colloque national sur les zénith
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COLLOQUE NATIONAL SUR LES ZÉNITH SYNTHÈSE DE LA JOURNÉE DU 10 OCTOBRE 2013 synthèse de la journée 02 propos liminaires 04 Les Zénith et l’évolution du spectacle vivant 06 Le zénith et son territoire 14 Le zénith et son avenir 22 intervention de jack lang 32 Conclusion 34 Programme du colloque 36 1 10 octobre 2013 Assemblée NAtionAle 2 sYnthèse L e Centre National de la Chanson, des Variétés et du Jazz (CNV) a organisé le 10 octobre 2013, dans la salle Colbert de l’Assemblée Nationale, un colloque national sur les Zénith. Un label populaire bien connu, qui pour ses 30 ans, posait la problématique suivante : « Les Zénith - Le réseau labellisé et l’évolution du spectacle vivant de grande audience ». Plus de 200 participants ont répondu à cette invitation à débattre d’un sujet central pour la politique culturelle française. Ce réseau d’équipements constitue en effet un maillon essentiel pour les artistes attachés à la qualité de leur accueil dans des lieux adapatés à leurs besoins, pour tous les acteurs professionnels qui oeuvrent pour l’animation et l’évolution du spectacle vivant, pour les collectivités locales qui bâtissent et structurent leurs territoires et enfin pour les publics qui aspirent à accéder à un large choix de spectacles de qualité, dans les meilleures conditions possibles. Représentants de l’Etat, élus, diffuseurs, producteurs, tourneurs, exploitants, artistes, musiciens, représentants des organismes et syndicats professionnels... Tous se sont retrouvés à l’occasion de 3 tables rondes qui ont rythmé une journée animée par une quinzaine d’intervenants représentatifs de toutes les parties concernées par le sujet. De nombreux échanges d’expériences, riches d’idées et de points de vues variés ont nourri les débats et montré l’intérêt renouvelé pour ces Zénith trentenaires. Introduit par Patrick Bloche, Président de la Commission des Affaires Culturelles et de l’Education de l’Assemblée Nationale, Marcel Rogemont, député de l’Ille-et-Vilaine et Guy Marseguerra, président du CNV, ce colloque a été marqué par l’amicale présence de Jack Lang ancien Ministre de la Culture, grand témoin incontournable car initiateur et dynamiseur du concept de Zénith en 1981. Les débats ont été animés par trois modératrices : Florence Berthout, directrice de l’Etablissement Public du Parc de la Grande Halle de la Villette, Martine Robert, journaliste « Les Echos » et Anne Quentin, journaliste « La Scène ». Le résumé conclusif a été assuré par Jacques Renard, directeur du CNV et témoin historique de cette épopée exceptionnelle que fut la création des Zénith, un projet unique et fortement remarqué bien au-delà de nos territoires. 3 JACQUES RENARD DIRECTEUR DU CNV GUY MARSEGUERRA PRÉSIDENT DU CNV 4 propos liminAires C ’est par une référence historique commune, qui s’imposait comme une évidence, mais non empreinte de nostalgie, que fut introduit ce colloque par Marcel Rogemont puis Patrick Bloche. Celle, incontournable, d‘évoquer combien « la clairvoyance, l’anticipation de Jack Lang », sa « vision d’une politique culturelle radicalement nouvelle » furent à l’origine des Zénith et de la construction du premier d’entre eux, inauguré à Paris en 1984. Un rappel à deux voix de ces 30 années et de l’importance de ces lieux qui répondaient à un vrai besoin. Patick Bloche a également mis en exergue les problématiques liées à la concurrence d’usage, à la séparation ou la complémentarité entre équipements culturels et sportifs, entre Zénith et Arena. Il a pointé notamment les enjeux liés à la diversité culturelle avec en perspective, « l’exception culturelle », soulignant les risques de concentration et d’uniformisation. Un « enjeu majeur » selon Patrick Bloche, un enjeu de neutralité d’exploitation, particulièrement d’actualité, évoquant l’absence de législation anti-concentration, dans le secteur du spectacle vivant. Marcel Rogemont a souligné que ce passé glorieux ne devait pas cacher la nécessité d’être vigilant, de « réinterroger ce modèle, questionner la diffusion des musiques actuelles et des variétés, un chantier jamais terminé ». Ajoutant que ce colloque était une bonne occasion pour Guy Marseguerra, président du CNV, a complété ce tour d’horizon en rappelant les réalités économiques des Zénith aujourd’hui. Il a évoqué aussi deux problèmes d’actualité et alerté les élus sur ceux-ci. le faire. En premier lieu, celui du plafonnement de la taxe fiscale qui empêchera d’exercer le droit de tirage pour les sommes supérieures au plafond de 24 millions d’euros atteint en 2013. Un risque qui bloque l’action du CNV et ne peut qu’engendrer des réactions fortes de la part de la profession. Interroger les Zénith mais aussi « toute la dimension culturelle qu’ils peuvent représenter ». Patrick Bloche a ainsi évoqué combien ces équipements culturels, « éléments majeurs d’aménagement du territoire et maillage ô combien précieux », étaient au cœur de problématiques nombreuses où les métiers se mêlent. Il a rappelé qu’ils occupent plus que jamais une place essentielle et que leur cahier des charges, bien que datant de 3 décennies, restait totalement pertinent. Un cahier qui questionne, bien sûr, en particulier sur le quota de moins de 30% de manifestations non culturelles. Ensuite, il a attiré l’attention sur la nécessité de voir le Ministère « se réapproprier » le dossier des Zénith afin de disposer de moyens plus coercitifs pour faire appliquer les décisions qui concernent notamment le cahier des charges, confié à la responsabilité du CNV. Une alerte qui a introduit la question du cahier des charges comme un enjeu central des futurs débats. 5 1 LES ZÉNITH ET L’ÉVOLUTION DU SPECTACLE VIVANT Quelle régulAtion publique fAce aux mutAtions économiques et Artistiques ? 6 Florence Berthout, en tAnt que modératrice de cette première table ronde, a posé les bases essentielles du débat proposé : Le réseau des Zénith se porte bien. Les chiffres tendent à démontrer que la fréquentation de ces salles est bonne. Mais jusqu’à quel point peut-on parler de bonne santé ? Il y a tout de même des sujets d’inquiétude, comme les phénomènes de concentration, une sensibilité à la crise et une porosité d’internet qui préoccupent. FLORENCE BERTHOUT DIRECTRICE DE L’ETABLISSEMENT PUBLIC DU PARC DE LA GRANDE HALLE DE LA VILLETTE Quelles sont ces réalités ? Dans quel contexte le spectacle vivant évolue t-il ? Deux questions se posent : comment garantir la diversité des oeuvres et des entreprises? Pourquoi et comment la puissance publique doit-elle jouer un rôle de régulation ? L’essentiel est là ! 