•de l`anlifascisme •pologne •science et anarchie •espagne.procés

rA
revue lib e rta ire
Internationale
•de l'anlifascisme •pologne •science et
anarchie •espagne.procés'scala” .fiai
N° 4
H IV E R 8 0 -8 1
« A G O R A»
revue d 'in fo r m a tio n s
lib e rta ire s in te r n a tio n a le s
s o m m a ir e
E ditée par: «Pensée et A ctio n » .
P é rio d ic ité : tr im e s trie lle .
D irecteur
de p ublication:
A m oros. ■
Dépôt lé g a l: à p a ru tio n .
Commission
Solon
p a rita ire : n° 62.601.
I.S .S .N .: n° 0 2 4 5 -3 6 3 0 .
Im prim erie: «Corep», 21 rue de la
V ig u e rie , 31300 T o u lo u se .
Equipe de rédaction: C laude A ris o ,
Marc L é to n d o r, Solon A m oros, T o n y
A lv a re z .
Rédaction et A dm inistration:
«AGORA», B .P . 3187
31027 - T o u lo u s e - C édex.
P rix du numéro: 10 F rs.
Abonnement: 4 n u m é ro s-3 5 F rs.
Diffusion m ilita n te :
- 5 e x e m p la ire s : 45 F rs.
- 10 exempl aire s : 90 F rs .
Pour tout versem ent: lib e llé à l'o r-
.•
4
EN MARGE
■ L e s jo u rs d if f ic ile s de l'a n tifa s c is m e .
■ J u if e t lib e rta ire .
• SANS FRONTIERES
■
■
■
■
■
■
■
B
Pologne: S yn d ica t = 1 , - d é m o cra tie = 0.
T u rq u ie : A p rè s le coup d 'E ta t.
A u s tra lie : L ib e rta ire s en m ouvem ent.
Espagne: P ro cè s «Seala».
Ita lie : F ia t, p lu s dure sera la chute.
Uruguay: V iv r e en a u to g e s tio n .
Ita lie : Secours rouge et n o ir.
24
• KIOSQUE
■ Des notes de le c tu re .
25
• REPERES
■ C hine: Le printemps de P ékin.
• Où sont passés les m a o i'ste s?
• Un printem ps en p le in h iv e r.
• L a v ie d'u n «bébé rebelle».
• F le u rs du p rin te m p s.
• R endez-nous notre je u n esse .
54
• NOTRE MEMOIRE
■ L e s C o n s e ils ita lie n s :
1920.
• ARGUMENTS
59
■ L 'o p p o rtu n is m e s c ie n tifiq u e .
■ F la v io C o s ta n tin i : a rtis t of anarchy.
• EN BREF
l
± :
■ Des n o u v e lle s de partout.
Ont été mis à contribution pour
ce
numéro: B ill
N o w lin , Bruno
N a p p i,
C laude
A ris o , E ve lyn e
D elb os,
H ub ert G a ly , Jean-M arc
Iz rin e , J u lie n D reux, L e e Yu See,
Marc
L é to n d o r,
M arcos,
Nanni
B o n io lo ,
René
A rc o s ,
S eyfried,
Solon A m oros, T o n y A lv a re z , Y u s u f
Dâg, « R iv is ta A.», «Umanità Nova»,
« B ic ic le ta » ,
«C ienfuegos
Press»,
«Acier
Inox» et les c o p a in s de
«M.D.P.».
• COURRIER
46
■ B .P . 3187.
• RECETTES -DE TAT1E CEONSTADT
47
■ F resques m urales.
• CRAYON NOIR
48
■ S e yfrie d .
• EN V E N T E A : ■ «Germinal», 19 rue des S u isse s, 13200 A rle s . ■ «Graffiti», 11 rue R iq u e t, 31000 T o u lo u s e .
■ «Anglade»; 44 rue M e rly , 31000 T o u lo u s e . ■ «Amoros», 14 rue de l 'E t o i l e , 31000 T o u lo u s e .
