L`étranger de Georg Simmel(1)
Transcription
L`étranger de Georg Simmel(1)
OTTHEIN RAMMSTEDT L'étranger de Georg Simmel L'étranger aussi a un nom. Il peut s'appeler Paul Merkel ou Monsieur Meursault. Mais qui peut bien connaître un étranger du nom de Merkel ou Meursault. Ces noms nous sont inconnus bien que des inconnus portant ce nom aient pu nous être familiers. Car Paul Merkel est le nom du protagoniste du roman de Pené Schickele "L'étranger"® et Meursault, c'est "l'Étranger" de Camus. M ais peut-être ces noms ne sont-ils peu d'importance. Les noms - nous le savons plus présents à notre mémoire au moins depuis Kafka si on ne se rappelle parce que les noms des prota- plus la «Genèse» - laissent d'abord venir les gonistes dans les romans de Schickele et de choses à soi; ce sont d'abord les noms qui Camus n'apparaissent presque jamais, ils ont donnent aux personnages leur individualité : Huile de Michel Rovelas. Photos Alain Ameslon, 1988 (3) Otthein (1) Rammstedt Université de Bielefeld Faculté de sociologie Texte traduit par K. Chaland, P. Watier Laboratoire de Sociologie de la culture européenne, Université de Strasbourg & H. Bopst, (Fachbereich Angewandte Sprach- und Kulturwissenschaft, Gemersheim). Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 146 Don Quichotte, Werther, Tristram Shandy, étranger en sous-main. La distinction entre Afin de faire naître le doute, rappelons- Oblomow, Swann - un nom pour un destin. Moi et Toi, ego et alter, semble pourtant nous les destins d'émigrants. Après la 2 Mais depuis qu'au XIX , l'individualité s'est fondamentale; elle est l'assise de notre guerre mondiale, un émigrant célèbre avait réduite en un «vouloir être autrement» connaissance et de notre interprétation du dit, avec une certaine revendication à la (Anders-sein-Wollen) ou «devoir être monde. Et l'étranger c'est pourtant bien généralisation : «Le pays étranger n'est pas autrement »(Anders-sein-Mùssen)' , l'inverse l'autre. Et si l'étranger n'est plus l'autre per devenu notre patrie, mais notre patrie est est également vrai: le destin individuel, se, qu'est-il donc?' e 4) 71 e 121 devenue un pays étranger»' . Ceci renvoie l'individualité évoquent le nom, ils le mettent Mais l'étranger que nous dépeignent aux limites de toute définition dans la mesu- en avant; jadis déjà, Érostrate voulait par une Schickele et Camus est-il vraiment l'étran- re où l'émigrant ne peut plus s'établir sans action - dut-il commettre un délit - im- ger? Le doute nous saisit. Nous pensons tout être considéré par les autres comme étran- mortaliser son nom. Aujourd'hui c'est plutôt de même savoir ce que signifie être étranger; ger; le lieu qui lui était (est) familier et la souffrance qui supplante de plus en plus nous avons appris, en tant que voyageur, ce duquel il émigra n'existe plus. Ce lieu n'est l'action par laquelle se définit l'indi- que signifie être étranger. Comme socio- plus circonscrit spatialement mais unique- vidualité^ , c'est en attirant l'attention sur une logue nous avons su en tirer profit, que ce soit ment temporellement. telle souffrance que certains se font un nom en s'accordant, comme étranger, la possibi- - phénomène dont témoignent les nombreu- lité de l'objectivité' , ou bien en parvenant ses, sans doute trop nombreuses, auto- soi-même, par adaptation, à réduire la dis- 1 61 biographies depuis Rousseau' . 81 tance sociale et culturelle dans le pays étran- La notion d'étranger chez Simmel Paul Merkel fait figure chez René ger de sorte que le rôle de l'étranger se Schickele, comme Meursault chez Camus, perde' . Ce qui paraît ici si clair, si confor- nant au mot la définition qui lui est attri- d'individu fictif. Merkel et Meursault ne se me à la compréhension ordinaire de l'étran- buée; il suffit en effet d'examiner ses ré- caractérisent pas par leur individualité mais ger, se complique dès qu'on le verbalise: flexions sur l'étranger pour constater assez par leur destin d'étranger. D'après Schickele comment définir l'étranger? rapidement qu'elles vont à l'encontre de On ne rend pas justice à Simmel en pre- 91 et Camus, ce destin, n'est ni unique, ni origi- L'étranger c'est tout d'abord l'éloigné, nal ni même individuel - c'est la raison pour c'est celui qui vit à l'étranger, c 'est celui qui ladite définition. Pour Simmel, l'étranger est une «forme sociologique», caractérisée laquelle qu'ils les font agir quasi anonyme- vient de l'étranger. Cela nous est donné par par le fait d'être à la fois fixé en un point de ment. Le destin d'étranger, pour Merkel la langue, sur laquelle repose les définitions l'espace et détaché de ce même point. Il en comme pour Meursaut, n'est pas fortuit, il ne juridiques et politiques de l'étranger. Si découle pour cette forme sociologique que vient pas seulement de l'extérieur; ce destin pour le XX siècle l'étranger est par exem- la relation à l'espace d'une part la condition, n'est pas un fatum qui leur serait imposé. ple, l'expulsé, le réfugié, l'exilé, la «displa- mais d'autre part le «symbole des relations Tous les deux ne subissent pas le rôle de ced person»' , c'est-à-dire une personne l'étranger, mais ils sont activement empêtrés qui doit quitter son pays malgré elle; alors comme une «forme sociologique», Simmel dans ce destin. l'étranger est celui qui voyage contre son entend une forme cristallisée de l'action e 101 031 entre h o m m e s » . En évoquant l'étranger Aucune définition de l'étranger n'est gré. Ceci renvoie le sociologue dont l'objet réciproque qui est socialement donnée donnée au lecteur. Schickele et Camus s'en est l'étranger à Georg Simmel, et l'entraîne d'avance à chacun et qui peut être utilisée remettent à ses hypothèses. Tandis qu'au à faire usage de la formulation de Simmel, pour la réalisation de différents contenus . 