7 P our asseoir les échanges et réflexions, Michel Orier a commencé par rappeler que les musiques actuelles n’avaient pas « droit d’entrée » au Ministère de la Culture avant que Jack Lang ne s’y installe avec son équipe. C’est à ce moment-là que « l’on prend la mesure d’une différence de comportement des gens par rapport à la musique ». La création des Zénith c’est d’abord cela. MICHEL ORIER DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA DIRECTION DE LA CRÉATION ARTISTIQUE AU MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION Ce fut aussi une ambition de créer « un dispositif dans lequel l’ensemble du métier pouvait se reconnaître, défendre pour l’ensemble du territoire les artistes dont les producteurs développaient la carrière ». Précisant qu'aujourd’hui « cette chose simple est devenue habituelle et heureuse dans notre paysage musical ». « Un écrin » comme l’évoque Marcel Rogemont. Un écrin qui doit être à la disposition d’une dimension culturelle mais aussi un maillon essentiel pour le devenir des musiques. A ce stade, les limites aujourd'hui rencontrées gagnent à être évoquées. Après 30 ans, il faut reconnaître que les choses ont bougé. Ces salles appartiennent à un « écosystème » - que revendiquent certains et qui est, aujourd'hui, confronté à un certain nombre de mutations. Un premier point de débat est celui du cahier des charges. Hier outil de cadrage et de régulation nécessaire, serait-il devenu instrument de blocage au développement, de déséquilibre propre à générer des situations condamnables ? Si son utilité ne fait pas débat, « on sent un petit vent qui dirait : ce serait bien si…. » comme l’évoque Florence Berthout. MARCEL ROGEMONT DÉPUTÉ D’ILLE-ET-VILAINE S’il traduit des réalités qui font consensus, il subit parfois, sur le terrain, certaines « dérives ». Certains exploitants affirmant sans ambages ne pas l’avoir respecté, sous la pression du groupe les employant et avec la nécessité d’équilibrer les comptes d’activités multiples. D’autres, se revendiquent plus comme acteurs économiques que culturels en affirmant privilégier la rentabilité (ainsi Aurélien Binder, directeur du Zénith de Lille), et suscitant alors des réactions dans la salle. 8 Un écrin qui doit être à la disposition d’une dimension culturelle le rouleau compresseur des logiques marchandes nous met en grande Enfin, il est exprimé à maintes reprises que l’hétérogénéité d’implantation des Zénith sur les territoires a fait naître des Zénith plus « faibles », moins attractifs que d'autres et qui se retrouvent face à des difficultés financières importantes, à l'écart des tournées importantes qui permettent d'accueillir des spectacles de forte notoriété, confessant que « le rouleau compresseur des logiques marchandes met ces Zéniths en grande difficulté ». difficulté La tentation est grande d’outrepasser certaines règles du cahier des charges, pour s’en sortir. La mise « aux enchères » des dates des tournées des artistes les plus côtés active ce phénomène. Doit-on préserver le cahier des charges tel qu’il est ? La question revient comme un leitmotiv. Si pour certains, la situation est largement fantasmée, pour d'autres la multiplication des initiatives irrespectueuses de ces clauses révèle qu'elles sont aujourd'hui dépassées. « Ne parlons pas de futur cahier des charges, faisons appliquer celui qui existe » dit Jean-Claude Camus le producteur. A-t-on vraiment la possibilité de faire appliquer le cahier des charges ? Et s'agit-il d'une question ou d'une revendication ? Il est pourtant utile pour « se défendre de toutes les attaques, coups de boutoir, des surenchères et des concentrations qui tuent la diversité… » MARC SLYPER SYNDICAT FNSAC-CGT Marc Slyper évoque un enjeu qui se cache derrière ce problème : « Il faut le faire appliquer sinon on ouvre les portes à tout… Le risque est de ne plus avoir de règles, de ne plus avoir de cahier des charges qui s’applique, ne plus avoir de règles par rapport aux délégations de service public et aux appels d’offres, c’est ouvrir la porte à la concentration à outrance ». S’il y a solution, elle passe pour beaucoup par un « travailler ensemble » qui doit permettre de solutionner les cas extrêmes, de lutter contre les cas avérés ou les tentatives de position dominante par exemple. Face à l’interrogation répétée sur le rôle et la responsabilité du Ministère de la Culture, Michel Orier affirme : « J’espère que 9 nous allons trouver des modalités d’intervention qui permettent de protéger ce cahier des charges, peut-être de le réaménager en fonction des réalités vécues par les uns et les autres, et de le faire appliquer ». Au-delà de facteurs purement économiques, le moment est venu d’évoquer l’action culturelle. Les Zénith constituent un réseau qui a un sens, du point de vue des politiques culturelles et du soutien à la filière musicale. Quel rôle jouent les collectivités territoriales ? Elles financent. Elles gèrent. Mais comment ? : « On s’aperçoit, que, d’une commune à l’autre, cette fonction Zénith n’est pas toujours assumée par le service culturel piloté par son adjoint à la culture mais relève de la responsablilité d'autres services de la ville ou d'autres adjoints ou conseillers municipaux » témoigne JeanFrançois Burgos. JEAN-FRANÇOIS BURGOS VICE-PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (FNCC) Vouloir un Zénith tout en voulant s’échapper de ses contraintes, tel est le constat que l'on peut quelquefois remarquer. Or, il est jugé important de rappeler que le Zénith fait partie d’un On s’aperçoit, que d’une commune à l’autre, cette tout « Les politiques territoriales ont développé un ensemble de dispositifs et d'équipements en faveur de la musique et le Zénith doit trouver sa place dans cette construction, en complémentarité, en spécificité avec ces structures et salles de toutes tailles ». fonction Zénith n’est pas assumée par le service culturel piloté par son adjoint à la culture Promouvoir, encourager le dialogue entre l’Etat et les collectivités territoriales, mais aussi impliquer sans cesse tous les métiers concernés : « Si l’on veut que le dispositif Zénith, dans son ensemble, puisse perdurer et assumer clairement ses missions, il faut que le Ministère, pas seulement, toutes les organisations des collectivités territoriales soient associées à une réflexion; c’est quand même eux qui financent et la tentation de ceux qui financent c’est d’être décisionnels » affirme Marcel Rogemont. Dans ce contexte, des élus ne manquent pas de soulever le fait que le seul dialogue ne suffit pas : « les élus à la culture sont dans une situation extrêmement difficile, avec des budgets contraints et néanmoins soucieux de préserver les politiques culturelles dans un environnement très perturbé ». 