les techniques de conservation de la pierre - PierreSud
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Guide Durabilité & Compatibilité de pierres régionales Auteur : Pierre Gaudon Document téléchargeable sur http://pierresud.brgm.fr Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » SOMMAIRE 1. Contexte & problématique ............................................................................................................... 2 2. Pierres étudiées & méthodologie d’étude ........................................................................................ 5 3. Cas des murailles d’Aigues-Mortes (30) .......................................................................................... 6 3.1. Pierres d’origine du monument ................................................................................................. 7 3.2. Pierres d’anciennes carrières .................................................................................................... 8 3.3. Pierres envisagées pour le remplacement .............................................................................. 10 3.4. Résultats d’analyses & conclusion .......................................................................................... 12 4. Cas de la Maison Carrée et de l’amphithéâtre de Nîmes .............................................................. 15 4.1. Pierres d’origine des monuments............................................................................................ 15 4.2. Pierres de carrières ancienne et actuelles .............................................................................. 15 4.3. Etude pétrographique .............................................................................................................. 16 4.4. Résultats d’analyses & conclusion .......................................................................................... 18 5. Cas de la Cité de Carcassonne ..................................................................................................... 20 5.1. Pierres étudiées ...................................................................................................................... 20 5.2. Etude pétrographique .............................................................................................................. 20 5.3. Résultats d’analyses & conclusion .......................................................................................... 22 6. Compatibilité visuelle ..................................................................................................................... 24 Bibliographie ...................................................................................................................................... 29 Pierre GAUDON © EMA – 2010 1 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 1. Contexte & problématique Comme tout matériau naturel, les pierres des bâtiments subissent au fil du temps des mécanismes physico-chimiques générant des altérations, dommageables pour l’esthétique de l’édifice et à terme pour sa stabilité. Plus de la moitié des dépenses liées à la restauration des monuments historiques est consacrée à ces problèmes, qu’il s’agisse de la substitution des moellons altérés de l’édifice par de la pierre fraîchement extraite de carrière, ou du traitement conservatoire des pierres en œuvre d’origine. Pour un monument donné, la maîtrise du coût « restauration de la pierre » apparaît donc étroitement liée à la fréquence des travaux de restauration, elle-même conditionnée par le choix des pierres et leur « durée de vie ». La phase de sélection des matériaux pierreux est fondamentale et ne peut être réussie qu’en ayant mené une étude préalable des pierres d’origine et de substitution, basée sur les notions de durabilité et de compatibilité. La durabilité a pour objet de prédire ou quantifier le comportement dans le temps (à l’échelle historique) d'une pierre extraite de son milieu naturel (pierre de construction) et soumise à divers facteurs d'altération. La compatibilité visuelle se traduit par la non-visibilité de la pierre de remplacement ; La compatibilité physique a pour objet de prédire ou quantifier l’interaction dans le temps (à l’échelle historique) de deux pierres juxtaposées sur un édifice (dont l’une est d’origine et l’autre de substitution) et soumises à divers facteurs d’altération. On parlera d’une compatibilité correcte, lorsqu’aucune altération différentielle ne se manifeste dans le temps entre deux pierres. Il apparait en effet que nombre de restaurations ont conduit à des problèmes plus importants que ceux qu’elles étaient censés palier, du fait d’un choix inadéquat des pierres de substitution. Ainsi une pierre froide (peu poreuse, très résistante) dans un bâti en pierres tendres (poreuse) va constituer un point singulier du point de vue mécanique qui va perturber la répartition des efforts dans un mur. En cas de mouvement de sol, cette pierre sera à l’origine de fissures. De la même manière, du point de vue de la circulation de l’eau une pierre froide représente un point singulier : du fait qu’elle n’absorbe pas l’eau contrairement à ses voisines les pierres latérales sont soumises à un flux d’eau supplémentaire et sont susceptibles de s’altérer plus rapidement. Inversement une pierre tendre dans un édifice en pierre froide, ne présentant pas les mêmes comportements hydriques, mécaniques et thermiques (dilatation) pourra être à l’origine de désordres divers. Dans ces conditions il apparait que la seule pierre de remplacement correcte est a priori celle provenant de la même carrière que l’originale. Lorsque cela est possible, c’est évidemment la solution la plus logique. N’oublions pas cependant qu’une carrière présente la plupart du temps des niveaux (bancs) de caractéristiques différentes, et que, là aussi il y a lieu de choisir correctement la pierre. Cependant, comme le montre l’ensemble du site internet PIERRESUD (http://pierresud.brgm.fr), l’immense majorité des carrières patrimoniales sont aujourd’hui abandonnées ou colonisées par l’urbanisation. Il est donc nécessaire de faire appel à d’autres pierres que celles de la carrière d’origine. Sur quels critères les choisir ? La pierre assure une fonction esthétique. La pierre de substitution devra donc s’approcher de la pierre initiale dans le domaine de l’aspect. L’aspect d’une pierre dépend de facteurs intrinsèques, couleur (liée à la nature des grains), texture, (liée à l’arrangement des grains) et de facteurs extrinsèques tel que l’état de surface (scié, bouchardé, layé) et le recouvrement éventuel (poussières, suies, lichen, algues). Il existe sur un mur propre une variabilité de teinte de pierres parmi lesquelles la pierre de substitution doit venir s’inscrire sans choquer le regard. Nous nous sommes penchés sur la mise au point d’un protocole d’aide au choix des pierres de substitution en imaginant qu’il suffisait d’introduire l’image d’une pierre pressentie comme pouvant âtre utilisée en substitution dans l’image du mur réel, pour juger de la compatibilité. Ce travail fait l’objet d’une thèse à l’Ecole des Mines d’Alès. Plusieurs problèmes se sont posés : Pierre GAUDON © EMA – 2010 2 