041 début des romans, Merkel et Meursault sont c'est-à-dire à désigner l'étranger comme un Saisir l'étranger comme une forme des éléments interchangeables et sans con- être mobile (Wanderer), «qui vient au- sociologique renvoie à la spécificité de tours de leurs cercles sociaux respectifs, et jourd'hui et qui reste demain » . Cette for- l'analyse simmélienne car Simmel détache à la fin des romans le lecteur doit partir du mulation est considérée comme la défini- non seulement l'étranger de la condition fait qu'ils sont des étrangers. Cette mutation tion de l'étranger par Simmel. Ceci incite à spatiale existante en prenant les distances s'est effectuée au cours de l'action. Ceci est penser que la dimension spatiale est la sociales qui s'accroissent rapidement dans déroutant car le lecteur essaie alors en vain condition de l'étranger. Mais en est-il vrai- les sociétés modernes comme des sublima- de se remémorer les passages significatifs ment ainsi? Suffit-il pour définir l'étranger tions (Überhöhungen) symboliques mais il de ce revirement. On est d'autant plus de manière suffisamment précise d'évoquer rend aussi l'étranger - comme forme ou dérouté, qu'il nous apparaît inacceptable le rapport à l'espace associé à un minimum encore comme type - dépendant de l'action qu'il puisse être possible de devenir un d'attachement local ? réciproque sociale c'est-à-dire que le grou- Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 147 (11) pe et l'autre déterminent par l'interaction, fixé? et «quelles formes se constituent pour tous disposent de forces qui ne procèdent ni la forme selon laquelle l'autre peut devenir le groupe mais également pour les personnes ne sont alimentées par le groupe mais dont un interactant pour les membres du groupe mobiles lorsque seulement certains éléments celui-ci est demandeur. Pour le prêtre, le et de quelle manière le type social « étran- du groupe et non le groupe en son entier sont 15 ger» se manifeste' '. 19 mobiles?' 'La seconde question se subdivi- guérisseur et le sage, il est décisif pour leur position que quelque chose qui pour les L'étranger de Simmel est, en tant que se à son tour car d'après Simmel la mobilité autres membres du groupe est loin, soit pour forme, analytiquement séparé des contenus peut à la fois contribuer à l'uniformisation du eux proche. En référence aux rapport aux possibles qui peuvent lui être attribués. La groupe comme à son dualisme' '. Comme autres, on peut retenir, dans un sens figuré, forme «étranger» n'est donc pas une dispo- exemples de ce dernier aspect, il cite comme que «la distance à l'intérieur de la relation 20 sition psychique mais au contraire exclusi- éléments singuliers, le vagabond et l'aventu- vement une forme sociale - c'est pourquoi rier' ' puis - à l'opposé des nomades comme fait même de l'alterità signifie que le loin- Simmel décrit également l'étranger comme communauté mobile - les communautés de tain est proche »' . « un type social » - se constituant sur la base voyageurs, par exemple autrefois les asso- Pour Simmel, être étranger dans une de la spatialité de toute interaction sociale ciations significatives de compagnons. Pour telle constellation est «une relation tout à et qui par là présentent des traits qui se ren- finir, il constate que «la position du séden- fait positive»' '. L'étranger occupe ainsi contrent partout à la fois. taire à l'opposé de son adversaire, dépendant une position tout à fait particulière dans le de la mobilité» devient au cours du temps groupe, dans la société, qui se traduit par toujours plus favorable; ceci peut se com- des conditions privilégiées pour lui. Ainsi, prendre « par les facilités à changer de lieux » Simmel désigne par «l'attitude de l'objec- La «Digression sur l'étranger» de Simmel La célèbre digression sur l'étranger de 21 signifie que le proche est lointain, mais le 24> 25 lesquelles permettraient au sédentaire de tivité» (Attitude des Objektiven), la mobi- jouir en même temps des avantages de la lité de l'étranger, lequel «entre occasion- 22 Simmel, qui compte à peine sept pages, est placée dans le chapitre IX de sa grande «Soziologie» de 1908, lequel s'intitule: «L'espace et l'ordre spatial de la société». mobilité' '. C'est à cet endroit que débute nellement en relation avec chaque élément «la digression sur l'étranger» - pour ainsi particulier [du groupe; O. R] » dire une considération ajoutée à la première avec aucun d'eux de liaison organique, que partie. la modalité de cette liaison soit parentale, <26) , mais «n'a 27 Nous soulignons cela dans la mesure où la La forme sociologique de l'étranger locale, professionnelle»' '. Cette attitude réception de la sociologie de Simmel est pose l'unité entre le détachement d'un point est propre à l'étranger qui «n'est retenu par presque toujours réalisée en pointillé (la spatial et la fixation à ce même point; la dis- aucune espèce d'engagement» de sorte que réception de «Soziologie» est presque tou- jonction de ce qui ici constitue une unité l'on peut «tout aussi bien définir l'objecti- jours ponctuelle) et parce qu'il semble était le fondement des réflexions précé- vité comme liberté»' '. A côté des valeurs 28 dentes de Simmel. Et en outre, la notion positives, mobilité, objectivité, liberté, digressions comme des parties