10 Marc Slyper pour sa part souligne que certaines collectivités dès lors, sont quelquefois tentées de s'abstraire des dispositions incluses dans les politiques culturelles nationales, pour y substituer d'autres à la situation locale. Comment définir des politiques Ce débat a aussi permis d'évoquer quelques points préoccupant une partie de l'assistance : celui de la valeur que les Zénith pourraient apporter. Marcel Rogemont fait ainsi remarquer que les spectateurs dépensent plus que des billets, or les Zénith offrent peu en dehors du spectacle même. culturelles qui ne soient pas remises en cause dès le lendemain [...] par les politiques des collectivités Vient se greffer la notion de confort et d’accueil, jugés comme insuffisants ou indignes de notre époque, Jules Frutos estime que les professionnels sont attachés au réseau des Zénith et que territoriales ? c'est l'État qui doit trouver les solutions aux problèmes existants, dès lors que c'est lui qui est en charge de la régulation. Il précise aussi que ces salles ne programment pas elles-mêmes, mais ce sont les producteurs qui les louent pour présenter des artistes au public. Il rappelle que « à l'origine le Zénith de Paris était un chapiteau provisoire, 30 ans après il est toujours là ». Le débat rebondit naturellement sur les prix de location pratiqués. Ceuxci sont jugés excessifs par certains professionnels. De leur côté, les exploitants se disent souvent étranglés par les dipositions trop contraignantes insérées dans les délégations de services public octroyées par certaines collectivités. JULES FRUTOS PRODISS (UNION DU SPECTACLE MUSICAL ET DE VARIÉTÉ) à l’origine le Zénith de Enfin, est évoquée la place d’internet et du numérique. Deux problèmes d’actualité. Il est constaté que le concept de gratuité d’internet se manifeste par une perte de ressource pour le financement de la création du spectacle vivant (transfert de valeur au profit des FAI ou des grands opérateurs) et qu’il serait juste qu’une partie retourne à celui-ci, comme à l'ensemble des acteurs de la création. Paris c’était un chapiteau provisoire, 30 ans après il est toujours là Dans cette complexité, et au-delà de points de vue variés, les avis de tous les intervenants et participants convergent vers une affirmation forte de la nécessité de maintenir ce réseau en bonne place dans les équipements qui animent les territoires, tant ils représentent une garantie pour la pérennité des musiques actuelles et des spectacles de variétés et un type d’équipement, somme toute assez proche des besoins de chacun, pour assurer l’activité de tous. 11 Cela reste un outil privilégié d’aménagement du territoire qui, en témoigne Denis Turmel, directeur du Zénith de Nantes Métropole, peut dynamiser la scène locale « sans vitrifier l’ensemble de la sphère culturelle », en la maintenant à un niveau de prospérité notable. Lors de cette table ronde, le rôle de l’Etat est revenu de façon transversale : souci de le voir plus présent dans un monde marqué par la métropolisation et la décentralisation, la démocratisation et la décentralisation. Il est rappelé que les Zénith s’inscrivent dans un programme politique, territorial et culturel et que l’Etat doit tenir pleinement sa place face aux collectivités territoriales, même si son levier d’action est ou serait « extrêmement faible ». Des élus à la Culture souhaitent être plus accompagnés, plus entendus, pour ne pas être forcément qu’une « variable d’ajustement face aux collègues chargés des finances ». Le représentant de l’Etat tient à affirmer « que la Ministre et le Ministère sont extrêmement attentifs à ces mutations... Nous avons une fenêtre de tir législative, une occasion formidable de pouvoir jouer pleinement ce rôle de régulateur mais elle ne sera efficiente que si nous sommes en capacité de travailler ensemble, c’est la loi d’orientation sur la création qui devrait être débattue à l’Assemblée, au printemps prochain… la question des Zénith est l’un des points importants pour préserver l’ensemble de l’écosystème du spectacle vivant». Cela reste un outil privilégié d’aménagement du territoire qui [...] peut dynamiser la scène locale sans vitrifier l’ensemble de la sphère culturelle 12 ZÉNITH DE PARIS ZÉNITH DE LILLE ZÉNITH DE NANTES ZÉNITH DE NANCY ZÉNITH DE DIJON ZÉNITH DE MONTPELLIER ZÉNITH DE STRASBOURG 13 2 LE ZÉNITH ET SON TERRITOIRE Quel rôle des Zénith dans la politique culturelle des collectivités ? 14 Cette deuxième table ronde s’est plus particulièrement penchée sur la diversité des Zénith, dans leurs territoires. Comme l’a évoqué Martine Robert, modératrice « 17 Zénith, 17 cas différents, avec ce souci de concilier politique culturelle et gestion économique, dans un contexte de finances publiques de plus en plus contraintes, c’est une évidence… ». MARTINE ROBERT JOURNALISTE « LES ECHOS » Un contexte évoqué lors de la première table ronde. Des témoignages variés, des « vécus » de territoires assez emblématiques ont aidé le débat à motiver des échanges. 15 C NICOLA SIRKIS CHANTEUR on a atteint une dimension ’est par un témoignage vidéo qu’a commencé cette série d’interventions. Celui de Nicola Sirkis, du groupe Indochine. Fort d’une expérience d’artiste qui s’est développée concomitamment au cycle de construction des Zénith, il a apporté son vécu d’une évolution qui s’est faite de façon marquée « … dans les années 80, c’était un peu le désert, même plus que cela, c’était compliqué ». Evoquant l’apport décisif de Jack Lang et des concepteurs des Zénith : « on a atteint une dimension de qualité, d’espace scénique, d’endroits où jouer qui sont très rares en Europe », des salles bien adaptées, fonctionnant bien et permettant – parce que mieux remplies – de proposer des prix attractifs. Quelques fois propices à un marché noir qu’il dénonce. Un bilan pour lui très positif, pas seulement pour les Zénith, mais pour l’ensemble des équipements qui constituent le parc des salles proposées en France « qu’il faut maintenir, même si cela