 2004 et portant sur 1 442 femmes atteintes d'un cancer du sein a
donné des résultats positifs au chapitre de la réduction des effets indésirables du traitement
conventionnel du cancer (chimiothérapie, radiothérapie, hormonothérapie) et du temps de
survie. Les patientes ont été suivies durant cinq ans en moyenne : les 732 femmes du groupe
contrôle ont reçu un traitement conventionnel, tandis que les 710 ont reçu, en plus, des
injections sous-cutanées de gui. Ces dernières ont été nettement moins nombreuses à subir des
effets indésirables (16 % contre 54,1 % dans le groupe contrôle) et ont bénéficié d'un temps
de survie deux fois plus long (5).
Aujourd’hui il semble admis que les injections de VAF permettent de mieux supporter
les traitements chimiothérapiques, améliorant le confort des patients et amenant un
allongement de la durée de vie. Des études similaires semblent montrer les mêmes résultats
lors de mélanome primitif.
Recherche fondamentale
Son objectif est d’essayer de comprendre les mécanismes d’action du viscum en cas de
pathologie tumorale afin d’expliquer les résultats cliniques et d’essayer de les améliorer.
Jusqu’à présent les mécanismes cellulaires et moléculaires amenant un effet cytotoxique et
immunomodulateur des VAF étaient inconnus. Aujourd’hui la recherche est active; il est
possible de trouver des articles sur des thèmes très différents comme :
-activité de différentes variétés de VAF ou de lectines sur des cultures cellulaires de
différents types tumoraux,,
-cristallisation de lectine afin de mieux comprendre leur action,
-rôle du VAF dans une éventuelle angiogénèse susceptible de favoriser une dispersion
métastatique,
-activation ou inhibition de certaines interleukines,
- effet du VAF sur l’inhibition du cycle cellulaire
-recherche de la voie apoptique, membranaire ou mitochondriale
etc.
Lors d’une réunion récente de scientifiques en Suisse, il a été souligné que les mécanismes
sous-jacents à l’action des lectines et des viscotoxines sont complexes, incluant un rôle dans
la cytotoxicité, l’apoptose, l’angiogénèse et l’immunomodulation. Ces résultats sont
confirmés par les publications récentes d’un laboratoire de l’INSERM à Paris qui travaille sur
ce sujet (travaux dirigés par Srini Kaveri).
*La cytotoxicité, c’est l’action directe du médicament qui détruit les cellules tumorales.
*L’apoptose, c’est la mort programmée des cellules, leur suicide ! En effet, celui-ci est prévu
dans le programme génétique des cellules et peut être déclenché en cas de “désordre”
cellulaire. Souvent, les cellules tumorales résistent à l’apoptose.
*l’angiogénèse, c’est la stimulation de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins. En effet,
les cellules tumorales sont avides de nutriments ; “elles ont faim”. Il faut que ces nutriments
arrivent et pour cela les tumeurs favorisent la formation de nouveaux vaisseaux ; ce qui
favorise la dissémination des cellules tumorales et l’apparition de métastases.
*L’immunostimulation, c’est la stimulation des défenses immunitaires, contre les cellules
tumorale ou les virus (pour ce qui concerne le VAF).
Les lectines ont une action cytotoxique importante alors que les viscotoxines ont une action
immunomodulatrice.
Rapide historique de l’utilisation du VAF en médecine vétérinaire
Depuis 1945, en Allemagne ou en Suisse, quelques rares vétérinaires utilisaient le VAF en
cancérologie. Pour ma part dès 1990, j’ai commencé à le tester dans les tumeurs “solides” de
la chienne et de la chatte, notamment les tumeurs mammaires. Dès le début, j’ai copié les
protocoles classiquement proposés chez l’Homme, notamment dans le choix de la variété du
viscum ( pini, quecus ou mali ) ainsi que dans le dosage.
Nous avons eu alors beaucoup de chance, car je pensais que le VAF avait une activité proche
de celle d’un médicament homéopathique, avec un effet dose minimal (les doses humaines
pourraient être administrées sans problème à un chat ou un chien). Il s’agissait d’une erreur :
le VAF est un médicament phytothérapique! Mais les résultats ont été rapidement
intéressants et le VAF a toujours été très bien toléré par nos animaux malgré les doses
humaines prescrites ; alors que chez l’homme des réactions locales et générales limitent les
doses administrées.