isolées' '. d'espace est ici le symbole des rapports aux Simmel ne méconnaît pas les difficultés Mais dans le cas précis de la digression sur autres. C'est seulement ainsi, que la formu- sociales de l'étranger car chaque relation l'étranger, ne pas tenir compte de son lation prend son sens, à savoir que l'étran- avec un étranger reste abstraite puisque contexte conduit à des erreurs d'interpréta- ger n'est pas, comme généralement admis, «l'on a que certaines caractéristiques géné- tions. le voyageur qui vient aujourd'hui et qui part rales en commun avec l'étranger»' '. Cela Nous nous souvenons que le chapitre demain mais contrairement à lui, il est celui se manifeste dans la proximité avec l'étran- «L'espace et l'ordre spatial de la société» se qui «vient aujourd'hui et qui reste demain». ger «pour autant que nous sommes sem- compose de deux parties : «La sociologie de Car l'étranger «est fixé à un cercle spatia- blables, nous et lui : par la nationalité, le sta- l'espace» et «Sur les projections spatiales lement déterminé ou à un cercle dont les tut, la profession ou par l'appartenance à la . La première partie limites sont analogues aux limites spatiales, nature humaine en général» et en même se compose de cinq paragraphes, dont le der- mais sa position dans le cercle est essentiel- temps cela se manifeste dans la distance qui nier problématise, le changement de lieu, le lement déterminée par le fait qu'il ne fait nous sépare de l'étranger «pour autant que déplacement' '. Simmel part de deux inter- pas d'emblée partie de ce cercle, qu'il intro- ces similitudes nous dépassent, lui et nous, rogations : « Quelles sont les formes de socia- duit des caractéristiques qui ne sont pas et ne nous rapprochent que parce qu'elles lisation d'un groupe de personnes mobiles en propres à ce cercle et qui ne peuvent pas rapprochent un grand nombre»' '. Simmel regard de celles d'un groupe spatialement l'être»' '. Le prêtre, le guérisseur, le sage - désormais aller de soi de considérer ces 16 29 des formes sociales» (17) 18 30 Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 23 148 souligne finalement le fait que les étrangers « sont appréhendés non pas comme des indi- désigant le sujet la forme interactionnelle il vidus mais surtout comme des étrangers le nomme groupe, cercle ou encore société sorte qu'il peut se comporter de manière car en ce qui les et en lui il n'y a p a s , d'abord, d'étranger. d'autant plus conforme au sein du groupe, concerne le moment de la distance n'est pas Un tel aspect résulte de l'interaction avec un sans pour autant perdre son individualité. A moins général que celui de la proximité. élément extérieur, soit que des interactions cet endroit, Simmel indique également avec un autre situé spatialement en dehors d'autres types en dehors de l'étranger, à de la propre structure interactionnelle se savoir l'ennemi, le criminel, le pauvre. d'un type particulier» <31) L'étranger comme type social Les réflexions de Simmel sur l'étranger ne sont pas disposées au hasard. L'espace socialisé c'est l'étranger qui l'apporte, de poursuivent durablement, soit que l'autre Selon lui, tous ces types se caractérisent par vienne d'autres strates à l'intérieur d'une le fait qu'il sont d'une manière ou d'une société hiérarchique ou fonctionnellement autre exclus de la société cependant que leur existence est néanmoins significative pour différenciée. symbolique entre les hommes, que nous La notion de type social chez Simmel la société. Mais cet «En-dehors est - pour le désignons par la formule distance et proxi- renvoie à trois aspects distincts et centraux dire brièvement- seulement une forme spé- mité, lui importe. Et le fait que Simmel en de sa théorie sociologique. Le premier tient ciale de l'En-dedans»' . Simmel a illustré cette catégorie de types dans le chapitre VII 44) soit venu à étudier l'étranger et non pas, par à ses réflexions épistémologiques sur la dis- exemple, l'invité ou encore le voyageur, tance^ ', lesquelles reposent sur les argu- de «Soziologie» avec ses réflexions bien vient de ce qu'il considère l'étranger ments méthodologiques de la psychologie connues sur le pauvre' ' et sur la similitude comme un type social vraiment particulier. des peuples à propos de l'établissement des entre le type du pauvre et celui de l'étran- Pour lui, l'étranger a un caractère général, données' , dépend de ses théories esthé- 6 45 371 ger; à présent, on comprend mieux pour- . Si Simmel tiques sur le Voir (zum Sehen)' ' et de ses quoi ses réflexions n'apparaissent pas dans avait dans ses travaux sociologiques anté- réflexions critiques sur la culture inspirées la digression sur l'étranger.' '- rieurs mis particulièrement l'accent sur les de Nietzsche' '- Ces réflexions furent im- formes de l'action réciproque, par exemple, portantes pour son approche relativiste. Car ses célèbres réflexions sur la cupidité, l'ava- «l'objectivité» une individualité collective 1321 38 46 39 est pour Simmel une rice, le gaspillage, la pauvreté, le cynisme « forme particulière de la proximité et de la et sur l'esprit blasé dans la «Philosophie de distance»' ' qui acquiert sa garantie et sa l'Argent» (33) , par contre dans son ouvrage Contexte biographique Simmel avait déjà abordé, dans un passa- 40 ge assez long de la « Philosophie de 1 ' argent » stabilité sociale de par 1' « efficace récipro- de 1900, le rôle des juifs dans leur relation à « Soziologie » de 1908 il souligne le rôle des cité Wechselwirsam- l'argent' '. Et il concluait finalement que sa acteurs dans