peut être des gouffres financiers parce qu’il y a peu de spectacles ». de qualité, d’espace scénique, d’endroits où jouer qui sont très rares en Europe Plusieurs points pour y remédier : touchant la configuration «…Il faut des salles qui s’adaptent et fassent des versions Club » mais aussi la politique culturelle : « pour les élus, je ne pense pas qu’aujourd’hui le spectacle ou la musique soient la priorité, mais il ne faut pas chercher à contenter tout le monde, mais en tout cas à s’adresser à tout le monde ». Viennent ensuite 4 témoignages qui expriment des problématiques contrastées, avec des politiques culturelles et des choix de gestion bien marqués. il ne faut pas chercher à contenter tout le monde mais Montpellier, Strasbourg, Nancy, Dijon. Quatre villes consacrant un fort pourcentage de leur budget à la culture. Avec des options d’exploitation différentes. Pour ces territoires, aux historiques différents, il apparaît que le Zénith est un équipement central dans le dispositif d’équipements gérés. Important par l’investissement consacré, important par la jauge qu’il autorise. Il 16 en tout cas à s'adresser à tout le monde compte, il faut faire avec. Mais « comment on les fait vivre ? » dit Michel Dufraisse. C’est la préoccupation commune. En tant qu’équipement, on parle de la mutualisation des coûts, des équilibrages et arbitrages budgétaires pour veiller à ce que l’articulation entre les salles fonctionne au mieux. En ce qui concerne la politique culturelle, le souci est le même. La nature du spectacle détermine le choix d’utiliser plutôt le Zénith, l’Arena ou la SMAC locale. « Est-ce que le public est en nombre suffisant pour aller dans un établissement ou l’autre ? » évoque Martine Viceriat. MICHEL DUFRAISSE ADJOINT AU MAIRE DE NANCY, CONSEILLER AUPRÈS DU PRÉSIDENT DU GRAND NANCY la recherche d’équilibre entre les « pouvoirs » de chacun est L’on parle plus de complémentarité que de concurrence : « Tous les spectacles qui passent aujourd’hui à l’Arena, sont des spectacles que l’on n'aurait pas pu accueillir au Zénith ». Autre cas de complémentarité, d’entraide évoqué par Yves Berteloot « C’est le Zénith qui participe au financement de la SMAC. Relever la redevance du Zénith permet de financer des travaux de rénovation de la salle la Vapeur ». Bien entendu, ce maillage de salles est remis dans le contexte d’un bon usage culturel. Celui du respect de l’identité, de la vocation de chaque salle, de son apport dans le parcours artistique. essentielle Martine Viceriat réaffirme « je me vis comme un acteur culturel, je suis attentive à la façon dont fonctionnent les SMAC ». Chaque témoin a raconté comment chaque type de salle est utilisé pour faire cheminer l’artiste dans sa progression : « ...L’artiste a parfois commencé chez nous dans une petite salle... Quelquefois, 6 mois plus tard, il est dans une grande salle et il la remplit » raconte Thierry Danet (salle « La Laiterie » de Strasbourg). Mais cette insertion des Zénith dans le tissu des équipements de la ville ou de son agglomération ne se fait pas toujours sans difficulté. En premier lieu, il est important de se situer par rapport à son environnement régional, mesurer la proximité des autres salles, prendre en compte les bassins de population. MARTINE VICÉRIAT DIRECTRICE DU ZÉNITH DE MONTPELLIER Ensuite, la recherche d’équilibre entre les « pouvoirs » de chacun est essentielle. Le conseil et l’expérience des uns, la puissance financière des autres. Les chaises tournent. 17 La pression indirecte de gros opérateurs, les enjeux politiques locaux, la présence de fortes personnalités à la tête d’une agglomération font évoluer les orientations et bouger les lignes « C’est quand même la volonté politique qui est déterminante dans ce que l’on fait d’un Zénith » précise Michel Dufraisse. Pour Thierry Danet « les discussions ont lieu dans un triangle avec la collectivité et l’agglomération…La question de la politique culturelle est une donne fondamentale ». La qualité des rapports avec les élus est considérée comme un élément déterminant, ce point étant souligné par des représentants de sociétés d'exploitation comme par des élus locaux. La complexité des problématiques à gérer nécessite une cohésion, un partenariat et une confiance. « C’est surtout une question de rapports humains… Quand la parole de chacun est respectée on arrive à faire les choses comme il faut » dit Michel Dufraisse. Une relation qui doit aussi exister avec l’ensemble des professionnels locaux qui participent à l’animation culturelle. Car la notion de Zénith semble centrale « C’est une notion symbolique qui induit le respect des producteurs et des artistes et ça, dans le cadre d’une politique culturelle, c’est fondamental » affirme Michel Dufraisse. THIERRY DANET FONDATEUR DE LA SMAC LA LAITERIE À STRASBOURG, DIRECTEUR D’ARTEFACT La discussion se passe dans un triangle avec la collectivité et l’agglomération… Tout ceci avec le souci de respect du public car il s’agit avant nous estimons que nos investissements doivent aller vers plus de tout d’une politique publique précise l'adjoint de Nancy : « nous mobilisons des financements en conséquence, comme pour une piscine, nous sommes dans le cadre d’une politique publique du spectacle et de la culture et nous estimons que nos investissements doivent encourager une évolution qualitative en faveur des gens qui viennent dans ces équipements ». qualitÉ pour les gens qui viennent Dans la continuité de ces sujets, est abordée la place de l’exploitant, quel que soit son statut. dans ces équipements « Comment garder un bon équilibre entre notre délégataire et les partenaires locaux ? » Là aussi, la confiance est jugée nécessaire, quelquefois assujettie à des négociations rudes mais indispensables, selon des élus. 18 L’intervention attendue d’Olivier Hibal, président de Vega qui gère cinq Zénith, était attendue sur ce point. Accompagner la diversité culturelle est sa vocation affichée. La concentration (Vega, Fimalac) est un faux problème affirme-t-il. « Etre un acteur de valeur et faire vivre les équipements, depuis la création jusqu’au spectacle de masse » telle est sa vision, sinon sa mission. La société Véga gère d'autres salles ou parcs d'expositions que les Zéniths. Il s'agit en fait de maintenir les équilibres entre gestionnaires de salles, producteurs et promoteurs locaux. OLIVIER HIBAL DIRECTEUR GÉNÉRAL DE GILBERT COULLIER PRODUCTIONS Au travers des expériences des uns et des