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VÔTRE
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DR JACQUES OHANA
Entretiens avec Minou Azoulai
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Editions de la Beauté
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A Myriam,
Qui sait rester l’épouse,
Et la princesse qu’elle a toujours été.
Celle qui m’a subjugué un jour,
Et me fascine toujours.
A Deborah, Noémie et Raquel,
nos merveilles.
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Editions de la Beauté, 2011
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INTRODUCTION
De nombreux livres ont été consacrés à la chirurgie
esthétique, chirurgie des formes et sculpture du corps,
réparatrice lorsqu’il s’agit de séquelles d’accidents,
esthétique quand elle corrige une disgrâce. Ces ouvrages
expliquent en détail chaque intervention, ses suites opératoires, la cicatrisation et les différentes techniques.
Ajoutés aux articles régulièrement publiés qui
concernent notre spécialité, ils ont aidé à une certaine information, une prise de conscience et une plus grande maturité de la demande. Il manquait le point de vue des
patients, les questions que chacun se pose sur son corps,
la perception de sa propre image… indispensables pour
que cette discipline qui est ma passion trouve enfin un
écho favorable auprès du grand public. Il m’importait
donc de participer à sa réhabilitation, de lui donner les lettres de noblesse qu’elle mérite, tout en gardant un regard
critique sur sa réalité, ses limites et ses dérapages :
- On prétend que cette chirurgie coûte cher. C’est
exact, mais sa démocratisation est désormais obligatoire !
Au fond, quel est le prix du rajeunissement d’un visage
ou d’une féminité retrouvée ? Par ailleurs, la médecine
assistée, qui a l’avantage d’assurer une même qualité de
soins pour tous, ne dévalorise-t-elle par l’importance du
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geste médical et chirurgical par une apparente gratuité qui
coûte cher à la collectivité ?
Sans démagogie aucune, ce qui m’émeut davantage,
c’est la faible rémunération en chirurgie conventionnée.
Un chirurgien qui opère une patiente pour une péritonite
ou une fracture de jambe sauve à la fois la vie et la fonction !
C’est la revalorisation de ces actes qui me semble plus
importante. Surtout si l’on veut sauvegarder la qualité des
soins médicaux dont la France s’enorgueillit.
- On parle des « ratés » de la chirurgie esthétique !
Quelle spécialité peut prétendre à la perfection ? Il faut
savoir que ces « ratés » sont rares et peuvent le plus souvent
être corrigés. Il reste que le patient doit rester vigilant sur
le choix du chirurgien : certains praticiens ne prennent pas
le temps d’une formation nécessaire, où la technique
s’acquiert en même temps que l’éthique. Le problème est
particulièrement important dans le domaine médical, car la
sanction est lourde, puisqu’elle touche à la santé, à la vie.
Dans notre société, où les médias sont omniprésents,
de nombreux journalistes professionnels font leur métier
avec rigueur, vérifiant et contrôlant l’information avant
de la diffuser. Malheureusement le goût du scoop, le
rythme effréné des parutions, l’incontestable audience des
sujets de chirurgie esthétique entraînent aussi des dérapages
préjudiciables pour tous. Combien de techniques fleurissent
et disparaissent le temps d’un « coup médiatique » ?
Comment croire que des techniques apparemment
magiques, qui ne sont que de la publicité mensongère,
puissent convaincre de si nombreuses patientes ? Force
est de constater que la part du rêve fait perdre le sens
critique… Ou que la naïveté humaine est telle qu’elle en
devient inquiétante.
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INTRODUCTION
Aux patientes donc de s’informer auprès du Conseil
de l’Ordre, de leur médecin, de deux ou trois chirurgiens
plasticiens. A nous de les aider par une information régulière
qui véhicule l’image de notre profession. Il n’est pas question
de faire de la publicité tapageuse, mais, lorsqu’une nouvelle
technique fait parler d’elle, il ne faut pas la mépriser, ni
s’en méfier. Au contraire, on l’expérimente, on en parle pour
la valoriser ou la rejeter ! L’exemple le plus démonstratif
est celui du « scandale des prothèses mammaires ». Je
m’en suis expliqué dans ce livre, mais je le précise encore :
du jour au lendemain l’opprobre est jeté sur une intervention
pratiquée depuis quarante ans, dans tous les pays du
monde et sur des milliers de patientes. Au mépris de tout
argument scientifique réel, des informations fausses,
orchestrées par on ne sait qui, ont terrorisé des milliers de
femmes qui, porteuses de prothèses mammaires très bien
tolérées, se sont senties soudain en danger. La frayeur collective, générée par cette information « non contrôlée »,
aurait dû logiquement être un élément de réflexion,
justifiant une vérification scientifique rigoureuse. Il n’en
a rien été ! Pis. Les professionnels de notre spécialité,
ceux qui ont en charge la défense de la chirurgie plastique,
n’ont pas su organiser une réponse cohérente, collective
et responsable. Ils ont laissé la place à d’autres divagations
sans fondement ; trois ans après cette « bombe médiatique
», des études importantes, émanant de centres médicaux
compétents et reconnus, ont clairement établi l’innocuité
de ces prothèses. Et pourtant on cherche en vain, dans ces
mêmes médias, une brève, en entrefilet , une réhabilitation
de ces prothèses, ne serait-ce que pour rassurer les
patientes. Ma réaction est à la mesure de la gravité
du sujet parce que notre responsabilité est engagée
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dans nos actes médicaux et dans l’image de notre chirurgie !
C’est pour toutes ces raisons que j’ai eu envie de
m’exprimer à travers cet ouvrage.
- Pour que la beauté de notre profession soit conforme
à celle que nos patients nous demandent. Pour que cette
spécialité cesse d’être entachée par ceux qui ne la connaissent
pas. Le métier de chirurgien esthétique est trop sérieux,
trop passionnant, trop essentiel pour être laissé aux mains
de ses détracteurs. La beauté, les femmes, les hommes
méritent mieux qu’une controverse. Si elle est parfois
inévitable, j’ai au moins envie de la dépasser pour
continuer à aider ceux qui ne s’aiment pas toujours devant
leur miroir.
J. O.
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OUVERTURE
Ce jour-là nous étions deux. Deux femmes. L’Autre
et moi-même.
Nous n’avions pas rendez-vous. Non, nous nous
étions juste retrouvées devant le miroir, pour assortir les
couleurs du jour, vérifier le galbe des cuisses, la minceur
des hanches, l’arrondi du ventre.
Je m’étais approchée du miroir sans savoir que l’Autre
était là, à mon insu. C’est elle qui me susurrait, silencieusement, que quelque chose n’allait pas dans mon reflet.
C’est elle qui a remarqué le poids des seins, l’effacement
de la taille. Elle qui m’a poussée à scruter le visage fatigué
par une longue soirée entre amis.
Alors, avant de procéder au rituel du maquillage, je
me suis approchée de ce miroir. Il m’a d’abord agacée ce
miroir ! Il a figé mon regard, mes traits. Normal. Un miroir
ça ne bouge pas. On s’y regarde, comme inanimée…
Même Narcisse s’y est perdu…
Mais j’y étais. Et j’ai vu. Les premières ridules, le pli
sur la paupière supérieure, le gris-brun de la paupière
inférieure, les premiers cheveux blancs, les sillons naissants
autour du nez … J’ai remonté la peau du visage, je l’ai
tirée sur les côtés, j’ai rehaussé les seins…
J’ai souri car, comme dirait Verlaine, je n’étais ni tout à
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fait la même, ni tout à fait une autre ! J’étais moi et je
cherchais l’Autre ; la plus jeune, la plus belle, celle que
la vie avait emportée. Pour rire et pour pleurer, l’aimer
ou la châtier, la rendre mère tout en la laissant femme.
Nostalgie quand du nous tiens !
Moi j’étais là, traversant la quarantaine, sans avoir
songé à m’y arrêter.
J’étais bien dans ma peau, contente d’aborder cette
journée avec un cœur en fête, un corps en forme. J’étais
fière de mon nouveau tailleur, de mes cheveux brillants,
de mes amies, de mes enfants, de mon mari. Fière de tout
mais pas de cette Autre si exigeante, trop idéale.
Elle oublie que les enfants ont grandi, qu’ils assènent
et assument leurs goûts et leurs jugements à mes dépens ! Elle
feint d’ignorer que les hommes se retournent encore sur moi !
Mais elle sait que les femmes, les amies qui me regardent
ne font que se toiser elles-mêmes ! Que de regards à affronter,
que d’années à compter avant et après !
Je me suis écartée du miroir, sans quitter mon reflet.
L’Autre, plutôt perfide, me suggérait un peu de gymnastique pour tonifier, un régime pour affiner, du maquillage
pour embellir et masquer. Des vêtements pour épouser les
belles formes, sans révéler les autres.
Là j’ai compris que j’abordais à mon tour la crise du
milieu de la vie, les premiers signes du temps qui passe.
Le vieillissement …
Ou la maturité... C’est selon, les deux mots se conjuguent
avec l’état d’âme du moment !
J’ai pensé à toutes les femmes qui ont le blues devant
leur miroir.
A celles qui comblent des manques par l’insatisfaction
et l’autocritique.
Elles râlent contre leur nez, leurs seins, le tout et les
riens…
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OUVERTURE
Je pense à ces femmes qui se sentent séduites et abandonnées, qui ne savent plus voir l’éclat de leur beauté.
Et ces hommes qui mentent comme de grands enfants
lorsqu’ils disent nous aimer telles que nous sommes. Mais qui
sans vergogne se retournent vers l’Autre, la jeune et belle !
Alors que eux, jeunes premiers ou grisonnants, ils
nous volent nos crèmes et font semblant d’ignorer le miroir.
Eux qui ne connaissent ni le désordre hormonal, ni l’horloge
biologique. Quelle chance !
Mais quelle chance aussi d’être une femme !
Une femme qui devant son miroir peut narguer l’Autre,
avoir encore en elle le goût d’être jolie et de plaire. Or la
beauté des yeux, d’une peau ou d’un corps n’est rien sans
cet éclat de beauté intérieure.
Tant pis pour ces « femmes-canons », ces beautés fatales
qui s’exhibent toujours et partout. C’est du harcèlement
esthétique ! Elles sont belles, galbées, pulpeuses. Oui. Et
alors ? Nous aussi. D’ailleurs, il n’y a pas du papier glacé
ou de bons photographes pour retoucher nos défauts ou
les traces d’une fatigue naturelle.
Il y a aussi notre lucidité, notre sérénité ou notre
indulgence. Parce que la beauté est aussi le corollaire du
désir. Parce qu’elle est autant dans notre propre regard
que dans celui de l’Autre !
Parce qu’il y a des matins où l’on s’aime et d’autres
où l’on se déteste. C’est ainsi pour les plus belles, les plus
laides, les plus intelligentes ou les plus riches. C’est une
affaire de vague à l’âme, pas de mensurations.
Mais quand on s’aime, on ne compte pas. Ni les
crèmes du jour, ni le soleil de l’hiver, ni les pilules de la
nuit, ni les ordonnances… Il suffit de savoir choisir, de
poser les bonnes questions, de s’informer au mieux.
Il faut savoir négocier avec les autres, avec soi, avec
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l’Autre. Il faut déjouer la complaisance ou l’hostilité du
miroir.
Pour un jour dire à l’Autre, dans le miroir, qu’elle ne
nous entraînera pas dans un blues stérile et sénile. Pour
faire rimer beauté et sérénité. Pour oublier les rides du
visage et celles de la vie. Et surtout pour faire en sorte
que tous les hommes qui ont envie de s’occuper de notre
beauté ne nous abusent pas mais consentent à rester
esthétiquement nôtres !
M. Azoulai
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-ILE CAPITAL BEAUTÉ
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« Les privilèges de la beauté sont
immenses. Elle agit même sur ceux qui
ne la constatent pas ».
Jean Cocteau.
Nous naissons tous avec des caractéristiques physiques,
inscrites dans nos gènes. Peut-on, de ce fait, parler
d’une beauté innée ? Ou d’une beauté acquise comme
lorsque l’on s’interroge sur l’intelligence ?
Cet éternel débat sur l’intelligence divise encore les
chercheurs et les spécialistes de l’enfance. Les thèses sur
l’inné et l’acquis fluctuent avec les modes et les découvertes concernent le cerveau.
Peut-être trouvera-t-on un jour un gène de l’intelligence ? Mais il est sûr qu’on ne découvrira jamais celui
de la beauté. Elle est en effet la résultante de plusieurs
caractéristiques inscrites dans nos gènes. Mais elle est surtout
subjective ; elle dépend du regard, du désir, de l’amour de
l’Autre. Elle est aussi mouvante que l’image ou l’amour
que l’on a de soi.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
A la naissance d’un enfant, on dira spontanément de
lui qu’il est beau. Les commentaires sur son intelligence
viendront plus tard, car on se fie d’abord à son apparence
et à ce qu’il représente.
La beauté va certes se développer dans le temps, mais
elle demande à être entretenue pour bien s’épanouir. On
peut manipuler l’intelligence d’un individu, l’endoctriner,
lui ôter tout discernement. Il n’en est pas de même pour
le physique. Il ne peut pas y avoir de « figure imposée ».
Ce qui permet à chacun, à chacune de trouver sa propre
harmonie tout en respectant ses caractéristiques naturelles.
Le cliché de la grande blonde aux yeux bleus n’a pas le
monopole de la beauté comme certains cherchent parfois
à l’imposer. Il n’est qu’une référence parmi d’autres, dans
une société où toutes les formes de beauté occupent la
même place.
La beauté est donnée d’emblée à certains d’entre nous,
mais elle rencontre les limites de l’horloge biologique.
Elle n’est qu’un privilège prêté, et il nous faut faire
beaucoup d’efforts pour ralentir les effets du temps sur
l’enveloppe corporelle.
Contrairement à l’intelligence, elle connaît des limites
dans ses formes et dans le temps. Ce qui n’est guère le cas
du savoir, de l’érudition, des aptitudes intellectuelles (sauf
si le cerveau est un jour affecté par une lésion).
La beauté évolue dans le temps, elle se structure,
elle s’épanouit, elle s’atténue, elle se transforme. Son
éclat et sa plénitude ne durent que quelques longues
années dans la vie humaine. Elle est à la fois innée,
acquise et temporaire, elle n’est pas forcément globale
comme une entité. Celles ou ceux que l’on dit beaux
présentent des traits plus réguliers, des lignes, du visage
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LE CAPITAL BEAUTÉ
et du corps, plus harmonieuses. Mais la couleur des yeux
ou la forme de la bouche, la courbe des seins suffisent parfois
pour donner la beauté à un individu.
De la même façon, un infime défaut risque d’abîmer
un visage ou une silhouette, mais, une fois corrigé, il a
l’avantage de changer tout l’ensemble ou de rendre beau
quelqu’un dont l’apparence est banale.
Le corps se développe, embellit ou se détériore, en
fonction des caractéristiques héréditaires et génétiques.
Nous ne sommes pas tous égaux dans nos gènes. Sans
compter que de nombreux facteurs interviennent tout au
long d’une vie pour modifier ce programme préétabli.
Je pense à des facteurs traumatiques, dus à un accident,
qui modifient l’esthétique d’un visage ou d’un corps ; ou
au développement d’une tumeur superficielle qui, après
un geste chirurgical, entraîne des séquelles du même type.
Quant aux facteurs psychologiques, ils ne sont guère
négligeables, surtout s’ils ont un retentissement sur
l’alimentation et le poids de l’individu.
Dans tous les cas, la majorité d’entre nous chercherons
à cultiver leur beauté. Les femmes et les hommes ont
toujours inventé des artifices, des stratagèmes pour
embellir leur visage et leur corps. Cette beauté qui nous
est donnée, il faut savoir la recevoir, en profiter, et en accepter
la transformation. Si l’on s’accroche à une beauté que l’on
veut éternelle, on entreprend une course contre le temps,
une course perdue d’avance. Chercher à entretenir et à
conserver sa beauté est une démarche tout à fait positive
à condition d’en connaître les limites.
Certains exemples célèbres traduisent la course à la
beauté dans ce qu’elle a de plus pathologique et pathétique.
Certaines personnes opérées dix voire vingt fois,
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loin d’être des modèles deviennent plutôt des caricatures.
Mais cette fuite en avant traduit une obsession où la
beauté n’est qu’un prétexte. Ce type de comportement est
souvent le signe d’un refus de soi, de sa condition sociale,
de ses traits originels.
Heureusement, ces cas sont rares où, pour rester
mince, fin, le corps n’est plus ni féminin ni masculin et
devient une sorte de mutant.
Il y a l’exemple connu de ce fameux chanteur qui a
voulu rester un enfant de dessin animé, un Peter Pan
comme il s’est surnommé. Il a fait de multiples interventions de chirurgie esthétique… Mais que devient la beauté
dans ce cas puisqu’elle perd tout son naturel, toute son
authenticité ?
Si elle est un élément important dans la vie, elle ne
doit pas être une priorité absolue, un but en soi, sinon elle
risque de générer un déséquilibre qu’aucune chirurgie
esthétique, aucun produit cosmétique ne sera capable de
corriger.
La beauté est aussi évolutive et subjective. Pourtant,
quand une femme est belle et qu’elle ne sait pas ou ne veut
pas le savoir, sa beauté ne lui sert pas à grand-chose. Les
complexes que l’on se fait tous, en fixant son attention sur
un défaut plus ou moins visible, n’entament pas la beauté
mais ils empêchent son épanouissement.
La chirurgie esthétique ne cherche pas à masquer une
profonde angoisse existentielle, mais à résoudre un
problème au niveau du visage ou du corps qui, s’il est
mal vécu, prend parfois des proportions démesurées. Si
l’on comprend cela, si on l’intègre bien, on peut accepter
le privilège de la beauté et le savourer jusqu’à son terme.
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A condition toutefois de dépasser la notion de beauté
plastique conventionnelle, et de penser à développer et à
mettre en valeur toutes les qualités humaines qui font la
beauté intérieure.
Tous les bébés sont-ils beaux ?
Oui. Tous les bébés sont beaux, ne serait-ce que par
le miracle que représente une naissance. Ils sont beaux,
parce qu’ils sont le fruit du désir, de l’amour et parce que
l’être humain porte en lui les potentiels de toutes les
beautés.
Tout est déjà inscrit en nous, et les caractéristiques
physiques programmées génétiquement seront modifiables
tout au long de la vie.
Deux individus peuvent posséder un patrimoine
génétique similaire, mais ils seront différents, parce que
leurs gènes s’exprimeront autrement sur le plan biologique. Sans compter l’adaptation à l’environnement
climatique, culturel, familial et social qui va imprimer sa
marque sur l’évolution psychologique et physique de
chacun.
En regardant des photos prises à deux époques différentes de la vie, on ne reconnaît pas toujours la même
personne. Elle n’est pas la même à cinq, à huit et à dix-huit
ans, malgré quelques constantes physiques comme la couleur
des yeux, l’expression du regard qui restent une marque
profonde de la personnalité. Il y a ainsi des yeux rieurs,
mélancoliques, rêveurs qui sont les témoins de l’âme.
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Tout le reste du visage et du corps va bouger, se
transformer au fil de la croissance. Si l’on ne reconnaît
pas cette même personne, c’est que les traits dessinés vers
l’âge de huit ans ne s’affirmeront nettement qu’au terme
de la puberté.
La finesse d’un corps peut parfois se modifier de
façon pathologique vers l’obésité ou la maigreur. C’est la
faute de la vie ou à la maturité intellectuelle, psychologique, qui n’est pas toujours en accord avec l’évolution
physique.
Le visage et le corps de l’enfant ne sont donc que
l’esquisse à peine ébauchée de ce que sera l’adulte. Avant
l’objet-miroir, le premier miroir de l’enfant est le visage
de sa mère. Il en scrutera toutes les expressions, celles qui
l’inquiètent et celles qui le rassurent. Il les fait siennes
jusqu’au moment où il découvre son propre corps et le
distingue du corps maternel. C’est cette étape du miroir
qui va lui donner son autonomie.
Pourtant il suffit qu’une mère, un père ou un petit
camarade d’école dise et répète à l’enfant qu’il est le vilain
petit canard pour que celui-ci le croie. Dès lors, il se dévalorise et oublie vite qu’il peut être beau. Les cours de
récréation sont parfois des sources de souffrance pour les
petits. Combien de complexes y sont nés à cause des
regards scrutateurs, moqueurs, des sarcasmes concernant
le poids, la taille, un strabisme ou des oreilles décollées.
Autrement dit, dès l’enfance, notre apparence et notre beauté
extérieures ont une influence sur notre beauté intérieure.
On n’insistera jamais assez sur le rôle régulateur des
parents, des éducateurs, et du regard de l’entourage.
L’adolescence est une autre étape qui risque d’entamer le capital beauté. Le corps change de proportions, les
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traits du visage se modifient. C’est une véritable métamorphose, qui fragilise toutes les filles et tous les garçons.
L’incertitude, le doute vont s’ancrer en eux. Ils vivent un
âge tumultueux. Ils transposent sur eux l’analyse dont ils
se croient l’objet. Ils se regardent d’un œil critique,
sévère. Ils essaieront toutes sortes de coiffures, ils changeront
tout le temps de tenue. Soit ils se trouvent très beaux, ils se
sentent bien dans leur peau et dans ce cas ils ne supportent
pas la critique des autres ; soit ils traquent le moindre
défaut, ils sont mal à l’aise dans leur corps et ne supportent
toujours pas la critique des autres…
Leur beauté, leur miroir sont des préoccupations
quotidiennes.
Les filles s’observent inlassablement : leurs seins sont
trop petits, trop gros ; leur cellulite, leurs hanches
« immondes », disent-elles. Elles rêvent toutes d’être des
mannequins, projetant ainsi leur image de femme en devenir.
Ainsi la beauté est un atout que l’on apprendra à mettre
en valeur.
A partir de là, il faut se dessiner soi-même, en toute
harmonie. Une harmonie qui est la résultante du charme, de
la grâce ou d’une forme d’intelligence que l’on trouve en soi.
Des gestes simples et tout à fait concrets favorisent
cette mise en valeur : une coupe de cheveux adaptée, une
peau bien entretenue, un maquillage étudié embellissent
une femme, sont à même de redessiner un visage, de lui
donner un éclat différent. Ce travail sur soi est une manifestation simple, classique de la quête de la beauté et il
est à la portée de tous.
Etre beau ou belle, ce n’est pas forcément l’être toujours.
Il y a des moments de beauté à saisir comme il y a des
moments de bonheur ou de sérénité.
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Mais lorsqu’un défaut est réel, et qu’il gêne au point
de déstabiliser l’adolescent ou le jeune adulte, voire de le
confiner dans une attitude de repli, un conseil du type
chirurgical peut se révéler bénéfique pour passer plus
calmement la crise de l’adolescence déjà bien complexe.
Souvent, dans cette période très critique, c’est au niveau
du visage et en particulier sur le nez que se focalisent les
angoisses liées au physique.
Enfin, n’oublions surtout pas qu’à cet âge l’adolescent
est souvent trop fragile pour juger seul de sa propre
beauté, et il se soumettra en permanence aux jugements
des autres. Il faut savoir déceler ce manque d’assurance
que le temps, souvent, ou une prise en charge psychologique
permettent de contrôler.
L’une de mes patientes, âgée de seize ans, et fort jolie,
est venue une bonne douzaine de fois en consultation. Elle
se trouvait laide, et pourtant rien, ni au niveau de son visage
de son corps, ne semblait justifier une telle attitude. Je l’ai
écoutée longtemps, sans céder à sa demande, et en lui
proposant de réfléchir encore et encore.
Puis je ne l’ai plus revue, mais sa mère, quelques
mois plus tard, m’a informé que sa fille n’avait rien fait,
que son obsession était passée et qu’elle se sentait beaucoup
mieux dans sa peau.
Quels sont les canons de la beauté d’aujourd’hui ?
L’histoire de la beauté est en quelque sorte l’histoire de la
femme, de sa représentation… vue par des hommes. C’est
ainsi, on ne peut pas vivre et se regarder vivre. Ce
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LE CAPITAL BEAUTÉ
sont eux qui se sont inspirés, emparés de la femme pour
mettre en valeur sa beauté et exprimer les émotions
qu’elle suscite.
Les canons de la beauté sont les critères esthétiques
que chaque groupe culturel, à un moment donné de son
histoire, attribue au corps idéal. Et il ne s’agit pas d’une
beauté purement plastique Par exemple une femme mince,
voire longiligne, est considérée comme belle dans certaines
pays scandinaves, alors que les pays latins et orientaux
préfèrent les femmes plus rondes ;
Mais aujourd’hui les canons de la beauté évoluent plus
dans le temps que dans l’espace puisque ce dernier a été aboli
par le développement de l’image et le mélange des cultures.
Etre belle n’est plus l’apanage d’une seule classe sociale.
De ce fait, comme son image, la beauté s’est démultipliée. Les stars mythiques du cinéma sont aujourd’hui
remplacées par des vedettes que la télévision monte en
exergue, le temps de quelques émissions. Tous les mannequins, toutes leurs beautés, exotique, naturelle,
plantureuse ou androgyne, y ont une place. Mais de leur
côté les femmes normales, ordinaires continuent leur
éternelle quête et ont à leur disposition une gamme de
moyens très étendue : les vitamines, le collagène, le sport,
le bronzage, la lipoaspiration, tout leur est permis. La
beauté est plus accessible, mieux partagée, parce que plus
nuancée. C’est ce que déplore Philippe Sollers lorsqu’il
écrit : « Elles semblent en suspens. Elles sont réquisitionnées
par le Calcul, le Programme. On les veut consommatrices,
matrices, esclaves des produits de beauté, cyniques, travailleuses, sentimentales, frontales. Elles doivent maigrir,
bronzer, débronzer, pointer, réussir, accoucher, éduquer,
s’agiter, défendre leur droit à l’égalité, se maquiller… »
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A moins de tourner le dos à cette tendance, ce qui se
révélerait difficile, les femmes ne peuvent que répondre
à ces exigences.
C‘est dire que les contraintes imposées par les canons
de la beauté sont encore et toujours du côté des femmes.
De façon moindre, mais certaine, l’homme commence lui
aussi à être concerné.
Mais l’intérêt de l’évolution des critères esthétiques de
la beauté réside justement dans cette demande très diversifiée
qui a balayé les stéréotypes. Peut-être reviendront-ils dans
quelques années, ou quelques décennies ? Mais en attendant
leur disparition permet l’expression du charme, de la
grâce au sens large du terme.
Bien sûr, les grands couturiers continuent de rêver de
la femme, de l’habiller de leurs créations, d’exalter sa
féminité, mais la mode a aussi suivi la démultiplication
de la beauté… Ou elle l’a précédée…
Quoi qu’il en soit, la beauté est longtemps restée un
mythe nourri par le cinéma. Comme l’a écrit Edgar Morin,
elle a été l’un des plus forts ingrédients du star-système.
Selon lui, « le maquillage au cinéma élève la beauté
quotidienne au niveau d’une beauté supérieure, radieuse,
inaltérable… La beauté au cinéma n’est pas une beauté
de musée, mais une beauté de présence ». Le maquillage
ou la lumière qui justement accentuent la présence d’une
beauté même ordinaire. Même un maquillage léger ou une
lumière naturelle. Autrement dit, ce n’est pas un nez parfait
ou une bouche sensuelle qui donnent la beauté à la femme
mais sa présence intérieure. Cette « beauté » de présence
a parfaitement convenu aux femmes quand elles sont entrées
dans le monde du travail.
Elles ont voulu gommer leurs rondeurs, elles ont
choisi et imposé la beauté en mouvement qui va avec la
minceur et une allure plus sportive.
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LE CAPITAL BEAUTÉ
Tout se joue désormais dans la silhouette : les cheveux
se sont raccourcis, les jambes se sont exhibées grâce à la
mode lancée par Coco Chanel. A la même époque l’exotisme
de Joséphine Baker, le teint hâlé ont séduit toute une
génération d’hommes et de femmes jusque-là attachées à
la blancheur laiteuse.
Au milieu des années 70, l’élan vers une beauté
naturelle s’est confirmé puis accéléré avec les prémices
des mouvements de femmes.
Elles ne voulaient plus ressembler à la Twiggy, filiforme. Elles voulaient assumer leur corps tel qu’il était,
sans entraves ni artifices, tout en concédant de recourir
au sport et à la musculation.
Depuis être belle n’est plus une contrainte puisque
chaque femme peut et doit rester elle-même, quelle que
soit la mode. Il est difficile, aujourd’hui, d’imposer aux
adolescentes le port de talons aiguilles ou de ceintures qui
leur enserrent la taille. Les baskets, les bottines, les jeans
correspondent au désir de laisser le corps en liberté. Mais
ces vêtements a priori masculins ne masquent jamais la
beauté et la féminité des filles qui les portent. Au contraire
leur naturel, leur présence n’en sont que plus affirmés.
Quel rôle jouent les médias dans l’établissement des
canons de la beauté ?
Ils en sont les vecteurs. Ils mettent à la portée de tous
les désirs, les rêves de beauté des artistes et des grands
créateurs, qui étaient autrefois connus ou appréciés par
quelques initiés des classes les plus favorisées.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Aujourd’hui toutes les femmes peuvent s’identifier à
celles que l’on dit belles, en ouvrant un journal, en
croissant une pub, en regardant un film ou une émission
télévisée. Elles peuvent tendre vers les modèles affichés,
elles peuvent les récuser ou les imiter sans aucun
discernement.
Mais certains dérapages sont possibles. Les seins
hauts et ronds, les lèvres pulpeuses ne vont pas à tout
le monde, ils sont à la mode, mais les clones n’ont jamais
le même charme que la beauté originale et authentique.
Et les progrès réalisés au niveau de la beauté plastique
ne doivent pas nous faire oublier que notre corps, lui,
est construit, remodelé en permanence par notre vie.
Il est sujet, il n’est pas objet. Même avec une volonté
de fer, on ne peut pas le solliciter au-delà de certaines
limites.
C’est à ce niveau-là que les médias et certains
« médecins » font courir des risques aux femmes et aux
hommes mal informés. Ils font miroiter des leurres, ils
cultivent l’illusion d’une beauté absolue ou d’une
jeunesse éternelle. Cela étant, ce sont les personnalités les
plus fragiles qui se laissent prendre à ce jeu pervers. Les
femmes qui interrogent leur miroir, qui se penchent sur
leur propre vie s’acceptent telles qu’elles sont. Si elles
décident de corriger les défauts qui les gênent, elles le font
en toute connaissance de cause, sans dénaturer ni leur
corps, ni leur visage, ni leur apparence. Elles ne trichent
pas avec leur vie, avec leur image. Elles s’en accommodent
à leur manière.
Prenons par exemple l’image d’une publicité mettant en scène l’instantané d’un corps propre, net,
presque parfait. Ce corps est sans histoire, sans passé,
sans avenir. Mais, par ailleurs, tant mieux si nous
sommes entourés de corps jeunes et beaux, cela nous
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LE CAPITAL BEAUTÉ
oblige à des efforts pour rester dynamiques. Le désir de
beauté pousse les femmes à consommer des produits qui
vont effacer leurs rides. Elles auraient ainsi le même
visage que celle qui vante les produits… Mais elle aussi
vieillit.
Les femmes le savent. Elles ne sont pas dupes. Ni de
la réalité, ni de la supercherie, mais elles ont envie, besoin
de jouer le jeu. Elles trouvent du plaisir en rêvant leur
propre image.
Chercher à se rajeunir est peut être l’un de ces
moyens qui donnent l’illusion de retenir le temps qui
passe, ou de le franchir en douceur.
C’est une manière de conjuguer ce temps existentiel.
En véhiculant sans excès les canons de la beauté, les
médias nous donnent l’occasion de nous occuper de notre
corps. Ils le font parce qu’on les sollicite, Ils répondent à
une attente plus collective qu’individuelle. Les femmes
travaillent longtemps, beaucoup, elles s’occupent de leurs
enfants, elles n’ont plus des heures à consacrer à leur
miroir ; les médias leur offrent des échappées belles et
elles s’y regardent. Toute cette beauté montrée, décrite les
flatte, les porte, les rassure et leur rappelle une féminité
qui aurait parfois tendance à s’égarer dans leurs
préoccupations quotidiennes. Condamner ce jeu plaisant,
c’est à mon avis condamner la frivolité, la légèreté de
l’être. Elle est une facette de notre personnalité qui nous
maintient en vie et sans laquelle nous serions de tristes
sires. Il faut connaître ou avoir connu un handicap
physique, une vraie souffrance dans sa chair pour
comprendre à quel point un corps en mouvement, un
corps en beauté est précieux ; c’est quand on a perdu sa
jeunesse, sa beauté que l’on a envie de dire aux autres,
toute amertume mise à part, d’en profiter et d’en jouir au
maximum.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Si une femme n’est pas belle, si un homme n’est pas
beau, sont-ils laids pour autant ?
Il arrive quelquefois d’avoir le souffle coupé par la
beauté d’une femme, mais ce n’est qu’un instantané
exceptionnel. La laideur, la vraie laideur est elle aussi
exceptionnelle, elle est plus près du pathologique que du
normal.
La beauté se dérobe à toute définition. Unanimement
reconnue, elle devient une évidence… Mais comment
parler d’une évidence ? On ne peut que la constater et
l’admettre.
Seuls les artistes, les poètes, restent crédibles
lorsqu’ils incarnent et racontent la beauté. En fait ils nous
décrivent leur muse ou la femme fatale qui les inspire ou
les tourmente. Grâce à leur talent, on croit approcher une
définition de la beauté, mais ils n’ont fait que sublimer
celle qu’ils aiment. Or elle est si bien incarnée par leurs
couleurs ou leurs mots qu’on se laisse emporter dans leurs
rêves et leurs fantasmes. C’est dire à quel point la beauté
est subjective, liée à l’imaginaire des uns et des autres. Ce
qui signifie aussi que chacun a en soi un désir de beauté.
Dans la vie elle peut nous faire rêver. Ou nous faire
peur. Lorsque deux personnes s’extasient sur la beauté
d’une troisième, la première émotion passée, elles vont
chercher leurs mots pour en parler. Puis elles vont nuancer
leur avis, dire « elle est superbe, mais… » où « il est très
beau mais… ». Elles cherchent la faille, comme si la
beauté pure avait quelque chose d’insoutenable. Ou
comme si elle n’existait pas !
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LE CAPITAL BEAUTÉ
De cette rencontre vont surgir d’autres interrogations,
car la beauté de l’Autre nous renvoie à la nôtre. On fait
des comparaisons, on doute…
On revient à son miroir. Cela est bien normal,
l’unanimité ne se fait que pour l’art et par l’œuvre d’art,
parce qu’il s’agit d’épures et non d’êtres vivants.
En revanche, l’histoire de l’art, de la littérature au
cinéma en passant par la peinture, a donné le genre féminin
à la beauté. Les mots ou les exemples choisis dans les
dictionnaires sont toujours féminins.