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » La mesure de la couleur. La couleur d’un objet peut être totalement définie par son spectre de réflectance, obtenu par un spectrophotomètre. Cette information est cependant trop complexe pour être utilisée facilement. On caractérise généralement la couleur au chromamètre, lequel filtre le spectre de réflectance à la manière de l’œil, et fournit une information simple en termes de luminance, teinte et de saturation. On utilisera ici le système CIELAB ou L*a*b*, L* caractérisant la luminance du noir au blanc, a*, l’axe vert-rouge, et b*, l’axe bleu-jaune. Mais l’information fournie par un chromamètre est ponctuelle et convient mal à l’étude d’une surface importante, non homogène. Les conditions d’éclairage. Le rendu d’une pierre varie selon qu’elle est à l’ombre, en plein soleil ou que le ciel est voilé. On peut maîtriser en laboratoire les conditions d’éclairement d’une pierre mais on ne maîtrise pas les conditions d’éclairement d’un bâtiment. La distance d’observation. L’aspect d’une pierre, liée à sa couleur et à sa texture change selon l’échelle d’observation. Un contraste choquant « de près » peut être imperceptible « de loin ». En terme de durabilité et compatibilité, une méthodologie de sélection des pierres à destination des professionnels de la restauration (architectes, exploitants de carrières, restaurateurs) des monuments historiques et plus largement des immeubles bâtis, a été mise au point par le BRGM en collaboration avec le LRMH. Les lignes qui suivent ne font que reprendre les conclusions de leurs études (voir bibliographie (1), (2), (3)). La durabilité d’une pierre dépend a priori de facteurs intrinsèques (liés à la pierre elle-même) et de facteurs extrinsèques, par exemple l’eau disponible la température ou le climat en général. Dans le cadre d’un guide du choix de pierres de substitution, le facteur extrinsèque est le même et donc seuls les facteurs intrinsèques sont à considérer. L’étude générale des mécanismes d’altération des pierres met en évidence quatre principaux types de propriétés intrinsèques, intervenant à des degrés divers dans le développement des altérations : Comportement des minéraux en présence d’eau (CM). La composition minéralogique d’une pierre donnée va intervenir dans le développement des altérations à travers le comportement de ses minéraux constitutifs en présence d’eau : activité des argiles, en particulier. Propriétés de stockage des fluides (SF). La connaissance du volume poreux total d’une pierre et de son volume poreux accessible à pression atmosphérique permet d’approcher son degré de saturation maximum en conditions naturelles. On en déduit le volume de pores mobilisable (rôle de « vase d’expansion ») en cas de changement de volume d’un élément (cristallisation de sels, gélifraction...) dans le milieu poreux. Propriétés de transfert des fluides (TF). La détermination des vitesses et des modes de saturation en eau (imbibition) et de séchage (évaporation) d’une pierre permettent d’appréhender sa propension à se fatiguer (par une répétition des cycles imbibition / évaporation) et à voir se développer des cristallisations des sels en surface ou en profondeur. Résistance mécanique (RM). La qualité des joints de grains intervient directement dans la réponse d’une pierre aux sollicitations mécaniques générées par les cristallisations de sels et la gélifraction. Il est donc possible de définir un indice de durabilité à partir de grandeurs mesurées correspondant à ces quatre propriétés. A chaque classe de valeurs de ces grandeurs mesurées on associe des « points équivalents de durabilité » dont l’addition fournira l’indice recherché Le gonflement en présence d’eau est dû aux argiles et donc mesuré par la valeur de bleu de méthylène, qui indique « l’activité » des argiles c'est-à-dire approximativement leur surface spécifique. Plus celle-ci est grande, plus fort est le risque de gonflement. L’échelle proposée par Dessandier et al. (1), (2), (3) est : 0 Valeur de bleu (Vbleu) en mg/g 5 - A P Réactivité des argiles contenues - + A = Absence d’argiles réactives dans la pierre P = Présence d’argiles réactives dans la pierre + Les propriétés de stockage des fluides sont mesurées par le coefficient d’absorption d’eau S48, Pierre GAUDON © EMA – 2010 3 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » teneur en eau maximale absorbée par une roche pendant 48 h d’immersion. Plus celui-ci est fort plus grands sont les risques de dommages liés à l’eau. L’échelle proposée est : Les transferts de fluides sont régis dans les pierres par la capillarité, mesurée par le coefficient de capillarité. Plus celui-ci est fort plus grands sont les risques de dommages liés à l’eau. L’échelle proposée est : Les propriétés mécaniques sont estimées par la résistance en compression simple Rc. Plus celle-ci est forte, meilleures sont les chances pour la pierre de résister aux sollicitations. L’échelle proposée est : - Résistance à la compression (Rc) en Mpa 0 5 0 10 100 - 15 200 20 300 25 400 30 500 35 600 Points équivalents de durabilité + 40 700 45 800 900 + L’indice de durabilité et de compatibilité est un nombre obtenu en additionnant les « points équivalents de durabilité » de chacun des trois derniers paramètres (S48, C1, Rc), suivi d’une lettre (A ou P). Cet indice permet d’apprécier directement les caractéristiques de la pierre du point de vue de la durabilité, et la comparaison de chacun des chiffres (centaine, dizaine, unité et lettre) des indices de deux pierres permet facilement d’en apprécier la compatibilité. Pierre GAUDON © EMA – 2010 4 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 2. Pierres étudiées & méthodologie d’étude Dans le cadre de ce guide régional nous nous sommes intéressés à trois types de pierres, très utilisées localement depuis l’époque romaine jusqu’à nos jours, correspondant à trois chantiers de restauration, les fortifications d’Aigues-Mortes, la Maison Carrée à Nîmes et la cité de Carcassonne. Le matériau des fortifications d’Aigues-Mortes est une pierre calcaire tendre à demi-ferme, une molasse, correspondant à des dépôts du Miocène (ère tertiaire), étage Burdigalien. Ce sont des calcaires coquillers à grains de taille variable, blanchâtre à jaune, riches en débris de fossiles. Ils sont utilisés très largement dans la région et ailleurs, essentiellement en élévation. La Maison Carrée et les arènes de Nîmes ont utilisé entre autre des pierres calcaires froides correspondant à des dépôts du Crétacé (ère secondaire), étage Hauterivien. Elles sont utilisées dans la région et ailleurs en soubassement, assises de rejaillissement etc. Le matériau de construction de la cathédrale de Carcassonne, comme de toute la ville, est élevée une molasse gréseuse de l’éocène (ère tertiaire) étage Yprésien. L’eau représentant le principal facteur externe de développement des altérations, l’étude des pierres s’appuie classiquement sur des méthodes de caractérisation en laboratoire susceptibles d’une part de qualifier et de quantifier leur milieu poreux, en tant que lieu de stockage et de transfert des fluides, d’autre part de fournir des éléments prédictifs du comportement des pierres en présence d’eau. La méthodologie d’étude appliquée aux