■ «L'En-Dehors», 46 rue du Mi r a il, 33000 Bordeaux. ■ «Groupe Sébastien Faure», 7 rue du
M uguet, 33000 B ordeaux. ■ «La Crue», 245 rue B ourgogne, 45000 O rlé a n s . ■ «La Capotière»,
rue des C arm es, 45000 O rlé a n s. ■ «Le Temps des Cerises», 5 bi s rue G u sta ve Sim on, 54000
N ancy. ■ « L 'E tin c e lle » , 30 rue P asteur, 64000 Pau. ■ «Le Futur Antérieur», rue du T h é â tre ,
66000 P e rp ig n a n . ■ «Cercle d'Etudes Sociales», 48 rue des A u g u s tin s , 66000 P e rp ig n a n .
■ «La Gryiff e», 5 rue Sébastien Gryphe, 69007 L y o n . ■ «Ulthar», 6 rue S a in te M arie des
T e rre a u x, 69001 L y o n . ■ «La Taupe», 2 quai de l'A m ira l L a la n d e , 72000 L e M a n s .
■ «Imagine», 51 rue de Lappe, 75011 P a ris . ■ «Le Jargon Libre», 6 rue de la R e in e B la n c h e ,
75013 P a ris . ■ «La Commune de la Butte aux C ailles», 11 rue B a rra u lt, 75013 P a r is .
■ «OCL», 33 rue des V ig n o le s , 75020 P a ris . ■ «L'Autre», 3 avenue De L a ttr e de T a s s ig n y ,
81000 A lb i. ■ «Rencontres», 36 rue de l'H ô te l de V ille , 81100 C a s tre s . ■ «La Mandoune»,
12 rue G illa q u e , 82000 Montauban. ■ «Alinéa», 4 rue C h a rle s P o n e y, 83000 T o u lo n .
■ «Le Kiosque du Boulevard», 13 boulevard Georges F avon, 1204 G enève. •
LA
COURSE
DES
RATS
«Ouvrez l e s y e u x c r a c h e z la m o n n aie
L e c ir q u e e s t en v ill e e t ç a s ' r a p a s f a c i l e
De s'c a c h e r
T o u t l'm o n d e e s t en fraude
Y ’ a d é jà d e s c lo w n s qui rôdent».
(J.P . C apdevielle).
Nous sommes encore quelq u e s-u n s à ne pas être
candidats. On se demande par quel tour de force.
Ils y vont tous de leurs recettes : course de
rats pour l e p o u v o i r . 'B r u its de b o t t é's=EfSx
frontières du quotidien. T 'a s tes papiers ?
Gauche, droite... Droite, gauche...1Un
vrai match de boxe d'où nous sortirons
K .O .
Candidats marginaux ? L e s écolo­
gistes s ' o r g a n i s e n t en b a t a i l l o n s
clairsem és et é l i s e n t l e u r g é n é r a l :
voilà pour I'a u to g e s tio n . 1L e s tro ts k y s ­
tes, «ces enfants c o m p l e x é s d'un père
qui n 'a pas réussi dans la vie» , vont se
c o m p t e r encore un c o u p : V oilà pour les
m a t h é m a t i qu e s . L e s clowns, dans
ce
spectacle en direct, sont enfin vraim ent tr is te s :
voilà pour le cirque.
Quant au r e s t e ,
c 'e s t v r a i m e n t des r e s t e s .
V ie i l le s soupes p o litic ie n n e s prêtes à gérer notre mi:
A lle z , c irc u le z ! il n 'y a rien à v o ir!
Alors, quoi ? De l'a b s te n tio n encore et to u jo u r s ?
Même pas. L a vraie v ie est a ille u rs . E lle se
construit, peu à peu, dans des h i é r a r c h i e s qui s'é c r ou I en t, des mythes qui se d é g o n f l e n t ,
des
c o u d e - à -c o u d e qui se font fraternels, des lutte s qui se cherchent et fin iro n t bien par se trouver.
L e 20 mars à 1 7 h 0 4 m n , ce sera le p r i n t e m p s. Le p r i n t e m p s ,
sans blague ? A lo rs là,
oui,
nous sommes candidats. •
L e concierge d'«Agora».