autres, que leur exploitant soit Vega ou pas, les intervenants disent qu'il est surtout attendu du délégataire qu’il sache s‘intégrer dans la politique culturelle locale, en comprendre les enjeux et être un maillon actif de l’animation de celle-ci. On attend aussi plus spécifiquement qu’il participe à la promotion de la programmation des autres équipements culturels de la ville, qu’il entretienne « de bonnes relations avec ces structures », au besoin qu’il relaye et organise aussi des événements de la commune en tant que partenaire. Un partenariat qui doit donc être au service d’un collectif, une valeur ajoutée pour progresser. Olivier Hibal évoque cet aspect être un bien au-delà de la problématique régionale : valeur et acteur de faire vivre les « Quel devenir pour nos équipements et comment doit-on les équipements, travailler pour qu’ils soient plus animés, qu’ils puissent soute- depuis la nir plus efficacement le développement culturel français, qui création devrait être aujourd’hui dans une réflexion d’exportation et ne jusqu’au pas continuer à vivre en vase clos ? ». Si la projection est ambi- spectacle tieuse, la réalité est plus mesurée et pragmatique, ainsi Yves Berteloot énonce sa préoccupation en tant qu’élu à la Culture : « Comment capter une partie du public pour l’amener à d’autres pratiques culturelles sur d’autres lieux culturels de la ville ? ». Une autre façon d’appréhender la rentabilité ou le retour sur investissement. de masse A ce stade, sont évoqués plusieurs problèmes qui interfèrent dans le bon fonctionnement des politiques territoriales et handicapent la gestion des Zénith. 19 Le premier est sans conteste le fait que la compétence culturelle est à la ville et pas à l’agglomération… qui parfois a la charge du Zénith, car équipement d’agglomération ! L’équipement appartient à la ville mais nous n’avons pas le droit de faire de Autre point qui a été communément cité : la billetterie. Survolé lors de la première table ronde, il revient de façon plus prégnante, en relation avec la problématique précédente : Yves Berteloot : « L’équipement appartient à la ville mais nous n’avons pas le droit de faire de la billetterie, cela reste un mystère dans le cahier des charges ! ». la billetterie, cela reste un mystère dans le cahier des charges ! Dans l’ambition de la ville d’apporter plus de services à ses salles, l’absence de billetterie est perçue comme une incohérence, sinon un handicap : « On ne peut pas imaginer que l’avenir se fasse sans pouvoir gérer la billetterie » commente Martine Viceriat. Pour Michel Martin, qui fut rédacteur du cahier des charges à son origine, il faut relativiser le problème mais bien discerner les enjeux : « Cela ne me gêne pas qu’il y ait un point de distribution de billetterie... Le cahier des charges a voulu limiter essentiellement le fait que les salles imposent la commercialisation et aient le monopole de la distribution, même en s’appuyant sur des opérateurs ». Un sujet qui fait revenir naturellement au cahier des charges, dont certains exploitants avouent s’en être dédouanés. Tout en déclarant le respecter, dans le fond : « Nous n’avons pas l’impression d’y avoir dérogé ». La question reste posée pour Michel Dufraisse : « Comment accompagner l’évolution d’une telle structure en respectant le cahier des charges ? ». Une question qui alimente le débat sur la possibilité, ou pas, d’ouvrir ce fameux cahier des charges. La dernière partie de la table ronde revient à nouveau sur le problème qui est motivé, en partie, par la posture de Vega. Celle de la concentration. 20 YVES BERTELOOT ADJOINT AU MAIRE DE DIJON, CHARGÉ DE LA CULTURE ET DU PATRIMOINE MUNICIPAL Le danger n’étant pas forcément perçu comme lié à la concentration des services mais plutôt « à la monopolisation de la création, de la production d’artistes dans un réseau qui deviendrait hégémonique ». Lorsque le label Zénith a été conçu, a été En réponse, Olivier Hibal rappelle « que c’est l’artiste qui décide et qui impose sa tournée, les producteurs ont tous besoin de répondre aux attentes de leurs artistes. L’exigence des artistes de se retrouver dans des tournées est aujourd'hui liée à des pertes de revenus qui venaient d’ailleurs. La concentration n’est pas brimante ». fait, il avait été pensé aussi à un développement sur le territoire avec des salles de plus petite jauge et des expressions Pour Marc Slyper la perception est toute autre « On risque de tuer toute idée de création, de diffusion en se concentrant sur des grands réseaux et des grandes exceptions. Lorsque le label Zénith a été conçu, a été fait, il avait été pensé aussi en lien à à un développement sur le territoire avec des salles de plus petite jauge et des expressions différenciées. La concentration est en train de tuer tout cela » différenciées. La concentration est en train de tuer tout celA Jean-François Burgos ajoutant : « Regardez le Cinéma. La concentration tue le produit » Regardez le Cinéma. La concentration tue le produit A ce danger de concentration est ajouté le danger suscité par l’arrivée des salles Arena qui ne suivent plus une logique d’implantation dédiée aux spectacles, mais d'avantage au sport ou à la multiactivité, et qui pourraient nuire à l’organisation des territoires tels qu’ils existent aujourd’hui. 21 3 LE ZÉNITH ET SON AVENIR Quel avenir pour les équipements musicaux de grande capacité ? 22 Lors de cette ultime table ronde, fort animée, les participants ont tenté de brosser le périmètre, sinon les composantes du futur des Zénith. Tour d’horizon des sujets récurrents qui ont animé les précédentes tables rondes, en s’appuyant fortement sur les acquis et le partage d’expérience d’intervenants et participants, certains étant à l’origine de nombreux épisodes de cette aventure trentenaire. ANNE QUENTIN JOURNALISTE « LA SCÈNE » 23 D aniel Colling, le premier, a fait appel à son parcours personnel pour témoigner de la réussite des Zénith, « un acte positif… Les Zénith en France ont dopé de 20 à 30% l’économie du spectacle depuis 20 ans. Et on ne le dit pas assez ». Un succès incontestable et reconnu par tous, car une réponse bien adaptée aux besoins initiaux. Il conteste aussi le fait que les salles Zénith soient trop chères. Succès qu’il faut tempérer par des faiblesses qui continuent à être pointées du doigt. DANIEL COLLING DIRECTEUR DU ZÉNITH DE PARIS Les Zénith en France ont dopé de 20 à 30 % l’économie du spectacle depuis 20 ans En premier