échantillons a donc été la suivante : Analyse minéralogique par diffractométrie des rayons X et étude pétrographique au microscope optique polarisant. Dosage par attaque acide de la fraction silicatée insoluble. Analyse par diffractométrie X de la fraction insoluble totale et de la fraction argileuse Détermination de la porosité totale (Nt) suivant NF B 10-503 (1973) " Pierres calcaires : mesure de la porosité, de la masse volumique réelle et de la masse volumique apparente". Détermination du coefficient d’absorption d’eau (S48), suivant NF B 10-504 (1973) "Pierres calcaires : mesure du coefficient d'absorption d'eau". Détermination du coefficient de capillarité suivant le lit de la roche (C1) et perpendiculairement au lit de la roche (C2) suivant NF B 10-502 (1980) "Pierres calcaires : mesure de l'absorption d'eau par capillarité". Mesure de la résistance mécanique à la compression uniaxiale sur échantillons sec (Rc), suivant NF B 10-509 (1973) "Pierres calcaires : essai de compression". Mesure de la vitesse du son Sur le seul chantier d’Aigues mortes des mesures colorimétriques ont été réalisées qui nous permettront d’illustrer la démarche de recherche en cours dans ce domaine Au total 22 échantillons de pierres calcaires et gréseuses mises en œuvre d’origine sur monuments historiques, utilisées en restauration ou provenant de carrières anciennes, ont été prélevés sur monument ou en carrière. Il s’agit de pierres dont la zone d’utilisation est régionale ou même nationale. Chaque pierre sélectionnée est largement représentée en termes de quantité mise en œuvre sur un nombre important d’édifices et/ou en quantité de pierre actuellement utilisées pour la restauration. Nous avons disposé sur les ouvrages en cours de restauration de un ou quelques blocs démontés, soit des volumes faibles, qui ne nous ont pas permis de réaliser tous les essais de caractérisation dans les conditions dimensionnelles fixées par les normes. Nous avions en effet le choix entre réaliser une éprouvette par pierre et considérer les résultats obtenus sur cet échantillon comme représentatif, ou réaliser plusieurs éprouvettes plus petites permettant de se faire une idée de la dispersion des propriétés. Dans la mesure où la plupart du temps seules des carottes prélevées dans le bâtiment sont disponibles nous avons optés pour des comparaisons sur ce type d’éprouvettes. Nous présenterons successivement les trois chantiers de restauration étudiés : les murailles d’AiguesMortes, la maison carrée et l’amphithéâtre de Nîmes et la cathédrale St Michel à Carcassonne. Les critères de choix des pierres de substitution sont essentiellement basés sur la compatibilité des propriétés physiques et de transfert d’eau. Dans une dernière partie nous montrerons qu’une démarche parallèle concernant la compatibilité visuelle est en train de se faire jour. Pierre GAUDON © EMA – 2010 5 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 3. Cas des murailles d’Aigues-Mortes (30) La porte de la Reine, entrée sud-est de la ville d’Aigues-Mortes Les murailles d’Aigues-Mortes sont réputées avoir été construites à la demande de Louis IX, en pierre de Beaucaire. Quoiqu’éloignées de 44 km à vol d’oiseau du lieu de construction, les carrières de Beaucaire se trouvent en effet être les plus faciles d’accès si l’on prend en compte la voie fluviale que représente le petit Rhône. C’est sans doute par bateau, sur le fleuve puis par la mer, proche d’AiguesMortes au XIIIème siècle, que sont arrivés les matériaux de construction. Il s’agit de molasses, calcaires grossiers détritiques, formation du Burdigalien (23 millions d’année) étage du Miocène (tertiaire). Cette formation est présente dans tout le sud-est de la France, depuis Bézier jusqu’à Montélimar, Manosque et Marseille. Il s’agit de sables calcaires (calcarénites) coquillers plus ou moins chargé de grains de quartz, correspondant à un dépôt littoral ou proche d’un récif coralliaire. L’exemple le plus connu de cette formation est la fameuse pierre du Pont-du-Gard. Nous avons étudié d’une part les pierres de l’ouvrage lui-même, puis les pierres des carrières encore accessibles supposées avoir fourni le matériau et enfin les pierres de deux carrières susceptibles de fournir, aujourd’hui, un matériau de remplacement. Informations sur les pierres échantillonnées dans le cadre du chantier d’Aigues-Mortes ; les échantillons précédés de la lettre M proviennent de monuments et ceux précédés de la lettre C proviennent de carrières. Dénomination Pierre de Beaucaire Pierre de Beaulieu Pierre GAUDON Epoque/Etage géologique Miocène Burdigalien (23 Ma) Miocène Burdigalien (23 Ma) Lieu d’extraction Beaucaire Beaulieu Lieu d’échantillonnage Référence de l’échantillon Aigues-Mortes (Porte de la Reine) M-AM1 à M-AM4 Carrière Gaudon M-BcG1 & 2 C-BCG3 & 4 Carrière St Roman Carrière Roc des Mourgues Carrière Proroc C-StR Carrière Farrusseng C-Bl2 & C-Bl3 © EMA – 2010 C-RM C-Bl1 6 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 3.1. Pierres d’origine du monument Nous avons disposé de quatre blocs déposés lors de la restauration de la porte de la Reine, numérotés M-AM 1, 2, 3 et 4. Pierre d’Aigues-Mortes M-AM1face éclatée Pierre d’Aigues-Mortes M-AM3 face éclatée Pierre d’Aigues-Mortes M-AM2 face éclatée Pierre d’Aigues-Mortes M-AM4 face éclatée Il s’agit dans tous les cas de calcaire coquiller jaune orangé à éléments (débris de fossiles) plus ou moins grossiers, parfaitement distincts quoique difficiles à identifier, de 1 à 7 mm (calcarénite bioclastique). Porosité des fragments de fossiles eux-mêmes et porosité entre les grains par défaut de cimentation. Elles se différencient par la taille des grains : 1 à 6 mm pour M-AM1, 1 à 7 mm pour MAM2, 6-7 mm pour M-AM3, inférieurs à 1 mm pour M-AM4 et la cimentation, meilleure pour M-AM3 (porosité apparente plus faible). Les lames minces montrent des éléments divers, bioclastes (littéralement « débris de vie », débris de coquilles) et pellets (éléments globuleux sans structure interne). Parmi les bioclastes on reconnait aisément des coquilles de lamellibranches, des plaques d’échinodermes et des bryozoaires. Les bioclastes apparaissent en clair, chatoyants : il s‘agit de microsparites (cristaux de calcite entre 4 et 60 µm). Les pellets apparaissent en gris uniforme, il s’agit de micrite (cristaux de calcite inférieurs à 4 µm). Chacun de ces éléments est lié aux autres par un ciment microsparitique apparaissant comme un liseré blanc. La porosité apparaît en noir. Elle correspond pour l’essentiel à un défaut de cimentation, mais également à l’existence de pores internes aux bioclastes. Pierre GAUDON © EMA – 2010 7 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » M-AM1, lumière polarisée analysée M-AM2, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres déposées de la porte de la Reine à AiguesMortes. La barre représente 2mm. Comme on pouvait déjà le voir à l’œil nu les principales différences résident dans la taille des éléments. On distingue ici et là de rares grains de quartz, pourtant toujours présent dans les diffractions de rayons X. Les insolubles en faible proportion (de 1,3 à 2,5 %) correspondent à du quartz et des argiles, illite majoritaire, et interstratifié chlorite