Dans le langage courant on dit d’un homme qu’il est
beau ou qu’il a du charme. Pour les femmes, la gamme
d’adjectifs est plus étendue : une femme est jolie, belle,
ravissante, mignonne ou gracieuse…
Autrement dit, la beauté se décline au féminin.
Peut être parce que le corps féminin a plus de courbes.
Les seins, la cambrure des reins, les hanches ou les
cheveux sont chargés de sens dans l’inconscient
collectif.
Et pourtant toutes les femmes ne sont pas forcément
très belles. La majorité d’entre elles possèdent une grâce,
une gestuelle, un charme qui n’ont rien à voir avec leurs
caractéristiques plastiques. Il suffit d’un je-ne-sais-quoi
dans leur démarche, leur port de tête, leurs mouvements
pour nous séduire.
La beauté est un puzzle, un ensemble de proportions
ou un infime détail qui échappe à une simple équation
mathématique. Elle suscite des émotions, elle est le
corollaire du désir et de l’amour. La beauté n’est donc pas
une valeur absolue, mais une plus value.
Quand on n’est ni particulièrement beau, ni
particulièrement belle, on apprend simplement à vivre
avec soi-même. On n’est pas laid pour autant ! La majorité
d’entre nous y parviennent, et cela est sans doute plus
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
confortable que d’être exceptionnellement beau ou
exceptionnellement laid.
L’équation est subtile ; on l’appelle équilibre ou
harmonie, mais dans tous les cas elle concilie l’être et
le paraître. C’est cela la beauté ordinaire, celle qui
peut émouvoir, susciter le désir sans intimider, sans
faire peur. On peut séduire une femme normalement
belle. Mais celle que l’on dit « trop belle »est inaccessible
p a r c e q u ’ e l l e é c h a p p e à l ’ e ff e t - m i r o i r q u e l ’ o n
recherche chez l’autre.
Si la grande beauté fait l’unanimité, en est-il de même
pour la laideur ?
Certainement, la laideur quand elle est pathologique
est évidente. Elle peut être la résultante d’une malformation congénitale : c’est le cas de la craniosténose, une
soudure prématurée des os du crâne. Ce phénomène,
appelé aussi asymétrique de la boîte crânienne dès l’enfance,
qui agit sur la croissance faciale et maxillaire, et peut
même avoir de graves conséquences au niveau cérébral
et oculaires.
Ces maladies dites de Crouzon et d’Apert sont
impressionnantes, graves et heureusement rares. Longtemps hors de portée de toute thérapeutique, elles sont
désormais accessibles à un traitement chirurgical, grâce
au génie d’un chirurgien français, le docteur Paul Tessier,
qui a établi les bases de la chirurgie cranio-faciale et en a
codifié les indications. Cette chirurgie très complexe
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LE CAPITAL BEAUTÉ
mobilise plusieurs équipes de plasticiens, d’ophtalmologistes, de neurochirurgiens, qui obtiennent des résultats
esthétiques spectaculaires, surtout chez l’enfant, tout en
prévenant le retentissement fonctionnel important des ces
malformations.
Actuellement, quand elles sont dépistées tôt, ces
anomalies de la croissance peuvent faire l’objet de
traitements moins lourds, qui orientent différemment
l’évolution osseuse, et évitent la constitution avancés de
ces maladies.
Il existe d’autres exemples d’asymétries faciales qui
ne sont pas en rapport avec des malformations primitives, mais des déformations secondaires du visage.
Celles-ci sont dues à un traumatisme de l’enfance, un
accident, ou encore une injection au niveau des os et des
articulations de la face. Il en résulte sur le plan esthétique une insuffisance de développement de l’hémimandibule, une projection déformée du menton, une
croissance osseuse de la pommette incomplète et quelquefois des problèmes fonctionnels au niveau de l’articulation dentaire.
Des cas moins caricaturaux sont à l’origine de dysharmonies faciales « moins laides » et réparables par des
interventions chirurgicales courantes.
A des degrés moindres, plutôt que de laideur, on parlera
de défauts ou de disgrâces.
Les oreilles décollées, par exemple, et la bosse sur le
nez sont les défauts les plus répandus et les plus aisément
corrigés. Ces oreilles décollées, peut être par une
imprégnation culturelle inconsciente, donnent un air de
caricature, de héros de BD, à celui ou celle qui en est
victime, encore que les filles aient la chance de masquer
cette disgrâce par leurs cheveux. Ces petits défauts
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
deviennent grands à cause du regard impitoyable que les
enfants portent les uns sur les autres. Toutes « les grosses
», les « miro » ou « les oreilles en feuille de chou » ont
souffert des sarcasmes de leurs petits camarades. Le
recours à la chirurgie esthétique relève d’une nécessité et
non plus de la coquetterie. Et croyez-moi, il résout plus
d’un problème chez un enfant ou chez un adolescent en
le libérant de la petite déprime chronique qui accompagne
la dévalorisation de soi.
Un état de laideur, ou vécu comme tel, peut avoir
d’importantes répercussions sur le caractère et le mode de
vie de l’individu, allant du repli sur soi jusqu’à l’agressivité la plus violente avec un sentiment d’injustice jamais
assouvi.
Ce qui compte, comme pour la beauté, c’est la
manière dont on vit la disgrâce, dont on la fait partager
aux autres. Ce sentiment, ce comportement du disgracieux
prennent leur source dans l’enfance.
On acclame la beauté, tandis que les silences gênés
et les non-dits accueillent la laideur. Ceux qui en souffrent
ou qui s’y résignent vont compenser par toutes sortes de
moyens : l’ambition sociale, le travail acharné, l’agressivité,
alors qu’ils pourraient en s’acceptant utiliser cette énergie
de manière moins volontariste et moins violente. Une
personne laide ou qui se juge ainsi a l’angoisse de séduire
chevillée au corps, tandis qu’une personne belle éprouve
l’angoisse de ne plus séduire.
L’environnement familial, amical et médical est un
tout indispensable pour aider à retrouver le chemin de la
confiance en soi. Comme pour la jeunesse, comme pour
la beauté que l’on cherche à pérenniser, il faut faire tous
les efforts possibles pour diminuer tout sentiment de
laideur et atteindre le bien-être que l’on recherche. On dit
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LE CAPITAL BEAUTÉ
qu’il faut souffrir pour être belle (ou beau), mais la
souffrance peut s’alléger parce que les chirurgies
réparatrice et esthétique sont des remèdes parfois très
spectaculaires.
La beauté évolue parce que le corps lui-même se
transforme. Quelles sont les principales étapes de cette
évolution ?
Il y a des jours, des années où la majorité d’entre nous
s’acceptent fort bien. Nous sommes en bons termes avec
notre corps et paraissons plutôt bien dans notre peau. Cela
témoigne d’un état d’équilibre, qui peut durer ou, pour
diverses raisons, se déstabiliser et être à l’origine
d’un malaise.
Lorsque les remaniements de l’adolescence ont cessé,
la graisse s’est répartie, le nez a pris sa forme définitive
et les muscles se sont constitués ; la paix, ou en tout cas
le calme, s’installe enfin dans le corps.
La beauté, le normal ou l’exceptionnel peuvent
l’habiter sans générer de conflits.
C’est aussi à cette période que filles et garçons vont
connaître leur première relation amoureuse et sexuelle.
Elle va les rasséréner, canaliser leur énergie, leur vitalité
quasiment toutes-puissantes. Être aimés, regardés, touchés
par l’autre les réconcilie avec ce corps jusque-là embarrassant et qu’ils verront d’un œil moins critique.
Les voici parvenus au seuil de l’âge adulte, au bout
d’une solitude qui marque la fin de l’enfance.
A ce propos, il faut signaler que bon nombre d’ado-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
lescentes viennent en consultation accompagnées de leur
mère ou de leur père.
Les deux parents abordent la démarche de manière
très différente.
La mère et la fille sont en général le miroir l’une de
l’autre. Leur complicité ou leur rivalité émerge très vite
dans la formulation de la demande, mais la mère reste
dans l’ensemble un soutien pour sa fille.
Le père, lui, a tendance à minimiser le défaut à
corriger, pour éviter l’opération. Il aime sa fille telle qu
‘elle est, alors que pour sa propre femme ou sa compagne
il est souvent à l’origine de la démarche chirurgicale.
Certaines opérations d’adolescentes, pourtant justifiées,
seront annulées ou reportées à cause de la rigidité ou de
la crainte excessive du père.
Et s’il donne son accord, convaincu enfin de l’intérêt
pour son enfant, il se révèle très pointilleux : il vérifie
bien sûr les compétences du chirurgien, mais s’informe
aussi sur la technique employée et les suites de l’intervention.
Toutes ces attitudes sont évidemment très respectables,
mais lorsque les liens familiaux, psychologiques sont trop
complexes, ils peuvent déborder le cadre d’une consultation normale. Et si ma fonction les met peut-être en
exergue, le rôle de conciliateur à ce niveau n’est parfois
plus de mon ressort, et je dois dans ce cas, pour temporiser,
faire appel aux conseils d’un psychologue.
Le bistouri n’est qu’un instrument, pas une baguette
magique, le chirurgien qui n’a pas tous les pouvoirs doit
surtout connaître ses limites, et anticiper les diverses
répercussions de son geste.
Les différents âges de la femme sont autant d’étapes
à franchir et à négocier avec son ego, son narcissisme,
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LE CAPITAL BEAUTÉ
son entourage. Pour l’homme tout est plus simple, du fait
de sa stabilité hormonale et d’une moindre attente des
autres, par rapport à son apparence physique.
Au terme de l’adolescence, entre vingt et trente ans,
la femme atteint un plateau stable, propice à son épanouissement. Ses tissus sont de meilleure qualités, ses cycles
menstruels sont régularisés, son corps est au calme, sa
maturité relationnelle lui permet une vie de couple
harmonieuse. Si, dans le même temps, elle trouve une
stabilité professionnelle et sociale, elle ne considère plus
son corps comme un ennemi. Au contraire, elle va s’en
servir, le mettre en valeur, le dorloter.
L’été, ce sont les femmes de cet âge-là qui se font
bronzer seins nus.
Dans « Corps de femmes, regards d’hommes », le
sociologue Jean-Claude Kaufman observe que sur la plage
« tout sexe devient miraculeusement beauté ou laideur.
Le corps sexuel s’affiche soit comme objet de désir, soit
comme obscénité ». Ce sont les mêmes jeunes femmes
qui osent les tenues les plus provocantes. La mode, en
haute couture ou en prêt-à-porter, est montrée, vendue
grâce à elles, et ce n’est pas par hasard. Elles se regardent
dans ces regards portés sur elles. Elles ont une image
positive d’elles-mêmes. Si la vie les a épargnées, leur
beauté intérieure et leur apparence physique trouvent là
un point d’orgue. A ce stade, lorsqu’une personne fait
une demande d’opération esthétique, c’est souvent en
toute simplicité et non pas dans une attitude de combat,
car elle n’a pas de vrai problème existentiel, ni de
remise en question profonde. Les doutes et les peurs
liés à son apparence s’inscrivent plus tôt ou plus tard,
vers l’âge de quarante à cinquante ans. La beauté sied
à la jeunesse, et vice versa, mais l’on touche là un
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
point sensible puisque la fuite de la jeunesse entame la
beauté.
Entre-temps, la maternité est passée par là. Avec elle,
les modifications hormonales et psychologiques ont pu
entraîner un changement dans la silhouette. La femme
regarde autrement ce corps qui a donné la vie. Il est symboliquement plus riche que son apparence.
Alors, elle en accepte les petits défauts ou elle décide
de les supprimer sans état d’âme. Elle est moins narcissique, elle se tourne vers un enfant, vers un autre corps,
qu’elle doit toucher, aimer pour l’aider à grandir. Sa
féminité est chargée d’un autre sens, moins futile, plus
altruiste.
Elle diffère ainsi de quelques années, des préoccupations
légitimes, liées à sa jeunesse toute proche mais déjà moins
évidente. C’est lorsqu’elle a organisé sa vie de mère,
qu’elle est retournée à ses obligations professionnelles et
sociales que la femme revient à son miroir.
Elle scrute les modifications de son corps, elle s’interroge
et interroge les médecins. Bien qu’occupée par son enfant,
elle fait un retour sur elle-même, d’abord avec indulgence
puis avec une sérénité accrue.
La maternité, même si d’autres suivent, n’est plus une
fin en soi.
La mère voudrait redevenir cette jeune femme qu’elle
a été, tout en admettant qu’elle est aussi une autre. Or, là,
elle doit savoir ce qu’elle veut vraiment. Une maternité
n’est pas une maladie, on peut en sortir indemne, voir
intacte. Elle ne doit pas non plus être un alibi pour se
laisser aller ou s’enlaidir.
La grossesse étant un débordement hormonal, il est
important d’en prévenir et d’en maîtriser les conséquences. On ne mange plus pour deux, c’est un préjugé
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LE CAPITAL BEAUTÉ
révolu. On ne se néglige pas pour mieux se faire dorloter
par les autres. Sans aller vers une médicalisation outrancière, il est préférable de contrôler sa grossesse et d’éviter
la prise de poids.
Avant, comme après l’accouchement, une femme qui
veut rester belle a des devoirs envers elle-même, son
physique et son apparence.
Attendre la fin des biberons et des couches-culottes,
c’est courir le risque de ne plus pouvoir être comme
avant… Le surinvestissement maternel, les dégâts du
temps et de la grossesse sont parfois des prétextes pour
fuir la féminité. Il faut chercher ailleurs les raisons de cette
fuite. Les femmes sont responsables de leur beauté, du
maintien de leur silhouette.
Bien sûr, et le plus souvent, les seins s’affaissent
après la grossesse ou l’allaitement, certaines peaux se
distendent plus que d’autres, le bassin s’élargit après une
ou plusieurs maternités, mais tout cela n’est pas forcément
grave.
Quand une femme ne se reconnaît plus après une ou
deux grossesses, elle doit se poser d’autres questions sur
cette transformation.
La réponse peut être d’ordre psychologique, voire
conjugal. Je reçois beaucoup de femmes qui, après leur
maternité, veulent redevenir les séductrices qu’elles ont
été. Elles avouent ou sous-entendent que leur compagnon
n’est plus sensible à leur beauté, à leur charme… Mais
« avant » les enfants n’étaient pas là : leur arrivée
dans le couple a modifié les cartes. La femme accaparée
par eux, par son nouveau statut a perdu de vue son mari,
oubliant parfois le plaisir sinon la nécessité de la séduction. Et l’homme également, du fait de sa paternité,
modifie son attitude conjugale. La difficulté sera alors de
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
retrouver la vraie vie de couple et plus seulement la vie
de famille.
Bien sûr, la chirurgie esthétique pourra corriger les
modifications induites par la grossesse, et pourra remonter
les seins, atténuer la rondeur des hanches, mais elle ne
fera guère plus. C’est à la femme et à elle seule de raffermir son corps, de retrouver son désir et son plaisir de
séduire. A trente-cinq ans, elle est encore et pour longtemps jeune. Elle a plus de vingt ans devant elle avant
d’accuser le vieillissement. La maternité est, d’une certaine façon, un rempart au vieillissement, mais après elle
la féminité subsiste.
Mais d’autres discours, à propos de la maternité, nous
culpabilisent réellement !
Ce discours est de moins en moins répandu. Les
femmes se sont suffisamment battues pour rectifier le tir.
On n’est plus au temps des maternités nombreuses et successives qui abîmaient le corps de la femme. Aujourd’hui
celle-ci est responsable de son désir d’enfant, elle a les
moyens de récuser tout ce qui peut entraver sa féminité.
Alors, au-delà des discours, elle se doit de cultiver sa
beauté, son épanouissement physique. Sans sacraliser
l’esthétique, il faudrait éviter de la rejeter sous prétexte
que l’on devient mère, que l’on est débordée par le travail
ou le stress. Effacer chirurgicalement les méfaits d’une
grossesse ne suffit pas, puisqu’un corps séduisant ne se
limite pas à un tour de poitrine ou de hanches.
C’est le cas d’une des patientes que vous avez inter-
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LE CAPITAL BEAUTÉ
rogées. A quarante ans, mère de six enfants dont des
triplés, elle en avait assez de sa très forte poitrine. Les
grossesses, bien sûr, en ont augmenté le volume, le poids
et la ptose, c’est-à-dire l’affaissement. Pour être heureuses,
ces grossesses successives ont modifié et alourdi la
silhouette, en déformant la poitrine et le ventre. Il ne
s’agissait pas, dans le cadre de sa demande, de vouloir
exhiber ses seins sur la plage, mais elle voulait en finir
avec ses vêtements trop larges ou ses boutonnières qui
s’écartaient au niveau de la poitrine. Intelligente et dynamique, cette patiente, ravie d’être mère, ne voulait pas
pour autant occulter sa féminité qu’elle délaissait chaque
jour un peu plus.
Certaines interventions et en particulier l’hypertrophie mammaire, parce qu’elle est importante et entraîne
de réelles séquelles au niveau de la statique vertébrale,
sont prises en charge par la Sécurité sociale. Ce qui
fut fait dans le cas de cette femme et permit la réalisation
de l’intervention. Je lui ai donc réduit le volume de ses
seins, et corrigé la paroi abdominale à la fois par une
lipoaspiration, une résection de peau excédentaire, et un
rapprochement des muscles distendus. Cela s’est fait si
vite et si bien qu’elle a eu l’impression d’avoir « vécu un
rêve ». Quand elle nous dit qu’elle a un plaisir quotidien
à se regarder dans la glace, elle est sincère, enthousiaste ;
d’autant que les enfants retrouvent dans leur mère la
femme qu’elle est. Cet exemple est significatif, car trop
souvent les femmes mettent sur le compte de la maternité
une certaine lassitude de leur corps. Or cela coïncide aussi
avec une perte de leur féminité dont elles ne sont pas
toujours conscientes. C’est lorsqu’elles quittent la clinique
qu’elles comprennent que le geste chirurgical leur a
redonné ce plaisir d’être une femme.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
La quarantaine n’est plus, comme certaines le
vivent, ce cap tragique qui marquerait le début de la fin.
Elle est une étape psychologique qui s’inscrit dans la
crise du milieu de la vie, mais qui me paraît dépassé sur
les plans anatomique et physiologique. Les femmes de
quarante ans savent affirmer, convaincre, séduire, exiger
et obtenir.
Elles déroutent les hommes les plus attachés à des
préjugés machistes, et les autres reconnaissent leurs
charmes et apprécient leur présence. Elles sont souvent
obsédées par la pensée ou l’image du vieillissement, or
l’allongement de la vie en déplace les premières traces
autour de la cinquantaine.
J’ai récemment opéré une patiente de quarantecinq ans, en phase de ménopause précoce et qui avait
subi une hystérectomie (ablation de l’utérus). Outre
une faiblesse de la paroi musculaire, elle avait un excès
de graisse qui situé au niveau de son ventre lui donnait
une rondeur très nette. Son fils, âgé de huit ans,
chaque fois qu’il regardait le ventre de sa mère, exprimait sa satisfaction de la voir « enceinte » du petit frère
qu’il souhaitait. Cette situation était évidemment très
inconfortable pour cette femme, car les remarques de
son fils la renvoyaient à une impossible maternité, et
à un cap difficile au niveau de sa féminité. Elle voulait
donc effacer par la chirurgie cette « blessure » visible,
source d’un malentendu gênant. Une simple lipoaspiration, qui a permis d’enlever cette graisse excédentaire
et d’obtenir un ventre plat, a complètement pacifié la
patiente. Voilà un cas fréquent où quelques cicatrices
superficielles valent mieux que des blessures psychologiques profondes.
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LE CAPITAL BEAUTÉ
La beauté peut-elle être une souffrance ?
Une femme belle et célèbre a dit un jour : « C’est
terrible d’être belle ». A cause de sa timidité, qui passe
pour de la froideur, elle a du mal à accepter le désir des
hommes, ne sachant trop comment y répondre.
Bon nombre de jolies femmes, flattées, contemplées
en permanence, croient qu’on ne les aime que pour leur
beauté.
Ce malentendu est sûrement une cause de souffrance.
Une femme (ou un homme) n’est pas éternellement
belle, elle connaît mieux que quiconque le caractère
éphémère de la beauté qui lui est donnée. Surtout si elle
est véhiculée par son image. Si on disait à cette femme
belle et célèbre qu’elle le sera toute sa vie, elle ne trouverait peut-être plus cela si terrible.
Comme tout pouvoir auquel on s’habitue, on
peut entrer dans la dépendance de la beauté, et au
moment de s’en séparer on peut être en état de souffrance. On se sent sûrement frustré, privé de quelque
chose.
Mais au fond, qui nous dit que cette femme dont
vous parlez se trouve réellement belle ? Que son problème n’est pas justement de se sentir moins belle
que les autres la voient ? Qui nous dit qu’elle ne se
trouve pas survalorisée par rapport à sa propre idée de la
beauté ?
On peut se séparer sans souffrance de sa beauté
quand on en prend conscience et quand on ne dépend
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pas d’elle pour exister. Or quand une femme vend son
image, son apparence, elle donne un prix à sa beauté.
C’est peut-être à ce titre-là qu’elle l’a vit comme quelque
chose de terrible.
Dès l’instant où l’on fait de sa beauté, de son corps
et de son visage une valeur marchande, il me semble que
l’on se fait objet et que l’on se dédouble douloureusement.
La femme, l’être humain refoule ses émotions et
ses sentiments pour rester tapi derrière ce double.
« C’est terrible d’être belle » parce que c’est terrible
de devoir coller à son image jour et nuit, jour après jour,
année après année. Il faut sans répit faire coïncider sa vie
intérieure et sa vie quotidienne, avec cette image qui,
bien que démultipliée, reste figée. Il faut sans cesse avoir
l’air belle, même si l’on est fatiguée, triste ou simplement
soi-même. Il faut, vaille que vaille, ressembler à ce
double qui vous précède où que vous alliez. Il faut se
montrer à la hauteur des regards exigeants, habitués à un
visage lisse, un corps parfait, une tenue impeccable et un
sourire qui n’a aucun droit à la nostalgie.
La remarque de cette femme sur elle-même paraît,
de prime abord, présomptueuse, mais je crois que la
beauté reconnue par tous ne supporte ni la faiblesse,
ni la médiocrité. L’intelligence de cette femme est de
l’avoir compris, d’avoir analysé ce dédoublement de
personnalité.
Elle refuse tout simplement de se contenter de son
image, si sublime soit-elle. Si la beauté ordinaire est un
droit pour tous, elle devient un devoir pour cette femme.
Survalorisée par tous, elle se doit de toujours entretenir
son image, et donc de mentir avec son corps.
Parce qu’elle est une forme de beauté incarnée, son
apparence ne lui appartient plus, pas plus sans doute
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qu’aux hommes ou à l’homme qui partage sa vie. Une
chose est sûre : on pardonne difficilement à une femme
très belle des traits tirés, des cheveux mal coiffés ou une
négligence vestimentaire. Mais on ne comprend pas non
plus qu’elle passe son temps à se regarder dans son
miroir, ou à s’occuper de son corps à longueur de
journée. Ce narcissisme exacerbé, obligé, dérange l’entourage parce que la beauté qui a un prix réel n’a pas de
prix ; elle induit plus la contemplation ou le rêve qu’une
réalité triviale et légitime.
L’image de cette femme vend la beauté, s’affiche sur
les écrans de cinéma, mais en plus elle est utilisée, malgré
elle, pour des causes diverses. Et naturellement les
regards jugent son apparence, avant de juger son discours
ou son engagement que l’on voudrait aussi total
que sa beauté. D’autre part, je crois qu’une femme belle
est plus vulnérable qu’on veut bien le croire ; elle n’est
jamais sûre de son image du lendemain. Elle est en permanence soumise au regard et au jugement des autres,
sa vie dépend du prix de sa beauté, de sa cote et de tous
les fantasmes qu’elle suscite et véhicule. Il faut être
sacrément solide pour vivre cela en toute simplicité et en
toute sérénité. Une personnalité qui se structure sur la
beauté et l’apparence doit ériger des défenses imparables, si elle ne veut pas devenir ou se voir comme un
objet.
Quand la beauté est assumée, comprise, contrôlée
comme l’un des éléments de sa personnalité et non
comme l’essentiel, alors elle devient une force que l’on
peut utiliser et dont on peut se servir à bon escient, sans
en dépendre.
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La beauté serait-elle un pouvoir ?
Elle a, elle est un réel pouvoir. Comme tout pouvoir,
elle désarme, elle vulnérabilise les autres ; elle suscite
une réaction de défense dans la mesure où elle est
fascinante. Pourtant il n’est pas nécessaire d’être plastiquement belle de la tête aux pieds. La séduction tient
à un charme, un éclat, né d’un détail physique ou d’une
force intérieure. Le souvenir même de cette séduction
permet de l’ancrer, de la sublimer, d’en faire durer
l’impact. Combien de vies de couples ont basculé à
cause d’une femme plus belle que l’autre, à cause du
désir né d’une rencontre, d’une seule. On n’est jamais
beau ou belle que pour soi, on cultive cette beauté, on en
joue avec l’autre. Il nous faut l’adhésion de l’autre quand
on s’expose à son regard…
Ce privilège génère des relations différentes, il établit
un rapport de forces implicite, qui ne cherche pas à faire
plier l’autre mais à s’y mesurer.
La beauté, comme l’argent, ne fait pas toujours le
bonheur, mais elle y contribue lorsque l’on sait s’en servir
comme d’un atout. Une personne de grande taille par
exemple, séduisante de surcroît, aura a priori plus
d’ascendant et de pouvoir qu’une personne de petite
taille.
On connaît tous des hommes de taille moyenne ou
inférieure à la moyenne qui compensent ce « défaut » par
un autoritarisme souvent déplacé. La taille est bien sûr un
facteur de beauté, de séduction, mais cela ne signifie pas
que toutes les personnes grandes et belles réussiront toutes
leurs entreprises.
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Car il faut aussi avoir le goût du pouvoir et l’intelligence pour l’exercer avec ses propres armes.
La chirurgie esthétique reste pour certains un moyen
de maintenir ce pouvoir médiatique, social ou artistique
acquis. Bon nombre de personnalités de ces milieux ont
recours à la chirurgie pour entretenir leur image. C’est un
appoint qui contribue à rester ce que l’on est, ou du moins
ce que l’on paraît.
J’ai récemment vu en consultation une jeune
Suédoise de vingt ans, mannequin dans une agence internationale. Elle était sublime ! Son nez, ses yeux, sa
bouche, l’ovale de son visage semblaient être dessinés
avec un soin immense. Quand la jeunesse, la grâce et la
beauté cohabitent, le résultat est exceptionnel. Bref,
cette jeune femme qui mesurait près de 1,80 mètre avait
un corps massif et légèrement enveloppé, ce qui ne
correspondait pas aux mensurations exigées par sa
profession.
Elle m’a demandé une lipoaspiration étendue qui
consiste à réduire la largeur des hanches, l’intérieur des
cuisses, la graisse des genoux, des hanches, de la taille et
des bras. Il fallait en fait que je procède à un affinement
global du corps.
Deux mois plus tard, sans cicatrice apparente, et du
fait de la bonne qualité de sa peau, cette jeune fille opérée
avait minci. Elle est somptueuse et la dysharmonie entre
son visage et son corps est effacée.
Son pouvoir ne peut que s’accroître dans sa profession où seule compte la beauté plastique. Une beauté
plastique utilitaire, car je vois beaucoup de jeunes
femmes qui réduisent des seins trop gros, ou augmentent
leur petite poitrine, pour obtenir des mensurations
idéales, et présenter la lingerie féminine dans les défilés
de mode.
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Dans le registre narcissique, j’ai rencontré le cas
d’un homme qui m’a dit : « Je suis beau, je veux l’être
encore plus et le rester. J’aime que tout le monde s’arrête
pour me regarder lorsque j’arrive quelque part ». Si telle
est sa conception de la vie et de la séduction, pourquoi
pas ? Il est libre de se promener avec son miroir dans la
poche, et de se sentir bien ainsi. Il était âgé d’environ
trente ans, je n’avais aucune raison de refuser sa
demande ou de la remettre en question puisqu’il était
possible de l’aider à se sentir plus beau et donc plus sûr
de lui. Un jour il finira bien par accepter les effets du
temps sur sa silhouette, mais cette prise de conscience se
fera progressivement : sa vie se structurera sans doute
autrement et lui apportera d’autres repères pour se situer
par rapport à son image.
Il faudrait préciser que ceux qui recourent à la
chirurgie esthétique appartiennent à tous les milieux
sociaux et culturels. Ils ne sont pas une entité particulière, parce que la beauté est un privilège auquel tout
le monde réfléchit, que tout le monde aimerait posséder.
Ceux qui rejettent ou méprisent le pouvoir de la beauté
ou de la jeunesse se mentent à eux-mêmes. Il est vrai que
le développement récent de la chirurgie esthétique permet
de fabriquer la beauté plus aisément qu’il y a trente
ou quarante ans, mais les progrès sont tels qu’ils
permettent d’obtenir des résultats à la fois importants et
naturels.
Les grandes stars, Greta Garbo, Marlène Dietrich
ou d’autres, étaient des beautés exceptionnelles. Certaines
le sont restées. Mais d’autres qui ne se sentaient
plus conformes à leur image ont préféré se cacher pour
vieillir. Peut-être aussi pour s’épargner le jugement de
leur entourage et du public, ce qui était une manière de
laisser intacte et éternelle cette image mythique.
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Aujourd’hui, en aidant la beauté naturelle à s’améliorer,
on lui assure une longévité qui suit celle de la vie
humaine.
Les gestes simples, comme des injections de collagène
au niveau du visage, un comblement de quelques rides,
redonnent de la jeunesse et de la vivacité à une peau un
peu marquée.
Certaines interventions, faites précocement, auront non
seulement un effet de « correction d’un défaut » mais elles
vont également retarder sa réapparition ultérieure.
Faut-il encore et toujours souffrir pour être belle ?
Dans le domaine particulier de la beauté, tout
dépend bien sûr de la priorité donnée à l’apparence, et de
l’importance accordée au jugement d’autrui. Il y a des
hommes et des femmes qui, sans être exceptionnellement
beaux, disposent de charme et de séduction, sont en tout
cas attrayants, et heureux de l’être.
Quand on est bien dans sa peau, on promène sa
beauté, sa grâce ou son charme avec une attitude naturelle
qui ne laisse transparaître aucune souffrance.
Une certaine forme de souffrance commence avec la
prise de conscience du temps qui passe et des égratignures
qu’il fait à notre narcissisme. Lorsqu’on a compris que
notre corps nous appartient, qu’on est responsable et qu’il
nous fait revendiquer ses différences tout en se fondant
dans la masse, on commence à souffrir. Mais nous savons
bien que le défi, le dépassement de soi sont des comportements inhérents à la nature humaine.
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Dès l’adolescence, on quitte les habits choisis par la
famille, on écarte le mimétisme parental pour aller vers
les autres, ressembler à ses congénères. Pour se faire
beau, pour se faire belle, on fait parfois appel aux artifices
les plus insolites : une coupe de cheveux propre et
nette, une coiffure punk, un visage outrageusement
maquillé ou carrément sans fard. On peut montrer ses
jambes le plus haut possible, cacher ses yeux derrière des
lunettes noires, masquer la forme du visage par une
barbe, ou une moustache… Tout est bon pour ressembler
aux autres, se différencier ou mettre en évidence sa
propre personnalité face à la famille. Tout est bon pour
trouver ses propres critères de beauté en se conformant
d’abord à ceux des autres, en les sélectionnant, en les
adaptant ou en s’en éloignant. Dès lors, on commence à
céder à la mode, à toutes les modes. Il nous faut faire des
efforts pour entrer dans ce corps passe-partout dont
l’image est démultipliée. L’ennui est que tous ces efforts
pour paraître sont fournis au vu et au su de tous, puisque
tous les joggers se retrouvent au même endroit, les sportifs
dans les mêmes clubs de gymnastique, des seins
beaux et nus sur les mêmes plages. Et cette beauté que
l’on a voulue originale se retrouve soudain d’une grande
banalité.
Dans notre société être belle n’est pas un devoir, mais
être en forme est devenu une nécessité. L’obligation d’être
au mieux avec soi-même se double de celle d’être bien
avec et pour les autres.
On souffre pour être belle, mais il n’est pas forcément
question de douleur physique. Se passer une crème
tous les matins, se raser, faire un petit régime ou un peu
de sport sont des gestes tout aussi contraignants que
d’aller travailler tous les jours ou de préparer le repas
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familial. Ce sont des automatismes nécessaires. Rectifier
la courbe de son nez, le volume des ses seins, les plis de
son ventre ou effacer quelques rides, c’est bien sûr souffrir
dans sa chair.
Mais cette souffrance est temporaire et surtout prometteuse de plusieurs années de mieux-être et de mieuxparaître.
Comme partout, des excès existent, et il est évident
que l’on peut rencontrer des personnes qui sont dans la
surenchère permanente de leur apparence. Parfois elles
veulent tout changer, parfois elles ne supportent pas le
moindre signe de vieillissement. Mais à part ces cas aux
motivations complexes, la chirurgie esthétique doit rester
un palliatif comme un autre tant que l’on s’accepte,
tant que l’on ne se confond pas avec son image. Tant que
l’on ne mélange pas l’être et le paraître. Seule cette
confusion entraîne les demandes les plus folles, heureusement régulées par une consultation adaptée. On ne peut
pas tout changer avec un bistouri ou un laser; on ne
modifie ni les gènes, ni les tempéraments, ni la vie des
unes ou des autres. Mais on peut efficacement effacer à
tout jamais de nombreux défauts embarrassants pour
certaines personnalités.
Accepter de souffrir pour être belle, c’est une manière
de ne pas renoncer à soi. Tant que la chirurgie est utilisée
dans ce sens, elle peut et doit se développer en toute
conscience.
En revanche, la laideur ordinaire fait davantage
souffrir. Les personnes disgracieuses ou celles qui
s’enlaidissent à volonté ont sans doute été blessées
narcissiquement. C’est ce message qui passe dans leur
corps et leur apparence.
On peut bien sûr trouver en soi les possibilités de
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dépasser un problème en le minorant. Mais ce problème
prend parfois de telles proportions qu’il aura des
répercussions importantes. Il peut être à l’origine d’une
anorexie, ou d’une boulimie réactionnelle. Dans ce cas,
de façon préventive, il faut mettre tout en œuvre pour
éviter ce type de complication.
Très franchement, il me semble plus douloureux de
s’infliger des corsets psychologiques que de passer par
une intervention chirurgicale somme toute banale pour
plus vite reconsidérer son corps et son image. La paix
avec son corps et dans son corps est un long processus de
négociations avec soi-même. Il faut parfois passer
par des décisions tranchées pour y accéder plus vite. La
voie à suivre appartient à chacun d’entre nous, mais mon
devoir de médecin est d’aider les patients à la trouver en
leur proposant des moyens qui existent et ne les mettent
pas en péril.
