le mariage : un choix pour la vie - Direction de l`Egalité des Chances
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le mariage : un choix pour la vie - Direction de l`Egalité des Chances
UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN DEPARTEMENT DES SCIENCES POLITIQUES ET SOCIALES Unité de Science Politique et de relations internationales « LE MARIAGE : UN CHOIX POUR LA VIE ? UNE ENQUÊTE SUR LES ASPIRATIONS ET ATTENTES DES JEUNES ENVERS LE MARIAGE » Cette recherche a été commanditée par Monsieur Hervé Hasquin, MinistrePrésident du Gouvernement de la Communauté française en charge de l’ Egalité des Chances et par la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française. RRA APPPPO ORRT T FFIIN NA ALL L’équipe de recherche scientifique : Université catholique de Louvain - Département des Sciences Politiques et Sociales Direction scientifique : Ada GARCIA Chercheur : Isabelle DUMONT Collaboratrices associées : Emmanuelle MELAN, Victoria MONSHE Cette recherche a été réalisée en collaboration avec le CEFA (asbl d’éducation permanente) et avec le CeFeSoc (asbl d’éducation permanente et de recherche appliquée). 15 Juin 2004 PLAN DU RAPPORT FINAL DE LA RECHERCHE 1. REMERCIEMENTS 4 2. ETAT DE LA QUESTION 6 6 8 2.1 Evolution des modes de vie en couple 2.2 Le mariage : pas toujours la conséquence d’un choix personnel 2.3 Mariages forcés, définitions, théories explicatives, motivations et conséquences 2.4 Quelques définitions et témoignages 9 17 3. OBJECTIF(S) DE LA RECHERCHE 21 4. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 22 22 26 27 29 30 4.1 Une enquête quantitative 4.2 Une étude qualitative 4.2.1 Les animations et entretiens de groupe 4.2.2 Les entretiens individuels 4.2.3 Un questionnaire supplémentaire sur les mariages forcés 5. RESULTATS DE LA RECHERCHE 5.1 Résultats de l’enquête quantitative menée auprès de 1200 élèves 5.1.1 Introduction 5.1.2 Profil global 5.1.3 Idéaux des jeunes pour leur avenir personnel 5.1.4 Aspiration au mariage et mode de vie en couple ? 5.1.4.1 Pourquoi les jeunes souhaitent-ils se marier ? 5.1.4.2 Raisons pour lesquelles les jeunes ne veulent pas se marier ? 5.1.5 Conditions de réussite d’un mariage et qualités du /de la conjoint/e ou partenaire idéal/e 5.1.5.1 Conditions de réussite d’un mariage 5.1.5.2 Qualités du/de la partenaire / conjoint/e idéal/e ? 5.1.6 Opinions des jeunes au sujet du mariage inter-culturel, inter-religieux ? 5.1.7 Les parents et la vie de couple de leurs enfants 5.1.7.1 Thèmes évoqués par les élèves avec leurs parents 5.1.7.2 Influence des parents sur le choix du futur conjoint ou partenaire 5.1.8 Les mariages forcés : existence, connaissance, motifs 5.1.8.1 Existence des mariages forcés 5.1.8.2 Connaissance des mariages forcés 5.1.9 Les jeunes et la vie à deux 31 31 31 31 35 36 38 40 42 42 44 48 50 50 51 53 53 57 67 2 5.2 Résultats de l’étude qualitative : entretiens de groupe 5.2.1 Le mariage aujourd’hui 5.2.2 Les attentes 5.2.3 Le mariage forcé 5.3 Résultats de l’étude qualitative : les entretiens individuels 5.3.1 Témoignage 1 5.3.2 Témoignage 2 5.3.3 Témoignage 3 5.3.4 Témoignage 4 5.3.5 Témoignage 5 5.3.6 Témoignage 6 5.3.7 Témoignage 7 5.3.8 Témoignage 8 5.3.9 Témoignage 9 5.3.10 Témoignage 10 5.3.11 Témoignage 11 5.3.12 Témoignage 12 5.4 Résultats de l’étude qualitative : questionnaire supplémentaire écrit 67 67 69 70 75 75 76 77 78 78 79 80 81 82 82 83 84 85 CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS 6.1 Synthèse de la recherche quantitative 6.2 Synthèse de la recherche qualitative 6.3 Recommandations 86 86 88 93 7. BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE 97 8. ANNEXES 6. 8.1 Annexe numéro 1 : le questionnaire d’enquête 8.2 Annexe numéro 2 : le formulaire de partage d’expérience 8.3 Annexe numéro 3 : les courriers de sensibilisation adressés aux établissements scolaires 8.4 Module d’animation pour les entretiens de groupe 8.5 Le questionnaire supplémentaire sur les mariages forcés (témoignages écrits) et les témoignages 9. CALENDRIER DE LA RECHERCHE 101 101 109 110 114 123 141 3 REMERCIEMENTS* A la Direction et aux Enseignants des Etablissements scolaires mentionnés ci-dessous. Leur collaboration fut efficace et précieuse. Arrondissement de Bruxelles : Athénée Royal Alfred Verwée. Athénée Royal Marcel Tricot. Athénée Royal Victor Horta. Centre Scolaire Notre- Dame de la Sagesse. Centre Scolaire Sainte- Marie - La Sagesse. Collège Saint- Hubert. Institut de l’Assomption. Institut de la Vierge Fidèle. Institut des Dames de Marie. Institut Maris Stella. Institut Saint- Dominique. Institut Technique Frans Fischer. Lycée Maria Assumpta. Arrondissement de Liège : Athénée Royal Charles Rogier de Liège. Athénée Royal d’Alleur. Athénée Royal de Hannut. Athénée Royal Liège Atlas. Athénée Royal Lucie Dejardin de Seraing. Centre d’Enseignement Secondaire Léon Mignon de Liège. Centre d’Enseignement Secondaire Léonard Defrance de Liège. Centre Scolaire Saint-Louis de Liège. Collège Episcopal du Sartay. Institut Communal des Techniques de l’Industrie et de l’Automobile. Institut Don Bosco de Liège. Institut Libre d’Enseignement Technique Marie-Thérèse de Liège. Petit Séminaire de Saint-Roch. Arrondissement de Charleroi : Athénée Royal de Chimay. Athénée Royal de Gilly. Centre Scolaire du Sacré- Cœur de Charleroi. Institut Technique de la Communauté Française de Sivry - Rance. 4 Aux membres du Comité d’accompagnement, leurs remarques judicieuses et leur assistance ont contribué à la réalisation de la présente recherche : Adriaenssens Alexandra (Responsable de la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française), Beff Laurence (Attachée à la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française), Bost Mélanie (Attachée auprès de Hervé Hasquin, Ministre Président de la Communauté française en charge de l’Egalité des Chances), Martin Yvan (Assistant Administratif à la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française). Remarque : les considérations et points de vue exprimés dans cette recherche ne reflètent pas nécessairement ceux des établissements et personnes mentionnés. 5 2. ETAT DE LA QUESTION 2.1 Evolution des modes de vie en couple De nos jours, c’est selon un mode pluriel que la famille se décline : famille nucléaire, famille élargie, famille recomposée, famille sans enfant, famille monoparentale, cohabitation ou union de fait1. Aujourd’hui, on se marie moins qu’autrefois et le mariage ne représente plus l’unique référence pour la vie de couple et comme cadre de l’éducation des enfants2. En 2003, un échantillon représentatif de la population française âgée de 15 à 24 ans a été interrogé au cours d’une étude3. A propos de leurs idéaux, ils ont répondu par ordre décroissant d’importance : (1) réussir sa vie professionnelle ; (2) réussir sa vie privée, sa vie amoureuse ; (3) enfin et de manière équivalente : fonder une famille, se marier, avoir des enfants ; avoir des amis, un bon entourage ; réussir sa vie professionnelle. Ainsi, si la famille et la réussite de la vie amoureuse et de la vie privée constituent des valeurs prioritaires, le mariage n’est plus l’unique repère bien qu’il semble demeurer attractif. S’il apparaît être toujours attractif, sa signification a changé : « C’est ainsi que le mariage n’a pas décliné autant que prévu, qu’il peut même connaître une seconde jeunesse, à la condition de ne pas oublier qu’il ne s’agit pas du mariage d’hier. Le terme est resté le même, mais le contenu a changé fortement. Il n’est pas entrée dans la vie de couple. Il peut être dissous assez facilement »4 ou encore que « la perspective d’engagement à long terme est de moins en moins présente pour laisser place à l’idée d’expérimentation »5 voire que le mariage est : «le couronnement et non plus le début de la vie commune, ou qui suit une période d’expérience et de recherche plus longue »6. Par contre, une récente étude7 suisse - portant sur 312 collégiens et collégiennes - au sujet de l’importance accordée au partenariat et à l’amour a révélé d’une part que le mariage est une relation dans laquelle on s’engage pour la vie (80 % d’entre eux le pensent) et d’autre part que le mariage et le partenariat sont qualifiés d’importants à très importants (97 %). D’autres soulignent : « Pourtant, les sondages et les études montrent que (…) les idées relativement traditionnelles sur le mariage et la famille, comme la responsabilité parentale et la fidélité sexuelle, sont tenues en très haute estime et considérées comme des buts à atteindre (Eurobaromètre, 1993 ; Hardin 1986) »8. En France, entre 1981 et 1999, une enquête9 fut menée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Schlesinger Ben (1998), Les forces de la famille : renforcer les points positifs, 26 pages. Document disponible sur le site Web de l’Institut Vanier de la famille www.vifamily.ca De Singly François (avril 2000), La réinvention de la famille, Label France Magazine, numéro 9, 5 pages. TNS Sofres (non daté), Les valeurs des jeunes, 6 pages. Fiche technique de l’étude réalisée du 4 au 6 novembre 2003 disponible sur le site Web http://www.tns-sofres.com De Singly François (mars 1999), Le Soi, le couple et la famille, 4 pages. Intervention disponible sur le site Web : http://www.apgl.asso.fr Gauthier Madeleine (20 août 2003), Que sont les rites devenus ? Le mariage en déclin : à quoi se reconnaît un couple ?, Le Devoir, 5 pages. Bologne Jean-Claude (1997), Histoire du mariage en occident, Pluriel, Hachette Littératures, page 403. Bodenmann Guy (28.03.2002), Mariage et partenariat, Etunews. Document disponible sur le site Web http://www.etudiants.ch Dumon Wilfried, Les incertitudes des politiques à l’égard de la famille in Commaille J. et de Singly F. (sous la direction de) (1997), La question familiale en Europe, Collection « Logiques Sociales », L’Harmattan, Paris- Montréal, page 88. Galland Olivier et Roudet Bernard (2001) (sous la direction de), Les valeurs des jeunes. Tendances en France depuis 20 ans, L’Harmattan, Collection Débats Jeunesses, page 206. 6 à trois reprises sur les valeurs des jeunes âgés de 18 à 29 ans. Si l’institution du mariage ne connaît pas de regain de faveur, toutefois, en 1999, 60 % des répondants estiment que le mariage n’est pas une institution dépassée et de citer les conditions de réussite d’un mariage : la fidélité, la compréhension et la tolérance, le respect mutuel, le partage des tâches ménagères10. Quoiqu’il en soit, un écart existe entre, d’une part, les aspirations et valeurs et d’autre part, les comportements : « Ce qui frappe aujourd’hui, dans les différentes enquêtes nationales et internationales dont nous disposons, ce sont les attentes des couples. En même temps qu’ils se déchirent, se séparent, divorcent, ils aspirent à l’amour unique et à la fidélité » 11. Cet écart s’observe en effet à la lumière des statistiques. Dans notre pays12, il y a de moins en moins de mariages (50.552 en 1996 contre 40.434 en 2002) et de plus en plus de divorces (28.402 en 1996 contre 30.628 en 2002). Au sujet de l’année 2002, on a pu lire : « Le rapport entre divorces et mariages est aujourd’hui de 3 pour 4. Dans la période allant de 1998 à 2000, ce rapport s’élevait encore à 3 pour 5 »13. Ces mêmes auteurs citent ensuite les causes possibles de la baisse du nombre de mariages : des exigences plus élevées à propos des partenaires éventuels ; l’indépendance économique des femmes ; la crainte du divorce ; l’augmentation de l’espérance de vie ; le nombre accru de mariages mixtes ; l’émergence d’autres modes de vies en commun ; une diminution des mariages arrangés chez les autochtones. D’autres expliquent l’accroissement des divorces par : « L’autonomisation des individus et la centration sur l’affectif (…)» 14. En France, en 2000, une enquête15 a interrogé un échantillon représentatif de 1.000 personnes au sujet des diverses formes d’union. Chez les personnes âgées de 18 à 24 ans, les raisons pour lesquelles on ne se marie pas sont les suivantes citées en ordre décroissant d’importance : (1) le désir de ne pas s’engager trop vite ; (2) la peur de l’avenir ; (3) l’attrait pour les formules où l’on est plus libre de se séparer ; (4) la difficulté à trouver un emploi stable ; (5) le nombre important de divorces ; (6) le déclin des valeurs familiales en 2000. 10 11 12 13 14 15 Galland Olivier et Roudet Bernard (2001) (sous la direction de), opcit, pp. 38-39. Bawin-Legros Bernadette (2003), Le nouvel ordre sentimental. A quoi sert la famille aujourd’hui ?, Editions Payot & Rivages, Paris, pp. 71-72. http://www.statbel.fgov.be Moerenhout Alain et Vloeberghs Erik (12 juin 2003 actualisé les 11 et 30 septembre 2003), De moins en moins de mariages et de plus en plus de divorces, Info Flash numéro 40, Institut National de Statistique, page 1. Boulanger P.-M et alii cité par Marquet Jacques (17 février 2003), Les défis de la famille contemporaine, page 9. Exposé disponible sur le site Web suivant http://www.ucl.ac.be/actualites/m-famrecomp.html TNS Sofrès (non daté), Mariage, PaCS, union libre : les différentes formes d’union en 2000, 5 pages. Fiche technique de l’enquête menée du 15 au 17 novembre 2000. Ce document est disponible sur le site Web http://www.tns-sofres.com 7 2.2 Le mariage : pas toujours la conséquence d’un choix personnel En Belgique, d’un point de vue juridique, la validité d’un mariage requière le respect d’un certain nombre de conditions de fond et de forme. Parmi les conditions de fond, le consentement est une condition exigée. En effet, ainsi qu’il est précisé dans l’article 146 du Code civil : « Il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a pas de consentement ». En outre, divers instruments internationaux consacrent le droit d’un individu de choisir librement son/sa partenaire : en particulier, dans l’article 16 second alinéa, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, il est souligné : « Le mariage ne peut être conclu qu’avec le libre et plein consentement des futurs époux ». Dans notre conception occidentale actuelle, le mariage se fonde sur le sentiment amoureux. Autrefois, le mariage de convenance était courant parmi les membres de l’aristocratie et de la bourgeoisie : il semble que ce soit au XVIII siècle que le mariage ait cessé d’être considéré comme une entreprise de survie pour se fonder de plus en plus sur le sentiment amoureux16. Cette évolution a été influencée par des facteurs économiques, l’industrialisation, l’ouverture des marchés, le salariat, l’amélioration progressive des conditions de vie mais aussi par un encouragement de l’Eglise et de l’ Etat17. Malgré ces évolutions, de nos jours encore, la conception selon laquelle le mariage est toujours le fruit de la liberté absolue de deux personnes qui s’aiment doit être nuancée. D’une part, en raison de la tendance à se marier d’une manière relativement endogame selon laquelle le choix du conjoint est parfois conditionné par son origine sociale : “The practice of arranged marriage is not very different from marriage practices among white people, because the latter still recruit their partners from the same nationality, ethnic and racial group, socioeconomic background and religion. Those who do not conform to these norms, in some circumstances, suffer sanctions, ranging from disapproval to ostracism (The Bradford Commission Report 1996)”18. D’autre part, il arrive que des parents tentent d’influencer le choix du futur conjoint de leurs enfants : “on peut arranger les rencontres si l’on ne peut influer sur le mariage. L’organisation de rallyes, dans certains milieux aisés ou huppés, permet de mettre en relation des jeunes de même niveau social et de limiter les mésalliances”19. Enfin, les mariages blancs, mariages arrangés, mariages coutumiers, mariages forcés ou mariages contraints (parmi lesquels on retrouve les mariages précoces ou mariages d’enfants), sont autant de termes recouvrant des situations survenant de nos jours et où le mariage ne résulte pas du choix personnel adopté par deux personnes qui s’aiment20. 16 17 18 19 20 Cocheteux Pascale et Mélan Emmanuelle (document non daté), Mariage blanc. Lueur d’espoir sur fond de désespoir, Cefa service d’Education Permanente asbl, page 1. Bawin-Legros Bernadette (1988), Familles, mariage, divorce, Pierre Mardaga éditeur, Liège, page 23. Samad Yunas and Eade John (2002) ,Community Perceptions of Forced Marriage, Community Liaison Unit, Foreign and Commonwealth Office, page 2. Bologne Jean-Claude (1997), opcit, page 366. Pour les mariages blancs, se référer à Cocheteux Pascale et Mélan Emmanuelle, opcit, pp. 25-32. Pour les mariages précoces, se référer à Innocenti Digest (2001), Early Marriage. Child Spouses, Unicef, Innocenti Research Centre, 29 pages. 8 2.3 Mariages forcés : définitions, théories explicatives, motivations et conséquences Les mariages forcés peuvent notamment survenir au sein des pays du grand Maghreb (Maroc, Tunisie, Algérie, Mauritanie, Soudan), dans ceux d’Afrique subsaharienne ainsi qu’en Turquie et en Asie bien que les lois de la plupart de ces pays s’y opposent « la pratique des mariages forcés est bien réelle alors que les lois exigent le consentement des époux au mariage »21 mais aussi parmi les populations allochtones installées en Europe. Ainsi, il a été relevé qu’à profil socio-économique égal, les jeunes autochtones sont confrontés à des difficultés similaires aux jeunes allochtones. Cependant, parmi ces derniers, certains d’entre eux sont soumis à des contraintes spécifiques dont notamment la préservation de la virginité et le mariage forcé22. Que faut-il entendre par mariage forcé ? Il convient - même si d’un point de vue pratique ce n’est pas simple - de distinguer les mariages arrangés des mariages forcés. Dans la tradition des mariages arrangés, les familles des deux futurs époux jouent un rôle central dans l’arrangement du mariage, mais le choix de se marier ou non appartient aux deux futurs époux et peut être exercé à n’importe quel moment. En Inde, on estime à 95 % la proportion de mariages arrangés23. Le mariage généralement « has very little to do with love or any other emotion ; tradition, culture, religion, caste and community pressures all play an important part in the institution of marriage and the family »24. En Inde, en 1990, une enquête fut menée auprès d’environ 3850 garçons et filles alphabétisés et âgés de 15 à 29 ans. La majorité des répondants (58,1 %) préfèraient que leur mariage soit arrangé aux motifs suivants : « the desire to respect the wishes of their parents and to gain social approval (male : 14.4 %;female : 12.4 %) ; the belief that arranged marriages are more likely to succeed and longer lasting (male : 7.3 %;female : 10.3%) ; and as response to social or family pressures (male : 4.1 %;female : 1.9 %) »25. Toutefois, des évolutions se dessinent puisque 41,8 % se sont prononcés en faveur d’un mariage d’amour. Par contre, par mariages forcés, il faut entendre : « a marriage conducted without the valid consent of both parties, where duress is a factor »26. En d’autres termes, l’un ou les deux « futurs époux » n’a/ont pas le choix de s’y soustraire puisque «la famille recoure alors à des moyens coercitifs tels que : chantage affectif, contraintes physiques, violence, enlèvement, enfermement, confiscation des papiers d’identité, etc… »27. 21 22 23 24 25 26 27 Femmes contre les intégrismes (FCI) (juin 2002), Madame vous avez des droits !, pp. 10-11. Lacoste-Dujardin Camille (sous la direction de) (juin 1995), Les jeunes filles issues de l’immigration maghrébine : une problématique spécifique, rapport final, la Documentation Française. Bougaud Johanne et Gautrin Christine (émission diffusée le 17 août 2001), Oui, je le veux mais c’est papa qu’il l’a proposé, zone libre. Sex Education Counselling Research Training And Therapy Department of the Family Planning Association of India (SECRT) (1990), Attitudes and Perceptions of Educated, Urban Youth to Marriage and Sex, Report of a Survey conducted by the Family Planning Association of India (FPAI), 33 pages. Sex Education Counselling Research Training And Therapy Department of the Family Planning Association of India (SECRT) (1990), opcit, 33 pages. Home Office (2000), A choice by right, report of the working group on forced marriage, page 4. Ce document est disponible sur le site Web : www.homeoffice.gov.uk Cocheteux Pascale et Mélan Emmanuelle, opcit, page 31. 9 A l’instar de la violence intra familiale – insuffisamment dénoncée -, les mariages forcés font l’objet d’un véritable chiffre noir : « In many respects the phenomenon of forced marriages closely parallels domestic violence – there is considerable under- reporting and the figures are a small fraction of what is estimated to be the real scale of the problem »28. En Europe occidentale, le manque de compréhension et de connaissance du phénomène fut ainsi déploré : « Nous en sommes, pour les mariages forcés, au point où nous en étions il y a quinze ans pour la pédophilie avec un mur de silence et des haussements d’épaules »29. En Europe, dispose-t-on d’informations sur l’ampleur du phénomène ? Selon certains, cette pratique semble peu fréquente. Dans une enquête menée en France en 1994 et 1995 auprès de 67 femmes - âgées de 18 à 25 ans et nées de parents tous deux originaires du Maroc, de l’Algérie ou de la Tunisie - on précise : «aucune des jeunes femmes interviewées n’a parlé de pressions de la part des parents pour la forcer à se marier avec un homme que ceux-ci auraient choisi sans son accord. Enfin, c’est une minorité qui nous a répondu par l’affirmative quand nous leur avons demandé si elles avaient eu connaissance dans leur famille ou leur entourage de mariages arrangés »30. Et les auteurs de conclure au sujet des mariages arrangés: « ceux-ci sont en net recul dans les familles maghrébines installées en France »31. De même, au cours d’interviews réalisées auprès de populations allochtones de Grande-Bretagne, il a été souligné : «forced marriage is a declining problem since their cohort would no conduct forced marriages. (…) Personal experience guides them and they do not wish to inflict their bad experience on their own children »32. Enfin, dans une étude française portant notamment sur des dossiers de divorces rendus par le Tribunal de Grande Instance de Lyon pendant les six premiers mois de l’année 1996, les interrogations suivantes sont formulées : « Il ressort pourtant de ces dossiers et entretiens que la Justice connaît rarement des cas réels de « mariages forcés ». Est-ce que parce que cette pratique n’existe plus au sein des familles maghrébines ou d’origine maghrébines vivant en France ? Est-ce parce que les jeunes filles se soumettent à l’autorité du père ? »33. Cependant, d’autres relèvent que les mariages forcés sont toujours pratiqués dans certaines communautés africaines, turques ou maghrébines installées en Europe : «nous avons recueilli de très nombreux témoignages de filles confrontées à cette situation »34 voire qu’ils sont en augmentation : en effet, « Les mariages forcés en augmentation, selon une association féminine »35 a-t-on pu lire récemment. En Grande-Bretagne, on relève : « It’ is estimated that at least 1.000 young British-Asian women a year are forced into marriages against their wishes in the British Asian community of approximately one-million »36. En France, il a été déclaré : «Impossible à quantifier, cette réalité concernerait entre 10.000 et 20.000 adolescentes originaires d’Afrique noire et sans doute plus encore de jeunes filles, mais aussi de garçons, issus 28 29 30 31 32 33 34 35 36 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 54. Richet Catherine citée dans l’article suivant, (27 mai 2002), Les mariages forcés en augmentation, selon une association féminine, auteur inconnu, 3 pages. Document disponible sur le site Web http://www.bouclier.org Flanquart Hervé (2003), Croyances et valeurs chez les jeunes maghrébins, Editions complexe, Bruxelles, page 116. Flanquart Hervé (2003), opcit, page 117. Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 67. Philippe Jean-Bernard, Le mariage des maghrébins ou des personnes d’origine maghrébine in Fulchiron Hugues (sous la direction de) (avril 1999), L’étranger en France face et au regard du droit, La Documentation Française, Ministère de la Justice, Mission de recherche ‘Droit et Justice’, Université Jean Moulin Lyon 3, Centre de droit de la famille. Amara Fadela (2003), Ni putes ni soumises, Editions La Découverte, Paris, page 46. Les mariages forcés en augmentation, selon une association féminine, (27 mai 2002), opcit, 3 pages. Symington Alison (2001), Dual citizenship and forced marriages, Dalhousie Journal Of Legal Studies, Vol. 10, page 3. 10 de l’immigration turque »37 ou encore : « On ne dispose d’aucun chiffre mais plusieurs dizaines de milliers d’adolescentes – voire d’enfants – issues de l’immigration, nées et élevées en France, seraient ou pourraient être confrontées à ces pratiques. Si nombre d’unions s’effectuent à l’étranger, il ne faut pas oublier qu’en France même des filles à peine pubères sont unies religieusement – « coutumièrement » à des garçons plus âgés et même des hommes ».38 En outre, la Police française connaît parfois des cas de mariage forcés : « De même, les entretiens réalisés auprès des services de police révèlent qu’il n’est pas rare qu’ils reçoivent la visite de jeunes filles exprimant la crainte d’être ramenées et mariées de force dans leur pays d’origine et demandant protection »39. Quoi qu’il en soit, le manque de données dont on dispose à propos du mariage forcé nuit à sa compréhension. Dans une recherche40 récente, on donne aux mariages forcés les théories explicatives suivantes tout en soulignant qu’une seule théorie semble être insuffisante pour expliquer ce phénomène multidimensionnel : (1) La perspective ethnique Selon cette perspective, le phénomène des mariages forcés se situe dans le contexte des mariages endogames. Ainsi, les mariages forcés pourraient être considérés comme une extension extrême des pratiques endogames. La limite de cette perspective provient d’une prise en compte de la culture ou de la religion à l’exclusion d’autres facteurs. (2) La perspective de la génération Cette approche place l’accent sur les variations générationnelles survenant au sein des communautés. Par exemple, en Grande-Bretagne, les résultats d’interviews réalisées récemment auprès de populations d’origine pakistanaise et du bangladesh démontrent parmi les personnes plus âgées la persistance de croyance positive au sujet des mariages forcés : « Elders expect greater passivity from the younger generation. They want them to accept the decisions, just as they did when they got married »41. De même, un répondant a estimé que « there is a higher rate of divorce in love marriages compared to so-called forced marriages (…) (Pakistani Elder Men, Working Class)»42. Cependant, il arrive que les enfants demandent à leurs parents d’arranger leur mariage : «Most of these younger participants agree that they would be happy if their parents arranged their marriage. This was due to a combination of filial piety, love and trust. Parents love their children and want the best for them and their children understood that »43 ou encore : « Parfois les parents ne font que suggérer un conjoint, d’autres fois ils l’imposent. Mais souvent aussi, c’est à la demande de leurs enfants qu’ils interviennent dans leur vie amoureuse »44. La limite de la perspective de la génération réside dans le fait qu’elle devrait être confrontée et croisée avec d’autres facteurs explicatifs. 37 Le Monde (02/04/2000), Mariage forcé : la révolte des jeunes filles de l’immigration. Roques Mireille (27 juin 2002), Mariages arrangés, mariages forcés…, Lien Social, numéro 627, page 1. 39 Pesenti Xavier, L’autorité parentale in Fulchiron Hugues (sous la direction de) (avril 1999), opcit, page 88. 40 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 2. 41 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 79. 42 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 42. 43 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 63. 44 Bougaud Johanne et Gautrin Christine (émission diffusée le 17 août 2001), Oui, je le veux mais c’est papa qu’il l’a proposé, zone libre. 38 11 (3) La perspective de genre D’après ce point de vue, le mariage forcé serait lié au contrôle des femmes, à celui de leur sexualité, à la violence domestique. On peut critiquer cette approche en soulignant d’une part que les mariages forcés affectent aussi les hommes et d’autre part qu’ils peuvent être le fait des parents hommes comme femmes. Cependant, il a été précisé lors d’une étude en Grande-Bretagne : « forced marriage must be seen primarily as an issue of violence against women. It was clear from the consultations that it is women who most often live in fear and suffer violence as a result of forced marriage (…) Most of the cases of forced marriage that the Working Group encountered involved young women, from teenagers to people in their early twenties »45 voire que : « Whilst the majority of cases reported to the CLU (Community Liaison Unit) concern women, some 15 % involve young men being forced into marriage »46. Toutefois, la souffrance que vivent les garçons et les hommes victimes de ce phénomène ne devrait pas être occultée. (4) La perspective des classes sociales. La classe sociale est une variable importante mais n’est pas un indicateur unique. Elle doit être croisée avec d’autres variables. En Grande-Bretagne, un Groupe de travail47 fut chargé d’identifier les raisons soustendant la pratique des mariages forcés. Parmi ces raisons, on peut citer : La pression des pairs, de la famille comme ainsi souligné : « C’est devenu une sorte de norme dans la communauté. Des parents qui n’y avaient pas songé sont obligés de le faire pour ne pas être mis au ban »48; Le souhait de renforcer les liens familiaux : « Parents who force their children to marry often justify their behaviour as protecting their children, building stronger families(….) »49 ou encore « Bonding social capital and kin networks become valued as alternative resources to human and financial capital »50; La préoccupation de sauvegarder des idéaux religieux ou culturels dépassés ou erronés. Les idéaux religieux peuvent être erronés. Par exemple : « Islamic law explicitly forbids forced marriages, does not recognise the validity of a marriage where consent is absent (…) »51. De même, les idéaux culturels peuvent être parfois dépassés : « Les familles de culture étrangère sont souvent plus rigides en France que dans le pays d’origine (….) Le mariage est en effet souvent la seule parcelle de pouvoir qui reste aux parents »52 tandis qu’il peut y avoir une stratégie exacerbée de préservation de l’identité : « il n’en reste pas moins qu’ils reprennent à leur compte des pratiques qui ont évolué. Leurs attitudes sont restées figées, voire en 45 Home Office (2000), opcit, page 11. Harvey Heather (document non daté), Forced Marriage : The work of the Foreign And Commonwealth Office, Document disponible sur le site Web http://www2.essex.ac.uk. 47 Home Office (2000), opcit, page 14. 48 Hukum Pinar citée par Zappi Sylvia (08.03.02) L’éducation nationale se mobilise contre les mariages forcés, Le Monde. 49 Stobart Eleanor (document non daté), Dealing with cases of forced marriage, Published by the Association of Chief Police Officers and the Foreign & Commonwealth Office and the Home Office, 35 pages. 50 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 109. 51 Samad Yunas and Eade John (2002), opcit, page 72. 52 Saadi Mustapha cité dans l’article suivant : Les mariages forcés en augmentation, selon une association féminine, auteur inconnu, 27 mai 2002, 3 pages. Document disponible sur le site Web suivant http://www.bouclier.org 46 12 contradiction avec ce qui a motivé leur décision d’émigrer »53. Ces propos peuvent être nuancés grâce aux résultats d’une récente étude comparant les valeurs culturelles des jeunes hommes turcs par-delà la migration : «En Belgique, 86 % des répondants déclarent que leur mariage s’est conclu, en définitive, surtout grâce aux initiatives propres des futurs époux ; pareille réponse n’est donnée que par 66 % seulement des personnes rencontrées à Emirdag, laissant entendre une plus grande implication des parents dans l’arrangement du mariage »54. La motivation de se prévenir à l’encontre de relations qui ne conviennent pas (en dehors du groupe ethnique, de la culture, de la religion, de la caste) : «the category that is perhaps the most common is where young men and women are found to be involved in a liaison which their families disapprove of »55 ; La préoccupation de sauvegarder l’honneur de la famille. L’importance de préserver l’honneur familial a été ainsi mise en évidence dans une récente étude où une jeune fille déclarait : “I would rather commit suicide than bring shame on my family”56 ; Des engagements à long terme de la famille au travers d’alliances convenues entre parents ; Le contrôle des femmes et de leur sexualité. Ainsi, certains soulignent : « Il ne faut pas négliger la crainte des pères de voir leur fille avoir de mauvaises fréquentations. La virginité est une valeur essentielle et le modèle occidental fait peur : les marier le plus jeune possible est donc une garantie »57. On peut aussi avancer d’autres raisons de nature démographique (le nombre important de personnes allochtones en âge de se marier) et administrative (l’obtention de papiers de séjour) : «en effet, les jeunes filles nées de la politique de regroupement familial au début des années quatre-vingt arrivent aujourd’hui en âge du mariage. Pour les époux venus de l’étranger, c’est aussi une stratégie d’obtention des papiers »58 ou encore : « Consequently, the issue of forced marriage has become more significant simply because people from these communities are getting married in ever large numbers »59. Certaines personnes mariées sans s’être choisies ont réussi à former un couple stable60. Toutefois, il n’en demeure pas moins que les (menaces de) mariages forcés ont des répercussions graves et parfois tragiques chez ses victimes mais aussi pour les parents et pour la famille. 53 54 55 56 57 58 59 60 Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. Manço Altay A. (document non daté), Valeurs culturelles par-delà la migration : une comparaison entre turcs immigrés et non-immigrés, 3 pages. Document disponible sur le site Web suivant http://www.flwi.ugent.be Dans cette étude, l’auteur souligne que l’expérience migratoire ne force pas nécessairement les personnes à adopter une position de repli culturel qui tend à renforcer les cadres de pensées et les éléments culturels de la région d’origine. Samad Yunas and Eade John (2002) ,opcit, pp. 78-79. Sanghera Jasvinder et all cité par Harvey Heather (document non daté), opcit. Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. Service des droits des femmes et de l'égalité (document non daté), Les mariages forcés, 2 pages. Document disponible sur le site suivant : http://www.social.gouv.fr/femmes/gd_doss/droits2.htm Samad Yunas and Eade John (2002) ,opcit, page 55. Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. 13 Ainsi, et de manière non exhaustive, on peut citer : un chantage affectif - «Et la mère, qui a failli à son rôle d’éducatrice risque parfois la répudiation. Une menace qui pèse très lourd dans la décision de la jeune fille (….) Et que certaines jeunes filles déchirées entre leur désir et la peur que leur mère soit perçue comme une mauvaise mère accepteront un début de mariage (j’accepte et je divorce très vite) pour la sauver et retrouver leur liberté ensuite »61 - ; des violences physiques – pouvant aller jusqu’aux enlèvements62 dans certains cas - ; des pressions psychologiques – « leaving their family (or accusing them of a crime) will often bring shame on the young person and their family in the eyes of the community. For many, this is simply not a price they are prepared to pay »63 - sont certains des moyens utilisés pour parvenir à obtenir le “consentement“ de la personne. Ainsi, les victimes (ou les personnes menacées de l’être) subissent de la violence intra familiale : «Many women forced into a marriage suffer for many years from domestic abuse (…) They may live within a forced marriage for many years before they feel able to challenge the situation »64. En outre, des relations sexuelles contraintes avec un conjoint non choisi peuvent être assimilées à un viol organisé et prémédité65. Les victimes souffrent aussi de solitude, d’isolement – « Isolation is one of the biggest problems facing victims of forced marriage »66 - ; elles vivent dans la culpabilité et éprouvent des difficultés à fuir ce mariage forcé : « but felf unable to leave the marriage because of economic pressures, lack of family support and other social circumstances »67. Sur le plan de la santé68, on peut aussi signaler des troubles psychologiques tels que des troubles du sommeil, de l’alimentation, du comportement, des somatisations diverses. On signale aussi des dépressions graves pouvant aller jusqu’aux suicides : « many cases of self-harm and suicide among British women of South Asian origin were thought to be linked to forced marriage »69. Selon nous, les conséquences d’un mariage forcé sont bien illustrées par les propos suivants : «Enfin, un mariage forcé, ce sont surtout des études interrompues, des amours contrariés peut-être, des conflits familiaux d’où le stress dans lequel se trouve plongé de jeunes adolescentes qui conduit à des dépressions et des suicides »70 . Ainsi, il y a une contradiction entre, d’une part, les objectifs poursuivis par les parents forçant leurs enfants à se marier contre leur gré et d’autre part la réalité : « the main motivations for parents forcing their children into marriages is the desire to strengthen families and protect their cultures. In fact, the opposite is often the outcome, with families breaking apart and children turning against their cultural background because of their experiences »71. 61 Diallo Kadi et al in Castelnau Claudine (25/2/2002), Mariages forcés, Fréquence Protestante, 3 pages. Hossain Sara and Turner Suzanne (april 2001), Abduction for forced Marriage – Rights and Remedies in Bangladesh and Pakistan, International Family Law, [2001] IFL 1-64, pp. 15-24. 63 Stobart Eleanor (document non daté), Dealing with cases of forced marriage, Published by the Association of Chief Police Officers and the Foreign & Commonwealth Office and the Home Office, 35 pages. 64 Stobart Eleanor (document non daté), opcit, 35 pages. 65 Henrion Roger (séance du 17 juin 2003), Mutilations génitales féminines, mariages forcés et grossesses précoces, Bull. Acad. Natle. Méd., 187 n°6, page 9. 66 Stobart Eleanor (document non daté), opcit, 35 pages. 67 Innocenti Digest (2001), Early Marriage. Child Spouses, Unicef, Innocenti Research Centre, page 12. 68 Henrion Roger (séance du 17 juin 2003), opcit, page 10. 69 Innocenti Digest (2001), opcit, page 12. 70 Castelnau Claudine, (25 février 2002), opcit, 3 pages. 71 Home Office (2000), opcit, page 20. 