smectite. M-AM3 et M-AM4 contiennent en outre de la goethite responsable de la légère coloration jaune de ces deux pierres. M-AM3, lumière polarisée analysée M-AM4, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres déposées de la porte de la Reine à Aigues-Mortes. La barre représente 2 mm. 3.2. Pierres d’anciennes carrières Trois sites de carrières abandonnées ont été échantillonnés : La carrière abandonnée de Gaudon (C0079) largement urbanisée, avec deux blocs de remplois notés M-BcG1 et M-BcG2, provenant de la démolition d’une maison locale chemin haut de Gaudon « en pierre de Beaucaire », et deux blocs prélevés au pied des fronts de taille chez un particulier, chemin haut de Gaudon, notés C-BcG3 et C-BcG4 La carrière abandonnée du Roc des Mourgues (C0076) avec un bloc noté C-RM L’Abbaye de Saint Roman, non répertoriée en tant que carrière, à 5 km au NNW de Beaucaire, (coordonnées géographiques Lambert 2 étendu : X=783142, Y= 1873055) avec un bloc noté CStR. Pierre GAUDON © EMA – 2010 8 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Carrière de Gaudon M-BcG2 face sciée Carrière de Gaudon M-BcG1 ; face sciée Pierres déposées d’une maison à Beaucaire, Chemin des Gaudon Carrière de Gaudon C-BcG3 ; face sciée Carrière de Gaudon C-BcG4 ; face sciée Carrière du Roc des Mourgues C-RM face Abbaye de St Roman C-StR face sciée sciée Pierres de différentes carrières anciennes de pierre de Beaucaire. Il s’agit dans tous les cas de calcaires coquillers grossiers blancs à orangé, avec de fortes variations granulométriques à l’intérieur même d’un bloc. Sur quelques mètres la couleur peut varier du blanc à l’orange. Souvent les grains sont plus clairs que le ciment Dans les diverses carrières de pierre de Beaucaire, comme ci-dessus, les lames minces montrent des éléments divers, bioclastes et pellets lié les un aux autres par un ciment microsparitique. Les minéraux insolubles sont de même nature que les précédents, avec une argile supplémentaire, la kaolinite. Les proportions d’insolubles sont plus variées, de 0,4 à 5,7 %. L’échantillon C-BcG3 se distingue par une forte teneur en goethite responsable de sa couleur jaune soutenue. Pierre GAUDON © EMA – 2010 9 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » M-BcG1, lumière polarisée analysée M-BcG2, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres déposées d‘une maison à Beaucaire quartier de Gaudon. La barre représente 2 mm C-BcG3, lumière polarisée analysée C-BcG4, lumière polarisée analysée C-RM, lumière polarisée analysée C-StR, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres des carrières anciennes de Beaucaire. La barre correspond à 2mm. 3.3. Pierres envisagées pour le remplacement C’est le gisement de Pierre de Beaulieu (carrière PROROCH ; identifiant C0040) qui a été retenue pour la restauration (échantillon numéroté C-Bl1). La carrière FARRUSSENG, contigüe de la précédente, a également été échantillonnée. Pierre GAUDON © EMA – 2010 10 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Pierre de Beaulieu carriere Proroc C-Bl1face éclatée Pierre de Beaulieu carriere Farrusseng C-Bl2 face sciée Pierre de Beaulieu carrière Farrusseng C-Bl3 face sciée Pierre de Vers-Pont-du-Gard. Face sciée Il s’agit pour la carrière PROROCH d’un calcaire coquiller bicolore blanc et orangé, à grain moyen. Dans la carrière FARRUSSENG C-Bl3 et C-Bl4, les couleurs semblent moins prononcées. Les grains (blanc), de 3 à 4 mm ne présentent pas de structure permettant leur identification. En comparaison la pierre de Vers-Pont-du-Gard, de même formation, de même âge Burdigalien et de même structure, est beaucoup plus colorée et contrastée que celles de Beaucaire. C-Bl1, lumière polarisée analysée C-Bl2, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres des carrières de Beaulieu. La barre correspond à 2mm. Pierre GAUDON © EMA – 2010 11 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Dans les trois échantillons de pierre de Beaulieu les bioclastes sont méconnaissables pour la plupart ; il n’est que rarement possible de les attribuer à un genre donné. La proportion des insolubles reste faible de 2,1 à 4,1 %. Ils correspondent à du quartz et des argiles, illite majoritaire, et smectite. Microphotographie de lame mince des pierres de carrières de Beaulieu. La barre correspond à 2mm. C-Bl 3, lumière polarisée analysée 3.4. Résultats d’analyses & conclusion Felspaths Goethite Interstratifié Illite-chlorite Chlorite Smectite Insolubles % kaolinite échantillon Illite Dénomination Quartz Données minéralogiques des pierres étudiées pour le chantier d’Aigues-Mortes : + + + M-AM1 2,35 + + + M-AM2 2 ,36 + + + + M-AM3 2,45 + + + + M-AM4 1,35 + + + + M-BcG1 2,41 Pierre de Beaucaire + + + + M-BcG2 0,44 + + + + + C-BcG3 2,86 + + + ++ C-BcG4 5 ,66 + + + + + C-StR 0 ,74 + + + + C-RM 1,70 + + + + C-Bl1 2,10 Pierre de + + + + C-Bl2 2,45 Beaulieu + + + + C-Bl3 4,14 Teneur en silicates insoluble dans les pierres échantillonnées dans le cadre du chantier d’AiguesMortes, et minéralogie des argiles : Propriétés mécaniques et de transfert d’eau : Les résultats des mesures physiques figurent dans le tableau ci-après. Pour comparaison, nous avons ajouté à nos propres mesures obtenues sur de petites éprouvettes (diamètre 34 mm), les données des fiches techniques obtenues sur les carrières PROROCH et FARRUSSENG à Beaulieu et sur la carrière de Vers-Pont-du-Gard. Il ne semble pas y avoir de désaccord important entre nos propres données et celles des fiches techniques compte tenu du fait que notre échantillonnage est fatalement différent de celui utilisé pour les fiches techniques. Pierre GAUDON © EMA – 2010 12 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Dénomination Pierre de Beaucaire C1 2 1/ g/m .s C2 2 1/ g/m .s 0,69 0 ,70 0,62 249 222 80 309 257 119 30,6 ± 1,5 0,76 181 217 M-BcG1 M-BcG2 C-BcG3 C-BcG4 26,3 ± 1,1 34,1 ± 0,3 26,0 ± 1,1 30,0 ± 3,0 0,67 0,72 0,80 0,74 47 198 125 193 58 220 113 100 C-StR 17,9 ± 2,7 0,57 192 100 échantillon N % S48 M-AM1 M-AM2 M-AM3 31,7 ± 0,4 32,1 ± 0,9 24,7 ± 1,2 M-AM4 2 2 Rc MPa Vs m/s 16.2 ± 1.1 16.1 ±1.1 17,1 ± 2,1 12,9 ± 2,0 6,7 ± 1,9 8,5 ± 1,3 13.4 ± 1.4 9.8 ± 1.4 29.0 ± 4.8 26.1 ± 1.7 6,7 ± 1,9 13.6 ± 2.7 9.2 ± 0.2 17 3299 3246 3894 2949 3592 2704 3700 3450 4205 C-RM 26,9 ± 1,8 0,73 47 59 3649 C-Bl 1 29 ,4 ± 0,9 0,74 112 131 2851 Pierre de C-Bl2 29,5 ± 0,9 0,73 207 113 3200 Beaulieu C-Bl3 28 ,5 ± 0,9 0,80 122 116 2865 Proroch 28 160 161 3240 Fiches Farrusseng 29,2-30,7 137 149 3060 techniques Vers 28 182 116 10 Caractéristiques physiques des pierres échantillonnées dans le cadre du chantier d’Aigues-Mortes. Les données « fiches techniques » sont celles qu’il est possible de consulter sur les sites des carrières citées. Certaines données sont absentes. N : porosité ; S48 : coefficient de saturation à 48h ; C : coefficient de capillarité perpendiculairement (1) ou parallèlement (2) au litage ; Rc Résistance en compression sur cylindre ; Vs : vitesse du son. Les porosités N des pierres «de Beaucaire », du chantier ou des anciennes carrières s’étalent de 25 à 34 %, La pierre C-StR, nettement moins poreuse, semble en dehors du lot. Par contre les pierres de Beaulieu sont situées à l’intérieur de la fourchette précédente. Les