Que pensez-vous de l’importance accordée au look ?
Le look est aujourd’hui un critère d’embauche.
Des cours sont donnés aux demandeurs d’emploi pour
optimiser leur apparence. On leur enseigne l’harmonie des
couleurs, des formes vestimentaires. On montre aux
femmes la meilleure manière de se maquiller. On décrypte
la gestuelle de chacun, on leur apprend le maintien, la
démarche.
La beauté, l’apparence sont plus que jamais des
éléments de séduction puisque toutes ces stratégies sont
élaborées pour les valoriser.
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Cela confirme à quel point la beauté s’est démultipliée, à quel point les médias y ont contribué.
Dans cette dynamique, la chirurgie esthétique entre
autres est partie prenante de cette stratégie, mais elle est
un moyen et non pas une fin en soi. Les artistes aussi
bien que les hommes politiques utilisent la chirurgie
esthétique pour améliorer une apparence qui doit plaire
au plus grand nombre. Un sourire, une peau lisse
compte désormais autant, sinon plus parfois, que des
qualités professionnelles ou un discours bien structuré.
Les conseillers en communication sont pléthore pour
étudier, concocter et systématiser des articles pour
« vendre » l’image d’un homme ou d’une femme. Seulement voilà, que ce soit à la télévision, à une tribune ou
dans une consultation de chirurgie esthétique, il y a toujours un moment de vérité qui émerge, par un geste, un
mot, une mimique inattendue. Ce moment de vérité
révèle l ‘authenticité de la personne et s’impose, malgré
les artifices ou la stratégie mis en place. L’authenticité
c’est aussi la beauté de chacun ; l’élégance, la grâce
d’une personne transparaît toujours à un moment ou à
un autre. De la même façon, la vulgarité peut apparaître
sous l’habit le plus brillant. Une apparence pour être
sauve n’est pas toujours convaincante. Si certains
hommes politiques ne passent pas bien à la télévision, ce
n’est pas à cause de leur « look » mais de ce qu’ils sont
réellement.
L’image à la télévision est une loupe grossissante impitoyable : si un homme est « mauvais » à la télévision, il
l’est aussi à sa tribune… Si le « je-ne-sais-quoi » de la séduction ne passe pas ou ne transmet pas, c’est parce qu’il
n’existe pas. On peut retoucher des paupières, les défatiguer, mais on ne donne pas au regard une profondeur ou
une âme différentes.
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On peut exalter la beauté, on ne peut pas la créer.
Bien sûr, l’apparence se cultive, les cours de look
dispensés aux demandeurs d’emploi vont mettre en
exergue les qualités physiques de ceux qui en possèdent.
Tant mieux pour les « beaux » ou les « belles » qui
s’ignorent, tant mieux si cela leur permet de trouver un
emploi. Cela est déjà une porte ouverte sur le milieu professionnel ou la culture de l’entreprise qu’ils sollicitent.
Encore faut-il qu’ils soient à la hauteur de l’emploi
recherché, qu’ils prouvent que cette image présentée à
l’employeur n’est ni fabriquée, ni usurpée. A trop se fier
à l’image, on la vide de son contenu, et on en dépossède
celui ou celle à qui elle appartient. Combien d’hommes
politiques ont tendance à oublier que derrière l’image se
profilent toujours l’homme, son intelligence, sa force de
conviction ?
Évidemment, il vaut mieux regarder quelqu’un qui
porte des lentilles de contact plutôt que de grosses lunettes
qui masquent son regard, mais cette première étape
franchie, et malgré ce qu’on dit, on écoute le discours, on
observe le comportement pour saisir les idées fortes. La
séduction et la beauté ne sont que des sas pour accéder à
l’être humain.
L’habit peut faire le moine à condition qu’il y ait un
moine…
Cela étant, on n’attend pas, on n’exige pas la même
chose d’un mannequin. Cet homme ou cette femme
mettent leur corps au service d’un vêtement, d’un produit
à vendre, pas au service d’une idée. Ce n’est pas un
jugement, mais un constat qu’ils sont notre part de rêve,
pas de réalité. Pour exercer leur métier on leur accorde
le droit de tricher avec leur corps puisqu’il est interchangeable. Il est un instrument de travail : il doit être
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plastiquement beau pour vendre la beauté. Au même
titre que les routiers doivent être forts et musclés pour
conduire leurs engins, et les jockeys menus et souples
pour monter leur cheval. Ils ont le physique de l’emploi,
il ne s’agit pas de look ni d’apparence mais d’un impératif
morphologique, et là, bien sûr, la chirurgie esthétique ne
peut pas grand chose.
L’homme et la femme sont ils égaux devant la
beauté ?
Pour être tout à fait honnête, je ne le crois pas. Ils
ne l’ont jamais été et ne le seront peut-être jamais. Les
individus, la société dans son ensemble sont plus exigeants pour le physique, l’apparence d’une femme que
pour ceux d’un homme. C’est pourquoi les femmes
s’imposent des obligations de résultats que les hommes
ne connaissent pas ou peu. Encore que nous y arrivions
doucement car les hommes deviennent soucieux de leur
beauté.
Il n’empêche, un homme peut être laid ou pas très
beau, il reste néanmoins séduisant par certains aspects.
Son intelligence, ses performances sociales, ses
conquêtes féminines affichées, et plus encore sa notoriété seront des compensations à un physique qui peut
être ingrat.
Dans certains milieux, la richesse matérielle, l’intelligence, le talent d’un homme s’avèrent aussi être
des atouts majeurs. Serge Gainsbourg est un exemple
célèbre et démonstratif. Non seulement son talent, sa
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voix nous faisaient oublier ses oreilles décollées, son
visage anguleux, et ingrat de son propre avis, mais lui
même cultivait son apparence. Or cette « laideur » toute
subjective ne l’a pas empêché de séduire les plus belles
femmes, tant ce créateur brillant et attachant savait mettre
en valeur ses autres qualités.
Par contre, si une femme veut être dans les normes
les plus répandues de la féminité, elle doit fournir des
efforts permanents pour maintenir les signes extérieurs de
sa beauté et de la séduction. N’être ni trop jeune, ni trop
âgée, ni trop soumise, ni trop autoritaire, bref tant de
choses qui la font paraître trop… ou pas assez !
Malgré l’évolution des mentalités, la société n’est pas
encore prête à chasser de son inconscient collectif l’image
de la femme jolie, pudique, naturelle et réservée !
On ne dit plus aujourd’hui à une femme – le supporterait-elle ? – « Sois belle et tais-toi », mais tout de
même… Une belle femme, puissante et brillante à la fois,
instaure malgré elle un rapport de forces au risque, aux
yeux des autres, de perdre et d’occulter sa féminité.
L’homme ou la femme qui cherche la perfection du
corps et du visage a quelque chose à prouver en relation
avec l’objet et non plus avec le sujet. L’égalité de la
femme et de l’homme doit être acquise sur le plan social,
intellectuel, mais elle ne peut l’être sur le plan strictement
biologique. Pour la bonne raison que la beauté plastique
est étroitement liée à l’horloge interne, différente pour
l’homme et pour la femme.
Pour les femmes, cela représente une épreuve
supplémentaire à laquelle nulle n’échappe, bien que
certains traitements médicamenteux régulent maintenant
les méfaits, physiques et psychologiques, du désordre
hormonal.
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L’homme a cette chance de ne pas devoir surveiller
son corps aussi rigoureusement. Il subit moins de
variations métaboliques. A cinquante ans et plus, il peut
encore séduire sans difficulté. Pour une femme du même
âge, à l’évidence, la situation est différente. La ménopause
s’accompagne de modifications de la silhouette et
d u visage que ne peuvent corriger les traitements
substitutifs. C’est aussi une question de peau, celle de
l’homme est plus épaisse, elle supporte la barbe et le
rasage quotidien.
Celle de la femme, plus fine, se distend plus facilement et se marque plus tôt. La femme porte et donne la
vie ; son corps nourricier est soumis à de plus rudes
épreuves.
Ainsi, étant si différents physiologiquement, l’homme
et la femme ne sont pas égaux devant la beauté.
Tous les éléments font que les femmes ont recours
à la chirurgie esthétique plus fréquemment que les
hommes. Une femme fait une demande de lifting vers
l’âge de quarante-cinq à cinquante ans, un homme peut
attendre cinquante-cinq à soixante ans. Dans l’un et
l’autre cas, cette intervention, dont le but est d’atténuer
les effets du temps, sera forcément différente et le résultat
technique aussi, même s’il est satisfaisant. Un lifting
du front et du visage, qui permet à la fois de rajeunir et
souvent d’embellir, nécessite des cicatrices à l’intérieur
et derrière l’oreille. Le principe est de procéder à une
remise en tension des différents plans : la peau, le muscle
et la correction des dépôts graisseux comme les bajoues
et le double menton.
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Les hommes seraient-ils plus coquets qu’autrefois ?
L’homme s’est toujours préoccupé de son apparence.
Les dandys, les élégants, les « snobs » faisaient en
sorte de se vêtir, de se coiffer en fonction de leur milieu,
de la mode de leur époque. Mais si les romanciers et les
historiens les ont largement observés, les femmes, elles,
osaient moins porter leur regard critique sur les
hommes. Pourtant aujourd’hui les hommes volent les
crèmes de leur femme. Ils essaient des shampooings
colorants et posent dans les publicités qui vantent des
produits spécifiquement masculins. Ils s’inquiètent de leur
silhouette… Ils ont leurs défilés de mode.
Les années féministes qui ont suivi les mouvements
de Mai ¬68 ont changé les mentalités. Leurs revendications ont porté les femmes sur le terrain masculin, mais
l’inverse est vrai aussi. Dès l’instant où les hommes ont
pu exprimer leur sensibilité et leurs émotions, ils ont pu
avouer ouvertement leurs préoccupations esthétiques
sans mettre en péril leur virilité. La vogue des cheveux
longs, la mode unisexe les ont poussés un peu plus dans
les sphères de l’apparence, de la beauté et donc de la
mode. Certes, les jeunes premiers au cinéma ont existé,
séduit les femmes au même titre que les stars ont fait
rêver des générations d’hommes ; mais maintenant les
mannequins, les animateurs de télévision les ont remplacés. Cela donne pour les hommes aussi une beauté
naturelle, plus accessible dont s’emparent les stratégies
commerciales pour ouvrir un marché de cosmétiques
masculins.
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Les recherches scientifiques ont permis de créer des
produits adaptés à leur peau, à leurs spécificités physiologiques et anatomiques.
Ce marché ne peut que se développer et inciter les
hommes à s’occuper d’eux-mêmes. Leur coquetterie
potentielle est désormais plus avouable. Et les femmes
l’admettent aisément puisque d’une certaine façon ce
sont elles qui l’ont mise au jour. Elles se laissent volontiers voler leurs crèmes, elles n’hésitent pas à conseiller
leur mari, leur compagnon ou leurs amis à tenter une
démarche vers la chirurgie esthétique. Elles le font avec
naturel et grandeur. En investissant le domaine artistique
de la photo et du cinéma, elles valorisent et transcendent
à leur tour et à leur manière la beauté masculine.
L’histoire de l’art nous dira un jour si l’homme est
lui aussi devenu un support de rêve, un modèle de
l’éternel masculin.
La coquetterie des hommes n’est pas forcément
connotée de féminité. La musculature à la Rambo est très
à la mode, la force physique s’exhibe.
Les barbes, les moustaches sont encore prisées par
les hommes et appréciées par les femmes. Les hommes
médiatisés n’hésitent pas à corriger leur sourire, leurs
paupières, leur silhouette. Ils ont eux aussi envie de vivre
pleinement leur époque, de rester beaux et séduisants.
Certains se sentent mieux quand ils peuvent
s’embellir ou rajeunir.
Ils refusent la fatalité du temps qui passe, et l’esthétique corporelle n’est plus le monopole des femmes. La
preuve, les hommes politiques se font « relooker » et les
mannequins masculins ont une couverture médiatique
aussi importante que les femmes.
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Leurs demandes, leurs motivations sont-elles très
différentes de celles des femmes ?
Sur le plan statistique les hommes consultent moins
les médecins parce qu’ils ne sont pas soumis aux aléas de
leur horloge biologique. Ils n’ont pas ce cycles menstruels, ni de grossesses, mais en ce qui concerne la
chirurgie esthétique proprement dite ils y ont moins
recours du fait de la stabilité et des différences de leur
anatomie. Ils n’ont pas de seins, ni de cellulite. Ils ne
connaissent pas les problèmes de vergetures. Ils vivent
mieux les effets du vieillissement et, du côté de l’embonpoint, le régime s’avère plus efficace pour eux que la
lipoaspiration car leur prise de poids est plus normale, et
d’origine alimentaire.
En revanche, à l’âge adolescent, ils nous consultent
pour corriger leur nez qu’ils veulent souvent plus fin et
droit.
Les hommes adultes ont une forte demande pour les
paupières, les poches sous les yeux parce que ce « défaut
» leur donne une mine fatiguée. Rendre un peu de vivacité
à leur regard est important sur le plan personnel et dans
leur vie professionnelle. Ils souhaitent aussi corriger des
hanches un peu lourdes pour avoir une silhouette plus
élancée, mais la demande la plus forte concerne la perte
des cheveux et la calvitie qui sont des problèmes plus
spécifiquement masculins.
Les motivations des hommes sont parfois étonnantes,
comme cette histoire d’un homme de vingt-cinq ans
que sa fiancée a poussé à me consulter. Il était obèse,
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il pesait 120 kilos et devait se marier. Il est venu me voir,
contraint et forcé par son entourage, en m’affirmant
qu’il se sentait très bien ainsi, mais la pression familiale
avait eu raison de ses résistances. Je l’ai opéré d’une
plastie abdominale qui relève plus de la réparatrice que
de l’esthétique, car il avait ce que l’on appelle « un
tablier ». Je lui ai enlevé 12 à 15 kilos de graisse ; depuis
il a perdu par lui-même près de 20 kilos, il est radieux,
heureux de refaire du sport. J’ai ensuite opéré sa mère,
elle aussi obèse. C’est un vrai plaisir de les voir épanouis,
prêts à changer leur comportement alimentaire et donc
tout un mode de vie. Ceci prouve, non seulement
l’influence des femmes et leur désir de se préoccuper de
la beauté de leur compagnon, mais également les effets
positifs d’une chirurgie alors que l’on se croit hors
normes, obèse à tout jamais…
Les canons de la beauté masculine poussent-ils
autant les hommes que les femmes vers la chirurgie
esthétique ?
Les hommes sont beaucoup moins nombreux que les
femmes à demander une chirurgie esthétique. Les critères
de beauté pour un homme se ne situent pas forcément au
niveau de l’harmonie. Ils sont plus côté de l’élégance, du
charme, d’une séduction globale.
On ne demande pas à un homme d’être « joli » ou de se
grimer, on ne lui demande pas de se maquiller. En
revanche, on attend de lui qu’il assume sa coquetterie,
qu’il évite les fautes de goût et qu’il conserve une allure
sportive ou tout au moins dynamique.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Si les produits cosmétiques et le goût du bronzage
gagnent aussi le domaine masculin, c’est justement pour
permettre à l’homme d’afficher une bonne mine. Autrement dit, lui aussi se regarde dans le miroir. Lui aussi est
de plus en plus concerné par son image, par l’effet qu’il
peut produire sur l’autre. Il n’échappe pas au devoir de
paraître en forme, de s’occuper de son corps.
Mais pour autant, les canons de la beauté masculine
sont moins fluctuants que ceux qui concernent les
femmes. A part la longueur des cheveux et la mode
vestimentaire, le bel homme aujourd’hui n’est pas
fondamentalement différent de celui des années 20.
Le visage anguleux, les moustaches, la barbe
naissante ou affirmée, bref les signes physiques de la
virilité ont toujours plus séduit les femmes que les visages
poupons et imberbes.
Les préoccupations esthétiques majeures d’hommes
restent la silhouette, le rajeunissement du visage, souvent
entamé par les poches sous les yeux, et la perte des
cheveux.
Ils sont de plus en plus soucieux de garder la ligne,
de remédier au ventre bedonnant qui se forme vers la
quarantaine. Ils passent beaucoup de temps à surveiller
leur alimentation, à s’échanger des régimes miracles. Ils
fréquentent les salles de gymnastique, les courts de tennis
ou de squash pour entretenir leur musculature. Ils n’ont
guère envie d’être en reste au bureau face à des femmes
très dynamiques et actives.
Une attitude qui s’explique aussi par la sédentarité
des professions urbaines. On ne peut pas comparer la silhouette naturellement musclée des Nord-Canadiens, des
Groenlandais avec celle des hommes d’affaires parisiens.
Les hommes sont candidats à la lipoaspiration qui
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LE CAPITAL BEAUTÉ
les aide à se débarrasser de leur ventre et de leurs poignées
d’amour. Mais vers la cinquantaine ils demandent aussi
un lifting pour que leur visage ne vieillisse pas plus vite
que leur esprit ou leur corps encore musclé.
Certains font la démarche seuls, mais dans
l’ensemble ils sont poussés, voire accompagnés par leur
femme ou leur amie. Pourtant, jusqu’au bout du processus, ils restent méfiants, craintifs, douillets. Ils offrent un
terrain psychologique plus fragile que les femmes. Ce
qui se vérifie dans tous les secteurs de la médecine ; ce
n’est pas par hasard que les hommes consultent moins
que les femmes.
A leur décharge, je dirais qu’ils n’ont pas dans leur
corps la mémoire de la souffrance que les femmes
connaissent par leurs grossesses et leurs accouchements.
Les hommes sont des grands enfants qui ont besoin
d’être rassurés, mais une fois décidés ils prennent leurs
dispositions, ils se font opérer et contestent très rarement
les résultats.
La jeunesse est, par définition, limitée dans le temps. La
beauté, elle, peut s’adapter au temps, à la vieillesse.
Serait-elle indissociable de la jeunesse ?
La beauté et la jeunesse sont heureusement dissociables, mais de chacune il est souhaitable de faire une alliée,
pas une ennemie.
Mais je suis prêt à parier que, si demain la science
nous proposait un traitement efficace pour cela, nous
l’achèterions tous et sans hésiter.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Ce serait la même chose pour la beauté à condition
de ne pas devenir les clones les uns des autres, car nous
sommes encore soucieux de revendiquer nos différences.
On parle beaucoup actuellement d’une molécule, la
mélatonine, à laquelle on attribue toutes les qualités.
Vigueur, santé, jeunesse, bonne mine, au dire de ces
défenseurs enthousiastes, elle est le médicament miracle
de l’an 2000. Aux Etats-Unis, on assiste à un véritable
raz de marée et ce traitement est utilisé par des millions
de personnes. Il est bien difficile, et c’est le rôle des chercheurs et des scientifiques, de faire la part du rêve et de
la réalité, de l’effet marketing, de l’effet placebo et de
l’effet réel. Seuls, des études précises et le recul permettront de définir l’efficacité et l’innocuité de cette molécule. Il peut aussi s’agir d’un de ces remèdes miracles
qui ont déjà disparu ; chaque année on nous en propose
pour faire maigrir, aider à la repousse des cheveux, traiter
les rides, effacer les vergetures…
Or une femme de vingt ou vingt-cinq ans veut être
de plus en plus belle, elle ne songe pas à rester jeune, ce
n’est pas encore son problème.
Une femme ou un homme de cinquante ans entre
dans le processus du désir de rajeunissement. Plus on est
jeune, plus on cherche la beauté.
Plus on vieillit, plus on cherche la jeunesse que l’on
assimile à la beauté. La peur de vieillir trop vite conduit
parfois à des excès tout à fait regrettables. Combien de
femmes de trente-cinq ans, trop préoccupées par leur seule
apparence, ont déjà eu recours à des traitements qui
finissent par entamer leur personnalité, au détriment de
leur charme et de leur séduction naturels à cet âge-là.
Heureusement, elles sont nombreuses les femmes
de cinquante ans qui sont toujours belles, minces et
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séduisantes. Loin de faire leur âge, du fait probablement
de prédispositions héréditaires favorables, elles ont le
mérite d’avoir entretenu leur beauté en s’occupant
d’elles-mêmes. On peut par exemple aimer fumer, mais il
faut aussi en accepter les inconvénients, et la peau,
fragilisée, ternie, témoigne de façon évidente de cette
intoxication cutanée.
A moins d’un accident, la beauté ne se brise pas,
elle se transforme, alors que la jeunesse s’éteint
doucement.
De quinze à vingt-cinq ans, la femme se découvre.
De vingt-cinq à trente-cinq ans, elle s’accomplit. De
trente-cinq à quarante-cinq, elle s’épanouit. De quarantecinq à cinquante-cinq ans, elle s’entretient, et de
cinquante-cinq à soixante-cinq, elle se maintient.
Nous sommes programmés pour vivre cent vingt ans,
mais entre-temps les cellules ne se régénèrent plus, les
tissus perdent toute élasticité, les muscles s’affaissent, le
squelette se tasse. On a fini d’être jeune quand tous ces
changements s’opèrent, et la préoccupation première sera
de vieillir le moins et le mieux possible.
En son état actuel, ni la science, ni la chirurgie
esthétique ne sont aptes à rattraper la jeunesse passée.
Si certains ont pu, de façon brutale et imagée, parler
de « l’art d’accommoder les restes », la chirurgie
esthétique a prouvé, par ses progrès récents, une réelle efficacité, tant sur le plan physique que psychologique et
social.
Mais jamais, faut-il vraiment le souhaiter, elle ne sera
à la hauteur du rêve faustien, du rêve de beauté ou
d’éternité de l’être humain.
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- II IMAGE DE SOI,
REGARD DES AUTRES
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« La beauté des choses existe dans
l’esprit de celui qui les contemple ».
David Hume .
Certaines de vos patientes sont très jeunes. Elles ont
moins de vingt-cinq ans et déjà elles veulent « se réparer ».
Que pensez-vous de ce refus de soi ?
Parmi les jeunes patientes, il y a les mannequins qui
pour des raisons professionnelles veulent corriger un de
leurs défauts, améliorer leur silhouette. La chirurgie
esthétique est donc un moyen pour elles d’arriver à leurs
fins. Elle a un caractère utilitaire, quasiment professionnel, qui a peu de chose à voir avec l’image de soi.
D’autres par contre ont des problèmes avec leur
image. Elles ne s’attardent pas devant leur miroir, elles
souffrent de cette Autre qui ne leur convient pas. Elles
sont obnubilées par ce qui ne va pas et ne voient plus ce
qui est beau. Or nous savons tous nous fabriquer des idées
fixes, des obsessions qui nous rendent malheureux. Nous
avons l’impression que tous les regards convergent
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
vers ce que justement on voudrait cacher, enfouir.
Quand on est jeune, ce sentiment de honte est encore
plus fort. Il en devient presque handicapant, allant
jusqu’à provoquer des petites déprimes à répétition.
Quelques adolescents polarisent cette insatisfaction,
cette quête de soi sur leur nez qu’ils font corriger plusieurs
fois. Les adolescentes, elles, veulent gommer des
hanches, des fesses ou des cuisses trop fortes. Bien sûr
elles sont jeunes, mais surtout elles souffrent. C’est cet
aspect-là des choses qui m’intéresse en tant que médecin.
Pourquoi faire durer et endurer un mal-être que l’on
peut enrayer ? Pourquoi attendre quand les techniques
existent, avec le soutien affectif des parents pour se sentir
mieux dans sa peau ? Je pense évidemment aux problèmes
normaux, pas aux cas pathologiques d’insatisfaction
ou de rejet de soi.
J’ai eu le cas d’une jeune patiente, Sophie, qui est
venue me demander de lui diminuer les seins, de lui faire
une lipoaspiration des cuisses. Elle a avoué penser à la
chirurgie esthétique depuis l’âge de quinze ans. Elle en
avait assez, disait-elle, du regard des vendeuses
lorsqu’elle demandait un soutien-gorge de 95 double D.
Elle se sentait très mal dans sa peau. Sophie fait partie de
ces patientes chez qui la détermination et la confiance
donnent d’emblée un aspect très positif à la décision.
D’autant que dans son enfance elle était atteinte d’une
maladie grave des capillaires et des vaisseaux sanguins.
Pendant sept ans, elle a été traitée à la cortisone, ce
qui entraîne d’importantes modifications morphologiques, notamment au niveau de la répartition des
graisses de l’organisme. Guérie de sa maladie, elle a
voulu consciemment « réparer » les méfaits de ce long
traitement, à la fois pour oublier ces années de souf-
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
france, mais aussi pour devenir la jeune femme vive,
insouciante et séduisante qu’elle est réellement. Une
revendication très claire, tout à fait légitime et rassurante.
Comme toutes les jeunes femmes, qui dans son cas
prennent une décision de ce type, elle voulait mettre
un terme à ces maux qu’elle avait endurés et ne plus se
sentir obligée de porter des jupes longues et des pantalons
larges pour cacher ses rondeurs. Elle voulait, par cette
correction chirurgicale, exprimer son dynamisme
réel refaire du sport, être coquette. Quand elle est venue
me voir, malgré sa détermination, et peut-être à cause
des espoirs importants qu’elle mettait dans cette intervention, il me fallait être toujours aussi prudent, réservé, bien
insister sur les inconvénients, non pas pour la faire
changer d’avis, mais pour lui exprimer l’exacte réalité de
nos possibilités.
Je l’ai opérée au mois de juillet, et elle a donc profité
de cette période de vacances pour passer en famille et
discrètement les suites opératoires.
Le résultat correspondait à ce qu’elle espérait et, dans
la logique de sa motivation, elle a continué par des efforts
personnels à améliorer et entretenir son résultat.
A aucun moment cette jeune femme n’a considéré la
chirurgie esthétique comme une source de difficulté ou de
remise en question particulière. Au contraire, elle le dit
elle-même, elle ne comprend pas qu’on en fasse un
problème de conscience vis-à-vis de soi. Amincie,
rassurée, elle a tourné une page sur son passé et, si les
souvenirs de sa maladie ne sont pas complètement effacés,
les marques qu’elle portait sur son corps ont disparu. A
elle, maintenant, de reprendre le cours d’une vie normale,
d’exprimer sa féminité et, pourquoi pas, de se laisser aller
de temps en temps à une gourmandise qu’elle corri-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
gera ensuite par quelques restrictions alimentaires ou un
peu de sport. Je garde précieusement cette jolie lettre de
remerciement, écrite par sa mère, qui dit : « Je lui ai donné
la vie, vous lui avez donné la joie de vivre ».
Chaque patiente porte en elle un message spécifique
qu’il faut savoir décoder si l’on veut, comme le témoigne
cette histoire, retrouver des atouts que l’on croyait
perdus.
A propos d’histoire particulière, et à l’opposé du cas
de Sophie, je me souviens de cette patiente âgée de
quatre-vingt-quatre ans venue pour un lifting du visage.
Certes, on se demande d’abord ce qui à cet âge peut
motiver une intervention de type esthétique bien que, et
les examens biologiques l’ont confirmé, il n’y eût dans
son cas aucune contre-indication médicale particulière.
Cette femme avait connu et aimé un homme il y a cinquante ans. La guerre les a séparés, ils se sont quittés en
se promettant de se revoir cinquante ans plus tard à un
endroit précis. Ils ont vécu chacun de leur côté, se sont
mariés et ont mené une vie normale. Cette femme voulait
un lifting pour être belle à ce rendez-vous avec
l’homme qu’elle n’a jamais oublié. Je vous laisse
imaginer l’émotion que l’on peut ressentir devant un tel
discours.
Vive, dynamique, elle avait bon pied, bon œil pour
rejoindre le fiancé de sa jeunesse. Des examens très
spécifiques ont été faits pour être sûr d’éviter toute complication, et l’intervention s’est passée très simplement.
Les suites opératoires n’ont posé aucun problème
particulier chez cette femme qui est restée sur son nuage.
Elle est revenue me voir et j’ai su, le monsieur tant attendu
n’était pas au rendez-vous pour la bonne raison qu’il
était hospitalisé. C’est son fils qui était là, à sa place,
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
pour lui dire qu’elle pouvait aller à l’hôpital où l’attendait
son père.
Voilà une jolie histoire où le souvenir de la beauté et
de l’amour donne tout son sens à une intervention apparemment banale. On ne peut vraiment pas dire que la
beauté n’est qu’une affaire de jeunesse, cet exemple
prouve le contraire… Même au cours de la vieillesse, elle
peut s’avérer utile et répondre à un désir de séduction et
de bonheur.
Raphaël a écrit : « Pour peindre une femme, il me
faudrait en voir plusieurs… » Vous-même, vous
référez-vous à des modèles ou à des mensurations
précises pour opérer le corps ou le visage d’une
femme ?
En tant qu’artiste, il était nécessaire pour Raphaël de
nourrir son imaginaire de plusieurs représentations de la
femme. Le chirurgien plasticien n’est pas dans l’imaginaire,
mais dans la réalité. Nous opérons en trois dimensions une
personne vivante et animée, unique, qui a sa propre
personnalité. Contrairement à un peintre, il ne s’agit pas
de retrouver une harmonie absolue, mais de réparer une
partie d’un ensemble pour l’assortir à cet ensemble. La
beauté en peinture et en sculpture a des lignes et des
formes qui n’obéissent pas aux mêmes critères que ceux
d’un chirurgien plasticien.
Chaque patient a des données morphologiques très
spécifiques dont il faut tenir compte, des proportions de
telle ou telle partie du corps qui lui sont personnelles
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
qu’il faut prendre en considération pour que l’intervention
s’intègre bien dans cet ensemble. Il s’agit donc d’adapter
une technique et un geste à chaque cas particulier et non
pas de refaire une image complète ou un moule nouveau.
Chaque patient a son équation personnelle, et il est
indispensable d’essayer d’obtenir un rapport idéal, qui
conduirait en fait à une standardisation et à une uniformité,
au détriment de la personnalité.
Et puis il faut aussi tenir compte des désirs du
patient ou de la patiente. Certes, il ne s’agit pas non plus
de faire exactement et systématiquement ce que chacun
demande, car cela relève parfois de l’imaginaire ou du
fantasme invivable quotidien. D’où l’importance de la
consultation et de la discussion ouverte qu’il faut avoir.
Mais pourquoi refuser à une jeune femme une poitrine un
peu plus forte que celle que les dimensions du prêt-àporter lui imposeraient ? Pourquoi se conformer à des
chiffres normalisés qui n’ont en fait aucune valeur réelle
au niveau individuel ?
Le chirurgien plasticien doit porter tous ses efforts
sur la finesse et la précision de ses gestes, ainsi que sur
l’enseignement qu’il peut trouver auprès de ses
confrères, au cours de congrès et de discussions. Mais
quel enseignement aussi il trouve auprès de ses patients !
Ce dernier est essentiel, il est la concrétisation du geste
technique et la dimension réelle de l’intervention dont
l’expression va bien au-delà de la modification d’une
forme.
L’expérience, la maîtrise des techniques font
qu’aujourd’hui un bon chirurgien plasticien peut dessiner
un sein ou un nez en fonction de l’ensemble du corps des
patients. Plus on opère avec un esprit critique, une lucidité
et un recul permanents, plus l’expérience permet
d’assurer un bon résultat et des suites satisfaisantes. Les
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
patientes d’ailleurs n’ont aucune envie « d’être normalisées », car, même si elles tendent vers un idéal, c’est en
fait pour mieux s’accepter qu’elles demandent la correction de leurs défauts.
La vocation d’un chirurgien plasticien est justement
d’exalter une beauté potentielle mais masquée par des
imperfections. Il ne s’agit pas, à la manière d’un Pygmalion, de rechercher une perfection à imposer aux
patientes. D’ailleurs, ces mensurations souvent rapportées
qui gardent la froideur des chiffres ne donnent pas
forcément plus de charme, ni plus de grâce, ni plus de
beauté au corps. Répondre à un problème en utilisant les
données qui nous sont proposées, c’est le rôle du chirurgien
plasticien, c’est une mission qui en soi est formidable,
mais il n’existe pas d’arithmétique de la beauté.
Renoir et Rubens nous présentent des splendeurs aux
formes généreuses. La Vénus au miroir, de Vélasquez est
bien différente de La Naissance de Vénus, de Botticelli,
toutes les deux superbes. Ingres dans ses nombreuses
études, et notamment La Grande Odalisque dans sa
recherche de la perfection, offrant des formes et des
courbes parfaites, n’hésitait pas à transgresser l’anatomie
normale, en modifiant la longueur de la colonne vertébrale
et les différentes proportions d’un corps.
Je suppose que vous refusez certaines demandes et que
vous en encouragez d’autres … Selon quels critères
allez-vous dans un sens ou dans l’autre ?
Les demandes opératoires ont beaucoup augmenté en
vingt ans, mais les techniques aussi ! En fait, l’évolu-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
tion a été importante autant que le plan quantitatif que sur
le plan qualitatif Nous sommes passés d’interventions
globales, standardisées, identiques dans tous les cas,
à des actes où les indications sont de plus en plus
affinés, ponctuelles et précises. Par exemple, on ne se fait
plus « refaire le nez » comme il y a vingt ans, de façon
globale, mais on procède à une analyse beaucoup plus
minutieuse, en étudiant la bosse du nez, la base, l’élargissement de la pointe, la courbure des narines. C’est un
véritable protocole opératoire qui est établi, où chaque
temps est bien noté, échappant ainsi à la standardisation
et à l’uniformité. Ainsi peut-on corriger un tout petit
défaut, sans avoir à reconsidérer l’ensemble de la
structure.
Les techniques ont permis de faire évoluer les
demandes et d’obtenir des résultats plus naturels, plus
discrets et plus adaptés à la personnalité et à la motivation
de chacun.
Chacune des interventions a progressé dans son
ensemble, mais s’est également morcelée : on peut ainsi
réaliser un lifting du cou, ou une opération portant
uniquement sur le regard, sans avoir à toucher le reste du
visage. Et chacune de ces techniques nouvelles vient
s’ajouter à l’ensemble de l’arsenal thérapeutique dont
dispose le chirurgien pour lui permettre un résultat plus
naturel.
D’autre part, ces nouvelles méthodes ont répondu à
des demandes latentes, mais qui ne pouvaient s’exprimer,
faute de solution. C’est le cas de la lipoaspiration, des
micro-implants de cheveux, ou du laser. Des problèmes
ont toujours existé sur le plan esthétique, mais ils
ne trouvaient pas de réponse simple, satisfaisante,
efficace, sans risque.
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
Prenons le cas de la calvitie : les greffes de cheveux
permettaient l’implantation de dix à vingt cheveux en
même temps, et des techniques plus lourdes encore,
étaient pratiquées comme les lambeaux de rotation d’un
ensemble de cheveux.
Pour être efficaces, ces moyens ne donnaient pourtant
pas un résultat satisfaisant. La microgreffe de cheveux ou
la greffe cheveu par cheveu a résolu de façon « élégante
» ce problème. Avec de tels résultats, les demandes, qui
jusqu’à présent ne s’exprimaient pas faute d’une réponse
simple, ne cessent d’augmenter.