62 14 En Grande-Bretagne par exemple, il y a eu une certaine réticence à intervenir contre une pratique considérée comme relevant de la sphère privée ou de la culture : « forced marriage is a "family matter", and a practice rooted in religious beliefs or cultural practices, and therefore does not require external intervention. For example, a seventeen-year-old woman who informed social services of her fears of being abducted by her family was told that nothing could be done»72voire que « Until recently, British officials have been reluctant to interfere in what was viewed as “ family “ or “ cultural “ matters »73. Cependant, des évolutions se dessinent. En Europe occidentale74 notamment, on tente de se mobiliser contre ce phénomène. De manière non exhaustive, on peut citer : En Grande Bretagne, en août 2000, l’ Office des Etrangers et le Ministère de l’ Intérieur britanniques ont publié un plan d’action contre les mariages forcés : « Forced Marriage – The Overseas Dimension ». Dans le cadre de ce projet, une structure fut crée (Community Liaison Unit ou CLU) pour exécuter ce plan, renforcer les liens avec les communautés en Grande Bretagne et pour effectuer un travail de prévention75. En Norvège, forcer une personne à se marier contre son gré est illégal et est passible d’une peine de trois ans de prison tandis qu’un plan76 est exécuté actuellement pour combattre cette pratique. Il existe également une ligne téléphonique d’information au sujet des mariages forcés. Au Danemark, le Ministre pour l’égalité des sexes prépare une initiative dans ce domaine en collaboration avec le Ministre de l’intégration et en consultation avec les ONG. En vue de combattre les mariages forcés, on a introduit dans la loi sur les étrangers une augmentation de la limite d’âge pour le regroupement des époux77. En France, en mars 2002, le Ministère de l’Education nationale a impulsé une journée de sensibilisation des personnels des Lycée intitulée : « De la mission générale d’émancipation par l’école à la lutte contre les mariages forcés ». Dans le Val d’Oise, les associations, l’éducation nationale, les conseils généraux et les services sociaux et éducatifs travaillent en collaboration. Par exemple, les services de l’enfance ont accepté d’accélérer leur procédure en cas de menace de mariage forcé. En outre, des formations sont organisées pour les travailleurs sociaux, les professions médicales et tous les personnels de l’éducation nationale. Des débats ont commencé à s’organiser dans les cours d’éducation civique comme au lycée technologique Martin- Nadaud à 72 73 74 75 76 77 INTERIGHTS (March 2000), Home Office Working Group Information Gathering Exercice On Forced Marriages, page 3. An- Na’im Abdullahi and Candler Charles Howard (2000), Forced marriage, page 2. Paper available on http://www/soas.ac.uk Beaucoup de pays en voie en développement tentent également de lutter contre le mariage précoce en fixant un âge minimum pour se marier tandis que la réforme du Code du statut personnel marocain devrait apporter plus de liberté aux femmes. Harvey Heather (document non daté), opcit. Ministry of Children and Family Affairs (2002), Renewed Initiative Against Forced Marriage Spring 2002, 7 pages. Réseau d’experts indépendants sur les droits fondamentaux (31 mars 2003), Rapport sur la situation des droits fondamentaux dans l’Union Européenne et ses Etats Membres en 2002, Rapport établi à la demande de la Commission européenne, Unité A 5 « Citoyenneté, Charte des droits fondamentaux, Racisme et Xénophobie, Programme Daphné » de la DG Justice et affaires intérieures, page 108. Cependant, cette modification législative a été jugée peu conforme au regard de la loi sur les droits internationaux de l’homme par le Comité pour l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard des femmes. 15 Paris78. A Genevilliers, des élèves relais, ayant suivi une formation, assurent un maillage et offrent à leurs camarades en difficulté une oreille attentive79. Des associations80 tentent de lutter contre le mariage forcé. Par exemple, INTERIGHTS - Association internationale oeuvrant en faveur des droits humains - travaille à l’élaboration d’un manuel sur les remèdes aux mariages forcés à l’attention des avocats, des victimes, des organisations défendant les femmes. Ce manuel aurait dû être disponible au printemps 200481. Et en Belgique, en Flandre, une recherche a été commanditée à l’Université d’Anvers. Etudier les effets de la réforme de la Moudawana (Code du statut personnel marocain) auprès de membres de la première et de la deuxième génération figurent parmi les objectifs poursuivis par cette recherche. Indirectement, la question des mariages forcés y sera abordée. Cette recherche devrait être terminée fin-décembre 2004- début 200582. 78 Zappi Sylvia (08.03.02) L’éducation nationale se mobilise contre les mariages forcés, Le Monde. Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 4. 80 On peut aussi citer, par exemple, GAMS, Voix d’elles rebelles, Elele, les Nanas Beurs, Association Fatouma. 81 http://www.soas.ac.uk/honourcrimes/FMhandbook.htm 82 Information transmise par Madame Fauzaya Talhaoui de l’Université d’Anvers. 79 16 2.4. Quelques définitions et témoignages : Définition du mariage forcé « On ne parlera de mariage forcé que lorsque les parents ou les tuteurs imposent à leur enfant une union qu’ils ont négociée sans son avis. En cas de refus de sa part, la famille recoure alors à des moyens coercitifs tels que : chantage affectif, contraintes physiques, violence, enlèvement, enfermement, confiscation des papiers d’identité, etc ». Source : Cocheteux Pascale et Mélan Emmanuelle (document non daté), Mariage blanc. Lueur d’espoir sur fond de désespoir, Cefa service d’Education Permanente asbl, page 31. Définition du mariage forcé «A marriage conducted without the valid consent of both parties, where duress is a factor ». Source : Home Office (2000), A choice by right, report of the working group on forced marriage, page 1. Ce document est disponible sur le site Web suivant : www.homeoffice.gov.uk Définition du mariage forcé « Quand vous avez été contrainte de vous marier par des pressions psychologiques, voire des violences physiques, il s’agit d’un mariage forcé ». Source : FCI et FIJI Rhône-Alpes (juin 2002), Madame vous avez des droits !, pp. 10-11. Définition du mariage forcé «In forced marriage at least one party does not consent to the marriage and some element of duress is involved». Source : Stobart Eleanor (document non daté), Dealing with cases of forced marriage, Published by the Association of Chief Police Officers and the Foreign & Commonwealth Office and the Home Office, 35 pages. Témoignage d’une personne française, témoin d’un fait de mariage forcé “Je connais bien ce problème et je peux dire que l’influence familiale est énorme…. Mon mari a été marié par ses parents à une fille du même village qu’ils ont choisie pour lui”. Source : Ce témoignage est disponible sur le site Web : http://www.planete-senegal.com/forum 17 Témoignage d’une française, témoin d’une menace de mariage forcé « Le problème est justement que nous voulons éviter le rejet de sa famille car je sais à quel point elle est importante pour lui mais comment leur faire comprendre qu’il ne veut pas de ce mariage. Que ce n’est pas par non-respect de la famille ou des traditions qu’il refuse mais qu’il aimerait pouvoir choisir sa femme et sa façon de vivre ». Source : Ce témoignage est disponible sur le site Web : http://www.planete-senegal.com/forum Témoignage d’une personne d’origine sénégalaise “Pour les Sénégalais (ceux d’un certain âge) le mariage n’est pas une question de sentiments, il s’agit simplement d’un moyen de resserrer les liens familiaux, par le mariage entre cousins, et de perpétuer des traditions ancestrales. Pour nous les “jeunes”, la situation est extrêmement difficile, surtout quand on vit en Europe. On est partagé entre le respect des parents et le maintien des liens familiaux, donc un mariage forcé et le mariage d’amour. Soit on décide de vivre en respectant les traditions qui constituent une part essentielle de notre personnalité, soit on la rejette complètement et on se marie avec une personne que l’on aime”. Source : Ce témoignage est disponible sur le site Web : http://www.planete-senegal.com/forum Témoignage de Yasmina, menacée d’un mariage forcé, France “…..j’ai moi-même été victime de violences morales et physiques par mes parents et mon frère aîné, fréquenter un français c’est une honte pour la famille. Ca fait cinq ans que je suis avec mon petit- ami et ils ne l’acceptent toujours pas malgré ses efforts pour s’intégrer. J’ai dû partir de chez moi pour leur faire comprendre que même si il n’est pas musulman ce serait un mari idéal. Mais malgré tout ça, le peu de fois que je vais les voir, ils continuent à insister bêtement en me faisant des reproches. Je n’ai pour l’instant aucun espoir de conjuguer mon avenir aux leurs ce qui me rend triste”. Source : Ce témoignage est disponible sur le site Web : http://www.macite.net Témoignage de Weinishet, 16 ans, victime d’un mariage forcé, Ethiopie “ On m'a mariée quand j'avais 7 ans, explique-t-elle. Mon mari était beaucoup plus âgé que moi. Il a attendu que j'aie 9 ans pour avoir des rapports sexuels avec moi. Ce fut très difficile. Il est décédé quand j'avais 12 ans. J'étais enceinte à l'époque, et j'ai perdu le bébé après un accouchement difficile qui a duré plusieurs jours. Je ne veux pas me remarier. Je ne veux plus qu'un homme me touche. " Source : Margherita Amodeo, chargée de l'information et de la communication, Unicef, Ethiopie, mars 2001. Site internet www.unicef.org/french Témoignage de Mulugojam, 21 ans, victime d’un mariage forcé, Ethiopie "On m'a mariée quand j'avais 10 ans. J'ai eu mon fils à 13 ans. Ma fille est née quelques années plus tard. Ma vie n'était qu'une longue suite de corvées et d'épreuves. Après six années de labeur et de souffrances, j'en ai eu assez. J'ai décidé de quitter mon mari et de m'installer en ville avec mes enfants. Je me suis rendue à Bahir Dar où j'ai trouvé du travail comme domestique. Ma famille était furieuse, bien entendu, car je la couvrais de honte et elle m'a répudiée, me laissant sans ressources. Mais une de mes tantes a eu pitié de moi et elle m'a permis de m'installer dans sa minuscule maison avec mes enfants. " Source : Margherita Amodeo, chargée de l'information et de la communication, Unicef, Ethiopie, mars 2001. Site internet : www.unicef.org/french 18 Témoignage de Fatou, menacée d’un mariage forcé, France « Salut je m’appelle Fatou, j’ai 18 ans. Je suis née en France et j’ai grandi en France. Mes parents m’ont promise depuis petite à un cousin qui est au pays. Il est plus âgé que moi d’environ 10 ans. A l’époque, je devais avoir 13/14 ans. Sous la pression de mon père, je n’ai pas pu protester. Je ne savais pas à qui me confier. Je n’arrivais plus à suivre ma scolarité normalement. Je ne mangeais plus, je déprimais tout le temps mais malgré tout ça, j’ai essayé d’oublier, j’ai fais comprendre à moi soit disant futur mari que je ne voulais pas de cette union mais pour lui tout était conclut et pour lui, renoncer à ce mariage, c’était : je vais blasphémer la parole de mon oncle. Aujourd’hui, je suis avec quelqu’un que j’aime beaucoup et qui veut se marier avec moi. Mais mon père ne veut rien. Il parle même de partir au Sénégal pour me marier pendant les vacances scolaires. Aidez moi, je ne sais plus quoi faire, j’ai besoin de témoignages ». Source : Ce témoignage est disponible sur le site Web http://www.senegalaisement.com Témoignage d’une jeune fille, victime d’un mariage forcé, Grande Bretagne « My Mum was saying – You’ve got to marry him or your Dad will divorce me. (16 year old girl, Bradford)». Source : Home Office (2000), A choice by right, report of the working group on forced marriage, page 5. Témoignage d’un parent, Grande-Bretagne « As many of us have migrated to Britain, the innate sense of obligation to maintain our cultures, languages and traditions have sometimes overwhelmed our ability to develop as a natural family unit». Source : Home Office (2000), A choice by right, report of the working group on forced marriage, page 6. Ce document est disponible sur le site Web suivant : www.homeoffice.gov.uk Témoignage d’une jeune fille, Grande Bretagne « We don’t want to leave our families, we just don’t want to be forced into a marriage (Young woman, Leicester)». Source : Source : Home Office (2000), A choice by right, report of the working group on forced marriage, page 5. Témoignage d’une jeune femme d’origine Pakistanaise en Grande-Bretagne « But parents….always decide yeah they know how you are, they know how the children are so they can choose the right person ». Source : Samad Yunas and Eade John (2002) ,Community Perceptions of Forced Marriage, Community Liaison Unit, Foreign and Commonwealth Office, page 64. 19 Témoignage d’une pratique de mariage forcé commise sur une jeune femme d’origine indienne et vivant en Grande-Bretagne “ A 21 year-old woman, who was born and raised in Britain, told (British High Commission) officials (in India) that she had been tricked into going to India by her parents…on the pretext of visiting a dying grandmother. Once in the country her British passport was confiscated and she was kept under the watchful eye of relatives while her engagement to a local man was arranged…She was moved from village to village in Punjab for 34 days before she was found by diplomats and police in the state capital Chandigarh after a secret three-day operation”. Source : Hossain Sara and Turner Suzanne (april 2001), Abduction for forced Marriage – Rights and Remedies in Bangladesh and Pakistan, International Family Law, [2001] IFL 1-64 pp. 15-24. 20 3. OBJECTIF(S) DE LA RECHERCHE Cette étude poursuivait les objectifs suivants : Etudier auprès d’un échantillon de jeunes âgés de 15 à 18 ans leurs valeurs et aspirations envers le mariage et la vie de couple ; Etudier leur connaissance des mariages forcés, des caractéristiques des situations où ces mariages sous la contrainte se produisent et des conséquences qui en découlent ; Analyser à l’aide de ces observations les facteurs qui interviennent et marquent l’évolution de ce type de comportements (aspects juridiques et socio- culturels) ; Proposer des pistes pour prévenir la survenance du phénomène et pour venir en aide aux jeunes filles et jeunes garçons tant mineurs que majeurs, victimes de ce type de phénomène. 21 4. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 4.1 Une enquête quantitative Introduction A l’initiative de Monsieur Hervé Hasquin, Ministre- Président du Gouvernement de la Communauté française en charge de l’ Egalité des Chances et de la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française, une recherche a été commanditée à l’Université catholique de Louvain. Cette recherche a été réalisée en collaboration avec le CEFA, asbl (Centre d’Education à la Famille et à l’Amour, asbl d’éducation permanente) et avec le CeFeSoc, asbl (Centre Femmes et Société, service d’éducation permanente et de recherche appliquée). Etudier la perception des jeunes à l’égard du mariage et au sujet du mariage forcé en particulier constituaient l’un des objectifs centraux poursuivis par cette recherche. En vue d’atteindre cet objectif, il a été choisi de mener une enquête auprès d’élèves. En effet, d’une part, l’établissement scolaire semble être un lieu privilégié pour entrer en contact avec les jeunes et d’autre part, à propos des personnes menacées d’être envoyées à l’étranger pour subir un mariage forcé, certains ont souligné : «l’école est souvent le seul lieu où, hors famille, elles vont pouvoir exprimer leurs souffrances ou leurs craintes »83. Conception d’un questionnaire d’enquête et test du questionnaire L’élaboration de ce questionnaire (voir Annexes) a été guidée par le souci d’une part, de ne pas stigmatiser les populations d’origine étrangère et d’autre part, de respecter la confidentialité des données transmises par les élèves. En effet, la Loi relative à la protection des données du 8/12/1992 restreint la transmission de données à caractère personnel à des équipes de recherche notamment. Au cours de la conception du questionnaire, l’équipe de recherche a bénéficié des remarques précieuses et pertinentes de Alexandra Adriaenssens (Responsable de la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française), de Laurence Beff (Attachée à la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française), de Mélanie Bost (Attachée auprès de Hervé Hasquin, Ministre Président de la Communauté française en charge de l’Egalité des Chances). Ce questionnaire a fait ensuite l’objet d’un test auprès de quelques personnes, ce qui a permit d’en améliorer la conceptualisation. En définitive, le questionnaire s’articulait autour des thématiques principales suivantes : -Le projet de vie de couple ; 83 Roques Mireille (27 juin 2002), Mariages arrangés, mariages forcés…, Lien Social, numéro 627, page 2. 22 -Le souhait de se marier ; -Les aspirations globales pour l’avenir ; -L’influence des parents sur le choix du/de la futur/e conjoint/e ; -Les conditions de réussite d’un mariage ; -Les qualités du/de la partenaire idéal/e ; -La possibilité d’un mariage mixte ; -La connaissance des mariages contraints ; -Quelques stéréotypes masculins et féminins. Sensibilisation des Etablissements scolaires au sujet de l’enquête En premier lieu, en vue d’avoir une certaine diversification territoriale, il a été convenu de réaliser une enquête auprès de 1.200 élèves fréquentant des établissements scolaires situés dans les arrondissements administratifs de Bruxelles, Liège et Charleroi ; âgés de 15 à 18 ans ; issus des classes de 4ème, 5ème et 6ème années de l’enseignement ordinaire et de l’enseignement en alternance ; appartenant aux filières suivantes : générale, technique, professionnelle. Dans une précédente recherche menée auprès d’élèves de l’enseignement primaire en Communauté française, la pertinence du choix des arrondissements de Bruxelles- Capitale et de Liège comme territoire d’investigation fut soulignée: « Ces deux arrondissements s’avèrent particulièrement riches et représentatifs et procèdent d’un contour socio- démographique plus ou moins identique. Chacune de ces deux aires se caractérise par une forte disparité des communes en terme de profils socioéconomiques : certaines communes y sont en effet situées à des extrêmes au niveau du revenu moyen par habitant, (ce qui n’est pas le cas dans d’autres arrondissements de la Région Wallonne, présentant un profil général moins contrasté) »84. Afin d’encourager la participation à cette enquête, un premier courrier fut transmis à la direction des établissements scolaires situés dans les arrondissements de Bruxelles, Liège et Charleroi. Ce courrier (voir Annexes) rappelait, d’une part, le contexte et les motivations sous tendant cette étude ; d’autre part, les modalités de son exécution et enfin, insistait sur l’importance d’une réponse rapide en vue d’être sélectionné pour participer à l’enquête. Au total, ce courrier a été envoyé à 221 directeurs/ices ; préfets et préfetes d’établissement et d’implantation des arrondissements susmentionnés. En particulier, il fut transmis pour les arrondissements de Bruxelles, Liège et Charleroi à respectivement : 106 établissements (dont 36 à discrimination positive) ; 69 établissements (dont 10 à discrimination positive) ; 46 établissements (dont 21 à discrimination positive). La Direction de l’ Egalité des Chances de la Communauté française s’est chargée d’envoyer ce courrier et de réceptionner les demandes de participations. Au début du mois de février 2004, 30 établissements ont manifesté leur souhait de participer à l’enquête (soit 13.5 % du total des établissements contactés). En particulier, à 84 Dauphin Nicolas (et al.) (décembre 2001), Recherche sur la mobilité des élèves en cours de scolarité primaire en Communauté française Wallonie- Bruxelles, Rapport final, GIRSEF, page 58. 23 Bruxelles (12 établissements dont 4 à discrimination positive) ; à Liège (14 dont 3 à discrimination positive) ; à Charleroi (4 dont 1 à discrimination positive) ont formulé un tel souhait. En outre, ils précisaient le nombre de questionnaires qu’ils souhaitaient recevoir. Selon les établissements, le nombre souhaité de questionnaires s’étalait de 60 jusque 320. En moyenne, les établissements ont demandé entre 100 et 150 questionnaires. Un second courrier fut envoyé dans le courant du mois de février 2004 aux établissements intéressés. Dans ce courrier étaient notamment précisés : les modalités pratiques d’exécution (la date limite de retour des questionnaires ; la présentation de l’initiative par l’enseignant ; le remplissage des questionnaires de manière individuelle et anonyme par des élèves de classes de 4ème 5ème 6ème année de l’enseignement ordinaire, en alternance et issus des filières technique, professionnelle et générale ; une fiche d’identification de l’enseignant) ainsi que les modalités de renvoi des documents (sous forme d’une enveloppe en contenant deux autres distinctes et destinées à recueillir pour la première la fiche d’identification de l’enseignant notamment et pour la seconde les questionnaires remplis par les élèves dans un souci de confidentialité). La Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté française, en particulier Monsieur Yvan Martin, s’est chargé de réceptionner les questionnaires et de les transmettre à l’équipe de recherche chargée d’analyser les données. Choix d’une technique d’échantillonnage, analyse des données Premièrement, il a été décidé de sélectionner 20 établissements scolaires selon les conventions suivantes. D’une part, la stratification territoriale suivante a été respectée : 10 établissements à Bruxelles, 6 à Liège et 4 à Charleroi. D’autre part, au sein de ces arrondissements, il a été convenu de choisir les établissements, en priorité selon leur qualité d’établissement à discrimination positive (ce choix étant justifié par l’objectif central de la recherche d’étudier la perception qu’ont les élèves du mariage forcé) et pour les autres établissements, selon l’ordre d’arrivée des demandes de participation (Tableau 0). Deuxièmement, à la mi mars, 1979 questionnaires au total furent transmis par ces 20 établissements lesquels furent ensuite scindés en deux groupes : le groupe des questionnaires issus des établissements à discrimination positive et le groupe des autres établissements. De manière aléatoire, 600 questionnaires ont été choisis dans chaque groupe ce qui a permit de constituer un échantillon de 1.200 élèves (Tableau 1). L’encodage des données a été effectué grâce à la collaboration précieuse de Brigitte Nivaille, Yolande Nivaille, Geneviève Van Ginderdeuren, Nathalie Van Humbeeck du CeFeSoc. L’analyse des données a été possible grâce au logiciel informatique SPSS et grâce aux conseils pertinents de Monsieur Bernard Masuy (UCL). 24 Limites inhérentes à cette technique Il s’agit ici d’une recherche exploratoire dont les résultats doivent être envisagés avec prudence. Toute recherche présente des limites. Des limites d’ordre méthodologique tout d’abord. Ainsi, il convient de faire preuve de vigilance face au choix méthodologique adopté. D’une part, les établissements retenus pour participer à l’enquête l’ont été sur une base volontaire. L’échantillon constitué n’est donc pas représentatif de la population dans son ensemble. A Bruxelles, par exemple, la proportion importante d’établissements accueillant des élèves issus de classes vraisemblablement aisées est susceptible de constituer un biais d’échantillonnage ! D’autre part, le nombre de questionnaires reçus présente des variations importantes selon les établissements participants tandis qu’il n’a pas été tenu compte de la taille des établissements répondants. Il aurait été préférable de sélectionner aléatoirement un ensemble d’élèves représentatifs de la population dans son ensemble à l’instar d’une précédente recherche où il a été souligné que des groupes d’élèves furent sélectionnés aléatoirement : « dans la population d’ensemble tout en étant « stratifié » du point de vue (i) du caractère (officiel, libre) et (ii) de la localisation en milieu urbain (arrondissements de Bruxelles, Liège, Charleroi) vs semi- urbain ou rural (tout le reste). Il s’agissait d’avoir – dans chacun des échantillons de 10.000 élèves – des proportions d’élèves selon le caractère et la localisation identiques à celles caractérisant l’ensemble de la population »85. Des limites financières et humaines également. On peut songer aux ressources humaines et financières, à l’étendue du champ d’observation et aux contraintes de temps. Tableau 0 : Stratification de l’échantillon des établissements retenus 85 Arrondissements Nombre établissements contactés % Nombre établissements sélectionnés % Bruxelles 106 (dont 36 à discrimination positive) 48 10 (dont 4 à discrimination positive) 50 Liège 69 (dont 10 à discrimination positive) 31 6 (dont 3 à discrimination positive) 30 Charleroi 46 (dont 21 à discrimination positive) 21 4 (dont 1 à discrimination positive) 20 Total 221 100 20 100 Dauphin Nicolas (et al.) (décembre 2001), opcit, page 52. 25 Tableau 1 : Stratification de l’échantillon des élèves Arrondissements N total questionnaires N total questionnaires N total questionnaires reçus mars 2004 selon sélectionnés selon D+ reçus mars 2004 D+ ou D ou D (%) (%) Bruxelles 667 Liège 697 Charleroi 615 Total 1979 (34) D + = 144 D = 523 (35) D + = 343 D = 354 (31) D + = 228 D = 387 1979 D + = 600 (50) D - = 600 (50) 1200 D + : Etablissements à discrimination positive retenus. D : Autres établissements retenus. 4.2 Une étude qualitative Introduction Par souci d’approfondir le volet « mariages forcés », il a été proposé aux élèves d’apporter leur(s) témoignage(s) sur des cas dont ils avaient connaissance. Pour cerner la demande, un formulaire libre dit de « partage d’expérience » avait été glissé dans l’enquête et devait revenir à l’équipe de recherche dans un pli distinct de celui contenant les questionnaires, ceci de manière à sauvegarder le principe de confidentialité. Sur base du recueil des formulaires (117), des contacts ont été pris avec les écoles et en particulier avec les professeurs qui avaient assuré le suivi de la première étape. Il leur a ainsi été demandé de demander aux élèves s’ils souhaitaient participer à une rencontre avec l’équipe. Il a été convenu de procéder à des entretiens individuels ou de groupe (sous forme ici d’animation) afin de détecter la présence de cas de mariages forcés dans les établissements scolaires, d’analyser grâce aux témoignages les facteurs favorisants et in fine de pouvoir dégager certaines pistes pour prévenir la survenance du phénomène. Il a ainsi été demandé aux élèves volontaires d’expliquer les circonstances dans lesquelles se déroulait le mariage (forcé ou arrangé) mais aussi et surtout de définir les moyens utilisés par la famille et par les parents ainsi que les conséquences sur le plan personnel, familial et scolaire de la personne à qui une union a été imposée. Les objectifs de ce second volet qualitatif visaient essentiellement à rencontrer des jeunes gens qui côtoient dans leur environnement proche des familles qui ont recours à la pratique des mariages forcés. Par ces rencontres, il était ainsi souhaité d’appréhender du mieux 26 possible les souches de la population les plus concernées afin dans un premier temps de pouvoir se faire une idée de l’ampleur et de l’évolution du phénomène. Il convient ici d’insister sur les difficultés méthodologiques rencontrées au cours de cette seconde partie de l’enquête. Manque de communication de l’école envers les élèves concernés et envers la consigne d’origine, désistement de certains établissements, problèmes d’organisation,… sont autant de facteurs qui ont joué sur la perte de données pour les missions d’animation et d’entretiens. Afin de palier à ce manque, un questionnaire écrit plus complet composé de questions ouvertes sur le mariage forcé à été déposé dans les écoles à l’attention des élèves qui n’avaient pas souhaité rencontrer l’équipe d’animation. Le questionnaire, repris en annexe, pouvait soit être retourné par la poste ou laissé au secrétariat des écoles. D’autre part, dans certaines écoles, s’il n’a pas été possible de rencontrer les élèves ; le contact avec certains professeurs de ces écoles a révélé l’existence d’une réelle problématique au sujet des mariages forcés au sein de leur établissement. Cette problématique ne peut visiblement être quantifiée, tout au plus relevée. Il est cependant déjà intéressant de relever le souhait de certains enseignants de poursuivre l’action sur les mariages forcés en 2004-2005, contraints de postposer l’initiative en raison de la période d’approche des examens. Les élèves rencontrés ont également manifesté un certain enthousiasme pour l’enquête jugée très intéressante et sont demandeurs d’animations dans leur classe. 4.2.1 Les animations et entretiens de groupe Il était souhaité de pouvoir rencontrer les élèves dans le cadre d’une animation afin de les confronter aux premiers résultats quantitatifs de l’enquête et ainsi de faire émerger d’une part leurs questions et réflexions sur le thème du mariage et plus généralement de la vie de couple et d’autre part d’approfondir le volet « mariages forcés » pour lequel ils avaient souhaité témoigner. Objectifs et contenu des animations La relation personnelle née de l’entretien individuel ne peut se retrouver dans l’animation de groupe, que celui-ci soit invariablement composé de trois, de dix ou de vingt personnes. Il y a dans le groupe une autre dynamique à exploiter et c’est précisément cette différence qui a justifié l’expérience des animations. L’objectif était d’abord de confronter les élèves aux premiers résultats quantitatifs et à l’opinion générale, c’est-à-dire celle que reflétaient les écoles participantes et ensuite, de créer un débat autour de ces opinions. Une fois ce débat mis en place, il était souhaité de placer la problématique des mariages forcés au centre de la réflexion, ceci afin de mieux cerner l’ampleur du phénomène. Méthode et technique de travail : le phénomène de groupe et la dynamique de groupe Quand on travaille avec un groupe d’élèves, il y a nécessairement une méthodologie différente à appliquer. En effet, un groupe implique l’existence de règles informelles et de pressions de conformité. Mieux les personnes qui composent le groupe se connaissent, plus le groupe est fermé, et plus ces pressions sont grandes et obligent inconsciemment chacun à s’y conformer au risque d’être « exclu » ou tout au moins de passer pour l’ « anormal » de service. 27 Ainsi, comme le dit Roger MUCCHIELLI pour expliquer la notion de dynamique de groupe : « Les membres déterminent entre eux des règles informelles. Ces règles sont puissantes et obligent chaque membre à s'y conformer au risque d'être exclu ou de devenir le « souffredouleur » sur lequel le groupe peut déverser une foule de sentiments aussi négatifs que farfelus ». 86 Roger MUCCHIELLI parle de « sanctions groupales (mépris, raillerie, mise en quarantaine…), qui punissent les « infractions » aux standards, en référence à une sorte de règlement informel parfois en contradiction avec le règlement officiel ». 87 Souhaitant ainsi atténuer l’influence des pressions de conformité, il avait été choisi de travailler avec des groupes « mixtes » constitués d’élèves volontaires provenant de classes et/ou d’années différentes. En se portant volontaires, les élèves savaient qu’ils prenaient le risque de se retrouver avec d’autres jeunes qu’ils ne connaissaient pas et subir alors éventuellement une autre forme de jugement. Méthode et technique de travail : les contraintes matérielles et le cadre du travail en groupe Il est évident que le choix méthodologique d’un travail « en classe » ou « hors classe » a également été influencé par certaines contraintes d’ordres matériel et/ou organisationnel telles que le manque de temps des professeurs, de trop grandes classes difficiles à gérer, les voyages scolaires, l’approche des examens, la période d’évaluation des pratiques pour les filières techniques et professionnelles, etc. Il était en effet plus facile de former des groupes hétérogènes que de devoir combiner avec les éléments décrits ci-dessus. les contraintes humaines Quand il est demandé de travailler avec un groupe et de l’animer, certaines règles doivent davantage être respectées comme par exemple le respect de la parole de l’autre. Une fois la démarche de l’animation présentée, il est certain qu’il faut veiller en permanence à pouvoir recadrer les débats si nécessaire. Souvent, les buts de pareille démarche ne sont pas bien définis ou compris par tous les participants. C’est alors que des perturbations issues de la dynamique sociale, d’une part et des personnalités, d’autre part, interviennent et agissent sur le bon déroulement du processus. Le module d’animation (voir annexes) Deux animations de groupe ont été réalisées afin de rencontrer les jeunes et de favoriser le débat. Il était initialement souhaité de faire une animation dans les trois régions concernées par l’enquête, à savoir Liège, Bruxelles et Charleroi. Combinant à la fois les disponibilités des écoles participantes ainsi que la motivation des élèves à rencontrer les formatrices dans le cadre de ces échanges, il a été possible de réaliser l’expérience dans deux écoles : d’une part, dans un établissement scolaire situé en zone urbaine à Bruxelles, avec un groupe de 8 élèves – groupe A - et d’autre part, dans un établissement scolaire situé dans une zone rurale de Charleroi avec un groupe de 9 élèves – groupe B. 86 87 MUCCHIELLI R., La dynamique des groupes, ESF Editions, Paris, 14ème édition, 1995, p 26-28. Op.Cit. 28 Spécificité des groupes La préoccupation de mener des entretiens de groupe par le biais de l’animation dans les trois régions concernées par l’enquête s’expliquait avant tout par la volonté de rencontrer des populations différentes, issues de milieux géographiques différents afin de voir si le phénomène des mariages forcés était visible partout. Ainsi, comme nous pouvions le présupposer, le contenu des débats a été fortement influencé par le groupe rencontré. Groupe A ( zone urbaine – Bruxelles ) Le groupe était constitué de 8 filles d’origine et de culture différentes, âgées de 16 à 18 ans. Toutes étaient désireuses d’entamer la discussion autour de la thématique des mariages forcés, soucieuses d’apporter leurs réflexions au débat, dans la mesure où chacune d’entre elles avait une connaissance étroite du sujet. Groupe B ( zone rurale – province de Charleroi ) Le groupe était constitué de 9 jeunes (2 garçons et 7 filles), âgés de 16 à 20 ans, majoritairement d’origine belge. Tous étaient intéressés par le sujet des mariages forcés mais davantage par la thématique du mariage en général. Contenu de l’animation Un module a été spécialement créé pour animer les deux groupes. Ce support se voulait avant tout dynamique en offrant ainsi un lieu d’échanges et d’interactions. Pour y arriver, l’équipe en charge de la partie qualitative a opté pour une structure simple respectant l’ordre des questions posées dans le premier questionnaire qui servait d’outil à la partie quantitative. L’idée était de relever les questions pertinentes qui pouvaient servir de base au débat en demandant aux jeunes de donner leur avis sur les premiers résultats obtenus et de les amener ainsi à une réflexion sur : les valeurs des jeunes face au projet de vie en couple les attentes envers les partenaires le choix du partenaire et l’implication des parents dans ce choix Pour les aider à bien comprendre les implications du couple, des exemples ainsi que certaines notions (telles que « attente », « stéréotype sexuel », « idéal », …) ont été mis en avant. Enfin, la question des mariages forcés a été placée au centre de la discussion, l’équipe s’aidant pour cela d’une grille de questions présentée à la fin de l’annexe concernant le module d’animation. 4.2.2 Les entretiens individuels En dehors des 17 jeunes rencontrés dans le cadre des deux animations qui ont abouti aux entretiens de groupes, 12 élèves ont accepté de témoigner de leurs connaissances sur des cas de mariage forcé, et ceci dans les trois régions concernées. Les entretiens se sont déroulés de manière individuelle en présence des deux collaboratrices en charge du volet qualitatif. La durée 29 moyenne d’un entretien est à estimer à vingt cinq minutes. Certains –très peu- ont été plus courts, d’autres légèrement plus longs mais ne dépassant jamais quarante – quarante cinq minutes. Chaque entretien a été facilité par la mise à disposition par la direction ou par l’enseignant responsable d’un local privé afin de ne pas perturber la rencontre. Un seul établissement n’a pu nous offrir comme lieu d’entretien que la salle d’étude, très vaste et heureusement peu fréquentée. Dès lors, trois entretiens ont du s’y dérouler en tentant de faire abstraction du va et vient de certains autres élèves ou surveillants. A la différence des entretiens de groupe, le module d’animation n’a pas été ici utilisé. Quelques résultats leurs ont été présentés mais sans prendre grand temps d’en faire l’analyse. En effet, il semblait plus utile d’aborder directement la problématique des mariages forcés. Pour mener l’entretien, l’équipe a opté pour la semi directivité en utilisant pour cela la grille de questions déjà utilisée dans la conduite du débat sur les mariages forcés dans les deux groupes. 4.2.3 Un questionnaire supplémentaire sur les mariages forcés Le formulaire libre dit de « partage d’expérience » qui avait été glissé dans l’enquête faisait apparaître que 117 élèves souhaitaient apporter un témoignage plus complet sur les mariages forcés. Pour palier aux difficultés méthodologiques rencontrées au cours de cette seconde partie de l’enquête, un questionnaire écrit plus complet composé de questions ouvertes sur le mariage forcé avait été déposé dans les écoles à l’attention des élèves qui n’avaient pas souhaité rencontrer l’équipe d’animation. Le questionnaire, repris en annexe, pouvait soit être retourné par la poste ou laissé au secrétariat des écoles. 52 questionnaires ont pu être récupérés, dont 33 seulement avaient été complétés. 30 5. RESULTATS DE LA RECHERCHE 5.1 Résultats de l’enquête quantitative menée auprès de 1.200 élèves 5.1.1 Introduction En raison des choix méthodologiques adoptés (se rapporter au chapitre 4 relatif à la méthodologie), il convient d’envisager les résultats présentés ci-dessous avec prudence. 5.1.2 Profil global des répondants Répartition géographique La répartition géographique globale des élèves est relativement proportionnelle entre les arrondissements : une légère majorité (37 %) fréquente toutefois des établissements implantés en arrondissement liégeois (Tableau 1). Si l’on scinde les répondants selon qu’ils appartiennent à des établissements à discriminations positives (D+) ou non (D), la répartition est moins équilibrée (Tableau 1). Dans le groupe d’établissements de type D+, les répondants proviennent surtout d’établissements situés à Liège (47,3 %) et moins d’établissements Bruxellois (19,7 %). Dans l’autre groupe (D), les élèves sont essentiellement concentrés dans des établissements Bruxellois (41,2 %) et moins de Liège (26,6 %) : la situation inverse prévaut donc. Tableau 1 : Répartition des répondants selon l’arrondissement de leur établissement scolaire et selon D+ et D Arrondissements N échantillon D+ % Bruxelles 365 Liège 444 Charleroi 385 Sans réponse 6 Total 1.200 D % 118 30,4 % 247 19,7 284 37 41,2 160 47,3 195 32,1 26,6 190 32,5 3 0,5 100 600 31,7 3 0,5 100 600 0,5 100 D+ : établissements à discriminations positives D : autres établissements. Sexe, âge, type d’établissement Il y a une très légère majorité de filles (50,7 % de filles contre 48,5 % de garçons, le pourcentage restant étant constitué de non répondants) parmi les élèves (Tableau 2). Quel âge ont les jeunes interrogés ? Tel qu’illustré au Tableau 3, un répondant sur deux est âgé de 17-18 ans tandis qu’un tiers environ a entre 15 et 16 ans. Une analyse sexuée des âges révèle qu’il y a presque autant de garçons que de filles dans la catégorie d’âge 17-18 ans. Parmi les répondants les plus jeunes, les filles sont légèrement plus nombreuses. La situation inverse prévaut chez les 31 répondants plus âgés (Tableau 4). Au sujet de la répartition des sexes dans les types d’établissement (D ou D+), une légère majorité de garçons dans le groupe d’établissements de type D+ fut observée (52 % d’entre eux contre 48 % d’entre elles). Par contre, il y a un peu plus de filles dans le groupe des autres établissements (52 % de filles contre 48 % de garçons). Tableau 2 : Répartition des répondants selon le sexe Sexe Féminin N échantillon 608 % échantillon 50,7 % population88 49,5 Masculin 582 48,5 50,5 Sans réponse 10 0,8 Total 1.200 100 100 Tableau 3 : Répartition des répondants selon l’âge Ages N échantillon % échantillon < 15 ans - 16 ans 405 33,8 17 ans - 18 ans 600 50,0 19 ans - > 20 ans 179 14,9 Pas répondu 16 1,3 Total 1.200 100 Tableau 4 : Répartition des répondants selon le sexe et l’âge < 15 ans - 16 ans (%) 17 ans - 18 ans (%) 19 ans - > 20 ans (%) Sexe 88 Masculin 44,4 48,5 59,5 Féminin 55,6 51,5 40,5 Total 100 100 100 Communauté française de Belgique, Statistiques rapides - Effectifs scolaires plein exercice 2002-2003 - Diplômes et certificats plein exercice évolution de 1991 à 2002, Etnic Division des Etudes et de l’ Exploitation des statistiques, Editeur : H. Ingberg. Ces pourcentages furent obtenus en additionnant les données relatives à l’enseignement secondaire total du deuxième et du troisième degré. 