lieu, l’aménagement du territoire : si l’Etat a impulsé, engagé les premiers investissements, la prise de relais par les collectivités locales n’a pas toujours été jugée adaptée, avec des implantations peu judicieuses et des Zénith aujourd’hui en souffrance. La seconde faiblesse identifiée reste le controversé cahier des charges. Maintes fois évoqué tout au long de la journée, il a été parfois dénoncé parce qu'en fait, « quelques Zénith n'ont pas correspondu à ce que l’on voulait, ni physiquement, ni en exploitation » témoigne Daniel Colling. Dans le détail de ce cahier des charges des points continuent à faire débat. La clause 70/30 (selon laquelle 70% au moins des activités d'un Zénith doivent être culturelles) « pour que l’équipement sous label Zénith garde bien son identité du spectacle » n’a pas semblé mobiliser le plus de blocages. « Ce n’est pas fondamental, mais il est préférable être souple ». Mais, « Souple aussi sur le principe de neutralité qui veut que l’exploitant ne peut être producteur et inversement ? » relance Anne Quentin. Pour vendre le projet aux collectivités, le Ministère se devait de C’est la question du respect du métier, de son identité, qui est posée. Etre au service de la profession sans tuer la profession c’est le principe qui est défendu dès l’origine. « Pour vendre le projet aux collectivités, le Ministère se devait de défendre la notion de service public et donc de neutralité, c’est elle qui a dicté la base du cahier des charges » témoigne Daniel Colling. Sur la concurrence Zénith / Arena, il estime que la différence 24 défendre la notion de service public et donc de neutralité, c’est elle qui a dicté la base du cahier des charges fondamentale est la scénographie. Dans les Arena, celle-ci est environnante (aire de jeu au centre, public autour) car adaptée au sport, alors qu’en spectacle, la relation avec le public est frontale. Les Zénith ont été construits pour l’activité de spectacle. On nous demande de faire appliquer le cahier des charges mais on n’a aucun moyen de le faire appliquer concrètement Autre sujet récurrent : la billetterie. Modéré sinon gommé par Guy Marseguerra : « La billetterie de toute façon cela existe déjà, la plupart des Zénith, sur leurs sites, vendent des billets des concerts qui ont lieu chez eux, donc je ne vois pas où est le problème », rajoutant « Je ne vois pas si cela vaut la chandelle de vendre des billets le soir du spectacle ». Néanmoins, il reste une attente forte pour voir bouger les lignes, il est bien convenu que c’est quelque chose qui pourrait évoluer. Daniel Colling situant ce problème dans une perspective plus large : « La billetterie n’est qu’un petit aspect du problème de la commercialisation du spectacle, qui reste de la responsabilité du producteur ». Globalement, ce cahier des charges, s’il a mobilisé beaucoup de temps de parole, a fait aussi émerger une convergence de points de vues sur la pertinence et l’utilité de son usage et la nécessité de son respect. « Il faut des outils pour sanctionner ». « On nous (le CNV) demande de faire appliquer le cahier des charges mais on n’a aucun moyen de le faire appliquer concrètement » constate Guy Marseguerra. « Il faut un cahier des charges très contraignant, avec un carton rouge s’il le faut » renchérit Thierry Biskup du Groupe Vega. Pour l’Etat et son représentant André Cayot « La question du cahier des charges et de son inscription – pourquoi pas dans la loi d’orientation reconnaissant ce label Zénith – sera un geste fort même s'il ne s’accompagnera pas forcément de moyens financiers ». Enfin, ce cahier des charges peut-il être une clé d’avenir pour GUY MARSEGUERRA PROMOTEUR DIFFUSEUR DE SPECTACLES, PRÉSIDENT DU CNV les Zénith ? « Le réseau des Zénith est une forteresse assiégée, ... Il y a à peu près 90 salles de grande capacité en France. Toutes ces salles n’ont pas le même régime et ne sont pas soumises aux mêmes règles… Etablir une sorte de code des usages pour travailler ensemble, c’est le sens du cahier des charges… » évoque André Cayot. 25 Le problème de la relation avec les collectivités locales est abordé. « Un problème assez compliqué » témoigne l’un des intervenants, qui repose peut être sur l’inconstance des Ministères qui se sont succédés et qui devaient porter les Zénith. Mais aussi sur une incompréhension des intentions premières : « On n’a pas créé des équipements pour faire de la création. On a investi dans des équipements pour qu’ensuite l’économie locale s’en empare ». L’on a rappelé volontiers que « les communautés d’agglomération n’ont pas la compétence culturelle et vous êtes un peu en face d’objets autonomes ». Le mot « dialogue » revient comme étant la base pour progresser, comme une réponse bien adaptée à cette situation qui correspond à des problématiques hétérogènes. on a fait attention à avoir un excellent maillage et une bonne ARNAUD DELBARRE, DIRECTEUR DE L’OLYMPIA ET EX-DIRECTEUR DU ZÉNITH DE LILLE Pour beaucoup, il existe, il progresse même. Bien que certaines limites existent « Avec les collectivités locales, comme il y a les DSP, on n’est pas en contact » dit Guy Marseguerra. L’une des solutions ne serait-elle pas de passer au stade supérieur, de passer du dialogue ponctuel à l’initiation d’actions communes, fondement de n’importe quel réseau digne de ce nom ? spécialisation des salles Il est convenu que de nombreuses initiatives ont été faites dans ce sens dans le passé, avec peu de succès : « Il y a 20 ans, nous avions monté une association des directeurs de Zénith. On a vite été remis à nos places » témoigne Arnaud Delbarre. Daniel Colling est plus optimiste « Il y a eu récemment deux réunions des responsables de Zénith, il est prévu que l’on se revoie pour parler de nos problèmes, y compris de parler avec Vega, tout va bien de ce côté là ». Pour revenir à la question du programme Zénith, la table ronde a essayé d’appréhender la place qu'occupe celui-ci aujourd’hui. Les témoignages confirment que les Zénith continuent à jouer juste dans le maillage du jeu collectif. Complémentaires aux SMAC, différents des Arena car proposant une scénographie spécifiquement dédiée aux spectacles. 