La lipoaspiration est une technique révolutionnaire
qui a permis de remédier à toutes les disgrâces corporelles
liées à une surcharge localisée de graisse. Certes, elle n’en
supprime pas les causes qui sont hormonales, circulatoires
et héréditaires, mais elle en corrige les conséquences. Le
terme de cellulite est impropre, car il peut faire penser à
une infection, alors qu’il ne s’agit que d’une imprégnation
hormonale, normale chez la femme, mais inesthétique
selon les canons de la beauté d’aujourd’hui. La lipoaspiration est devenue la demande la plus importante, non
seulement en chirurgie esthétique, mais toutes interventions confondues.
Ces deux exemples de la lipoaspiration et des
microgreffes de cheveux apportent des réponses efficaces,
partielles ou totales selon les cas. Il est fort probable qu’un
jour on trouvera un traitement hormonal qui permettra soit
d’éviter l’apparition de la cellulite, soit d’empêcher la
chute des cheveux. Car ces deux manifestations ne sont
que des effets secondaires de processus hormonaux. Entre
autres progrès, une évolution importante se dessine
actuellement avec l’utilisation du laser pour certaines
rides du visage.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Il s’agit d’un contrôle très précis du laser, qui
permet de retirer des couches superficielles de la peau, de
l’ordre du dixième de millimètre, facilitant à la fois sa
régénérescence et son rajeunissement. Cette technique
récente fait partie des espoirs importants de la chirurgie
esthétique, et le temps nous dira l’efficacité de ses
résultats.
L’une des demandes les plus fréquentes est celle des
patientes qui souhaitent des fesses plus fermes et plus
remontées. Or, on ne peut, sans cicatrice inesthétique,
procéder à ce lifting des fesses, comme cela se fait pour
les seins. Pour y parvenir, il faudrait savoir tonifier les
muscles fessiers, redonner de l’élasticité à la peau, savoir
augmenter le volume des fesses, sans en modifier
l’apparence et le naturel.
Si l’on sait par la lipoaspiration retirer de la graisse
par des mini-incisions, véritable endochirurgie, la qualité
du résultat dépend en fait de la rétractation de la peau. Or
cette rétractation est meilleure lorsque la patiente est plus
jeune. Mais pour celle qui présente à la fois un excès de
peau et un défaut d’élasticité, nous n’avons pas de réponse
satisfaisante.
Arriverons-nous un jour à redonner à la peau cette
élasticité et cette tonicité qu’elle perd avec le temps ? Très
probablement, et c’est un des progrès de demain qui ne
sera peut-être pas d’ordre chirurgical, un traitement
médical viendra probablement renforcer et rendre plus
durable l’élasticité des tissus. D’autres problèmes
n e trouvent qu’une mauvaise réponse : par exemple
l’excès de peau au niveau de l’intérieur des bras, la peau
qui plisse au niveau du coude, et d’autres détails pour
lesquels il convient de ne pas faire de fixation.
Une demande tout à fait particulière et heureuse-
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
ment rare est celle qui émane des transsexuels. A titre
personnel, je préfère ne pas intervenir. Ce sont des
domaines très complexes, qui traduisent une structure psychologique particulière, et ne relèvent pas exclusivement
de la chirurgie esthétique. La réponse chirurgicale à cette
demande d’identité doit être mûrement réfléchie. Elle
nécessite une organisation spéciale, basée sur le travail
d’équipes pluridisciplinaires et soutenue par la collaboration
de psychothérapeutes. C’est une spécialité à part entière,
qui n’est pas de la compétence des chirurgiens plasticiens
en général.
Pour de tels cas, il existe quelques centres, dans le
secteur public ou à l’étranger, qui sont tout à fait structurés
et adaptés. Outre les problèmes d’ordre psychologique,
parfois impossibles à résoudre, il persiste un certain
nombre de difficultés techniques. La transformation
extérieure et physique d’un homme en femme est
possible, avec une apparence très satisfaisante. Par contre,
la transformation de femme en homme nécessite des
techniques très compliquées sans la garantie du résultat
escompté.
Les demandes qui nous sont faites sont parfois
l’expression d’un narcissisme extrême, quasi pathologique, ou d’une fixation ancienne pour laquelle une
intervention chirurgicale n’est pas la réponse adaptée.
Elles ne correspondent pas à une réalité anatomique et
souvent ces patients ne savent d’ailleurs pas l’exprimer.
D’autant que l’insatisfaction fait partie du profil psychique spécifique de ces patients. Accepter de les opérer,
c’est devenir leur instrument et entrer dans une relation
que le patient recherche, mais qui ne correspond pas à
l’éthique de notre profession.
Savoir déceler les problèmes de ces patients avant
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
de les opérer n’est pas toujours évident. Ils viennent en
consultation avec des photos d’eux-mêmes depuis leur
naissance, expliquant et racontant leur vie étape par étape.
Parfois, il est difficile devant un discours apparemment
normal, et une disgrâce réelle, de déceler la motivation
plus complexe qui explique certaines insatisfactions,
malgré un résultat correct.
Que faire lorsqu’une patiente dépressive s’imagine
avoir tous les problèmes de la terre, se croit laide et inutile
? Que faire lorsqu’elle souhaite une intervention qui lui
redonnera, selon elle, la force et l’assurance qu’elle
cherche désespérément ? Faut-il y répondre et de quelle
façon ? Il est évident que c’est affaire de cas particulier,
ce qui fait à la fois l’intérêt de cette spécialité, mais sa
complexité aussi. Cette dimension humaine est essentielle
si l’on veut donner un sens réel au geste que l’on fait. Il
ne s’agit donc pas de se comporter uniquement comme
un chirurgien plasticien esthétique, ou réparateur, mais
aussi comme un ami ou un confident, tout en respectant
des limites qui doivent éviter toute ambiguïté facile dans
ce contexte. A une patiente qui récemment me disait :
« Docteur, comment expliquer chez vous cette sérénité,
alors qu’en tant que chirurgien vous êtes soumis à une
tension permanente et recevez les patientes qui vous
expriment leurs problèmes ? ».
J’ai répondu simplement : « Madame, je n’ai pas du
tout l’impression, ni d’être sous tension, ni d’être accablé
par les problèmes que vous exprimez, mais l’intérêt que
je leur porte, et l’attention particulière que je leur consacre
sont d’autant plus faciles à manifester qu’ils sont la réelle
dimension de ce métier que je fais avec passion, donc avec
patience ».
En revanche, il existe un certain nombre d’inter-
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
ventions que l’on se doit d’encourager, car on sait à quel
point le résultat sera gratifiant et satisfaisant. Par exemple,
je n’hésite pas à conseiller à des parents, un peu hésitants,
de faire opérer leur enfant pour ses oreilles décollées,
lorsque celui-ci manifeste des contrariétés liées à son
milieu scolaire.
La correction de ces petits défauts esthétiques répare
en profondeur des déséquilibres psychologiques, qui
peuvent prendre des proportions graves.
Certaines adolescentes vivent mal une hypertrophie
mammaire : ces seins qu’elles jugent trop volumineux,
qu’elles considèrent comme une disgrâce voire une tare !
Il s’agit donc d’opérer une jeune femme, de réduire le
volume de ses seins et de laisser des cicatrices dont on ne
connaît pas toujours le devenir à long terme. Mais dan la
très grande majorité des cas, les patientes sont soulagées,
elles remettent des vêtements qu’elles n’osaient plus
porter, un tee-shirt à même la poitrine sans soutien-gorge,
et font abstraction des cicatrices. Or ce problème était
omniprésent dans leur vie, aux séances de gymnastique,
aux cours de danse, dans les surprises-parties, les soirées
amicales, ou d’autres circonstances agréables mais
assombries par leur complexe.
Quand on a vingt ans, et peu ou pas de poitrine, les
problèmes sont du même ordre. Malgré son charme et sa
jeunesse, une jeune femme se sent mal à l’aise à cause de
ses seins réellement petits. Lorsqu’elle vient seule en
consultation exprimer ce problème, elle parle comme une
femme mûre, exprime des problèmes douloureux, et fait
état de l’incompréhension totale de son entourage. En
particulier du père, souvent opposé à une intervention
chirurgicale, qu’il ne considère jamais ou rarement
utile pour sa fille. Alors il faut longuement discuter
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
avec la patiente, recevoir le père, seul, et lui parler
franchement. Il faut le mettre en confiance, s’impliquer à
titre personnel, pour l’aider à vaincre cette anxiété
naturelle, qui entraînera une grande satisfaction de sa fille
et son propre soulagement. Gérer cette relation est unes
responsabilité qu’il faut pouvoir et savoir assumer, en
considérant l’une et rassurant l’autre, en dédramatisant au
mieux la situation pour les aider l’une et l’autre à travers
cette décision.
L’opération d’augmentation des seins comporte de
très nombreux avantages : l’implant qui est mis derrière
le sein ou derrière le muscle n’empêche en aucun cas ni
les grossesses, ni l’allaitement. Des radios, et des examens
du sein sont tout à fait possibles et normaux, et la cicatrice
qui résulte de cette intervention est très petite. L’inconvénient
qui est de mal supporter l’implant est rare. Et, c’est important,
cette intervention est totalement réversible, l’implant
pouvant être retiré par la même cicatrice discrète. Ces
avantages expliquent la conviction avec laquelle on peut
défendre un acte, lorsque l’on estime que ses bienfaits
sont réels. Ils aident à passer un cap difficile, à donner à
la patiente l’assurance qui lui manque. De plus, il est
nécessaire d’avoir l’approbation de l’entourage pour le
bien moral et psychologique des patients.
La beauté est, a toujours été, une exigence humaine
qui a besoin de modèles et d’identification. Mais à partir
du moment où une société démultiplie son image, et donc
ses valeurs, son désir de beauté, elle rencontre le risque
d’y perdre sa culture et son image originelles, et en même
temps l’avantage que plusieurs cultures se mêlent et
se confrontent. Que certaines femmes orientales
désirent ressembler aux femmes occidentales, cela
reste marginal, mais ce n’est pas étonnant dans ce
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
contexte. A l’inverse, certaines Européennes rechercheront le teint hâlé, les couleurs exotiques de l’Orient. On a
connu la mode des coiffures dites « afro »… Michaël
Jackson s’est fait blanchir la peau, ou certains mannequins
métissés atténuent la forme épatée de leur nez.
Pourquoi ne pas octroyer le droit à certaines femmes
d’être comme le plus grand nombre en gommant leurs
différences physiques, leur accent ou l’aspect de leurs
cheveux ? Dans le brassage actuel des cultures, ce
processus est logique. Mais cela ne signifie pas que l’on
tende à obtenir un physique uniforme, stéréotypé. Les
racines culturelles ne s’effacent pas aisément, et la
personnalité de chacun persiste au travers de son image.
Les femmes et les hommes vivent leur époque, et il
est normal qu’ils en suivent les canons de beauté.
Débrider ses yeux ou blanchir sa peau n’est pas sans
risque Fort heureusement, ces demandes sont rares ; la
chirurgie esthétique prône la modération et cherche au
contraire à valoriser les caractéristiques propres à chaque
patient. Ceux ou celles qui nous prêtent d’autres pouvoirs,
ou qui nous font des demandes incongrues, ne connaissent
pas la réalité de notre profession ni ses limites techniques
et éthiques.
La beauté démultipliée fait peut-être de chacun de
nous un Narcisse en puissance. Lorsque l’on recourt
à la chirurgie esthétique, le fait-on pour soi ou pour
l’autre ?
Dans la mythologie grecque, Narcisse est le fils d’un
dieu des fleuves et d’une nymphe. Il était très beau et
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
toutes les jeunes filles en tombaient amoureuses. Mais sa
vanité était telle qu’aucune femme ne trouvait grâce à ses
yeux. Il était comblé par lui-même. Au point qu’un jour
il crut rencontrer l’âme sœur en découvrant son propre
reflet dans un étang aussi lisse qu’un miroir. Il parla à
son reflet, se pencha pour en embrasser les lèvres et bien
sûr le visage disparut. Dépité, il se plongea un couteau
dans la poitrine et mourut de s’être trop aimé. Les dieux,
tristes de voir disparaître un veau représentant de
l’espèce humaine, firent apparaître une jolie fleur blanche,
à l’endroit où Narcisse s’était donné la mort. Cette fleur
porte son nom.
Qu’il s’agisse de Pygmalion ou de Narcisse, la
mythologie grecque est difficile à transposer dans notre
réalité quotidienne. Certes, il faut s’aimer soi-même,
pour aimer les autres et en être aimé, mais il ne s’agit pas
là de narcissisme. Vouloir valoriser son capital beauté ou
harmoniser son apparence physique par rapport à une
jeunesse et un dynamisme intérieur ne sera pas non plus
une manifestation du narcissisme exacerbé. Il s’agit au
contraire d’un comportement normal qui témoigne d’une
recherche et d’un désir d’équilibre et d’harmonie.
Dans ce cas, la chirurgie esthétique est d’un grand
secours et chaque intervention est alors et avant tout faite
pour soi. Corriger un défaut visible, un nez disgracieux,
des oreilles décollées ou un vieillissement prématuré de
la peau relève du même état d’esprit.
Pourquoi perdre foi en soi alors que les remèdes
sont à notre portée, pourquoi rester blessé quand il est
simple de se réconcilier avec sa propre image ? Se faire
plaisir, faire plaisir à son corps. Je ne connais pas une
seule femme qui ne soit contente de sortir de chez le
coiffeur, d’un institut de beauté ou d’une boutique de
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
vêtements. S’embellir, c’est bien sûr se faire plaisir. Et
cela est de plus en plus vrai pour les hommes aussi…
De même, le vieillissement prématuré attriste certaines personnes puisque leur apparence extérieure est
trompeuse. Elle n’est plus à la mesure de leur dynamisme
et de leur énergie. La chirurgie esthétique devient alors
un recours plus simple qu’on ne le pense. Et les résultats
sont gratifiants pour ces personnes qui peuvent enfin
paraître leur âge.
C’est l’instinct de la jeunesse qui les anime à nouveau et change leur vie. Bien sûr, j’ai rencontré des
« Narcisse » qui étaient d’une grande complaisance
envers eux-mêmes. Leur jugement, leur valeur sont en
décalage par rapport à la réalité. Et leur bonheur est
d’abord de se complaire en eux-mêmes, or cette quête
du bonheur passe par une recherche de la perfection.
Cette démarche, quand elle est uniquement centrée sur
soi, ne correspond plus aux possibilités ni à la fonction
de la chirurgie esthétique. Rentrer dans le jeu de Narcisse
n’est pas franchement mon objectif de praticien.
Au contraire, en réparant une image et une apparence, je
voudrais permettre à une personne de mieux s’intégrer
dans une société.
J’ai eu affaire à des femmes qui venaient pour
répondre au seul désir de leur mari ou de leur compagnon.
Leur demande est certes plus problématique,
puisqu’elles viennent uniquement pour l’autre, mais elle
reste légitime dans la mesure où elles l’assument pour
elles et pour leur couple. Alors, et c’est également un
domaine intéressant, il s’agit d’être à la fois à l’écoute des
deux personnes et, dans la mesure où le désir de
l’intervention est réellement partagé, d’essayer d’obtenir
un résultat qui aura pour but de renforcer le couple.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Dans cette recherche de valorisation esthétique, pour se
trouver belle, pour s’aimer, pour se sentir bien dans sa
peau, de nombreux moyens sont possibles, allant de la
gymnastique au régime, au cours de danse ou à une cure
psychanalytique. Mais dans certains cas la chirurgie
esthétique se révèle comme la thérapie la plus radicale et
la plus adaptée à ce désir de changement.
L’image de Narcisse s’est brouillée parce qu’elle
n’était qu’un trompe-l’œil. Mais le regard des autres, le
regard sur soi, lorsqu’il est lucide et équilibré, n’égare
personne. Dans les entretiens que nous avons avec les
patientes, il est facile de discerner leurs véritables
motivations.
Celles-ci sont le plus souvent cohérentes, légitimes.
Quand ces motivations n’apparaissent pas simplement,
ou quand elles sont une manifestation d’instabilité, il
faut différer l’intervention et suspendre toute décision.
Les patientes qui n’expriment pas clairement leur désir
resteront insatisfaites même si le résultat est techniquement bon.
Oscar Wilde nous livre une réflexion intéressante
sur l’image de soi. S’étonnant que le lac dans lequel
Narcisse se noya restait d’une inconsolable tristesse, les
Oréades, divinités des bois, s’entendirent répondre : « Je
pleure pour Narcisse, mais je ne m’étais jamais aperçu
que Narcisse était beau. Je pleure sur Narcisse parce que
chaque fois qu’il se penchait sur mes rives, je pouvais voir
au fond de ses yeux, le reflet de ma propre beauté ».
Et Paulo Coelho de conclure : « Voilà une belle
histoire, dit l’Alchimiste ».
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
Que pensez-vous de la chirurgie mise au service d’un
certain art ? Je pense à Orlan, cette femme qui n’en
finit pas de transformer son corps…
Orlan est une personne qui, adolescente, se travestissait en homme et qui, adulte, se travestit en femme. Je
dirais même en femmes plurielles. Aujourd’hui, en sept
opérations chirurgicales, elle s’est dotée du front de
Mona Lisa, de la bouche d’Europa, peinte par Boucher,
du menton de la Vénus de Botticelli, des yeux de Psyché
peinte par Jérôme.
Restent deux opérations que comme les autres elle
mettra en scène, filmera et vendra en cassettes vidéo. Les
médecins et le personnel qui participent à son spectacle
médical sont habillés par Paco Rabanne.
Elle commente son film qu’elle étaye de lectures de
poèmes. On peut parler de mise en scène, de coup
médiatique, mais derrière tout cela cette femme se soumet
aux lois des canons de la beauté.
Mais est-ce bien de l’art ? Est-ce bien de la chirurgie
esthétique ? Tout cela ressemble à un montage purement
médiatique, une sorte de spéculation intellectuelle, sans
aucune preuve tangible. Quand bien même Orlan aurait
demandé toutes ces transformations, elles sont techniquement impossibles. Un modèle de front, de bouche
ou de menton ne peut en aucun cas être reproduit parfaitement par une intervention chirurgicale. C’est donner au
chirurgien un pouvoir qu’il n’a pas et au modèle humain
une malléabilité qui n’existe pas ; ceux qui ont refusé
d’opérer Orlan sont très nombreux et bien avisés.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Orlan n’est pas dessinée comme la Joconde, elle ne peut
pas avoir obtenu son front… Pour la raison très simple
qu’un front, par exemple, est la résultante de plusieurs
structures osseuses associées, et non modifiables.
La boîte crânienne a un rôle fonctionnel, celui de
protéger le cerveau selon un impératif architectural précis,
avec ses piliers, ses lignes de tension. Le cuir chevelu
et la peau du front ne peuvent être modelés à l’infini. Des
muscles, des nerfs et des vaisseaux y circulent, qui
imposent le respect de règles chirurgicales.
Derrière cette apparence, il y a une fonction que
l’on ne dénature pas à volonté. D’autre part, en chirurgie,
on ne peut accéder à toutes les régions anatomiques
sans risquer de provoquer des lésions. Orlan affirme vouloir un menton de la Vénus de Botticelli, mais un menton
a aussi une fonction ; il est lié aux maxillaires, aux dents,
à la forme originelle d’un visage. On peut opérer le menton, le corriger, on ne peut en fabriquer un autre. Ces
figures qu’Orlan s’impose sont des chimères : elle
s’approchera de l’original, plus ou moins près, elle ne
l’aura jamais exactement. Mais entre-temps elle aura
certainement assouvi quelques fantasmes, et d’autres avec
elle. Cela relève, pour moi, peut-être pas d’une pathologie
psychiatrique, mais d’une démarche à caractère surréaliste. Ethiquement, techniquement, la chirurgie esthétique
ne suit pas ; sa vocation n’est pas de rendre les gens autres
que ce qu’ils sont, mais de les aider à vivre autrement,
sans quitter le domaine du réel.
Orlan fait de son corps une pâte à modeler : en
devenant son propre artisan, en prenant les autres pour
des instruments, elle nie ce corps en tant que sujet. Ceux
qui travaillent pour elle et sur elle jouent un jeu. Il est
difficile de dire dans quelle mesure ils partagent réelle-
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
ment ses convictions. Se refaire entièrement, petit bout
pas petit bout, se filmer, c’est mettre en scène sa propre
folie narcissique. Et cela n’a rien à voir avec le désir d’une
femme de « ressembler » à telle ou telle beauté. Qui sait
si les femmes n’ont pas envie parfois de ressembler à une
poupée ? Il s’agit sans doute d’un autre type de dérapage :
être autre mais sans se déconstruire… Une jeune
Britannique est passée à l’acte et par l’acte chirurgical,
pour devenir Barbie, mais elle ne prétend pas, publiquement
du moins, être Barbie. On serait plutôt dans l’identification primaire.
Elle en a sûrement tiré un bénéfice psychique, à la
différence d’Orlan qui poursuit un impossible rêve, une
inlassable quête.
Ces deux exceptions ne confirment aucune règle en
chirurgie esthétique ; elles constituent les dérapages à
forte résonances médiatique, et qu’il est heureusement
rarissime de rencontrer dans le cadre des demandes
courantes, raisonnables et réfléchies.
Les demandes en chirurgie esthétique ont-elles souvent
un lien avec l’état affectif des patients ?
L’amour, le regard de l’être aimé ont le pouvoir
d’exalter la beauté d’un homme ou d’une femme.
Dès l’enfance les yeux aimants d’une mère ou d’un père
se posent sur l’enfant, l’accompagnent dans toutes les
étapes de son développement. Ainsi ce dernier sera nettement plus harmonieux que si l’enfant est laissé pour
compte. Un enfant se sent beau parce qu’il est aimé pour
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
lui-même ; la beauté qui est en chacun de nous ne demande qu’à s’exprimer.
A la période de l’adolescence, l’amour est aussi un
élément qui va aider le garçon ou la fille à franchir l’étape
qui le mène à l’âge adulte.
L’aboutissement de cet âge tumultueux est la
première relation sexuelle : elle met en général un point
final à toutes les peurs de l’adolescent parce que le
regard de l’autre l’a reconnu. Le voilà rassuré. Il a été
aimé pour lui, pour ce corps embarrassant, problématique,
pour cette beauté à laquelle il ne croit pas toujours.
Les adolescents qui ont eu cette première relation
sexuelle s’empressent d’en parler à leurs copains ; ils le
font avec fougue quels que soient les sentiments éprouvés,
leur plaisir ou leur déception. Certains en sont transfigurés, car peu à peu ils se sentent mieux dans leur
corps et dans leur peau. D’autres sont simplement apaisés
même si la transformation physique n’est pas spectaculaire.
Dans la majorité des cas ils ont l’occasion de s’accepter
tels qu’ils sont.
Mais tous n’y parviennent pas à cause d’imperfections physiques tels l’acné, une culotte de cheval, des
seins trop gros ou trop petits, un nez disgracieux… En
général ceux-là n’hésitent pas à nous consulter, surtout
s’ils sont amoureux, ou s’ils ont envie de l’être. Ils ne
veulent plus d’obstacle à leur bien-être, ni de frein au désir
de l’autre. Les opérations pratiquées dans ces cas-là sont
une réussite incontestable.
Non seulement sur le plan technique parce que les
patients sont jeunes, mais également sur le plan
psychique. La fille ou le garçon débarrassé de son défaut
prend une formidable assurance. L’un comme l’autre
n’ont plus aucune honte à montrer leur corps, et cette
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
intervention leur a épargné des années de mal être ou de
psychothérapie. Ils mettent fin à leurs doutes et s’abandonnent à l’amour qu’ils sont en train de découvrir ou de
vivre. La beauté qu’ils portent en eux s’est libérée, c’est
pour cela que l’on parle de transfiguration. Mais l’amour
seul ne suffit pas toujours. Je constate les mêmes effets
positifs sur des femmes ou des hommes gênés par un
vieillissement prématuré de leur peau, des seins trop vite
affaissés après une grossesse, ou quelques kilos bien installés. Il se trouve que leur corps ne reflète pas tout à fait
leur état d’esprit : ils n’ont pas de problèmes psychologiques ou affectifs majeurs, mais leur apparence les
ennuie.
L’acte chirurgical les transfigure eux aussi. Une fois
opérés, ils se sentent rajeunis, leur image correspond enfin
à leur dynamisme : ces personnes s’épanouissent et
communiquent leur plaisir à tout leur entourage. Certaines
m’affirment que leur vie à changé, que quelque chose en
elles s’est apaisé après des années d’embarras ou de
déprimes à répétition.
En revanche, il arrive que des femmes hésitent
longtemps avant de recourir à la chirurgie esthétique parce
qu’elles déplacent des préoccupations qui n’ont rien à voir
avec leur beauté plastique. Ces femmes, plutôt vulnérables,
ont des problèmes conjugaux ou affectifs, et s’imaginent
qu’en faisant une opération esthétique elles vont reconquérir un homme. Une fois opérées, elles sont satisfaites
du résultat, mais quelques mois plus tard elles se rendent
compte que leur apparence a changé alors que leur
problème relationnel reste entier.
C’est alors que commence la remis en question :
elles cherchent à comprendre pourquoi, malgré tous les
efforts esthétiques, sportifs ou autres, elles en sont au
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
même point. Or ces interrogations ne sont plus du ressort
de la chirurgie esthétique, il faut les poser avant la
décision opératoire.
Une des patientes que vous avez interrogées est
un cas typique de cette problématique. Elle a fait refaire
son nez deux fois par un chirurgien et elle vient me voir
pour que je « rattrape » un résultat dont elle n’est pas
contente ? Or il est flagrant que son insatisfaction est
d’une autre nature.
Cette jeune femme a quarante ans, elle travaille
dans un bureau de poste où elle trie le courrier. Elle vit
seule à Paris, complètement seule sans compagnon ni
amis. Sa famille composée de plusieurs frères et sœurs la
rejette en arguant qu’elle est laide à cause de ce nez refait
et elle a droit à toutes les railleries. Alors, elle déprime,
elle est tout le temps au bord des larmes et ne veut pas
démordre d’une intervention chirurgicale, qui malheureusement ne changera strictement rien à son problème
d’image de soi et de relation affective avec les autres. Elle
est convaincue qu’on ne voit que son nez, qui ne justifie
pas une telle réaction, et que toute sa vie repose sur le
regard qu’on y porte. Elle est aussi persuadée que si son
nez est « réparé » sa famille sera admiratrice et prête à
l’aimer. Voilà un cas psychologique difficile dont je ne
peux, en tant que chirurgien, prendre la responsabilité.
D’autant que quand on lui demande quelle forme de nez
elle souhaite elle répond : « Je ne veux plus de ce nez là.
Je veux autre chose… » Mais elle ne sait pas quoi..
Cette jeune femme a perdu ses parents à l’âge adolescent et depuis elle tente de se raccrocher à l’amour de
ses frères et sœurs. Mais je ne me permettrais pas de faire
une analyse psychologique de son cas, car je n’ai pas
toutes les données et cela n’est pas de mon ressort. Je
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
sais simplement que je n’ai ni le droit ni l’envie de lui refaire son nez dont elle sera mécontente. Un ami, des amies
ou un psychothérapeute l’aideront à retrouver une certaine
forme d’équilibre.
Le délai d’attente que je propose aux patientes est
conçu pour cela, pour que leur réflexion trouve sa raison
d’être avant… Après il est trop tard, elles risquent de
rejeter leur mécontentement sur la technique, sur la vie,
sur les autres, et continuer le processus de dévalorisation
de leur propre image. La motivation est essentielle en
chirurgie esthétique. Qu’il s’agisse d’un coup de tête ou
d’une réflexion de longue haleine, il est important de savoir
pourquoi on y vient, et surtout ce que l’on attend, ce que
l’on espère après. On embellit un physique, une apparence,
pas la vie. Parfois, il vaut mieux différer une demande
opératoire, le temps de retrouver un équilibre à sa vie. On
revient plus déterminé à passer à l’acte, ou à y renoncer,
mais les problèmes n’ont pas été mélangés.
Comme toute chirurgie, celle-ci n’est pas innocente.
Le rapport que l’on entretient avec les autres n’est plus le
même, au point que certaines personnes décident de changer
d’environnement ou d’activité. Autant de répercussions
qui justifient une réflexion avant toute décision.
Etes-vous juge de la beauté de vos patients ? Votre
regard, votre expérience professionnelle abordent-ils de
manière identique la beauté d’un homme et d’une
femme ?
Mon regard professionnel est aussi attentif dans les deux
cas. C’est une personne que j’ai en face de moi et
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
qui va exposer le récit de ce qui est vécu comme un mal
être.
« La beauté est un éclat qui se passe très bien de la
perfection », a écrit Guillaume Apollinaire. La beauté
n’est pas que plastique, une personne doit parler, s’animer, bouger pour exprimer et valoriser sa beauté intérieure. A propos d’un défaut d’ordre esthétique, je
m’efforce d’éviter toute analyse critique systématique.
Pour rester neutre, simplement humain, l’écoute est prépondérante sur le regard. Le relief d’une personnalité
émerge quand on l’écoute. Je m’interdis donc tout jugement a priori. Mon regard sur mes patients est comparable à celui du psychanalyste assis près de l’analysé : il
le regarde certes, mais surtout il l’écoute très attentivement.
L’aspect physique n’est qu’un élément d’une personnalité, et pour l’approcher je commence par lire le
dossier médical, écouter mon interlocuteur. Ensuite je
peux le regarder et faire une observation esthétique
globale. Entre-temps, il y a eu des mots, une voix, une
gestuelle, un sourire par lesquels un diagnostic
s’affirme.
Un jugement immédiat sur telle ou telle imperfection
serait déplacé et pourrait déclencher un problème
qui n’existe pas. Quand on vient me voir, j’attends la
fin de la consultation pour me prononcer. Mais, évidemment, ce n’est pas toujours cette attitude que l’on
attend de moi : les patients déterminés ont envie que je
prenne une décision d’ordre technique. Mon comportement, ma ligne de conduite professionnelle
m’obligent, dans un premier temps, à une écoute
attentive et non pas à un jugement critique. Apprécier
la beauté est une chose complexe ; tout est affaire de
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
goût, de mode de vie ou d’émotions. Si j’encourage ou
si je dissuade une personne d’une intervention, c’est
soit pour des raisons techniques, soit parce que je ne la
sens pas prête. Que je la trouve belle ou pas n’est pas le
propos, nous sommes là, elle et moi, pour améliorer son
apparence.
Il ne s’agit donc pas d’être juge de la beauté des
patients, mais de les aider à obtenir le résultat qui leur
convient le mieux en fonction de leur problème. Encourager une motivation à s’exprimer, faire accepter à la
patiente les limites des techniques et donc le résultat
escompté, savoir discerner une demande objective d’une
quête impossible est le but de la consultation.
Chaque personne formule à sa façon ses souhaits,
et il est vrai que les hommes et les femmes abordent
de manière différente les questions d’ordre esthétique.
L’homme appréhende davantage la douleur, et a des
impératifs plus contraignants sur le plan social ou professionnel. La femme, elle, a une approche beaucoup
plus naturelle et plus simple. Elle a peut-être dans son
corps la mémoire de douleurs passées, qui lui font
accepter comme une évidence les contraintes d’une
intervention. Elle est un terrain plus favorable à ce type
de chirurgie.
Enfin, il faut savoir, et sans aucun regret, refuser
une intervention dont on n’est pas profondément
convaincu. Opérer par complaisance, c’est s’exposer
à un résultat discutable et à des reproches ultérieurs de
la patiente. S’il n’a pas à être juge de la beauté, le
chirurgien doit rester le seul juge de l’indication
chirurgicale.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Votre expérience professionnelle, votre aptitude à
saisir l’harmonie d’un visage ou d’un corps n’ontelles pas changé votre regard d’homme sur les
femmes ?
C’est la même chose pour tout professionnel dans
tous les domaines. Quand on aime ce que l’on fait, notre
regard s’aiguise, notre jugement est plus prompt et nous
observons le monde par la lorgnette de notre passion. Si
je ne juge pas la beauté des patientes, elles m’ont
convaincu, avec le temps, que la correction d’un défaut
même mineur peut changer leur vie ou leur manière
d’être. Alors de temps en temps, lorsque j’observe une
femme, et que je lui découvre un petit problème d’harmonie, je me surprends à penser à un geste opératoire.
Mais c’est une déformation professionnelle et je n’ai pas
un crayon correcteur ne permanence dans ma tête. Je
sais trop les satisfactions que les femmes tirent d’une
opération esthétique, c’est en cela que mon regard à
changé.
Plus souvent, d’ailleurs, lorsqu’il se porte sur des
comédiennes qui exposent leur beauté autant que leurs
défauts. En regardant un film ou une pièce de théâtre, je
me dis que telle ou telle actrice serait plus belle avec un
nez plus court, des paupières moins tombantes, ceci en
plus ou en moins. Et si je réagis ainsi, c’est parce que leur
image est d’emblée offerte au jugement de tous. Cela
m’arrive comme un flash, mais pas souvent avec les
femmes que je rencontre dans ma vie quotidienne. Sauf
si je tombe sur une faute de goût flagrante : à une femme
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IMAGE DE SOI, REGARD DES AUTRES
qui essaie un vêtement ou une couleur non adaptés à son
âge ou à sa silhouette, j’ai envie de dire que le premier
vêtement c’est la peau… Qu’il faut peut-être l’améliorer,
ou s’habiller en concordance avec ce que l’on est.
La beauté n’est pas un critère de sélection dans la vie,
mais quand elle peut être un atout supplémentaire alors il
ne faut pas hésiter à l’acquérir. C’est surtout ces réflexions
que je ne me fais en regardant les femmes, à la lumière
de mon expérience. Je crois en toute sincérité que je
prêche aussi pour les femmes grâce aux plaisirs qu’elles
expriment après l’intervention. Et comme je suis plus ou
moins influencé par la diffusion massive des canons de la
beauté, je ne suis pas insensible aux formes, aux couleurs,
aux mouvements d’aujourd’hui… Mais quand une
personne compte sur ma compétence pour l’aider à être
plus jolie, plus séduisante, j ‘essaie de mettre de côté mes
propres critères pour faire en sorte que nous ayons une
même idée de sa beauté.
Auriez-vous la même tentation que Pygmalion, ou
êtes-vous un artisan ? Ou un technicien ?