EN MARGE
LES JOURS DIFFICILES
DE L’ANTIFASGISME
utour de Copernic, la fiè ­
vre est retombée. 1L e s ra­
tonnades et autres e x p lo its
fa s c is te s peuvent se poursuivre
tranquillem e nt;
ça n 'in té re s se
plus le s média. ' Au cours des
journées délira n te s qui ont suivi
l'a tte n ta t de la synagogue, que
n'a-t-on pas entendu! F aire le
point aujourd'hui semble devenu
p o s s ib le , et rafraîchir les mé­
m oires aussi. «Le temps est
A
peut-être venu où ceux qui, de
toutes parts, parlent de "lutte
contre le fascism e" devraient
commencer à comprendre que les
conceptions qui, dans leur e s ­
prit, accompagnent cette formule
ne sont pas moins puériles, que
ce lles des sorciers luttant con­
tre les orages» (Georges B a t a i l ­
le).
A U T O U R DE G IS C A R D :
LA D R O IT E !
n l'a dit, é c r it et répété;
sous Giscard nombre de
m ilita n ts de d ro ite sont
parvenus au pouvoir. L e s exem­
ples ne manquent p as: Longuet,
Madelin, B assot ancien d ' «Occi­
dent» et organisateur de la der­
nière campagne p ré s id e n tie lle ,
ou encore Hersant, pétainiste
d'hier, giscardien d'aujourd'hui
et détenteur de 70 % de la presse
écrite française. Il n 'e s t donc
pas étonnant que parallèlem ent
à une chasse aux sorcières gau­
c h iste s exacerbée se so it in s ta l­
lée ces années une im punité
quasiment totale pour les fa s c is ­
tes. Il f a lla it bien récompenser
ceux qui restent les hommes de
main rêvés pour les basses be­
sognes. 1 Déjà, en 74, Giscard
n 'h é s ita pas à faire appel à eux
pour assurer son s ervice d'ordre
pendant la période électorale.
O
Il n 'y a pas ici génération
spontanée. Et si ces personna­
ges, si l'id é o lo g ie de la nouvel­
4
le droite ont pu se mettre en
marche, c 'e s t que le terrain leur
a été préparé par les idées d'extrême-droite défendues par les
gens en place. Témoin, Bonnet,
m inistre de l'in té r ie u r qui, dès
le 13 décembre 69, déc la ra it au
«Monde»:
cepter la
pétition
sélection
meilleurs
nes et à
«...'La France doit ac­
loi d'airain de la com­
qui s 'a n a ly s e dans la
et la stimulation des
dans tous le s domai­
tous le s niveaux». 'Ces
derniers temps, B e u lla c renché­
r i s s a it : «Il faut tuer cette vieille
idée selon laquelle le s enfants
sont égaux». '
Mais l'é ta t giscardien n 'e st
pas un état fa s c is te déclaré.
Bien au contraire, il développe
un dpable langage qui b ro u ille
les cartes. M u ltip lia n t les décla­
rations «libérales», il met pra­
tiquement en place ce qu'on a
appelé un «fascisme doux». L e
vent de droite qui souffle sur le
monde peut se concrétiser de
d i f f é r e n t e s façons. Soit par
l'in s ta lla tio n d 'E ta ts forts, so it
par la volonté de démantèlement
des déjà maigres libertés «démo­
cratiques» («Sécurité et Liberté»
est l'une des attaques). L 'o b j e c ­
t i f reste bien évidemment d'a ider
à restaurer des p ro fits mis à mal
par la crise. Il est donc bien
c la ir que nous nous situons, en
France, dans la seconde s itu a ­
tion. L 'o ffe n s iv e patronale, bien
servie par Barre et la d iv is io n
ouvrière, ne semble pas avoir
besoin aujourd'hui de la version
autoritaire fa s c is te . 1
L ’ A N T1F ASCISME
EST A V E U G L E ;
L ’U L T R A -G A U C H E
EST M Y O P E .
es a t t e n t a t s fa sc is te s
jouent ainsi un rôle d'épouvantail
et renforcent
l'u n ific a t io n de la population
L
par-delà ses in térêts divergents.
V o ilà pourquoi tout le courant
réformiste est à l'a is e dans le
mouvement a n ti-fa s c is te qui nie
les classes et reconnaft à l 'E t a t
la fonction d 'a rb itre «au-dessus
de la mêlée». V olontaire m e nt en­
fermée dans une a ttitu d e défen­
sive, de peur de r e m e t t r e en
cause le c a p ita lis m e lui-même,
la gauche respectable se propo­
se comme che va lie r servant de
la démocratie bourgeoise. Pour
se protéger, c ro it- e lle , de l 'e x ­
trême-droite, e lle se jette dans
le s bras de la droite et lui fa it
concurrence sur le terrain de la
«loyauté» envers les in s titu tio n s .