26 Ainsi à Nantes, Jean-Louis Jossic témoigne de cette complémentarité : « on a fait attention à avoir un excellent maillage du territoire et une bonne spécialisation des salles…. L’implantation du Zénith a même été subordonnée à la possibilité de l’inscrire dans un développement cohérent où il trouverait sa juste place ». Les Zénith se sont imposés, sans faire de l’ombre aux Arena, aux salles polyvalentes et aux salles de sports « détournées », qui ne sont que des mauvaises adaptations pour les spectacles. « On n’a jamais inventé mieux » pour Jean-Louis Jossic. « Le choix d’un Zénith s’est fait pour cela, plutôt que d’aménager l'existant ». JEAN-LOUIS JOSSIC ADJOINT AU MAIRE DE NANTES, CHARGÉ DE LA CULTURE Le Zénith reste un équipement culturel. Il peut aussi être instrument de divertissement, mais il est d'abord un outil au service de la politique culturelle. Cependant, Arnaud Delbarre interpelle l'assemblée sur la difficulté à remplir les grandes salles, selon lui, le potentiel d’artistes francophones étant insuffisant : « les Arena, les salles à très grande capacité, les stades et autres, c’est magnifique tout cela mais on va mettre quels artistes ? » Cet avis n'est pas vraiment partagé par Guy Marseguerra, qui cite de nombreux artistes qui remplissent ces équipements ou sont succeptibles de le faire. S’il y a un sujet d’actualité vers lequel convergent les interrogations, c’est celui de la concentration. Sujet déjà abordé dans les tables rondes précédentes. Ici le débat n’évoque pas ses particularités mais ses causes et pointe des responsabilités : « Un Zénith, c’est un investissement lourd. A partir du moment où l’on veut équilibrer ou gagner de l’argent, les demandes financières et les niveaux de garanties demandées sont plus lourds… Forcément à un moment sur l’exploitation il y a des dérives au sens propre du terme et des structures qui se concentrent parce qu’elles ont un intérêt à terme, sur chaque Zénith… Il faut que les politiques fassent leur choix » dit Arnaud Delbarre. « Aujourd’hui la collectivité territoriale qui tranche les DSP a aussi, elle, de plus en plus d'exigence de rentabilité à remplir et cela retombe sur les exploitants » complète Aurélien Binder, directeur du Zénith de Lille. a partir du moment où l'on veut équilibrer ou gagner de l'argent, les demandes financières et les niveaux de garanties demandées sont plus lourds 27 « Si le cahier des charges est respecté au sens de la neutralité des équipements et de la séparation exploitants/producteurs, il n’y a pas trop de problème » commente Daniel Colling. Le « défaut de cuirasse » abordé en début de table ronde, celui d’un aménagement du territoire incomplet sinon déséquilibré refait face, avec l’évocation d’enjeux financiers : « Si le Ministère veut garder ce réseau de Zénith, il faut absolument qu’il ait un programme de financement ou de soutien aux Zénith qui sont plus difficiles » affirme Thierry Biskup du Groupe Vega. Que le Ministère se ré-empare de ce programme et continue, se serve du CNV comme bras armé Pourquoi le CNV ne participerait-il pas à cet effort ? « Le CNV pourrait avoir un rôle de modération et aider certaines tournées qui ne pourraient pas accéder aux Zénith » évoque Daniel Colling. Jean-Louis Jossic a une autre perception de ce soutien à apporter : « le CNV peut très bien aider. Il aide la création, il peut aider la diffusion, ce n’est pas la même chose que d’aider une tournée en diffusion et aider directement le Zénith ». Il justifie ce point de vue en affirmant : « Il faut que l’on arrête de pleurer pour aller chercher de l’argent, on a fait un choix culturel… Cet investissement fait partie intégrante de la politique choisie et nous l’assumons ». Mais, pour cela « il faut qu’il y ait de la programmation, du public et des spectacles » rétorque Aurélien Binder. Voilà 30 ans que l’on a pas estompé En clôture de ce débat et de ce colloque, l’avenir des Zénith est abordé, avec un souhait de Daniel Colling « Que le Ministère se ré-empare de ce programme et continue, se serve du CNV comme bras armé ». Il évoque également un point qui reste, selon lui, très présent dans les problématiques qui touchent ce réseau, à savoir l'ambiguïté entre activité commerciale et activité culturelle : « Les Zéniths sont un carrefour entre monde marchand et monde culturel et se différencient ainsi de l'action culturelle traditionnelle. Voilà 30 ans que les Zéniths existent mais voilà aussi 30 ans que cette distinction perdure». Un sujet qui mériterait sans doute un autre débat ! 28 le problème entre monde marchand de la variété et monde culturel des musiques actuelles. Entre SMAC et Zénith 29 30 grand témoin J ack Lang, invité en tant que grand témoin de ce colloque a voulu, non pas se prononcer sur les débats qui ont animé ce colloque, mais contribuer à nourrir leurs cheminements, car « c’est en rappelant les réflexions d’un moment que l’on peut aussi résoudre les réflexions du jour ». Il a rappelé, comme d’autres intervenants avant lui, quelles étaient les réalités lors de son arrivée au Ministère de la Culture en 1981. Avec des musiques « modernes » non reconnues, n’entrant pas dans le champ des préoccupations des politiques publiques. Jugées insuffisamment « nobles », considérées comme dangereuses, subversives, voire menaçantes pour l’ordre public. Une situation d’indifférence, d’ignorance ou de non reconnaissance fort préjudiciable pour tous les professionnels et publics de l’époque. C’était « une autre génération » qui était concernée. Tant ceux qui décidaient que ceux qui en pâtissaient. C’est lors de rencontres avec des artistes qu’un dialogue s’est amorcé, que les réalités se sont exprimées « ils m’ont expliqué des choses banales, toutes simples et évidentes. Les endroits improbables, la gadoue, la pluie, l’inconfort, l’acoustique incertaine… ». Ce constat fut suivi d’une décision d’action rapide. 8 mois d’étude, 9 mois pour construire. « On a essayé de faire vite et à peu près bien ». Et puis, ensuite la décision d’aller hors de Paris, avec « pourquoi pas, un Zénith par région ». Jack Lang a insisté sur le fait que « cela faisait partie d’un ensemble, d’une politique d’ensemble ». Il fallait construire des grandes salles mais aussi faciliter l’émergence de salles plus modestes, créer des lieux de répétition, des studios… Un objectif qui est, selon lui, toujours d’actualité : « nous avons besoin en France d’une diversité d’équipements, de grandes, de petites salles, de structures, de lieux de répétition, sans compter tout le reste… ». En résonance avec plusieurs débats qui ont animé les tables rondes, il rappelle que les Zénith sont au cœur d’un équilibre sensible : « il faut tenir la balance égale entre la nécessité d’assurer un minimum de survie économique à ces institutions et en même temps ne pas sombrer dans une sorte de marchandisation à outrance » L’objectif restant toujours de faire la place aux jeunes talents, aux chercheurs, aux nouveaux groupes sans « se laisser écraser par certains mastodontes ». Pour finir, il a souligné la nécessité et l’importance du dialogue qui lui semble indissociable de la problématique des Zénith. L’existence de ce colloque en étant le témoin militant. 