de telles actions réciproques. keit) . Le second s'appuie sur la différen- définition du juif comme étranger était à pré- Celles-ci sont quant au contenu dépen- ciation analytique entre forme et contenu ; sent anachronique puisque que dans le dantes de l'évolution sociale ainsi que des les formes des interactions induisent des monde moderne - «un organisme s'unifor- «conditions (lebendige 47 M) correspon- rôles sociaux pour l'interactant, et ils misant toujours davantage» - l'étranger , et sociologi quement les types constituent à leur tour comme Ensemble - n'était plus le «tout à fait différent». sociaux se laissent quant à eux circonscrire nous dirions aujourd'hui role-set - le type suivant le niveau de développement de la social. La notion de type chez Simmel est dantes » (34) économiques vitale» 35 société' '. L'étranger troisièmement en étroite relation avec ses n'est pas pour Simmel l'Autre généralisé, mais simplement l'Autre, avec lequel nous sommes en action réciproque, qui par cette action réciproque endosse un rôle spécifique, à savoir celui de l'étranger. Si l'on argumente ainsi, l'Autre n'est pas seulement celui, qui vit ou qui vient de l'étranger, mais virtuellement tout autre, c'est-à-dire tous les autres en dehors de moi. Par la suite, Simmel délimite sociologiquement cet aspect épistémologique en réflexions sur les a priori sociaux. Tout élément d'un groupe social «n'est pas seulement un élément de la société mais est en 42 plus quelque chose d'autre»' '. Cette partition constitue l'individualité. Lorsqu'à ce propos Simmel dit que «le fait que l'individu ne soit pas par certains côtés un élément de la société, fonde la condition positive pour qu'il le soit par d'autres côtés de son 43) être (...)»' . La référence à l'étranger s'impose presque ici car cet élément non Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 149 Ce sont justement ces références au rôle du juif, qui apparaîtront plutôt comme secondaires dans la grande «Soziologie», qui ont conduit de nombreux exégètes de Simmel à interpréter la digression sur l'étranger comme une analyse biographique sur la judaïcité. On peut ici nommer Margaret Sussman, Werner Sombart, René König, Hans Liebesschütz et tout récem48 ment Almut Loycke' '. Le texte ne permet pas une telle interprétation et la vie de Simmel ne donne pas matière à un tel texte. Il semble très important de distinguer deux choses, à savoir l'actualité du thème de l'étranger dans la discussion antisémite de e la fin du XIX , et le «devenir étranger» (Zum-Juden-Werderi) de Georg Simmel <49) , un processus qui coïncide largement avec le sentiments de haine développés à l'égard de ces derniers les touchaient également. Georg Simmel dont les parents s'étaient probablement fait baptiser à Paris, grandit dans un ménage protestant (50) devenir juif de Georg Simmel . assimilé. C'est seulement après ses études, entre autres, auprès de Moritz Lazarus et La querelle antisémite et le thème de l'étranger de Heymann Steinthal qui enseignaient à Berlin la psychologie des peuples ( Völker- Depuis la fin des années 70 du XIX siè- psychologie), une forme de sociologie, que cle, l'hostilité latente envers les juifs se Simmel fut confronté à son «être juif». transforma en un antisémitisme idéolo- Cela le perturba et le rendit très sensible e gique, organisé en mouvements. L'antisé- aux arguments de Lazarus dans la querel- mitisme était alimenté d'un côté par une le sur l'antisémitisme <54> . opposition contre le centralisme politico- Dès 1884, la conférence des rabbins administratif, contre le déploiement rapide réunie à Berlin publia une déclaration du capitalisme moderne, de l'économie de contre les pamphlets antisémites, lesquels marché, et contre l'extrême modernisation mettaient en doute les traditions juives. Or, (51) ; d'autre part depuis le début des années cette déclaration insistait explicitement sur 80, surtout dans l'allemagne impériale et les commandements concernant l'amour du dans l'empire austro-hongrois, l'antisémi- prochain, l'amour de l'étranger ainsi que de tisme s'accentua avec l'afflux des réfugiés celui appartenant à une autre religion' '. juifs afflux déclenché par les nombreux Dans son ouvrage «Ethik des Judenthums» 55 progroms du sud de la Russie(1881), de (Ethique du Judaïsme) paru en 1898 sur Varsovie (1881/82) et des Pays Baltes l'initiative de l'union communale germano- (1882). Ils atteignirent leur point culminant israélienne , Moritz Lazarus reprit cet entre 1891 et 1894 lorsque les juifs furent argument en le développant davantage; (56) expulsés de Moscou et que le gouvernement d'après son interprétation, l'étranger a tou- tsariste encouragea par circulaire adminis- jours eu une place «au centre d'Israël» trative l'émigration des juifs <52) . Alors que (57) , c'est-à-dire que l'étranger est éthiquement l'hostilité classique envers les juifs se justi- - et par là socialement - un élément du grou- fiait par le critère religieux, l'antisémitis- pe social interne (soziale Innengruppe). Cet me (53) était dominé par les préjugés eth- étranger, intégré au groupe social interne, niques et racistes. L'assimilation sociale, Lazarus le dissocie de l'entièrement étran- surtout favorisée comme facteur d'intégra- ger (Wildfremd) que l'éthique juive recom- tion par les milieux instruits de la bourgeoi- mande néanmoins de traiter «de manière sie juive, n'était plus prise en considération juste et amicale». L'entièrement étranger par les groupements antisémites. L'antisé- est défini par l'expression «l'étranger du mitisme ne plaçait en effet les distinctions marché» religieuses, politiques, nationales et so- autre» mais seulement celui avec lequel on ciales qu'après le critère ethnique. Les ne peut avoir que des interactions limitées. (58) . Il n'est donc pas le «tout familles juives établies et apparemment Car l'entièrement étranger en tant qu'étran- bien intégrées dans les grandes villes ger du marché doit au moins être appréhen- comme Francfort-sur-le-Main, Hambourg, dé comme un partenaire d'interactions Berlin ou Vienne furent donc, selon ce prin- potentielles. cipe considérées de la même manière que l'étranger, Lazarus s'inspire directement de les réfugiés juifs de l'Europe de l'Est, les la sociologie (Lazarus aurait dit la psycho- Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 150 Dans cette périphrase de logie des peuples). Peu nombreux sont les phiques» écrit-il «concernent justement le chaire passages qui, comme cette interprétation de côté impersonnel des philosophes. Que brisa' '. Cet échec était probablement dû à l'étranger, l'appréciation antisémite que porta Schâfer montrent l'université d'Heidelberg se Simmel quelqu'un ait été pauvre ou riche, beau ou voyait en Lazarus son maître en sociologie. laid, anglais ou allemand, marié ou céliba- sur Simmel, et dont ce dernier n'eut con- Les affinités entre Lazarus et Simmel taire, c'est quelque chose de relativement naissance que beaucoup plus tard, proba- deviennent encore plus évidentes si, par commun qu'il partage avec d'innombrables blement par l'intermédiaire de G. Jellinek. contraste, on lit les argumentations de T. personnes»' '. A l'inverse, Simmel est Cela, et seulement cela, lui permit de mettre Herzl qui, eu égard à l'antisémitisme qui se d'avis que la pensée scientifique reflète jus- un nom sur les personnes du milieu univer- développait aussi rapidement qu'une épidé- tement le côté personnel et singulier. sitaire qui avaient constamment agi contre mie, juif» Cependant on se permettra, et pas unique- lui. «L'antisémitisme, le mauvais traite- définit dans pourquoi à 66 son «Etat 63 (Judenstaat) la nation comme «un groupe ment parce que Simmel lui-même ne s'y ment à l'égard des personnalités indépen- historique de gens qui sont unis de manière tenait pas strictement, d'attirer l'attention dantes, le traitement de défaveur réservé reconnaissable et qui ont un ennemi com- sur deux épisodes susceptibles d'éclairer la aux sciences humaines par rapport aux . Conformément à cette définition théorie de l'étranger de Simmel; (1) on doit sciences naturelles», voilà ce qui est selon de l'ennemi, il écrit au sujet de l'étranger: partir du fait que Simmel a écrit sa «digres- Simmel à l'origine de ses difficultés dans la «Qui est (l')étranger dans un pays, c'est la sion sur l'étranger» après «Sociologie de la vie universitaire. La voie parlementaire se majorité qui peut le décider; c'est une ques- pauvreté», donc probablement fin 1906 ou devait de remédier à ces pratiques bien tion de pouvoir, comme tout ce qui concer- début 1907' . Or, l'année 1907 fut drama- connues des universitaires mais désavouées tique pour Simmel. Dans une lettre adres- par le gouvernement,ainsi que Simmel sée à G. Jellinek, Simmel se déclare prêt à l'écrivait accepter une chaire de professeur extraordi- peu après avoir accepté une chaire à naire, équivalente à celle qu'il occupait Strasbourg' '. mun » (59) 60 ne le déplacement des peuples»' '. Que Simmel ait suivi avec intérêt le sionisme de Herzl tout en restant critique à son égard, apparaît dans les lettres de Simmel datant de 1897' 61) ainsi que dans une obser- vation dans laquelle il fait remarquer qu'en fin de compte le sionisme est anachro62 nique' ', car une exclusion sociale est selon lui en contradiction avec toute différencia- 641 alors à Berlin, à Heidelberg - pourvu qu'il puisse avoir l'opportunité de quitter Berlin. Simmel écrit, également en 1907, à E. Husserl : «Florence est mon pays, la patrie de mon âme, pour autant que les gens tels 65 tion fonctionnelle. On peut rappeler ici la constation de Simmel, tirée de «Philosophie de l'argent» selon laquelle la conception du juif en tant qu'étranger serait historiquement dépassée. Ainsi, ce ne serait pas l'exclusion du juif en tant qu'étranger qui constitue la modernité. L'étranger, même dans le cas où le juif est considéré comme étranger, devrait toujours être compris comme le produit d'une forme d'interaction. Selon Simmel, l'étranger ne peut pas être défini de manière unilatérale mais doit être déterminé socialement de façon réci- nous en aient une»' '. Simmel semble alors se détacher de Berlin. Il veut partir de cette ville où il est né, où il a toujours vécu et, comme il le sait lui-même dont il a été imprégné. En 1907, une grande partie de ses relations sociales s'étaient défaites, les amitiés de longue date étaient rompues, les cercles culturels étaient devenus insignifiants, quant aux nouveaux contacts avec le milieu culturel et universitaire, ils échouèrent. Depuis des années sa carrière universitaire stagnait et il était de plus en plus isolé. A cette époque, les relations avec sa famille paraissaient elles aussi incertaines. proque. On peut supposer que Simmel cherchait à prendre, ailleurs, un nouveau départ, qu'il Georg Simmel, l'étranger. voulait ailleurs et en tant qu'étranger faire de nouveau ses preuves. Tout au long de sa vie, Simmel a refusé l'explication des théories par le recours à la biographie «car les anecdotes biogra- Comme nous le savons, en 1908, l'espoir qu'avait