Afin de vérifier scientifiquement nos impressions cliniques très favorables, nous avons (en
2000) participé à la formation d’un groupe international de recherche clinique vétérinaire sur
le VAF, sous l’égide des Laboratoires Weleda. Ce groupe actif, qui comprend à ce jour des
vétérinaires suisses et allemands, a permis l’élaboration d’études cliniques dont nous allons
présenter les résultats et projets actuels.
Etudes cliniques vétérinaires actuelles
-VAF et fibrosarcomes du chat
Le fibrosarcome (FSC) est une tumeur maligne agressive du chat présentant des risques
importants de récidive après exérèse .Alors que chez le chat la pathologie tumorale est plutôt
rare le développement de plus en plus fréquent de cette tumeur sur le lieu d’injection
vaccinale ( notamment en interscapulaire ) a fait associer dès les années 1980 , l’apparition du
FSC à la consultation vaccinale; ainsi les anglos-saxons dénomment facilement le FSC :
«Feline injection site-associated sarcoma» ou «vaccination-associated sarcoma» et une
«Vaccine-Associated Task Force» a même été créée.
A ce jour, l’étiologie de ces FSC est encore peu claire et les vétérinaires comme les
propriétaires de chat cherchent à prévenir comme à guérir ces FSC.
Différents facteurs ont été mis en causes : la présence d’adjuvant telle l’alumine, le type
même du vaccin, le traumatisme provoqué par l’injection en région interscapulaire,
l’apparition d’une inflammation chronique après une injection de produits irritants.... Ces
études ont abouti à des modifications des contenus vaccinaux ainsi qu’à des recommandations
strictes concernant les lieux d’injection. Malgré celles-ci, dans nos clientèles nous continuons
à voir des FSC chez des chats vaccinés ou non, ayant eu des injections ou non, parfois
apparaissant même après des griffures. Il est à noter qu’au Brésil, la prévalence de ces FSC
semble peu importante ; est-ce lié à la faible vaccination des chats dans ce pays ou à d’autres
facteurs ?
Une réponse inflammatoire exagérée de type granulomateuse semble être un facteur
prédisposant à l’apparition d’un FSC liée à des facteurs génétiques, iatrogènes et locaux.
La thérapeutique conventionnelle est essentiellement chirurgicale associée à une
radiothérapie puis éventuellement à une chimiothérapie. La qualité de la chirurgie, la
possibilité d’effectuer une exérèse complète de la tumeur avec une incision à au moins 3 cm
du tissu tumoral est un facteur pronostic primordial . Ainsi Hershey et col. ont montré que la
prévalence des récidives peut varier de 8 à 80 % en fonction de l’acte chirurgical .
L’intérêt des radiothérapies (en pré ou post opératoire ) semble moins controversé que celui
des chimiothérapies; des traitements à l’interféron sont aussi essayés . Mais face à un FSC, il
reste aujourd’hui difficile de pouvoir présenter un pronostic avec certitude, malgré les
traitements invasifs, astreignants et souvent onéreux. A ce jour, d’un point de vue
thérapeutique, il y a la place pour un traitement alternatif, non-conventionnel, soit palliatif soit
accompagnant les traitements classiques. D’où l’intérêt dans ce cadre thérapeutique de tester
le gui fermenté.
Depuis 1992, nous utilisons le VAF dans les fibrosarcomes du chat, sous forme orale ; la
nature même de la tumeur et les étiologies possibles et discutées, nous faisant rejeter la forme
injectable . Le protocole est simple : une semaine après l’exérèse chirurgicale, VAF quercus
St3 (1 mg) , 0,5 ml matin et soir tous les jours.
Ce protocole a été appliqué dans 2 études cliniques : une étude allemande avec suivi de 60
chats pendant 2 ans et une étude française avec suivi de 20 chats pendant 5 ans.
Les résultats confirment les nombreuses études cliniques en soulignant l’importance de la
qualité de la chirurgie quant au pronostic, mais en comparaison avec ceux-ci, ils renforcent
notre impression clinque en montrant un allongement de la durée de vie statistiquement
significatif.