coefficients d’absorption d’eau à 48h (S48) sont compris entre 0,57 et 0,80. Là aussi, les pierres de Beaulieu sont dans la fourchette des valeurs présentées par les pierres de Beaucaire. Les capillarités sont plus dispersées avec des 2 1/2 valeurs de 47 à 300 g/m .s soit de 1 à 6. Deux roches semblent sortir de la moyenne, avec des coefficients de capillarité faibles : MBcG1 et C-RM. On peut supposer qu’il s’agit dans le cas de MBcG1 d’une pierre extraite de la carrière du Roc des Mourgues. Si on considère les autres pierres de Beaucaire la dispersion n’est plus que de 1 à 3. Notons de grands écarts entre C1 et C2, pouvant avoir des rapports de 1 à 2 (C-BcG4 et C-StR). Ces écarts sont liés à la très forte granulométrie des éléments fossilifères constitutifs de ces pierres, et à la faible taille des éprouvettes. Les résistances en compression et les vitesses du son n’amènent pas de remarques particulières Durabilité-Compatibilité : Pour l’ensemble des propriétés mesurées les valeurs des pierres de Beaulieu (et de Vers-Pont-duGard) sont comprises dans la fourchette des valeurs présentées par les pierres de Beaucaire. C’est ce que traduit la proximité des indices de durabilité et de compatibilité reportés dans le tableau cidessous. Pierres Pierres d’origine Pierres d’anciennes carrières Pierres de remplacement Indice de durabilité 267A 257A 147A et de compatibilité Indices de durabilité et de compatibilité des pierres échantillonnées / chantier d’Aigues Mortes Du point de vue de l’aspect des pierres de substitution on voit en annexe que la pierre de Beaulieu est compatible avec la pierre en place du point de vue de sa couleur et de son contraste interne. Par Pierre GAUDON © EMA – 2010 13 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » contre sur ces deux critères la pierre de Vers-Pont-du-Gard comme la pierre C-BcG4 ne sont pas comprises dans la fourchette des valeurs présentes dans la muraille d’Aigues-Mortes. Au vu des critères mécaniques et de transfert d’eau la pierre de Beaulieu possède des ème caractéristiques proches de celles utilisées au XII siècle lors de la construction des murailles d’Aigues-Mortes. En conséquence sa durabilité devrait être du même ordre, et la compatibilité avec les pierres en place ne devrait pas poser de problème Pierre GAUDON © EMA – 2010 14 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 4. Cas de la Maison Carrée et de l’amphithéâtre de Nîmes L’amphithéâtre de Nîmes La maison carrée avant restauration La pierre de Barutel est employée en parties basses de la Maison Carrée et constitue l’essentiel du grand appareil de l’amphithéâtre de Nîmes. Il s’agit de pierres fermes à demi-fermes, calcaires blancs légèrement crayeux déposés en mer au Barrémien étage du crétacé (fin du secondaire). La pierre de Roquemaillère a été utilisée dans les arènes. Il s’agit d’une pierre ferme à froide, calcaires blancs déposés en mer profonde à l’Hauterivien, étage du crétacé (fin du secondaire), juste avant le Barrémien. Le chantier de restauration de la Maison Carrée, originellement temple d’Auguste, se termine (2010). Le chantier de l’amphithéâtre (les arènes de Nîmes) a débuté en 2009 et ne concerne pour l’instant qu’une seule des travées (travée n°47). Dénomination Epoque/Etage géologique Pierre de Barutel Crétacé Barrémien (130 Ma) Lieu d’extraction Nîmes Lieu d’échantillonnage Référence de l’échantillon Maison carrée M-BrA Carrière des arènes C- BrA Carrière de Barutel C-BrS Crétacé Pierre de Carrière antique de Hauterivien Nîmes C-RmB & C-RmJ Roquemaillère Roquemaillère (125 Ma) Informations sur les pierres échantillonnées dans le cadre des chantiers de restauration de la ville de Nîmes; les échantillons précédés de la lettre M proviennent de monuments et ceux précédés de la lettre C proviennent de carrières 4.1. Pierres d’origine des monuments Nous avons disposé d’un bloc déposé de l’amphithéâtre de Nîmes pour remplacement par l’entreprise Sèle, noté M-BrA, La carrière d’origine est réputée être celle dite « des arènes » 4.2. Pierres de carrières ancienne et actuelles Pierre de BARUTEL : Un bloc a été prélevé dans la carrière abandonnée de pierre de Barutel dite « des arènes », répertoriée C0089, sur le côté est de la route de Nîmes à Alès, noté C-BrA, L’étude des traces d’escoude (le pic des carriers) a permis aux archéologues de certifier l’exploitation de cette carrière dès l’époque romaine. Elle a été reprise à une époque récente comme carrière de granulats avant d’être à nouveau abandonnée Un bloc de pierre de Barutel envisagée comme pierre de substitution (noté C-BrS) nous a été fourni par l’entreprise Sèle. Leur carrière (C088) est située à quelques centaines de mètres au sud de la précédente, côté ouest de la route de Nîmes à Alès. Pierre GAUDON © EMA – 2010 15 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Pierre de ROQUEMAILLERE : Nous n’avons pas pu disposer d’un bloc issu des arènes. Nous avons travaillé sur deux blocs de la carrière (C0090) de la société Carrière romaine de Roquemaillère notés C-RmB pour le faciès grisbleu et C-RmJ pour le faciès beige. 4.3. Etude pétrographique Pierre de BARUTEL : Les pierres de Barutel issues du monument (amphithéâtre) ou des carrières ancienne et actuelle sont calcaire beiges jaunâtres à grain fin, compacts et homogènes, à cassure terne. Le litage n’est pas visible. Il n’est pas possible de distinguer de grain ou de fossile à l’œil nu. Pierre de Barutel, issue des arènes de Nîmes M-BrA face sciée Pierre de Barutel, carrière des arènes C-BrA face sciée . Pierre de Barutel, carrière Sèle C-BrS Vues macroscopiques des pierres de Barutel Les lames minces des pierres des carrières de Barutel montrent une pâte fine micritique contenant quelques microfossiles dont des foraminifères microsparitiques. Les insolubles sont présents en plus grande quantité que dans les pierres précédentes : ils atteignent ici 9,8 à 12,7 % et sont constitués pour l’essentiel de quartz. La fraction argileuse contient illite et chlorite Pierre GAUDON © EMA – 2010 16 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » M-BrA, lumière polarisée analysée C-BrA, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres de Barutel. La barre correspond à 200 µm. . C-BrS, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces de la pierre de la carrière Sèle. La barre correspond à 200 µm. Pierre de ROQUEMAILLERE : Il s’agit de calcaires veinés, à grain fins, compacts. La différence de coloration est un cas typique 2+ d’oxydation. A l’origine la pierre est gris-bleu du fait de la présence d’oxydes de fer à l’état réduit Fe et sans doute de matière organique. Par oxydation due au contact avec l’air et l’eau circulant dans les 3+ fissurations, le fer passe à l’état oxydé Fe jaune et les matières organiques disparaissent, donnant à la pierre sa couleur beige. Carrière de Roquemaillère, faciès bleu RmB Carrière de Roquemaillère, faciès beige RmJ face sciée face sciée Vues macroscopique de pierres de la carrière de Roquemaillère Les lames minces des pierres de Roquemaillère montrent une pâte micritique englobant de très petits éléments allongés (inférieurs à 100 µm) microsparitiques. Le faciès bleu ne se distingue pas du faciès Pierre GAUDON © EMA – 2010 17 