Simmel d'obtenir une Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 151 au début de l'année 1914, 67 Que Simmel ait, au début de l'année 1914, désigné l'antisémitisme dans les universités comme un problème majeur, n'est pas étonnant; ce qui l'est beaucoup plus c'est qu'il ait dénoncé plus particulièrement la politique à laquelle il reprochait d'avoir introduit ce thème dans les universités. Le fait que sa nomination ait été l'objet d'un débat au parlement d'Alsace-Lorraine peut lui en avoir semblé la preuve. On y insinue en effet «que son enseignement négatif en matière de religion et de morale est bien connu» et «bien évidemment» on met en 68 avant sa judaïcité' '. Dans le Strasbourg des années 1913/14, ces difficultés allaient de pair avec la publication du décret selon lequel l'une des deux chaires de philosophie ne pouvait être attribuée qu'à un scienti69 fique catholique' '. Simmel pensait pouvoir échapper aux querelles qui s'en suivirent en ne maintenant des contacts qu'avec de vieilles connaissances comme le philosophe Otto Baensch, les spécialistes d'histoire de l'art Georg Dehio et Ernst Polaczek, le juriste Fritz van Calker, les politologues Georg Friedrich Knapp et Werner Wittich. Fulda. Si on localise l'étranger en effet dans Par contre, il garda ses distances vis-à-vis l'espace et non géographiquement, alors il de sa propre faculté. Et cette attitude aggra- en va de même pour la notion de patrie. va sa condition d'étranger qu'il avait subi Simmel l'a évoqué dans un aphorisme qui au début de son séjour à Strasbourg bien date de sa période strasbourgeoise : « Quel qu'en même temps il s'engageait - comme bonheur inexprimable d'être quelque part à il avait déjà prévu de le faire à Heidelberg - l'étranger chez soi, car ceci est une synthè- à assumer pleinement son rôle d'étranger. Il se de nos deux désirs majeurs : le désir de connaissait très bien Ernst Stadler et René voyager et celui d'avoir une patrie, une syn- Schickele. Il fut introduit par Pierre Bûcher thèse de Devenir et d'Etre»' '. 3. 4. 73 dans le cercle de ce dernier, fut reçu dans le Pour Merkel, le personnage de l'oeuvre (70) salon d'Eisa Koeberlé , et noua des liens 2. de René Schickele, la notion géographique 5. 71 avec les directeurs des archives' ', des mu- de «patrie» devient, au moment décisif, sées et théâtres et essaya de collaborer avec également la «légende de son â m e » ' ' e t 74 72 les journaux strasbourgeois' '. Tout ceci se sera remplacée, par son auteur, par une fit en dehors des obligations universitaires, notion sociologique, celle de proximité res- au cours des derniers mois de paix, c'est-à- sentie dans un contexte interactionnel dire entre avril et juillet 1914. durable. En est révélateur ce passage, dans Malgré ce programme chargé qu'il lequel il dit qu' »une âme habile peut trou- menait parallèlement à ses projets scienti- ver partout une patrie »' ' et qui évoque éga- fiques (coopération avec les universités de lement la partie nécessairement active de Fribourg et de Heidelberg en vue d'une for- Merkel. La description par René Schickele de ment et de consolidation de ses contacts Paul Merkel, personnage fictif né en 1871 à avec Paris), malgré tout ceci, il soulignait sa Saverne et devenant étranger dans l'Alsace condition d'étranger. En avril 1914, il écrit prussienne, repose sur une idée de l'étran- à Ludwig Fulda : «Recevez mes salutations ger qui se manifeste au moment où Merkel cordiales de notre nouvelle, je n'ose pas prend conscience de son rôle d'étranger. «Il dire, patrie. Nous sommes trop vieux pour savait» écrit Schickele, «qu'il avait échap- nous établir de nouveau (beheimaten) et pé à l'étable de la communauté (...) Au pour autant que j ' a i e une patrie - ce à quoi contact du monde extérieur il s'aperçut je ne voudrais pas prétendre avec certitude qu'il était un autre, un étranger mobile» - cette patrie se situera toujours à Berlin ou (76) . L'étranger et l'apatride, c'est ce qui res- 7. 8. 10. Cela nous rappelle quelque chose et à 11. de lui en 1907, à l'époque même où Simmel écrivait son «étranger» tandis que lui écrivait son roman. 12. 13. sort des propos de Simmel, sont étroitement liés. Cette relation semble rejoindre les Notes formes actuelles d'étrangers: le réfugié, l'émigré, l'exilé, tous ont en commun d'être 1. apatrides. Mais dans ces exemples, la notion d'espace n'est pas sociologique mais géographique. «Nous sommes trop vieux pour nous établir de nouveau (beheimaten) » avait écrit Simmel dans sa lettre à L. Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 Cet article est la traduction du texte retravaillé de la conférence tenue le 3 décembre 1993 dans le cadre du Laboratoire de Sociologie de la culture européenne. L'auteur tient particulièrement à remercier Patrick Watier, Freddy Raphaël pour son texte «L'étranger» (in G. Simmel, La sociologie et l'expérience du monde moderne, sous la direction de P. Watier, Paris, Méridiens 152 e e 9. juste titre. Car Schickele avait fait ses études auprès de Simmel et était très proche Conclusion 6. 75 mation commune; projet d'approfondisse- plus précisément à Westend». 