L’une des plus belles histoires de la mythologie
grecque est souvent évoquée lorsqu’on parle des chirurgiens plasticiens. C’est l’histoire du sculpteur Pygmalion, à Chypre, où régnait Aphrodite, la déesse de
l’amour. Pygmalion cherchait une compagne dont la
beauté pourrait correspondre à son idée de la femme
parfaite, or les femmes les plus belles autour de lui
étaient infidèles, rendaient les hommes malheureux et
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
brisaient des mariages. Aphrodite punit ces femmes en les
pétrifiant. Pygmalion devait donc renoncer au mariage et
créer lui-même la beauté et l’amour. Ce qu’il fit : une
merveilleuse statue de marbre, une femme parfaite, dont
il tomba amoureux. Il en rêvait toutes les nuits, mais la
statue restait de marbre. Jusqu’au jour où la déesse
Aphrodite décida de récompenser ce magicien de la
beauté. La statue devint femme. Pygmalion l’avait
lui-même façonnée selon son idéal.
Or la chirurgie n’est pas limitée au savoir-faire. Elle
a une vocation particulière et une dimension humaine qui
échappe à la froideur répétitive d’une technique efficace,
mais sans âme. Le chirurgien doit contrôler tous les
aspects théoriques et techniques de sa spécialité, pour
maîtriser toutes les étapes d’une intervention. Mais, c’est
là sa singularité, le matériau du chirurgien est vivant,
spécifique, différent selon les tissus.
Donc, je ne me considère pas comme un simple
technicien. Cela me semble insuffisant par rapport aux
responsabilités qui incombent au chirurgien, qu’elle que
soit sa spécialité.
Un artisan ? Dans la mesure où un artisan se concentre
sur une pièce unique et s’y consacre avec beaucoup de
soin… Peut-être l’artisan a-t-il l’amour de son travail,
comparable à la vocation du chirurgien, qui si elle n’était
pas animée d’une passion profonde ne résisterait pas aux
difficultés quotidiennes.
Le chirurgien plasticien est un esthète. Il doit l’être
dans ses goûts, dans sa vie personnelle, dans chacune de
ses réalisations. L’acte opératoire lui-même doit être
considéré comme une œuvre rythmée jusqu’au résultat
final. Mais malgré sa sensibilité particulière, le chirurgien
plasticien ne doit pas projeter ses propres idées sur
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ses patients. En effet, il agit à leur demande et répond à
leur désir ! Tout en restant clairvoyant, informatif, directif
dans certains cas, il doit respecter les désirs de l’autre, du
patient ou de la patiente, et choisir la bonne technique
pour les satisfaire. Le côté esthète ou artiste du chirurgien
plasticien s’exprimera dans sa connaissance intuitive des
tissus et dans l’enchaînement des gestes spontanément
adaptés à la plasticité des éléments opérés. Tout cela doit
se faire dans une humilité permanente, pour à chaque fois
en tirer le meilleur profit et la meilleure expérience. Ce
recul nous aide à progresser, à aller dans le sens de la
demande, à tenir compte des résultats satisfaisants ou au
contraire discutables. Henri Mondor, l’un des grands
chirurgiens de ce siècle, reconnaissait modestement :
« Les erreurs sont pardonnables, je les ai toutes faites !… »
Car, pour avoir fait des erreurs, Henri Mondor en a
immédiatement tiré les conséquences qui lui ont permis
d’en éviter la répétition.
Mais comparer un chirurgien esthétique à un Pygmalion, c’est d’une part lui accorder un pouvoir qu’il n’a pas,
d’autre part retirer au patient son rôle actif dans la
décision commune. Pygmalion cherchait l’amour à travers
la beauté, alors que le chirurgien esthétique tend vers la
beauté par amour de son travail et de ses patients. La
motivation profonde qui guide le geste chirurgical est
l’amour de la beauté, pas sa possession. Il s’agit de la
valoriser, non de la créer selon une image déterminée ou
des fantasmes de Pygmalion. Le chirurgien est avant tout
à l’écoute de ses patientes, il met à leur service sa
technique, son expérience.
Il n’est pas question pour lui d’avoir une velléité de
toute-puissance ou de possession, mais au contraire de
partager son pouvoir.
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Le chirurgien plasticien est satisfait de son résultat
lorsque la patiente est elle-même satisfaite. Quand on
fait de chaque cas un trophée personnel, on court le
risque de perdre son humilité, son regard critique, et le
contact avec la réalité de l’exercice chirurgical. En
démystifiant cette spécialité en l’expliquant clairement,
nous permettons au plus grand nombre d’y accéder en
toute sécurité.
Un mot sur Pygmalion : en animant la statue de
marbre, Aphrodite la rendait femme, belle certes, mais
avec ses faiblesses.
Et le bonheur risque d’être de courte durée en cas
d’infidélité, ce qui renverrait Pygmalion à la réalité.
Et l’Ecclésiaste de dire : « Vanité des vanités, tout
n’est que vanité et tourments de l’esprit ».
Les femmes vous demandent-elles le nez de Liz Taylor, une bouche parfaite ou les pommettes de Greta
Garbo ?
Les top-models ont brisé le mythe des stars du cinéma des
années 30 à 50, et sont devenus un point de jonction entre
le rêve et la réalité. Leur vogue arrange toutes les femmes,
parce que leur beauté tient un double langage. Ces jeunes
femmes défilent sur des podiums de rêve et, dans le même
temps, elles apparaissent naturelles à la télévision ou dans
les magazines féminins. Puisque la beauté est devenue un
puzzle, autant en choisir les meilleurs morceaux, le rêve
s’est nourri d’autres aventures, d’autres personnages.
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Maîtriser sa beauté, ou en jouer, c’est vivre au plus
près de soi… Alors oui, si cela correspond à un désir réel,
voire à un besoin, si cela aide à affirmer la féminité et à
se rassurer tout en se sentant mieux, pourquoi les
femmes n’auraient-elles pas envie d’avoir des seins ou
une bouche parfaits. Cela signifie que d’une certaine
façon elles restent maîtresses d’elles-mêmes, de leur
corps, elles ne le sacralisent plus. C’est l’un des privilèges du choix et l’avantage de la médiatisation de la
beauté.
On peut s’améliorer sans se transfigurer. On peut
changer son apparence sans changer son être. Le corps se
morcelle organiquement et esthétiquement, et les
techniques chirurgicales sont au point pour le maintenir
en harmonie. On greffe des organes pour sauver des vies,
mais on greffe aussi des éléments du corps pour redonner
du bonheur en plus. Les demandes vont du nez parfait à
la bouche pulpeuse. Peut-être que, au temps des idées
courtes, de la défaite des idéologies, on a envie de sauver
les apparences, de miser sur la bonne mine plutôt que sur
la mauvaise… Et vous le savez aussi bien que moi, les
femmes s’imposent elles-mêmes la dictature de la beauté,
relayées par les médias dans lesquels elles-mêmes travaillent, et s’y reconnaissent. Ce ne sont pas les chirurgiens
plastiques et esthétiques qui en sont responsables. Nous
disposons d’une technicité qui a fait ses preuves, et
progresse encore, mais nous n’imprimons pas les idées
dans l’esprit des gens. Ce sont eux qui viennent à nous
avec leur désarroi ou leur idéal. Nous participons au
triomphe de l’apparence, du look comme l’on dit. Nous
donnons l’information, nous expliquons nos techniques,
mais nous ne contrôlons pas la circulation de cette
information, ni les fantasmes des gens.
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Les dérapages en ce domaine ne sont que le lot de
quelques-uns, praticiens et patients, qui croient que l’on
peut, que l’on doit tout faire dès qu’une technique existe
et s’avère efficace. Mais ce ne sont que des dérapages, la
chirurgie esthétique dans son ensemble est beaucoup plus
douce, plus raisonnable qu’on ne le pense.
Même si ces demandes existent parfois, elles
tiennent davantage du rêve que de la réalité. En effet,
un nez, une bouche, des pommettes ou des seins ne
sont pas des structures reproductibles aussi facilement
qu’on le souhaite. Pour le nez il est possible d’en affirmer les os, d’obtenir une pointe plus jolie en modelant
les cartilages, mais le résultat est fonction des tissus de
la patiente, de son potentiel de cicatrisation. De la
même façon, pour des seins, si on peut augmenter le
volume d’une poitrine pour la faire ressembler à une
autre, elle n’en sera pas pour autant identique car
d’autres éléments interviennent dans sa morphologie,
comme la base d’implantation, la position des aréoles,
l’écart entre les mamelons, la largeur du dos ainsi qu’un
certain nombre d’autres critères. Pour avoir des
pommettes, on fait une intervention simple, par
voie endo-buccale et sans laisser des cicatrices. Mais pour
que ces pommettes soient identiques à celles d’un modèle,
il faut que l’ossature et la structure du visage soient
comparables, ce qui n’est pas toujours le cas de la patiente
qui en rêve.
Il faut être particulièrement prudent dans l’expression
du résultat que l’on prévoit, pour éviter toute forme
de fixation à la patiente qui vivra toute incartade comme
un échec. Lorsqu’une patiente veut savoir comment sera
son nez après l’intervention, on peut lui donner une
réponse approximative de profil en retouchant ses pho-
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tos ou en procédant à la modification sur un ordinateur.
Mais ce n’est qu’un à-peu-près, dont il faut se méfier !
Certaines patientes se présentent en consultation avec des
dossiers bien préparés qui traduisent une réflexion
approfondie et précise de ce qu’elles veulent. Il faut alors
être clair, refuser une demande parfois trop structurée et
éloignée de la réalité, car toute probabilité est prise
comme une promesse.
Je me souviens d’une patiente qui pensait que tout
était possible : elle m’a demandé de changer son visage,
car elle voulait ressembler à l’une des plus belles femmes
du monde dont elle me citait le nom. Au fur et à mesure
de la discussion, je lui ai expliqué que dans son cas une
telle transformation n’avait pas d’intérêt particulier.
L’harmonie de son visage serait mieux respectée grâce à
une simple intervention sur son nez un peu large.
L’intervention s’étant passée comme prévu, la
patiente était satisfaite, convaincue de la beauté de son
nouveau visage, et elle ne fit plus jamais référence à la
star de ses fantasmes.
Lorsqu’il est nécessaire d’opérer un enfant, parle-t-on
de chirurgie réparatrice ou de chirurgie esthétique ?
Sont-elles complémentaires ?
La chirurgie esthétique est fille de la chirurgie réparatrice,
elle l’a enrichie en lui apportant le raffinement
puisqu’elle opère des sujets « sains » et cherche toujours
à parfaire ses résultats. La chirurgie réparatrice en restau-
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rant une image normale est la chirurgie du bien-être,
alors que la chirurgie esthétique offre un mieux-être en
améliorant l’image.
Un enfant qui a des oreilles décollées n’a pas de
problème de santé, ni une anomalie morphologique grave.
Grâce à l’intervention chirurgicale, il ne sera plus
introverti et ne subira plus les sarcasmes de ses amis ou
de son miroir.
Deux malformations sont fréquemment associées en
cas d’oreilles décollées :
- l’hypertrophie du cartilage (la conque) qui projette
et « décolle » le pavillon de l’oreille ;
- un défaut de plicature est une absence de relief de
cartilage (l’anthélix) qui déplisse le pavillon de l’oreille
et rend plus visible l’oreille décollée.
On peut intervenir dès l’âge de sept ans, après des
examens de laboratoire. On opère sous anesthésie locale
normale ou approfondie et dans certains cas sous
anesthésie générale. L’incision, discrète, cachée derrière
l’oreille, permet de recoller et de reconstituer le relief du
pavillon pour redonner une morphologie normale. La
durée de l’hospitalisation excède rarement vingt-quatre
heures, et le pansement circulaire protégeant les
oreilles est à conserver pendant cinq à six jours. Dans
les suites opératoires, l’enfant peut ressentir une douleur
passagère, mais en deux jours elle disparaît grâce à
un traitement antalgique. Lorsque l’on retire le pansement, on conseille de le remplacer par un bandeau de
tennis le jour, et une protection plus complète la nuit,
pendant une dizaine de jours. Quant aux fils, ils sont
spontanément résorbables huit à dix jours après l’intervention.
Pour les autres problèmes concernant l’enfant, à
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moins d’une laideur pathologique comme les malformations congénitales opérées très tôt, ce sont des ophtalmologistes qui opèrent des strabismes convergents ou
divergents. S’il s’agit du nez, il est nécessaire d’attendre
la puberté, car, quel que soit son défaut dans l’enfance,
le nez n’a pas encore sa forme définitive. On ne peut y
toucher que vers l’âge de seize ou dix-sept ans et l’opérer
alors tout à fait normalement.
Je fais personnellement partie de ceux que l’on
appelle des « chirurgiens plasticiens ». Je veux donc
pratiquer toutes les indications de chirurgie esthétique et
réparatrice. Ce qui me satisfait pleinement, car ce secteur,
en pleine expansion, est encore riche de domaines
inexplorés. Je déplore sincèrement que certains chirurgiens
esthétiques, par désir de protectionnisme, ignorent
l’apport des autres spécialités. Ils se privent d’une ouverture
enrichissante, assurée par une formation permanente
grâce aux progrès techniques et scientifiques.
Quand on touche le corps humain, on a besoin, si
compétent soit-on, d’en connaître toutes les facettes, et de
s’allier le concours de tous ceux qui s’y intéressent.
Prendre en charge des sujets sains nous permet d’affiner
nos gestes, de proposer aux autres spécialistes des
techniques qui vont aussi améliorer leurs résultats.
Certains médecins ont une formation plus spécifique,
les gynécologues sont capables de rectifier les seins, les
ophtalmologistes font la chirurgie des paupières, les ORL
sont habilités à corriger un nez.
Par contre, les chirurgiens spécialisés en chirurgie
maxillo-faciale peuvent aussi bien réaliser un lifting
qu’une rhinoplastie, une blépharoplastie qu’une rectification des oreilles décollées. En cas d’indication
complexe, j’en appelle à leurs compétences : lorsqu’un
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nez est traumatisé par une déviation importante de
la cloison, lorsque la fonction respiratoire est perturbée
par une hypertrophie des cornets, je m’assure de la
collaboration d’un ORL qui aura examiné le patient.
Mais je trouve aussi normal que les gynécologues,
les ophtalmologistes ou les ORL, quand ils ont la
compétence chirurgicale, veuillent opérer eux-mêmes les
parties du corps qu’ils connaissent le mieux. La
demande existe, il faut y répondre à condition de ne pas
rester un franc-tireur de sa spécialité. Si ces praticiens sont
désireux d’étendre leurs activités dans le domaine de la
chirurgie esthétique, ils peuvent se former aux techniques
qu’elle propose. Cela ne peut qu’optimiser leurs propres
résultats.
C’est dans cet esprit de collaboration, d’échanges que
la chirurgie esthétique trouvera une légitimité et une
image qui correspondent mieux à sa vraie vocation. Je
pense que le temps, la compétence des uns et des autres,
la satisfaction croissante des patients modifieront cette
image dont profiteront tous les patients et les praticiens.
La chirurgie esthétique est une locomotive qui fait
avancer et se rallier d’autres domaines dont la cosmétologie.
Les esthéticiennes, les coiffeurs, les kinésithérapeutes sont
ou serons un jour en contact direct avec nous. Certains
soins se sont médicalisés, le peeling, l’utilisation d’acides
de fruits, le traitement médical des rides sont effectués par
les dermatologues qui a leur tour correspondent avec les
chirurgiens plasticiens.
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- III LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE
EN QUESTION
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« La beauté est un éclat qui se passe
très bien de la perfection ».
Guillaume Apollinaire
On affirme que peu de chirurgiens plasticiens et
esthétiques seraient compétents. Comment éviter les
dérapages ?
Selon une enquête des pouvoirs publics, sur quatre
mille médecins assurés pour des actes de chirurgie
esthétique, quatre cents seulement détiennent une compétence reconnue et confirmée. Le Conseil de l’Ordre est
habilité à en communiquer les noms.
Les raisons de l’engouement des médecins pour la
chirurgie esthétique sont d’une part la diminution très
nette de l’activité médicale et chirurgicale pure, au
sens classique du terme (d’où la nécessité d’un reclassement ou d’un recentrage de cette activité), d’autre
part la demande esthétique qui, elle, a beaucoup
augmenté.
Parmi les interventions les plus pratiquées en
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
l’absence de toute compétence, il ya la lipoaspiration :
avec des moyens matériels restreints ou non appropriés,
de nombreux praticiens l’effectuent, car ils la considèrent
comme une intervention non chirurgicale. Et ceci en toute
légalité, tant qu’il s’agit d’une compétence et non d’une
spécialité, car comme il est dit dans l’article 17 du Code
de déontologie médicale :
« Tout médecin est habilité à pratiquer tous les actes
de diagnostic, de prévention et de traitement. Mais un
médecin ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles,
entreprendre ou poursuivre des soins, ni formuler des
prescriptions dans les domaines qui dépassent sa compétence et ses possibilités ». Or la chirurgie est une spécialité
qui s’acquiert par une longue et solide formation.
En France la chirurgie esthétique appartient à la
spécialité « chirurgie plastique, reconstructive et esthétique », elle nécessite six ans d’études de médecine générale, puis après l’internat six ans de formation de chirurgie
spécialisée dans un centre hospitalo-universitaire. Pour
exercer en toute sécurité la chirurgie plastique, il faut une
structure équipée selon des normes officielles très précises. Et c’est le même chirurgien qui doit effectuer la
consultation, l’opération et son suivi. Ceux qui dérogent
à ces règles ne sont pas des praticiens scrupuleux : il vaut
mieux s’informer de leurs compétences avant de céder à
la tentation d’un écho médiatique ou d’un bouche à
oreille. La prudence et la vigilance sont de mise. Des opportunistes existent dans tous les secteurs : la médecine
n’échappe pas à cette règle et la chirurgie esthétique est
encore trop récente pour permettre une juste évaluation
de ses professionnels. Un bon chirurgien esthétique est un
homme d’expérience qui sait se servir de ses mains aussi
bien que du plateau technique dont il dispose.
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
En homme responsable, il est capable de mesurer les
conséquences de ses indications, de son diagnostic et de
ses actes. Il n’est pas infaillible, mais on ne bâtit pas une
réputation sur une interview racoleuse ou sur une seule
réussite opératoire. Les non-spécialistes ne travaillent pas
impunément pendant des années, leur incompétence les
rattrape un jour ou l’autre. La médecine spectacle, dont la
chirurgie esthétique fait les frais, n’est pas une médecine
de qualité, elle est aussi éphémère que le spectacle
lui-même. Pour éviter ces erreurs, les patients ont des
recours en France, des lieux d’information sérieux, des
sociétés qui ne sont pas seulement savantes sur l’étiquette.
Il y a des journalistes sérieux, des spécialistes compétents
qu’il faut prendre le temps d’interroger. Et puis on ne se
lève pas un beau matin en décidant un lifting ou une
lipoaspiration ! La réflexion est un processus naturel qu’il
est bon de partager avec ceux qui savent. Les patients
doivent se responsabiliser autant que les chirurgiens, car
c’est de leur peau qu’il s’agit.
L’exemple de nombreux praticiens opérant dans des
conditions douteuses implique la prudence des patients.
Il faut s’assurer d’un équipement moderne constitué d’un
bloc opératoire complet avec la présence permanente d’un
anesthésiste et d’une infirmière au moins.
La confiance entre le chirurgien et la patiente reste
une garantie importante de sécurité.
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Quelle est la proportion de « ratés » en chirurgie
esthétique ? Combien de procès sont-ils justifiés ?
Le terme « raté » a une connotation définitive qui ne
correspond pas à la réalité. Les vrais échecs, irréversibles, sont extrêmement rares et relèvent d’une
incompétence notoire ou d’une faute professionnelle
grave.
Un « raté » est plutôt un résultat insuffisant que l’on
peut corriger par une retouche sous anesthésie locale.
Cela arrive sur des seins pas tout à fait identiques mais
que l’on rectifie très bien. Parfois, c’est le cas pour un
reste de cellulite, une asymétrie dans la lipoaspiration ou
encore une cicatrice trop épaisse… Ces quelques
inconvénients font que 5 à 10 % des patientes sont insatisfaites, mais dans les trois quarts de ces cas nous obtenons un résultat final très convenable. Cela n’est possible
que si le dialogue entre le chirurgien et la patiente
se poursuit après l’opération, si le suivi médical est
sérieux et si le chirurgien lui-même fait son autocritique
et admet l’insatisfaction de la patiente.
J’ai moi-même vécu des histoires difficiles. L’une
d’entre elles est, si je puis dire, un raté psychologique.
Une femme de cinquante-cinq ans m’avait demandé un
lifting du visage, des paupières, du cou et du front. Pendant un an elle a été mécontente du résultat trop net, trop
visible à son goût.
Nous nous sommes revues plusieurs fois, jusqu’au
jour où elle s’est avouée finalement satisfaite de son nouveau visage. Au point que huit ans après cette dame
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
revient pour un complément de lifting. En fait son insatisfaction ne découlait pas d’un zèle technique de ma part,
mais plutôt de notre anticipation de son désir.
J’ai aussi connu un épisode infectieux survenu sur un
sein, pendant une très forte vague de chaleur. La cicatrice
a macéré, provoquant une infection enrayée par un
traitement antibiotique La cicatrisation était trop large
autour du mamelon et créait une asymétrie de forme pour
les deux seins. Trois mois après, le temps que les tissus
agressés se reposent, j’ai pu arranger tout cela sans aucun
problème ; mais ce délai opératoire normal paraissait
évidemment très long à la patiente. Il faut alors être très
présent, chaleureux pour maintenir la confiance et éviter
qu’une femme trop anxieuse se précipite chez le premier
médecin venu, au risque d’aggraver ce genre de
complications.
Tout le monde se souvient sans doute du cas de cette
célèbre actrice italienne… Elle avait eu des injections
d’un mélange de produits dans les rides, mais sa peau a
fait une sorte de réaction allergique, son visage était
bouffi. Les médias, d’une seule voix, ont hurlé au
scandale en invoquant une carrière brisée à tout jamais.
Pourtant tout est rentré dans l’ordre, et l’allergie a
progressivement disparu. En fait, la photo qu’elle a fait
paraître dans la presse était prise après l’injection, pendant
l’épisode allergique, avec un gonflement cutané et des
rougeurs forcément impressionnantes. Le problème est
toujours le même : la chirurgie esthétique est en vogue,
les médias peuvent s’en emparer et faire de la mauvaise
publicité au moindre incident de parcours. Si tous les
chirurgiens prenaient la peine d’expliquer clairement et
précisément les suites et les délais post-opératoires à
chaque patient, tout irait mieux.
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Par ailleurs, trop de publicité nuit à tout métier : elle
entraîne un surplus d’activité, mais aussi des risques supplémentaires !
Bien opérer un patient, susciter le bouche à oreille,
avoir un bon plateau technique et un personnel médical
de qualité est la meilleure publicité pour un chirurgien.
Nul n’est à l’abri d’une erreur, bien sûr, et toute
intervention comporte des risques. Mais il faut tous les
envisager, les calculer, les contrôler. Une décision hâtive,
une demande mal ou peu motivée peut être la cause
d’un ratage, du moins d’une insatisfaction des deux
parties.
Et cela retentit toujours sur la carrière du chirurgien
en question.
L’erreur en chirurgie esthétique est très rarement une
erreur de diagnostic. C’est plutôt dans l’indication ou lors
du suivi post-opératoire qu’un problème peut survenir.
Une réaction infectieuse, un hématome, une nécrose sont
des complications inhérentes à toute chirurgie. Elles ne
sont pas forcément imputées au chirurgien, mais c’est à
lui seul de savoir les éviter, ou les traiter.
En France, les médecins ne sont pas tenus à une
obligation de résultats, mais une obligation de moyens.
Une faute doit être démontrée, prouvée, en présence
d’experts, pour mettre en cause la responsabilité du
chirurgien. Le cas échéant, il peut être établi un pretium
doloris, un dédommagement, c’est-à-dire une « faute sans
faute ».
Il est important aussi de distinguer l’erreur médicale,
qui relève du jugement des tribunaux, de la notion
d’accidents ou d’aléas résolus auprès des compagnies
d’assurances. Aujourd’hui les tribunaux ne mettent plus
en cause la légitimité de la chirurgie esthétique, mais ils
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restent exigeants, car elle n’a pas de finalité thérapeutique
officiellement reconnue, ni un caractère d’urgence. Les
chirurgiens sont tenus au devoir d’informer, de prouver
cette information : même un croquis est une preuve de
leur bonne foi ou de celle de la patiente.
Au début du siècle déjà, une jeune comédienne s’était
faite opérer de la lèvre supérieure pour la rendre plus
pulpeuse : la cicatrisation se faisait mal, mais le tribunal
n’a relevé aucune faute technique du chirurgien. Cependant, il l’a condamné à indemniser sa patiente, alléguant
« qu’un chirurgien méconnaît ses obligations contractuelles, plus rigoureuses en matières esthétique, lorsqu’il
expose son patient à un risque sans proportion avec les
avantages escomptés par lui ».
Du côté des assurances professionnelles, il est
reconnu actuellement une déclaration de sinistre pour dix
assurés. La somme versée par l’assureur à la victime a
augmenté d’environ 400 % en dix ans. Ce qui est logique
face à une demande accrue. Aux Etats-Unis, il y a une
inflation caricaturale des procès. Ils sont dix fois plus
nombreux qu’en France et les avocats n’hésitent pas à
recruter leur clientèle par des publicités ou des petites
annonces. Cela devient du marketing et non plus une
défense légitime des plaignants. Il faudra bien un jour
imposer une réglementation pour que les chirurgiens
puissent travailler sereinement, en toute transparence et
dans l’intérêt des patients.
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Pourquoi la chirurgie esthétique coûte-t-elle si
cher ?
Une intervention chirurgicale, même esthétique,
implique à l’évidence un certain nombre de frais. La
structure dans laquelle se déroule l’opération est une clinique, qui doit disposer d’une fonction hôtelière et surtout
d’une fonction chirurgicale impliquant à elle seule une
infrastructure sophistiquée, incluant les blocs opératoires,
le matériel utilisé, la salle de réveil, les chambres
médicalisées et les soins infirmiers. Il y a, par ailleurs, des
honoraires d’anesthésie et de chirurgie compris dans le
coût des interventions.
Une appendicectomie ou une opération cardiaque
sont totalement prises en charge par la Sécurité sociale,
mais le patient qui entre en clinique en ignore le prix.
L’intervention simple peut coûter environ 3 000 euros
à la Sécurité sociale, et la plus complexe dépasser
30 000 euros. Le prix de journée, en moyenne, à
l’hôpital, est de l’ordre de 500 euros. Certains chirurgiens dits « conventionnés » ou du secteur 1 pratiquent
des tarifs de base imposés par la Sécurité sociale. Les
chirurgiens du secteur 2 ont droit à des dépassements
d’honoraires. Les autres sont non-conventionnés, tels les
chirurgiens plasticiens du secteur privé. La quasi-totalité
des spécialités chirurgicales, y compris la chirurgie réparatrice, sont remboursées par la Sécurité sociale et les
mutuelles. D’autres domaines ne le sont que partiellement, comme la dentisterie par exemple, et les mutuelles
doivent intervenir pour compléter les frais réglés par la
patiente.
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
A la différence de ces spécialités, la chirurgie esthétique a en charge des sujets sains. Elle est plus souvent
utile que nécessaire et donc considérée comme une
chirurgie de luxe, ce qui ne correspond pas aux catégories
socioprofessionnelles de nombreuses patientes. Elles
ne viennent pas toutes de la classe la plus favorisée. Certaines d’entre elles, d’ailleurs, demandent des facilités de
paiement qui leur sont accordées.
La différence majeure réside dans le fait qu’en
chirurgie esthétique le patient doit assumer les frais d’une
intervention, alors qu’il ne connaît pas le montant d’autres
interventions du même type.
On peut poser la question différemment : pourquoi
la chirurgie esthétique n’est-elle pas remboursée par la
Sécurité sociale ? La situation actuelle de crise économique, associé à un chômage important, rend ces questions légitimes. Cela étant, la Sécurité sociale ne prend
pas en charge le secteur de la chirurgie esthétique et n’en
rembourse pas les patientes. Sauf quelques cas dont le
retentissement physique ou psychologique est sérieux,
tels les oreilles décollées chez l’enfant, les hypertrophies
des seins, un ventre abîmé par une ou plusieurs grossesses, une déviation nasale consécutive à un accident,
une greffe de peau du visage ou des brûlures importantes.
Il est possible de faire une entente préalable, c’està-dire une demande à la Sécurité sociale, pour savoir
si elle peut rembourser tel ou tel autre type d’opération.
A partir du moment où l’assurance-maladie intervient
dans les frais, la mutuelle assure généralement le
complément.
Il est très important, au cours d’une consultation,
d’aborder clairement ces problèmes financiers. La
patiente ne doit pas se sentir gênée, et il est normal
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
qu’elle se fasse préciser le coût total de l’intervention, les
modalités de paiement. Il est normal aussi qu’elle exprime
ses difficultés financières pour trouver un arrangement
avec le chirurgien.
L’honnêteté, la compétence d’un chirurgien sont aussi
basées sur la clarté de son rapport avec l’argent. Les
résultats n’en seront que plus satisfaisants sur le plan
humain, technique et psychologique. La liberté de choix
des patients tient à une information complète, qui permet
de comparer ce que proposent un ou plusieurs chirurgiens
avant la décision définitive.
Certains praticiens promettent des bons résultats, à
des coûts très élevés. La démocratisation de la chirurgie
esthétique est en marche, et un patient, une patiente bien
avisés ont rarement de mauvaises surprises financières.
Peut-être ne suis-je pas le mieux placé pour en parler, mais
puisque vous abordez l’aspect financier, je déplore la
faible valorisation des actes médicaux et chirurgicaux des
autres spécialités (digestives, orthopédiques, gynécologiques…), car elle risque à court terme de retentir sur la
qualité des soins fournis. S’il est vrai que la Sécurité
sociale, déjà bien mal en point, ne peut prendre en charge
ce problème, les mutuelles et assurances privées devraient
être davantage sollicitées.
La chirurgie esthétique est peut-être le secteur le
plus controversé de la médecine. Avez-vous une
explication ?
La santé est devenue un droit pour tous. On ne pardonne aucune défaillance. De nombreux progrès restent
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
à faire notamment au niveau génétique et viral, pour
élucider les mystères de la pathologie du cancer ou du
sida.
La beauté, l’esthétique est un signe de bonne santé.
Ceci explique l’engouement actuel pour la chirurgie
esthétique, et la controverse permanente qui l’entoure.
Avoir le droit à la santé comme à la beauté dans une
société prospère rend exigeant.
A partir du moment où l’on vit longtemps, on
voudrait mieux vivre. Le professeur Etienne Emile
Beaulieu a découvert, il y a quelques années, le sulfate de
DHEA, une hormone présente dans le sang. Son taux
augmente de sept à vingt-cinq ans, pour atteindre alors un
plafond, puis il diminue régulièrement, pour n’exister
qu’en quantité variable après soixante-dix ans. Mais
contrairement à ce que l’on a dit trop vite, ce produit n’est
pas un élixir de jouvence, mais une bonne approche
thérapeutique pour mieux vivre. Il semble que le taux de
cette hormone est plus important chez ceux qui bénéficient d’une meilleure santé. L’avenir nous dira si ce
traitement, une fois mis au point, est vraiment un facteur
de douce et longue vie.
La chirurgie esthétique bouscule un certain nombre
de conventions et devient une chirurgie de l’essentiel, tant
elle est liée à l’image de soi, à une forme d’être en soi. Ce
n’est pas parce qu’il touche à l’apparence que l’acte
chirurgical doit être minimisé. Au contraire, avoir la
beauté au bout des doigts, c’est avoir la vie au bout des
doigts, puisqu’un geste abusif ou erroné peut la faire
basculer.
La chirurgie esthétique qui accentue ou donne la
beauté est controversée parce qu’elle est une tentation
permanente : elle a attiré les meilleurs et les pires spécia-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
listes, les patients les plus équilibrés ou les plus
fantasques. Elle trouve sa place dans tous les milieux
sociaux, dans toutes les situations, occasionnant ainsi des
dérives spectaculaires. Dans les années à venir, il lui
faudra retrouver ou consolider la confiance des patientes.
La dernière polémique à propos des prothèses mammaires
en est une illustration. Sans aucune raison évidente, en
l’absence de toute preuve scientifique, un discrédit,
organisé et amplifié par les médias, a été jeté sur une
technique pourtant connue et utilisée depuis plus de trente
ans. Seul l’impact médiatique a compté, au mépris des
angoisses suscitées chez les patientes porteuses de ces
prothèses mammaires.
Ce problème a été géré en dépit du bon sens, à
l’encontre des réalités scientifiques, et au détriment du
respect des patientes.
Or la chirurgie esthétique n’est plus l’apanage d’une
minorité. Sa banalisation est telle que les patientes
oublient qu’il s’agit d’un véritable acte chirurgical, et
qu’elles sont confrontées par quelques « spécialistes » qui
outrepassent leur vocation. D’autre part, on ne décide
pas de se faire opérer après avoir vu une publicité,
entendu un discours sur un plateau de télévision ou
regardé une photo prometteuse. On devrait s’informer
auprès des autorités compétentes. Les patients sont en
droit d’exiger la qualité des soins et la transparence de
toutes les étapes.
La qualité en chirurgie esthétique existe. Le problème
des spécialistes compétents vient du fait qu’ils se sont
drapés dans leur orthodoxie au point de n’avoir pas
compris le rôle d’une communication prudente et parcimonieuse. Ils ont laissé la place à des non-spécialistes
bruyants, trop heureux de se faire connaître, et à tous les
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
détracteurs de la chirurgie esthétique, du progrès en
général. Il est normal que la méfiance et la controverse
s’installent dans ce climat. Je crois que pour assainir ce
secteur il faut non seulement impliquer les pouvoirs
publics, mais aussi éviter la politique de la chaise vide.
Nous devons sans cesse expliquer les tenants et les aboutissants de notre spécialité, pour que nos actes, nos propos
ne soient ni déformés, ni récupérés. Nous avons en
France des praticiens sérieux, rigoureux, à l’affût de toute
nouveauté technique, prêts à écouter leurs patients, à
les orienter dans leur choix et leur décision. A eux
d’occuper le terrain de l’information, d’autant qu’on ne
s’improvise pas chirurgien. Il existe un cursus universitaire, et la compétence en chirurgie plastique et esthétique
doit devenir une spécialité à part entière, pour justement
enrayer les pratiques inacceptables, éloignées de l’éthique
médico-chirurgicale. Les actes n’étant pas remboursés par
la Sécurité sociale, il me semble important d’en surveiller
les indications, de renforcer les garde-fous, tant du côté
du Conseil de l’Ordre que de celui des sociétés regroupant
les spécialistes.
Pourquoi et comment est-on passé de la chirurgie
réparatrice à la chirurgie plastique et esthétique ?
La chirurgie plastique est très ancienne. Elle était déjà
pratiquée par les Egyptiens et les Indiens avant le début
de notre ère. Puis par les Italiens à la Renaissance et par
de nombreux Français au XIXe siècle.