32 Réseaux, filières, classes, sexe des répondants La quasi unanimité des élèves appartient au réseau ordinaire : 94,2%. Ils sont essentiellement issus de la filière générale - 67,5% d’entre eux - et moins de la filière technique - 19,0% - et professionnelle - 13,5% (Tableau 5). Cette répartition coïncide-t-elle avec la répartition réelle des élèves dans la population ? Dans notre échantillon, la filière générale est surreprésentée au détriment de la filière professionnelle. Si l’on étudie la répartition entre les filières de manière sexuée, dans la filière générale, davantage de filles (71,9 % d’entre elles) que de garçons (63,1 % d’entre eux) sont présentes. Toutefois, il y a un peu plus de garçons que de filles dans les autres filières. Cela peut être observé au Tableau 6. Globalement, les élèves se ventilent de manière relativement proportionnelle entre les classes (30,7% en 4ème année ; 35,9% en 5ème année ; 33,1% en 6ème année). Une majorité de filles (contre une minorité de garçons) provient de 6ème année : 39,3 % d’entre elles (contre 27% d’entre eux) tandis que la majorité des garçons est issue de 5ème année : 41 % d’entre eux (Tableau 7). Tableau 5 : Répartition des répondants selon les filières Filières N échantillon % échantillon % population89 Générale 810 67,5 53,4 Technique 228 19,0 23,3 Professionnelle 162 13,5 23,3 Total 1.200 100 100 Tableau 6 : Répartition des répondants selon le sexe et la filière Féminin % échantillon Féminin % population Masculin % échantillon Masculin % population Filières 89 Générale 71,9 56,3 63 50,4 Technique 16,6 22,5 21,5 24,2 Professionnelle 11,5 21,2 15,5 25,4 Total 100 100 100 100 Communauté française de Belgique, opcit. 33 Tableau 7 : Répartition des répondants selon le sexe et la classe Féminin (%) Masculin (%) 4ème année 29 32 5ème année 31,4 41 6ème année 39,3 27 7ème année 0,3 Total 100 Classes 100 Cours de religion ou de morale non confessionnelle suivis par les élèves interrogés Un répondant sur deux environ déclare assister à un cours de religion catholique. Ensuite, 29 % des élèves fréquentent un cours de morale non confessionnelle. 14 % des jeunes interrogés suivent quant à eux un cours de religion islamique. Tableau 8 : Répartition des répondants selon leur cours de religion ou de conception philosophique suivi90 90 Religion N échantillon % Catholique 623 52 Protestante 27 2,25 Islamique 169 14 Juive 0 0 Orthodoxe 3 0,25 Morale non confessionnelle 350 29,2 Sans réponse 28 2,3 Total 1.200 100 Dans notre échantillon, peu de répondants ont déclaré suivre des cours de religion protestante et orthodoxe tandis qu’aucun d’entre eux a précisé suivre un cours de religion juive. Dans l’optique de ne pas biaiser les résultats, ils furent par défaut exclus des analyses ultérieures. En outre, 28 élèves n’ont pas précisé leur cours suivi. 34 En conclusion, profil global des répondants : Sur le plan géographique, les élèves fréquentant des établissements de type D+ proviennent majoritairement de Liège. Dans l’autre groupe, ils sont essentiellement concentrés dans des établissements bruxellois ; Sexe et âge : il y a une légère majorité de filles dans l’échantillon. Un répondant sur deux est âgé de 17-18 ans ; Réseaux et filières : la quasi unanimité des élèves est issue du réseau ordinaire. La filière générale est sur- représentée au détriment de la filière professionnelle ; Classes : la majorité des filles provient de 6ème année tandis que les garçons sont pour la plupart issus de 5ème année ; Cours de religion ou de conviction philosophique suivi : un élève sur deux assiste à un cours de religion catholique ; 30 % des répondants environ suivent un cours de morale non confessionnelle ; 14 % des élèves fréquentent un cours de religion islamique. 5.1.3 Idéaux des jeunes pour leur avenir personnel En premier lieu, parmi l’ensemble d’un éventail de rêves, il fut demandé aux répondants d’en sélectionner six en leur attribuant un degré d’importance allant du « plus important » « au moins important ». Des résultats de l’enquête, il ressort que les idéaux principaux des jeunes sont : une bonne santé ou un mari/une épouse (1er rêves principaux) ; des enfants (2ème et 3ème rêve principal) ; un salaire intéressant (4ème rêve principal) ; un salaire intéressant ou des amis (5ème rêves principaux) ; des voyages (6ème rêve principal). Les résultats de cette enquête ont souligné l’importance que les jeunes accordent à leur santé ainsi qu’au fait de se marier et de fonder une famille. En particulier, ‘être parent ’ fut cité à deux reprises comme rêve principal. Enfin, l’aspect matérialiste du travail semble prévaloir sur le souhait d’avoir un travail épanouissant, un bon diplôme. Un tel constat réside-t-il dans le fait que les jeunes amorcent parfois leur parcours professionnel par des emplois de nature plus fragile ? L’amitié représente également une valeur importante chez les jeunes interrogés. La plupart des élèves interrogés espèrent un jour fonder une famille (81%) et en particulier une famille nombreuse. Dans ce cas, combien d’enfants souhaitent-ils avoir ? Parmi eux, le nombre de 2 enfants est qualifié d’idéal par la majorité (43% d’entre eux) tandis que 19% se prononcent en faveur de 3 enfants voire 4 pour 10% d’entre eux. L’enfant unique n’est souhaité que par 5% de ceux-ci. En conclusion, idéaux principaux des jeunes pour leur avenir : Les élèves semblent attacher beaucoup d’importance à leur santé ; au fait de se marier et d’avoir des enfants (ils aspirent pour la plupart à fonder une famille nombreuse). L’aspect matériel du travail (salaire) et l’amitié sont des idéaux importants. 35 5.1.4 Aspiration au mariage et mode de vie en couple ? Globalement Plus de 70 % des élèves aspirent à se marier un jour : 57 % se prononcent en faveur d’un mariage civil et religieux ; 15% optent pour un mariage civil. 15 % des jeunes également hésitent encore. Des résultats de cette enquête, il ressort que le mariage semble avoir la faveur des personnes interrogé(e)s (Histogramme 1). Comme l’illustre le Graphe 1, si les jeunes sont nombreux à plébisciter le mariage, ils préfèrent, en premier lieu, que celui-ci soit précédé par une période de cohabitation (62 % des répondants le pensent) ou non (20,8 %). La cohabitation unique est choisie par 13,5 % de jeunes. Ainsi, il apparaît que les jeunes aspirent davantage à un amour unique qu’à des relations épisodiques (1% des jeunes seulement souhaitent ne pas avoir de relation durable) et d’autre part que le mariage semble davantage couronner une période de vie en commun plutôt que de l’amorcer. Histogramme 1 : Répartition des répondants selon leur souhait de se marier (%) 60 50 40 30 20 10 0 oui civ oui relig oui civ + relig non je ne sais pas encore Graphe 1 : Modes de vie en couple souhaités par les jeunes (%) partenaires sans cohabiter 1% pas de relation stable 1% sans relation 1% cohabiter sans se marier 14% se marier uniquement 21% cohabiter et se marier 62% 36 Type d’établissement (D+ et D), mariage, mode de vie en couple « Cohabiter et se marier ensuite » est le choix formulé par la majorité des élèves issus des deux types d’établissements. Cependant, certaines spécificités furent constatées. Premièrement, les répondants du groupe d’établissements de type D sont un peu plus nombreux que les autres à souhaiter « Cohabiter et se marier ensuite » (68 % des élèves issus des établissements de type D l’ont déclaré contre 56 % des autres). Deuxièmement, les répondants du groupe d’établissements de type D+ aspirent davantage à un seul mariage que les autres élèves (27 % des jeunes issus du groupe d’établissements de type D+ contre 15 % des autres ont formulé un tel souhait). Genre, cours de religion ou de conception philosophique suivis, mariage et mode de vie en couple Quel que soit leur genre, les répondants souhaitant se marier civilement et religieusement tout en expérimentant la vie en commun auparavant sont majoritaires. Cependant, au-delà de ce consensus, émergent les différences suivantes : « Se marier civilement et religieusement » est un souhait davantage formulé par les filles (66 % d’entre elles contre 48 % d’entre eux) à l’instar du fait de « vivre ensemble au départ du mariage » (23 % contre 18 %). Les garçons, par contre, sont plus nombreux à respectivement souhaiter : « un mariage civil uniquement » (18 % des répondants masculins contre 13 % de filles) ; « ne pas se marier du tout » (12 % contre 7 %) ; « cohabiter sans se marier » (16 % contre 12 %). Indépendamment du cours suivi, les élèves sont majoritaires à aspirer à un mariage tant civil que religieux. Toutefois, 78 % de ceux assistant à un cours de religion islamique l’envisagent contre 62 % de ceux fréquentant un cours de religion catholique et contre 40 % parmi ceux suivant un cours de morale non confessionnelle. Ces derniers sont chaque fois plus nombreux que les autres groupes à envisager un mariage civil uniquement (25 % d’entre eux contre 11 % de ceux suivant un cours de religion catholique et contre 7 % des jeunes assistant à un cours de religion islamique) ou encore la possibilité de ne pas se marier (respectivement : 15 % ; 8 % ; 3 %). « Cohabiter et se marier ensuite » est un souhait formulé par la plupart des personnes fréquentant un cours de religion catholique (71 %) ou de morale non confessionnelle (67 %) contre une minorité de jeunes assistant à un cours de religion islamique (15 %). Par contre, ces derniers sont quasi unanimes à souhaiter « vivre ensemble au départ du mariage » (81 % d’entre eux contre 12 % des répondants suivant un cours de religion catholique et 8 % de ceux assistant à un cours de morale non confessionnelle le pensent). Ces constats peuvent être observés au tableau 9. 37 Tableau 9 : Répartition des élèves selon leur cours de religion ou de conviction philosophique suivi et selon leur rêve de vie de couple Cohabiter sans se marier Cours de religion catholique 13 % Cours de religion islamique 1 % Cours de morale non confessionnelle % 21 Cohabiter et se marier 71 15 67 Se marier 12.5 81 8 Autres * 3.5 3 4 Total 100 100 100 * Par « Autres », il faut entendre : absence de relation stable ou absence de relation ou absence de cohabitation. 5.1.4.1 Pourquoi les jeunes souhaitent-ils se marier ? Globalement Aux jeunes souhaitant se marier, il leur a été demandé d’en expliciter les raisons. Les idées traditionnellement associées à la notion de mariage semblent recueillir l’adhésion des jeunes interrogés : le mariage apparaît être davantage lié à une notion d’engagement (32 % des raisons avancées) qu’à celle d’une expérience, d’un test (12 %). Ensuite, les élèves ont l’intention de se marier pour légitimiser l’arrivée des enfants (22 %). La crainte de finir seul- e représente 9 % des motifs avancés. Enfin, les raisons suivantes furent formulées de manière décroissante : avoir des relations sexuelles légitimes ; la liberté ; la sécurité financière ; l’honneur ; la fête ; quitter sa famille ; plaire aux parents. Histogramme 2 : Raisons du mariage selon les jeunes ? 35 31,8 30 25 21,7 20 12,4 15 9 5 4 3,1 liberté 5,7 quitter famille 10 1,6 3,6 3,9 3,4 0 fête peur solitude honneur sécurité financière plaire aux parents enfants relations sexuelles expérience s'engager 38 Genre, cours de religion ou de morale non confessionnelle suivi et motivations du mariage Peu de différences ont été observées au regard du genre. Les motifs semblent relativement similaires. Toutefois, d’une part, le souhait de légaliser les relations sexuelles est une motivation davantage citée par les garçons et d’autre part, l’envie de s’engager à long terme envers la personne aimée est une raison plus fréquemment avancée par les répondantes. Les élèves assistant à un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle ont des raisons relativement avoisinantes (les motifs suivants étant toutefois un peu plus cités par les premiers : « l’expérience » ; « légitimiser l’arrivée des enfants » ; « la crainte de finir seul-e »). Par contre, les motivations des jeunes fréquentant un cours de religion islamique résident, nettement davantage que les autres, dans la crainte de la solitude ; la préoccupation de légitimer les relations sexuelles et la naissance des enfants ; des questions d’honneur ; le souci de plaire à leurs parents. Ces constats peuvent être observés au Tableau 11. Tableau 10 : Raisons du mariage selon le sexe Filles % Garçons % Engagement 34,9 29 Expérience 12,3 12,7 2 9,1 Enfants 22 21 Liberté 4 3,7 Quitter sa famille 3,5 2,5 Plaire aux parents 1 2,1 Honneur 3,5 3,7 Sécurité financière 4,8 3,1 Fête 3,6 3,3 Peur de la solitude 8,4 9,8 Total 100 100 Relations sexuelles 39 Tableau 11 : Raisons du mariage selon le cours de religion ou de conviction philosophique suivis* Cours de religion islamique % 87,8 Cours de morale non confessionnelle % Engagement Cours de religion Catholique % 95,1 Expérience 40,3 39,7 27,2 Relations sexuelles 12,7 33,3 13,8 Enfants 61,4 80,8 55,6 Liberté 12,5 12,2 9,9 Quitter sa famille 9,5 10,3 7,3 Plaire aux parents 3,0 11,5 3,9 Honneur 6,4 26,3** 8,6 Sécurité financière 14,2 3,2 12,5 Fête 10,8 3,8 11,6 Peur de la solitude 23,5 48,1 18,5 95,7 * Peu de répondants ayant déclaré suivre d’autres cours de religion, ils furent exclus de cette analyse. **Parmi les répondants déclarant suivre un cours de religion islamique et souhaitant se marier, 26.3 % d’entre eux lient ce choix à une question d’honneur. 5.1.4.2 Raisons pour lesquelles les jeunes ne veulent pas se marier? 9 % des élèves interrogés ont déclaré ne pas vouloir se marier. Quelles en sont les raisons ? Par ordre décroissant d’importance, ils ont précisé : « ce n’est pas important pour eux » (29,9 % des motifs) ; le constat d’un « trop grand nombre de divorces à l’heure actuelle » (26,6 %) ; « ce n’est qu’un bout de papier » (25,8 %) ; « ce sont des contraintes » (8,2 %) ; c’est une « perte de liberté » (8,2 %) ; « ce n’est pas à la mode » (1,2 %). Ainsi, des résultats de cette enquête, il ressort que la motivation de ces jeunes ne souhaitant pas se marier réside davantage dans l’opinion que le mariage n’est plus l’unique référence pour vivre en couple et pour éduquer des enfants et dans le constat du nombre important de divorces et moins dans l’idée que le mariage semble être une institution dépassée ou synonyme de contraintes, de perte de liberté. Comme il l’a été précédemment relevé, plus de garçons que de filles ne souhaitent pas se marier plus tard. Les raisons varient-elles selon le sexe des répondants ? Chez les filles à l’instar des garçons, la première motivation tient au fait que : « ce n’est pas important ». Au-delà de ce consensus, la seconde motivation provient, chez les filles, de l’opinion que le mariage ne représente qu’un « bout de papier » et chez les garçons du fait qu’il y a « trop de divorces actuellement ». 40 Graphe 2 : Raisons pour lesquelles les jeunes ne veulent pas se marier ? bout de papier 26% pas important 30% contraintes 8% trop de divorces 27% démodé 1% perte liberté 8% En conclusion, aspiration au mariage, modes de vie en couple : Globalement : les élèves aspirent davantage à un amour unique qu’à des relations épisodiques. Le mariage est plébiscité par une majorité de répondants (70 %) et ce tant civilement que religieusement (57%). En outre, il semble davantage couronner une période de vie en commun plutôt que de l’amorcer. Les filles semblent plus nombreuses que leurs homologues masculins à être attirées par un mariage tant civil que religieux d’une part et par la vie ensemble au départ du mariage d’autre part. Le souhait de cohabiter uniquement ; de se marier uniquement civilement voire de ne pas se marier du tout est davantage formulé par les répondants masculins. La cohabitation suivie par un mariage est un choix formulé par la majorité des personnes suivant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle contre une minorité d’élèves fréquentant un cours de religion islamique. La quasi unanimité de ces derniers plébiscite le fait de vivre ensemble au départ du mariage ; En premier lieu, les raisons du mariage semblent assez traditionnelles : s’engager à long terme envers la personne aimée et accueillir la naissance des enfants. Ensuite, l’envie d’en faire l’expérience mais aussi la crainte de la solitude ont été parmi les motifs évoqués. Peu de différences furent observées selon le genre. Par contre, si les personnes suivant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle ont des motifs relativement similaires, ceux ayant choisi de suivre un cours de religion islamique avancent davantage les raisons suivantes : la crainte de la solitude ; légitimer des relations sexuelles et l’arrivée des enfants; des questions d’honneur et de plaire aux parents ; Peu de répondants ont déclaré ne pas souhaiter se marier. Dans ce cas, cela provient généralement de leur crainte du divorce et de l’opinion que le mariage n’est plus la seule référence pour vivre en couple. 41 5.1.5 Conditions de réussite d’un mariage et qualités du/de la conjoint/e ou partenaire idéal/e 5.1.5.1 Conditions de réussite d’un mariage Par ordre décroissant d’importance (Histogramme 3), les élèves ont cité les conditions suivantes : 95 % d’entre eux ont mentionné ‘’ l’amour ’’ (16 % des conditions requises) ; 90 % ‘’ la fidélité ‘’ (15%) ; 87 % ‘’la communication ’’ (14,5%); 83 % ‘’ le respect’’ (14%) ; 56 % ‘’les enfants’’ (9%) ; 55 % ’’une bonne entente sexuelle’’ (9%) ; 36 % ‘’ la sécurité financière’’ (6 %) ; 35 % ‘’la tolérance’’ (5,9%). Par contre, on constate que le partage des goûts et hobbies évoqué par 22 % des élèves (4 % des conditions requises) à l’instar du partage des tâches ménagères (2,7%) ; de la même religion (2,6%) ou culture (1,4%) recueillent moins l’adhésion des jeunes. Des résultats globaux de cette enquête, il apparaît que les jeunes semblent accorder plus d’importance à des relations de couple satisfaisantes (amour, fidélité, communication) plutôt qu’à une endogamie d’ordre culturelle ou religieuse. Histogramme 3 : Selon les jeunes, conditions de réussite d’un mariage 18 16 14,5 15,8 13,9 14 15 12 9,3 10 8 6 2,7 2,6 religion 4 tâches ménagères 5,9 6 9,2 3,7 1,4 2 gouts et hobbies culture entente sexuelle argent enfants fidélité respect tolérance amour communication 0 Genre et conditions de réussite d’un mariage D’une analyse sexuée, peu de différences émergent. Toutefois, il a été constaté que les filles sont un peu plus nombreuses à estimer que la communication est quelque chose d’important pour qu’un mariage réussisse (92% des filles le déclarent contre 81% des garçons) à l’instar du respect (90 % d’entre elles contre 76 % d’entre eux) et de la fidélité (92% d’entre elles contre 87% d’entre eux). Par contre, il a été observé que les répondants masculins étaient un peu plus nombreux à penser qu’une bonne entente sexuelle est quelque chose d’important (61 % des garçons le relèvent contre 49% des filles) à l’instar de l’équilibre des tâches ménagère (19 % d’entre eux contre 14% d’entre elles) ainsi que les enfants (58% d’entre eux contre 53% d’entre elles). 42 Type d’établissements (D ou D+) et conditions de réussite d’un mariage Quel que soit le type d’établissements dont ils proviennent, peu de différences furent observées selon les élèves. Les élèves appartenant aux établissements de type D mettent un peu plus en exergue que les autres l’importance de bien communiquer (89% des répondants issus d’établissements de type D le déclarent contre 85% dans les autres). Les jeunes fréquentant un établissement de type D+ sont un peu plus nombreux que les autres à citer le critère de l’endogamie de nature religieuse (20% des répondants fréquentant des établissements à discriminations positives le mentionnent contre 11% chez les autres) à l’instar des enfants (59% contre 52%). Cours de religion ou de conviction philosophique suivi et conditions de réussite d’un mariage Lorsqu’un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle (contre un cours de religion islamique) fut choisi, les élèves placent davantage l’accent sur les facteurs liés à la qualité des relations de couple (contre des facteurs d’endogamie religieuse ou culturelle). Tableau 12 : Répartition des répondants selon le cours de religion ou de conception philosophique suivi* et selon les conditions de réussite d’un mariage Cours de religion catholique Cours de religion islamique Cours de morale non confessionnelle Communication 88 79 88 Amour 95 87 97 Tolérance 35 34 36 Respect 83 86 82 Fidélité 91** 83 92 Tâches ménagères 16 9 19 Religion 8 70 4 Enfants 54 61 58 Argent 36 30 39 Entente sexuelle 58 34 58 7 25 4 23 17 24 Conditions Culture Goûts et hobbies * Peu de répondants ayant déclaré suivre d’autres cours de religion, ils furent par défaut supprimés de cette analyse. **Parmi les répondants déclarant suivre un cours de religion catholique, 91 % d’entre eux estiment que la fidélité est une condition de réussite d’un mariage. 43 5.1.5.2 Qualités du/de la partenaire/conjoint/e idéal/e ? Globalement, selon le genre, selon le type d’établissement et le cours de religion ou de conviction philosophique suivi En premier lieu, d’un point de vue global. « Avoir un physique agréable » est particulièrement recommandé : 70 % des jeunes citent cet attribut comme primordial. Près d’un jeune sur deux qualifie l’«âge » de son partenaire comme important. L’existence d’un « travail » est recommandée par 45% des répondants. L’absence d’enfant d’une part et d’un mariage antérieur d’autre part sont escomptées par respectivement 42 % et 38 % des élèves. Enfin, le diplôme (30 %) ; le statut social (28 %) ; la réputation (27 %); la même religion (20,5%) furent d’autres qualités citées par les élèves. Par contre, la culture (15 %) ; l’aisance matérielle (15 %); la virginité (14 %) ; le partage d’opinions philosophiques (12 %) ou politiques (8 %) semblent recueillir moins d’importance auprès des jeunes. Deuxièmement, selon les sexes (Tableau 13). Les garçons accordent plus d’importance aux qualités suivantes : le physique (83 % d’entre eux contre 58% d’entre elles le mentionnent) ; l’âge (55% contre 45%) ; la virginité (22% contre 7%) ; la réputation (30% contre 23%). Les répondantes attachent plus d’intérêt aux attributs suivants : l’existence d’un travail (61 % d’entre elles contre 29 % d’entre eux le soulignent) ; l’absence d’enfant (46 % contre 37%) ou d’un mariage antérieur (41 % contre 33 %). Troisièmement, peu de différences émergent selon le type d’établissement auquel appartiennent les répondants (Tableau 13). Cependant, la religion ; la virginité ; l’absence d’un mariage antérieur (contre l’existence d’une activité professionnelle) sont des ‘’ qualités ‘’ légèrement plus citées par les élèves issus d’établissements de type D+ (contre ceux provenant d’établissements de type D). En dernier lieu, selon le cours de religion ou de morale non confessionnelle suivi. La plupart du temps, les qualités avancées par les personnes ayant choisi de suivre un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle semblent similaires (bien que l’âge, la culture, l’existence d’un travail, la religion soient un peu plus formulées par les membres du premier groupe). Les personnes fréquentant un cours de religion islamique placent, nettement plus que les autres, l’accent sur la religion ; la virginité ; la réputation ; la culture ; l’absence d’un divorce (Tableau 14). 44 Tableau 13 : Qualités du/ de la partenaire ou conjoint/e idéal/e, globalement, selon le genre et selon le type d’établissements Globalement (%) Etablissements (%) Genre (%) D Filles D+ Garçons Qualités Age 50 45 50 55 Physique 70 58 Diplôme 30 31 50 71 83 69 28 29 Statut social 28 29 31 28 26 Réputation 27 23 Argent 15 13 27 25 30 29 15 16 Culture 15 16 14 15 15 Travail 45 61 Religion 21 20 16 48 29 42 17 21 Convictions philosophiques 12 Opinions politiques 8 8 Virginité 14 7 11 24 14 13 10 8 7 8 9 22 Non divorcé -e 38 41 20 34 33 Sans enfant 42 46* Autre 28 30 41 42 37 42 29 25 26 Parmi les filles, 46 % d’entre elles précisent que le partenaire ou conjoint idéal ne devrait pas avoir d’enfant. 45 Tableau 14: Qualités du/ de la partenaire ou conjoint/e idéal/e selon le cours de religion ou de conviction philosophique suivi Cours de religion catholique Cours de morale non confessionnelle Cours de religion islamique Qualités Age 50* 60 44 Physique 71 60 73 Diplôme 30 25 30 Statut social 30 21 28 Réputation 22 52 23 Argent 17 10 13 Culture 14 37 8 Travail 50 31 42 Religion 15 78 3 Convictions philosophiques 15 5 11 Opinions politiques 6 10 9 Virginité 6 62 5 Non divorcé -e 36 53 34 Sans enfant 42 44 42 Autre 29 14 33 * Parmi les répondants suivant un cours de religion catholique, 50 % d’entre eux précisent que l’âge du partenaire ou du conjoint idéal est une qualité importante. 46 En conclusion : Réussite d’un mariage : Des résultats globaux de cette enquête, il ressort que les jeunes attachent plus d’intérêt au fait d’avoir des relations de couple satisfaisantes (amour, fidélité, communication) plutôt qu’à une endogamie d’ordre culturelle ou religieuse ; Selon le sexe, peu de différences émergent : les répondantes placent davantage l’accent sur la communication, le respect et la fidélité ; les répondants mettent un peu plus en avant l’importance d’une bonne entente sexuelle ; de tâches ménagères équitablement réparties ; des enfants ; D’après le cours suivi. La qualité des relations de couple est davantage mise en exergue par les répondants suivant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle tandis que ceux fréquentant un cours de religion islamique insistent davantage sur des facteurs d’endogamie religieuse ou culturelle. Qualités du/de la conjoint/e ou partenaire idéal/e : Un physique attractif ; l’âge ; une activité professionnelle ; l’absence de divorce et d’enfant ; un bon diplôme ; un bon statut et une bonne réputation ; la même religion sont autant de ‘qualités’ qui font d’une personne le/a conjoint/e ou partenaire idéal/e d’après l’ensemble des jeunes interrogés. Chez les filles, une plus grande importance semble être accordée au travail, à l’absence de divorce ou d’enfants tandis que les garçons placent davantage l’accent sur le physique, l’âge, la virginité, la réputation de leur future partenaire ou conjointe; Quel que soit le type d’établissement, il y a peu de différences entre les élèves. A la lumière du cours de religion ou de conception philosophique suivi ; si les répondants suivant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle citent des qualités généralement semblables, les jeunes fréquentant un cours de religion islamique placent, nettement plus que les autres, l’accent sur la religion, la virginité, la réputation, l’origine culturelle de leur futur conjoint/e. 47 5.1.6 Opinions des jeunes au sujet du mariage inter culturel, inter - religieux ? (1) Le mariage inter- culturel Globalement, la majorité envisage cela comme possible : 90 %. En particulier, près d’un élève sur deux n’y voit aucun inconvénient ; 40% d’entre eux environ estiment important d’y réfléchir avant. Seuls 10 % des jeunes déclarent impossible de se marier avec une personne issue d’une autre culture ou origine qu’eux (Graphe 3). Un mariage inter culturel ne constitue aucun problème chez la majorité des garçons tandis que la plupart des répondantes préfèrent y songer d’abord. Au regard du type d’établissements, peu de différences ont été observées. Quel que soit le cours de religion ou de morale non confessionnelle suivi, la plupart des élèves déclarent qu’un mariage inter- culturel est envisageable. Graphe 3 : Opinion globale des élèves à l'égard du mariage inter culturel Non c'est impossible 10% Oui sans problème 49% Oui mais j'y réfléchirais avant 41% (2) Le mariage inter- religieux Comme l’illustre le Graphe 4, à l’instar du mariage inter- culturel, la grande majorité des répondants estime que c’est possible : 79% des élèves peuvent l’envisager. Toutefois, un peu plus d’élèves déclarent qu’ils y réfléchiront avant : 45% le soulignent contre 34% pour qui cela ne constitue aucun problème. 21% estiment impossible de se marier avec une personne d’une autre religion qu’eux. Graphe 4 : Opinion globale des élèves à l'égard du mariage inter religieux Non c'est impossible 21% Oui sans problème 34% Oui mais j'y réfléchirais avant 45% Selon le genre, les filles comme les garçons déclarent pouvoir envisager un mariage inter religieux. Cependant, elles sont un peu plus nombreuses à préférer y songer auparavant (48 % 48 d’entre elles contre 39 % d’entre eux). Les répondants, par contre, déclarent davantage que cela ne constituerait aucun problème (40 % d’entre eux contre 26,5 % d’entre elles). D’après le type d’établissements, peu de différences furent relevées. Enfin, au regard du cours de religion ou de morale non confessionnelle suivi. Le mariage inter-religieux ne constituerait aucun problème chez la plupart des élèves fréquentant un cours de morale non confessionnelle (54.5 % d’entre eux le précisent). Par contre, ceux suivant un cours de religion catholique sont majoritaires à préciser qu’ils préfèreraient y songer auparavant (51 %). Enfin, parmi les élèves assistant à un cours de religion islamique, la plupart estiment impossible de se marier avec une personne d’une autre religion qu’eux (59 %). En conclusion, le mariage inter-culturel, inter-religieux : Globalement, pour la plupart des élèves, le mariage inter- culturel ne constituerait aucun problème. Un mariage inter-religieux serait plus soumis à une réflexion préalable ; Les garçons sont, chaque fois, plus nombreux que les filles à déclarer qu’un mariage inter-culturel, inter-religieux ne représenterait pas un obstacle ; Peu de différences furent relevées selon que les élèves fréquentent un établissement de type D+ ou D ; Le mariage inter-culturel est envisageable par la majorité des répondants quel que soit le cours de religion ou de morale non confessionnelle suivi. Par contre, le mariage interreligieux est qualifié de possible (contre respectivement : possible après réflexion d’une part et impossible d’autre part) par la majorité des répondants suivant un cours de morale non confessionnelle (contre respectivement : un cours de religion catholique d’une part et de religion islamique d’autre part). 49 5.1.7 Les parents et la vie de couple de leurs enfants 5.1.7.1 Thèmes évoqués par les élèves avec leurs parents (1) La sexualité comme thème Les questions relatives à la sexualité sont peu abordées par les jeunes avec leurs parents. Premièrement, un peu plus d’un répondant sur deux (53 %) précise ne « jamais » évoquer ce sujet avec eux. Selon le genre, c’est le cas de 58 % de garçons contre 49 % de filles. Deuxièmement, si 46 % des élèves déclarent évoquer ce thème avec leurs parents ; c’est plus volontiers « parfois » (37 %) que « souvent » (9 %). Parmi les élèves ne discutant pas de ce sujet avec leurs parents, avec qui alors en parlent-ils ? Essentiellement avec leurs « copains et amis » (73 % d’entre eux le déclarent), voire avec personne (18 %) ou avec leurs frères et sœurs (16 %). (2) Le mariage comme thème Le mariage semble être un sujet dont les élèves s’entretiennent plus fréquemment avec leurs parents : si 60% d’entre eux en parlent avec leurs parents; c’est le cas d’une majorité de filles (70% des répondantes le soulignent) contre une minorité de garçons (47 %). Au regard du cours suivi, il a été constaté que les filles suivant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle sont nettement plus nombreuses que leurs homologues masculins à déclarer s’entretenir du mariage avec leurs parents (respectivement 68 % d’entre elles contre 47 % d’entre eux d’une part et 69 % d’entre elles contre 32 % d’entre eux d’autre part). Par contre, parmi les personnes assistant à un cours de religion islamique, cette part est relativement similaire quel que soit le genre des répondants (83 % d’entre elles contre 80 % d’entre eux). Enfin, 40 % de jeunes ont précisé ne « jamais » aborder ce thème avec leurs parents. Dans ce cas, en parlent-ils et avec qui ? D’une analyse selon le genre, il ressort qu’un peu plus de 40 % de filles abordent ce sujet avec leurs amis ou alors avec personne (48 %). Les garçons, quand à eux, choisissent généralement de n’en parler à personne (65 % d’entre eux le précisent). 50 5.1.7.2 Influence des parents sur le choix du futur conjoint ou partenaire (1) Aucune influence Plus de 60% des élèves souhaitent choisir seuls leur futur(e) époux (se) ou partenaire c’est-à-dire sans subordonner cette décision à l’influence de leurs parents : 58% des filles l’affirment contre 63,5% des garçons. A la lumière du cours de religion ou de conviction philosophique suivi, 74 % des jeunes fréquentant un cours de morale non confessionnelle le déclarent contre 64 % des personnes suivant un cours de religion catholique et contre 18 % des élèves assistant à un cours de religion islamique. La liaison entre le cours suivi et l’existence de l’influence parentale a été statistiquement confirmée. Tableau 15 : Relation entre le cours de religion ou de conviction philosophique des élèves et l’existence d’une influence parentale sur le choix du futur conjoint ou partenaire Cours de religion Catholique (%) Cours de religion islamique (%) Cours de morale non confessionnelle (%) Oui influence parentale 36 82 26 Non pas d’influence parentale 64 18 74 Total 100 100 100 X²* 155,860*** * 36 % des élèves suivant un cours de religion catholique ont déclaré que le choix de leur futur conjoint sera influencé par leurs parents. Le test du X² permet de mesurer l’association ou l’existence d’un lien entre deux variables. Il y a un lien statistique entre deux variables si la répartition des données d’une variable varie de façon significative selon les modalités d’une autre variable. Il y a alors dépendance entre les deux variables. Lorsqu’il existe un lien statistiquement significatif entre la connaissance ou l’existence du mariage forcé et l’une des variables indiquées, la valeur de la statistique du test de X2 est indiquée. Le seuil de signification de cette relation est précisée au moyen de la nomenclature usuelle, une étoile lorsque le seuil d’erreur alpha s’élève à 0.05 ; deux étoiles lorsqu’il s’élève à 0.01 ; trois étoiles lorsque le risque d’erreur toléré est réduit à 0.001. (2) D’une ‘certaine’ influence vers une influence ‘certaine’ 39% des répondants relèvent que leurs parents auront une influence sur le choix de leur futur partenaire ou conjoint. Parmi eux, cette influence serait circonscrite à un « avis ou un conseil » dans 82 % des cas. Toutefois, 17 % d’entre eux ont déclaré que le choix appartiendrait aux parents bien que les élèves auront généralement leur « mot » à dire. Toutefois, que faut-il entendre par « j’ai mon mot à dire » ? Ainsi, au total, 7% des élèves de l’échantillon (soit environ 80 élèves) ont estimé que l’influence de leurs parents va au-delà d’un simple conseil ou d’un avis. Quel que soit le genre ou le type d’établissements (D ou D+) dont les répondants proviennent, il n’a pas été observé de grandes différences entre les élèves. Parmi les jeunes pointant l’existence d’une influence parentale, ceux fréquentant un établissement de type D + 51 sont légèrement plus nombreux que les autres à relever que la décision appartiendra à leurs parents (19 % d’entre eux contre 15 % dans l’autre groupe). Enfin, au regard du cours suivi, parmi les élèves déclarant une influence du chef de leurs parents, ceux fréquentant un cours de morale non confessionnelle ou un cours de religion islamique sont un peu plus nombreux que ceux assistant à un cours de religion catholique à déclarer que le choix reviendra à leurs parents bien qu’ils auront généralement leur mot à dire (22% parmi les premiers contre 18% dans le second groupe et contre 14% au sein du troisième). Cependant, cette différence n’a pas pu être confirmée d’un point de vue statistique. Tableau 16 : Relation entre le cours suivi et le degré d’influence parentale Degré d’influence parentale Cours de religion Catholique (%) Cours de religion islamique (%) Cours de morale non confessionnelle (%) Avis ou conseil 86 82 78 Parents décident mais mot à dire généralement 14 18* 22 100 100 100 Total X² N.S. * Parmi les répondants suivant un cours de religion islamique et ayant déclaré que leurs parents auraient une influence sur le choix de leur futur conjoint ; 18 % d’entre eux soulignent que leurs parents décideront du choix de ce conjoint bien qu’ils auront généralement leur mot à dire. En conclusion : Thèmes évoqués par les jeunes avec leurs parents Les questions relatives à la sexualité semblent être peu abordées par les jeunes avec leurs parents. Si le thème du mariage apparaît être davantage évoqué en famille, c’est le cas de la majorité des filles contre une minorité de garçons. Influence parentale sur le choix du futur conjoint et partenaire Globalement, l’absence d’influence parentale sur le choix du futur conjoint ou partenaire est soulignée par la majorité des élèves. L’absence d’une intervention parentale est évoquée par la majorité des élèves fréquentant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle contre une minorité de ceux suivant un cours de religion islamique. 40 % des répondants environ ont déclaré l’existence d’une influence parentale. Parmi eux, cette influence serait circonscrite à un avis dans 82 % des cas. 17 % d’entre eux ont déclaré que ce choix appartiendrait à leurs parents bien qu’ils auront généralement leur mot à dire. 52 5.1.8 Les mariages forcés : existence, connaissance, motifs Dans certains cas, deux personnes peuvent être contraintes de se marier malgré elles. Le mariage peut être « forcé » et ne pas résulter du choix personnel adopté par deux personnes qui s’aiment. En raison des objectifs poursuivis par la présente enquête, les élèves furent interrogés au sujet des mariages forcés. Dans le questionnaire d’enquête, les mariages forcés recouvrent : « des situations où la fille ou le garçon sont obligés de se marier même s’ils n’en éprouvent pas l’envie ». 5.1.8.1 Existence des mariages forcés (Graphe 5 et Tableaux 17 – 22) (1) Une telle pratique existe-t-elle encore de nos jours en Belgique ? Globalement, la grande majorité des répondants a estimé que cette pratique persistait actuellement dans notre pays : neuf répondants sur dix l’ont déclaré. Cette situation, c’est généralement « parfois » qu’elle survient : environ 74 % des élèves l’ont affirmé (Graphe 5). Les filles semblaient être légèrement plus nombreuses à estimer que cette pratique survenait « souvent » dans notre pays (une fille sur cinq soit 21 % d’entre elles contre 14 % des garçons). Les garçons, par contre, apparaissent être deux fois plus nombreux que leurs homologues féminins à préciser qu’une telle pratique n’existe pas en Belgique. Cette différence de perception a pu être statistiquement confirmée (Tableau 17). Du point de vue des catégories d’âge, les répondants plus âgés (17-18 ans, 19 - 20 ans et +) sont plus nombreux à affirmer que la pratique des mariages forcés survient « souvent » dans notre pays (Tableau 17) : cela a été confirmé d’un point de vue statistique. Selon le type d’établissement (D ou D+), peu de différences ont été constatées. Quel que soit l’arrondissement dont les élèves proviennent, un constat identique peut être formulé même si les élèves bruxellois (contre carolorégiens) déclarent légèrement plus que les autres que les mariages forcés existent « souvent » (contre « parfois ») bien que cela ne soit pas statistiquement significatif. Au regard des filières (Tableau 19). Les élèves suivant une filière technique ou professionnelle semblent plus nombreux que ceux fréquentant une filière générale à affirmer que les mariages forcés surviennent « souvent ». Une relation entre cette variable, et la perception de l’existence des mariages forcés a été confirmée statistiquement. D’après le cours de religion ou de conviction philosophique suivi (Tableau 20). S’il n’a pas été observé de différence de perception entre les élèves fréquentant un cours de religion catholique ou de morale non confessionnelle ou d’autres cours (religion protestante ; orthodoxe) ; par contre, les jeunes assistant à un cours de religion islamique sont à la fois les plus nombreux à affirmer d’une part que les mariages forcés ne surviennent « jamais » (17 % d’entre eux le soulignent) et d’autre part qu’ils existent « souvent » (25%). Un lien entre le cours suivi et la déclaration de l’existence des mariages forcés a pu être observé sur le plan statistique. 