5. Klincksieck, 1986, pp. 257-281) auquel il doit beaucoup, ainsi que le CNRS qui a rendu possible son séjour prolongé à Strasbourg afin qu'il puisse poursuivre sa recherche sur G. Simmel. René Schickele, Der Fremde, in Werke in drei Bänden. Bd. 1. Köln, Berlin, Kiepenheuer & Witsch, s.d., pp. 1013-1181. Albert Camus, L'Etranger, Paris, Gallimard, 1942. Voir aussi Adèle King, Albert Camus, «L'Etranger», the stranger or the outsider, London 1980. Cf. Georg Simmel, Die beiden Formen des Individualismus. Das freie Wort, Frankfurter Halbmonatsschrift für Fortschritt auf allen Gebieten des gesittigen Lebens 1 (1901/1902), pp. 397-403. Cf. Voir Georg Simmel, Zu einer Theorie des Pessimismus, in Georg Simmel Gesamtausgabe Bd.5, Aufsätze und Abhandlungen 1894-1900, Heinz-Jürgen Dahme et David P. Frisby, (éd.,), Frankfurt, Suhrkamp 1992, pp. 543-552. (cit. p. 550) Cf. Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions. (trad. all., Selbstbildnis, Zürich, Manesse, i960, p. 51 s.) Cf. Herfried Münckler, Schroff gezeichnet, schwarz gemalt und rasch verkauft: Das Feindbild, Frankfurter Allgemeine Magazin, Heft 685 vom 16. April 1993, pp. 20-30. Au milieu du XIX , Wilhelm Heinrich Riehl avait déjà attiré l'attention sur le problème méthodologique de l'observateur étranger. Cf. «Handwerksgeheimnisse des Volksstudiums» in W.H. Riehl, Die Naturgeschichte des Volkes als Grundlage einer deutschen Social-Politik, Bd. 4, Wanderbuch als zweiter Teil zu 'Land und Leute', Stuttgart, J.G. Cotta, 1869, pp. 1-34. La discussion méthodologique relative à l'observation participante ne s'est, sur ces points, pas modifiée au cours du XX siècle. Cf. Hannah Arendt, The Origins ofTotalitarism, 1951. (all, Elemente totaler Herrschaft, Frankfurt, Europäische Verlagsanstalt, 1958, p. 24 ss.) Georg Simmel, Soziologie. Untersuchungen über die Formen der Vergesellschaftung [pour la suite, SOZ], (1908), Gesamtausgabe, Bd. 11, Otthein Rammstedt, (éd.,), Frankfurt a. M., Suhrkamp, 1992, p. 764. Alfred Polgar, Der Emigrant und die Heimat, in Anderseits, Erzählungen und Erwägungen, Amsterdam, Querido, 1948. SOZ, p. 764. Pour la problématique forme/contenu voir Georg Simmel, Das Problem der Soziologie, in Georg Simmel Gesamtausgabe Bd. 5, op. cit., pp. 52-62, descript. p. 54 s. et SOZ, p. 17 ss. Le problème de la sociologie, in G. Simmel et les Sciences humaines, sous la direction d'O. Rammstedt et P. Watier, Paris, Méridiensklincksieck, 1992, p.30 et suivantes Nombre de commentaires sur l'étranger de Simmel ne prennent en compte qu'un de ces deux aspects; la reformulation «marginal man» pour l'étranger en est un exemple. Cf. Robert E. Park, Human migration and the marginal man, The American Journal of Sociology 33, 1928, 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. pp. 881-893. (descript. p. 888). Voir également Alfred Schutz, The Stranger, Collected Papers II, Studies in Social Theory.den Haag : Martinus Nijhoff 1964, pp. 91-105 et H. Arendt, The Jew as Pariah. Jewish Identity and Politics in the Modern Age, Ron H. Feldman (éd.,), New York, 1978. Se reporter également à Alois Hahn, Überlegungen zu einer Soziologie des Fremden, Simmel Newsletter 2, 1992, pp" 54-61, (60). Wolf Lepenies prétendait encore récemment que la «Soziologie» de Simmel n'était une «mosaïque d'essais» in Die drei Kulturen, Soziologie zwischen Literatur und Wissenschaft, Reinbek, Rohwohlt, 1988, p. 290. Ces deux parties furent pré-publiées en 1903; elles se trouvent à présent dans Georg SimmelGesamtausgabe, Bd. 7 (à paraître). Voir SOZ, pp. 748-764. Ibid. p. 748. Ibid. p. 755. Ibid. p. 760. lbid.p.764. SOZ,p.765. (ici la trad, s'est inspirée de celle Y. Grafmeyer et 1. Joseph sans la reprendre littéralement) G. Simmel, Digression sur l'étranger in L'école de Chicago, Y. Grafmeyer, I. Joseph, Aubier, Paris, 1984, p. 54. (SOZ, p. 765). Ibid. p. 765. Ibid. p. 766. Variante de G. Simmel, Digression sur l'étranger in L'école de Chicago, op. cit., p. 55. (SOZ. p. 766). G. Simmel, Digression sur l'étranger in L'école de Chicago, op. cit., p. 56. (SOZ, p. 767). Ibid. p. 768. G. Simmel, Digression sur l'étranger in L'école de Chicago, op. cit., p. 57. (SOZ, p. 769). Ibid. p. 770. La Bruyère désignait déjà dans «Les Caractères» (1688) des «types de tous le temps», «le parvenu, l'égoiste, le fat, le collectionneur». Simmel connaissait bien entendu la compréhension par type dans la littérature, un point de discussion central, à laquelle Simmel participa de manière engagée, dans le Naturalisme. Georg Simmel-Gesamtausgabe, Bd. 6, [pour la suite PHG] David P. Frisby, Klaus Chr. Köbnke (éd.,), Frankfurt, Suhrkamp, 1989, p. 308 ss. Georg Simmel, PHG, op. cit., p. 308. La dénomination, action réciproque, centrale pour la sociologie de Simmel, fut traduite par Albion W. Small, dans toutes les pré-publications de parties de «Soziologie» dans l'»American Journal of Sociology », par «interaction» - et ce terme fit ainsi carrière en sociologie. Cf. Georg Simmel, Philosophie des Geldes, p. 41 ss., p. 658, 666 s.; Die Probleme der Geschichtsphilosophie, Leipzig, Duncker & Humblot 2. Aufl 1905, p. 100 ss.; Hauptprobleme der Philosophie, Berlin und Leipzig 1910, 8 éd., 1964, p. 36 ss.; Grundfragen der Soziologie (Individuum und Gesellschaft), Berlin und Leipzig, Walter de Gruyter 1917, 4 éd., 1984, p. 10 ss. Pour une approche plus générale voir aussi, Heinz Otto Luthe, Distanz: 36. 37. 38. 39. 40. 41. 42. 43. 44. 45. 46. 47. 48. 49. 50. 51. e e 52. 