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » jaune à cette échelle. Les insolubles sont nettement plus importants que dans la pierre de Barutel : 20 et 21 % et sont constitués pour l’essentiel de quartz. La fraction argileuse contient de la chlorite, majoritaire, un peu de kaolinite et des traces d’illite (vraisemblablement de la glauconite, verte). C-RmB, lumière polarisée analysée C-RmJ, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres de la carrière de Roquemaillère. La barre correspond à 200 µm. 4.4. Résultats d’analyses & conclusion Felspaths Goethite Interstratifié Illite-chlorite Chlorite Smectite kaolinite Illite Quartz Insolubles % Dénomination échantillon Caractéristiques minéralogiques des pierres de Barutel et Roquemaillère : + + + + + Pierre de Barutel C- BrA 10,19 + + + + C-BrS 12.66 + + + + C-RmB 20,90 tr + + + Pierre de Roquemaillère + C-RmJ 21,07 tr + + + Teneur en silicates insoluble dans les pierres échantillonnées / chantiers de Nîmes / et minéralogie des argiles. tr = traces M-BrA 9.78 Propriétés mécaniques et de transfert d’eau : Les résultats des mesures physiques figurent dans le tableau ci-dessous. Pour comparaison, nous avons ajouté à nos propres mesures celles obtenues sur une étude du LEM sur des pierres des arènes et la pierre actuelle disponible en carrière communiquée par la DRAC. Il ne semble pas y avoir de désaccord important entre nos propres données et celles des fiches techniques compte tenu du fait que nos échantillons sont fatalement différents de ceux de l’étude du LEM. Pierres de BARUTEL : Les porosités N des diverses pierres de Barutel sont proches les unes des autres avec des valeurs comprise entre 13 et 20 %. Ces valeurs extrêmes correspondent à celles des pierres de l’amphithéâtre, qui encadrent donc celles de la pierre de carrière C-BrS ou C-LEM. Les coefficients d’absorption d’eau à 48h (S48) sont compris entre 0,70 à 0,87. Les valeurs de carrière sont plutôt plus faibles que celle de la pierre de l’amphithéâtre. Les coefficients de capillarité C1 et C2 sont plus faibles que ceux des pierres « de Beaucaire » et peu différenciés entre parallèle et perpendiculaire au Pierre GAUDON © EMA – 2010 18 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » lit de carrière. Les résistances mécaniques sont importantes de même que les vitesses du son, en carrière ancienne ou actuelle comme dans l’échantillon provenant des arènes. Vs m/s Rc MPa C2 2 1/2 g/m .s C1 2 1/2 g/m .s S48 N % échantillon Dénomination Pierres de ROQUEMAILLERE : Ne disposant que de deux échantillons, provenant de la même carrière, il est donc logique de constater leur grande proximité. Notons toutefois des caractéristiques remarquables à savoir une très faible porosité, de très faible coefficient de capillarité associés à un coefficient d’absorption d’eau « ordinaire », et une résistance mécanique très supérieure à celle des bétons. 76.4 ± 3882 4.4 43.3 ± M-LEM 13,0 ± 1,6 50 3550 Pierre de 7.7 Barutel C- BrA 18,1 ± 0,4 0,87 29 35 107 4156 C-BrS 15,5 ± 0,8 0,84 31 28 65,4 3435 C-LEM 14,5 42 48 3800 C-RmB 4,44 ± 0,2 0,69 1 2 258.1 5000 Pierre de Roquemaillère C-RmJ 5,70 ± 0,8 0,76 3 2 186.4 5015 Caractéristiques physiques des pierres échantillonnées dans le cadre des chantiers de Nîmes. Les données « fiches techniques » sont celles qu’il est possible de consulter sur les sites des carrières citées. Certaines données sont absentes. N : porosité ; S48 : coefficient de saturation à 48h ; C : coefficient de capillarité perpendiculairement (1) ou parallèlement (2) au litage ; Rc Résistance en compression sur cylindre ; Vs : vitesse du son. Les données LEM sont celles citées en référence. M-BrA 19,5 ± 0,6 0,91 65 56 Durabilité-Compatibilité : Le tableau ci-dessous résume les mesures te commentaires précédents : les pierres de la carrière actuelle de Barutel sont parfaitement susceptibles de remplacer celles utilisées au Ier siècle par les romains. Sans surprise, les deux faciès des pierres de Roquemaillère ne se distinguent que par l’aspect. Pierre de Barutel Pierres Pierres d’origine Pierre de remplacement Pierre de Roquemaillère C-RmB C-RmJ Indice de durabilité 929A 928A 969A 969A et de compatibilité Indices de durabilité et de compatibilité des pierres échantillonnées / chantiers de Nîmes Pierre GAUDON © EMA – 2010 19 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 5. Cas de la Cité de Carcassonne Partie supérieure de la façade ouest de la cathédrale St Michel à Carcassonne. L’ancienne église paroissiale St Michel, construite à partir de 1247 sous Louis IX, est promue cathédrale en 1803. Elle a été restaurée par Viollet-Le-Duc en 1857 suite à un incendie survenu en 1849. Comme la cité de Carcassonne et la plupart des monuments de la ville, les abbayes de Caunes-Minervois et de Lagrasse, l’église St Michel est construite en « grès de Carcassonne », grès calcaire, molasse, à grain moyen ou fin correspondant à un dépôt fluviatile de delta. Cette formation est datée de l’Yprésien (56 millions d’années), étage de l’Eocène (tertiaire). 5.1. Pierres étudiées Nous avons étudié une pierre utilisée antérieurement à la construction de l’église, une pierre utilisée pour sa restauration après l’incendie de 1849, et une pierre actuellement utilisée pour effectuer la restauration. Nous n’avons pas disposé de la pierre locale exploitée par la carrière AUDABRAM. Pierres d’origine : Nous avons disposé d’un bloc issu du vieux rempart proche de la Cathédrale St Michel, sans doute ème mis en place au XII siècle, noté M-Ca1. Il s’agit d’une molasse gréseuse à ciment calcaire Pierre utilisée au XIXème siècle en remplacement de la pierre d’origine : Beaucoup des pierres remplacées au XIXème sont altérées et doivent être à remplacées à leur tour. Nous avons disposé d’un bloc déposé lors de la restauration de la Cathédrale, noté M-Ca2.. L’échantillon provient de la partie saine d’un bloc très profond dont seul le parement a été affecté par la desquamation. Pierres envisagées pour le remplacement : La pierre choisie pour le remplacement est un grès Catalan, de Lerida (Espagne). Nous disposons ème d’un bloc de grès fin, gris vert, d’aspect similaire à celui utilisé lors des restaurations du XIX , noté C-Le1. 