53 Selon le profil socio-économique des parents. Premièrement, les élèves dont le père est ouvrier de profession semblent être légèrement plus nombreux que les autres à déclarer que les mariages forcés arrivent souvent (20 % des élèves dont le père est ouvrier de profession le déclarent contre 14 % de ceux dont le père exerce une profession d’employé et contre 14 % de ceux dont le père est cadre ou indépendant de profession). Cependant, cette différence de perception selon la profession parentale n’a pas pu être statistiquement confirmée. En second lieu, d’après le niveau d’études atteint par leurs parents. Les répondants dont le père a une formation inférieure au niveau secondaire (contre respectivement équivalente ou supérieure au niveau secondaire) sont plus nombreux à affirmer que les mariages forcés surviennent « souvent » (contre « parfois » chez les autres). Une relation statistiquement significative a été mise en évidence entre le niveau de formation du père et la perception de l’existence des mariages forcés. Graphe 5 : Existence et fréquence de survenance du phénomène des mariages forcés Non jamais; 8,5 Oui souvent; 17,7 Oui parfois; 73,8 54 Tableau 17 : Relation entre le genre, l’âge et la perception de l’existence des mariages forcés (%) Filles (%) Garçons (%) (%) <15 ans-16 ans 17 ans-18 ans (%) 19 ans->20 ans Oui souvent 21 14 13 18 28 Oui parfois 74 74 78 75 64 Non jamais 5 12 9 7 8 100 100 100 100 100 Fréquence Total X² 25,632*** 19,550** Tableau 18 : Relation entre les types d’établissements, arrondissements et la perception de l’existence des mariages forcés (%) D (%) D+ (%) Bruxelles (%) Liège (%) Charleroi Oui souvent 16 19,5 21 17,5 14 Oui parfois 76 72 71,5 72,5 79 Non jamais 8 8,5 7,5 10 7 100 100 100 100 100 Fréquence Total X² N.S. N.S. 55 Tableau 19 : Relation entre les filières suivies et la perception de l’existence des mariages forcés (%) Générale (%) Technique (%) Professionnelle Oui souvent 14 25 23 Oui parfois 78 65 71 Non jamais 8 10 6 100 100 100 Fréquence Total X² 19,839** Tableau 20 : Relation entre les cours suivis et perception de l’existence des mariages forcés (%) Oui souvent 17 17 Oui parfois 77,5 58 75,5 77,5 Non jamais 6,5 17 7,5 5,5 Total 100 100 100 100 X² 91 (%) Cours de morale non confessionnelle (%) (%) Cours de religion Cours de religion islamique catholique 16 25 Autres 91 30,233*** Mesurer l’association entre les variables au moyen de X2 n’a été possible qu’en excluant la catégorie « autres religions ». En effet, cette catégorie est trop restreinte que pour permettre une telle analyse. 56 Tableau 21 : Lien entre le niveau d’étude parental et la perception de l’ existence des mariages forcés < Secondaire Secondaire Père > Secondaire (%) (%) (%) Mère Père Mère Père Mère Oui souvent 31 28 18 18 13 14 Oui parfois 60 62 74 73 78 79 Non jamais 9 10 8 9 9 7 Total 100 100 100 100 X² Père 21,281*** 100 100 Mère 16,215* (2) En général, pour quels motifs deux personnes se marient-elles contre leur gré ? Par ordre décroissant d’importance, la première raison réside dans le souhait d’obtenir des papiers de séjour (20,6% des motifs). Ensuite, de manière quasi équivalente, c’est d’une part le fait que ces personnes sont forcées par leurs parents (plus d’un élève sur deux a cité ce motif représentant 20,1 % des choix) et d’autre part, pour légitimiser l’arrivée d’un enfant en cas de grossesse (20,0 %). Selon les types d’établissements (D+ ou D), peu de différences émergent parmi les répondants. Ces constats peuvent être observés au Tableau 29. Les raisons avancées par les répondants sont généralement semblables quel que soit leur sexe : toutefois ; la contrainte des parents est un motif un peu plus avancée par les filles (53,6% d’entre elles le soulignent contre 48,4% d’entre eux). Les garçons évoquent davantage la raison de l’argent (33,7% d’entre eux contre 17,5% d’entre elles). 5.1.8.2 Connaissance des mariages forcés (Graphe 6 et Tableau 22-30) (1) Quelle connaissance les élèves ont-ils des mariages forcés ? Globalement, la plupart des répondants ont souligné ne connaître personne ayant vécu une telle pratique bien qu’ils en ont entendu parler (39,8%). Ensuite, 36,8% des jeunes ont estimé ne connaître personne ayant été forcé de se marier. Enfin, un peu plus d’un élève sur cinq (23 %) a souligné avoir connu des cas de mariages forcés et ce principalement chez des connaissances (15,8%) et moins dans leur famille (6,5%). 57 Graphe 6 : Connaissance de faits de mariages forcés oui dans ma famille 7% non mais j'en ai entendu parler 40% oui chez des connaissances 16% non chez personne 37% Les répondantes semblent connaître davantage de cas de mariages forcés parmi leurs connaissances (hors famille) que leurs homologues masculins (21% d’entre elles contre 10,5% d’entre eux). Une relation statistiquement significative a pu être mise en évidence entre le sexe des répondants et leur connaissance de cas de mariages forcés. Au regard de l’âge des élèves, plus les répondants avancent en âge, plus ils semblent déclarer connaître des faits de mariages forcés (39,5 % chez les plus âgés contre 22 % parmi les jeunes âgés de 17-18 ans et contre 16 % chez les plus jeunes répondants). Cette relation a pu également être confirmée d’un point de vue statistique. Tableau 22 : Relation entre le sexe, l’âge et la connaissance des mariages forcés (%) Filles (%) Garçons (%) <15 ans-16 ans (%) 17 ans-18 ans (%) 19 ans -> 20 ans Oui dans ma famille 6,5 6,5 5 7 10 Oui chez des connaissances 21 10,5 11 15 29,5 30,5 44 41 38 25 42 39 43 40 35,5 100 100 100 100 100 Fréquence Non à personne Non mais en ai entendu parler Total X² 35,585*** 42,167*** Selon les filières. Ceux suivant des filières technique et professionnelle semblent plus nombreux à signaler avoir connu des cas de mariages forcés essentiellement parmi leurs connaissances. Les jeunes fréquentant une filière générale déclarent, davantage que les autres, ne pas avoir connaissance de cas de mariages forcés. Cette différence est statistiquement significative. 58 Tableau 23 : Relation entre les filières suivies et la connaissance des mariages forcés (%) Générale (%) Technique (%) Professionnelle Oui dans ma famille 5 11 9 Oui chez des connaissances 14 18 23 Non à personne jamais Non mais j’en ai entendu parler Total 40 33,5 27 41 37,5 41 100 100 100 Fréquence X² 26,461*** Dans l’arrondissement bruxellois, les élèves évoquent, deux fois plus qu’ailleurs, avoir eu connaissance de pratiques de mariages forcés survenus dans l’entourage familial. Les élèves liégeois sont, légèrement plus nombreux que les autres, à signaler en connaître parmi leur entourage (hors famille). Lorsqu’on étudie si la connaissance des mariages forcés varie selon les types d’établissements, il a été constaté que des cas des mariages forcés dans l’entourage (hors famille) sont plus souvent signalés par des élèves appartenant à un établissement de type D+. D’autre part, les élèves issus d’établissements de type D sont plus nombreux à souligner ne pas connaître de faits de mariages forcés. Une relation statistiquement significative a pu ainsi être mise en évidence entre l’arrondissement ; le type d’établissement et la connaissance de cas de mariages forcés. 59 Tableau 24: Relation entre les types d’établissements,arrondissements et la connaissance des mariages forcés (%) D (%) D+ (%) Bruxelles (%) Liège (%) Charleroi Oui dans ma famille 6 7 11 5 4 Oui chez des connaissances 12 20 14 20 13 Non à personne 41 33 34 39 39 Non mais en ai entendu parler Total 41 40 41 36 44 100 100 100 100 100 Fréquence X² 20,081*** 28,760*** D’après le cours de religion ou de conception philosophique suivi. Ceux suivant un cours de religion islamique semblent être un peu plus nombreux que les autres à déclarer avoir connu des faits de mariages forcés (37 % d’entre eux contre 23 % des personnes suivant un cours de morale non confessionnelle et contre 19 % des personnes suivant un cours de religion catholique). Le lien entre le cours suivi et la connaissance des mariages forcés a été statistiquement démontré. En outre, les personnes souhaitant que leur mariage religieux soit célébré par un Imam signalent davantage connaître de cas de mariages forcés parmi leur entourage que celles souhaitant que leur mariage soit célébré par un Prêtre (41,4 % des personnes souhaitant que leur mariage soit célébré par un Imam le précisent contre 15,4 % chez les autres)92. Tableau 25 : Lien entre le cours de religion ou de conviction philosophique suivi et la connaissance des mariages forcés (%) Cours de religion catholique (%) Cours de religion islamique (%) Cours de morale non confessionnelle Oui dans ma famille 6 12 6 Oui à des connaissances 13 25 17 Non à personne 38 25 42 Non mais j’en ai entendu parler 43 38 35 X² 92 31,565*** En raison du faible nombre de répondants souhaitant que leur mariage soit célébré soit par un pasteur, un rabbin ou par quelqu’un d’autre, ils furent exclus de cette analyse. 60 Profil socio-économique des parents. Les élèves ayant des parents ouvriers de profession signalent plus que les autres – ceux dont les parents sont employés ou cadres/indépendants – avoir connu des cas de mariages forcés parmi leurs connaissances. Ensuite, selon le niveau d’étude parental. Les répondants dont le niveau de formation parental est inférieur au stade de l’enseignement secondaire sont plus nombreux que tous les autres à préciser connaître des pratiques de mariages forcés familiaux. Les élèves dont le niveau de formation parental est inférieur (contre inférieur ou équivalent) au stade de l’enseignement secondaire signalent connaître, davantage que les autres, des pratiques de mariages forcés parmi leur famille (contre leurs connaissances). Ces relations ont été confirmées d’un point de vue statistique. Tableau 26 : Relation entre la profession des parents et la connaissance des mariages forcés Ouvrier Père Employé Mère Père Mère Père Cadre +Indépendant Mère Oui dans ma famille 7 11 2 4 7 7 Oui à des connaissances 21 24 14 10 11 12 Non à personne 37 30 41 43 37 39 Non mais j’en ai entendu parler 35 35 43 43 45 42 Total (%) 100 100 100 100 100 X² Père 25,573*** 100 Mère 31,354*** 61 Tableau 27 : Lien entre le niveau d’études parental et la connaissance des mariages forcés Père < Secondaire Mère Père Oui dans ma famille 13 17 6 Oui à des connaissances 19 Non à personne Secondaire Mère Père > Secondaire Mère 6 6 4 23 19,5 18 12 11 27 22 36 39 40 40 Non mais j’en ai entendu parler 41 38 38,5 37 42 45 Total (%) 100 100 100 100 X2 Père 22,263** 100 100 Mère 52,591*** Au regard des langues pratiquées par les répondants : il a été observé que les élèves s’exprimant notamment dans une langue issue d’un pays d’Europe de l’Est ; de la Turquie ; du Grand Maghreb ; d’Afrique Subsaharienne semblent connaître davantage de cas de mariages forcés survenus chez des connaissances ; dans leur famille que les élèves s’exprimant uniquement dans une langue du Nord de l’Europe. Ces observations doivent être toutefois appréhendées avec prudence92. 92 En premier lieu, les répondants furent répartis d’après les langues parlées. Il est important de noter que la langue parlée ne présume pas de l’origine de la personne mais en est peut-être une indication. Deuxièmement, il n’a pas été possible de mesurer l’association entre les variable en raison de trop grandes disparités. Par exemple, 20 élèves parlant une langue originaire de l’Afrique subsaharienne contre 400 parlant une langue d’Europe du Nord. 62 Tableau 28 : Relation entre la connaissance des mariages forcés et les langues parlées (%) Nord Europe (%) Sud Europe (%) Est Europe (%) Turquie (%) Grand Maghreb (%) Afrique subsaharienne Oui dans ma famille 4,9 4 23 17,5 12 9,5 Oui chez des connaissances 10,4 22,8 18 38,5 19 19,5 43 34,9 18 17,5 29,5 28,5 41,7 38,3 41 26,5 39,5 42,5 100 100 100 100 100 100 Non à personne Non mais j’en ai entendu parler Total (2) Chez ceux qu’ils connaissent, quels motifs ont amené deux personnes à se marier contre leur gré ? Globalement, par ordre décroissant d’importance, «la contrainte des parents » (22,1% motifs) ; « obtenir des papiers de séjour » (19,2%) ; « légitimiser l’arrivée d’enfants » (17,6%) furent les principaux motifs avancés. des La contrainte des parents est le premier motif cité par les élèves quel que soit leur cours suivi : cependant, cette raison semble être plus souvent avancée par les personnes qui assistent à un cours de religion islamique que par tous les autres répondants (54,5% des élèves ayant un cours de religion islamique le relèvent contre 41,4% des personnes suivant un cours de morale non confessionnelle et contre 39,2% des personnes suivant un cours de religion catholique). Les motifs particuliers suivants : la grossesse ; adopter un enfant (contre obtenir des papiers de séjour) furent également avancés un peu plus par ceux suivant un cours de morale non confessionnelle (contre de religion islamique). D’après le type d’établissement, il y a peu de différences bien que la contrainte parentale soit une raison légèrement plus citée par les jeunes fréquentant un établissement de type D+. A la lumière du genre, des différences émergent. Chez les filles, les motifs des mariages forcés résident davantage, chez ceux qu’elles connaissent, dans la contrainte parentale ( 47,8% d’entre elles contre 33,1% d’entre eux) ; des raisons religieuses (22,4% contre 17,8%). Les garçons avancent plus que les filles des raisons liées à l’argent (22,7% d’entre eux contre 13,9% d’entre elles) ; aux papiers de séjour (38% contre 33,8%) ; à l’adoption d’un enfant (9,8% contre 4,5%). 63 Tableau 29 « en général » ; « chez leurs connaissances » : motivations au mariage forcé selon D ou D+ % Général % Général D % Général D+ % % % Connaissance Connaissance Connaissance D D+ 20 20 19,8 17,6 17,9 17,3 Contrainte des parents 20,1 20 20,1 22,1 19,7 24 Argent 9,9 10 9,3 9,5 10,1 9,1 Papiers de séjour 20,6 21,3 20 19,2 19,1 19,1 Adoption d’un enfant 2,8 2,5 3 3,8 4,2 3,5 Tradition ou coutume 12,9 12,5 13,2 13,3 14,5 12,5 Raisons religieuses 12,7 12,1 13,2 11,1 10,7 11,2 1 1,6 1,4 3,4 3,8 3,3 100 100 100 100 100 100 Causes possibles Grossesse Autres raisons Total 64 Tableau 30 : Chez ceux qu’ils « connaissent », motifs du mariage forcé selon le sexe et le cours de religion ou de conviction philosophique suivi. Féminin Masculin Cours de religion Cours de religion Cours de Morale Catholique Islamique non confessionnelle % % % % % Grossesse 31,8 34,4 32,5 Contrainte des parents 47,8 33,1 39,2 Argent 13,9 22,7 17,5 15,2 18,1 Papiers de séjour 33,8 38 33,7 40,9 34,5 Adoption d’un enfant 4,5 9,8 6,6 1,5 12,1 Tradition ou coutume 24,4 25,2 27,1 27,3 21,6 Raisons religieuses 22,4 17,8 20,5 15,2 23,3 5 8 7,8 7,6 3,4 Causes possibles Autres raisons 21,2 54,5 39,7 41,4 Parmi les répondants de confession islamique, 54.5 % relèvent que le mariage forcé est chez ceux qu’ils connaissent dû à la contrainte des parents. 65 En conclusion, les mariages forcés : Une majorité des répondants a estimé que les mariages forcés surviennent encore « parfois » dans notre pays (74%). Toutefois, une minorité d’élèves (23%) a précisé avoir connu des cas de mariages sous la contrainte lesquels se sont produits essentiellement parmi leurs connaissances (16%) et moins dans leur famille (7%) ; Les filles sont plus nombreuses que les garçons à déclarer, d’une part, que les mariages forcés existent souvent en Belgique (21% des filles contre 14% des garçons le pensent) et d’autre part à signaler connaître des faits de mariages forcés parmi leurs connaissances (21% des répondantes contre 10,5% d’entre eux le soulignent) ; Les répondants plus âgés (17–18 ans ; 19-20 ans et +) soulignent, davantage que les plus jeunes, que les mariages contraints ont souvent lieu en Belgique : ils apparaissent également être plus nombreux à signaler connaître de tels faits (39,5% parmi les 19->20 ans ; 22% parmi les 17-18 ans ; 16% parmi les < 15-16 ans l’ont mentionné) ; Les élèves suivant des filières technique et professionnelle précisent davantage que les autres, d’une part, que les mariages forcés surviennent « souvent » dans notre pays (25% des élèves fréquentant une filière technique le déclarent contre 23% de ceux suivant une filière professionnelle et contre 14% de ceux suivant une filière générale) et d’autre part avoir connaissance de cas de mariages forcés (32% de ceux suivant une filière professionnelle le précisent contre 29% de ceux suivant une filière technique et contre 19% de ceux fréquentant une filière générale) ; Les élèves concentrés dans des établissements implantés en arrondissement bruxellois (contre liégeois) déclarent, plus que les autres, connaître des pratiques de mariages forcés familiaux (contre de tels faits subis par leurs connaissances). En outre, les élèves fréquentant des établissements à discriminations positives signalent plus souvent avoir eu connaissance de ces pratiques parmi leur entourage – hors famille ; Les jeunes assistant à un cours de religion islamique semblent plus nombreux que les autres à déclarer connaître des faits de mariages sous la contrainte à l’instar des personnes souhaitant que leur mariage soit célébré par un Imam ; Des pratiques de mariages forcés survenues chez des connaissances sont davantage signalées par les élèves dont le père est ouvrier de profession que les autres. Les jeunes dont le niveau de formation parental est inférieur au stade de l’enseignement secondaire semblent connaître plus de cas familiaux que les autres ; Quels motifs sous-tendent des pratiques de mariages forcés ? En général, obtenir des papiers de séjours ; la contrainte parentale ; une grossesse figurent parmi les principaux motifs cités de manière décroissante. Chez ceux qu’ils connaissent, la contrainte des parents ; obtenir des papiers de séjour ; légitimiser l’arrivée des enfants furent les principales raisons avancées. Les filles (contre les garçons) lient davantage, les mariages forcés à la contrainte parentale (contre pour des motifs liés à l’argent). Les répondants suivant un cours de religion islamique (contre respectivement de morale non confessionnelle) lient davantage les mariages forcés à des motifs de contraintes parentales (contre des raisons de grossesse et d’adoption). « Etre forcé par ses parents » est une raison davantage formulée par les élèves issus d’établissements de type D+ à propos des cas connus. 66 5.1.9 Les jeunes et la vie à deux Un ensemble de situations de la vie courante a été soumis à l’appréciation des élèves. Par rapport à de telles situations, il leur fut demandé de préciser leur degré d’accord ou de désaccord. « Rompre pour plaire à ses parents » est une proposition qui recueille une très grande majorité des désaccords (90 % des jeunes la désavouent contre 8 % étant d’accord). « Etre homme au foyer » : c’est une situation recueillant l’adhésion d’une grande majorité d’élèves (75 % d’entre eux contre 24 % qui désavouent cela). La plupart des jeunes estiment que « L’égalité dans la répartition des tâches ménagères » est une bonne chose (87 % des élèves le pensent contre 12 % n’y étant pas favorable). « Etre sexy dans sa manière de s’habiller» n’est pas un manque de respect pour son/sa conjoint/e pour 65 % des jeunes. « S’habiller sexy, c’est vouloir provoquer un garçon ». A une telle affirmation, un jeune sur deux répond par l’affirmative tandis qu’une même proportion y répond négativement. Enfin, « la jalousie, c’est un signe d’amour » est une affirmation désavouée par 81 % des élèves contre 18 % estimant que c’est une preuve d’amour. 5.2 Résultats de l’étude qualitative : entretiens de groupe Il a été proposé aux élèves de donner leur avis sur les résultats obtenus et de les amener à une réflexion sur : les valeurs des jeunes face au projet de vie en couple ( voir 5.2.1. le mariage aujourd’hui ) les attentes envers les partenaires ( voir 5.2.2. le/la partenaire idéal-e ) le choix du partenaire et l’implication des parents dans ce choix ( voir 5.2.3. le mariage forcé ) 5.2.1 Le mariage aujourd’hui Après avoir demandé aux élèves de se présenter et d’émettre un commentaire ou une réflexion qui leur vient en tête lorsqu’on leur parle de mariage, il leur a été proposé de jeter un œil au questionnaire et de réfléchir au 3 premières questions de l’enquête qu’ils avaient remplie en classe quelques semaines plus tôt. 1. Dans l’avenir, comment imagines-tu ta vie de couple ? 2. Si tu as répondu « oui » à la question 2, peux-tu nous dire pourquoi tu souhaites un jour te marier ? 3. Si tu as répondu « non » à la question 2, peux tu nous dire pourquoi tu ne veux pas te marier ? 67 Les premiers résultats de l’enquête faisaient apparaître que 82.9% des jeunes souhaitent comme mode de vie en couple un jour se marier. Parmi eux, 62.1 % des jeunes interrogés imaginent de vivre ensemble avant le mariage, les autres étant contre l’idée de faire l’expérience de la vie en couple (cohabitation) avant de se marier. Les raisons qui poussent les jeunes à se marier aujourd’hui sont prioritairement le fait de s’engager avec l’être aimé et d’avoir des enfants. D’autre part, seule une petite minorité (16.9%) opte pour la cohabitation ou préfère le célibat. Les raisons évoquées pour justifier ce choix sont partagées entre le fait que le mariage ne représente pas quelque chose d’important (considéré aussi comme un simple « bout de papier ») et que le nombre de divorces ne cesse d’augmenter. Groupe A ( zone urbaine – Bruxelles ) Les filles du groupe se sont toutes montrées assez choquées par la proportion de jeunes qui souhaitent vivre ensemble avant le mariage. Pour elles, un tel chiffre est trop important et ne représente pas leur réalité. Elles pensent que ce n’est pas normal et que « ce n’est pas respectable comme attitude » vis-à-vis de la société, et de la famille en particulier. Selon elles, une jeune fille qui a reçu une bonne éducation vit chez ses parents jusqu’aux noces. Et même fiancée, il n’est pas concevable de vivre avec son partenaire avant le mariage. Le mariage est une étape importante qu’on ne banalise pas. Il en va de la réputation et de l’honneur des parents qui sont fiers de marier leur enfant. Si on vit ensemble avant, la noce peut être remise en question. On se marie pour s’engager, pour avoir des enfants mais également pour préserver la réputation d’une famille. Une fille qui n’est toujours pas mariée à un certain âge (l’âge ici varie selon les témoignages mais est souvent lié au fait d’enfanter – « pas trop jeune mais pas trop vieille pour avoir encore des enfants »), ça fait « désordre » et « ce n’est pas normal ». Par ailleurs, même si la majorité des jeunes filles interrogées souhaitent se marier un jour, certaines sont un peu plus résistantes à l’idée par crainte d’un échec du mariage. Le phénomène de la hausse des divorces joue ici un certain rôle d’influence. Cependant, le mariage reste un idéal – elles veulent se marier - et par conséquent ces filles sont d’avis que le problème réside dans le choix d’un « bon partenaire qui partage les mêmes valeurs ». Elles trouvent ainsi la raison des divorces dans la négligence de ne pas avoir pris en considération les valeurs et l’éducation du partenaire. Groupe B ( zone rurale – province de Charleroi ) Contrairement au groupe A, les jeunes du groupe B sont unanimes quant au fait de vivre ensemble avant de se marier. En effet, cette phase est importante voire nécessaire dans la vie d’un couple pour apprendre à se connaître et pour décider des projets de vie commune. Cette cohabitation ne débouchera pas pour autant sur un mariage car « même si c’est bien, ce n’est pas parce qu’on se marie qu’on est plus heureux ». Le mariage apparaît alors comme une possibilité, non une nécessité. Il peut aussi se faire sur « un coup de tête » avec les copains, « histoire de faire la fête » mais les parents ne sont pas toujours associés à ce projet dans la mesure où cela appartient à la sphère privée du couple. Ainsi, dans la même perspective, si les parents sont contre le mariage, ils conçoivent sans trop de problèmes de le faire sans eux, pourvu qu’ils soient avec la personne qu’ils aiment. Le mariage chez certains (surtout chez les filles) représente encore « quelque chose de beau, de romantique, comme un conte de fée dont on rêve depuis qu’on est enfant » mais la 68 réalité rappelle vite à la vigilance : « avec le nombre de divorces qu’il y a aujourd’hui, il vaut mieux être prudent ». Aussi, les raisons invoquées pour se marier sont applicables dans le cas où on vit ensemble sans officialisation. L’engagement avec la personne aimée, le fait d’avoir des enfants, la sécurité financière, l’indépendance vis-à-vis des parents sont autant de raisons qui poussent les jeunes à vivre ensemble. Certaines, cependant, estiment que pour avoir un enfant, il vaut mieux être mariés. 5.2.2 Les attentes Dans cette seconde partie de l’animation, il leur a été demandé de confronter les résultats des questions suivantes avec leurs aspirations. 1. Pour ton avenir personnel, de quoi rêves-tu ? 2. Si tu devais composer un cocktail «Amour parfait», quels seraient les 6 ingrédients les plus importants de la recette pour que ton mariage réussisse ? 3. Quelles sont pour toi les qualités les plus importantes du/de la partenaire idéal(e) A la question de savoir si les jeunes espèrent que la relation amoureuse qu’ils entretiennent ou qu’ils comptent nouer durerait toujours, majoritairement ils répondent « oui », même si certains ont tendance à mettre un bémol à cette affirmation. Assurément, quoiqu’en disent les statistiques sur les divorces, tout le monde espère voir la relation durer longtemps. Lorsqu’il est demandé ce qui pourrait favoriser la durée de la relation, quelques réponses émergent parmi d’autres, côté garçons par exemple : « la tolérance, l’ouverture d’esprit, l’acceptation des défauts du conjoint, le respect» ; « avoir des enfants, s’aider mutuellement dans la vie de tous les jours, etc. » ; « le maintien de la passion, la communication, des petites choses » ; « ne pas mentir, l’aimer, le lui faire sentir, faire des câlins souvent, ne rien cacher à l’autre… ». Du côté des filles, « dire la vérité, communiquer énormément, la spontanéité, le partage des même valeurs, des mêmes grands principes de vie, le fait de s’ouvrir à d’autres, de continuer à voir des personnes extérieures au couple, avoir envie de créer des projets communs,… » ; « la confiance, l’honnêteté, le dialogue, la tolérance ». Groupe A ( zone urbaine – Bruxelles ) La vie de couple et plus précisément le mariage est un but en soi dans la vie des 8 jeunes filles. Pour que ce projet de vie commune réussisse, « il faut y mettre du sien ». Choyer son mari, l’aimer, lui être fidèle forment le ciment du couple. Avant le mariage, la question du choix du partenaire est une décision importante qui conditionnera la réussite du couple. Ainsi, comme nous l’avons déjà remarqué dans la première partie de l’animation, le partage des mêmes valeurs est un facteur qui rendra un mariage viable ou pas. Sous la notion générale de « valeurs », on retrouve ainsi la réputation et l’éducation donnée par les parents, le partage des mêmes croyances religieuses ainsi que le partage de la même culture. L’importance est vraiment accordée à la culture et à un socle éducationnel commun. Le reste est assez superflu et même si considéré comme important, il passe après. Ainsi, le fait d’avoir de l’argent, un beau salaire, une vie sociale bien remplie, des amis, des hobbies communs sont des ingrédients qui apportent peut-être un plus à la qualité de vie en couple mais qui ne sont pas nécessaires. Ainsi à la question de savoir comment conjuguer les relations avec les ami(e)s et la vie à deux, il semble plus important de 69 sacrifier la vie sociale pour s’occuper de son mari. Ainsi, en parlant d’une connaissance qui était mariée et qui ne voyait plus ses amies, une jeune fille nous disait que « c’est tout à fait normal car elle n’a plus le temps de sortir avec ses amies.(…) elle doit s’occuper de son foyer. Et puis, maintenant, elle est mariée, c’est une autre femme (…) ». Groupe B ( zone rurale – province de Charleroi ) Ainsi, comme nous l’avons dit dans la première partie de l’animation, le mariage n’est pas un but en soi dans la vie de ces jeunes. Le projet de vie en couple est néanmoins très important et déjà, chez les aînés du groupe (19-20 ans), il est au cœur de leurs préoccupations quotidiennes, certains jeunes vivant déjà en couple ou ayant déjà connu une grossesse (non aboutie). Pour que ce projet de vie commune réussisse, des centres d’intérêt communs sont nécessaires, plus que le partage de la même culture ou de la même éducation. Au niveau du quotidien, l’accent est surtout mis sur des qualités humaines déjà citées plus haut mais pour lesquelles nous retiendrons essentiellement: la communication, l’honnêteté, la fidélité, la gentillesse mais aussi sur des facteurs extérieurs tels que l’argent, les sorties entre copains, les hobbies communs. Une grande tolérance et un respect de la vie sociale du partenaire est exigée : « pas question qu’on m’interdise de voir mes amis ». Par rapport à la vie en couple, les filles semblent toujours rêver du prince charmant et réagissent en disant qu’elles espèrent quand même que l’homme avec qui elles sont/seront sera « le bon ». Les garçons (pour rappel, au nombre de deux) se montrent quelque peu plus « pragmatiques » dans le sens où ils préfèrent plutôt une succession d’histoires plus ou moins longues à une seule histoire d’amour car tous deux pensent qu’ « on est sur terre pour un petit moment alors, on a bien le temps d’avoir plusieurs aventures. On va peut-être rester 10 ans avec la même [ personne ], et puis, on en rencontrera une autre, et encore une autre. Ce serait bête de ne pas en profiter (…) ». 5.2.3 Le mariage forcé Groupe A ( zone urbaine – Bruxelles ) Comme il a déjà été dit, les jeunes filles du groupe souhaitaient vivement entamer la discussion autour de la thématique des mariages forcés, soucieuses d’apporter leurs réflexions au débat, dans la mesure où chacune d’entre elles avait une connaissance étroite (directe ou indirecte) du sujet. A la question de savoir comment pouvait être expliqué un mariage forcé, outre les éléments communs de pression et de défaut de consentement, les notions d’éducation, de tradition familiale et de culture ont largement dirigé le débat. Ainsi, le lien étroit qui relie les huit jeunes filles à la connaissance du phénomène des mariages forcés ou arrangés peut s’expliquer essentiellement par les caractéristiques socioculturelles du groupe. En effet, toutes d’origine immigrée, elles témoignent de la tradition culturelle de leurs aînés, tradition plus ou moins fortement ancrée dans les mœurs selon les familles. Le mariage est un modèle encore fort présent, comme un idéal, chez ces jeunes filles qui désirent dans l’absolu se marier mais tout en ayant le choix de leur futur partenaire. La plupart d’entre elles ne conçoivent pas de subir un mariage forcé et le disent clairement. Les autres s’abstiennent d’émettre un avis trop catégorique. D’autre part, il s’avère qu’elles souhaitent avoir 70 le consentement de leurs parents voire leur appui lors de la prise de décision du mariage. Toutefois, certaines acceptent aussi la possibilité que leurs parents puissent leur présenter une personne afin de conclure un mariage. Dans cette hypothèse, elles admettent l’idée de rencontrer la personne choisie par respect pour leurs parents. Pour respecter la tradition et leurs parents, certaines accepteraient ainsi de voir s’il y a une quelconque affinité avec l’autre personne. Elles disent qu’on leur laisserait le choix de dire « non » au mariage si elles ne le veulent pas. Nombreuses d’entre elles disent aussi qu’elles doivent conserver une certaine distance quant au fait d’avoir une relation amoureuse avec un garçon avant le mariage. En effet, il apparaît que la plupart du temps, elles sont surveillées par leurs frères ou leurs connaissances car il n’est pas recommandé qu’elles fassent des écarts, toujours pour conserver l’honneur de la famille. Le fait de préserver leur virginité avant le mariage semble très important pour elles, pour l’image qu’elles pourraient donner. Elles trouvent également qu’il est « normal » que le garçon ne soit pas quant à lui vierge avant le mariage. Les filles se disent pour la plupart, surveillées par leurs frères, afin de s’assurer qu’elles ne font pas de faux pas. En général, elles trouvent qu’être vierge avant le mariage est une des plus belles preuves d’amour qui soit. Pour beaucoup d’entre elles, respecter ses parents est très important, elle ne conçoivent pas devoir aller à l’encontre de leurs décisions et de l’autorité parentale sauf si elles trouvent cette mesure injustifiée. Certaines précisent que les parents ne doivent pas non plus avoir tous les pouvoirs et qu’elles ont aussi leur mot à dire quant aux décisions qui sont prises par rapport à elles. Ainsi, précisément lorsqu’on leur demande quelle serait leur réaction si on leur imposait un mariage, la plupart répondent qu’elles ne se laisseraient pas faire et qu’elles ont leur mot à dire. Témoignages de mariages forcés : Les filles que l’on marie de force ont entre 14 et 22 ans. Les cas de mariage énoncés se sont déroulés sans l’accord de la jeune fille. Le mariage se fait soit en Belgique ou dans le pays d’origine. La plupart ont terminé leurs études secondaires mais d’autres pas. La coutume est très importante dans la communauté musulmane, elle prend une large place dans l’éducation et se veut garante d’une certaine stabilité et une référence pour les futures générations. Les jeunes filles sont très vite amenées à respecter les coutumes et la tradition. Le mariage constitue l’une d’elle, ne pouvant être transgressée au risque de subir des représailles. Les jeunes filles interrogées relèvent le poids de la pression qu’ont vécu les jeunes filles mariées de force. Il s’agit là d’un acharnement perpétuel de la part de la famille que ce soit de la part du père, de la mère ou même des frères et parfois des sœurs. Valeurs du «choix»: Pour la plupart, les filles comme certains garçons n’ont pas vraiment le choix. Le mariage est souvent imposé. Toutefois, le mariage n’est pas toujours mal vécu selon certaines. 71 « Moi j’ai une amie à qui on a imposé un mari, au début ils ne se connaissaient pas mais petit à petit ils ont appris et ils se sont plu. A présent, ils ont une petite fille et cela se passe bien » *** Par contre une autre nous explique : « Oui mais moi, je connais aussi une amie qui elle était partie en vacances et lorsqu’elle est revenue, elle était mariée. Quelques mois plus tard, on ne l’a plus vue aux cours. J’ai tenté de prendre des nouvelles mais sans succès. Jusqu’au jour où je l’ai aperçue pendant que je faisais les courses, alors on s’est jetée dessus, on était trop contente… et là elle m’a expliqué le calvaire qu’elle vivait. Elle se fait taper dessus et au début elle était séquestrée. J’ai alors compris pourquoi on n’avait plus de nouvelles d’elle… » Respect et culture : La culture est très importante, elle doit être véhiculée et maintenue. Le groupe nous dit que l’on peut ressentir un renforcement des groupes culturels, qu’on revient aux mariages entre les personnes de même culture pour ne pas perdre les valeurs d’avant. « Les parents trouvent que les filles aujourd’hui sont vulgaires, qu’elles rencontrent trop de garçons, qu’elles s’habillent comme des dévergondées… Ce n’est pas sain tout ça disent-ils. Alors les parents sont de plus en plus stricts et croient que c’est comme cela que les enfants vont les respecter ». Confrontation avec la famille : Dans le cas des mariages forcés, il n’y a pas vraiment de confrontation. Certains tentent de se rebeller, de fuir, de se donner la mort parfois mais une fois la décision prise, elle est irrévocable. La personne n’a pas le choix, cela lui est imposé. Répudiation : Le groupe a souhaité parler de répudiation car elles ont constaté que souvent il y avait une trop grande différence de culture entre les époux et que cela influait sur la relation de couple. « Les personnes sont trop différentes… Allez dire à une fille qui a fait ses études en Belgique, qui a plein d’ami(e)s, qui est habituée aux Snack, aux sorties, au cinéma, etc., d’aller du jour au lendemain s’enfermer entre quatre murs et rester à la maison pour faire à manger à son mec et de devoir demander l’autorisation pour sortir ?! C’est ridicule, c’est trop de décalage et cela ne peut mener qu’à la rupture ». *** « Les filles sont répudiées si elles ne conviennent pas à leur mari. Donc s’il en a marre, il peut décider de divorcer ou chasser sa femme par contre, elle ne peut pas le faire » ! Territorialité : Bien souvent, le mariage se fait à l’étranger afin que la personne n’ait pas le temps de réagir ni de porter plainte. De plus, certains mariages se font durant les vacances ce qui ne permet à personne d’intervenir (ex : les professeurs interpellés 72 ne peuvent rien faire durant cette période). Enfin le mariage fait à l’étranger est reconnu et ne peut être annulé une fois en Belgique. Fréquence, durée du mariage, divorce : Les élèves semblent dire qu’en général ce genre de mariage ne dure pas longtemps. Toutefois, il y a des cas de répudiation ou de divorce mais bien souvent à la demande de l’époux. Les jeunes femmes retournent alors dans leurs familles quand celles-ci veulent encore d’elles. D’autres mariages durent et parfois les conjoints s’habituent l’un à l’autre et apprennent à se connaître. Des dérives telles que des violences dans le couple peuvent survenir mais ne constituent pas toujours la cause d’un divorce. « Je connais une femme qui est restée 15 ans avec son mari, elle avait été mariée de force. Après 15 ans, elle s’est enfuie. C’est une femme répudiée à présent. Elle ne s’est jamais remariée ». Mariage blanc différent du mariage forcé : le groupe à très vite différencié le mariage blanc du mariage forcé. « Le mariage blanc c’est purement administratif, soit c’est pour l’argent, soit pour les papiers ou pour le permis de travail, le chômage, le logement, le CPAS etc. Mais en général les personnes sont au courant et d’accord tous les deux. C’est un arrangement à l’amiable. Par contre dans le cas du mariage forcé, bien souvent, on ne demande pas l’avis des gens, c’est ça qui est honteux. En plus on ne se préoccupe pas de savoir si les gens s’aiment ou pas. Et très souvent, les femmes se font battre et ne voient plus personne ». Dans la dénomination, certaines ont volontairement distingué aussi les mariages forcés des mariages arrangés, d’autres pas car selon elles, c’est la même chose car l’avis du jeune (ou consentement) n’a pas été respecté. Groupe B ( zone rurale – province de Charleroi ) La connaissance que le groupe avait des mariages forcés s’est relevée très mince à l’exception d’un seul témoignage. Toutes et tous avaient déjà entendu parler du phénomène mais celui-ci était nettement moins ciblé que par rapport au groupe A. Ainsi, à la question de savoir comment pouvait être expliqué un mariage forcé, des éléments divers ont été apportés tels que la pauvreté, l’obligation de se marier dans un cas de grossesse, l’obtention de papiers de séjour,… A l’exception de l’unique témoignage dont il sera rapporté plus de détails infra, les éléments donnés par les jeunes du groupe ont permis de conclure à une connaissance plus théorique que pratique de ce qui peut être qualifié de « mariage blanc », terme préféré à « mariage forcé » dans la mesure où il y a dans les exemples rapportés par le groupe B absence de l’élément de pression présent avec force dans les témoignages du groupe A. Ainsi, il est préférable d’utiliser ici la notion de « mariage blanc », qui peut être expliquée sur base des éléments recueillis comme suit. 73 L’acception la plus fréquemment et communément rencontrée fait référence aux mariages non consommés sexuellement. Cependant, selon les exemples rapportés par le groupe B, c’est une seconde acceptation du terme qui doit retenir ici l’attention et qui concerne une pratique courante et ancestrale à savoir des mariages célébrés pour des raisons « socioéconomiques ». Le projet de vie en couple ne semble pas ici être primordial. D’autres intentions sont davantage présentes, guidées soit par les parents, soit par le couple. Ainsi, comme il a déjà été en partie relevé, on peut citer : les raisons pécuniaires et patrimoniales, les alliances familiales, les « avancements » professionnels, la recherche d’une sécurité d’existence, la légitimation d’enfants naturels ou adultérins ou encore le désir de se libérer des parents, le souhait de bénéficier de la pension de survie, les héritages, etc. Si toutes ces motivations socioéconomiques continuent à constituer des « bonnes » raisons de se marier, aujourd’hui, relèvent la majorité des jeunes, c’est principalement l’obtention d’un permis de séjour ou de travail qui est visée. Ceci souvent afin de régulariser la situation des personnes en séjour illégal sur le territoire belge ou de permettre l’accès au territoire à des personnes qui, autrement, n’auraient pas l’autorisation de résider et de travailler en Belgique. Par rapport au groupe B, on pourrait s’interroger sur la non connaissance de cas de mariages forcés. L’explication est peut-être à trouver dans la situation géographique de l’établissement visité (zone rurale, sud de la Belgique). Les jeunes rencontrés proviennent tous de villages avoisinants qui n’ont pas vu leur population transformée par les flux migratoires, à l’opposé de zones urbaines comme Bruxelles, Liège ou Charleroi. C’est en effet vers ces grandes villes tout comme Mons ou La Louvière que les jeunes du groupe B nous ont « orientés ». C’est aussi dans cet environnement que l’unique témoignage apporté par un des deux garçons trouve sa source. En effet, ce garçon a un vaste réseau d’amis sur Mons et Charleroi dans lequel de nombreux cas de mariages forcés et de mariages blancs semblent être, comme il dit, « monnaie courante ». Les trois jeunes filles (dont deux sœurs) dont il nous fait part de la situation sont d’origine maghrébine et subissent actuellement des pressions très fortes de la part de leurs familles respectives qui se manifestent notamment par un contrôle quotidien et permanent qualifié d’ « étouffant et invivable ». Elles ont entre 17 et 21 ans. L’une des deux sœurs est une amie proche du garçon et il semblerait que ce soit son état de détresse qui ait poussé « notre témoin » à vouloir en parler. Le schéma de leur histoire est assez classique et n’apporte pas d’éléments supplémentaires à tout ce qui a déjà été dit mais confirme une fois de plus la pression énorme qui pèse sur leurs épaules. Les parents très attachés et respectueux de leurs traditions et de leur religion estiment qu’il est venu le temps de penser à marier leur fille. Deux d’entre elles acceptent avec résignation « parce que c’est comme ça », mais pas la troisième. Ce témoignage insiste très fort sur l’état de souffrance psychologique dans lequel se trouve l’amie du garçon. 