Après la Révolution et l’Empire, la chirurgie plas-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
tique de la face se fait partout en Europe. On réparait, sans
anesthésie, ni antisepsie, ni asepsie, des becs-de-lièvre,
des oreilles décollées, des nez, des paupières. Les rapports
médicaux de l’époque sont terribles, tant la douleur de
l’opéré transparaît avec la même force que les difficultés
du chirurgien.
Les découvertes, d’abord de l’anesthésie en 1846, puis de
l’antisepsie en 1867 et de l’asepsie en 1878, ont révolutionné l’acte chirurgical de reconstruction. Ce qui a permis
de remédier aux « gueules cassées » de la Première Guerre
mondiale, et de commencer, dans de bonnes conditions,
la chirurgie maxillo-faciale.
Autre bond dans cette chirurgie, les grands brûlés pour
lesquels ont peut créer des centres spécialisés, au
lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La peau restait
le premier élément sur lequel et par lequel passait toute
chirurgie plastique, mais les progrès ont permis très vite
de corriger les muscles et le squelette.
Un exemple : la fente labio-palatine (unie ou bilatérale),
ou bec-de-lièvre, est une malformation congénitale que
l’on réparait uniquement au niveau de la lèvre, et en fermant
le voile du palais. On s’est vite aperçu qu’il fallait aussi
réparer le muscle qui constitue le sphincter buccal et l’os
maxillaire sur lequel il repose : aujourd’hui le geste
opératoire reste complexe mais il est très bien réglé.
Le bond le plus spectaculaire, qui a ouvert de nouvelles
voies pour la chirurgie plastique, est sans conteste celui
impulsé par Paul Tessier en 1958. Il a effectué des
reconstructions totales de la face. Un travail qui durait
quinze heures et mettait en collaboration une vingtaine de
personnes. Grâce à lui, on a pu ouvrir le crâne, refouler le
cerveau pour atteindre les orbites par le haut et découper
sans entrave le massif facial.
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
Depuis on peut reconstruire des visages que l’on
croit perdus ou redonner vie à des paupières. Il a
repoussé les limites de notre savoir, de nos possibilités. Il
a osé aborder la chirurgie par des moyens non explorés
en prenant des risques impressionnants avec une maîtrise
et un contrôle qui forcent l’admiration. Lorsque
l’on relit ses écrits d’il y a vingt ans, on est encore
stupéfait par son audace, sa précision, sa rigueur et sa
régularité.
J’ai eu la chance d’être son interne pendant un an. Il
vaut mieux ne pas rester trop longtemps dans le sillage
de cet homme hors du commun. Cela risque de vous
marquer à jamais et même de vous bloquer dans vos
propres possibilités. Il est indispensable de l’avoir connu,
mais il faut s’en séparer à temps pour être soi-même.
Même les meilleurs chirurgiens ne sont que de bons
répétiteurs de sa technique, car son génie créateur et
sa témérité sont du domaine de l’exception. Ce qu’il a mis
au point n’est utilisable que par quelques chirurgiens ou
certaines équipes particulièrement entraînés à des
malformations précises. Mais cette percée a permis des
progrès techniques dans la neurochirurgie et bien sûr la
chirurgie esthétique.
La réflexion éthique n’a jamais été absente de son
travail. A une journaliste qui l’interrogeait sur la compatibilité de deux chirurgies menées par lui, réparer des
visages monstrueux et lifter une paupière, il a répondu :
« Dans un cas, c’est ouvrir la vie sociale à des gens qui
en étaient écartés par leur apparence monstrueuse, dans
l’autre, c’est donner un peu plus d’assurance à des
personnes qui en ont besoin pour mieux vivre dans leur
milieu. Je n’y vois qu’une différence de degré… En
revanche, j’ai toujours refusé d’opérer les personnes
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
atteintes de malformations de la face, qui étaient en même
temps des débiles profonds. Car la chirurgie n’aurait pas
suffi à les rendre à une vie sociale normale ».
Mais rétorquait la journaliste : « Cela aurait aidé les
personnes qui s’occupent de ces enfants ?... »
Et Paul Tessier de répondre : « On n’opère pas une
personne pour quelqu’un d’autre ».
Grâce à lui on est dans la chirurgie de l’apparence
dans ce qu’elle a de plus noble. Aujourd’hui, il ne s’agit
plus tellement de savoir ce qu’il est possible de faire, car
la technique existe, elle est efficace, mais quand et qui
doit-on opérer ? L’indication est essentielle, tant certains
patients attendent beaucoup plus que ce qu’on peut leur
donner. Alors, déçus ou en quête d’autre chose, ils passent
de mains en mains ; savoir refuser, argumenter son refus
est une attitude éthique en chirurgie esthétique. Cette
spécialité a par ailleurs enrichi la chirurgie viscérale,
l’urologie ou l’orthopédie, car elle reconstruit des endroits
du corps qui ont souffert organiquement.
Certains progrès ont été déterminants pour la
chirurgie esthétique, mais il ne faut pas confondre
nouveauté et progrès. Une nouveauté n’est pas forcément
révolutionnaire, elle peut disparaître aussi vite qu’elle est
apparue. Ce fut le cas du laser mal utilisé il y a sept ans,
et que l’on a dit formidable pour la cellulite. Or il s’est
avéré inefficace… Tout comme les ultrasons que l’on a
crus exceptionnels pour produire un effet lifting et enlever
les graisses. Ils ont un appoint pratique pour fragiliser et
fragmenter les graisses, mais n’ont aucune incidence sur
les résultats. Ils n’étaient qu’une variante de la lipoaspiration, mais les promoteurs commerciaux en ont si
bien « vendu » les vertus que l’on a crié au progrès
extraordinaire.
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
Un progrès est une technique qui s’affirme dans le
temps, par son application, par le changement qu’elle
produit sur les résultats. Dans cet ordre d’idées, la
lipoaspiration a été révolutionnaire pour la chirurgie
esthétique et pour d’autres spécialités. La canule est
devenue aussi importante que le bistouri. Aujourd’hui
deux autres nouveautés font leur percée, mais il faut
attendre pour savoir si elles sont un véritable progrès.
Le laser : le Laser scanné pulsé (LSP) d’une part, qui
efface les rides et les ridules, qui retend la peau sans
cicatrices, au niveau des paupières inférieures, de la
patte-d’oie et du pourtour des lèvres.
L’endoscopie d’autre part, très efficace dans
d’autres activités médico-chirurgicales, mais qui ne fait
pas encore l’unanimité en chirurgie esthétique. Grâce à
elle on peut de l’intérieur, au moyen d’une petite
incision, enlever les rides intersourcilières et remonter les
sourcils.
Le temps et l’expérience permettront de définir les
indications précises de ces deux techniques en chirurgie
esthétique, auxquelles on prête aujourd’hui des propriétés
peut-être excessives par rapport à la réalité.
Votre pouvoir de chirurgien vous procure-t-il du
plaisir, de l’anxiété ou une simple satisfaction
professionnelle ?
Il n’y a pas de toute-puissance du chirurgien. Il y a
un vrai pouvoir, dont la légitimité repose sur l’histoire de
la médecine, de la chirurgie, et par des études choisies et
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
menées à bien. Ce pouvoir acquis est confirmé par la demande à laquelle nous consacrons notre vie et à laquelle
nous essayons de répondre le mieux possible. Il nous est
transmis par les enseignements de nos maîtres, nous avons
à les transmettre à notre tour, pour qu’il puisse s’exercer
avec le maximum d’éthique chirurgicale.
Chirurgie vient du grec kheirourgia, travail de la
main. Le travail de la main guidé par l’esprit répare, sauve
et traite ce qui ne peut pas l’être par la médecine. Et si le
chirurgien s’applique à augmenter son efficacité,
améliorer sa technicité, si, en permanence, il cherche
à affiner ses gestes, le pouvoir qui en résulte est partagé
avec ceux et celles (les patients) qui en bénéficient.
Dans le même temps, la façon de s’en servir lui est
précisément enseignée. L’humilité reste une valeur de
base pour tout scientifique qui, loin d’être dupe de ses
moyens, doit rester critique pour chercher à progresser
avec une responsabilité de tous les instants.
Il s’exerce sur la matière la plus noble qui soit, c’està-dire le corps humain, la vie, il gratifie autant qu’il responsabilise. Son importance est telle qu’il ne laisse pas le
droit à l’erreur.
Heureusement, le poids des responsabilités est
moins lourd à porter avec le temps, car, renforcée par
l’expérience, la main et l’esprit qui la guide sont de plus
en plus sûrs. Tout est difficile, pesant, en début de carrière,
car l’on se doit d’assumer la totalité des gestes et leurs
conséquences. Au terme de sa formation hospitalière, le
chirurgien aborde son activité privée, et c’est toujours le
grand saut pour voler de ses propres ailes, et prouver
l’efficacité de sa formation. Mais en fait tout se déroule
en douceur, d’une expérience à l’autre, d’un progrès à
l’autre…
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LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE EN QUESTION
Il est essentiel de ne jamais être pris au piège de ce
pouvoir, ni de l’image que les autres vous renvoient.
Chaque intervention est nouvelle, c’est un travail, toujours
recommencé, où tout reste à prouver. La confiance des
patientes justifie une attention et une rigueur de tous les
instants que le chirurgien doit assumer en permanence et
qu’il doit communiquer à tous les membres de son équipe.
Il me revient bien sûr la responsabilité de tout contrôler,
de tout mesurer et de tout adapter à chaque demande, mais
l’expérience et la sécurité de la structure dans laquelle je
travaille allègent mon anxiété. Le dévouement d’une
infirmière, la perspicacité d’une panseuse, la délicatesse
d’une secrétaire sont des éléments indispensables.
Mais on attribue volontiers au chirurgien plasticien
plus de possibilités qu’il n’en a réellement. Nos
techniques actuelles ont certes beaucoup progressé, la
découverte est loin d’être épuisée. Contrairement à la
chirurgie générale ou orthopédique pour lesquelles le
chirurgien reste maître du diagnostic, et de l’ensemble de
la démarche, en chirurgie esthétique, il s’agit d’une
décision prise avec la patiente ou le patient bien informés.
Mettre tout en œuvre pour réussir une intervention est un
objectif permanent que l’on appelle l’obligation de
moyens.
Le chirurgien plasticien a d’autre part l ‘avantage de
pouvoir refuser le principe d’une intervention si la
demande n’est pas en rapport avec le résultat escompté.
Ce refus est en soi un diagnostic, qui signifie : «je ne
pense pas que votre demande soit légitime ou cohérente,
ou je ne pense pas qu’il soit possible d’obtenir ce que vous
désirez. » Refuser d’exercer un pouvoir, c’est en reconnaître les limites et les accepter. On est loin de la
toute-puissance !
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- IV LE CORPS REVISITÉ
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« … et la beauté sereine de ton corps déroule,
mate, ses impeccables accords ».
Paul Verlaine
Comment se déroule la première consultation
pour une femme ?
La consultation est l’une des étapes importantes de
la démarche qui conduit à la chirurgie esthétique. Une
femme attend longtemps ce moment, qu’elle espère
autant qu’elle l’appréhende. Elle a déjà réfléchi, hésité,
pensé et repensé à ses motivations. Elle est revenue des
dizaines de fois à son miroir, à son album de photos de
famille. Elle en a parlé franchement ou indirectement à
son entourage, elle s’est inquiétée des réactions éventuelles à un changement de son apparence.
Elle a sans doute testé le regard des autres, sondé
ses proches. Ou bien elle s‘est débattue toute seule avec
ses interrogations. Ou encore, sa décision a été très
soudaine.
Quoi qu’il en soit, cette consultation est l’aboutisse-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
ment d’une introspection liée à une réflexion personnelle, une pression sociale, médiatique, qui rend
complexe toute démarche en ce domaine. D’autres
femme ne connaissent pas ces atermoiements – les mannequins, les vedettes du théâtre, du cinéma ou de la
télévision -, car elles sont guidées par un impératif
professionnel.
Des femmes, gênées par un défaut physique
évident, sont tout à fait déterminées à s’en débarrasser :
ce sont les plus sereines durant tout le processus pré et
postopératoire. Pour elles, la chirurgie esthétique est un
moyen comme un autre d’atteindre un objectif. Ces
femmes sont un tempérament volontariste, elles sont mues
par une nécessité impérieuse de s’adapter à une réalité
pour mieux vivre.
Pour la majorité d’entre elles, celles qui réfléchissent
longtemps avant de se décider, la première consultation
est le point culminant de leurs tergiversations et en
fait, à ce stade, leur décision est prise. Consulter oui…
mais qui ?
Et là… Je suis formel, seul le bouche à oreille est un
critère fiable. Un avis amical, familial, émanant de
quelqu’un qui a été opéré et qui est satisfait de l’intervention et de ses suites, est à ce stade un élément essentiel.
Une information précise, élargie et complète permet
de sélectionner deux ou trois noms de chirurgiens, sur
lesquels se porte le choix. En consulter davantage est
une erreur qui traduit ou entraîne l’indécision, et la
confusion.
Une fois le rendez-vous obtenu, c’est souvent émue
et contrariée que la patiente se présente, scrutant le
moindre détail dans l’environnement ou se montrant
sensible à la moindre réaction des gens qui la reçoivent.
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LE CORPS REVISITÉ
La façon dont elle est accueillie, la salle d’attente,
l’attitude de chacun sont perçues comme des révélateurs
d’un ensemble. Personnellement, je m’efforce de tout
mettre en œuvre pour que la consultation se déroule dans
une bienveillante neutralité et dans la plus grande
transparence. Cette rencontre repose sur un contrat de
confiance implicite qui doit s’établir entre nous : l’environnement sonore, visuel compte autant que l’amabilité
du personnel médical et administratif ou les informations
qu’elle est en droit de demander et d’obtenir avec clarté.
Avant que je ne voie la patiente, celle ci remplit le dossier
administratif. On lui demande ensuite pour quel type de
conseil ou de problème elle est là. En général nous
recevons deux styles de réponses. L’une est informative :
« Je viens pour les rides, pour le cou, pour les paupières,
pour le visage… » ; l’autre est plus déterminée : « je viens
pour une lipoaspiration, pour un lifting, pour des
prothèses mammaires… »
La deuxième question importante est de savoir comment elle venue me voir. Si c’est une amie ou une patiente
que j’ai déjà opérée, c’est un gage de confiance et de
sécurité. Elle peut être aussi adressée par son médecin
traitant parce qu’il nous connaît ou a assisté à nos
interventions. Ce conseil accompagné d’une lettre du
médecin prouve que la démarche est déjà bien engagée.
L’esthéticienne, le kinésithérapeute, le coiffeur ou le
pharmacien sont des personnes auprès desquelles la
patiente se renseigne, car elle a avec elles un contact plus
privilégié et plus intime.
Lorsqu’elle s’est informée auprès du Conseil de
l’Ordre, elle connaît déjà la compétence du chirurgien, car
elle a obtenu la liste des praticiens reconnus. Ce qui
traduit de sa part une démarche critique et positive
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Il faut d’abord laisser la patiente s’exprimer, écouter
les mots qu’elle utilise, le caractère contrôlé ou violent de
son langage, le regard qu’elle porte sur elle et la manière
dont elle juge son défaut.
Si elle annonce d’emblée que sa décision est prise, je
reste très vigilant. La patiente est certes déterminée,
directive, mais cela ne me suffit pas. En tant que
chirurgien, j’ai une responsabilité médicale, et il me faut
aussi apprécier le profil psychologique de la patiente. Je
dois l’écouter, analyser ses motivations, ses attentes par
rapport aux processus et aux résultats de l’intervention.
Une fois le dialogue bien établi, un climat détendu
s’instaure entre nous et permet de poser mon diagnostic.
Je peux aussi bien aller dans son sens, si cela est justifié,
la prévenir des inconvénients de certaines cicatrices ou au
contraire la dissuader de l’opération si la motivation n’est
pas cohérente. Mes réticences peuvent convenir à ses
hésitations, ou renforcer sa décision, lorsqu’elle avoue
vivre mal un problème apparemment mineur.
Il m’arrive évidemment de refuser d’opérer certaines
patientes. Celles dont le profil me fait préjuger
qu’elles assumeront mal les suites opératoires, ou celles
qui ne connaissent pas vraiment la réalité esthétique et
chirurgicale. D’autres ont une fausse idée de leur disgrâce
qu’il n’est pas vraiment nécessaire de corriger.
Enfin je refuse d’opérer celles dont l’attente est démesurée par rapport aux résultats réels de l’intervention et qui
n’a rien à voir avec une démarche médicale. Leur problème est plus complexe, il tient souvent à un mal de
vivre qu’une intervention chirurgicale ne peut pas régler.
Mon refus s’accompagne bien sûr d’une information
précise, et d’une orientation vers un autre spécialiste.
A l’issue de cette consultation, si la décision d’opérer est
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LE CORPS REVISITÉ
prise, j’explique dans les moindres détails tout le déroulement de l’intervention, toutes ses implications physiques, sociales, familiales et psychologiques. La patiente
doit sortir de la consultation rassurée, informée, prête à
réfléchir de nouveau sur la base de ces renseignements
précis complémentaires.
Lorsque le principe de l’intervention est retenu, on
passe à la phase des examens préopératoires. C’est par
souci d’information que nous avons élaboré un guide de
chirurgie plastique et esthétique, livret que nous donnons
aux patientes après la première rencontre. Il donne une
idée globale des possibilités de la chirurgie esthétique, et
en particulier de l’intervention pour laquelle la patiente
est venue consulter. A partir de ce guide, elles peuvent
analyser sans émotivité ce qu’implique leur demande.
L’ensemble des explications données, des photos et des
schémas reproduits concerne le bilan préopératoire, le
suivi postopératoire, les modes d’anesthésie et les résultats escomptés en fonction des interventions.
Procédez-vous de la même façon pour opérer un homme
et une femme ?
Bien sûr que non. Les différences sont multiples et il
faut évidemment en tenir compte.
La peau en particulier. Celle de l’homme est plus
épaisse, il a un système pileux plus développé, il a de la
barbe et une implantation de cheveux différente. Il est plus
difficile de masquer les cicatrices d’un lifting chez un
homme que chez une femme.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Pour une rhinoplastie nous procédons différemment
à cause de la texture de la peau, des tissus qui ne
réagissent pas de la même façon. Nos gestes techniques
ne peuvent donc pas être les mêmes.
Et puis les hommes ont besoin d’être vus plus souvent
avant l’intervention, étant dans l’ensemble plus anxieux.
Plus méfiants vis-à-vis de la médecine. Que ce soit pour
eux-mêmes, pour leur femme ou leur compagne. Il m’est
arrivé de demander à un homme de ne plus revenir voir
sa femme à la clinique ; il était odieux et faisait peser une
pression très forte sur elle.
Lorsque l’on touche à leur apparence, à leur
physique, il nous faut aussi être plus discret car quand le
changement est trop visible cela les gêne. Tandis qu’une
femme peut habilement détourner l’attention et conserver
pour elle le secret de son intervention.
Le terrain biologique spécifique de l’homme,
différent de celui de la femme, ainsi que ses contraintes
professionnelles plus importantes justifient une attitude
particulière du chirurgien, et des indications différentes.
Or, bien que l’homme se préoccupe de plus en plus de
son apparence, il ne constitue dans le cadre de l’activité
chirurgicale qu’une partie encore peu importante des
interventions. Ce sont bien sûr les traitements de la calvitie qui sont le plus demandés, car cette pathologie est
très masculine. Les hommes font également des liftings
du visage, une chirurgie des paupières ainsi que des
lipoaspirations de la paroi abdominale. Nous voyons des
hommes décidés à se débarrasser de leur air fatigué, dû à
des poches sous les paupières, ou à retrouver une silhouette plus dynamique mise à mal par une alimentation
déséquilibrée ou trop riche. Des hommes d’une cinquantaine d’années et plus trouvent dans un lifting cer-
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LE CORPS REVISITÉ
vico-facial la solution aux bajoues naissantes et au cou
relâché. Lorsqu’ils ont trente ans, ils viennent du secteur
des relations publiques, de la publicité, de la communication ou encore de la mode, car ils supportent mal les
premiers signes d’une calvitie considérée comme une
entrave à leur séduction.
Est-il préférable de garder secret le recours à une
opération esthétique, lorsque cela ne relève pas de la
pathologie ?
Le rapport que l’on entretient avec son corps est le
plus intime qui soit. Celui que les femmes établissent
parfois entre elles est aussi de l’ordre de l’intime.
La beauté se décline d’abord au féminin ; les harems,
les gynécées, les groupes d’amitiés féminines ont toujours
été des espaces où les corps se côtoyaient sans fausse
pudeur ni jugements définitifs.
Certaines femmes ont la faculté de se parler sans
contraintes, de créer une complicité réelle, de se reconnaître et de partager l’amitié en toute simplicité. S’agissant de leur beauté, ou de leur corps, ces mêmes femmes
vont en parler comme de leurs vêtements : elles savent
s’échanger ces derniers aussi bien que des conseils ou des
secrets de beauté. Le recours à la chirurgie esthétique fait
partie de leurs conversations.
Celles que je vois sont souvent accompagnées d’une
amie ou recommandées par elle. C’est une démarche où
la complicité est fréquente. Le plus souvent, le secret ne
déborde pas vers un cercle plus élargi, encore moins vers
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
les hommes. Modifier quelque chose de son apparence
nécessite sans doute une complicité et un soutien qui vont
au-delà du dialogue médecin-patient. Les femmes qui se
livrent des secrets esthétiques le font sur le même ton,
chaleureux et humoristique, que lorsqu’elles parlent de
leurs accouchements.
Le recours à la chirurgie esthétique est rarement
avoué à l’homme, sauf à celui qui partage la vie quotidienne. Parce que ce secret est aussi une astuce pour
séduire. Cela prouve que d’une certaine façon il est bien
assumé et protégé du jugement des autres. On reste
soi-même, on ne change pas parce que la paupière est
corrigée ou le sein arrondi. Il faut, dit-on, « sauver les
apparences », et rien ne me paraît plus juste en ce qui
concerne la beauté.
Simone de Beauvoir a écrit dans La Force de l’âge
cette très jolie phrase : « La beauté se raconte encore
moins que le bonheur ». Et le bonheur comme la douleur
ont quelque chose d’indicible… C’est un bonheur de se
sentir belle. Pourquoi donc clamer haut et fort que
cette « bonne mine » est une affaire entre soi et soi ?
Pourquoi justifier un bien-être qui se lit sur le visage, alors
qu’il suffit en tant que tel à rassurer les autres ? On ne
passe pas son temps à scruter les changements d’un
visage, on le regarde et on l’accepte ou pas.
Il est évident qu’un défaut trop visible qui disparaît
du jour au lendemain peut surprendre. Encore faut-il que
l’interlocuteur pose des questions, or la discrétion l’en
empêche… Mais, par exemple, lorsqu’un nez refait
satisfait la personne concernée, nul doute qu’elle donnera
une explication sans aucune gêne. Les hommes qui font
des implants de cheveux, et dont l’apparence reste
naturelle, n’éprouvent pas le besoin de se raconter à tout
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LE CORPS REVISITÉ
un chacun. De la même façon, les vedettes les plus médiatisées préfèrent garder pour elles les secrets de leur
beauté ou de leur jeunesse. Leur image leur appartient,
même si le public ne résiste pas au plaisir de se l’approprier.
Si nous connaissions tous les mystères, tous les
fantasmes des uns et des autres, le désir, l’émotion,
l’amour perdraient bien des vertus. On aime regarder un
film, s’identifier à son héros, plonger dans l’intrigue sans
chercher à comprendre la magie du cinéma. On aime
contempler une œuvre d’art sans savoir comment elle a
été élaborée. Les effets spéciaux d’un film, les pensées
d’un modèle qui pose pour un peintre sont moins importants que l’émotion et la fascination que suscite l’œuvre.
Lorsqu’une femme est belle à regarder, ou un homme
séduisant, ils nous offrent leur beauté. C’est une alchimie
qui ravit les sens, qui est irrationnelle et que l’on ne
cherche pas à comprendre.
Le secret d’une chirurgie esthétique est un secret
légitime qu’il vaut mieux ne pas voler à celles ou ceux
qui le détiennent. Mais si l’on en parle, autant l’assumer !
Souvent, ceux qui émettent la velléité d’un nouveau nez,
d’un lifting ou d’une quelconque intervention s’entendront dire : « Pourquoi pas, si tu en ressens le besoin… »
L’efficacité de cette spécialité rassure de plus en
plus. La fréquence des interventions, notre propre
regard s’adaptent aisément à ce changement sur l’autre
et sur nous-même, en miroir. Les pieux mensonges
sont encore admis : bon nombre de personnes se font
opérer en invoquant un voyage à leur entourage.
Quand elles retournent à leurs habitudes, leur absence,
leur fugue esthétique sont passées presque inaperçues
puisqu’elles reviennent affublées de leur bonne mine.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Peut-on ralentir le vieillissement qui est l’une des
obsessions des hommes et des femmes ?
Avant d’aborder l’aspect physiologique du processus
du vieillissement, je voudrais rappeler qu’il est très lié
à l’idée que l’on se fait de sa propre vie. Le goût de vivre,
l’optimisme, s’ils ne sont pas entamés par trop de petits
ou de grands malheurs, sont une parade au vieillissement,
une garantie de jeunesse mentale et physique. Cela
revient à répéter que la beauté intérieure d’un individu reste un support et un moteur de sa beauté extérieure.
On ne connaît pas encore les gènes de la longévité,
mais la théorie génétique dit que le vieillissement de
chaque individu est inscrit dans son programme chronobiologique. Certains chercheurs affirment qu’au cours
de notre vie se produit une erreur de transcription
génétique qui se répercute à toutes les cellules. Leur
fonctionnement en est alors perturbé, les erreurs s’accumulent, et c’est cette dégradation qui serait à l’origine du
vieillissement.
D’autres, dont le professeur Hayflick, auraient
observé que les cellules humaines ne se reproduisent
qu’une cinquantaine de fois, après quoi les chromosomes
ne peuvent plus transmettre le message génétique. Cette
vitesse de multiplication diminue avec le temps, d’où une
meilleure cicatrisation chez l’adolescent que chez une
personne âgée.
Enfin, on connaît aussi le rôle des radicaux libres,
ces molécules extrêmement toxiques pour l’organisme.
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LE CORPS REVISITÉ
S’il y a excès de production de radicaux libres à cause du
mode de vie de l’environnement, les cellules ne sont plus
protégées et le vieillissement s’accélère.
Toutes ces hypothèses trouveront certainement une
réponse génétique aux causes du vieillissement.
En attendant, ses effets les plus importants
concernent notre apparence. Les cheveux peuvent
commencer à blanchir très tôt, dès vingt-cinq ou trente
ans. Les tissus se distendent, la peau se fragilise ou se
ternit. La taille diminue du fait de la résorption osseuse,
chez la femme plus que chez l’homme, avec une déminéralisation des os. Le fonctionnement et le métabolisme
de tous les organes se modifient, se ralentissent ou se
perturbent. L’état circulatoire, cardiaque, respiratoire,
rénal, l’acuité auditive et visuelle sont progressivement
altérés. Ralentir les effets du vieillissement tient d’abord
à une bonne hygiène de vie. On sait que le tabac,
l’alcool, une alimentation inadaptée auront des répercussions néfastes aussi bien sur le plan physique que
psychologique. Le sport est une façon d’entretenir le
dynamisme du corps, de tonifier les muscles et de
renforcer son moral. Mais si le vieillissement est un
phénomène physiologique inéluctable, de nombreux
progrès réalisés par la science permettent de vivre plus
longtemps et mieux.
La longévité moyenne s’est accrue de plus de dix ans
depuis le début du siècle. Les maladies sont en recul ; ce
qui paradoxalement pose, de façon plus aiguë encore, le
problème du vieillissement, car pour vivre plus vieux il
faut pouvoir vivre mieux. L’équilibre psychologique reste
le meilleur remède, et pour cela tout ce qui y contribue
est essentiel.
Les milieux familial, professionnel sont en premier
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
plan, et les aléas de la vie font qu’ils ne forment pas toujours
un rempart permanent. La curiosité, l’ouverture sur les autres,
la participation à la vie sociale renforcent l’aptitude au bonheur.
Parce que la séduction reste un critère essentiel de
jeunesse, quel que soit l’âge, s’entretenir, se surveiller, se
révèle aussi important que s’informer ou se distraire.
Nombreux sont les artifices, médicaux et cosmétologiques, qui permettent d’agrémenter le visage et la silhouette. Si quelques rides ternissent l’éclat d’un visage,
certains traitements à base d’acide hyaluronique et de toxine
botulique peuvent les dissiper pendant plusieurs mois.
Un discret «épaississement des lèvres par exemple est un
geste simple (acide hyaluronique) dont l’effet sur le plan sensuel en vue d’un rajeunissement est un artifice fréquemment
utilisé, complété par le comblement des sillons naso-geniens.
De même les rides d’expression qui sont d’origine
musculaire, comme les rides frontales ou intersourcilléres,
sont bien corrigées par la toxine botulique.
Quant aux paupières, c’est l’une des demandes les plus
fréquentes en chirurgie. On appelle cette intervention la blépharoplastie esthétique. Au niveau des paupières, les premières
rides flétrissent et distendent la peau. Il existe aussi des
« poches » graisseuses à la paupière supérieure, mais surtout
à la paupière inférieure, ce qui donne un regard « fatigué ».
La blépharoplastie corrige ces effets, seule ou associée à un lifting partiel ou total. Cette intervention se
pratique chez l’homme et chez la femme, vers l’âge de
quarante ou quarante-cinq ans, ou plus tôt quand des
facteurs héréditaires marquent prématurément les paupières. Comme pour toute intervention, on fait un bilan
préopératoire complet, avec dans ce cas un éventuel examen ophtalmologique, et on travaille sur une série de photos de la patiente. Sous anesthésie locale ou générale, on
fait une incision discrète, cachée dans un pli naturel des
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LE CORPS REVISITÉ
paupières. On retire l’excès de peau, de même que la
« hernie » graisseuse qui, souvent, existe à l’angle interne
de l’œil, près de la racine du nez. Pour les paupières
inférieures, l’incision effectuée au ras des cils est
pratiquement invisible. Les « poches » de graisse sont
retirées et, si excès de peau il y a, il est corrigé pour
retendre modérément la paupière sans modifier l’expression du regard. Sans excès de peau, on peut enlever les
poches par voie conjonctivale, c’est-à-dire par l’intérieur
de la paupière, sans aucune cicatrice. Le pansement est
mis en place pendant deux ou trois heures et un collyre
est prescrit pour protéger l’œil. Un œdème ou des ecchymoses apparaissent parfois mais s’atténuent en quelques
jours. Il faut ensuite appliquer des compresses froides
pour éliminer l’œdème, ou porter des lunettes teintées
pour masquer les ecchymoses. Les fils sont retirés une
semaine plus tard et le maquillage est possible dès le lendemain. Si l’on veut améliorer encore la qualité de la peau,
on peut associer à cette intervention un léger peeling.
Dans tous les cas, les résultats sont très satisfaisants
car le regard est rajeuni et les cicatrices sont très discrètes.
Tout cela ne ralentit certes pas le vieillissement
biologique programmé mais, en agissant sur l’apparence,
et en masquant les aspects inesthétiques, ces gestes
atténuent l’angoisse et l’obsession liées à cet état.
La qualité de la peau est très importante. Comment la
sauvegarder ?
La peau n’est pas seulement l’enveloppe qui
recouvre le corps humain, elle est un organe à part
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
entière, particulièrement développé et sophistiqué, ses
fonctions multiples sont peu exploitées, peut-être parce
que le sens du toucher est très inhibé par notre éducation.
Elle est constituée de l’épiderme, élément superficiel
du revêtement externe, et du derme, élément intermédiaire
qui joue un rôle de soutien par la présence de fibres et de
vaisseaux.
L’hypoderme est plus profond, constitué de tissus
conjonctifs. Il existe différents types de peaux, et entre la
peau sèche et la peau grasse de nombreux états intermédiaires. C’est dans le derme que se trouvent les fibres de
collagène qui assurent la solidité des tissus, et les fibres
élastiques qui garantissent le tonus de la peau.
Le bon fonctionnement de cet organe très complexe
protège notre organisme. La peau joue un rôle dans la
régulation thermique et reste le sas obligé des variations
et des agressions du monde extérieur. Elle est notre premier vêtement, la protection fondamentale de notre
apparence. Comme les yeux, le regard, la peau fait passer
l’éclat de la vie qui contribue à toutes les formes de
beauté.
Sa santé est l’obsession de tous les adolescents, de
toutes les femmes et de plus en plus d’hommes. Elle est
une constante des canons de la beauté, passant de l’aspect
laiteux, diaphane, à celui plus hâlé qui fait le succès
d’autres types de femmes aujourd’hui. Ceci explique que
bon nombre de problèmes dermatologiques aient une
cause psychosomatique.
La santé et la beauté optimale de la peau se situent
avant la puberté. L’enfant a une peau souple, ferme et
élastique. Le grain est lisse, les pores ne sont pas apparents et la surface est veloutée au toucher. Certains
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LE CORPS REVISITÉ
adultes ont la chance de garder longtemps cette peau
d’enfant. Mais pour la majorité d’entre nous, elle se fragilise ou s’altère à cause de certaines maladies, de modifications hormonales, et bien sûr du tabac, du soleil ou
d’autres agents extérieurs.
Le vieillissement, lui, commence dès l’âge de vingtcinq ans par des microtraumatismes progressifs. Il se
caractérise par la perte d’élasticité des tissus, ce que l’on
appelle la fibrose, et les fibres élastiques sont remplacées
par des fibres de collagène inextensibles. La peau se dessèche ; la sécrétion naturelle des glandes superficielles,
sébacées et sudorales, diminue et atténue le fonctionnement des différentes cellules de la peau. Les tissus se
plissent, se distendent et la peau se ramollit dans ce processus qui définit le vieillissement. Les radicaux libres
sont des équivalents de déchets du métabolisme cellulaire
qui accentuent le processus. Toute cellule au terme
de son métabolisme en produit. Ces ions sont normalement neutralisés, mais lorsqu’ils sont libres ils peuvent
provoquer une lésion sur les tissus qu’ils côtoient.
Ainsi dans la lutte contre le vieillissement, la neutralisation des radicaux libres est un élément important, et
dans le cadre de cette action antiradicalaire on connaît
l’effet bénéfique de la vitamine E, de la vitamine A, de la
vitamine C, du zinc et du sélénium. Lorsque ces radicaux
libres sont nombreux, ils agressent les cellules, les
fibres de collagène et l’ensemble des constituants intracellulaires. L’activité de la cellule se ralentit et son
efficacité s’amoindrit. Entre autres effets, la peau s’affine,
se fripe et perd de son élasticité. Des taches plus foncées
apparaissent dans certains endroits du fait de l’accumulation de pigments, l’épiderme se dessèche, la peau est plus
rugueuse.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Elle perd ses connexions internes avec les tissus
sous-jacents, elle n’est plus retenue par des éléments de
jonctions efficaces qui existaient auparavant. Ceci est
particulièrement vrai au niveau de la paroi abdominale,
des fesses, des cuisses, des bras. A cet ensemble de facteurs s’associent la baisse de l’activité des systèmes de
défenses et donc le risque infectieux. Comme il n’existe
pas de traitement médical préventif du vieillissement, on
fait disparaître l’excès de peau au niveau du visage, du
ventre ou de l’intérieur des cuisses par une intervention
chirurgicale de type esthétique.