5.2. Etude pétrographique Il s’agit dans les trois cas d’un grès gris vert à grain fin, dont le litage est difficile à discerner. A la loupe binoculaire la taille des grains ne dépasse pas 200µm pour M-Ca1, 500µm pour M-Ca2 et C-Le. On repère outre les grains de quartz gris ou noirs (quartz fumés), des grains jaunes de calcite ferrifère et des grains blancs de calcite sparitique (ou de feldspaths dans le seul cas des échantillons M-Ca2 et C-Le). Pierre GAUDON © EMA – 2010 20 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Ancien rempart de Carcassonne M-Ca1 face sciée Cathédrale St Michel de Carcassonne M-Ca2 face sciée Grès de Lérida C-Le1 face sciée La lame mince de la molasse de Carcassonne (M-Ca1) fait apparaître des pellets micritiques, des grains de sparite et des grains de quartz liés localement par un ciment sparitique. La porosité (en noir) est importante et de grande taille (200 µm) M-Ca1, lumière polarisée analysée M-Ca2, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces des pierres du chantier de la Cathédrale St Michel de Carcassonne. La barre correspond à 200 µm. Pierre GAUDON © EMA – 2010 21 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » . C-Le, lumière polarisée analysée Microphotographies de lames minces de la pierre de Lerida. La barre correspond à 200 µm. 5.3. Résultats d’analyses & conclusion Teneur en silicates insoluble dans les pierres échantillonnées dans le cadre du chantier de Carcassonne et minéralogie des argiles. Les insolubles révèlent que le « grès» de Carcassonne est en fait une molasse, un calcaire gréseux, à 80 % de calcite et 20 % seulement d’insolubles. Les insolubles sont du quartz, des micas, des feldspaths, et un cortège argileux à kaolinite, illite, smectite et interstratifié smectite -chlorite. ème + + + + + + + Feldspaths Smectite ++ +++ +++ Goethite kaolinite 19.79 58.66 60.26 Interstratifié Illite-chlorite Illite M-Ca1 M-Ca2 C-Le1 Chlorite Quartz Grès de Lerida Insolubles % Grès de Carcassonne échantillon Dénomination La pierre des substitutions du XIX siècle et le grès de Lérida sont très semblables avec 39 et 40 % de calcite seulement. Il s’agit donc de grès calcaires. La fraction détritique correspond à du quartz et des argiles, kaolinite, illite pour M-Ca2 et les mêmes plus un interstratifié smectite-chlorite pour C-Le, mais il faut noter aussi dans les deux cas la présence de feldspaths albite et orthose, absents de MCa1. + + + + + + Propriétés mécaniques et de transfert d’eau : Les résultats des mesures physiques figurent dans le tableau ci-après. On remarque des disparités importantes entre le grès de l’ancien rempart, M-Ca1, et les deux autres échantillons, qui sont parfaitement similaires. Les pierres du chantier de Carcassonne d’origine et de remplacement, se différencient du point de vue physique comme elles se différenciaient du point de vue minéralogique. Il y a d’une part la molasse gréseuse locale, d’autre part les pierres de substitution moins poreuse et moins capillaire mais à plus fort coefficient de saturation. La résistance des pierres de substitution XIX ou actuelles est importante. Pierre GAUDON © EMA – 2010 22 Vs m/s Rc MPa C2 2 1/2 g/m .s C1 2 1/2 g/m .s S48 N % échantillon Dénomination Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » M-Ca1 11,31 ± 0,9 0,58 15 49 48,8 ± 1,9 3278 C5,7 64 4110 Audabram M-Ca2 4,15 ± 0,5 0,90 5 4 88,8 ± 33 4077 C-Le1 3,15 ± 0,8 0,85 4 3 91,0 ± 6,3 4356 Grès de Lérida C-Barna 3 72,3 Caractéristiques physiques des pierres échantillonnées dans le cadre du chantier de Carcassonne. Nous avons ajouté pour comparaison les données de la fiche technique du grès « Barna » de Lérida N : porosité ; S48 : coefficient de saturation à 48h ; C : coefficient de capillarité perpendiculairement (1) ou parallèlement (2) au litage ; Rc Résistance en compression sur cylindre ; Vs : vitesse du son.. Grès de Carcassonne Durabilité-Compatibilité : La différence importante sur les porosités, les coefficients de capillarité et de saturation se traduisent par des indices de durabilité et de compatibilité différents. Au vu de ces résultats on peut craindre que la durabilité des grès de remplacement ne soit pas supérieure à celle des restaurations du XIXème siècle, soit 150 ans. Pierres Pierres d’origine M-Ca1 Remplacement du XIXème siècle MCa2 Pierre de remplacement actuelle : C-Le Indice de durabilité 989A 929A 939A et de compatibilité Indices de durabilité et de compatibilité des pierres échantillonnées / chantier de Carcassonne Pierre GAUDON © EMA – 2010 23 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 6. Compatibilité visuelle Nous présentons ici les grandes lignes et le principe des mesures de compatibilité visuelle. Ceci est ensuite appliqué uniquement au cas des murailles d’Aigues-Mortes. Le problème de la mesure de la couleur sur de grandes surfaces non uniformes a été résolu en utilisant un appareil photo numérique calibré à l’aide d’une mire et d’un spectrophotomètre (N. Concha Lozano et al. 2009). On utilise le signal directement issu des capteurs de l’appareil photo pour en tirer pixel par pixel l’information colorimétrique, qui est corrigée en fonction de la calibration puis transcrites en coordonnées L*a*b*. Le problème de l’éclairage a été résolu par des corrections appliquées aux images brutes, une mire étant associée à chaque photo. Contrôle de l’éclairage des pierres : A : Blanc de référence de la mire B : Zone pour le calcul de la moyenne C : Contrôle de la directivité de l’illuminant D : Echelle métrique On peut voir sur la figure ci-dessous l’image brute de la même pierre (pierre de Beaulieu) sous plusieurs éclairages différents, à comparer avec en bas les mêmes photos corrigées des conditions d’éclairage. On voit qu’il est possible de s’affranchir efficacement des variations de conditions d’éclairage. E max 49,44 Ecart-type : 15.18 Images brutes de la pierre C-StR pour différents éclairages E max 4,12 Ecart-type : 1,22 Images ci-dessus corrigées des différences d’éclairage A partir d’images différemment exposées (sous exposition, sur exposition) et éclairées avec une lumière directe, orientée ou diffuse, il est donc possible par corrections de retrouver une apparence « éclairage de façade ». Pierre GAUDON © EMA – 2010 24 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Le problème de l’homogénéisation des couleurs avec la distance est lui aussi susceptible d’un traitement mathématique des données brutes. Nous disposons donc a priori de tous les éléments pour comparer sur photo, avant travaux, une pierre pressentie pour se substituer à une autre dans un ouvrage donné, quelle que soit la distance d’observation et les conditions d’éclairage. Cependant l’acceptabilité d’une différence d’aspect dépend à la fois des caractéristiques de la pierre (et du mur) et de l’observateur. Le problème est commun à l’ensemble des phénomènes perçus par les sens (goût, odorat, touché, ouïe). Pour s’assurer de la compatibilité d’une pierre avec celles qui l’entoureront, on peut soit faire appel à un jury qui va noter les différences sur une échelle entre « non perçue » et « choquante ». Une analyse statistique permet alors de connaître le seuil au-delà duquel la substitution est perçue ou devient gênante. On peut aussi, parallèlement, s’imposer que les éléments mesurables dans l’aspect de la pierre de substitution se situent à l’intérieur des limites tracées par la variabilité propre des caractéristiques du mur où auront lieu les substitutions. Pour dire les choses plus simplement si la caractéristique X varie de 5 à 10 dans le mur on peut penser qu’une pierre dont la valeur serait 7 serait a priori acceptable du point de vue visuel. Par contre seul un jury permettrait de dire si la valeur 20 serait perçue comme rédhibitoire ou non. Variabilité colorimétrique des pierres des fortifications d’Aigues-Mortes. Les rectangles bleus correspondent aux pierres échantillonnées du point de vue colorimétrique des diagrammes de la figure ci-après Pierre GAUDON © EMA – 2010 25 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Position des pierres échantillonnées dans les carrières de Beaucaire Beaulieu et Vers dans les espaces colorimétriques A*b* et L*b*. Les figures ci-dessus montrent en bleu quelques pierres