74 « Elle est venue me voir un jour en me disant qu’elle ne supportait plus de vivre comme ça (…). Elle était tout le temps suivie, espionnée par ses frères, ses cousins, les amies de sa mère, tout le monde, quoi ! (…) Elle m’a dit qu’elle ne savait plus quoi faire (…) que ses parents avaient le projet de partir en vacances au Maroc avec tout le monde (…) qu’elle avait très peur car elle les sentait de plus en plus bizarres (…). Je ne sais d’ailleurs pas comment elle a fait pour pouvoir venir me voir (…) cela faisait au moins deux mois que je n’avais plus de ses nouvelles. (…) Elle parle de suicide ou de « trucs » dans le genre mais je ne sais pas (…). Elle me demande de l’aider (…), moi je suis là et je serai toujours là pour elle (…) alors je lui dis que c’est pas normal, qu’il faut en parler. Sa sœur [ n.d.l.a. : une autre sœur déjà mariée] s’est faite taper dessus par son mec, l’autre soir. (…) Elle a peur que ça lui arrive aussi, déjà que comme ça avec ses frères elle peut rien faire (…) » 5.3 Résultats de l’étude qualitative : les entretiens individuels En dehors des jeunes rencontrés dans le cadre des deux animations qui ont abouti aux entretiens de groupes, 12 élèves ont accepté de témoigner de leurs connaissances sur des cas de mariage forcé, et ceci dans les trois régions concernées. Les entretiens se sont déroulés de manière individuelle en présence des deux membres de l’équipe de recherche, chargées de la partie qualitative. Ce qui suit est la synthèse de chaque témoignage reçu. Pour mener l’entretien, nous nous sommes référés à un guide de questions repris en annexe. Chaque résumé essaie de suivre la même structure à savoir : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. Description des caractéristiques de la personne Contexte Connaissance des faits Impact au niveau relationnel Motifs Vécu de la situation Avis personnel et positionnement 5.3.1 Témoignage 1 « C’est le cas d’une jeune fille de 16 ans, dont le père semblait être « sévère » et la mère plutôt soumise. Elle provenait du YEMEN et de croyance musulmane. La personne était aux études au moment où les faits se sont produits » « Il était difficile d’expliquer le contexte, toutefois, la personne ne souhaitait pas ce mariage ». « Il semble que la personne concernée allait au YEMEN pour y passer les vacances ». « La personne n’a plus donné signe de vie à ses amies depuis le jour où elle a été mariée. Par contre il semble que les liens avec la famille proche ne soient pas modifiés ». « Depuis le jour où elle nous a dit que ses parents voulaient la faire marier, j’ai plus eu des nouvelles… » 75 « Les parents ont marié leur fille unique. Elle était assez « belle » et prête à se marier. Il semblerait que la jeune fille ait subi de la pression de la part de ses parents et ait fait l’objet de menaces ». « La personne aurait accepté de se marier par souci de respecter la volonté de ses parents. Le respect de la tradition, de la religion et de l’autorité parentale est très important ». « Si elle a accepté ce mariage c’est parce que ses parents l’ont imposé. Elle s’est rebellée, le monsieur avec qui elle devait se marier était beaucoup plus vieux qu’elle. Elle s’est renversée de l’eau chaude… mais malgré tout elle s’est mariée ». « Moi personnellement, je dirais que c’est injuste… dire qu’ils ont une fille unique et la faire marier à l’âge de 16 ans. Je ne suis pas très d’accord. Ce mariage est injuste. Si j’avais été dans la même situation, j’aurais respecté mes parents. Mais je crois que j’aurais tout fait pour ne pas être dans cette situation. Les parents ne devraient pas imposer à leurs enfants de les marier de force. Moi je sais que mes parents ne me forceront pas à me marier avec une personne pour qui je n’éprouve pas de sentiments… Aimer ». « Dans notre religion [n.d.l.a., musulmane], c’est tout à fait normal qu’une fille dès l’âge de sa puberté, elle doit se marier par sa volonté et la volonté de ses parents. Mais c’est vrai qu’à l’époque c’était comme ça mais nous sommes en 2004. Il faut pas oublier ses origines et sa religion et respecter surtout ses parents. J’espère qu’un jour - si Dieu le veut- je ne briserai pas la vie de ma ou mes filles ». 5.3.2 Témoignage 2 « La personne concernée est une jeune fille ayant 19 ans au moment des faits. Elle est d’origine turque, musulmane. Elle fait partie d’une famille nombreuse. La mère ne parle pas le français alors qu’elle est en Belgique depuis plus de 20 ans. La fille avait terminé ses études et travaillait au moment des faits ». « Cela s’est passé en Turquie, on lui a présenté son futur mari ». « La personne m’en a parlé directement ». « Je ne sais pas réellement s’il y a eu une coupure avec ses amies mais dès lors qu’elle s’est mariée, elle a porté le foulard ». « Elle a épousé ce monsieur pour lui permettre de vivre en Belgique. Cette personne avait subi des pressions et elle a cédé rapidement. Les parents lui ont imposé ce mariage, elle en était d’ ailleurs très perturbée. Le respect de la tradition familiale ou du pays d’origine est très important. La personne n’a pas essayé de se faire aider, elle a subi la situation ». « Pour ma part, je trouve cela dégoûtant mais je ne veux pas me disputer avec ma famille. Je qualifierais ce mariage d’honteux et si cela devait m’arriver, je refuserai et au besoin m’enfuirai ». « Il faudrait empêcher l’immigration par le mariage forcé. C’est uniquement pour venir vivre en Belgique que son époux l’a épousée ». 76 5.3.3 Témoignage 3 « Mon amie au moment des faits avait 18 ans, sa famille était très sévère. Elle est d’origine turque, de religion musulmane et parle le turc. A cette époque, elle était en 5ème professionnelle, après elle a arrêté ses études ». « Les faits se sont déroulés en Turquie, lors d’un séjour durant les vacances de juillet ». « J’ai été mis au courant par la personne concernée à son retour en Belgique ». « Mon amie a arrêté l’école, elle continuait toutefois à voir ses amies… par contre avec sa famille, la situation ne se passe pas bien depuis les faits, mais elle supporte car vit encore avec eux ». « Je pense que ses parents veulent qu’elle se marie avec quelqu’un qu’ils ont choisi euxmêmes parce qu’ils pensent que c’est le meilleur choix.. » « Mon amie a subi de la pression vis – à – vis de ses parents et de ses proches… Elle pouvait être menacée si elle faisait quelque chose à l’encontre de l’avis de ses parents ». « Elle semble avoir accepté de se marier car pour elle, c’était la seule manière d’échapper au contrôle familial, de « gagner son indépendance ». « Mon amie a refusé de se marier mais lorsqu’elle s’est aperçue que cela n’y changerait rien, elle a voulu se suicider… Elle n’a pas essayé de prévenir d’autres personnes pour l’aider, elle ne savait pas auprès de qui s’adresser… » « Je pense qu’aucune personne devrait faire cela, laisser le choix à la personne de faire ce qu’elle veut, de se mettre avec la personne qu’elle aime… Je suis presque sûre que le mariage ne va pas durer car elle est très malheureuse avec cette personne… » « Si je me trouvais dans la même situation, je pense que je me marierais et quelques années après, je divorcerais ou alors je ferais une fugue chez quelqu’un jusqu’à ce qu’ils comprennent que je ne veux pas ». « Je pense que dans ce genre de situation, on ne peut rien y faire car c’est à eux à régler leurs problèmes, on n’a pas à se mêler de leurs affaires. La personne concernée devra trouver un moyen pour échapper mais nous on peut rien y faire. Et je pense que petit à petit, la mentalité des gens change car maintenant dans notre environnement, je n’entends plus beaucoup de cas comme ça ». 77 5.3.4 Témoignage 4 « La jeune fille était âgée de 18 ans au moment où elle a appris qu’elle devrait se marier. Son père est algérien et sa mère belge. Son père est venu vivre en Belgique afin d’obtenir des papiers. Il est au chômage depuis longtemps. La personne est issue d’une famille composée de deux garçons et deux filles. Elle est de culture musulmane et de religion islamique ». « Le fait est qu’elle doit se marier bientôt et qu’elle est encore aux études. Elle ne désire pas se marier mais elle sait qu’elle n’a pas le choix ». « Elle m’en a parlé très vite, car elle est mon amie…elle était dans tous ses états, en pleurs… ». « Mon amie fréquente encore l’école, mais elle n’a que très peu d’amis, elle se limite à en avoir de peur de devoir s’en séparer… Je ne connais pas bien la relation qu’elle a avec ses parents, mais ça n’a pas l’air d’être drôle tous les jours… » « La fierté et l’honneur du père sont les motifs de ce mariage. L’enfant doit respecter cela et ne peut aller à l’encontre de la décision de son père ». « Mon amie a subi de la pression de ses parents mais je ne sais pas si elle a été menacée ». « Elle a accepté de se marier pour respecter la tradition familiale et en plus c’était pour elle un moyen d’échapper au contrôle de sa famille… » « Elle pense pouvoir s’échapper, elle voudrait refuser ce mariage mais son père veut la marier en Algérie… Elle ne sait pas comment faire, elle n’a personne qui pourrait l’aider…» « Moi je suis tout à fait contre ce genre de pratique, il ne faut pas marier quelqu’un contre sa volonté… C’est un mariage forcé, un mariage blanc ! Si je me trouvais dans cette situation, j’échapperais à ma famille, je refuserai sans doute… » « Ce type de situation arrive souvent dans mon environnement amical, j’ai beaucoup d’amies qui doivent se marier dans leur pays et qui ne sont pas majeures. La plupart ne connaissent pas leur futur époux » « Je pense qu’il serait intéressant de faire quelque chose pour protéger les adolescents. Il faudrait alors ouvrir une institution ou un bâtiment comme une ambassade pour venir en aide aux jeunes qui sont confrontés à ce problème. Je trouve qu’il faudrait plus de publicité à ce sujet pour informer les jeunes, qu’ils sachent qu’il y a une issue pour s’en sortir avant d’en venir même au suicide » ! 5.3.5 Témoignage 5 « Elle avait 20 ans au moment des faits, je ne connais pas vraiment sa famille. Elle est de nationalité marocaine. Mon amie avait terminé ses études secondaires et elle était demandeuse d’emploi en stage d’attente ». « Les faits se sont déroulés pendant les grandes vacances au Maroc » 78 « Mon amie m’en a parlé puisque nous nous connaissons depuis longtemps, nous sommes confidentes ». « Malgré cela, mon amie n’a pas arrêté de voir ses ami(e)s, elle sort quand elle veut, elle va où elle veut, elle n’a pas changé, elle a gardé le même rythme qu’avant … Au niveau de sa famille, elle va voir ses parents et toute sa famille tous les jours ». « Je pense que ce mariage a été fait pour percevoir la dot, c’est assez important… elle a d’ailleurs subi de la pression mais n’a pas été menacée non plus ». « Si elle s’est mariée c’est pour qu’on lui foute la paix, sa famille n’arrêtait pas de parler mariage, dot, etc. Elle en avait assez et a décidé de céder, c’était donc pour gagner son indépendance mais elle est toujours un peu sous le contrôle de sa famille. Elle n’a pas refusé le mariage mais n’avait pas vraiment le choix, elle n’a donc pas demandé d’aide car elle savait à quoi s’attendre ». « Personnellement je trouve que c’est dégueulasse de ne pas demander l’avis de la personne concernée, heureusement pour moi que je n’ai pas des parents cruels, comme elle. Je ne sais pas ma réaction en cas d’un évènement pareil ». « Je dirai que ce type de situation arrive souvent dans mon environnement scolaire, j’ai déjà entendu plusieurs histoires comme celle-là ». « Pour moi, je pense qu’il faudrait être plus vigilant au niveau des papiers, du visa, du passeport etc ». 5.3.6 Témoignage 6 « La jeune fille avait 14 ans au moment des faits, sa famille est très attachée à la coutume et surtout à la réputation. Dans la tradition, la fille n’a pas le droit de parler, elle doit juste accepter. Elle est Kurde, de religion islamique. A cette époque, elle était encore à l’école ». « Apparemment les faits se sont mal passés, il y a eu beaucoup de fracas ». « Moi j’ai été mise au courant via des amies en commun dans le cadre d’une discussion ». « Cette fille a arrêté l’école, elle ne voyait plus ses ami(e)s car on le lui a interdit, par contre les liens avec sa famille ont été renforcés, je veux dire qu’elle était tout le temps surveillée et à la fin on a appris qu’elle devait rester chez elle ». « Elle a du se marier parce qu’elle était en âge de le faire, elle n’a pas eu le choix et elle a été menacée ». « Elle a accepté de se marier parce que c’était la volonté de ses parents, ils ne lui ont pas demandé son avis, elle devait les respecter ainsi que leur choix avant tout, il y a aussi la tradition, chez les Kurdes, il paraît que c’est normal ». « Elle s’est évadée pour tenter d’échapper à ce mariage et elle avait un copain qui l’a aidée à s’enfuir ». 79 « Pour moi, une situation comme celle-là est inadmissible, je trouve que ce mariage est dégueulasse et si je me trouvais dans cette situation… en fait, jamais je ne me trouverai dans cette situation, mes parents ne m’imposent pas les choses ». « Je peux dire que ce type de situation arrive souvent dans mon environnement scolaire et amical ». « Pour ma part, si je suis directement confrontée à ça, je demanderai de l’aide à la police ou à d’autres personnes ». « Je voudrais dire une chose, qu’on ne doit jamais imposer quelque chose à quelqu’un !!! L’avis des parents c’est important mais la fille et le garçon devraient avoir libre choix de ce qu’ils voudraient faire de leur vie ». 5.3.7 Témoignage 7 « La fille était âgée de 16 ans au moment des faits, ses parents l’ont forcée à se marier, elle n’avait pas le choix, si elle ne l’avait pas fait, ils l’auraient mise à la porte. Elle vient du Kurdistan, parle le kurde, est de religion islamique mais elle ne porte pas le voile. Mon amie n’est plus à l’école car elle n’a pas pu terminer ses études. Elle est tombée enceinte quelques mois après le mariage ». « Cela s’est passé ici, en Belgique et le mariage s’est déroulé avec leurs coutumes ». « Le jour où elle a appris qu’elle devrait se marier, elle m’a téléphoné en pleurant car elle ne voulait pas » « Elle n’a pas eu le choix de quitter l’école, on l’a obligée, du coup elle personne, plus d’amis. Cela fait deux ans que je ne l’ai plus vue et pourtant inséparables. Avec sa famille rien n’a vraiment changé sauf que ses parents ont même chose avec sa sœur un mois après le mariage de mon amie. Ils disaient qu’ils plus assumer leurs enfants ». ne voit plus nous étions reproduit la ne pouvaient « Ses parents manquaient d’argent et ils en avaient besoin, ils ont donc choisi de faire marier leurs filles pour avoir leur dot. De plus, les études leur coûtaient trop cher ». « Mon amie a subi la pression de ses parents, ils lui disaient que si elle ne se mariait pas, elle devrait rentrer au pays et elle ne le voulait pas ». « Elle n’a pas vraiment eu le choix, elle s’est pliée à la volonté de ses parents. De même qu’elle devait respecter la tradition familiale. Ses parents l’ont mariée à défaut de la mettre directement à la porte, ils avaient des problèmes d’argent » « Elle a essayé de s’enfuir pour éviter ce mariage et m’a demandé de l’aide mais je n’ai rien pu faire, je ne savais pas à qui m’adresser » 80 « Pourquoi ne laisse-t-on pas le choix aux gens, moi je considère ce mariage comme un faux mariage, et si je me trouve dans la même situation je refuserai qu’on me fasse épouser quelqu’un que je n’aime pas et que je ne connais pas ». « Ce genre de situation arrive souvent dans mon environnement scolaire et très souvent chez mes amies proches ». « Je pense que personne ne peut vraiment empêcher cela, au début la fille est dans les nuages, c’est très beau, on lui fait miroiter plein de bonnes choses car elle va se marier mais elle ne connaît pas la personne et souvent elle la connaît après et finit par vite comprendre l’erreur ». « Je trouve cela dommage moi qui vais me marier, je connais mon futur mari vu que je vis avec, je connais son caractère donc je sais s’il est bien pour moi. Mon amie, elle, ne savait rien de son futur époux et maintenant c’est une mère et une femme malheureuse et battue, renfermée chez elle donc coupée du monde extérieur. Je sais que cela arrive souvent mais cela pourrait être évité en connaissant la personne à qui on va appartenir et s’unir pour la vie ». 5.3.8 Témoignage 8 « C’est une fille de 15 ans, elle vient de Turquie et elle s’est mariée en Belgique. Tous ses frères et sœurs se sont mariés très jeunes (13-14 ans). Elle est de religion musulmane et appartient à une famille très pauvre. Elle a arrêté ses études à l’âge de 12 ans jusqu’en 5ème primaire ». « En fait, le futur marié habitait en Belgique, c’était un garçon très turbulent qui a commis beaucoup d’actes illégaux comme brûler des voitures, etc. La mère de ce garçon a décidé de le marier en Turquie. Elle a demandé une fille et le père de la jeune fille a accepté sans l’accord de la personne concernée. La jeune fille n’a rien pu dire ». « J’ai été mis au courant car ils ont fait leur mariage en Belgique et tout le monde en parlait autour de notre communauté ». « Elle a du arrêter ses études à l’âge de 12 ans. Elle voulait continuer mais ses parents lui on interdit. Elle ne voit plus aucun de ses amis car ils sont en Turquie, en plus, comme elle est mariée, elle doit rester auprès de son mari. Même chose pour sa famille qui vit en Turquie aussi, elle ne les voit qu’une fois tous les deux ans ». « Comme son époux faisait beaucoup de dégâts (prison, alcool, police, drogue) avant le mariage, sa famille a décidé de lui trouver une femme qui pourrait s’occuper de lui, c’est pour ce motif qu’on les a mariés mais le problème est que la jeune épouse a subi des pressions de partout, de sa famille, son entourage et de la famille du futur époux à l’époque. Maintenant, son mari boit toujours et il la bat ». « Elle a accepté de se marier car elle s’est pliée à la volonté de ses parents, elle n’a pas vraiment essayé d’empêcher ce mariage ou même de se révolter, elle était trop jeune pour comprendre ». « Je crois que ce mariage ne durera pas longtemps. Si un jour je me trouvais dans la même situation, je pense que je m’échapperais ». 81 « Ce genre de situation arrive souvent dans mon environnement scolaire, je connais beaucoup de jeunes filles dans ce cas ». 5.3.9 Témoignage 9 « La personne avait 19 ans, elle vient d’un famille très serviable mais qui ont encore une mentalité ancienne. C’est une famille de marocains, arabe et de religion islamique. La jeune fille est une personne intelligente, qui va terminer ses études secondaires ». « Les faits se sont déroulés durant les vacances, lors d’une visite familiale ». « La fille est venue elle-même me parler de ce qu’elle avait vécu lorsqu’elle est revenue de vacances ». « Cet évènement n’a pas vraiment perturbé ses études, elle a pu suivre les cours normalement. Elle fréquente encore ses amies. Par contre elle ne s’entend plus bien avec ses parents ». « Elle a été mariée de force par son père et ses grands-parents, pour épouser son cousin éloigné. Elle a subi beaucoup de pression de la part de sa famille ». « Elle a accepté de se marier pour la volonté de ses parents, pour eux, c’est une tradition ancienne. Malgré cela, elle n’a pas osé refuser le mariage ». « Si j’avais été à sa place, je me serais défendue en m’expliquant car dans cette religion, la femme ne doit pas être forcée pour le mariage ». 5.3.10 Témoignage 10 « La fille avait 17 ans au moment des faits, elle vivait avec son père et sa belle-mère. Son père était très dominant et il décidait tout pour la famille. Les enfants n’avaient rien à dire. C’est une famille de Rwandais et ils parlent le Kinyarwanda. Ils sont de religion catholique. Elle était encore à l’école et n’avait pas terminé ses études ». « Cela s’est passé au Rwanda et son père l’avait vendue. Elle n’était pas au courant. Un jour, son futur mari est venu à l’église pour la chercher et il l’a enlevée ». « Je connaissais cette fille et ma famille m’a parlé d’elle car nous habitions dans le même village ». « En fait, tout a basculé à ce moment là. Elle était obligée d’arrêter l’école car dans son pays, surtout à la campagne quand on est mariée, on ne va plus à l’école. Elle a été coupée de tout car elle était prisonnière de son mari jusqu’au jour où elle est tombée enceinte car son époux était sûr qu’elle ne pourrait pas partir avec l’enfant. Elle n’a plus de bon contact avec sa famille, elle déteste son père mais arrive à dire qu’elle leur a pardonnés ». « Le mari de la jeune fille était riche et âgé, il voulait avoir une jeune épouse. C’était pour lui facile de l’acheter. Le père de la fille et sa femme voulaient de l’argent et n’ont eu aucun scrupule. Ils n’ont même pas pensé à elle. Elle a subi beaucoup de pressions de la part de son père et de sa belle-mère. Son mari avait déjà deux autres femmes mais en voulait une plus jeune, une 82 vierge. En plus, cet homme avait déjà des enfants plus âgés que la fille. Elle a été menacée de mort si elle essayait de s’enfuir ». « Elle avait refusé ce mariage et ne savait pas où aller. Personne ne voulait l’aider. A présent son mari est mort car il a été tué lors d’affrontements avec des rebelles. Comme elle était la troisième épouse, elle a dû rentrer chez sa famille avec ses enfants, sans rien comme héritage. Elle ne travaille pas et dépend de sa famille à présent. Ce mariage n’était qu’une question d’argent et rien d’autre. Avant cela, elle n’aurait jamais pensé que cela lui serait arrivé. Or tout le monde savait déjà ce qui l’attendait. Elle n’a rien pu faire car elle s’est retrouvée piégée ». « La fille n’avait pas le choix car au début pendant cinq ou six mois on l’a enfermée comme une prisonnière. De plus, lorsqu’elle est tombée enceinte, ça été encore plus difficile pour elle de s’échapper, elle avait très peur. Pour moi, c’est un mariage matérialiste et forcé, on l’a vendue comme une esclave. Si je me trouvais dans cette situation, je n’aurais pas continué à vivre avec cet homme. J’aurais cherché tous les moyens pour fuir même si j’étais enceinte ». « Je trouve qu’il faut interdire la polygamie, si un homme n’est pas divorcé, il ne peut pas avoir d’autre femmes. En plus la seconde et la troisième épouse ne sont pas reconnues légalement, elles n’ont donc droit à rien. Le problème est que cette situation arrive souvent dans les campagnes. L’Etat devrait faire des lois pour défendre les femmes parce qu’elles n’ont aucune protection. En plus les premières épouses peuvent chasser les autres si le mari décède ». « Cette fille est dégoûtée pour le reste de sa vie, elle ne veut plus se marier à cause de ce qu’elle a vécu. Elle a une haine contre les hommes. De plus, ses enfants ne connaissent pas leur père vu qu’il est mort et ne sont pas reconnus par la famille de celui-ci. C’est une tragédie et elle devra vivre avec ça toute sa vie ». 5.3.11 Témoignage 11 « C’est ma sœur et elle avait 19 ans au moment des faits, on l’a mariée avec mon cousin en Turquie. On parle le français et le turc. Nous sommes de religion islamique. Ma sœur n’a pas pu terminer ses études et maintenant elle est au chômage ». « Cela s’est passé lorsqu’on est parti en vacances en famille de la Belgique vers la Turquie ». «J’étais là au moment des faits, on a rien compris avec ma sœur. Notre cousin était là aussi, il avait l’air sympa mais on ne le connaissait pas bien. On les a présentés au cours d’une après-midi et une semaine plus tard on les a mariés. Tout ça a été très vite, moi je n’ai pas vraiment réalisé ce qui arrivait à ma sœur, c’était un peu comme une blague ». « Elle ne pouvait plus sortir car son mari lui interdisait. Il ne voulait pas qu’elle travaille et elle ne pouvait plus voir ses amis ni téléphoner. Avec la famille, elle est devenue plus agressive et elle nous en veut tous ». « Ma sœur sortait tout le temps avec des garçons, elle s’enfuyait de la maison pour sortir avec son petit copain. Mon père ne pouvait rien faire à part crier mais elle ne l’écoutait pas et 83 donc sans rien lui dire, il avait déjà prévu de la marier. Elle n’a pas vraiment été menacée vu qu’on partait en vacances en famille mais elle ne s’attendait pas à ça ». « En fait elle ne pensait pas que c’était sérieux et donc elle à voulu revoir son ex-copain. Mais elle a eu des problèmes et a vite compris que son mariage était pour de bon. Mon père l’a mariée car lui-même s’était marié avec sa cousine, il a donc fait la même chose pour sa fille pour montrer l’exemple et pour qu’elle se calme au niveau de ses fréquentations. Elle n’a pas vraiment pu dire quelque chose lorsqu’on l’a mariée car elle pensait que ce n’était pas sérieux donc elle n’a pas protesté». « Moi je ne me souciais pas trop, en fait pour moi elle pouvait faire ce qu’elle voulait. Moi je suis libre dans ma tête, je suis pour l’égalité et le respect des femmes. Je trouve que ce mariage est arriéré et vieux jeux. Si j’étais à sa place, je me serais rebellée, en plus son mari est nul et violent. Le problème est que ce genre de mariage arrive souvent dans nos familles. J’entends parfois des situations comme ça à l’école aussi ». « Je ne crois pas que les autorités publiques pourraient faire quelque chose. De plus, ça fait partie des coutumes et ça peut créer des rebellions voire des menaces de mort, des ruptures de familles, comme avec le voile ». « Je trouve que c’est bien de faire des enquêtes comme cela et qu’il faut continuer à vouloir comprendre ce qui ce passe dans chaque culture ». 5.3.12 Témoignage 12 « La personne était âgée de 17 ans au moment des faits, sa famille est très autoritaire. Elle est turque et parle le français et le turc. Cette fille n’a pas fait de longues études. Son mariage s’est passé en Turquie ». « Elle est partie en Turquie pour deux semaines avec sa famille ». « J’ai pris connaissance de la situation lors d’une discussion en famille ». « Comme ses études ont été écourtées, elle n’a pas gardé de contact avec ses amies. De plus, on l’a empêchée de les revoir. Par contre, sa famille l’entoure toujours beaucoup, même un peu trop. Elle est tout le temps chez ses parents ». « C’est la culture qui veut ça, on n’a rien à dire. Elle n’a pas contesté la décision de ses parents de peur d’être rejetée ». « Elle a respecté la volonté de se parents et s’est pliée à celle-ci. La tradition est très importante dans cette culture, il faut toujours la respecter. En plus pour elle, c’était le moyen d’avoir un peu d’indépendance ». « Pour moi c’est tout à fait absurde. Je pense que chaque homme et femme a le droit de choisir la personne avec qui il ou elle veut vivre !!! Le mariage est une très grande chose, on ne peut pas décider de se marier rien que pour la beauté, l’argent. Il faut connaître un minimum la personne. Je pense qu’avant de se marier, il faut très bien réfléchir car la plupart du temps on ne connaît pas très bien l’autre. Il y a des gens qui se marient et qui divorcent après quelques 84 temps. C’est mon avis parce qu’ils ne connaissent pas le mauvais côté de l’autre. Si je me trouvais dans la même situation, je ne me marierais pas et j’essaierais de montrer à tous le monde que j’ai raison ». « Je pense qu’on doit faire des explications supplémentaires et punir les parents qui obligent leurs enfants à se marier sans leur consentement. Il faut aussi venir dans des écoles et expliquer aux jeunes ce qu’il faut faire avant de se marier. Expliquer que c’est un choix très important et que c’est seulement la personne qui est concernée qui doit prendre la décision ». Conclusion des entretiens: De ces entretiens individuels, il ressort une fois de plus une réelle prise de conscience de la jeune génération des conséquences d’un mariage forcé, une dénonciation et un refus mais parallèlement une impossibilité d’agir à l’encontre d’une pratique encore fortement ancrée chez certains dans la tradition familiale. Cette difficulté de communication entre enfants et parents justifierait un approfondissement du débat non pas seulement avec les plus jeunes mais bien aussi avec les adultes afin d’ouvrir le dialogue et d’apporter des pistes de solution en terme de prévention. 5.4 Résultats de l’étude qualitative : questionnaire supplémentaire écrit La qualité des résultats obtenus par le questionnaire complémentaire laisse supposer que les élèves qui y ont répondu souhaitaient davantage attirer l’attention sur l’existence du phénomène sans vraiment s’étendre sur les circonstances qui entouraient le mariage. L’intérêt de ces résultats existe bien dans la mesure où il vient compléter les deux autres méthodes utilisées (l’entretien de groupe et l’entretien individuel). Cependant, la majorité des répondants ayant utilisé des réponses courtes et schématiques, il aurait été dangereux de tenter une quelconque interprétation. C’est la raison pour laquelle, il est vite apparu plus pertinent d’insérer ces 33 témoignages en annexe du présent rapport sous forme de résumés, laissant ainsi au lecteur le choix d’en apprécier la qualité et l’intérêt. 85 6. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS 6.1 Synthèse de la recherche quantitative D’un état de la littérature, il ressort que le mariage n’est plus, de nos jours, l’unique critère comme mode de vie en couple et comme cadre d’éducation des enfants bien que la famille et la réussite de la vie amoureuse soient des valeurs jugées fondamentales par les jeunes. Si les idées traditionnelles au sujet du mariage et de la famille semblent être tenues en haute estime par la population ; l’écart existant entre les aspirations et les comportements peut être observé à la lumière des statistiques. Notre conception occidentale actuelle fonde le mariage sur l’amour, le bonheur et le consentement mutuel. Toutefois, la conception selon laquelle le mariage résulte toujours du choix personnel de deux personnes qui s’aiment doit être nuancée : en effet, les mariages blancs, mariages gris, mariages arrangés, mariages coutumiers, mariages forcés ou mariages contraints (parmi lesquels on retrouve les mariages précoces ou mariages d’enfants) sont des termes recouvrant des situations survenant actuellement et où le mariage ne résulte pas du choix personnel de deux personnes qui s’aiment. Les mariages forcés peuvent survenir à l’étranger mais aussi chez les populations allochtones d’Europe occidentale. Dans la tradition des mariages arrangés, les familles des deux futurs époux ont un rôle central dans l’arrangement du mariage ; le choix de se marier ou non appartient toutefois aux deux futurs époux. Par contre, en cas de mariages forcés ; l’un ou les deux « futurs époux » n’a/ont pas le choix de s’y soustraire puisque des moyens de pression sont utilisés pour obtenir le consentement. En Europe occidentale, le manque de connaissance et de compréhension du phénomène a été regretté. Certains estiment que cette pratique est peu fréquente. D’autres soulignent que les mariages forcés se déroulent toujours dans certaines communautés africaines, turques ou maghrébines résidant en Europe. L’insuffisance de données dont on dispose à propos des mariages forcés nuit à sa compréhension. Les répercussions des mariages forcés sont parfois tragiques chez ses victimes mais aussi pour les parents et pour la famille : un chantage affectif ; des pressions psychologiques ; des violences physiques sont certains des moyens coercitifs employés par les parents, la famille pour obtenir l’ « accord » de la personne. Ainsi, les victimes (ou les personnes menacées de l’être) subissent de la violence intra familiale. En outre, des relations sexuelles avec un époux non choisi peuvent être assimilées à un viol. Les victimes éprouvent un sentiment de solitude, d’isolement, de culpabilité. Sur le plan de la santé, on peut aussi évoquer divers troubles allant parfois jusqu’aux suicides. En décembre 2003, à l’initiative de Monsieur Hervé Hasquin, Ministre- Président du Gouvernement de la Communauté française en charge de l’ Egalité des Chances et de la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Communauté Française, une recherche a été commanditée à l’Université catholique de Louvain (Département des Sciences Politiques et Sociales, Unité de Science Politique et de relations internationales). Cette recherche a été réalisée en collaboration avec le CEFA, asbl (Centre d’Education à la Famille et à l’Amour) et avec le CeFeSoc, asbl (Centre Femmes et Société, service d’éducation permanente et de recherche appliquée. Cette recherche poursuivait les objectifs suivants : (1) étudier auprès d’un échantillon de jeunes âgés de 15 à 18 ans leurs aspirations envers le mariage et la connaissance qu’ils ont des mariages forcés ; (2) analyser grâce à ces observations les facteurs susceptibles d’encourager de tels comportements ; (3) proposer des pistes pour prévenir la survenance du phénomène et pour venir en aide aux victimes d’un tel phénomène. En vue d’atteindre cet objectif, une enquête fut menée auprès de 1.200 élèves fréquentant des établissements scolaires situés dans les arrondissements administratifs de 86 Bruxelles, Liège et Charleroi ; âgés de 15 à 18 ans ; issus des classes de 4ème, 5ème et 6ème années de l’enseignement ordinaire et en alternance ; appartenant aux filières suivantes : générale, technique, professionnelle. Les élèves furent ainsi interrogés sur les thématiques suivantes : leur projet de vie de couple ; leur souhait de se marier ; les aspirations globales pour l’avenir ; l’influence des parents sur le choix du/de la futur/e conjoint/e ; les conditions de réussite d’un mariage ; les qualités du/de la partenaire idéal/e ; la possibilité d’un mariage mixte ; la connaissance des mariages contraints ; quelques stéréotypes masculins et féminins. Des résultats de l’enquête quantitative, les constats suivants peuvent être formulés. Avoir une bonne santé ; se marier ; fonder une famille ; disposer d’un salaire attractif figurent parmi les principaux idéaux que formulent les jeunes envers leur avenir. En outre, ils aspirent davantage à un amour unique qu’à des relations épisodiques. Ensuite, si le mariage est un choix plébiscité par la plupart des élèves ; il semble surtout couronner une période de vie en commun plutôt que de l’amorcer (des nuances toutefois existent selon le genre et les convictions religieuses ou philosophiques des répondants). Les idées relativement traditionnelles associées au mariage semblent recueillir l’adhésion des jeunes interrogés : s’engager à long terme ; accueillir la naissance des enfants mais c’est aussi un moyen de fuir la solitude ! Par contre, la minorité de jeunes ne souhaitant pas se marier motivent notamment ce choix par leur crainte du divorce et par l’idée que le mariage n’est plus la seule référence pour vivre en couple. Au sujet des conditions de réussite d’un mariage, globalement, il apparaît que les élèves attachent beaucoup plus d’importance à des relations de couple de qualité plutôt qu’à une endogamie d’ordre culturelle ou religieuse (bien que des différences notables émergent à la lumière des convictions philosophiques ou religieuses des répondants). En outre, le mariage inter-culturel ne constitue pas un obstacle chez la plupart des jeunes ; le mariage inter-religieux serait plus soumis à une réflexion préalable. Quid des parents et de la vie de couple de leurs enfants ? La sexualité est un thème que les jeunes abordent peu avec leurs parents. Par contre, le mariage est un sujet dont ils s’entretiennent « parfois » en famille : c’est le cas d’une majorité de filles contre une minorité de garçons. Une minorité de répondants a déclaré que leurs parents auraient un rôle à jouer sur le choix de leur futur/e conjoint/e ou partenaire. Parmi eux, 17% de ces répondants ont précisé que ce choix appartiendrait à leurs parents même s’ils auront leur mot à dire ! Enfin, la thématique des mariages forcés a été abordée. Bien que la majorité des élèves déclare que les mariages forcés surviennent encore « parfois » dans notre pays ; un répondant sur cinq environ a souligné avoir connu des faits de mariages forcés et ce principalement parmi des connaissances et moins parmi la famille. Des résultats de l’enquête, il est ressorti que les facteurs suivants semblent être associés à une plus grande connaissance des mariages forcés : être de sexe féminin ; suivre une filière technique ou professionnelle ; étudier dans un établissement à discriminations positives ; étudier dans un établissement implanté en arrondissement bruxellois ou liégeois ; suivre un cours de religion islamique ; avoir un père dont le niveau de formation est inférieur au stade de l’enseignement secondaire d’une part ou ouvrier de profession d’autre part. Par ordre décroissant d’importance, les « motivations » des mariages forcés en général résident dans l’obtention de papiers de séjour ; la contrainte des parents ; une grossesse et en second lieu chez les personnes qu’ils connaissent dans : la contrainte des parents (ce motif étant davantage cité par les filles d’une part ; par les personnes suivant un cours de religion islamique d’autre part et par les répondants fréquentant un établissement de type D+) ; obtenir des papiers de séjour (cette raison étant plus formulée par les personnes assistant à un cours de religion islamique) ; légitimiser l’arrivée d’enfants (ce motif étant davantage évoqué par les jeunes fréquentant un cours de morale non confessionnelle d’une part et par les garçons d’autre part). 