53. Revue des Sciences Sociales de la France de l'Est, 1994 Untersuchung zu einer vernachlässigten Kategorie, München, Wilhelm Fink, 1985. Cf. Georg Simmel, Einleitung in die Moralwissenschaft, Bd.l, K. C. Köhnke, (éd.,). Georg Simmel Gesamtausgabe, Bd. 3. Frankfurt, Suhrkamp 1989, pp. 132, 133. Voir également Moritz Lazarus, Das Leben der Seele, Bd. 2. Geist und Sprache, Berlin, Ferd. Dümler, 3.Aufl, 1884, p. 404 ss. Cf. Georg Simmel, Philosophie der Landschaft, Die Giildenkammer, Norddeutsche Monatshefte 3(1912/1913), pp. 635-644) Voir également Klaus Lichtblau, «Das Pathos der. Distanz. Präliminarien zur Nietzsche Rezeption bei Georg Simmel » in Georg Simmel und die Moderne : Neue Interpretationen und Materialien. H-J. Dahme. O. Rammstedt (éd.,), Frankfurt, Suhrkamp, 1984, pp. 231-282. SOZ, p. 766. «Georg Simmel, Anfang einer unvollständigen Selbstdarstellung», in Buch des Dankes an Georg Simmel, K. Gassen et M. Landmann (éd.,), Berlin, Duncker & Humblot, 1958, p. 9 s. SOZ, p. 51 .Digression sur le problème : comment la société est-elle possible ? , in : G. Simmel, la sociologie et l'expérience du monde moderne, Paris, Méridiens Klincksieck. 1986, p. 32. Ibid. SOZ, p. 546. Cf. Chapitre 7 de « Soziologie ». Cf. SOZ, p. 546. Georg Simmel, Philosophie des Geldes, (2nde 2d. 1907). Gesamtausgabe, Bd. 6, D. P. Frisby, K.C. KÖhnke, Frandfurt am Main, 1989, pp. 285291. Cf. Margarete Susman, Die geistige Gestalt Georg Simmeis, Tübingen, J.C.B.Mohr (Paul Siebeck), 1959. Hans Liebeschütz, Von Georg Simmel zu Franz Rosenzweig. Studien zum jüdischen Denken im deutschen Kulturbereich, Tübingen, 1970. René König, Die Soziologie, in Leonhard Reinisch (éd.,), Die luden und die Kultur, Stuttgart, Kohlhammer, 1961, pp. 6177. Almut Loycke, op. cit.,. Cf. Klaus Christian Köhnke, Georg Simmel als Jude, in Erhard R. Wiehn (éd.,), Juden in der Soziologie, Konstanz, Hartung-Gorre, 1989, pp. 175-195. K. C. Köhnke, «Georg Simmel als Jude», in E. R. Wiehn (éd.,), Juden in der Soziologie, Konstanz, Hartung-Gorre, 1989, pp. 175-195. Cf. Thomas Nipperdey, Deutsche Geschichte 1866-1918, Bd.l, Arbeitswelt und Bürgergeist, München, C.H.Beck, 1990, p. 404 ss. Cf. Simon Dubnow, Weltgeschichte des jüdischen Volkes, Bd. 10, Die neueste Geschichte des jüdischen Volkes. Das Zeitalter der zweiten reaktion (1880-1814), Berlin. Jüdischer Verlag 1929, pp. 119-226. Voir également J. Wertheimer, Unwelcome strangers. East European Jews in Imperial Germany, Oxford, 1987. Voir la note sur la notion d'antisémitisme introduite en 1879; Dubnow, op. cit., p. 16, note 1. Voir l'introduction de Ingrid Belkes dans l'ouvrage éditée par elle; Moritz Lazarus und 153 54. 55. 56. 57. 58. 59. 60. 61. 62. 63. 64. 65. 66. 67. 68. 69. 70. 71. 72. 73. 74. 75. Heymann Steinthal. Die Begründer der Völkerpsychologie in ihren Briefen, Tübingen, J.C.B. Mohr (Paul Siebeck), 1971, pp. XIIICXLI. Cf. Simon Dubnow, op. cit., p. 48. Cf. Ingrid Belke, op. cit., p. LXXIII ss. Moritz Lazarus, Die Ethik des Judenthums, Frankfurt a.M. : J.Kauffmann 1898, p. 181, § 173. Ibid. Cité d'après Dubnow, op. cit., p. 314. Cité d'après Dubnow, op. cit., p. 316. Cf.S. Lozinskij, «Simmeis, Briefe zur jüdischen Frage», in Ästhetik und Soziologie um die Jahrhundertwende: Georg Simmel, H. Böhringer, K. Gründer (éd.,), Frankfurt a.M., Vittorio Klostermann, 1976, pp. 240-243. SOZ, p. 563. G. Simmel, Über Geschichte der Philosophie, Die Zeit n°504, 28/05/1904, p. 99. Attendu qu'aucune trace de la «Digression sur l'étranger» ne se trouve dans la «Sociologie de l'espace» parue en 1903. on peut supposer que la rédaction de la digression s'est effectuée après 1903. C'est en 1906 que parut «Sociologie de la pauvreté», mentionnant dans certains renvois, le type social de l'étranger. Or la digression, n'y est pas encore mentionnée, il est donc probable qu'elle ait été rédigée après 1906. La «Digression sur l'étranger» évite toute référence à d'autres passages sur l'étranger et sur le type social - en dépit du parallélisme que Schickele se plaisait à établir ailleurs avec le type social du pauvre. Ceci nous amène à supposer que Simmel l'a rédigée indépendamment de ses autres écrits et qu'elle a été destinée à paraître séparément comme pourrait le lui avoir inspiré la longueur du sujet et le sujet lui-même. Or, jusqu'à présent aucune pré-publication n'a été trouvée. Lettre datée du 12 mars 1907 (in Georg Simmel Gesamtausgabe (GSG), 22/23) Cf. M. Landmann, Bausteine zur Biographie, in Buch des Dankes an Georg Simmel, op. cit., pp. 11-33. Lettre datée du 30 janvier 1914 et adressée à Gottfried Traub. Scéance du 26 février 1914; voir le rapport dans la Straßburger Post datée du 27 février 1914, édition de midi. Cf. John E. Craig, Scholarship and Nation Building, The Universities of Strasbourg and Alsatian Society, ¡870-1939, Chicago, London, University of Chicago Press, 1984, p. 166 ss. Emst Stadler relate ces faits dans une lettre datée de juillet 1914 et adressée à René Schickele . Le directeur des archives municipales, Otto Winckelmann, était un camarade de classe de G. Simmel. La correspondance avec Kurt Schede, rédacteur- feuilletonniste à la Straßburger Post, et les éloges funèbres à Simmel dans le Strasßburger Post du 28.09.1918 en attestent. Tiré du journal posthume de Georg Simmel, Logos 8, (1919/1920), p. 131. Ibid. p. 1154. Ibid. p. 1157. Ibid. p. 1128.
Documents pareils
Théorie classique : Georg Simmel (SOL 3026) Fondements
Rivages,
p.
219-‐229
[«
Der
Henkel
»,
1905].
& Rammstedt,
O.
(2008).
«
La
littérature
de
l’anse
»
de
Georg
Simmel.
Une
approche
...
Georg Simmel
qu’en fit très rapidement Durkheim), dont on pourrait également tirer
largement profit d’une comparaison plus systématique (notamment en
raison de l’examen des rapports entre forme et morphologie s...
Georg Simmel et la question du socialisme
réflexion politique. L’individu et l’humanité marquent les frontières
sociales du politique, en indiquant le caractère radicalement a-social en
deçà (individu) comme au-delà (humanité) des processu...