Plus les tissus sont jeunes et de bonne qualité, plus
les résultats sont optimisés. Certaines opérations
s’avèrent plus délicates selon l’imprégnation tabagique
de la peau. Aux Etats-Unis, les chirurgiens refusent
d’opérer si les patients fument beaucoup, et ils font signer
une décharge pour ne pas avoir à répondre d’une
mauvaise cicatrisation. Le tabac et d’autres agressions
extérieures, comme un bronzage excessifs et répété, ternissent la luminosité du teint, vieillissent prématurément
la peau et entraînent un décalage entre la jeunesse réelle
d’une personne et son apparence.
La fascination des peintres et des poètes pour les
peaux diaphanes est bien dépassée. On n’est plus au temps
des ombrelles, des capelines qui protégeaient la peau du
moindre rayon de soleil. On est tombé dans l’excès
inverse avec la mode des plages et celle des cabines de
bronzage en milieu urbain.
De la pâleur des bourgeoises occidentales, nous
avons dérivé vers la mode du teint hâlé, qui évoque
l’exotisme des beautés orientales. Etre bronzé aujourd’hui
signifie que l’on a une bonne mine, que l’on paraît
dynamique et donc jeune. Mais ce bronzage, naturel ou
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LE CORPS REVISITÉ
artificiel, abîme toutes les peaux à plus ou moins long
terme. Les mises en garde répétées des dermatologues ne
sont pas sans fondement. Les rayons solaires sont agressifs pour l’épiderme, malgré la sensation de bien-être
moral et physique qu’ils procurent.
Ils assèchent la peau et font apparaître des rides en
même temps que des tâches brunes. Le soleil est aussi
un facteur prédisposant à la transformation maligne du
mélanome, cancer particulièrement grave survenant chez
les sujets jeunes. D’où la précaution d’éviter les longues
expositions au soleil.
Les grains de beauté sont en général bénins. Parfois,
l’un d’entre eux devient plus large, plus épais, plus grand
avec un contour irrégulier ou un peu homogène. S’il
devient douloureux ou s’il saigne, il convient d’enlever
ces lésions pour éviter toute transformation ultérieure.
Mais tous ces problèmes ne doivent pas être une obsession
simplement une précaution. D’autre part, une peau
abîmée par l’acné ou des poussées infectieuses, la varicelle par exemple, perd son uniformité. Nous disposons
de plusieurs techniques pour remédier à ces détériorations de la peau. La dermabrasion, les peelings et le
Laser scanné pulsé sont des méthodes radicales pour
« changer de peau », mais elles doivent être prescrites
médicalement.
La dermabrasion est une méthode mécanique
simple qui ne convient pas à toutes les peaux. Les peaux
mates risquent de perdre leur homogénéité et sont parfois
localement dépigmentées. Cette technique convient
bien à des séquelles superficielles de l’acné ou de varicelle
sur peau claire. Avec une meule rotative, on procède à
un gommage qui supprime, couche par couche, certaines irrégularités. De cette façon, on traite la peau
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
du visage (en faisant une anesthésie locale ou générale).
Ceci est fait en contrôlant précisément l’épaisseur de peau
enlevée.
Les inconvénients de cette méthode se traduisent
surtout par les suites opératoires un peu lentes. Les
crèmes sont utilisées pour aider à la cicatrisation plus
rapide de la peau qui est rouge d’abord et rosit au fur et
à mesure que l’épiderme se reconstitue. Il faut quatre à
six semaines pour la pigmentation redevienne normale. Si
l’on poursuit une activité scolaire ou professionnelle, on
peut masquer la couleur rose avec des fonds de teint
adaptés.
Pendant ce temps, l’épiderme reste fragile, il est donc
préférable d’éviter l’exposition au soleil dans les six mois
suivants. Cette méthode ne corrige pas les dépressions
cutanées trop profondes, ni les traces d’une trop forte
acné, mais on peut la renouveler un an plus tard pour
améliorer le résultat.
La deuxième technique dont les effets sont similaires
est le peeling. On traite la peau qui desquame par des
produits chimiques. Les peelings légers couramment
utilisés sont à base de résorcine, une pâte qui nettoie la
peau en profondeur, donne bonne mine et peut se faire
régulièrement sans aucun risque.
L’acide trichloracétique (TCA) est très connu, très
maniable, adaptable à différents types de peaux et beaucoup plus efficace que la résorcine. Il faut en doser la
concentration, de 20 à 50 %, et préparer la peau pour la
rendre plus réceptive au produit, permettant ainsi une
action plus homogène. C’est le docteur Obagi, un dermatologue californien, qui a développé ce peeling et
insisté sur la préparation de la peau. Cela réduit considérablement les incidents et évite les inconvénients connus
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LE CORPS REVISITÉ
de la dermabrasion comme la dépigmentation localisée.
Ce peeling atténue les rides et, associé au lifting, améliore
réellement la qualité de la peau.
Le phénol est un produit chimique beaucoup plus
fort, plus efficace mais moins contrôlable. Il est fort peu
utilisé en France et, si son action est spectaculaire pour
retendre, lisser la peau et effacer les rides, le risque de
dépigmentation voire de cicatrices difficiles à corriger est
réel.
En fait, l’inconvénient principal de ce produit par
rapport aux autres est qu’on ne sait pas exactement à
quelle profondeur on pénètre. Aux Etats-Unis, il est fréquemment utilisé, car les Américaines se maquillent
beaucoup et masquent cette peau trop tendue, trop lisse
qui a perdu son naturel. En Europe, et à mon avis à juste
titre, cette technique est beaucoup moins utilisée.
La troisième technique, qui est sans doute celle de
l’avenir, utilise le Laser. Le Laser n’est pas uniquement
ce rayon qui coupe, il est contrôlé, domestiqué, et l’on
peut régler sa puissance, sa distance et son efficacité. Le
traitement localisé ou diffus s’applique à la lèvre
supérieure, à la paupière inférieure, aux pattes-d’oie, au
dos des mains, voire au visage entier. Il permet un bon
contrôle visuel du geste effectué et une action progressive,
profonde, sans trace de cicatrices, ni de saignements. Très
efficace pour les rides de la patte-d’oie, de la lèvre
supérieure, de la paupière inférieure et pour les « poches
» malaires, le Laser scanné pulsé pose essentiellement le
problème du bon choix de l’indication, et de la gestion
des suites opératoires qui peuvent être longues (rougeurs
contraignant à l’utilisation d’écran total et de fond de teint
pendant quelques semaines).
Toutes ces techniques corrigent en surface la dété-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
rioration de la peau, lui redonnent un bel éclat et une
apparence de jeunesse et de meilleure élasticité. C’est une
amélioration qualitative de la peau.
De façon différente, et complémentaire, un lifting, qui
retend la peau en excès, peut être associé à ces différents
gestes pour obtenir un résultat plus complet ; c’est une
amélioration quantitative.
Utilisées à bon escient, effectuées ni trop tôt, ni trop
tard, ces différentes techniques, plus ou moins associées,
sont à l’évidence des atouts nouveaux et efficaces qui
soignent l’apparence si importante dans notre société.
Pourquoi et comment se forment les rides ?
On dit qu’elles sont les sillons creusés par la vie. Elles
raconteraient nos rires, nos soucis, nos larmes, nos peurs
et notre sérénité. Mais leur apparition a aussi des causes
physiologiques, elle correspond à une diminution
localisée de l’épaisseur de la peau. Leur profondeur est
liée à une atrophie des tissus qui s’installe avec le
vieillissement. Les rides d’expression apparaissent
progressivement sur le visage, autour des yeux, des lèvres
ou sur le font. Elles sont dues aux mimiques répétées qui
agissent sur les muscles peauciers. D’autres rides très
fines parcheminent le visage, lorsque la peau a dépassé
son capital soleil et qu’elle continue d’être exposée
longtemps et souvent.
Enfin, les plis d’affaissement qui altèrent l’ovale du
visage apparaissent au niveau du menton, des bajoues et
des paupières. Tout cela est un processus normal, car la
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LE CORPS REVISITÉ
peau perd son élasticité, se détend et « tombe » avec le
temps. C’est ce que l’on appelle la ptose qui, elle, ne se
corrige qu’avec la chirurgie esthétique, par un lifting
partiel ou total. On peut agir sur tous ces facteurs, on peut
retarder l’apparition des rides. Cette prévention s’avère
efficace quand elle est basée sur une bonne hygiène de vie
et un entretien régulier de la peau. On ne dira jamais assez
que le soleil est très important pour la vie, mais nocif pour
une peau non protégée.
De la même façon, les effets du tabac sont incontestablement nuisibles. Ils perturbent l’oxygénation des
tissus, la circulation sanguine ; ils ternissent la peau et les
cheveux.
Outre ces facteurs directement responsables de
l’apparition des rides, il est important de considérer que
le mode de vie a des incidences. Une alimentation
équilibrée évitera un changement de poids trop fréquent
et déstabilisant pour le métabolisme. La peau doit être
hydratée par une absorption d’un litre et demi d’eau par
jour, et par des produits cosmétiques nettoyants et traitants.
Il faudrait supprimer les boissons alcoolisées, pratiquer
des sports de plein air et éviter le surmenage.
Il faudrait dormir d’un bon sommeil réparateur
chaque nuit. La peau, l’organisme tout entier doivent être
ménagés, soignés jour après jour pour résister aux coups
de griffes du temps. Les rides étant le reflet de notre vie,
autant la ménager et se ménager soi-même. Autant profiter
aussi de toutes les techniques proposées par la chirurgie
esthétique qui naturelles, légères ou radicales améliorent
considérablement l’apparence d’un visage dont l’éclat est
plus ou moins terni par l’apparition des ridules et des
rides.
Nous utilisons souvent les injections de collagène
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
pour combler les rides. Quant aux lèvres qui deviennent
plus fines avec l’âge, et la bouche qui paraît moins pulpeuse, nous pouvons en rectifier la courbe et l’épaisseur
en injectant du collagène bovin purifié. Ce produit existe
sous différentes formes (Zyderm 1, Zyderm 2 ou
Zyplast), mais un test préalable doit toujours être
effectué, au niveau du bras, pour éliminer tout risque
d’allergie.
En l’absence de contre-indication, le produit est
injecté par une simple piqûre dans le derme superficiel. Il
s’ensuit une phase d’œdème ou de rougeur qui dure
vingt-quatre heures. L’effet du collagène subsiste
en fonction de sa localisation, quelques mois ou un an au
bout desquels le geste peut être répété.
Le contour des lèvres est l’une des indications les
plus fréquentes de ce procédé avec le comblement des
rides du sillon naso-génien. Il est évident qu’en agissant
chirurgicalement sur les muscles responsables des rides,
nous obtenons un résultat efficace et satisfaisant pour
plusieurs années. Ainsi peut-on procéder à un lifting
frontal pour les rides du front et les rides inter-sourcilières.
Au cours d’un lifting cervico-facial ou temporal, nous
allons atténuer les « pattes-d’oie » en retendant le muscle
orbiculaire des paupières.
Dans ce domaine, une nouvelle approche est possible
par l’endoscopie et le laser, qui suppose pour la première
une incision cutanée limitée, et pas d’incision du tout pour
le second. Mais toutes ces techniques chimiques,
mécaniques ou chirurgicales peuvent être, selon les cas,
associées pour de meilleurs résultats.
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LE CORPS REVISITÉ
Quelles sont les indications précises d’un lifting du
visage ? Comment procédez-vous ?
Il n’existe pas un seul mais plusieurs liftings, car
chaque geste est adapté à chaque cas particulier : un lifting
cervico-facial agira au niveau des tempes, sur le bas du
visage et le cou ; un lifting frontal, un mask-lift, aura effet
net au niveau du regard, des sourcils et du front ; ou des
liftings dits partiels dont l’objectif est plus limité. C’est
évidemment au terme d’une consultation adaptée, portant
non seulement sur les réalités physiques du vieillissement,
mais également sur les motivations psychologiques et la
disponibilité de la patiente, qu’il conviendra de définir le
geste approprié. L’explication des techniques, sans forcément entrer dans les détails, mais en insistant bien sur les
suites opératoires et les inconvénients, est déjà un élément
rassurant de l’intervention.
L’anxiété avant une opération est un sentiment normal. C’est même un phénomène protecteur. On ne peut
envisager une intervention quelle qu’elle soit sans une appréhension ; il s’agit donc de la contrôler et c’est le cas
de la majorité des patientes.
Une intervention au niveau du visage peut se concevoir de façon isolée, c’est ce que l’on appelle le lifting
simple, ou être associée à d’autres gestes complémentaires, pour optimiser le résultat.
On peut ainsi pratiquer une chirurgie esthétique des
paupières ou atténuer les rides de la patte-d’oie, du visage
ou des lèvres au laser, avec un peeling ou une dermabrasion. Là aussi, le choix de la technique dépend des spécificités tissulaires du patient.
153
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Le lifting cervico-facial est l’intervention la plus
fréquemment pratiquée. Il reproduit le résultat observé par
la femme qui, devant son miroir, tend sa peau sur les
pommettes, et voit se redéfinir l’ovale de son visage et
son cou se retendre. L’intervention se fait en général sous
anesthésie générale ou légère.
Son principe, une fois la peau décollée, est de
remettre en tension les muscles à leur bonne place et de
retirer l’excès de graisse au niveau des bajoues et du
double menton. Il s’agit donc d’une nouvelle répartition
des volumes.
La durée de l’hospitalisation est de vingt-quatre à
quarante-huit heures, et un pansement est mis en place
pendant quelques jours pour protéger les cicatrices. Au
bout d’une dizaine de jours, l’œdème, c’est-a-dire le
gonflement, diminue, et deux à trois semaines après
l’opération, la reprise d’une activité tout à fait normale est
possible.
Avant l’intervention on prescrit parfois des médicaments anti-œdémateux ; la patiente doit procéder éventuellement à ses soins de cheveux, car elle ne pourra
refaire une teinture qu’un mois après l’opération. Le
port d’un foulard et de lunettes teintées assure la discrétion à la sortie de la clinique. Dès le dixième jour après
l’intervention, la patiente peut se remaquiller normalement et les fils qui en général sont résorbables font
l’objet de soins antiseptiques. Dans certains cas, on propose à la patiente des massages ou des drainages au
niveau du visage, qui accélèrent la résorption de
l’œdème.
Certains gestes ont un effet localisé, comme le lifting
partiel, cervical qui n’agit que sur le cou : la cicatrice se
trouve derrière l’oreille. L’intervention, plus courte,
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LE CORPS REVISITÉ
dure environ une heure et les suites opératoires ne
s’étendent que sur huit à dix jours.
Quand c’est la partie supérieure du visage qui est
corrigée, le lifting est temporal, avec une cicatrice dans le
cuir chevelu. Il remet en tension le tiers supérieur du
visage. Là aussi, le geste opératoire est plus simple (une
heure d’intervention) et les suites plus rapides.
Un lifting frontal, avec une incision dans le cuir chevelu, atténue l’ensemble des rides du front, remonte les
sourcils et améliore l’obliquité du regard. Une variante de
cette technique est le mask-lift qui s’avère aussi efficace
mais est réalisé de façon plus profonde.
Un progrès tout à fait notable en matière de lifting du
front, est la chirurgie dite endoscopique. L’intervention
est réalisée sous contrôle visuel par fibre optique et à
l’aide d’une instrumentation tout à fait adaptée. Cette
opération peut remplacer un lifting frontal en agiss a n t sur l’ascension des sourcils et les rides intersourcilières avec des suites opératoires très atténuées. Ce
progrès trouvera sans doute des indications de plus en plus
étendues.
Le lifting cervico-facial reste pour la majorité des cas
une intervention féminine. La cicatrice située à l’intérieur
et derrière l’oreille est d’une discrétion remarquable, et la
longueur des cheveux de la femme, le port de boucles
d’oreilles permettent de mieux la cacher.
Chez l’homme, la différence se situe au niveau des
cicatrices à cause des cheveux plus courts et de l’absence
de maquillage. Le tracé de l’incision se fait à l’intérieur
et derrière l’oreille. Il reste discret et l’on recommande au
patient de laisser pousser ses pattes de cheveux, pour
cacher la cicatrice. Par ailleurs, pour que cette intervention
soit discrète, on lui demande de laisser pousser
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
sa barbe pendant les dix à quinze jours qui suivent
l’opération. La barbe naissante masque complètement
l’œdème et les ecchymoses, ce qui permet au patient, au
terme de deux semaines, et une fois rasé, d’apparaître sans
aucun signe de l’intervention mais avec une meilleure
mine.
Une question essentielle est de savoir quand recourir
à un lifting…
Il ne s’agit pas de conseiller le lifting dès l’apparition
des premières ridules, mais il est évident que l’intervention réalisée plus tôt, sur une peau de meilleure qualité,
permet des résultats plus durables. Cela étant, il
n’est pas souhaitable d’attendre que l’affaissement soit
très marqué, les rides plus importantes, ou la peau plus
fragile, car l’effet peut paraître trop spectaculaire. Le
résultat sera moins durable, puisque la qualité des tissus
est moins bonne, d’autant que cette intervention a
comme objectif principal de rester jeune plutôt que de
rajeunir.
Tous les patients souhaitent un résultat qui ne se
« voie pas »… Ils ont peur, à juste titre, des visages figés
et excessivement tendus qui perdent leur expression. Il
faut quand même savoir que ces visages presque caricaturaux sont souvent dus à des techniques anciennes qui
n’agissent pas sur les muscles ni sur la graisse, mais
tirent excessivement la peau. Ou bien ces personnes aux
traits figés ont déjà quatre ou cinq liftings à leur actif, et
leur peau a perdu toute sa souplesse et toute son élasticité.
Le succès de tout lifting dépend bien entendu de la
compétence du chirurgien, mais aussi de la qualité des
tissus de la patiente. Les suites opératoires devront être
minutieusement contrôlées par l’équipe chirurgicale
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LE CORPS REVISITÉ
pendant les deux mois suivant l’intervention. Les
conseils postopératoires sont rigoureux, et une bonne
hygiène de vie est un facteur essentiel pour augmenter la
durée et l’efficacité de l’intervention. Il arrive parfois
d’observer, quatre ou cinq ans plus tard, un léger relâchement de ce lifting chez certains patients. Dans ce cas,
on effectue une petite retouche qui redonne une netteté au
visage.
De plus en plus, d’ailleurs, il paraît intéressant de
concevoir tous les quatre ou cinq ans quelques petites
corrections, sous anesthésie locale, pour améliorer le
résultat et retarder l’échéance d’une autre intervention.
Cette chirurgie à petits pas connaît un grand succès aux
Etats-Unis et va s’intégrer très rapidement dans nos
habitudes.
Quelle est l’importance du nez dans un visage ? Doit-il
avoir une forme particulière pour être un élément de
beauté ou d’harmonie ?
Le nez confère au visage sa symétrie ou son asymétrie.
Il est présent dans le miroir, de face comme de profil, et
l’on peut comprendre que le moindre des ses défauts
focalise toute l’attention du sujet. Nous nous structurons
avec ce nez au milieu du visage, quel qu’il soit. C’est
surtout au sortir de la puberté qu’il prend sa forme définitive
et une fonction esthétique plus importante.
On connaît les malheurs de Cyrano de Bergerac
avec son nez démesuré, ceux de Pinocchio qui ont fait
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
trembler de nombreux enfants, effrayés de sentir le
mensonge s’inscrire sur leur visage. Le cauchemar ou le
rêve, mais toujours cette sublimation du nez pour tenter
de mieux vivre avec. Ceux qui ne parviennent à trouver
ce compromis ont la possibilité d’avoir une intervention
de chirurgie esthétique. J’écarterai d’emblée les « récidivistes » qui n’en finissent pas de se refaire un nez pour se
refaire un visage ; ils sont rares mais leur quête n’est plus
esthétique, elle est réparatrice d’une identité peu ou mal
assumée.
Lorsque le nez fait obstacle à une harmonie du
visage, à une expression de soi, il vaut mieux tenter de le
corriger, sans le changer radicalement. Les rhinoplasties
esthétiques aujourd’hui n’aboutissent plus au même nez
pour tous, à ce petit nez dit « à la parisienne ». Au
contraire, nous sommes capables de faire disparaître une
bosse, une longueur ou une forme trop proéminentes sans
modifier la personnalité, l’expression d’un visage.
A l’époque des grandes stars du cinéma, un nez trop
long était jugé gênant pour régler les lumières. Ses ombres
rompaient l’harmonie. De nos jours le problème ne se
pose plus, compte tenu des progrès techniques de la photo
et du cinéma : on règle mieux les éclairages, et l’utilisation de la couleur réduit tous ces reliefs d’ombres et de
lumières. Dans la majorité des cas, les patientes souhaitent
un nez droit et naturel qui s’intègre harmonieusement à
leur visage, et sur lequel on ne remarque pas les signes
d’une intervention. Il est rare, voire exceptionnel, qu’une
patiente demande de façon extrêmement précise le nez de
telle ou telle personne connue.
Comme d’autres éléments du corps et du visage, le nez
évolue dans le temps. La peau et les cartilages s’épaississent, l’élasticité est moindre, la pointe du nez « tombe ».
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LE CORPS REVISITÉ
Certaines opérations, dont le but est d’obtenir un effet
de rajeunissement du visage, peuvent comporter un geste
sur le nez qui, affiné et remis en place, atténue parfois
notablement l’apparence du vieillissement.
Le nez est constitué de trois structures bien distinctes : une base osseuse (ce sont les os propres du nez),
un relief cartilagineux (à la pointe du nez) et un revêtement cutané sur son ensemble. Chacun de ces trois éléments peut de façon isolée ou combinée être à l’origine
d’une légère dysharmonie. Ainsi peut-il exister une
bosse, c’est-à-dire une croissance exagérée au niveau
osseux et cartilagineux ; ou une pointe large, c’est-à-dire
une hypertrophie du cartilage, ou au contraire un nez
long dû à une cloison nasale trop développée. Ces différentes anomalies, associés de façons diverses,
motivent une intervention chirurgicale. Elle est fréquemment pratiquée entre dix-huit et trente ans, au sortir de
la puberté, et en accord total avec les parents. En tout
état de cause, il faut respecter l’harmonie des volumes et
des proportions qui permettra au nez de s’intégrer
naturellement dans le cadre de l’ensemble du visage sans
lui ajouter une caractéristique particulière, que ce soit de
face ou de profil.
Les progrès importants dans la connaissance de
l’anatomie, et des techniques chirurgicales sur les différents éléments du nez, permettent des rhinoplasties
très personnalisées, sur tout ou une partie du nez, et l’on
parle de rhinoplastie conservatrice, de rhinoplastie de
pointe, de rhinoplastie a minima. Il est même possible de
reconstituer un nez lorsque certaines formes de cartilage
sont anormales ou déviées. On fait alors appel à des
techniques de greffe de cartilage, prélevée sur la cloison
nasale. Mais cette opération reste complexe, car outre
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
l’aspect technique l’évolution de ces différents tissus
modifie petit à petit le nez jusqu’à ce qu’il se « pose »
vraiment au bout d’un an environ.
Parfois on fait une petite retouche pour obtenir un
résultat plus adapté et une harmonie plus complète : on
rétrécit les narines ou on affine la pointe du nez. Dans le
cadre du bilan préopératoire, on demande des photos aux
patients pour préciser l’aspect du nez de profil, et donner
une idée du résultat final auquel le patient s’habitue
progressivement.
Dans la majorité des cas, la rhinoplastie esthétique
est indiquée pour une bosse ou une pointe un peu
épaisses. Certains cas sont techniquement difficiles à
réaliser, je pense au nez dit de Cyrano à cause de l’hypertrophie des cartilages et de la peau, et de l’exagération des
reliefs.
J’ai eu pour patiente une ravissante Antillaise,
mannequin de profession. Elle était grande et mince, bien
sûr, mais elle souhaitait corriger son nez un peu épaté. Il
fallait en affiner la pointe et la base tout en le projetant
légèrement. Cela était possible et simple. Je l’ai revue
quelques semaines après cette intervention. Je suis
revenu aux photos d’avant l’opération : elle était jolie
avant mais la différence était spectaculaire. Cette simple
correction l’a rendue encore plus belle ! Je sais, par
expérience, ce que l’on peut obtenir en chirurgie esthétique mais certains résultats sont étonnants. La patiente
elle-même et son amie qui l’accompagnait éclatèrent de
rire en voyant la photo d’avant, témoignant à leur manière
de leur surprise et de leur satisfaction. Il est surprenant de
voir comment les patientes et leur entourage oublient
leur aspect initial pour intégrer très vite le résultat postopératoire.
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LE CORPS REVISITÉ
Le résultat que l’on obtient n’est pas seulement
relatif à la technique employée, mais aussi à la qualité
des tissus et de la peau des patients opérés. Comme pour
toute intervention, compte tenu de la place du nez dans
le visage et de l’âge du patient, les suites opératoires
entraînent des modifications du comportement : on
observe une plus grande ouverture par rapport aux
autres et des efforts pour améliorer toute la silhouette,
comme si le corps et l’esprit étaient vécus et représentés
autrement.
La calvitie est le « mal » des hommes, mais la chirurgie
esthétique vient à leur secours. Comment procédez-vous
pour remédier à la calvitie ?
Les cheveux constituent un élément esthétique
important pour les femmes et les hommes. Ils sont l’objet
de fantasmes, le point de départ de grands récits
mythologiques. Ils encadrent le visage, le dévalorisent ou
au contraire l’embellissent. Or les hommes ont hélas
l’inconvénient de les perdre prématurément, parfois brutalement, à la suite d’un choc psychologique.
De l’époque biblique à nos jours, en passant par
la civilisation égyptienne et romaine, la chevelure – sa
beauté, son abondance – est pour les deux sexes un atout
important de l’aspect esthétique. Elle est pour la femme
un symbole de provocation sexuelle. Pour l’homme elle
incarne, depuis Samson, l’invincibilité, la force, la vitalité.
Le scalp ou le crâne rasé sont synonymes d’une défaite ou d’une humiliation que l’on s’inflige, ou que les
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
autres vous imposent. Autrement dit, la chevelure est un
critère évident de beauté et de jeunesse. Chez l’homme,
même grisonnantes, les tempes restent un élément de
charme et de séduction. Les coiffures évoluent au gré
des modes, mais les cheveux, leur abondance ou leur
couleur sont toujours une parure chargée de sens.
Les hommes qui se « déplument » ont le sentiment
désagréable de perdre aussi leur ramage, d’autant plus
que, lorsqu’elle est mal vécue, la calvitie est difficile à
cacher malgré toutes les perruques et les postiches dont
on dispose.
En France, neuf millions d’hommes sont concernés
par la calvitie !
Il est intéressant de comparer le problème de la calvitie chez l’homme à celui de la cellulite chez la femme…
A chacun ses soucis !
Ces deux manifestations, qui ont un caractère héréditaire et une composante hormonale, ont des retentissements tout à fait différents pour les deux sexes. Les
femmes sont, en général, beaucoup plus sensibles et
embarrassées par leur cellulite. Sans doute est-on plus
indulgent pour l’homme, chez qui la calvitie est vécue
comme une disgrâce esthétique mais pas forcément
comme un handicap à la séduction. A l’évidence, les
femmes sont plus tolérantes pour le physique des
hommes !
Dans la grande majorité des cas, l’alopécie masculine est d’origine séborrhéique. Elle présente des
caractéristiques cliniques et évolutives particulières.
C’est au niveau des régions temporales que la chute
apparaît d’abord, de façon plus marquée sur les côtés
(golfes temporaux), isolant progressivement un îlot
médio-frontal (le toupet).
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LE CORPS REVISITÉ
La région occipitale dans le même temps se dégarnit, c’est
la tonsure. Selon les cas, la chute de cheveux apparaît plus
précocement ou est plus importante soit en avant (région
frontale), soit en arrière (région occipitale).
Peu à peu, ces deux zones de calvitie se rapprochent l’une
de l’autre, ne laissant qu’une couronne chevelue périphérique et réalisant la calvitie « hippocratique ».
Sur le plan psychologique, la chute de cheveux chez
l’homme est vécue de façon variable. Cela peut aboutir à
un véritable état pathologique et obsessionnel, car la calvitie est une atteinte à l’image de la jeunesse et du dynamisme, et à la virilité. Elle est aussi ressentie par certains
comme le signe d’un vieillissement prématuré. L’indication chirurgicale et le déroulement des différentes interventions doivent tenir compte de la façon dont le patient
« vit » sa calvitie.
Si, jusqu’à présent, la correction chirurgicale de l’alopécie
n’est pas aussi pratiquée qu’elle le devrait, cela est en partie dû aux résultats encore discutables obtenus par les anciennes interventions.
La transplantation capillaire, technique d’Orentreich, repose sur le principe du prélèvement de petites greffes de
cheveux sur la région occipitale et greffées dans la région
glabre. Les greffons retenus à l’origine de cette technique,
d’un diamètre de 4 millimètres en moyenne, comportaient
de 10 à 15 follicules pileux. Le résultat aboutissait à une
redensification capillaire de la zone alopécique, mais l’aspect n’était pas naturel. Chaque greffon séparé de ses voisins ressemblait aux « cheveux de poupée », qui signait
l’intervention.
L’utilisation de micro-greffes voire de greffes cheveu par
cheveu est un formidable progrès, elle permet une amélioration naturelle et spectaculaire des résultats.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
La micro-implantation capillaire résout de façon
rapide, simple, sous anesthésie locale, la majorité des
problèmes posés par les différentes calvities. Il est
probable que ce progrès technique est à l’origine d’une
demande croissante en matière de correction de
l’alopécie.
Dans d’autres cas plus rares, certaines techniques
chirurgicales peuvent compléter l’action des microimplants de cheveux. Les techniques de réduction tonsurale, de lambeau du cuir chevelu ont ainsi vu leurs
indications décroître, même si elles se révèlent encore
utiles. Mais, là aussi, le vécu psychologique du patient
implique que l’on traite la calvitie au cas par cas.
Pouvez-vous tout nous dire à propos des seins et des
interventions qui les concernent ?
Le sein est le symbole de la féminité, refoulée, affirmée ou exhibée… Il est de toutes les modes et de tous les
fantasmes. Du plus loin de notre histoire à nos jours, il
incarne la femme, la mère, la volupté, la douceur de vivre
et la beauté féminine. La mythologie est riche d’histoires
le concernant. On lui attribue des formes, des fonctions
réelles ou imaginaires. Quand il est altéré par les
grossesses, le vieillissement ou une maladie, la femme
revendique le droit de savoir, de comprendre les causes
de ses modifications. Elle se sent amputée d’une partie
essentielle de sa féminité.
S’il est vrai que la conception de la beauté a beaucoup changé, l’harmonie d’ensemble reste un élément
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LE CORPS REVISITÉ
essentiel de l’équilibre esthétique. Ceci confère à toutes
les demandes d’intervention une importance fondamentale, qui traduit une remise en question globale et
un mal être. Il n’est pas un organe du corps humain plus
chargé d’émotion que le sein ; il englobe et associe
l’image de la mère nourricière et de la féminité épanouie.
Il est la source de la vie, où les nouveau-nés vont trouver
la nourriture essentielle de leur croissance, en même
temps que le signe le plus évident de l’identité sexuelle
de la femme. A l’origine, dans les civilisations préhistoriques, et dans les sociétés actuelles dites « primitives »,
le sein souvent dénudé est d’abord un élément nourricier.
Son pouvoir érotique s’est développé avec les premiers
signes d’organisation sociale moderne. Si de façon unanime les religions refusent les seins qui s’exhibent, c’est
pour dissiper le trouble qu’ils suscitent dans la réalité et
dans les fantasmes. Comment, alors, ne pas reconnaître le
rôle prépondérant de la poitrine, parmi les atouts de séduction et dans l’expression de la beauté.
Qu’est-ce qu’une telle poitrine ? Avant tout, une
poitrine ferme et tonique. Son galbe, plus que son volume,
détermine son esthétique, même si la mode est au
décolleté généreux et les fantasmes portés sur les poitrines
les plus opulentes. Le sein n’est pas un muscle, la gymnastique n’a sur lui aucun effet, il est composé de tissus
adipeux et glandulaire (qui produit le lait). De la naissance
à la puberté, le sein reste une ébauche, en apparence
identique chez le garçon et la petite fille.
Celle-ci, mue par la coquetterie et le désir d’affirmer
les débuts de sa féminité, portera un maillot une pièce
ou un soutien-gorge… Vers l’âge de douze ans, la
puberté féminine se caractérise par la sécrétion d’hormones spécifiques dont les effets vont se manifester sur
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
l’ensemble du corps. C’est la métamorphose : la chrysalide devient un beau papillon, la femme apparaît, ses
formes s’arrondissent, la taille grandit, les seins poussent,
fermes et beaux. La qualité de la peau est un élément
essentiel de cette esthétique du sein, car sa tonicité, son
élasticité rendent compte de son maintien et de sa fermeté.
On dit d’ailleurs qu’elle est le soutien-gorge naturel de la
poitrine.
A partir de ce stade, le volume du sein va prendre
l’aspect de sa maturité. Selon les cas, les facteurs héréditaires et le poids, la poitrine peut être volumineuse,
moyenne ou petite. A ce stade elle est toujours belle, sauf
dans les cas de gigantomastie, où le volume excessif et
anormal crée une réelle dysharmonie avec l’ensemble de
la silhouette. Une poitrine trop lourde peut provoquer des
douleurs dans la colonne vertébrale, mais elle reste un
élément de fierté de la jeune fille, qui voit le regard des
autres se porter autrement sur elle. Au cours de la vie de
femme, les seins vont évoluer et se modifier en fonction
de la fin du cycle menstruel.
C’est surtout lors de la grossesse, bien sûr, dès le
troisième mois, que le sein se modifie et se prépare à
fabriquer le lait. La poitrine s’épanouit, pour dès la naissance assurer son rôle nourricier. A chaque grossesse, le
sein subit les mêmes modifications. Souvent, du fait de
ces variations multiples, il se produit une atrophie de la
glande, une réduction progressive de son volume. La peau
n’a plus la même élasticité, elle se trouve en excédent par
rapport au contenu et le sein s’affaisse par rapport à sa position initiale.
C’est la ptose mammaire qui s’accompagne d’une
perte de tonicité et de fermeté. Cette évolution est mal
vécue par les femmes, puisque ce sein jusqu’alors très
beau devient inesthétique.