87 6.2. Synthèse de la recherche qualitative Par souci d’approfondir le volet « mariages forcés », il avait été proposé aux élèves d’apporter leur(s) témoignage(s) sur des situations dont ils avaient connaissance. Pour cerner la demande, un formulaire libre dit de « partage d’expérience » avait été glissé dans l’enquête et devait revenir à l’équipe de recherche dans un pli distinct de celui contenant les questionnaires, ceci de manière à sauvegarder le principe de confidentialité. Sur base du recueil des formulaires (117), des contacts ont été pris avec les écoles et en particulier avec les professeurs qui avaient assuré le suivi de la première étape. Il leur a ainsi été demandé de demander aux élèves s’ils souhaitaient participer à une rencontre avec l’équipe. Il a été convenu de procéder à des entretiens individuels ou de groupe (sous forme ici d’animation) afin de détecter la présence de cas de mariages forcés dans les établissements scolaires, d’analyser grâce aux témoignages les facteurs favorisants et in fine de pouvoir dégager certaines pistes pour prévenir la survenance du phénomène. Il a ainsi été demandé aux élèves volontaires d’expliquer les circonstances dans lesquelles se déroulait le mariage (forcé ou arrangé) mais aussi et surtout de définir les moyens utilisés ainsi que les conséquences sur le plan personnel, familial et scolaire de la personne à qui une union a été imposée. Les objectifs de ce second volet qualitatif visaient essentiellement à rencontrer des jeunes gens qui côtoient dans leur environnement proche des familles qui ont recours à la pratique des mariages forcés. Par ces rencontres, il était ainsi souhaité d’appréhender du mieux possible les souches de la population les plus concernées afin dans un premier temps de pouvoir se faire une idée sur l’ampleur et l’évolution du phénomène. Deux animations de groupe ont été réalisées afin de rencontrer les jeunes et de favoriser le débat. Il était initialement souhaité de faire une animation dans les trois régions concernées par l’enquête, à savoir Liège, Bruxelles et Charleroi. Combinant à la fois les disponibilités des écoles participantes ainsi que la motivation des élèves à rencontrer les formatrices dans le cadre de ces échanges, il a été possible de réaliser l’expérience dans deux écoles : d’une part, dans un établissement scolaire situé en zone urbaine à Bruxelles, avec un groupe de 8 élèves – groupe A - et d’autre part, dans un établissement scolaire situé dans une zone rurale de Charleroi avec un groupe de 9 élèves – groupe B – soit un total de 17 jeunes pour la partie entretiens de groupes. En plus de ces 17 jeunes, 12 élèves ont accepté de témoigner de leurs connaissances sur des cas de mariage forcé, et ceci dans les trois régions concernées. Les entretiens se sont déroulés de manière individuelle en présence des deux membres de l’équipe de recherche, chargées de la partie qualitative. Sans vouloir généraliser, il semblerait que l’origine sociale et culturelle des élèves conditionne leurs aspirations face au mariage. Ainsi, même si tous les jeunes interrogés sont unanimes sur des valeurs telles que l’amour, l’engagement et les enfants, la question du respect de l’avis des parents est sensiblement différente en fonction du milieu d’origine. Ainsi, dans certaines familles, l’avis des parents est à ce point important que la volonté du jeune à marier s’en trouve considérablement amoindrie. Les formes les plus courantes de mariage conclu sur base de décisions prises ou dirigées par les parents sont ce qu’on appelle théoriquement les mariages traditionnels ou coutumiers, les mariages forcés ainsi que les mariages de raison. Autant de formes différentes qui parfois s’entrecroisent ou au contraire se rejettent selon les cultures où elles sont pratiquées. 88 En effet, la démarche d’engagement et la finalité du mariage ne sont pas universelles. Comme nous l’avons vu, beaucoup d’éléments psychologiques, religieux, culturels, sociaux… interviennent dans la compréhension des arrangements matrimoniaux. Il y a de nombreuses intrications entre toutes les formes de mariage au consentement problématique, c’est pourquoi il n’est pas évident de nommer clairement la forme des mariages décrits. Si pour notre législation belge, les époux ont le devoir d’habiter ensemble, d’être fidèles et de se porter secours et assistance, l’exigence d’amour n’entre pas dans le contrat de mariage. Sans vice de consentement, le mariage «arrangé» et sans amour est tout à fait légal. L’amour est une valeur essentiellement culturelle et un des fondements traditionnels mais non légaux du mariage en Belgique. C’est pourquoi aussi nous allons retrouver des mariages «arrangés» dans toutes les époques, tous les milieux, toutes les cultures, toutes les religions. Cependant, « mariage arrangé » ne veut pas dire d’emblée « mariage forcé ». Le mariage arrangé présuppose bien évidemment « arrangement », négociations, conciliations entre parents et enfants, familles et belles-familles, … Les différentes parties doivent préalablement s’entendre et se mettre d’accord. Dans ce type de mariage, les « fiancés » ou les « promis » sont associés à la démarche, longtemps préparés à l’idée de la noce. Dans certains cas, ils ont aussi droit au chapitre. Les mariages dits arrangés ne sont pas vraiment fréquents en Belgique mais subsistent encore dans de nombreux pays où les traditions et le cérémonial font partie intégrante du quotidien. Ces mariages sont généralement associés à ce qui apparaît dans la littérature sous la dénomination des « mariages traditionnels ou coutumiers ». On les retrouve ainsi principalement au Moyen Orient, en Afrique noire et en Inde. Chez nous, on préfèrera parler de mariage de raison ou de mariage forcé. Le mariage de raison Dans les sociétés occidentales on parlera davantage de mariage de raison, union à laquelle souscrivent généralement les deux futurs époux. Les alliances entre familles prospères, l’obtention d’une pension de survie, le mariage « promotionnel » avec la fille ou le fils du PDG, l’attente d’un héritage, le désir de porter un certain nom… peuvent constituer pour certains des motivations plus puissantes que l’amour. Le mariage forcé On ne parlera de mariage forcé que lorsque les parents ou les tuteurs imposent à leurs enfants une union qu’ils ont négociée sans leur avis. En cas de refus de leur part, les familles recourent alors à des moyens coercitifs tels que : chantage affectif, contraintes physiques, violence, enlèvement, enfermement, confiscation des papiers d’identité, etc. Dans de nombreux pays musulmans, la « contrainte de tutelle » donnait à l’homme le droit d’obliger ses enfants (filles et garçons) mineurs et les femmes vierges de sa famille, à se marier. Abolie en 1993 au Maroc, la contrainte de tutelle continue d’imprégner les mentalités qui se transforment encore plus lentement que le code du statut personnel (Moudawana) qui vient luimême de subir une refonte dans le but de garantir l’égalité entre les femmes et les hommes. Au mieux, la femme a toujours besoin du consentement d’un homme (père, frère, oncle, …) pour se marier. On explique cet attachement aux valeurs et règles du passé par ce qu’on peut décrire 89 comme un phénomène de repli identitaire : quand on est immigré, à cheval entre deux cultures et en marge de la société, il y a une tendance chez certains à se replier sur ce qu’on connaît, ce qui est ancré depuis des générations. Il y a alors une réinterprétation de la tradition alors que celleci pourtant perd peu à peu de sa force dans le pays d’origine lui-même. C’est ainsi que de nombreux jeunes (filles et garçons) partent en vacances dans le pays d’origine de leur famille et y sont mariés contre leur gré avec des exigences « morales » ou des aspirations parentales. Comme on l’a également vu, certains jeunes ne se rendent même pas compte qu’ils sont mariés. Ils assimilent ce qui s’est passé au pays à des fiançailles. Certaines filles ne sont même pas mises au courant du fait qu’elles sont mariées, leur père ayant usé de son pouvoir et de son autorité pour contracter mariage pour sa fille mineure. Ces mariages « arrangés » offrent donc des facettes variées qui vont du mariage de raison avec « accord » des futurs époux au mariage coutumier forcé avec violence. L’arrangement est davantage une composante des mariages avec vice de consentement des époux qu’un type d’union bien spécifique. Quelle que soit la forme que revêt le mariage arrangé, il reste intrinsèquement une contrainte, et correspond à un devoir social ou à un passage obligé pour entrer dans l’âge adulte et acquérir une certaine autonomie à défaut de liberté. Généralement la pression familiale est bien réelle et très forte, ce qui, dans les cas rencontrés au travers des témoignages, nous permet d’assimiler les mariages arrangés à la catégorie des mariages forcés. Dans tous les entretiens effectués, nous avons noté que chaque jeune avait une très bonne connaissance du sujet traité, de la problématique. Très vite, nombreux ont souhaité partager leurs récits car étant pour la plupart, choqués voir révoltés par ce genre de situation. Pour la majorité d’entre eux, ce type de mariage est inconcevable. Ils ne comprennent pas pourquoi on doit obliger une personne à se marier avec quelqu’un qu’ils n’aiment pas et qu’ils ne connaissent même pas. Il est important aussi de préciser qu’aucune des personnes interrogées n’a vécu la situation personnellement, il s’agit ici d’amis, de connaissances ou de membres de la famille (ce qui, pour ce dernier cas représente un risque non négligeable pour la personne qui a témoigné). Les jeunes interrogés ont exprimé leur désarroi face à cette situation, certains disent : « mais nous les jeunes, qui nous écoute ? Même si on voulait aider quelqu’un dans cette situation, qu’est-ce qu’on pourrait faire ? On ne peut rien y faire, les parents ne nous écoutent pas… ». Certaines jeunes filles disent comprendre que ce genre de situation se déroule. Pour beaucoup, elles savent qu’elles risquent d’être confrontées à ce type de mariage. Certaines vont même jusqu’à livrer: « Moi je sais que mes parents vont vouloir que je me marie mais je ne vais pas m’y opposer sinon je me fais « massacrer ». On ne parle pas encore de cela, mais je sais que ça va arriver. Et si cela m’arrive, eh ben j’accepterai de rencontrer le garçon pour voir si on s’entend, si ce n’est pas le cas alors je refuse de me marier ». 90 D’autres ne comprennent pas pourquoi les «mères» qui ont vécu la même chose imposent cela à leur propre filles. « Elles devraient pourtant comprendre que c’est dégoûtant et l’ayant vécu elles-mêmes, elles doivent savoir que c’est mal et que ça fait mal ». Toutefois, nombreux sont ceux qui ont avoué qu’ils ne pourraient pas transgresser les décisions de leurs propres parents. Certains ont affirmé vouloir faire une fugue ou tenter de s’échapper si cette situation devait leur arriver. D’autres encore pensent que ce genre de pratique ne se fait que dans certains pays. Lorsque qu’il leur a été expliqué que l’on peut trouver des cas de mariages forcés un peu partout, « des exemples de mariages forcés chez les catholiques existent aussi, mais on ne le dit pas comme cela… » , certains ont été étonnés, ne songeant qu’à la communauté musulmane. Certains garçons nous ont expliqué que les mariages forcés n’étaient pas qu’une affaire de filles car des garçons sont aussi dans ce cas. « Moi j’ai des amis à qui on a présenté plusieurs filles, et finalement vu qu’on leur a mis la pression, ils se sont mariés pour avoir la paix. Maintenant ils ont une maîtresse qui est en fait leur ancienne copine… C’est un peu ridicule mais les parents ne réfléchissent pas aux conséquences » Les jeunes parlent beaucoup de tradition, de respect envers les parents, de coutume. Tous ces éléments ont leur importance dans la famille. Toutefois, ils considèrent que ce genre de pratique est dépassée et incompréhensible. « C’est comme si on retournait en arrière, comme au moyen âge, où personne n’a le choix de rien… C’est affolant de se dire que quoiqu’on fasse, un jour, on va vivre avec une personne qu’on ne connaît pas et qu’on n’aime pas ». Enfin, la majorité des jeunes pensent qu’il faut faire quelque chose, car cette pratique à ses dérives. La violence, la rupture sociale et familiale, les abus, les coups, l’interruption des études, l’humiliation, le suicide sont des conséquences pouvant en découler. Toutefois, la majorité d’entre eux se sentent impuissant et souhaitent que l’on puisse sensibiliser les parents et les politiques pour que cela ne se fasse plus. suit : De ces entretiens ressortent une série de réflexions que nous pouvons formuler comme le mariage forcé est bien présent dans certaines souches de la population tous les élèves entretenus ont une connaissance directe de cas de mariage forcé pour ce qui est de la présence de cas dans les écoles, peu de données nous sont revenues. Ceci peut s’expliquer essentiellement par deux raisons : D’abord, les jeunes promis à un mariage forcé sont souvent mis au courant de la situation au dernier moment, ce qui peut expliquer l’absence de rumeurs autour de la situation de ces personnes ; Ensuite, une fois marié(e), le jeune ne revient pas à l’école et les témoignages recueillis confirment qu’il existe une réelle rupture avec l’environnement social du jeune après le mariage. 91 le stéréotype de la jeune fille maghrébine renvoyée au pays est à déconstruire : en effet, d’une part, les mariages forcés sont vécus non seulement par des personnes d’Afrique du Nord mais aussi d’Afrique noire, d’Europe ou du Moyen Orient. La quasi majorité des témoignages portent sur des jeunes filles de confession musulmane, mais dans une moindre mesure, on peut également pointer des personnes issues des communautés de confession catholique. Par ailleurs, on peut également relever des cas où le garçon n’est pas épargné par la pratique, même si ceux-ci demeurent minoritaires. D’autre part, certains mariages ont lieu en Belgique et pas uniquement au pays d’origine. En ce qui concerne les communautés du Maghreb, il semblerait que la pratique tende à diminuer dans les familles qui sont installées en Belgique depuis plusieurs générations. D’autre part, l’explication de la pratique des mariages forcés serait à rechercher non pas dans la loi musulmane (qui ne la justifie pas) mais plutôt dans un renforcement identitaire chez les personnes qui souffrent le plus d’une situation qui les place à cheval entre deux cultures. Dès lors, dans ces familles récemment installées en Belgique, le phénomène du repli identitaire constituerait un risque important de retour aux traditions et pratiques telles que le mariage forcé. Le respect envers les parents et le sentiment de culpabilité renvoyé en écho à la désobéissance poussent les jeunes à accepter sans opposition la décision des parents. Différentes hypothèses peuvent être avancées pour expliquer cet état de fait : Les femmes et les jeunes ont peur de parler et craignent des représailles de la famille ou de la belle-famille, en particulier des hommes. Certains jeunes n’ont ni l’envie, ni la force de rompre avec leur famille, ni celle d’être rejetés ou considérés comme des parias, même s’ils courent le risque de se marier avec la personne choisie par la famille. A cheval entre deux systèmes culturels, certains ignorent tout simplement qu’ils sont mariés ou ne comprennent pas ce qui leur arrive. Certains font davantage confiance à leurs parents et ont davantage foi en leurs traditions et coutumes qu’en leurs propres désirs. Deux phénomènes viennent renforcer cela : les fantasmes qu’ont les jeunes hommes ou les jeunes filles, d’épouser quelqu’un du pays d’origine; les échecs conjugaux et amoureux de ceux qui dans leur entourage, ont voulu faire un mariage d’amour souvent en dehors de la culture d’origine. Certains redoutent de ne jamais trouver de conjoint. Cette crainte est renforcée lorsque la mixité est interdite et que des règles très strictes sont appliquées pour préserver la virginité des filles. Pour certaines filles, c’est l’unique possibilité de quitter le foyer parental sans souiller l’honneur familial. Elles pensent qu’elles pourront divorcer très rapidement échappant ainsi au contrôle social et familial. Certains pays d’accueil n’osent pas intervenir dans une « tradition culturelle » qui véhicule d’autres valeurs que les siennes. 92 6.3 Recommandations Les mariages forcés enfreignent un certain nombre de droits reconnus par la Déclaration Universelle des droits de l’ Homme dont notamment le droit de se marier (incluant la condition du libre consentement de chaque conjoint) ; le droit à la liberté personnelle ; le droit à la sécurité personnelle93. Enfin, certains ont précisé : «Si le mariage a été consommé alors qu’il n’a pas été consenti, il peut être considéré comme un viol puni par le code pénal français, si les faits se sont produits en France »94. En outre, la loi de la plupart des pays, en exigeant le consentement des deux époux, s’y oppose tandis qu’il s’agit d’une pratique condamnée par diverses religions. A la lumière de ces constats, il ressort que les mariages forcés ne sont pas une affaire strictement privée mais représentent une atteinte aux droits de l’homme. La société devrait donc intervenir. Une meilleure connaissance du phénomène La mise en place de solutions suppose, au préalable, une meilleure connaissance de la pratique des mariages forcés. La présente recherche constitue un premier pas vers une meilleure compréhension de cette pratique mais elle peut sembler insuffisante. Phénomène de l’ombre, le mariage forcé pourrait être mieux connu, compris grâce à la réalisation d’autres études complémentaires. En premier lieu, il conviendrait de réaliser une enquête sur un échantillon représentatif de la population pour avoir une idée approximative de l’ampleur de ce phénomène. Ensuite, réaliser des interviews auprès de membres de diverses générations de ces communautés serait utile : ce serait l’occasion d’aborder notamment les thématiques suivantes : comment la tradition du mariage arrangé/forcé est-elle perçue ? Les parents ont-ils des attentes/craintes particulières envers leurs enfants ? Quelle est la motivation sous-tendant un mariage forcé/arrangé ? Enfin, une autre étude pourrait viser à consulter des victimes de mariages forcés pour mieux connaître leurs besoins. Avant de décider d’actions à mener, il serait aussi intéressant de constituer un Groupe de travail. Il pourrait se composer de membres issus des catégories suivantes : des membres des différentes communautés ; des services sociaux ; des associations de terrain; des leaders religieux de ces communautés ; la Police et la Justice ; des enseignants ; des professionnels de la santé ; des scientifiques ; etc. Ce Groupe pourrait avoir pour vocation d’étudier si les systèmes légaux (en cas de nationalité belge ou de double nationalité)95 et d’aides qui existent sont adéquats et sur cette 93 94 95 INTERIGHTS (March 2000), opcit, 39 pages. Dans cette publication, on souligne que les mariages forcés peuvent enfreindre également d’autres droits humains fondamentaux. Femmes contre les intégrismes (FCI) (juin 2002), opcit, page 13. Dans ce document français, on précise qu’en cas de mariage forcé, si on a la nationalité française, il convient de saisir directement le procureur et de l’avertir que le mariage n’a pas été consenti, de se dépêcher et de s’opposer à la transcription du mariage. Si l’on a la nationalité étrangère, la loi du pays d’origine s’appliquant, il est possible de saisir le juge européen en invoquant le code de la famille d’origine et de demander l’annulation du mariage sur base des articles exigeant le consentement des époux. Stobart Eleanor (document non daté), opcit, 35 pages. L’auteur rappelle que certains pays attribuent automatiquement aux enfants de ses citoyens la nationalité de ces pays. Cela signifie qu’un enfant né et élevé en Europe et dont un des parents a la nationalité de ce pays se voit automatiquement attribuer cette nationalité. Cela complique l’assistance avec ces personnes. 93 base, de proposer des pistes des solutions coordonnées lesquelles devraient faire l’objet d’une évaluation, d’un contrôle. L’importance de la prévention « Quand on a réussi à en protéger une, les autres sortent de l’ombre »96 a-t-on déclaré à propos des victimes. De tels propos illustrent l’importance de réaliser un travail de prévention et plus largement de sensibilisation. En effet, il vaut mieux prévenir que guérir car le mariage forcé est difficile à traiter sous l’angle juridique. L’annulation du mariage n’est pas facile à obtenir car il faut toujours apporter des preuves du défaut de consentement97. Il conviendrait de lancer une campagne d’éducation publique et de sensibilisation précisant que le mariage forcé ne peut plus être toléré car il s’agit d’une atteinte au droit et non une affaire de famille. Dans la mesure où il a été souligné à plusieurs reprises les difficultés de communication entre enfants et parents, ces campagnes devraient concerner non seulement les jeunes mais aussi les personnes issues d’autres générations de ces communautés et les informer des types d’aides et de soutiens qui existent. Pour ce faire, il pourrait s’agir de constituer un répertoire des services d’aides existants. Des brochures d’informations incluant des numéros d’urgence pourraient également être disséminées dans les ports, les aéroports, les gares, ou tout espace public. D’autres canaux plus dynamiques seraient également à prendre en considération : le « théâtre-action » ou le « cinéma-social » apparaissent comme des pistes à ne pas négliger. A cet effet, certaines productions – parce qu’elles sont simples et dégagent un sentiment de vérité – offrent une réelle possibilité de dialogue. Un des films les plus récents est celui des réalisateurs Taylan Barman et Mourad Boucif, « Au-delà de Gibraltar ». Sorti dans les salles belges le 13 mars 2002, il constitue encore 2 ans après le point de départ des débats sur l’immigration et les mariages mixtes. Il est également considéré par la jeune génération comme un espoir de dialogue avec leurs aînés, un catalyseur dans la prise de conscience. D’autres exemples existent. En France, l’association Elele privilégie la prévention par des réunions avec les mères, des rencontres avec les pères au sein des mosquées98. L’école aussi peut être un lieu de prévention. C’est souvent à l’école que les élèves révèlent faire l’objet de menaces : « Et il est vrai que c’est là que très souvent va se faire la révélation : à un professeur, à l’infirmière, à l’assistante sociale …Avant les vacances, les appels à l’aide se multiplient»99. On peut expliquer aux élèves les droits et obligations relatifs au mariage, au choix de leur partenaire – et méconnus par certains. En France, Mustapha Saadi, de l’association des juristes berbères est persuadé que les mariages forcés sont une des conséquences de la méconnaissance du droit français et, par des interventions dans les écoles, il tend à y remédier100. En France, il existe une brochure informant notamment les personnes menacées de mariage forcé de leurs droits. On y insiste sur l’importance de ne pas se faire confisquer ou détruire ses papiers 96 Zappi Sylvia, opcit. Femmes contre les intégrismes (FCI) (juin 2002), opcit, page 13. 98 Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. 99 Manço Altay in Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. 100 Roques Mireille (27 juin 2002), opcit, page 3. 97 94 d’identité et d’alerter un maximum de personnes de confiance de cette menace. Cela permet de se constituer un ensemble de preuves. La prévention revêt un rôle fondamental mais il convient d’éviter toute moralisation excessive. En Grande-Bretagne, l’intérêt du Gouvernement pour le mariage forcé n’a pas toujours été perçu de manière positive par certains : « Many of the older and middle-aged respondents in the Bangladeshi and Pakistani focus groups believe that the governement’s interest in forced marriages is motivated by a desire to halt the immigration of spouses »101. D’autre part, il convient d’être prudent (le port du voile ne signifie pas qu’une personne est menacée de mariage forcé) et d’autre part de ne pas stigmatiser les communautés concernées par une moralisation excessive : « There is a risk that the same outrage that established this body has created a venomous, moralistic fervor that the communities must be corrected or punished for their harmful practices. This type of reaction, by the dominant British culture in this instance, is most often counterproductive, as a community already fearing for its cultural survival tends to turn inward and reinforce the very practices that those on the outside are seeking to change »102. En effet, en les dénonçant et en les fustigeant, on peut les inciter à se replier sur elles-mêmes et provoquer dès lors un effet pervers. Des modules de formations et des lignes directrices Certains intervenants, certains professionnels de terrain ont déclaré se sentir démunis face à une pratique qu’on a tendance à considérer comme relevant de la sphère privée ou culturelle. Par exemple : «a seventeen-year-old woman who informed social services of her fears of being abducted by her family was told that nothing could be done»103. D’une part, ces acteurs devraient bénéficier d’une formation adaptée sur cette thématique. Ces formations devraient être dispensées aux services sociaux et d’aide aux enfants, aux professionnels de santé, aux enseignants, aux membres de la Police et de la Justice, aux agents de l’immigration, etc. Des centres de formation pour adultes devraient, en collaboration avec des experts, réfléchir à l’élaboration de modules spécifiques de formation. La problématique des mariages forcés pourrait aussi être inscrite à l’ordre du jour de certains programmes d’études (assistants sociaux, professionnels de santé, etc). D’autre part, les divers acteurs précisés ci-dessous devraient disposer de lignes directrices précises et coordonnées sur les conduites à adopter lorsqu’ils rencontrent un cas (ou une menace) de mariage forcé. Ces lignes directrices devraient être élaborées par des experts et grâce aux exemples de bonnes pratiques étrangères. En Grande Bretagne, par exemple, des lignes directrices ont été rédigées à l’attention des services sociaux et des services de police. On y insiste sur l’importance de la sécurité personnelle, de la confidentialité (tenter une réconciliation en évoquant le problème confié par la victime avec un des parents ou des membres de la famille peut mettre la victime en danger) et de fournir aux personnes des informations correctes sur leurs droits et sur le type d’aide auquel elles peuvent prétendre. Les situations suivantes sont distinguées : les individus craignant d’être forcés de se marier en Grande Bretagne ou à l’étranger ; un tiers faisant état d’une personne ayant été amenée à l’étranger en vue d’être 101 Samad Yunas and Eade John (2002) ,opcit, page 103. An-Na’im Abdullahi (2000), Forced marriage, Emory University, USA. Paper available on http://www.soas.ac.uk 103 INTERIGHTS (March 2000), opcit, 39 pages. 102 95 forcée de se marier ; un individu ayant été forcé de se marier ; un/e époux/se venue en Grande Bretagne de l’étranger. En France, des experts de la santé se sont penchés sur cette pratique : ils ont relevé : «Face à une menace de mariage forcé, les médecins et personnels sociaux devraient saisir le Parquet par un signalement ou convaincre les jeunes de le faire »104. Les enseignants ont aussi un rôle important à jouer : « Lorsque des élèves interrompent leurs études, il s’agirait de réagir rapidement et d’investiguer en urgence »105. Des lieux d’écoute, d’accueil dans le respect de la confidentialité et de la sécurité Les victimes de mariages forcés ont des besoins fondamentaux parmi lesquels : la confidentialité, la sécurité, des informations à propos de leurs droits et des aides disponibles voire éventuellement, un logement sûr, des revenus potentiels. Comme en Norvège, disposer d’une ligne téléphonique d’information sur les mariages forcés ou un numéro de téléphone d’urgence serait intéressant. En outre, certaines associations106 ont déjà une expertise particulière à propos des mariages forcés. Les victimes peuvent les considérer comme des acteurs dignes de confiance – par exemple, une personne peut craindre de contacter la Police : «The individual may be extremely frightened by contact with the police as they may have been told that the police will deport them and/or take their children from them. Extreme sensitivity to these fears is required when dealing with any individual from abroad (….) These circumstances make them particularly vulnerable »107 - et aisément accessibles. Il convient de les soutenir financièrement. Des collaborations, des coopérations Il n’existe pas de solution simple et unique à un phénomène aussi complexe. Au contraire, on peut plaider en faveur d’une approche coordonnée, transversale. Dans notre pays d’une part, il convient de favoriser la coordination des interventions entre les acteurs susceptibles de traiter des cas (ou des menaces) de mariage forcés. Ces acteurs devraient savoir où référer une victime demandant de l’aide. Les pouvoirs publics devraient également prendre des engagements pour lutter contre cette pratique de manière transversale. Au niveau transnational également, il conviendrait d’apprendre de l’étranger : il s’agirait éventuellement de diffuser des bonnes pratiques étrangères. La méconnaissance de ce qui se passe à l’étranger peut amener à faire double emploi, à ralentir le traitement de la victime et peut-être à mettre sa vie en danger. Il conviendrait de disposer de conventions diplomatiques et de réfléchir à l’existence d’une assistance spécifique pour les personnes ayant la double nationalité. Il serait intéressant aussi de disposer d’un point de contact dans les pays sensibles et d’amorcer un dialogue avec ces pays, avec des associations de ces pays. Henrion Roger (séance du 17 juin 2003), opcit, page 10. Femmes contre les intégrismes (FCI) (juin 2002), opcit, 48 pages. 106 En Belgique, on peut citer de manière non exhaustive : GAMS ; Collectif des Femmes ; Vie féminine ; Le Cactus ; La Voix des Femmes asbl ; Association 29 rue Blanche et les autres associations membres de la Commission des Femmes maghrébines. 107 Stobart Eleanor (document non daté), Dealing with cases of forced marriage, Published by the Association of Chief Police Officers and the Foreign & Commonwealth Office and the Home Office, 35 pages. 104 105 96 7. BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE Ouvrages, articles et publications consultés : AMARA Fadela (2003), Ni putes ni soumises, Editions La Découverte, Paris, 155 pages. AMODEO Margherita (mars 2001), « Les vies de Mulugojam, Weinishet,Tsigereda et Zeinab après un mariage précoce», Unicef, Ethiopie. Document disponible sur le site Internet : http://www.droitshumains.org AN-NA’IM Abdullahi (2000), Forced marriage, Emory University, USA. 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Arrondissement et/ou Province où l’établissement scolaire est situé (entoure la mention adéquate) : Bruxelles Capitale- Liège- Charleroi Réseau ordinaire en alternance Ce questionnaire est un des outils de travail d’une recherche que la Communauté française a souhaité réaliser sur le thème du mariage. C’est un sujet qui t’intéressera sans doute. La recherche vise à recueillir des informations sur les attentes qu’ont les jeunes de 15 à 18 ans à l’égard du mariage, de mieux connaître leurs opinions et aspirations sur la vie de couple. Le questionnaire qu’il t’est proposé de compléter est anonyme. Les données qui seront collectées seront traitées dans le respect le plus total de la confidentialité. Elles seront présentées sous la forme de statistiques et globalisées. Elles ne permettront pas non plus d’identifier l’établissement scolaire où l’enquête a été réalisée. Tu peux donc répondre en toute confiance aux questions qui te sont proposées. L’équipe de recherche te remercie d’avance pour ta collaboration. Ta filière : Général Technique Professionnel 4ème 5ème 6ème Ta classe : Cours à option choisis ou section choisie ? ……………………………………….……………………………………….…………………………….……………………………………….……………………… ……………….……………………………………….......................................................................................................................... Cours de langue : néerlandais anglais allemand espagnol Langue maternelle : ………………………………………………………………………………………………………………………………………… Autre(s) langue(s) parlée(s) : ………………………………………………………………………………………………………………………. Cours de morale/religion : Catholique Juive Protestante Orthodoxe Islamique Morale non confessionnelle 101 Première partie : les jeunes et le mariage 1. Dans l’avenir, comment imagines-tu ta vie de couple ? (1 seule réponse) 1. 2. 3. 4. vivre ensemble sans se marier vivre ensemble et se marier ensuite vivre ensemble à partir du mariage avoir un partenaire fixe sans cohabitation et sans mariage (chacun vit de son côté) 5. ne pas avoir de relation de couple stable 6. ne pas vivre de relation(s) amoureuse(s) 2. Personnellement, as-tu le souhait de te marier un jour ? 1. oui, civilement uniquement 2. oui, religieusement uniquement (si admis par le droit) 3. oui, civilement et religieusement 4. non 5. je ne sais pas encore Si religieusement, qui célébrera le mariage religieux ? le Prêtre l’Imam le Pasteur le Rabin autre Précise : ………………… 3. Si tu as répondu « oui » à la question 2, peux-tu nous dire pourquoi tu souhaites un jour te marier ? (maximum 5 réponses) 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. pour t’engager avec la personne que tu aimes pour faire l’expérience de la vie à deux pour avoir des relations sexuelles pour avoir des enfants pour avoir ton indépendance pour quitter le foyer familial pour faire plaisir à tes parents ou à ta famille pour respecter l’honneur de ta famille pour la sécurité et la stabilité financières pour la fête pour ne pas finir ta vie tout(e) seul(e) 4. Si tu as répondu « non » à la question 2, peux-tu nous dire pourquoi tu ne veux pas te marier ? (maximum 3 réponses) 1. 2. 3. 4. 5. 6. parce qu’un mariage, ce n’est qu’un bout de papier le mariage, ce sont des contraintes on perd toute sa liberté le mariage n’est plus à la mode il y a trop de divorces à l’heure actuelle parce que ce n’est pas important pour moi 102 5. Pour ton avenir personnel, de quoi rêves-tu ? (6 réponses maximum) Indique tes choix dans l’ordre du plus important (1) au moins important (6) 1. un compagnon/une compagne 2. un mari/une épouse 3. des enfants Si oui, combien ? ………………. 4. un travail épanouissant 5. des amis 6. la célébrité 7. un beau diplôme 8. un bon salaire 9. la pratique de hobbies 10. des voyages 11. une bonne santé 12. autre Précise : 6. Avec tes parents, t’arrive-t-il de parler : 1. d’amour ? Oui souvent Oui parfois Non jamais Si non, avec qui en parles-tu ? les copains/ copines avec personne 2. les profs/ éducateurs ta famille (frère, sœur, …) de sexualité ? Oui souvent Oui parfois avec quelqu’un d’autre exemple(s) : ………………………………… Non jamais Si non, avec qui en parles-tu ? les copains/ copines avec personne 3. les profs/ éducateurs ta famille (frère, sœur, …) du mariage ? Oui souvent Oui parfois avec quelqu’un d’autre exemple(s) : ………………………………… Non jamais Si non, avec qui en parles-tu ? les copains/ copines avec personne les profs/ éducateurs ta famille (frère, sœur, …) avec quelqu’un d’autre exemple(s) : ………………………………… 7. Sur le choix de ton/ta partenaire ou de ton/ta future(e) époux (se), penses-tu que tes parents ont un avis à donner ? 1. Non, je prendrai seul(e) ma décision 2. Oui, mes parents ont un avis à donner Si oui, a. je prendrai ma décision après en avoir parlé à mes parents b. mes parents décident mais j’ai mon mot à dire c. mes parents prennent seuls la décision. 103 8. Si tu devais composer un cocktail «Amour parfait», quels seraient les 6 ingrédients les plus importants de la recette pour que ton mariage réussisse ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. la communication l’amour la tolérance le respect la fidélité une répartition correcte des tâches ménagères 7. le partage de la même religion 8. 9. 10. 11. 12. les enfants la sécurité financière, l’argent une bonne entente sexuelle le partage de la même culture le partage des mêmes goûts, des mêmes hobbies Parmi les 6 « ingrédients » que tu as choisis, quel est pour toi celui qui est vraiment le plus important ? Indique le numéro de la réponse choisie : ……… 9. Quelles sont pour toi les qualités les plus importantes du/de la partenaire idéal(e) ? (maximum 7 réponses) 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. son âge son physique son diplôme son statut social sa réputation son argent le fait que cette personne soit de la même origine ethnique/culturelle que moi le fait que cette personne ait un travail le fait que cette personne partage les mêmes croyances religieuses que moi le fait que cette personne partage les mêmes conceptions philosophiques ou laïques que moi le fait que cette personne ait les mêmes opinions politiques que moi le fait que cette personne n’ait pas eu de relations sexuelles avant le mariage le fait que cette personne n’ait pas été mariée avant le fait que cette personne n’ait pas d’enfant autre quoi par exemple ? …… 10. Par rapport à la mixité, peux-tu envisager la possibilité de te marier avec une personne… d’une autre origine, culture que toi ? 1. oui sans problème 2. oui mais j’y réfléchirais avant parce que ça risque de poser des problèmes 3. non, c’est impossible pour moi d’une autre religion que la tienne ? 1. oui sans problème 2. oui mais j’y réfléchirais avant parce que ça risque de poser des problèmes 3. non, c’est impossible pour moi 104 11. Aujourd’hui, le mariage est une affaire personnelle, le choix de deux personnes qui s’aiment. Cependant, il existe quand même des situations où la fille ou le garçon sont obligés de se marier même s’ils n’en éprouvent pas l’envie. a. Crois-tu que ce type de situation existe en Belgique ? 1. oui, cela arrive souvent 2. oui, cela arrive parfois 3. non, cela n’arrive jamais b. Connais-tu, dans ton entourage, des personnes à qui c’est arrivé ? 1. oui, c’est arrivé à quelqu’un de ma famille 2. oui, c’est arrivé à des ami(e)s ou à des personnes que je connais bien 3. non, je ne connais personne à qui c’est arrivé 4. non, je ne connais personne mais j’en ai entendu parler Si tu as répondu oui, accepterais-tu de partager ton expérience avec un membre de l’équipe de recherche ? Oui Non Si oui, pourrais-tu compléter le formulaire accompagnant ce questionnaire et le remettre à ton professeur. c. A ton avis, quelles sont les deux raisons principales qui poussent les personnes en général à accepter ce type de mariage ? Et pour ceux que tu connais ? en général chez ceux que tu connais 1. parce que la fille est enceinte 2. parce qu’il/elle est forcé(e) par ses parents 3. pour obtenir de l’argent 4. pour obtenir des papiers de séjour 5. pour adopter un enfant 6. par tradition ou coutume 7. pour des raisons religieuses 8. autre raison. Précise : 105 2ème partie : Les jeunes et la vie… à deux Nous allons maintenant te demander ton avis sur les propositions suivantes. Essaie de t’imaginer dans quelques années et de répondre comme si ces situations t’arrivaient vraiment. Entoure alors la réponse qui te convient le mieux. 