des fortifications d’Aigues-Mortes, et en vert les pierres échantillonnées dans cette étude pour ce chantier (Beaucaire et Beaulieu), plus la pierre de Vers Pont du Gard. A gauche les données colorimétriques sont figurées dans le plan a*b*, à droite dans le plan L*b*. On remarque tout d’abord que la muraille actuelle est relativement bariolée avec des valeurs de a de -5 à 30 l’essentiel étant compris entre -5 et 0, et de b* de 0 à 55, l’essentiel étant compris entre 10 et 30. A deux exceptions C-BcG4 (b*=46) et la pierre de Vers (b*=31) les pierres de Beaucaire et de Beaulieu sont fondues dans le nuage principal. Par contre si on considère la luminance, il apparaît que les pierres étudiées sont plus claires que les pierres de la muraille : elles ne sont pas salies ni n’ont subi d’altération. La pierre de Beaucaire BcG4 n’entre pas dans le nuage des pierres existantes du fait de sa faible luminance : elle est très jaune (b* élevé) plus sombre (L faible) que l’ensemble des pierres actuelles. Caractériser une roche par sa couleur moyenne est insuffisant En effet un damier noir et blanc apparaît bien gris « de loin » mais sauf à ce que la taille des cases soit très petite, la différence avec un gris homogène est immédiatement perceptible à l’œil. L’aspect d’une pierre dépend non seulement de la gamme de couleur de ses composants, mais aussi de la taille de ceux-ci et de la taille des pores, qui déterminent le contraste colorimétrique interne. Sans entrer dans le détail de la structure et de la texture de la pierre, il apparait que la distance au-delà de laquelle une pierre est perçue comme de couleur uniforme est une « dimension » caractéristique de l’aspect de la pierre qui prend en compte à la fois l’étendue de la gamme de couleur, la taille des grains et la taille de la porosité. La figure suivante montre le contraste colorimétrique E maximal perceptible au sein d’un moellon en fonction de la distance d’observation. On voit que logiquement ce contraste diminue avec la distance. Mais cette diminution diffère d’une pierre à une autre. Ceci reflète le fait que la distance au-delà de laquelle la pierre est perçue comme étant de couleur uniforme, varie selon la pierre considérée. En admettant par exemple qu’une valeur de contraste de 10 ne soit plus réellement perceptible, on voit que cette valeur est obtenue avec un recul de 55 m pour une pierre de Beaulieu C-Bl1, de structure fine, en vert sur la courbe ci-contre, alors qu’il faut être à 140 m pour ne plus percevoir de contraste interne à la pierre M-AM3, la plus extérieure des courbes rouges. On dispose ainsi d’un indice global d’homogénéité qui caractérise la roche au-delà de sa seule couleur. Au vu des résultats concernant ce chantier d’Aigues Mortes on peut conclure que l’aspect des pierres de substitution est similaire quant à la couleur mais diffère du point de vue de la texture plus homogène dans la pierre de substitution que dans les pierres d’origine. Pierre GAUDON © EMA – 2010 26 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » 90 80 En rouge les pierres de la porte de la reine à Aigues-mortes 70 En vert la pierre de Beaulieu choisie comme pierre de substitution E maximum 60 En gris les pierres des diverses carrières de pierre de Beaucaire 50 40 30 20 10 0 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 Distance d’observation (m) Variation du contraste colorimétrique apparent des pierres d’Aigues-Mortes, de Beaucaire et de Beaulieu en fonction de la distance d’observation Les changements de couleur liés au vieillissement semblent pouvoir être assimilés du point de vue colorimétrique à des filtres de couleur qui s’interposent entre la pierre et l’observateur. La colonisation par des lichens conduit à un filtre noir, celle d’algues par des filtres noirs ou vert selon la nature des algues. Le dépôt de poussières conduit également à un noircissement. Le développement d’un sulfin (croûte gypseuse plus ou moins mêlée de suie) conduit à un jaunissement. La formation de calcin conduit à un blanchiment de la pierre par développement de micrite calcite fine (diffusante) en comblement de la porosité (disparition des pores donc réduction du contraste interne de la pierre). L’étude détaillée des pigments en cause reste à faire mais on peut penser à terme pouvoir simuler correctement les divers trajets de vieillissement des pierres et ainsi prévoir un aspect futur de la réhabilitation. La figure suivante montre les trajets colorimétriques -variation d’aspect au fil du temps- de deux qualités de pierre. Partant d’une surface sciée il y a avec le temps formation d’une patine suivie d’un nettoyage. Il y a à la fois décoloration (b*diminue) du fait de la formation d’un calcin blanc et noircissement (L baisse) dû à des dépôts organiques. Le nettoyage fait apparaître le calcin blanc. Pierre GAUDON © EMA – 2010 27 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Exemples de trajet colorimétrique de deux qualités de pierres de la Maison Carrée à Nîmes. En résumé de ce bref aperçu de la compatibilité visuelle, il faudra à l’avenir prendre en compte non seulement la compatibilité à l’instant t de la restauration mais aussi les variations d’aspects dû aux patines et salissures, qui peuvent varier d’une pierre à l’autre. Si nous sommes capables de simuler une pierre sous divers éclairages, il restera à résoudre le problème de la simulation à divers états d’humidité. Après la pluie les pierres de substitution sont-elles similaires aux pierres d’origine ? Pierre GAUDON © EMA – 2010 28 Guide « Durabilité & compatibilité de pierres régionales » Bibliographie D. (2000) – Guide méthodologique de sélection des pierres des monuments historiques en terme de durabilité et de compatibilité – Rapport BRGM/RP-50137-FR. Dessandier D., Blanc A., Bromblet Ph., Mertz J.D. (2002) – Durabilité et compatibilité des pierres des monuments :proposition d’une méthodologie de sélection. Pierre Actual 07/2002 pp 66-75 Dessandier D., Bromblet Ph., Mertz J.D. (2003) – Elaboration d’un indice de durabilité et compatibilité des pierres des monuments : essai de validation. AFGC GC 2003, 16 p. Concha-Lozano, N. ; Eterradossi, O. ; Gaudon, P. ; Lafon, D. ; Fronteau G. ; Blanc A., (2009). « Couleur et Pierre », Paru dans le mensuel Pierre Actual, no 876, Octobre 2009, I.S.S.N 00256072 Concha-Lozano, N.; Lafon, D. ; Eterradossi, O. ; Gaudon, P. (2010). « Etude du calcin de pierres carbonatées : implication en termes de compatibilité et de durabilité des pierres de substitution dans les monuments », Affiche de la Journée de la Recherche 2010, Université Jean Monet, St Etienne, 6 Mai. Concha-Lozano, N.; Lafon, D. ; Eterradossi, O.; Gaudon, P. (2010). « Assessment of real aging in selection process of replacement materials for stone monuments conservation », 2nd International Meeting on Graphic Archaeology and Informatics, Cultural Heritage and Innovation, Arqueológica 2.0, Sevilla, 14-19 June. Concha-Lozano, N. ; Gaudon, P. ; Eterradossi, O. ; Lafon, D. (2010). « Etude de la patine des pierres, exemple d’un calcaire oolitique », Affiche du 3eme congrès Matériaux, Materiaux 2010, Cité des congrès, Nantes, du 18 au 22 Octobre. (1) Dessandier (2) (3) (4) (5) (6) (7) Pierre GAUDON © EMA – 2010 29