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LE CORPS REVISITÉ
Trop petits, trop gros, trop bas, trop mous, les seins
sont au centre de nombreuses préoccupations féminines
et conjugales qui conduisent les femmes à consulter un
chirurgien esthétique pour retrouver la beauté d’avant la
grossesse, ou donner à la poitrine un volume plus important… Certaines patientes vont exprimer très naturellement leurs préoccupations, d’autres prendront des
chemins détournés avant d’arriver au but de leur visite.
L’essentiel est de les laisser libres de formuler leur
demande, pour qu’elle soit claire et précise, dans un climat de confiance mutuelle. Le chirurgien peut mieux
apprécier s’il s’agit d’une véritable disgrâce, ou d’un
défaut mineur, amplifié par un désir de perfectionnisme
exacerbé. Dans tous les cas, le déroulement de l’intervention sera expliqué dans ses moindres détails, adapté au
mode de vie de la patiente, à ses préoccupations personnelles, familiales ou professionnelles.
Les interventions pratiquées sur les seins sont de
différents ordres. La réduction mammaire a pour but de
diminuer le volume de la glande, disproportionné par
rapport à la silhouette. Souvent, du fait de l’excès de
poids et de volume, une ptose et une distention cutanée
s’associent. Cette hypertrophie mammaire peut même
avoir un retentissement sur la statique vertébrale, préjudiciable à long terme. Cette disgrâce est aussi mal vécue
psychologiquement, et c’est souvent entre seize et vingt
ans que la motivation chirurgicale s’exprime. A cet âge
l’indication majeure étant d’ordre psychologique, on
rétablit l’équilibre de la silhouette, qui retrouve une normalité par rapport aux autres jeunes femmes de même
âge.
Lorsqu’une patiente est plus âgée, on lui conseille
d’attendre le terme de ses grossesses avant d’envisager
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
une intervention. Dans tous les cas les motivations sont
importantes, car les seins sont « lourds à porter » au sens
propre et figuré de l’expression. Une poitrine volumineuse
contraint en effet à des ruses vestimentaire, elle gêne
certaines postures dans la vie courante, empêche de faire
du sport et entrave la mise en valeur de la silhouette.
L’intervention va soulager de manière spectaculaire la
patiente, mais elle comporte l’inconvénient de laisser des
cicatrices discrètes mais visibles. L’incision est faite
autour du mamelon, elle comporte aussi un segment vertical et horizontal sous le sein. La longueur de la cicatrice
va dépendre de la ptose et du degré d’hypertrophie.
Certes, le rôle du chirurgien est de laisser le moins
de cicatrices possible, mais l’essentiel est de privilégier
la forme du sein pour obtenir un résultat harmonieux. Si
la durée d’hospitalisation est brève (de vingt-quatre à quarante-huit heures), la convalescence dure huit à dix jours
et la reprise de toute activité se fait ensuite rapidement.
Quand aux résultats, ils sont très satisfaisants pour
l’ensemble des patientes, il est étonnant de constater à
quel point elles se sentent soulagées et fières de leur nouvelle poitrine. Je me souviens d’une jeune patiente de
dix-sept ans ; elle mesurait 1,58 mètre et avait une très
forte poitrine. Elle se laissait grossir pour en cacher le
volume. Elle est venue me voir avec sa mère, mais elle
restait enfermée dans un mutisme obstiné, sans pour
autant perdre une miette du dialogue entre sa mère et moi.
Il était évident que les détails la concernant la gênaient beaucoup, et il me paraissait indélicat, vu son âge,
de lui demander d’attendre le terme de ses éventuelles
grossesses. Il était tout aussi illusoire de l’orienter
vers une psychothérapie qui n’aurait eu aucun effet sur le
vécu de ce réel défaut physique. L’intervention s’impo-
168
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LE CORPS REVISITÉ
sait et la rançon cicatricielle lui semblait un moindre
mal. Une fois opérée, elle est redevenue volubile,
enjouée, son dynamisme a pu s’exprimer, et elle s’est
empressée de mincir pour redonner une belle harmonie à
sa silhouette.
Je me souviens d’un week-end passé en Normandie.
J’accompagnais l’une de mes filles à la piscine et j’aperçus sur l’autre bord du bassin une jeune femme souriante
qui me faisait de grands signes. Comme je fixais
mont attention pour tenter de l’identifier, la jeune
femme, sans aucune gêne apparente, a enlevé son teeshirt pour me montrer sa poitrine, comme un signe de
reconnaissance. Pour conserver le ton d’une plaisanterie
complice, je lui a adressé un regard réprobateur sur son
attitude… Nous en avons ri, et j’avoue qu’au fond j’étais
très heureux pour elle… Un peu fier aussi… mais j’ai
surtout compris que cette réduction mammaire effectuée
sur sa poitrine était justifiée et nullement encombrée par
les cicatrices.
Les seins trop petits posent aussi un problème à certaines femmes. Elles sont très nombreuses en France,
chaque année, à demander une augmentation mammaire.
Ce sont des patientes qui, au terme de la puberté, n’ont
pas vu leurs seins grossir. Ou qui, au terme de leurs
grossesses, les ont vus s’affaisser et se réduire. Ces
dernières s’y habituent d’autant moins qu’avant la
grossesse leur poitrine était ferme et que pendant la grossesse
elle avait pris du volume tout en conservant sa fermeté.
Certaines femmes, pour des raisons personnelles ou
psychologiques, souhaitent donner plus de volume à leur
poitrine normale, sans doute pour donner plus de « relief » à leur féminité. La technique de l’augmentation
mammaire est simple : elle consiste à mettre en place un
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
implant, ou prothèse, soit derrière, soit devant le muscle.
Elle s’effectue sous anesthésie générale, et c’est une
toute petite incision que l’on fait au niveau de l’aisselle
ou de l’aréole. Au terme de vingt-quatre heures d’hospitalisation, la convalescence s’étend sur une dizaine de
jours et la vie redevient tout à fait normale.
Pour toutes ces indications il est important de préciser quelques éléments que j’explique lors de la consultation :
- le volume de la poitrine désiré par la patiente fait
l’objet d’une décision très précise sur la base de photos
relevées dans les magazines et apportées par la patiente.
Nous les regardons, nous en discutons et nous tentons de
définir l’aspect le mieux adapté en fonction de la morphologie de la patiente ;
- le deuxième élément important est de détailler les
inconvénients de l’intervention. La principale complication reste la formation d’une coque. La prothèse étant un
corps étranger, l’organisme réagit systématiquement à sa
présence, par la constitution d’une membrane autour de
la glande. Cette membrane reste souple le plus souvent et
ne change rien à la consistance du sein. Parfois, pour des
raisons que l’on ignore, cette enveloppe durcit, prend l’aspect d’une coque et donne aux seins un aspect peu naturel.
Les coques se forment dans 5 % des cas, et il est important
d’en informer la patiente pour lui permettre d’être vigilante et dépister au plus tôt l’éventuelle formation de cette
coque. En dehors de son aspect inesthétique, la coque ne
comporte aucun élément de gravité. Il est possible de la
traiter et de la réduire ;
- enfin, le troisième élément est plus technique. On
dispose actuellement de trois types de prothèses. Toutes
comportent une enveloppe de silicone solide, c’est leur
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LE CORPS REVISITÉ
contenu qui est différent. Certaines contiennent du
sérum physiologique, d’autres du gel de silicone,
d’autres de l’hydrogel, un produit à base de polysaccharides, de sucres.
Les prothèses à bas de sérum physiologique et de
gel de silicone sont utilisées depuis trente ans. Des millions de femmes en bénéficient dans le monde, et hormis
le problème des coques, dont la fréquence a diminué
grâce à une texture plus appropriée, aucun inconvénient
particulier n’est apparu. Il a fallu la polémique venue des
États-Unis, ces dernières années, pour mettre en cause le
gel de silicone, tenu pour responsable de diverses affections, notamment les maladies auto-immunes, des maladies rares mais graves.
A ce jour, toutes les études menées en Europe et
dans le monde n’ont pas prouvé la nocivité de ce produit.
Au contraire, elles confirment son innocuité. En
France, les comités d’experts composés de cancérologues,
de dermatologues, de plasticiens, d’allergologues et
de rhumatologues ont été réunis par les pouvoirs publics
pour procéder à une enquête.
Ces experts, au terme de l’enquête, ont conclu que
les prothèses de silicone ne sont pas incriminées dans ce
type de maladie, mais elles nécessitent le même suivi et
la même vigilance que pour tous les corps étrangers dans
l’organisme humain. Malgré toutes ces enquêtes scientifiques et leurs résultats rassurants, la machine médiatique
s’est emballée et la suspicion des patientes persiste sur
l’utilisation de ce produit.
Cet exemple est caractéristique de la dérive de certains médias qui, avant toute enquête scientifique, ou
sans attendre de résultats, favorisent le sensationnel.
L’information se détourne alors de sa vraie mission, au
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
risque de déstabiliser les patientes, et de divulguer des
hypothèses qui n’ont aucune réalité scientifique.
D’autant que cette intervention d’augmentation mammaire, lorsqu’il n’y a pas de coque, est l’une de plus
magiques de la chirurgie esthétique. Le résultat est spectaculaire, la silhouette est revalorisée, rééquilibrée et sans
cicatrice visible.
De très nombreux mannequins y recourent et pas
uniquement pour des raisons professionnelles. J’ai eu la
chance d’en opérer un certain nombre. Des femmes très
belles qui le sont devenues un peu plus après. Elles font
la une des journaux, elles exhibent leur nouvelle poitrine
couverte ou dénudée, elles alimentent les fantasmes mais
elles sont fières de leur silhouette, c’est là l’essentiel. Le
secret professionnel m’impose bien sûr une discrétion
totale, mais j’espère que ces patientes comprennent aussi
mon plaisir de les voir épanouies, ma fierté d’obtenir ces
résultats.
Les patientes sont nombreuses, aussi, qui viennent
au terme de leur grossesse corriger une ptose mammaire.
Leur poitrine affaissée nécessite un remodelage vers l’âge
de trente-cinq, quarante ans ; une façon pour elles
d’accepter leur maternité sans en subir les traces sur leur
féminité. Dans certains cas, lorsque la ptose est petite et
la quantité de glande à retirer faible, on se contente
d’une simple incision autour de l’aréole. Plus la ptose est
importante, plus importante est la cicatrice, en T
inversé, fine et bien surveillée dans les suites postopératoires. Une cicatrice est toujours évolutive dans les
six premiers mois, elle ne devient stable qu’au bout d’un
an. La région des seins cicatrice moins bien que le
visage, mais avec un suivi minutieux on évite toute
complication. Dans un grand nombre de cas actuelle-
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LE CORPS REVISITÉ
ment, la cicatrice peut être réduite à l’aréole plus
souvent, avec parfois un petit prolongement vers le bas.
Il y a, dans ce domaine, d’importants progrès qui vont
permettre d’accroître les indications opératoires dans un
bref délai.
En amont de toutes ces interventions concernant les
seins, il est très important d’assurer le plus possible la
stabilité du résultat. Il faut les entretenir avec autant de
soins que le visage ou le cou. Il faudrait porter un soutien-gorge pour mieux soutenir le poids de la glande,
surtout lors des activités sportives. Il faudrait éviter les
longues expositions au soleil qui fragilisent et accélèrent
le vieillissement de la peau ; l’écran total est tout aussi
recommandé pour les seins que pour le visage. Il serait
bon enfin d’éviter les régimes « yo-yo », qui entraînent
des variations de poids néfastes pour la peau et le maintien
des seins. Cette partie de l’anatomie si importante
pour les femmes devrait faire partie des soins quotidiens
qu’elles apportent à leur corps ; C’est souvent trop tard
qu’elles se rendent compte que les défauts concernant
les seins ont des retentissements psychologiques au
niveau de leur féminité.
L’intervention esthétique concernant les seins estelle différente lorsque la patiente a été affectée par
un cancer ?
Le cancer du sein est probablement l’un des plus
fréquents des cancers de la femme. Sa gravité et sa fréquence ont donné lieu à de véritables campagnes de sen-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
sibilisation, réalisées aussi bien par les médias que par les
médecins. Cette sensibilisation est devenue une forme
de prévention. La palpation du sein par le médecin ou le
gynécologue, son autopalpation sont désormais des
gestes systématiques, pour déceler une tumeur ou un
nodule de petit volume, et assurer ainsi un diagnostic
précoce, un traitement plus efficace et un bien meilleur
pronostic.
La maladie cancéreuse n’est pas encore connue
dans son mécanisme intime. Cependant, son mode de
constitution, les dérèglements cellulaires et les modes de
propagation des cellules cancéreuses sont relativement
bien cernés. A défaut d’éviter son apparition (ce qui sera
peut-être possible demain), l’essentiel est de détecter la
moindre anomalie, avant qu’elle ne s’exprime sur le plan
clinique, bien avant qu’une douleur apparaisse, pour
pouvoir mieux l’explorer.
Car dès que la maladie est décelée à un stade précoce,
alors même que le développement ne s’effectue qu’à
un niveau local, les possibilités techniques de dépistage,
mammographie, échographie et autres examens plus
complexes, permettent de nous orienter vers un diagnostic
précis. Ce qui conduit ensuite à un geste chirurgical :
l’ablation de la lésion suspecte, aussitôt analysée en
laboratoire, permet de savoir si la lésion est de nature
cancéreuse, de quel type de cancer il s’agit et son évolution.
Tant que la tumeur reste locale, elle reste du meilleur
pronostic. Comme on le sait, la maladie cancéreuse doit
sa gravité à sa dissémination cellulaire, c’est-à-dire à
l’apparition de métastases, et à la colonisation d’autres
régions. La première étape d’extension est régionale, c’est
l’atteinte des ganglions, situés au niveau de l’aisselle
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LE CORPS REVISITÉ
(les ganglions axillaires). Les chaînes ganglionnaires de
l’aisselle sont nombreuses et le nombre de ganglions
atteints est également un élément de pronostic et de
gravité.
Au-delà de la dissémination régionale, le risque est à
la propagation générale, c’est-à-dire aux métastases à
distance, à l’atteinte d’autres organes, osseux, hépatique
ou autres. Malgré sa gravité, et du fait de cette sensibilisation accrue au cancer du sein, le pronostic a radicalement changé, et la fréquence des guérisons est aujourd’hui
importante.
La survenue d’un cancer du sein reste bien sûr une
maladie grave et un traumatisme profond qui déstabilise
la femme dans ce qu’elle a de plus vital. C’est la vie
même qui est en jeu, et c’est un problème d’ordre général
qu’il faut prendre en compte, bien avant les problèmes
plus spécifiques du sein. Ainsi, la réparation du sein
est un élément important mais, dans ce contexte, elle reste
secondaire. L’essentiel étant de guérir la patiente, de
mettre en œuvre tous les moyens nécessaires, compte tenu
des caractéristiques cliniques et histologiques de la
lésion, pour obtenir la guérison. Ces moyens d’ordre
chirurgical sont complétés par la radiothérapie ou la
chimiothérapie.
Lorsqu’il y a quelques années l’un des premiers
chirurgiens plasticiens a évoqué la possibilité de
reconstruction du sein après cancer, un tollé général a
accueilli sa communication. Ceux qui y ont assisté se
souviennent encore des critiques les plus vives dont il a
été l’objet tant il paraissait impensable, à ce moment-là,
de parler d’esthétique, quand il s’agissait d’une tumeur
aussi grave. Bien des choses ont changé depuis, et les critiques les plus durs sont devenus parmi les plus ardents
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
défenseurs du principe de la reconstruction du sein après
cancer.
Il a fallu pour cela que les techniques progressent,
que les mentalités évoluent et que la reconstruction fasse
preuve à la fois de son innocuité et de son efficacité. Il
était légitime, effectivement, de penser que réopérer sur
une région qui a été le siège d’un cancer pouvait entraîner
une certaine évolutivité de ce cancer. Or il a été établi
définitivement qu’il n’en est rien. Une fois la lésion
enlevée, les tissus sur lesquels le chirurgien plasticien travaille
sont des tissus normaux et le principe de la reconstruction
est légitime. Il faut cependant, et c’est l’intérêt d’une
confrontation des différentes spécialistes (gynécologues,
cancérologues, plasticiens), être sûr des critères de guérison,
ou du maximum de facteurs favorables à cette guérison,
avant d’envisager la reconstruction.
La femme accablée par la survenue d’un cancer et le
risque vital qui y est associé, même guérie, se sentait
incomplètement reconstituée à cause de la séquelle opératoire. En effet, de très nombreuses techniques existent
pour enlever une tumeur du sein et, lorsque cela est possible, seule la tumorectomie, c’est-à-dire l’ablation de la
lésion, suffit. Dans ce cas le sein est peu modifié dans sa
morphologie. Mais parfois, lorsque l’on découvre tardivement le caractère invasif de la lésion, la mammectomie,
c’est-à-dire l’ablation du sein, est le traitement le plus fréquent. Il est associé à une ablation des ganglions, qui seront étudiés pour évaluer l’extension régionale de la
maladie.
Même guérie, la patiente se retrouve traumatisée par
l’ablation du sein, et ses conséquences sur sa féminité,
sur ses relations conjugales et même, et de façon non
accessoire, sur son mode d’habillement.
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LE CORPS REVISITÉ
La reconstruction du sein est importante mais
secondaire par rapport à la guérison de la maladie. Pour
autant, cette maladie guérie, apparaît une nouvelle
« maladie », relevant de la chirurgie plastique, réparatrice
et esthétique. Le but est alors de restaurer l’image de la
femme dans son intégrité et dans sa féminité, en
reconstruisant son sein.
Toutes les femmes qui ont eu un cancer du sein et
en ont été opérées ne sont pas demandeuses d’une
reconstruction. Certaines, heureuses d’être guéries,
vivent très bien avec les séquelles de cette intervention.
Cette attitude qui n’est pas rare est respectable, voire
rassurante, car ces patientes ont compris l’importance
toute relative d’une reconstruction par rapport à leur survie.
Pour des raisons tout aussi compréhensibles,
d’autres patientes traumatisées par cette ablation du sein
(mammectomie) n’auront de cesse de vouloir reconstruire
et restaurer le plus vite possible l’image de leur féminité. Cette demande exprime aussi le désir de voir
disparaître les séquelles d’une maladie qui aurait pu être
grave. La reconstruction du sein après cancer pose au
chirurgien plasticien les problèmes les plus représentatifs
de cette spécialité. Reconstruire un organe à partir des
tissus du voisinage est de la chirurgie réparatrice, mais il
s’agit d’obtenir un sein symétrique par rapport à l’autre,
ce qui relève alors de la chirurgie esthétique.
Plus qu’aucune autre intervention, la reconstruction
du sein après cancer prouve la filiation intime entre la
chirurgie réparatrice et la chirurgie esthétique, voire une
véritable identité de spécialisation. La chirurgie réparatrice doit tendre vers le résultat le plus esthétique, et la
chirurgie esthétique comporte en elle toutes les motivations d’une véritable chirurgie réparatrice.
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
Face à la détresse d’une patiente qui découvre
qu’elle a un cancer du sein, les spécialistes, gynécologue,
cancérologue et plasticien, trouvent dans les possibilités
de reconstruction des arguments d’un poids réel qui
redonnent espoir à la patiente. Parler de reconstruction,
c’est déjà envisager la guérison. C’est donc une chirurgie
de l’espoir qui associe la guérison d’une maladie à la correction d’une mutilation. Et parce qu’elle est évoquée
dès le début du traitement, la possibilité d’une
reconstruction fait partie du traitement du cancer du
sein, pour aider la patiente à en assumer les étapes difficiles.
Le rôle du plasticien est important, ce qui lui est
demandé n’est pas toujours facile à réaliser : il s’agit de
restaurer un volume manquant au relief mammaire,
d’assurer ensuite la symétrie avec le sein opposé et de
reconstituer et redessiner une aréole et un mamelon.
D’importants progrès ont été réalisés dans ce
domaine, et différentes techniques existent en fonction
de l’importance de la mammectomie, et des traitements
complémentaires, de type radiothérapie, qui ont modifié
l’élasticité de la peau.
La reconstruction peut être envisagée peu de temps
après la mammectomie. Elle dépend de l’élasticité des
tissus restants, du côté où la mammectomie a été effectuée :
- s’il existe un revêtement souple, excédentaire et de
bonne qualité, la mise en place d’une prothèse mammaire
suffit à restaurer une galbe satisfaisant et à reconstituer un
volume suffisant ;
- par contre, si la peau est tendue, peu élastique, il
faut d’abord apporter au niveau du sein des tissus supplémentaires pour une reconstruction ultérieure. Pour
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LE CORPS REVISITÉ
trouver ces tissus supplémentaires, trois techniques sont
possibles : apport de tissus de voisinage par l’intermédiaire d’un lambeau musculaire et cutané prélevé au
niveau du dos, apport d’un lambeau musculaire et
cutané à partir de l’abdomen, ou distension de la peau
thoracique elle-même, par la technique de l’expansion
tissulaire.
Lorsque cet excédent de peau a été obtenu, grâce à
une première intervention, il convient dans un deuxième
temps de reconstituer le volume mammaire avec une
prothèse.
Ainsi, selon l’élasticité de la peau, on aura pu, en une
ou deux interventions, reconstituer un galbe, le volume et
la forme de l’autre sein seront ensuite symétrisés comme
l’aréole et le mamelon. Cette intervention d’ordre
esthétique et réparateur est très importante sur le plan
psychologique et morphologique. Elle est devenue si
simple techniquement qu’on en oublie les retentissements
bénéfiques sur les patientes.
En dehors de l’obésité, qui reste un problème médical,
on parle aussi de la mode des femmes rondes voire
grosses. Quelles sont la part de la réalité et celle de la
fonction médiatique ?
Dans les pays occidentaux, un certain nombre de
problèmes ont été résolus, notamment celui de la faim.
Or il paraît difficile de maintenir un poids satisfaisant,
tant la tentation est importante au niveau alimentaire
et la compensation d’accès facile. Conserver un poids
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
stable en fonction d’une éducation pour laquelle les
nutritionnistes doivent être consultés afin d’établir le type
d’alimentation qui convient à chacun.
En principe, on devrait garder son poids, à quelques
kilos près, de la maturité à la vieillesse. Or dans les sociétés occidentales et riches, la suralimentation a généré
et multiplie les problèmes de surcharges pondérales. Un
tiers des Américains, tous âges confondus, ont une tendance à l’obésité, au point d’avoir constitué une minorité
revendicatrice, épuisée par les régimes et dont le slogan
est « fat is beautiful ».
On ne peut pas dire que l’obésité soit à la mode,
mais, dans la mesure où elle est un véritable phénomène
de société, on en parle, on la montre, et certains en font
un atout pour compenser leur mal de vivre.
Dire que la beauté est aussi dans l’obésité, je veux
bien, à condition d’enfreindre tous les critères de la
beauté traditionnelle, basée sur des proportions normales,
harmonieuses. Mais elle n’est pas forcément non plus un
critère de laideur.
Simplement on n’est plus dans la norme, et l’obésité
n’a rien à voir avec les rondeurs voluptueuses peintes au
siècle dernier, ni avec les signes extérieurs de bonne santé
prônés dans certaines régions.
Anne Zamberlan, l’égérie de Virgin Megastore, a été
l’une des premières « grosses » à s’afficher sur les
murs de France. Et pourtant elle a souffert dans son
corps : « Je l’ai méprisé, écrit-elle, parce que les autres le
méprisaient, je l’ai abîmé parce que les autres voulaient
que je ressemble à leur image. J’étais tellement grosse,
tellement monstrueuse, tellement hors normes. J’ai
meurtri mon corps pour leur regard. Je lui ai fait mal et
j’en paie très violemment les conséquences corporelles :
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LE CORPS REVISITÉ
je garde des marques et des cicatrices de tous ces
régimes que j’ai faits puis abandonnés puis refaits… Je
me suis rendu compte que je devais m’aimer pour que
les autres m’aiment aussi… » L’obésité est donc une vraie
souffrance.
L’excès de poids, même s’il est dû à plusieurs
causes, n’existe que parce que l’on mange trop, par rapport à ses propres besoins, et que l’on manque d’activité
physique. Attention, cependant, de ne pas tomber dans
la tyrannie de la minceur, qui n’est pas non plus un gage
de beauté.
Dans la plupart des sociétés traditionnelles, la rondeur est considérée chez la femme comme le signe de sa
capacité à porter des enfants. Chez l’homme, à défaut
d’être esthétique, son embonpoint s’affiche comme un
emblème de sa réussite sociale. En France, en Europe,
les femmes préfèrent la norme classique, loin de l’androgynie des années 70, loin aussi malgré un certain tapage
médiatique de la femme forte.
Plusieurs facteurs sont donc à l’origine d’une surcharge pondérale. Des causes héréditaires et génétiques
font que les enfants de parents gros doivent toujours se
surveiller. Les graisses s’éliminent moins facilement chez
les membres de ces familles prédisposées. Ces graisses
accumulées sont dues aussi à des habitudes alimentaires :
on mange trop gras, trop sucré, et on grignote beaucoup.
Les causes psychiques, tels la dépression, les relations familiales conflictuelles ou le stress, entraînent une
attitude boulimique ou une forte propension à consommer
des pâtisseries ou des aliments sucrés, qui font évidemment grossir. La boulimie est une véritable anomalie
du comportement, qui oscille entre une suralimentation
hypercalorique et une attitude réactionnelle secondaire
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
pour corriger ces excès, réaction à type de vomissements
provoqués ou à type de compensation médicamenteuse
(laxatifs et diurétiques qui ne régulent jamais, au
contraire, la prise de poids). Quant à l’enchaînement des
régimes interrompus puis repris jusqu’au renoncement, il
ne sert qu’à masquer un peu plus les vrais symptômes de
la surcharge pondérale.
Le docteur Jeffrey Friedman, de l’université Rockefeller, a découvert le gène de la satiété qui permet
d’arrêter l’appétit, grâce à l’individualisation de l’hormone amaigrissante, la leptine. Lorsque celle-ci est déréglée, elle ne stimule plus le métabolisme et l’activité
physique. La consommation des graisses devient alors
excessive. Mais cette découverte, si elle semble prometteuse, n’a pas encore permis de mettre au point le traitement miracle pour combattre le gène « ob ».
L’obésité n’a cependant rien à voir avec la cellulite,
n’est-ce-pas ?
Il est important de comprendre que la surcharge
pondérale, globale et homogène et en particulier l’obésité
n’ont en rien à voir avec la cellulite. La cellulite
existe aussi chez les personnes minces et elle correspond
à des excès adipeux localisés le plus souvent, et rebelles
à tout régime alimentaire. Les hommes ont la chance d’en
être épargnés.
Elle est d’origine héréditaire, favorisée par des facteurs circulatoires et hormonaux. Apparaissant à la
puberté, elle est en fait un caractère sexuel secondaire
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LE CORPS REVISITÉ
normal chez la femme. Des traitements hormonaux, des
grossesses, la ménopause sont autant d’occasions où la
cellulite va se développer et s’étendre.
La cellulite est donc un phénomène normal et ne
correspond à aucune perturbation métabolique particulière. Certaines femmes en développent plus que
d’autres selon leur réceptivité hormonale. D’autre part,
la cellulite peut se localiser différemment, soit sur le bas
du corps (culotte de cheval, intérieur des cuisses, intérieur
des genoux, hanches), conférant la morphologie gynoïde propre à la femme méditerranéenne, soit au
contraire sur la ceinture, la taille, les hanches, plus
souvent observée chez les femmes d’origine anglosaxonne. Or ces amas de graisse peuvent être vécus
comme disgracieux et la lutte contre la cellulite est devenue pour certaines femmes une véritable hantise.
Arrêter définitivement le développement de la cellulite ou empêcher son apparition n’est pas possible actuellement. Par contre, en atténuer les effets et harmoniser
une silhouette est l’une des interventions les plus
fréquemment pratiquées. Le principe de retirer les graisses
après avoir désolidarisé les différents lobules était depuis
longtemps l’objet de recherches assidues. En Suisse, en
Italie notamment, certaines techniques ont été proposées,
mais leurs inconvénients trop fréquents, les complications
réelles qu’elles entraînaient ont mis un terme à leur
application. C’est en France que ce principe a acquis son
efficacité totale, sa fiabilité et son développement. A partir
de la technique de base de Y. G. Illouz, de nombreuses
améliorations ont été apportées qui sécurisent et rendent
plus fiable la lipoaspiration.
Cette intervention a pour objectif de corriger les
excès adipeux localisés, répartis en différentes régions du
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
corps : culotte de cheval, hanches, ventre, intérieur des
cuisses, intérieur des genoux, mollets, chevilles, bras,
double menton, ovale du visage.
L’indication chirurgicale tient compte de l’infiltration
adipeuse certes, mais surtout des possibilités d’élasticité
cutanée qui conditionnent la qualité du résultat.
L’intervention peut, selon les cas, être réalisée sous anesthésie locale, anesthésie locale approfondie ou anesthésie
générale. Le type d’anesthésie choisi est fonction du
nombre de localisations à opérer. L’incision est courte
(moins d’un centimètre) et discrète (dans un pli naturel
le plus souvent). Une canule mobilise dans un premier
temps les cellules adipeuses qui seront ensuite aspirées.
Un pansement de contention est mis en place (le plus
souvent, il s’agit d’un panty ou d’une gaine élastique).
La durée de l’hospitalisation est brève, quelques heures
s’il s’agit d’une anesthésie locale, un à deux jours s’il
s’agit d’une anesthésie générale. Dans les suites opératoires, un œdème et des ecchymoses apparaissent au
niveau des régions opérées. Une douleur qui survient
pendant la marche ou en position assise est atténuée par
un traitement antalgique. Les ecchymoses se résorbent en
dix ou quinze jours et l’œdème diminue progressivement.
Le port du vêtement de contention est conseillé pendant
deux à trois semaines. Le résultat est visible quatre à six
semaines après l’intervention. Les douches sont possibles
deux à trois jours après l’intervention. Un traitement
complémentaire par drainage lymphatique permet
d’accélérer la résorption des oedèmes et d’améliorer l’état
circulatoire.
Cette intervention est donc aussi bien pratiquée
chez la femme jeune, avant ou après les grossesses, et
autour de la ménopause car les facteurs hormonaux sont
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LE CORPS REVISITÉ
à l’origine d’une répartition disgracieuse des graisses. En
aucun cas il ne s’agit d’une substitution à un régime alimentaire pour surcharge pondérale, et à plus forte raison
d’un traitement de l’obésité.
Si l’élasticité cutanée est bonne, la peau se rétracte
et c o n s e r v e u n e b o n n e t e n u e . U n e m a u v a i s e
élasticité cutanée se traduirait par une rétraction insuffisante et l’apparition, de ce fait, d’irrégularités sur la
peau.
Les récents progrès en matière de lipoaspiration,
avec notamment l’utilisation de canules plus fines, autorisant des gestes plus superficiels, permettent d’obtenir
des résultats sur des zones, jusque-là, réputées difficiles
comme de devant de la cuisse ou l’ovale du visage. L’utilisation des ultrasons peut également se révéler intéressante dans certains cas. Son but est de fragmenter
préalablement une graisse plus dure (sur le dos, les
hanches, ou la « bosse de bison ») et de faciliter
considérablement son aspiration. On parle alors de
liposculpture.
Sans aller jusqu’à l’obésité, certaines femmes ont un
ventre volumineux, abîmé parfois par des grossesses.
C’est aussi le cas pour les cuisses, disproportionnées par
rapport au reste du corps. Procédez-vous de la même
façon que pour une lipoaspiration ?
L’efficacité de la lipoaspiration ne dépend pas uniquement de la quantité de graisse que l’on retire ; Elle dépend surtout des possibilités de redrapage spontané de la
peau liées à ses propriétés élastiques. Si lors de l’exa-
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ESTHÉTIQUEMENT VÔTRE
men clinique on s’aperçoit d’une laxité exagérée de la
peau, il conviendra d’associer à la lipoaspiration un geste
opératoire complémentaire qui consiste à retirer justement
cet excès de peau.
Cela arrive au niveau de la paroi abdominale, après
des grossesses multiples ou des prises de poids importantes. Cette véritable distension cutanée s’appelle le
« tablier ». Cela peut aussi se voir chez l’homme obèse,
ou chez celui qui a subi une importante cure d’amaigrissement. L’intervention réalisée est une plastie abdominale. Sous anesthésie générale ou péridurale, elle
associe une réduction de la masse graisseuse et une
diminution de la quantité de peau, et nécessite de ce fait
une hospitalisation de trois à quatre jours. Surtout, pour
bien garantir des suites opératoires simples, il est indispensable d’insister sur le port d’un vêtement de contention, une gaine, dont l’effet est d’assurer l’adhérence
rapide des tissus. En fait, selon que l’excès cutané est
plus important dans la partie sus-ombilicale, sousombilicale ou péri-ombilicale, selon qu’il existe ou non
un relâchement musculaire associé, selon bien sûr la
morphologie de la patiente, il existe différents types de
plasties abdominales et il faudra à chaque cas adapter la
technique appropriée.
Un phénomène tout à fait similaire existe pour
l’intérieur des cuisses. Une lipoaspiration simple, chez la
femme jeune à peau tonique, donne d’excellents résultats.
Lorsque, par contre, la peau est déjà distendue, en
« drapé de rideau », elle rend nécessaire la réalisation
d’un lifting de l’intérieur des cuisses qui restaure, galbe
et redonne une tonicité tissulaire. L’excès de peau est
retiré par une incision située dans le pli de l’aine, la cicatrice est en général discrète. Cette intervention, qui
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LE CORPS REVISITÉ
affine la silhouette, corrige aussi le frottement désagréable
de la peau des cuisses et les conséquence médicales que
cela entraîne (suintement ou ulcération). La réalisation
d’un mini-lifting de l’intérieur des cuisses a permis de
rendre cette intervention plus simple. L’hospitalisation est
de quarante-huit heures et une reprise de l’activité peut se
faire huit à dix jours plus tard.
Ces deux interventions ont largement bénéficié de
l’apport de la lipoaspiration qui, réalisée dans le même
temps, permet d’obtenir d’excellents résultats.
Mais la lipoaspiration n’est pas un substitut du
régime, car, si son efficacité est réelle, elle reste localisée
et n’exclut pas l’entretien du corps et l’hygiène alimentaire. On est responsable de l’harmonie de sa silhouette
comme on l’est de son état physique et psychologique.
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TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION .......................................................................................... p. 7
OUVERTURE
....................................................................................................
p. 11
1. Le capital beauté ........................................................................................ p. 15
2. Image de soi, regard des autres ............................................... p. 67
3. La chirurgie esthétique en question
.................................
p. 107
4. Le corps revisité ........................................................................................ p. 129
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Cet ouvrage a été réalisé par
l’Imprimerie Capelle
43 rue Damrémont - 75018 Paris
pour le compte des Éditions de la Beauté
en janvier 2011