1. Ton/ta meilleur(e) ami(e) t’appelle pour aller prendre un verre mais tu dois d’abord demander l’autorisation de ton mari/ton épouse avant de prendre une décision. Tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 2. Ton/ta meilleur(e) ami(e) veut justement te voir pour te parler d’un problème sérieux : il/elle est très amoureux/se d’une fille/d’un garçon mais malheureusement ses parents ne sont pas du tout d’accord. En effet, ils veulent lui présenter une personne de leur entourage qui serait « un bon parti » et qu’ils considèrent bien mieux que le copain/la copine avec qui il/elle sort. Par crainte de décevoir ses parents, ton ami(e) t’annonce qu’il/elle va rompre et accepter de rencontrer l’autre fille/garçon. Tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 3. De nouveaux voisins s’installent à côté de chez toi. C’est une famille avec deux petits enfants, très sympas ! Elle, elle travaille dans une grosse entreprise et tu ne la vois presque jamais car elle rentre souvent très tard à cause de son boulot. Par contre, lui reste à la maison pour s’occuper des enfants. Il est « homme au foyer ». Par rapport à cette situation, tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 4. Ta cousine vient de se marier et elle déclare : « dans mon ménage, les tâches seront réparties équitablement et ce ne sera pas toujours moi qui devrai mettre la table, faire la vaisselle, le rangement,… car on ne vit plus dans une époque où les femmes sont les seules à s’occuper de la maison et des enfants ! ». Avec cette idée-là, tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 5. Tes amis pensent que les femmes mariées qui portent des minijupes pour sortir (faire ses courses, aller travailler,…) ne sont pas sérieuses et manquent de respect envers leur mari. Tu leur réponds que tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 6. Ta grande sœur est très amoureuse d’un garçon que tu connais très bien. Ils vont se fiancer mais un jour elle te raconte que pour une bêtise pas très grave (elle a oublié de l’appeler pour lui dire qu’elle rentrerait en retard de ses cours), il lui a donné une baffe et lui a fait une vraie scène de jalousie. Ta sœur a beaucoup de peine mais elle dit qu’il l’aime très fort car la jalousie est un signe d’amour. Tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 106 7. Une fille de ta classe s’habille souvent sexy pour aller à un rendez-vous. Le problème, c’est que quand elle sort avec un garçon, il pense souvent qu’elle veut aller plus loin (avoir une relation sexuelle avec lui). Comme elle refuse parce qu’elle ne se sent pas prête ou parce qu’elle n’a pas envie, elle a une réputation d’allumeuse. Tout le monde dit que c’est de sa faute, qu’elle l’a cherché car elle ne doit pas s’habiller comme ça ! Tu es : Tout à fait d’accord D’accord Pas d’accord Pas du tout d’accord 3ème partie : Caractéristiques socioculturelles Les questions qui suivent te sont posées afin de pouvoir prendre en compte certaines caractéristiques socioculturelles dans l’analyse des réponses. L’équipe de recherche souhaite savoir par exemple si les élèves de sexe féminin et de sexe masculin ont des opinions différentes ou encore si l’âge de l’élève va influencer ses réponses. Par exemple : a-t-on des aspirations qui diffèrent selon qu’on ait 15 ans ou 18 ans ? Comme l’ensemble du questionnaire, les informations provenant des réponses à ces questions sont tout à fait confidentielles. 1. Quel est ton sexe ? F M 2. Quel âge as-tu ? 3. Actuellement, est-ce que ton père et ta mère travaillent ? Moins de 15 ans plus de 20 ans 15-16 ans 17-18 ans 19-20 ans 3.1. Père 3.2. Mère 1. oui 2. non Si non, pourquoi ? a. demandeur d’emploi b. pensionné(e) ou pré pensionné(e) c. décédé(e) d. au foyer e. rentier(-ière) f. invalide g. inconnu h. autre précise : 4. Quel est l’emploi actuel (ou le dernier) de tes parents ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. ......................... 4.1. Père ......................... 4.2. Mère ouvrier(-ère) (secteur public ou privé) employé(e) (secteur public ou privé) cadre (secteur public ou privé) indépendant(e) artisan(e)/commerçant(e) indépendant(e) agriculteur(-trice) indépendant(e) profession libérale 107 7. 8. 9. 10. 5. indépendant(e) chef d’entreprise jamais eu de travail rémunéré inconnu autre emploi précise : ......................... ......................... Si tes parents travaillent, s’agit-il d’un emploi… 5.1. Père 5.2. Mère 1. à temps plein 2. à temps partiel 6. Quel est le niveau d’études le plus élevé (études achevées) atteint par tes parents? 6.1. Père 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. primaire secondaire inférieur secondaire supérieur supérieur non universitaire universitaire aucun autre précise : ......................... 6.2. Mère ......................... 7. Composition de la famille : quelles sont les personnes qui composent ton foyer familial (personnes qui vivent sous le même toit que toi) ? 1. père oui 2. mère oui 3. beau-père/belle-mère oui 4. frère(s) oui 5. soeur(s) oui 6. grand(s)-père(s) oui 7. grand(s)-mère(s) oui 8. oncle(s) oui 9. tante(s) oui 10. cousin(e)s oui Place occupée dans la fratrie (1er, 2ème, ...) ? ……………. non non non non non non non non non non Si oui, combien ? ……… Si oui, combien ? ..……. ……ENCORE UN TOUT GRAND MERCI POUR TA COLLABORATION ! 108 8.2 Annexe numéro 2 :le formulaire de partage d’expériences FORMULAIRE DE PARTAGE D’EXPERIENCES Je souhaite partager mon expérience à propos de situations où la fille ou le garçon sont obligés de se marier même s’ils n’en éprouvent pas l’envie. J’accepte de participer à un entretien qui se déroulera à l’école avec un membre de l’équipe de recherche. Je serai informé-e au préalable du moment où l’entretien se déroulera. L’entretien restera strictement confidentiel et anonyme. Il contribuera à compléter les résultats de la recherche. Aucune information qui en découlerait ne sera utilisée ou publiée de façon nominative. NOM : ………………………………………………..…………………………… Prénom : …………………………………………………… CLASSE : ……………… Etablissement scolaire ………………………………………………………………………………….. FORMULAIRE DE PARTAGE D’EXPERIENCES Je souhaite partager mon expérience à propos de situations où la fille ou le garçon sont obligés de se marier même s’ils n’en éprouvent pas l’envie. J’accepte de participer à un entretien qui se déroulera à l’école avec un membre de l’équipe de recherche. Je serai informé-e au préalable du moment où l’entretien se déroulera. L’entretien restera strictement confidentiel et anonyme. Il contribuera à compléter les résultats de la recherche. Aucune information qui en découlerait ne sera utilisée ou publiée de façon nominative. NOM : ………………………………………………..…………………………… Prénom : …………………………………………………… CLASSE : ……………… Etablissement scolaire ………………………………………………………………………………….. 109 8.3. Annexe numéro 3 : courriers de sensibilisation adressés aux établissements scolaires Le mariage : un choix pour la vie ? Nous vivons une période de changements et de mutations constants. Cela peut s’observer dans de nombreux domaines ; partout, le monde charrie des bouleversements et nous laisse, souvent, avec davantage de questions que de réponses. Parmi ces domaines qui bougent, celui des mœurs est à souligner comme ayant connu des évolutions impressionnantes au cours de ces dernières années. L’émancipation des femmes, leur combat pour l’égalité des droits, leur accès aux mondes des études et du travail, mais aussi la libération sexuelle, les débats éthiques ont façonné d’autres modèles familiaux : en marge des modèles classiques, notamment, nombreuses sont aujourd’hui les familles recomposées. Tous ces changements affectent notre vision de la famille classique et suscitent une série de débats. Comment mieux aider les familles monoparentales, par exemple, qui se sont multipliées par l’évolution des mœurs et la facilité qui est désormais celle des couples de se séparer ? Nombreuses aussi sont les familles qui, aujourd’hui, ne sont plus le fruit d’un mariage. Cette institution, jadis pilier de notre organisation sociale, est en perte de vitesse. Pour certains, elle reste une nécessité, un symbole fort d’amour et de consécration d’une union que l’on souhaite solide. Pour d’autres, elle est un phénomène désuet qui fige les situations et les sentiments, et qui n’est pas nécessaire. Quelle est, pour les jeunes, la perception du mariage ? Quel regard portent-ils sur ce choix de vie ? Quels sont les mots, positifs ou négatifs, auxquels songe la jeunesse d’aujourd’hui, dans sa diversité d’origines et d’opinions, lorsqu’elle entend parler de mariage ? Liberté, amour, union, obligation, enfermement, violence ? Don de soi, partage, famille, enfants ? Tel est le sens de la présente étude. L’avis, la perception des nouvelles générations nous paraissent essentiels. Parce que ce sont elles qui, demain, formeront des familles, éduqueront des enfants et choisiront un cadre pour ce faire. Parce que les mœurs de demain se forgent dans les sentiments, les aspirations et les rêves des jeunes d’aujourd’hui. Hervé HASQUIN Ministre-Président du Gouvernement de la Communauté française, en charge de l’Egalité des chances 110 Madame, Monsieur, Afin de mieux connaître et de mieux rencontrer les valeurs et aspirations des jeunes de 15 à 18 ans concernant le mariage et la vie de couple, la Communauté française a souhaité réaliser une recherche visant à recueillir et à analyser des opinions. L’école a été choisie comme l’endroit idéal pour entrer en contact avec les jeunes. En effet, c’est à l’école bien souvent que les premières relations amoureuses se nouent entre les jeunes. Elles ont lieu à un âge de plus en plus précoce, représentent un moment important et vont conditionner d’autres relations plus durables qui, dans la plupart des cas, aboutiront à un mariage ou une vie en couple. La recherche qui vous est présentée ici est une initiative du Ministre-Président du Gouvernement de la Communauté française en charge de l’Egalité des Chances et de la Direction de l’Egalité des chances qui ont confié à l’Université catholique de Louvain la mission scientifique de la réaliser. Cette mission est effectuée en collaboration avec le Centre d’Education à la Famille et à l’Amour, CEFA (asbl d’éducation permanente) et le Centre Femmes et Sociétés, CeFeSoc (GSW-asbl, service d’éducation permanente et de recherche appliquée). D’un point de vue pratique, un questionnaire a été élaboré. De manière anonyme, il sera demandé à des élèves des classes de 4ème, 5ème et 6ème année de l’enseignement ordinaire et de l’enseignement en alternance de remplir individuellement ces questionnaires. Afin de pouvoir compter sur la participation d’établissements scolaires intéressés par cette étude, ce courrier est adressé à toutes les écoles des entités sus-mentionnées. Il a pour but de solliciter la participation de votre institution à cette recherche. Il est souhaité que les directions d’école réagissent rapidement et confirment leur souhait de participer à l’étude, au plus tard le 30 janvier. Cette confirmation peut être effectuée par courrier électronique ([email protected]), télécopieur (02/413.20.75) ou encore en téléphonant (Yvan Martin : 02/413.30.65). Vous trouverez de plus amples informations concernant les modalités pratiques de l’étude dans l’annexe ci-jointe. 111 Titre : « Les jeunes et le mariage » Une étude menée à l’initiative du Ministre-Président du Gouvernement de la Communauté française en charge de l’Egalité des Chances et de la Direction de l’Egalité des chances Par l’Université catholique de Louvain En collaboration avec le Centre d’Education à la Famille et à l’Amour (CEFA) et le Centre Femmes et Sociétés (CeFeSoc). Objectifs de l’étude Afin de mieux connaître et de mieux rencontrer les valeurs et aspirations des jeunes de 15 à 18 ans concernant le mariage et la vie de couple, la Communauté française a souhaité réaliser une recherche visant à recueillir et à analyser des opinions. L’école a été choisie comme l’endroit idéal pour entrer en contact avec les jeunes. En effet, c’est à l’école bien souvent que les premières relations amoureuses se nouent entre les jeunes. Elles ont lieu à un âge de plus en plus précoce, représentent un moment important et vont conditionner d’autres relations plus durables qui, dans la plupart des cas, aboutiront à un mariage ou une vie en couple. L’école est sans aucun doute le lieu privilégié où une préparation à la vie affective, sexuelle et familiale des jeunes adultes de demain pourrait être initiée. Effectivement, l’école est le lieu où l’égalité des chances de tous les élèves peut s’épanouir et tout particulièrement l’endroit où une réflexion sur l’égalité entre femmes et hommes peut se développer. Cette égalité acceptée et vécue dans tous les foyers de demain serait une des meilleures garanties pour que règnent l’équilibre, le respect et l’harmonie au sein des familles qui constitueront la société future. D’autre part, si la relation qui s’établit entre les jeunes «candidats à une vie commune» est généralement amoureuse et librement choisie, il arrive par contre que le choix du partenaire, du conjoint, soit orienté par les souhaits parentaux voire parfois imposé. Modalités pratiques de réalisation D’un point de vue pratique, un questionnaire a été élaboré. De manière anonyme, il sera demandé aux élève de classes de 4ème, 5ème et 6ème année de l’enseignement ordinaire et de l’enseignement en alternance de remplir individuellement ces questionnaires. Il est souhaité de réunir entre 1200 et 1500 questionnaires sur base d’un échantillon de 20 institutions scolaires dispensant l’enseignement de niveau secondaire. Un premier choix méthodologique a été fait par l’équipe de recherche pour la localisation géographique de l’échantillon d’écoles. Les enquêtes auront lieu dans les entités de Bruxelles Capitale, Liège et Charleroi. 112 Afin de pouvoir compter sur la participation d’établissements scolaires intéressés par cette étude, ce courrier est adressé à toutes les écoles des entités sus-mentionnées. Il a pour but de solliciter la participation de votre institution à cette recherche. Il est souhaité que les directions d’école réagissent rapidement et confirment leur souhait de participer à l’étude, au plus tard le 30 janvier. Cette confirmation peut être effectuée : par courrier électronique : [email protected] par télécopieur : 02/413.20.75 en téléphonant :Yvan Martin : 02/413.30.65 Les établissements qui seront retenus pour participer à l’expérience seront choisis en fonction de l’ordre d’arrivée des réponses en tenant compte de la répartition proportionnelle entre les entités géographiques choisies. Ensuite des contacts seront pris par l’équipe de recherche pour préciser les modalités de la mise en œuvre de l’étude. Il est prévu d’envoyer une centaine de questionnaires à chaque école participante, et ce afin qu’au moins une classe de chaque année puisse participer (4ème, 5ème, 6ème). Il est également prévu et de solliciter qu’un/une enseignant-e puisse se charger de présenter l’initiative aux élèves concernés et de les accompagner pendant qu’ils répondent aux questions. La collecte des données devra être effectuée au cours du mois de février prochain de préférence avant les vacances de carnaval. Les données ainsi collectées seront traitées par l’équipe de recherche le plus rapidement possible afin de communiquer, aux écoles, une synthèse des résultats avant la fin de l’année scolaire. Il est envisagé de proposer aux établissements participants à l’étude de bénéficier d’une séance de réflexion et échanges en lien avec le thème du mariage et les réponses fournies par l’ensemble des jeunes interrogés. Ensuite, les résultats complets de la recherche seront publiés. Si vous souhaitez prendre contact avec les responsables du projet à la Communauté française pour avoir plus d’informations, vous pouvez contacter la responsable de la Direction de l’Egalité des Chances, Alexandra Adriaenssens : 02/413.26.42 ou, par courriel : [email protected]. 113 8.4 Annexe numéro 4 : Module d’animation pour les entretiens de groupe LES JEUNES ET LE MARIAGE MODULE D’ANIMATION Partie 1 : le mariage aujourd’hui 1. Présentation du sujet Durée : 5 minutes Les animatrices se présentent, présentent la recherche et expliquent le but et les objectifs de l’atelier. S’il y a lieu, on demande aux élèves de se présenter et d’émettre un premier commentaire ou une réflexion qui leur vient en tête lorsqu’on leur parle de mariage (au sens général). « Pour moi, le mariage c’est… » Définition : En principe, le mariage est une institution par laquelle deux futurs époux décident de s'unir en associant leur existence. Ils créent une communauté de vie qui, en principe, est destinée à ne pas être dissoute. Consigne : On leur demande de jeter un œil au questionnaire et de réfléchir au 3 premières questions. 1. Dans l’avenir, comment imagines-tu ta vie de couple ? 2. Si tu as répondu « oui » à la question 2, peux-tu nous dire pourquoi tu souhaites un jour te marier ? 3. Si tu as répondu « non » à la question 2, peux tu nous dire pourquoi tu ne veux pas te marier ? Débat sur les jeunes et le mariage : on présente au groupe les résultats de notre enquête et en comparaison, on leur présente les dernières statistiques nationales. On leur demande de commenter les résultats et de donner leur avis. ENQUETE (résultats provisoires au 26/04/04) 1. Dans l’avenir, comment imagines-tu ta vie de couple ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. vivre ensemble et se marier ensuite vivre ensemble à partir du mariage vivre ensemble sans se marier un partenaire fixe sans cohabitation et sans mariage (chacun vit de son côté) pas de relation de couple stable ne pas vivre de relation(s) amoureuse(s) 62.1 20.8 13.5 1.3 1.2 0.9 114 2. Si tu as répondu « oui » à la question 2, peux-tu nous dire pourquoi tu souhaites un jour te marier ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. pour t’engager avec la personne que tu aimes pour avoir des enfants pour faire l’expérience de la vie à deux pour ne pas finir ma vie tout(e) seul(e) pour avoir des relations sexuelles pour avoir ton indépendance pour la sécurité et la stabilité financières pour respecter l’honneur de ta famille pour la fête pour quitter le foyer familial pour faire plaisir à tes parents ou à ta famille 31.8 21.7 12.4 9 5.7 4 3.9 3.6 3.4 3.1 1.6 3. Si tu as répondu « non » à la question 2, peux tu nous dire pourquoi tu ne veux pas te marier ? 7. 8. 9. 10. 11. 12. parce que ce n’est pas important pour moi il y a trop de divorces à l’heure actuelle parce qu’un mariage, ce n’est qu’un bout de papier le mariage, ce sont des contraintes on perd toute sa liberté le mariage n’est plus à la mode 30 27 26 8 8 1 Point de comparaison Les dernières statistiques de l'INS (2003) confirment une hausse des divorces en Belgique depuis 4-5 ans. Le nombre de mariages, lui, se stabilise. Par rapport à 1997 où 47.759 mariages ont eu lieu, l'année 2003 est plutôt "mauvaise" avec 41.805 mariages. Néanmoins, les chiffres sont supérieurs à l'année précédente (40.434 mariages). Pour les mêmes années, les divorces ont quant à eux augmenté de 26.748 en 1997 à 31.373 en 2003. Pour 4 mariages, on comptait l'année passée 3 divorces : en 2003, 41.805 mariages ont été célébrés, et 31.373 divorces prononcés. A Bruxelles, les divorces sont même légèrement supérieurs aux mariages. D'autre part, le "taux d'activité", tant des mariages que des divorces, est bien supérieur dans la capitale que dans les autres régions. A Bruxelles, ont eu lieu 5,34 mariages et 5,67 divorces pour 1000 habitants. En Flandre et en Wallonie, on a compté, pour 1000 habitants, moins de 4 mariages et 2,7 divorces. Questions relevantes : Qu’en pensez-vous ? Y a-t-il, selon vous, des raisons qui pourraient expliquer cette évolution ? Peut-on parler d’évolution dans les couples d’aujourd’hui ? Quoi par exemple ? (pistes : le partage des tâches ménagères, l’évolution professionnelle des femmes, les congés parentaux,…) 115 Explication Les valeurs qui fondent le mariage aujourd’hui ne sont plus celles d’avant. De nos jours, les hommes et les femmes veulent y trouver l’amour. Cette volonté d’amour dans le mariage est relativement nouvelle, en effet, les mariages arrangés entre les familles étaient, il y a peu, la règle habituelle. A présent, les hommes et les femmes cherchent un épanouissement personnel, affectif et aussi sexuel. Avant la révolution tranquille des années 60, le couple figurait parmi les « institutions sacrées ». Des changements sociaux importants ont progressivement transformés les relations ce couple. La durée de vie augmentant, la durée des études, les progrès de la médecine, l’entrée des femmes sur le marché du travail, le partage des tâches, l’âge des époux, etc. Tous ces facteurs influent sur notre conception du mariage. On ne se marie presque plus pour faire des enfants. Nous avons une conception nouvelle du couple et de la vie. Aujourd’hui, les jeunes générations se marient plus tard (études prolongées,…) et moins. Il y a plus de célibataires et de cohabitants de longue durée. Il est également remarqué que les couples divorcent plus et de plus en plus tôt. Avant le couple n’était pas vraiment le lieu de « l’amour- passion » : le couple se constituait moins pour s’aimer que pour survivre, pour s’entraider, unir ses forces, ses intérêts, voire ses patrimoines. Bien entendu, la réussite d’un couple ne repose pas seulement sur le sentiment. D’après les réponses au questionnaire, on peut noter que la tolérance, le respect et la communication de l’autre sont considérés comme étant des éléments importants à la survie du couple. Il y a bien entendu d’autres facteurs comme le partage des tâches, maintenir une certaine intimité etc. En 1998, une enquête « Noir, jaune, blues : Radioscopie de la famille belge francophone » allait déjà dans ce sens. Consigne : Pour faire la transition avec la partie suivante, on leur demande de regarder la question 4 et la question 5). 116 Partie 2 : Les jeunes et leurs attentes ENQUETE (résultats provisoires au 26/04/04) 4. Pour ton avenir personnel, de quoi rêves-tu ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. des enfants une bonne santé un bon salaire un mari/une épouse des amis un travail épanouissant un beau diplôme un compagnon/une compagne des voyages la pratique de hobbies la célébrité autre 13.5 13 12 11.2 10.8 10.5 7.2 5.5 5.5 4.1 1.6 0.8 5. Si tu devais composer un cocktail «Amour parfait», quels seraient les 6 ingrédients les plus importants de la recette pour que ton mariage réussisse ? 11. l’amour 12. la fidélité 13. la communication 14. le respect 15. les enfants 16. une bonne entente sexuelle 17. la sécurité financière, l’argent 18. la tolérance 19. le partage des mêmes goûts, des mêmes hobbies 20. une répartition correcte des tâches ménagères 21. le partage de la même religion 22. le partage de la même culture 15.8 15 14.5 13.9 9.3 9.2 6 5.9 3.7 2.7 2.6 1.4 En étant attentifs aux résultats présentés, parlons à présent des aspirations et des conceptions relevées parmi les jeunes de manière générale… Que pensez-vous de ces résultats ? Etes-vous d’accords/ pas d’accords ? Si vous ne deviez choisir qu’un seul élément pour favoriser la réussite d’un couple, lequel serait-ce ? Explication La première rencontre, les premiers baisers et les sorties en amoureux sont souvent très importants. Lorsqu’on est amoureux, plus rien d’autre n’a d’importance, on a le sentiment d’être sur un petit nuage et voir la vie en rose. Vivre une relation amoureuse avec une personne ne signifie pas ne former qu’une seule et même personne, ayant les même envies et les mêmes désirs. Il ne faut pas oublier qu’un couple est formé de deux individus autonomes et différents. 117 Dans toute relation humaine, le respect de l’autre mais aussi de soi-même est indispensable. Respecter l’autre, c’est respecter ses choix, les désirs, les sentiments et la manière d’être de l’autre. Me respecter, c’est refuser que l’autre ne respecte pas mes choix, mes désirs, mes sentiments et ma façon d’être. Si l’un des deux partenaires ne veut pas faire certaines choses, l’autre ne peut pas l’y forcer ou l’obliger. Pouvoir dire NON et pouvoir accepter le NON de l’autre sont les conditions du respect de soi et du respect de l’autre. Consigne : Question suivante de l’enquête : on leur demande d’y répondre individuellement et ensuite on passe éventuellement à l’exercice de groupe ENQUETE (résultats provisoires au 26/04/04) 6. Quelles sont pour toi les qualités les plus importantes du/de la partenaire idéal(e) ? 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29. 30. son physique son âge le fait que cette personne ait un travail le fait que cette personne n’ait pas d’enfant le fait que cette personne n’ait pas été mariée avant son diplôme son statut social autre sa réputation le fait que cette personne partage les mêmes croyances religieuses que moi le fait que cette personne soit de la même origine ethnique/culturelle que moi son argent le fait que cette personne n’ait pas eu de relations sexuelles avant le mariage le fait que cette personne partage les mêmes conceptions philosophiques ou laïques que moi le fait que cette personne ait les mêmes opinions politiques que moi 15.9 11.3 10.2 9.5 8.5 6.8 6.3 6.3 6.1 4.7 3.4 3.3 3.3 2.7 1.8 Exercice en équipe (si groupe mixte et supérieur à 10-12 personnes) Durée : 5 minutes Consigne : On demande à la classe de se mettre en équipe de 5 à 6 personnes, et demande aux filles de dresser le portrait de l’homme idéal (caractéristiques physiques, psychologiques, etc.) et aux garçons de dresser le portrait de la fille idéale. Rôle des formatrices : • Faire rapidement le tour des équipes et répondre aux questions • Assurer la discipline s’il y a lieu Discussion sur la relation de couple idéale et les attentes 1. on présente les résultats de l’enquête 2. On reprend les réponses des équipes (si l’exercice a pu être réalisé) et on les inscrit au tableau. On démontre le lien qui peut exister entre la « notion de stéréotype » et la notion de partenaire idéal. On anime une discussion en s’inspirant de quelques unes des questions suivantes : Canevas de questions : • Croyez-vous au partenaire idéal? • Comment décririez-vous la relation parfaite? • Quelles sont les principales qualités que vous voudriez retrouver chez votre partenaire ou chez vos amis de sexe opposé? • Avez-vous des exemples près de vous qui vous font croire que la relation idéale est possible? 118 • Pensez-vous que les attentes des garçons sont les mêmes que les attentes des filles face au sexe opposé dans une relation? (amicale, affective ou amoureuse) • Existe-t-il des ressemblances entre les attentes des hommes et les attentes des femmes? • Lesquelles retrouve-t-on des deux côtés? • Pourquoi les retrouve-t-on des deux côtés? (Suggérer que ces attentes, puisqu’on les retrouve des deux côtés, ne correspondent pas à des attentes stéréotypées mais plutôt à des exigences de la relation de couple ou des droits fondamentaux. Ex. respect, amour, etc.) • Que doit-on faire avec nos attentes? • Doit-on les nier, les oublier, les faire respecter à tout prix, ou alors y réfléchir, les questionner et tenter de mieux en comprendre le sens et la raison? • À partir de quand nos attentes peuvent-elles devenir nuisibles? • Ex. lorsqu’elles deviennent irréalistes, trop nombreuses, qu’elles ne tiennent pas compte de la personnalité de l’autre, lorsqu’elles nous empêchent de respecter l’autre Durée : 10 minutes Fonction de l’activité : Introduction à la notion d’attentes et de rôles sexuels Rôle des animatrices: • Poser les questions de façon claire • Susciter la participation du groupe • Être attentif aux propos de chacun Explication Une attente est un souhait, une espérance, un désir, une anticipation. Nos attentes sont directement reliées à nos besoins affectifs, matériels, sociaux, psychologiques. Elles dépendent aussi de ce qu’on a appris et sont, de ce fait, reliées à notre vécu, notre passé. Le couple nous met face à un challenge : accueillir “l’autre” qui arrive avec son histoire passée, ses identifications à sa famille et à ses croyances. Deux mondes ont à se recevoir et à s’harmoniser pour créer un nouveau monde : le couple. Des personnes ayant été grandement valorisées, écoutées, etc. auront tendance à s’attendre à retrouver ces mêmes éléments dans leur vie de couple. Au contraire, des personnes ayant manqué de certaines choses auront besoin de les recevoir dans leur vie de couple. Il est important de faire attention aux attentes reliées aux stéréotypes, par exemple : qu’un homme ne doit pas pleurer, doit être invulnérable, etc, peut constituer une attente. Il faut « briser » le tabou de ces images. On s’attendra à ce que notre conjoint ne pleure jamais, nous défende, soit fort, etc. Donc, il est très normal d’avoir des attentes dans nos relations affectives et amoureuses. Il faut prendre conscience de nos attentes et ne pas avoir peur de les évaluer, de les questionner. Les hommes comme les femmes se voient attribuer des rôles dans notre société. Pourtant le comportement qu’on affiche peut être en opposition avec ce que l’on ressent intérieurement. Par exemple, dans le cadre d’un couple, l’homme devrait s’occuper de sa femme, être rassurant, protéger sa partenaire, être attentif, fort, débrouillard, travailleur, motivé, indépendant, fidèle, doit pouvoir gérer le ménage etc. Dans les rôles que l’on pourrait attribuer à la femme, celle-ci devrait être attentive, attentionnée, aimante, sexy, indépendante, fidèle, bonne cuisinière, bonne mère de famille etc. Ces rôles pourtant, ne sont parfois plus d’actualité mais on peut remarquer qu’ils sont encore bien encrés dans notre inconscient. Cela pourrait expliquer que dans certains couples une fois qu’on est marié, on adopte des comportements de « bonne épouse ou de bon époux », par exemple : on ne va plus aussi souvent au ciné, on fait plus souvent les pantouflards, on se laisse plus aller au niveau vestimentaire (cfr, pyjama moltonné et short troué, training baillant, on se présente en tant que « Madame et Monsieur …un 119 tel », on ne danse plus avec d’autres partenaires, lorsqu’on est invité chez des amis, c’est souvent en couple et non plus seul, on évite surtout de se faire séduire etc…). Je vous rassure, ceci n’est pas systématique, nombreux couples ne changent pas leur mode de fonctionnement une fois marié. D’ailleurs, certains couples non mariés peuvent déjà réagir de telle manière, le tout est de voir si cela convient au deux partenaires. La notion de couple ou de relation idéale : Dans le fond, le partenaire idéal n’est rien de plus qu’une image que l’on se fait de quelqu’un qui répondrait à tous nos besoins et nos attentes. Toutefois, cela est impossible. Aucun individu ne peut répondre à tous nos besoins. Par contre, le fait d’être conscient de ses attentes, de ses besoins peut nous aider à mieux les exprimer. Bref, c’est humain d’avoir des attentes dans notre vie de couple et sexuelle. Il ne s’agit surtout pas de les nier mais plutôt de tenter de les regarder de plus près, de les comprendre et de communiquer là-dessus. 120 Partie 3 : le mariage forcé Pour introduire la thématique, les formatrices reviennent sur la partie de l’enquête qui concernait les mariages forcés et tracent le cheminement mené jusqu’à la rencontre avec le groupe, insistant au passage sur le respect de la confidentialité. Q.11 de l’enquête Aujourd’hui, le mariage est une affaire personnelle, le choix de deux personnes qui s’aiment. Cependant, il existe quand-même des situations où la fille ou le garçon sont obligés de se marier même s’ils n’en éprouvent pas l’envie. a. Crois-tu que ce type de situation existe en Belgique ? 1. oui, cela arrive souvent 2. oui, cela arrive parfois 3. non, cela n’arrive jamais b. Connais-tu, dans ton entourage, des personnes à qui c’est arrivé ? 1. 2. 3. 4. oui, c’est arrivé à quelqu’un de ma famille oui, c’est arrivé à des ami(e)s ou à des personnes que je connais bien non, je ne connais personne à qui c’est arrivé non, je ne connais personne mais j’en ai entendu parler c. A ton avis, quelles sont les deux raisons principales qui poussent les personnes en général à accepter ce type de mariage ? Et pour ceux que tu connais ? 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. en général parce que la fille est enceinte parce qu’il/elle est forcé(e) par ses parents pour obtenir de l’argent pour obtenir des papiers de séjour pour adopter un enfant par tradition ou coutume pour des raisons religieuses autre raison. Précise : chez ceux que tu connais Guide de questions 1. Description de la personne à qui on a imposé un mariage : âge au moment des faits sexe caractéristiques de sa famille appartenance culturelle origines (pays, langues parlées, religion, etc.) situation personnelle (ex.: était-elle encore à l’école ?, avait-elle terminé ses études ?) 121 2. Déroulement des faits Comment les faits se sont-ils déroulés ? Dans quel contexte : quel pays, quel environnement ? (ex. : vacances hors de la Belgique ?, en Belgique, etc.) 3. Connaissance du cas (mise au courant de la situation) Comment l’avez-vous appris ? Qui vous en a parlé ? 4. Impact sur le mode de vie de la personne Sur la fréquentation scolaire (A-t-elle arrêté de suivre un enseignement ?) Sur la fréquentation de ses amis/amies, copains/copines ? (A-t-elle été empêchée de les revoir ?) Sur les liens avec sa famille ? (Ont-ils été modifiés ? Comment ?) 5. Motif(s) pour le(s)quel(s) on a imposé le mariage ? Raisons ? Volonté des parents à laquelle on doit toujours se plier ? Tradition familiale ou du pays d’origine ? Seule façon d’échapper au contrôle familial de « gagner son indépendance » ? Autre raison ? 6. Vécu de la situation et réactions A-t-elle refusé le mariage ? Si oui comment ? S’est-elle rebellée ? A-t-elle essayé, par exemple, de s’échapper de la maison familiale ? A-t-elle essayé de faire intervenir quelqu’un pour l’aider à échapper au mariage ? Y a-t-il eu des pressions ? (forme, conséquences,…) Des menaces ? 7. Avis et recommandations Qualification du mariage ? (mariage blanc, mariage forcé, mariage arrangé, …) Fréquence ? Ce type de situation se produit – elle souvent ou rarement dans votre environnement scolaire, familial ou amical ? Solutions possibles pour éviter le mariage forcé ? Que faudrait-il faire ? Que ferais-tu à leur place ? Pensez-vous que les autorités publiques (gouvernants, législateurs, etc.) doivent faire quelque chose pour éviter que les mariages forcés ne se produisent ? 122 8.5 Annexe numéro 5 : le questionnaire supplémentaire sur les mariages forcés (témoignages écrits) et les témoignages RECHERCHE « LE MARIAGE - UN CHOIX POUR LA VIE ?» — PARTAGE D’EXPERIENCES — Tu as aimablement accepté de contribuer à compléter les informations récoltées lors de l’enquête par questionnaire effectuée en mars dernier en apportant un témoignage sur tes expériences relatives aux situations où des jeunes sont forcés de se marier alors qu’ils n’ont n’en ont pas l’envie. L’équipe de recherche te remercie dès à présent pour ta précieuse collaboration. Comme tu as souhaité te tenir à un témoignage écrit, les questions que tu trouveras ciaprès t’aideront à relater et à expliciter la/les situation(s) que tu connais. Tu trouveras également une enveloppe, dans laquelle nous te demandons de glisser le questionnaire, que tu remettras à ton professeur, une fois l’enveloppe fermée puisqu’ il s’agit toujours de données confidentielles. Tu es invité-e à répondre en écrivant le plus lisiblement possible. Si l’espace prévu pour chaque réponse n’est pas suffisant tu peux également l’écrire au verso de la feuille. Prière dans ce cas de noter à chaque fois le numéro de la question à laquelle tu réponds. 1. Pourrais-tu décrire avec le plus de précisions possibles les caractéristiques de la personne à qui un mariage a été imposé ? • son âge au moment des faits : ………………………… • son sexe : …............... • les caractéristiques de sa famille (cite les traits les plus frappants) ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • appartenance culturelle, ses origines (pays, langues parlées, religion, etc.) ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • sa situation personnelle (ex. : était-elle encore à l’école ?, avait-elle terminé ses études ?) ……………………………………………………………………………………………………………………………………… …………. 123 ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………. 2. Comment les faits se sont-ils déroulés ? Dans quel contexte : quel pays, quel environnement ? (ex. : vacances hors de la Belgique ?, en Belgique, etc.) …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 3. Comment as-tu été mis-e au courant de cette situation ? Qui t’en a parlé ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 4. Selon toi est-ce que ce mariage a eu un impact sur le mode de vie de la personne ? • la fréquentation de l’école. A-t-elle arrêté de suivre un enseignement ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • la fréquentation de ses amis/amies, copains/copines ? A-t-elle été empêchée de les revoir ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • les liens avec sa famille ? Ont-ils été modifiés ? Comment ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 5. A ton avis, quel(s) était (étaient) le(s) motif(s) pour le(s)quel(s) on a imposé le mariage ? 124 …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. Penses-tu que cette personne concernée a subi des pressions ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. A-t-elle été l’objet de menaces ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 6. De quelle manière la personne a-t-elle vécu la situation ? Quelles réactions a-t-elle eues ? • A-t-elle accepté parce que c’était : • la volonté des parents à laquelle on doit toujours se plier ? …………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………… ……………………. • la tradition familiale ou du pays d’origine …………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • la seule façon d’échapper au contrôle familial de « gagner son indépendance » …………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • autre raison …………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 125 • A-t-elle refusé le mariage ? Si oui comment ? S’est-elle rebellée ? A-t-elle essayé, par exemple, de s’échapper de la maison familiale ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • A-t-elle essayé de faire intervenir quelqu’un pour l’aider à échapper au mariage ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 7. Et toi, que penses-tu de tout cela ? Quelle est ta position personnelle ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • Comment qualifierais-tu ce mariage ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. • Que ferais-tu si tu te retrouvais dans cette situation ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….…………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………. 126 8. Dirais-tu que ce type de situation se produit dans ton environnement scolaire, familial ou amical : très souvent, souvent, rarement ou très rarement ? Très souvent • Dans l’environnement familial • Dans l’environnement scolaire • Dans l’environnement amical Souvent Rarement Très rarement 9. Penses-tu que les autorités publiques (gouvernants, législateurs, etc.) doivent faire quelque chose pour éviter que les mariages forcés ne se produisent ? Que faudraitil faire ? Que ferais-tu à leur place ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………….……………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………….…………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………….………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………….……………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………….…………………………………………… ………………………………………………………………………………………………………….………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………………. 10. Commentaires libres. Souhaites-tu ajouter quelque chose encore ? …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………….………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………….……………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………………….………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………….……………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………….…………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………….………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………….……………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… L’équipe de recherche te remercie pour ton témoignage. Tu seras informé-e des résultats de la recherche. 