Ainsi, pour l’étude française, le temps de survie est de 3,6 ans (figures1 à 4) ; les études
comparables de référence comme celle de Hershey indiquent 2,2 ans.
Nous avons publié ces résultats ont été publiés dans la revue Phytothérapie en 2008 .
Une étude allemande portant sur ‘étude de 90 chats suivis pendant 2 ans confirment ces
résultats.
-VAF et tumeurs mammaires chez la chienne
Sur le même modèle que celui du fibrosarcome, une étude allemande va débuter. Chez la
chienne, le VAF pini est administré par voie SC, par série de 12 injections en dose croissante
(4 de 0,1 mg, 4 de 1 mg, 4 de 10 mg) , 1 injection tous les 2 jours.
La difficulté de cette étude tient principalement en la diversité actuelle des critères
histologiques de classification . Nous attendons de cette étude une confirmation de nos
impressions cliniques sur la durée de vie et la qualité de vie.
-VAF et sarcoïdes du cheval
Une consoeur suisse, Ophélie Clottu, vient de terminer comme travail de thèse, une étude
clinique ( verum/placebo ) sur l’intérêt du VAF pini , par voie injectable, chez des chevaux
présentant plusieurs sarcoïdes. Les résultats, statistiquement significatifs, sont
“impressionnants” . Chez la plupart des chevaux, les sarcoïdes régressent ou disparaissent
pendant le traitement ou après. Le traitement au VAF semble une bonne alternative aux
traitements classiques (souvent décevants) ou complémentaire à l’exérèse chirurgicale. Le
VAF est étudié dans des universités suisses et allemandes dans cette indication.
Discussion
Dans notre pratique quotidienne, le VAF présente un intérêt considérable en cancérologie,
confirmé par les premières études statistiques.
L’utilisation du VAF et la connaissance de son action en médecine vétérinaire n’en sont
probablement qu’au début et de nombreuses questions restent posées.
Ainsi, à ce jour, nous sommes peu performants dans les tumeurs touchant directement l’os ou
les lignées sanguines, alors que nous avons des résultats cliniquement intéressants dans de
nombreuses pathologies tumorales comme les fibrosarcomes, les tumeurs mammaires de la
chienne et de la chatte,les mélanomes buccaux, les carcinomes de l’estomac… Ces résultats
vétérinaires semblent confirmer ceux obtenus en médecine humaine.
Il est à noter que chez l’animal de compagnie, les doses administrées sont beaucoup plus
importantes que celles prescrites chez l’homme. Est-ce dû à la structure différente du tissu
sous-cutané ? A t’on alors une efficacité supérieure ?
Quelle variété de viscum utiliser, à quelle dosage, par quelle voie ? Les essais cliniques, en
s’appuyant sur la recherche fondamentale, nous permettrons de progresser et d’être encore
plus performants.
C’est en travaillant en collaboration avec la recherche fondamentale et tout particulièrement
avec Srini Kaveri, que nous avons pu progresser et notamment intéresser au VAF, les
confrères du Centre de cancérologie vétérinaire d’Alfort.
A ce jour, nous travaillons donc de plus en plus en collaboration avec eux, essayant d’associer
par exemple chimiothérapie et VAF, afin de limiter les effets secondaires et d’améliorer
l’efficacité des traitements.
Conclusion
Le VAF est un remède phytothérapique hautement dynamisé, dont les composants actifs, en
particuliers les lectines et les viscotoxines, commencent à être bien étudiés.
Le VAF n’est certainement pas “ le remède miracle qui guérit tous les cancers”. Mais dans de
nombreuses pathologies tumorales, nous retrouvons chez l’animal – comme déjà prouvé chez
l’homme- un allongement de la durée de vie ainsi que, dans bien des cas, une amélioration de
la qualité de vie constatée par les propriétaires. C’est, de plus, un traitement peu onéreux et
facile à mettre en œuvre.
Nous avons encore beaucoup à apprendre du VAF dans l’intérêt de nos animaux, et nous
espérons beaucoup de notre collaboration avec la recherche fondamentale et nos confrères
cliniciens classiques.