31 JACQUES RENARD DIRECTEUR DU CNV 32 A u terme de ce colloque, Jacques Renard, directeur du CNV, a remercié toutes les personnes ayant participé à son organisation, les députés les intervenants, le public nombreux et tous ceux qui ont permis sa réalisation. Une mobilisation qui a témoigné de l’intérêt du sujet pour tous les acteurs de la vie culturelle. Une source de réflexion importante et profitable pour un outil qui reste « un beau label d’Etat » comme l’a exprimé Nicola Sirkis. Rappelant que « les Zénith sont une construction publique avec une gestion privée, offerte aux producteurs de spectacles, pour présenter leurs spectacles ». Evoquant l’impossibilité de dresser un résumé de l’ensemble des propos tenus, il a retracé quelles en furent les grandes lignes. En premier, le souci de régulation. Le réseau est certes en partie hétérogène dans sa répartition sur le territoire, mais pas plus que bien des réseaux d’équipements culturels qui se sont implantés au fil du temps sur le territoire national. Il a rappelé que les équipements culturels « s’implantent aussi là où il y a des demandes, notamment des demandes des collectivités territoriales » . Ce sont elles qui financent, même s’il y a des subventions de l’Etat. Il a évoqué l’intervention de Michel Orier à propos de ce sujet, de cette « fenêtre de tir » qui se présente pour introduire un dispositif de régulation dans le cadre du projet de loi d’orientation. En alertant sur la nécessité de se mobiliser afin de bien saisir cette opportunité. Petite parenthèse sur le « label » Zénith qui existe sans exister, afin qu’il se voit conférer une disposition législative réglementaire. Là aussi, avec un appel à faire des « propositions pertinentes pour avancer dans cette direction ». Autre sujet abordé : la concentration. En parti- culier celle de la concentration verticale qui se développe dans le domaine des variétés et des musiques actuelles. Il s’agit de réguler mais pas d’empêcher d'agir ceux qui exercent, y compris les entreprises puissantes. « Il s’agit de trouver un équilibre entre les grandes entreprises et les acteurs indépendants », pour préserver ce que l’on a appelé l’économie du spectacle vivant. Ensuite, est évoqué le rapport entre les collectivités territoriales et les professionnels. Il a constaté « que selon la situation des Zénith, -leur bassin démographique- selon les résultats économiques et culturels, la position des collectivités territoriales n’était pas toujours la même ». D’où la nécessité de concilier une double logique : la logique professionnelle de la filière musicale et la logique territoriale qui a charge de promouvoir la politique culturelle. Il a mis en exergue le mot « dialogue », clé de décrispation des problèmes rencontrés sur le cahier des charges et son application. « Le cahier des charges sera en définitive respecté si ses clauses paraissent comme étant pertinentes et adaptées pour l’ensemble des acteurs concernés, et donc si ses dispositions principales font consensus ». Aujourd’hui le processus de concertation doit se poursuivre. Ce colloque est une étape dans ce processus de longue haleine. Il faut ainsi distinguer plus clairement l'essentiel et l'accessoire dans les dispositions contraignantes de ce cahier ». Enfin, rappelant en quelques chiffres le succès des Zénith il a suggéré – en forme de clin d’œil à un propos d’Olivier Hibal sur la dimension internationale – d’afficher ce succès des Zénith hors de nos frontières, de le promouvoir à l’international. Une belle manière de faire valoir l’exception culturelle française. 33 programme du colloque INTRODUCTION ET PROPOS LIMINAIRES INTERVENANTS Marcel Rogemont Député d’Ille-et-Vilaine Patrick Bloche Président de la Commission des Affaires Culturelles et de l’Education à l’Assemblée Nationale Guy Marseguerra Président du CNV TABLE RONDE N°1 LES ZÉNITH ET L’ÉVOLUTION DU SPECTACLE VIVANT. QUELLE RÉGULATION PUBLIQUE FACE AUX MUTATIONS ÉCONOMIQUES ET ARTISTIQUES ? MODÉRATRICE Florence Berthout Directrice de l’Etablissement Public du Parc de la Grande Halle de la Villette INTERVENANTS Jean-François Burgos Vice-Président de la FNCC,conseiller municipal de Gennevilliers Jules Frutos Président du Prodiss Michel Orier Directeur général de la Direction de la Création Artistique au Ministère de la Culture et de la Communication Marcel Rogemont, Député d’Ille-et-Vilaine Marc Slyper Syndicat FNSAC-CGT 34 TABLE RONDE N°2 LE ZÉNITH ET SON TERRITOIRE. QUEL RÔLE DES ZÉNITH DANS LA POLITIQUE CULTURELLE DES COLLECTIVITÉS MODÉRATRICE Martine Robert Journaliste « Les Echos » INTERVENANTS Yves Berteloot Adjoint au Maire de Dijon, chargé de la culture et du patrimoine municipal Thierry Danet Fondateur de la SMAC La Laiterie à Strasbourg, directeur d’Artefact Michel Dufraisse Adjoint au Maire de Nancy, conseiller auprès du président du Grand Nancy Olivier Hibal Directeur général de Gilbert Coullier productions Nicola Sirkis Artiste, membre de la GAM (témoignage vidéo) Martine Vicériat Directrice du Zénith de Montpellier TABLE RONDE N°3 QUEL AVENIR POUR LES ÉQUIPEMENTS MUSICAUX DE GRANDE CAPACITÉ MÉDIATRICE Anne Quentin Journaliste « La Scène » INTERVENANTS Daniel Colling Directeur du Zénith de Paris Arnaud Delbarre Directeur de l’Olympia et ex-directeur du Zénith de Lille Jean-Louis Jossic Adjoint au Maire de Nantes, chargé de la culture Guy Marseguerra Promoteur diffuseur de spectacles, président du CNV GRAND TÉMOIN Jack Lang Ancien Ministre de la Culture CONCLUSION Jacques Renard Directeur du CNV 35 Contact Crédits CNV 9, boulevard des Batignolles 75008 Paris Tél. 01 56 69 11 30 Fax. 01 53 75 42 61 www.cnv.fr Direction de la rédaction Jacques RENARD Corinne BRET Chargée de communication Tél : 01 56 69 11 40 [email protected] Jean-François PAUX Responsable Salles de Spectacles Tél : 01 56 69 11 47 [email protected] 36 Rédaction Jean-Marc NICOLAS Photos Véronique GUILLIEN Sauf N.SIRKIS : Yves BOTTALICO Conception graphique Nathalie & Vincent MALÉTRAS www.watsonmoustache.com Impression SOPEDI Document certifié PEFC