127 Témoignage 1 Le présent témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 18 ans issue d’une famille marocaine divorcée avec 5 enfants. Tous sont de culture islamique. La jeune fille travaille dans un supermarché et ne va plus à l’école. Elle a mis au courant le jeune qui témoigne ici en lui parlant de sa situation, par ailleurs, elle a rompu les liens avec ses amis : elle ne les voit plus. Selon le témoignage, elle a sûrement subi des pressions et a accepté de conclure le mariage en raisons de la volonté forte (volonté à laquelle on doit toujours se plier) de ses parents mais aussi du poids d’une tradition familiale lourde justifiée en partie par le fait de leurs origines. Elle a accepté l’union sans résistance et n’a donc pas essayé de s’y dérober ou de faire intervenir un tiers. Avis du jeune interrogé: le fait de ne pas appartenir au même cadre culturel lui empêche de s’exprimer et de prendre position. Cependant, il qualifie ouvertement le mariage de mariage arrangé. Il ne sait pas comment il réagirait dans semblable situation et d’un point de vue général semble dire que ce type de situation se produirait très rarement dans son environnement personnel mais très souvent dans l’environnement familial, scolaire ou amical extérieur. Témoignage 2 Ce témoignage porte sur le vécu d’un garçon de 18 ans issu d’une famille belge divorcée marquée par des problèmes familiaux. Les faits se sont déroulés alors qu’il était en rhéto, lors de vacances d’été, pour résoudre des problèmes inter- familiaux (mariage organisé). Il a mis au courant le jeune qui témoigne en lui parlant de sa situation. Il continue à aller à l’école, cependant il y a eu une véritable séparation avec son groupe d’amis/amies. Les parents ont été pointés du doigt. Le garçon a subi de fortes pressions sans toutefois en arriver à des menaces. Il a accepté le mariage sans rébellion mais a cependant tenté de faire intervenir la personne qui témoigne pour l’aider à échapper à la situation. Rien ne nous permet de tirer des conclusions quant aux autres raisons qui ont motivé son acceptation (poids de l’autorité, de la culture, des origines familiales,…) Avis du jeune interrogé: il désire ne pas intervenir dans ce type de situation et par conséquent ne prend pas position. Il qualifie lui-même le mariage de mariage organisé, arrangé et explique que si pareille situation devait lui arriver, il en parlerait à ses amis. Enfin, de manière générale, il estime que ce type de mariage se produit très souvent et ceci, invariablement dans les milieux (famille, école, amis). Témoignage 3 Le présent témoignage porte sur le vécu d’une jeune femme de 22 ans issue d’une famille italienne catholique où l’autoritarisme des parents est à souligner. La jeune femme a terminé ses études, ce qui explique que le mariage n’a pas interféré dans son cursus scolaire. Par contre, les fréquentations ont subi les frais de ce mariage, la jeune femme ne voyant plus ses ami(e)s. Pour ce qui est de l’impact sur les liens familiaux, rien ne nous permet de conclure à une quelconque rupture ou à certaines modifications. Les faits se sont passés en Belgique pendant les vacances, à la connaissance directe du jeune qui témoigne. Il semblerait que des intérêts familiaux aient été en jeu. Selon le témoignage, la JF a probablement subi des 128 pressions sans pour autant faire l’objet de menaces. Bien qu’elle ait tenté d’échapper à l’union en se réfugiant chez une amie, in fine, elle a accepté de conclure le mariage en raisons de la volonté forte de ses parents mais aussi du poids d’une tradition familiale lourde justifiée en partie selon le jeune qui témoigne par le fait de leurs convictions religieuses (catholiques pratiquants). Avis du jeune interrogé: il se pose en affirmant que la jeune femme devrait pouvoir mener la vie qu’elle souhaite. Il qualifie ce type de mariage de mariage truqué et impropre. Placé dans les mêmes circonstances, il s’opposerait au mariage ou prendrait la fuite. Enfin, il estime que ce type de mariage se produit souvent dans l’environnement familial, rarement à l’école et très rarement dans son environnement amical. Témoignage 4 Ce témoignage concerne une jeune fille âgée de 16-17 ans issue d’une famille vivant au Yémen. Sa famille est arabe, de religion islamique. Son père était très autoritaire. La jeune femme était étudiante à l’époque. Son mariage a été conclu, sans son accord, durant ses vacances scolaires au Yémen. Suite à cet évènement, la personne a cessé de fréquenter l’école et n’a plus donné de nouvelles à son entourage. Le fait d’être fille unique et en âge de se marier semble être la raison pour laquelle elle a été mariée. Il semble qu’elle ait subi des pressions et des menaces de la part de son père afin de l’obliger à s’unir avec un homme qu’elle ne connaissait pas. La jeune femme a tenté de se rebeller en voulant mettre fin à ses jours. Malgré cela, le mariage fut conclu. Avis du jeune interrogé: il se dit indigné par cette pratique et la qualifie de mariage forcé mais parallèlement affirme que la volonté des parents est prioritaire à celle des enfants. Il qualifie néanmoins ce mariage d’injuste. Il précise que cette pratique est courante et qu’elle est très mal vécue par les jeunes filles. Il estime qu’il aurait tout fait pour ne pas vivre la même situation et que les parents ne devraient pas imposer le mariage à leurs enfants. Toutefois, il relate que dans « leur » religion, il est normal qu’une fille dès l’âge de la puberté soit mariée. Il précise enfin que malgré l’importance de ne pas oublier ses origines et de respecter la tradition, il est primordial de consulter les personnes quant aux projets qui les concernent directement. Témoignage 5 Le présent témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 16 ans de nationalité grecque, à qui on a imposé un homme de 20 ans son aîné. Cette personne est issue d’une famille orthodoxe, parlant le français et le grec. Le jeune qui témoigne raconte que cette personne n’avait pas terminé ses études au moment des faits et que le mariage s’est conclu en Belgique. La jeune fille lui en a parlé et, à la suite de son mariage, elle a arrêté ses études, de même que ses fréquentations. Le jeune qui témoigne n’a plus eu de nouvelles par après. Il précise que la jeune fille a accepté de se marier par respect de la volonté parentale et de la tradition. Avis du jeune interrogé: il estime que vu l’évolution actuelle au niveau des mariages, il est inacceptable de se marier dans ces condition et que l’on a le droit de choisir son futur partenaire tout en prenant en compte l’opinion des parents. Il précise qu’il refuserait de se marier et demanderait de l’aide si cette situation devait lui arriver. Enfin, il pense qu’il faudrait adopter une loi interdisant les mariages arrangés et forcés. 129 Témoignage 6 Le témoignage relate le vécu d’une jeune femme âgée de 25 ans dont la famille est très respectée dans le milieu musulman et a une très bonne réputation. Le jeune qui témoigne ne donne aucun élément sur l’origine culturelle de la personne. Il précise que cette personne avait terminé ses études secondaires mais suivait des études supérieures et qu’il a été mis au courant par des amis de la famille. Il déclare qu’elle a cessé de voir certaines de ses fréquentations et que les liens avec sa famille n’ont pas été modifiés. Il précise que la personne n’a pas subi de pressions et a accepté le mariage par respect pour la tradition. La jeune femme aspirait à être plus épanouie par son mariage. Toutefois, elle ne connaissait pas son futur époux. Le mariage s’est conclu sous l’accord des deux familles. Avis du jeune interrogé : il dit que dans son environnement proche, cela arrive souvent. Il considère que les femmes sont comme des poissons dans un aquarium et que les hommes sont des pêcheurs n’ayant qu’à choisir leurs épouses [sic]. Il précise qu’il y a un renforcement de la volonté de respecter les traditions dans certaines communautés. Toutefois, il n’est pas contre cette pratique qu’il qualifie sciemment de mariage arrangé. Enfin, il déclare qu’il laisserait d’abord à chaque membre de sa famille l’occasion d’émettre son avis et par la suite donnerait sa décision en espérant qu’on ne lui refuse pas. Témoignage 7 Le témoignage concerne une jeune fille belge de 18 ans, issue d’une famille de catholiques très pratiquants. Les faits se sont déroulés à la fin de ses études. Il s’agit de la cousine du jeune qui témoigne qui est tombée enceinte. Ses parents ne pouvant accepter cette situation, ont décidé de la marier avec le père de son enfant. La jeune fille s’est confiée après avoir pris connaissance du projet de ses parents. Elle a toutefois terminé sa dernière année au lycée. La jeune fille était interdite de sorties et ne pouvait plus voir ses amis car ses parents avaient honte de sa grossesse. Les rapports entre les parents et la jeune fille ont toujours été froids. Cependant, la marraine de cette personne l’a aidée à surmonter ces épreuves. La jeune fille a subi des pressions et la menace d’exclusion du foyer familial. Le jeune qui témoigne raconte que la personne a été forcée de se marier car ses parents estimaient qu’elle était indigne de l’éducation qu’ils lui avaient donnée. Elle a refusé ce mariage qu’elle estimait trop précipité et a demandé de l’aide (au jeune qui témoigne et à sa marraine) mais rien n’y a fait car ses parents lui ont rétorqué qu’il était trop tard. Avis du jeune interrogé: il dénonce ce mariage en le qualifiant de mariage truqué. S’il se trouvait dans la même situation, il s’échapperait et ne se laisserait influencer par personne. Il conseille de pouvoir ouvrir d’autres foyers d’accueil pour les femmes en détresse et un numéro d’écoute afin de les rassurer et conseiller. Il dénonce les mariages forcés et précise qu’on pourrait trouver des moyens pour empêcher certaines situations. Témoignage 8 Le témoignage relate l’histoire d’une jeune fille de 16 ans issue d’une famille très « fermée » et « orgueilleuse ». Elle est marocaine et de religion islamique. Au moment des faits, la personne était encore aux études et son mariage s’est déroulé au cours des vacances scolaires. La jeune fille n’avait pas été mise au courant et pensait partir en visite dans sa famille au Maroc. Ses 130 parents avaient conclu un arrangement avec la famille du futur époux (le cousin de la jeune fille). Le mariage s’est fait assez rapidement et la jeune fille n’a pu prévenir personne. De retour en Belgique, elle a pu terminer son année mais n’a pas poursuivi sa scolarité jusqu’au bout. Le jeune qui témoigne précise que ce mariage était forcé car la fille n’était pas au courant de ce qui allait lui arriver, son avis n’a pas été demandé. Il nous dit que ce mariage a été imposé pour une question d’honneur et pour respecter la tradition familiale. La jeune fille a refusé ce mariage estimant qu’elle était trop jeune et qu’elle ne connaissait pas bien son cousin. Avis du jeune interrogé: tout à fait opposé à ce type de mariage qu’il qualifie de mariage arrangé, il précise que seule la volonté des parents a été importante. La jeune fille n’a pas eu l’occasion de réagir. Si lui se trouvait dans cette situation, il se rebellerait. Il pense que les autorités de chaque pays devraient faire quelque chose pour ces jeunes filles mais est convaincu que personne ne veut se bouger. Enfin, il confirme qu’il y a encore beaucoup de cas de mariages arrangés et que pour lui, c’est la même chose qu’un mariage forcé. Témoignage 9 Le présent témoignage relate le vécu d’une jeune fille de 17 ans d’origine turque et de religion islamique. Elle était encore aux études au moment des faits. Ses parents sont très croyants et ont voulu la marier. Le jeune qui témoigne décrit que la famille de la jeune fille lui ont trouvé un mari qu’ils ont fait venir de Turquie. Suite à son mariage, elle a arrêté de fréquenter l’école et n’a plus donné de nouvelles. Les rapports avec ses parents ont été modifiés depuis le mariage. Elle ne voit plus personne. Les motifs évoqués furent des questions d’argent. En effet, son mariage a été conclu par un arrangement financier. Elle a subi beaucoup de pression et a été menacée d’être mise à la porte. Le jeune qui témoigne précise que la jeune fille a tenté de mettre fin à ses jours et qu’elle a fugué. Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage comme étant ignoble, il ne comprend pas que l’on puisse encore faire cela à l’heure actuelle. Si cette situation lui arrivait, il s’enfuirait et irait voir un avocat. Il déclare que c’est un mariage forcé et que cela arrive encore très souvent dans son environnement scolaire et familial. Il pense qu’il faut interdire les mariages forcés et que la Belgique devrait adopter des lois pour éradiquer ce phénomène. Enfin, il souligne que le mariage forcé est pour lui une forme d’esclavagisme et de maltraitance. Pour lui, dans ces situations, la femme est prise comme un objet et peut ressentir les relations sexuelles avec son mari comme un viol. Témoignage 10 Le témoignage relate le vécu d’une jeune fille de 17 ans issue d’une famille marocaine, musulmane, de religion islamique. Le jeune qui témoigne révèle que la personne était dans sa classe et s’est mariée durant les vacances scolaires. Il affirme que la jeune fille avait été mise au courant par ses parents de leur intention de la marier et de l’envoyer au Maroc. Elle n’a pu poursuivre ses études et n’a plus donné de nouvelles. Le témoignage précise que la jeune fille était très renfermée et qu’elle n’a parlé de cette histoire à personne d’autres. Il semble que pour les parents, c’était normal de marier leur fille à cet âge. Toutefois, elle a subi des pressions de leur part mais n’a pas été menacée. Elle n’a pas eu le choix. Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage d’horrible et d’inhumain. Pour lui c’est un cas de mariage forcé, c’est un mariage sans amour. Il déclare qu’il ne se trouvera jamais dans cette 131 situation car il fera tout pour l’empêcher. Enfin, le jeune qui témoigne ici préconise que les autorités publiques puissent intervenir afin de soutenir les jeunes gens. Qu’on puisse leur permettre d’avoir le choix de se marier avec la personne désirée. Selon lui, il faudrait mettre en place des lieux où les personnes pourraient déposer plainte, surtout dans le pays d’origine. Témoignage 11 Le présent témoignage relate le vécu d’une jeune fille âgée de 15 ans, de nationalité turque. Sa famille est d’origine turque, de religion musulmane. Elle a arrêté ses études à l’âge de 12 ans car ses parents ne pouvaient plus subvenir à ses besoins. Le jeune qui témoigne relate que la jeune fille est arrivée en Belgique pour contracter son mariage avec un homme qu’elle ne connaissait pas. La famille du garçon a choisi cette fille car ses parents la leur avaient proposée. Ils ont reçu de l’argent en échange. Le jeune qui témoigne précise que la famille a vendu cette jeune fille et qu’elle est devenue l’esclave de cet homme. Elle a été forcée de se marier car elle a subi des pressions et des menaces de la part de tout son entourage. Il semble qu’elle ne parlait pas le français lors de son arrivée en Belgique et ne connaissait personne. Son époux l’a enfermée durant des mois et l’empêchait de voir des gens. Elle s’est pliée à la volonté de ses parents et n’a pas tenté d’empêcher le mariage car elle n’y comprenait rien. La jeune fille ne voit plus sa famille car ils sont en Turquie. Elle est donc seule ici en Belgique avec cet homme qui la bat. Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage d’honteux et affirme que c’est un mariage forcé. Il pense que ce mariage ne tiendra pas car les époux ne s’aiment pas et n’ont pas appris à se connaître. Il dénonce cette pratique et déclare que s’il se trouvait dans cette situation, il s’échapperait. Enfin le jeune précise que ce genre de situation arrive souvent dans son environnement scolaire. Témoignage 12 Le présent témoignage relate le vécu d’un jeune garçon de 18 ans pour lequel ses parents ont conclu le mariage. Ses parents sont d’origine juive et pratiquent la religion hébraïque. Sa future épouse lui a été désignée et le mariage s’est déroulé en Belgique. A l’époque, le jeune homme travaillait avec son père et fréquentait une jeune fille non - juive. La tradition a primé sur ses aspirations. Le respect de la tradition était très important. Le jeune homme a dû s’y plier. Il a été menacé d’être renié par son père s’il ne se mariait pas avec la personne désignée. Le jeune qui témoigne était un ami du jeune homme et a tenté de l’aider à persuader ses parents. Après le mariage, le garçon fut envoyé dans son pays afin d’effectuer son service militaire. Le jeune qui témoigne précise qu’il était outré et indigné car il avait appris que le père du jeune homme avait menacé l’ex-amie de celui-ci pour qu’elle ne tente plus de le revoir. A présent, le jeune homme est devenu très religieux et n’a plus donné de nouvelles à ses amis. Il vit toujours dans son pays d’origine. Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage comme étant forcé et écoeurant. Il condamne les parents du jeune homme. Il révèle avoir tenté de prévenir la police en Belgique mais celle-ci n’a rien pu faire. 132 Témoignage 13 : Le témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 17 ans issue d’une famille turque musulmane. La personne était encore aux études au moment des faits. Le mariage avait d’ores et déjà été programmé par sa famille. La jeune fille a été mariée durant les vacances scolaires. De retour en Belgique, elle n’a pas poursuivi ses études. Le jeune qui témoigne révèle que la victime l’a appelée un jour en pleurs afin de lui demander de l’aide. En effet, il a appris quelque temps plus tard que la jeune fille était battue par son époux. Elle a tenté de s’échapper mais son mari le lui a empêché. Suite à cet évènement, le jeune qui témoigne n’a plus eu de nouvelles de la jeune fille. Les parents de celle-ci avaient perçu de l’argent pour vendre leur fille. A l’époque, elle n’avait pas réalisé qu’elle partait en vacances pour se marier. La dernière fois que le jeune qui témoigne a tenté de voir la jeune fille, on lui a rétorqué qu’elle était hospitalisée en raison de sa grossesse difficile. Il décrit son découragement face à la situation et déclare que c’est un mariage arrangé et forcé. Avis du jeune interrogé : il ne désire pas donner son avis, il nous précise juste qu’il ne sait pas ce qu’il aurait pu faire de plus car personne n’a voulu l’écouter. Témoignage 14 : Le présent témoignage relate l’histoire d’une jeune femme de 18 ans issue d’une famille Belge d’origine marocaine de religion musulmane, la personne étudiait encore au moment des faits. Elle a été menacée par ses parents de retourner dans son pays. Son père était très autoritaire et violent envers ses enfants. Le mariage s’est déroulé en Belgique. Une fois mariée, la jeune fille est tombée enceinte. Le jeune qui témoigne a été mis au courant de la situation car il était le cousin de la fille. Il décrit qu’elle a tenté de s’enfuir et demander de l’aide. Elle a du épouser cet homme pour respecter la tradition familiale et la volonté du père. Elle a interrompu ses études pour s’occuper de son enfant. A présent, elle vit avec ses parents car son époux est retourné dans son pays pour épouser une autre femme, n’étant pas satisfait de sa première épouse. Avis du jeune interrogé : il pense que la jeune fille a été victime d’un mariage forcé. A présent, elle ne travaille pas et s’occupe de son enfant. Il raconte que sa famille est très honteuse de la jeune fille car selon eux, elle n’a pu garder son époux. Il précise aussi qu’à la place de la personne, il ne se serait pas plié à cette pratique. Toutefois, il déclare que cette situation se produit souvent dans son environnement familial et scolaire. Il préconise de pouvoir établir des lois afin que les jeunes filles puissent porter plainte, il dénonce ce genre de situations et souhaiterait qu’elle puisse être punie. Enfin, il estime que l’on doit arrêter d’utiliser les femmes comme des objets. Témoignage 15 : Le jeune qui témoigne relate l’histoire d’une jeune fille de 14 ans issue d’une famille fortement attachée à la coutume. Ces parents, ont décidé de la marier avec un homme beaucoup plus âgé. Celui-ci l’a emmenée en Turquie d’où elle est originaire pour l’épouser. Au moment des faits, elle était toujours à l’école. Depuis son mariage, réalisé durant les vacances, plus personne n’a eu de 133 ses nouvelles. Le père de la fille était très strict et dur. Il avait menacé sa fille d’avoir des problèmes si elle ne se mariait pas. Elle vit à présent avec son époux en Turquie. Au vu de son âge, elle n’avait pas saisi l’importance de cet acte. Selon le jeune qui témoigne, la jeune fille a été mariée de force mais n’a pas refusé de partir avec son époux car elle ne comprenait pas ce qui l’attendait. Les parents ont reçu de l’argent pour la dot de celle-ci. Le jeune qui témoigne a pris connaissance des faits par sa cousine. Avis du jeune interrogé : il qualifie cet acte d’impardonnable et d’inhumain. Il dénonce le mariage forcé comme étant malsain et réducteur pour les femmes. Il précise que les femmes dans cette communauté n’ont pas le droit de dire quelque chose, elles sont manipulées par les hommes et vendues comme du bétail. Il pense qu’il faut intervenir et empêcher cette pratique en interpellant les pouvoirs publics. Témoignage 16 : Le présent témoignage relate le vécu d’une jeune femme de 21 ans issu d’une famille marocaine, parlant l’arabe et de religion musulmane. Au moment des faits, elle travaillait et habitait en Belgique. Elle venait de terminer ses études et venait de trouver un travail. Le jeune qui témoigne nous indique que la jeune femme a été mariée au Maroc. Elle ne connaissait pas son futur époux. Celui-ci souhaitait s’établir en Belgique pour y travailler. Il était un ami du père de et ensemble, ils ont conclu le mariage sans l’avis de la personne concernée. Le jeune qui témoigne a été mis au courant car il était invité à participer au mariage au Maroc. Il précise qu’elle était en larmes et complètement désespérée le jour du mariage. Elle a tenté de mettre fin à ses jours une semaine avant la cérémonie. D’après le témoignage, les parents de la fille l’on mariée pour de l’argent car le marié était assez fortuné. La victime a du arrêter son travail deux mois après son mariage. Avis du jeune interrogé : Il qualifie cet acte de mariage forcé et estime que c’est inconcevable de s’acharner sur une personne comme cela. Il pense que chacun a le droit de se marier par amour. Le jeune qui témoigne précise que le gouvernement Belge ne pourrait pas faire grandchose car certaines femmes étant soumises, vont dire qu’elles sont « amoureuses » alors que ce n’est pas le cas et personne ne peut le prouver. Toutefois, il propose que l’on interdise le système de dotation afin de décourager les familles à marier leurs filles pour de l’argent. Témoignage 17 : Le présent témoignage relate le récit d’une jeune femme de 19 ans issu d’une famille très fortunée, iranienne et musulmane de religion. Elle a été mariée durant ses études. Le mariage s’est déroulé en Iran. Les parents ont accepté la demande du futur époux et ont estimé qu’il convenait à leur fille. Le jeune qui témoigne a été mis au courant de la situation par sa mère. Selon lui, la jeune femme a cessé de fréquenter l’école et de voir se amis. De plus, elle avait subi des pressions de sa famille et avait fait l’objet de menaces de la part de son époux. Elle n’a plus parlé à sa famille après son mariage. Le témoignage précise que la jeune femme a accepté de se marier par respect pour ses parents et pour la tradition familiale. 134 Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage comme étant un mariage arrangé et confie que cette situation est courante dans son environnement familial. Il pense qu’il y a des limites pour toute chose et qu’il est important de considérer l’avis de chacun. Témoignage 18 : Le témoignage décrit le vécu d’une algérienne de 32 ans qui a été obligée par sa famille de se marier à un belge en vue d’obtenir les papiers. Sa famille provient d’Algérie, parle le français et l’algérien. Elle pratique la religion musulmane. Cette femme vivait en Algérie et s’est mariée en Belgique. Le jeune qui témoigne était voisin de cette personne. Il nous précise que la personne ne travaillait pas et restait régulièrement chez elle. Par ailleurs, elle n’a pas fait l’objet de menaces, elle s’est rendue en Belgique sur base volontaire mais ne connaissait pas son futur époux. Celui-ci était une connaissance de la famille. Il a accepté de l’épouser car, en échange, il a obtenu de l’argent des parents de la jeune femme. Le jeune qui témoigne qualifie ce mariage de mariage blanc. Le jeune qui témoigne pense que cette personne est malheureuse actuellement car elle se trouve prisonnière de son mariage. En effet, l’époux ne souhaite pas divorcer d’elle et la menace de la dénoncer auprès des autorités. Avis du jeune interrogé : il déclare que cette situation est absurde et qu’il est dommage de devoir se marier sans amour pour obtenir des papiers. Il affirme qu’il ne pourrait jamais se marier sous ces conditions. Le jeune qui témoigne propose de soumettre un test psychologique pour les personnes qui ne se connaissent pas et qui désirent toutefois se marier. Il estime que l’on doit interdire cette pratique si ce n’est déjà le cas. Enfin, il pense qu’au vu de l’augmentation du nombre de divorces que les gens devraient réfléchir avant de se marier et que cela ne doit pas être pris à la légère. Témoignage 19 : Le présent témoignage retrace le vécu d’une jeune femme de 21 ans d’origine Marocaine et de religion musulmane. Le jeune qui témoigne précise que c’est une cousine éloignée. Cette personne avait terminé ses études et son mariage s’est déroulé en Allemagne. Le jeune qui témoigne a été mis au courant des faits par téléphone, par sa famille. Il déclare que le mariage n’a eu aucun impact sur le mode de vie de la personne. Il précise également que les liens familiaux de la jeune femme n’ont pas été modifiés. Selon lui, le seul motif à son mariage fut son âge et le respect de la tradition, les parents estimant qu’elle était en âge de se marier. Au départ, la jeune femme n’était pas d’accord mais une fois mariée, elle a appris à apprécier son époux. Elle n’a fait l’objet d’aucune menace selon le jeune qui témoigne. Avis du jeune interrogé : il estime que le mariage doit se faire de manière naturelle et non forcé. Cependant, il affirme que la personne a eu le choix tout en respectant l’avis de ses parents. Il dit qu’a la place de la jeune femme, il discuterait plus avec ses parents. Enfin, le jeune pense que l’on devrait interdire les mariages forcés et que chaque gouvernement a son rôle à jouer. 135 Témoignage 20 Le jeune qui témoigne décrit le cas d’une jeune fille turque de 14 ans dont la famille est fortement attachée à la coutume et à la réputation. De religion islamique, elle était encore aux études au moment des faits. La jeune fille a été mariée de force par ses parents, en Belgique. Le jeune qui témoigne était ami(e) avec cette personne. Il nous relate que la jeune fille n’a plus continué ses études à cause de son mariage, elle a cessé toute fréquentation. Elle a été menacée et s’est pliée à la volonté des parents. La jeune fille a tenté de s’évader et a tenté de faire intervenir son petit ami. Avis du jeune interrogé : Indigné par cette histoire, il précise qu’il ne sera jamais dans cette situation. Il pense qu’il faut demander l’aide de la police et celle des politiques et ajoute qu’on ne devrait jamais imposer un mariage à quelqu’un, et que chacun puisse avoir le libre choix. Témoignage 21 Le jeune qui témoigne décrit l’histoire d’une jeune fille de 16 ans. Elle est kurde et de religion islamique. Ses parents l’ont forcée à se marier. Elle n’a pas eu le choix, ils l’on menacée de la chasser si elle ne se mariait pas. La jeune fille n’a pu terminer ses études car suite à son mariage elle est tombée enceinte et n’a plus pu sortir de chez elle. Le jeune qui témoigne précise que le mariage s’est déroulé en Belgique avec les coutumes de la famille. Les parents de la jeune fille l’ont mariée car ils n’avaient plus d’argent et ne pouvaient subvenir aux besoins de leur fille. Elle a été menacée d’être renvoyée dans son pays si elle ne se mariait pas. Le poids de la tradition et la volonté des parents sont la cause de son mariage. Elle a essayé de s’enfuir et demandé de l’aide. Avis du jeune interrogé : il faut laisser le choix aux gens dit-il. Si il se trouvait dans cette situation, il refuserait car il estime qu’on doit laisser le choix à chacun et qu’on doit empêcher que celle arrive. Il trouve cela dommage car cela arrive encore souvent. Témoignage 22 Le jeune qui témoigne décrit le cas d’une jeune fille turque de 18 ans, de religion musulmane, dont les parents sont très sévères. Elle doit se marier avec quelqu’un qu’ils ont choisi. Depuis qu’ils lui ont parlé de ce mariage, elle ne s’entend plus très bien avec eux, mais n’a pas le choix car elle vit sous le même toit. Selon le témoignage, elle subit des pressions mais malgré tout refuse, elle a voulu se suicider. Avis du jeune interrogé : il pense qu’aucune personne ne devrait subir cela, il faut lui laisser le choix de se mettre avec la personne qu’elle aime. Petit à petit la mentalité des gens change, on voit de moins en moins de cas comme cela. 136 Témoignage 23 Ce témoignage relate l’histoire d’une jeune femme de 18 ans, issue d’une famille ayant des difficultés financières. Son père était tyrannique. Sa famille est d’origine italienne et de religion catholique. Le jeune qui témoigne explique que la jeune fille n’a pas eu la chance de poursuivre ses études, elle a arrêté à l’âge de 10 ans pour aider ses parents. A 11 ans, elle a travaillé comme servante pour une famille bourgeoise. Il nous raconte que les parents de la jeune fille sont venus travailler en Belgique car ils avaient huit enfants et ne pouvaient leur garantir une sécurité financière. La jeune fille étant l’aînée, elle devait assurer l’éducation de ses frères et sœurs. Le jeune qui témoigne a été informé de la situation car il s’agit de sa grand-mère maternelle. Il qualifie se mariage de mariage arrangé. Les parents l’ont incitée à se marier pour leur épargner d’autres frais. Elle s’est pliée à la volonté de ses parents. La jeune fille n’aimait pas son mari et malgré cela a eu trois enfants. Son époux était un ami du père. Avis du jeune interrogé : il qualifie ce mariage d’insensé. Il estime que c’est un sacrifice qui a de lourdes conséquences. Il pense qu’à l’heure actuelle, cela ne devrait plus arriver et que le mariage devrait se faire avec le consentement de chacun. Il estime que l’on doit s’aimer pour se marier et affirme que cela ne lui arrivera jamais. Il préconise d’écouter les jeunes et d’être vigilent. Il propose que les autorités fassent un sondage afin de connaître les aspirations des jeunes par rapport au mariage et à l’idée qu’ils en ont. Il déclare qu’il y a encore trop souvent de situations similaires et qu’on devrait pouvoir empêcher cela. Enfin, il précise qu’il faut continuer d’investir dans cette problématique. Témoignage 24 : Le présent témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 16 ans issue d’une famille nombreuse, de religion islamique et de culture arabe. Sa famille est très sévère et relativement pauvre. La jeune fille était étudiante, les faits se sont déroulés au Maroc durant les vacances de fin d’année. Le jeune qui témoigne a été mis au courant par l’intermédiaire de son cousin. Il précise qu’à présent la jeune fille déteste ses parents. Elle avait subi des pressions de la part des parents. Avis du jeune interrogé : il trouve cela injuste et barbare. Il pense que le mariage forcé pour les jeunes filles de moins de 18 ans devrait être interdit et qu’on doit protéger celles-ci. Témoignage 25 : Le témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 17 ans dont le père est autoritaire. Sa famille est turque et parle le turc. La jeune fille a du interrompre ses études pour aller se marier en Turquie. La jeune fille a cessé toute fréquentation car sa famille la gardait prisonnière chez elle. La tradition et la culture devant être respectées, le père lui a imposé un homme qu’elle ne connaissait pas. Elle a tenté de s’évader mais sans succès. Elle a dû se plier à la volonté de ses parents et à la tradition familiale car elle était en âge de se marier. Avis du jeune interrogé: pour lui, cette situation est complètement absurde, il pense que chacun devrait avoir le choix de son futur conjoint et de la personne avec qui on veut vivre. Pour lui, ce mariage est forcé. Il estime que le mariage n’est pas chose à prendre à la légère et qu’il faut 137 être conscient des conséquences pouvant en découler. Il précise qu’il ne pourrait pas se marier dans ces conditions et qu’il refuserait, insistant sur le fait qu’il est primordial de se connaître avant de se marier, voire de vivre ensemble. Le jeune qui témoigne pense qu’il est nécessaire de donner une bonne information aux jeunes sur leurs droits et punir les parents qui imposent le mariage à leurs enfants. Enfin, il explique que le mariage est une décision qu’il faut réfléchir ensemble, parents et enfants. Témoignage 26 : Le présent témoignage décrit le vécu d’une jeune fille de 18 ans, d’origine belge. Elle avait terminé ses études et travaillait. Son futur époux était un homme d’une trentaine d’année d’origine belge également, de religion catholique et parlant le flamand. Le mariage s’est déroulé en Belgique. Le jeune qui témoigne a été mis au courant par sa grand-mère. Il estime que la jeune fille était trop jeune de plus, elle avait déjà un petit ami. Les parents de la jeune fille l’ont incitée à se marier car son futur époux était très riche d’une part et que leur fille était enceinte de son petit ami, d’autre part. La jeune fille a tenté de s’enfuir mais ses parents ont réussi à la convaincre que c’était pour son mieux et qu’elle finirait par être heureuse, que son époux lui donnerait tout et lui garantirait la sécurité financière pour son enfant. Le jeune qui témoigne ne nous apporte pas d’autre précisions. Avis du jeune interrogé : il déclare que c’est une grosse bêtise et que ce mariage n’aurait jamais dû se faire. Il dit qu’il ne ferait rien car estime que les décisions de chacun doivent être respecté. Toutefois, il qualifie cette situation comme étant un mariage arrangé. Témoignage 27 : Le témoignage relate le vécu d’une jeune fille de 18 ans issue d’une famille dont le père est très strict et religieux. La famille est originaire de Turquie. La jeune fille venait de terminer ses études et a été mariée dans son pays d’origine. Le jeune qui témoigne habitait le même quartier qu’elle (en Belgique) et a été mis au courant par des voisins. A présent, la jeune fille ne travaille pas et ne poursuit pas d’autres études. Elle n’a pas cessé de voir ses amies et ses parents sont toujours proches d’elle. Ses parents ont décidé de la marier pour l’éloigner de son petit ami précédent qui n’était pas de la même origine qu’elle. Selon le jeune qui témoigne, la jeune fille en était triste et souhaitait s’enfuir. Depuis, elle a accepté la situation. La volonté de ses parents a été respectée. Les époux vivent en Belgique Avis du jeune interrogé : Il dit qu’il n’a pas à émettre de jugement concernant ce mariage. Toutefois, il précise que chacun devrait écouter son cœur et non les désirs des autres. Il estime que ce mariage n’a pas vraiment de sens. Enfin, il pense que l’on doit interdire les mariages forcés en faisant intervenir les autorités publiques. Témoignage 28 : Le présent témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 16 ans issue d’une famille italienne catholique avec des parents très autoritaires et pauvres. La jeune fille travaillait dans une entreprise de couture et n’allait plus à l’école. Ses parents l’ont obligée à se marier en Italie avec 138 un homme plus âgé qu’elle car il possédait des investissements importants dans le village. Après le mariage, le mari est devenu très jaloux, lui interdisant de sortir et de voir ses amis. Avis du jeune interrogé : Il précise que c’est une vieille histoire et pense qu’ici en Belgique, pareille histoire est impossible : on ne peut pas obliger sa propre fille à se marier pour des questions d’argent. S’il était dans le cas, il se me révolterait, mais précise qu’il dit cela parce qu’il a 18 ans en 2004 et non en 1920 dans un pays où les parents et la tradition ont le droit à tout. A cette époque (début du siècle dernier), il dit aussi qu’il n’aurait pu faire qu’une chose : se taire ! Témoignage 29 : Le jeune qui témoigne décrit l’histoire d’une jeune femme de 28 ans issue d’une famille belge aristocratique et de religion catholique. Elle avait terminé ses études et avait un petit ami à l’école. Ses parents ont absolument voulu la marier avec un garçon issu du même milieu qu’eux. Elle ne voulait pas se marier mais vu la pression de ses parents, elle a été obligée d’accepter. Elle en veut toujours à ses parents de l’avoir obligée. Avis du jeune interrogé : Il trouve cela très mal car en acceptant pour ses parents, la personne s’est rendue malheureuse. Il ne sait pas ce qu’il ferait dans semblable situation car franchement il faut le vivre pour le dire [sic]. Témoignage 30 : Le témoignage porte sur le vécu d’un jeune homme de 20-21 ans, issu d’une famille juive, de religion hébraïque. Il est chômeur et donne à ses parents une participation aux frais de la vie quotidienne. Il a été obligé d’arrêter l’école car il n’avait pas le choix, il devait travailler pour subvenir à ses parents. Il a rompu les liens avec ses amis, ses parents comptant plus pour lui. Ils l’ont obligé à se marier. Il subit des pressions. Il vit très mal la situation mais il n’a pas le choix. La seule façon qu’il a d’échapper au contrôle familial et de «gagner son indépendance», c’est fuir sans jamais se retourner mais ce sera très dur. Il a refusé le mariage en partant de chez lui, les frères et sœurs de son père ne voulaient pas le recueillir. Personne ne pouvait intervenir pour l’aider à échapper au mariage, ses parents ne changeront plus. Avis du jeune interrogé : ce type de situation se produit très rarement. Les choses que les autorités juridiques pourraient faire pour éviter que les mariages forcés ne se reproduisent sont les reportages afin d’ouvrir les yeux aux personnes concernées. Témoignage 31 : Il s’agit ici de l’histoire d’une jeune fille de 20 ans, issue d’une famille marocaine, de religion musulmane. Elle avait terminé ses études ici en Belgique. Ses parents voulaient éviter qu’elle ne 139 se marie avec un homme qu’ils n’aimaient pas, donc ils lui ont choisi son mari. Elle avait subi des pressions. Avis du jeune interrogé : dans ce cas-ci, il trouve que cela s’est bien passé, le couple a appris à se connaître, ils se sont aimés et vivent bien maintenant. Si lui se retrouvait dans la même situation il refuserait. Il ne pense pas que les autorités auraient pu faire quelque chose. La solution courante de nos jours est le divorce. Témoignage 32 : Le témoignage porte sur le vécu d’une jeune fille de 19 ans. Elle est aux études supérieures. Ses parents voulaient éviter qu’elle ne se marie avec un homme qu’ils n’aimaient pas et par conséquent, ils lui ont choisi son mari. Elle subit des pressions de son entourage familial et les parents veulent suivre la tradition. Elle a accepté de se marier par crainte du regard de la famille et pour sa réputation. Pour le moment elle n’est toujours pas mariée, elle se rebelle, elle ne peut plus revoir ses copains. Avis du jeune interrogé : Il trouve que cela ne devrait plus exister au 21ième siècle. Si il était dans cette situation, il tenterait d’y échapper. Témoignage 33 : Le présent témoignage décrit l’histoire d’une fille de 20 ans, issue d’une famille marocaine. Elle a terminé ses études secondaires, et est demandeuse d’emploi. Le jeune qui témoigne a été mis au courant par la personne elle-même qui est venue lui parler de sa situation dans la mesure où il s’agit d’une amie de longue date. Les faits se sont déroulés pendant les grandes vacances au Maroc. On lui a imposé son mari et elle a accepté pour gagner son indépendance. Elle a subi des pressions mais pas exagérées. Ce mariage n’a pas eu d’impact sur son mode de vie, elle voit toujours ses amis. Avis du jeune interrogé : Il trouve que ce n’est pas bien de ne pas demander l’avis de la personne concernée. Heureusement pour lui, dit-il, ses parents ne sont pas comme cela. Il pense que les autorités publiques devraient être plus vigilantes, au niveau des papiers (visa, passeport) pour éviter que les mariages forcés ne se produisent. 140 9. CALENDRIER DE LA RECHERCHE Début de la recherche (décembre 2003) ; Envoi de courriers aux établissements scolaires en vue de les inciter à participer à la recherche (janvier/février 2004) ; Volet quantitatif : clôture de la réception des questionnaires transmis par les établissements scolaires (mi avril 2004) ; Volet quantitatif : analyse des données (mi avril 2004 – mi juin 2004) ; Remise du Rapport final de la recherche (15 juin 2004). 141