Rien de bien nouveau dans ce
mariage de raison. 1
RUE
Mais,
malheureusement,
à
l'aveuglem ent a n tifa s c is te des
réform istes correspond une myo­
pie de l'ultra-gauche. Et les l i ­
bertaires ne sont pas en reste
dans ce déferlement du schéma­
tisme démagogique. L e s m o b ili­
sa tio n s qui ont suivi Copernic
nous ont offert deux exemples.
L e tract d'une organisation l i ­
bertaire, au cours de ces jour­
nées, affirme que: «démocratie
et fascisme sont deux formes du
système c a p italiste . 'Il n 'y a pas
à choisir entre l e s deux». 'Nous
disons que de te ll e s phrases
sont c rim in e lle s car e lle s j u s t i ­
fie n t un recul q u a li t a t if de la
classe ouvrière, a lo rs que le
fascisme n 'e s t pas autre chose
que la c o n c ré tis a tio n de ce re­
cul. A ffirm e r que les o b je c tifs
de la démocratie et du fascisme
sont les mêmes (le m aintien du
profit) est ju s te , mais on reste
!
EN MARGE
à mi-chemin d'une p os ition lib e r­
ta ire si on ne s'inte rro ge pas, en
même temps, sur les différences
de formes entre les deux s ystè ­
mes et sur le rôle que ces d iffé ­
rences jouent. L e fascism e tra­
d u it un rapport de force défavo­
rable aux révolutionnaires; la
démocratie bourgeoise désigne
un espace p oss ible à l'a c tio n .
Mais le manichéisme des or­
ganisatio ns lib e rta ire s n'en res­
te pas là. Un autre tract déve­
loppe l'id é e que «le fascism e est
une forme qu'utilise le c a p ita lis ­
me en crise face aux lu ttes ou­
vrières». C e r te s , le patronat n'a
jam ais cessé de faire appel à
des hommes armés. Mais le fas­
cisme, c 'e s t tout autre chose et
le c apitalism e recourt à cette
solution «pour se protéger moins
contre les troubles de la rue que
contre le s troubles de son pro­
pre système économique». Dans
l'a tte n tis m e dominant, tel est le
cas aujourd'hui.
L ’ A N T I FASCISME
L IB E R T A IR E
P E U T - IL E X IS T E R ?
C
onstruire un antifascism e
lib e rta ire , est-ce p o s sib le ?
Il le faut, car il est incon­
cevable que le mouvement a n ti­
autoritaire reste sans réaction
à des événements qui le concer­
nent directement. Mais, un anti­
fascisme lib e rta ire se b â tit sur
quatre p ilie r s fondamentaux: la
lutte intransigeante contre l'E ta t,
l'a id e apportée à l'u n ité ouvriè­
re, le combat idéologique, l'o r ­
ganisation de I'auto-défense.
une «autorité im partiale et pater­
nelle». On en est alors à bénir
la violence d 'E ta t, à maudire
toute violence privée, à souhai­
ter une paix sociale. C 'e s t c ro i­
re à un développement autonome
du fascisme alors que «pour éli­
miner le fascisme, il n'y a pas
besoin d'un gouvernement plus
fort que l'a c tu e l: il suffirait que
l 'E ta t c e ss e de le soutenir».
T e lle est la c la r ific a tio n appor­
tée par l'a n tifa s c is m e lib e r ta ir e :
les lo is B onnet-S toléru, le pro­
je t P e yre fitte sont les bases
mêmes sur lesquelle s s'appuie
l'extrêm e-droite. C 'e s t bien l ' E ­
tat qu'il faut frapper!
Ce combat, pour être mené à
bien, nécessite une ample unité
ouvrière sur ses propres intérêts.
Cela veut dire deux choses:
d'abord que la d iv is io n actuelle
ne peut que favoriser les solu­
tions «musclées»; ensuite qu'il
ne s 'a g it pas d 'a lle r de compro­
mis en allia n ce s, comme si le
nombre
remplaçait la clarté.
L 'u n ité ne peut concrètement se
réaliser qu'à partir d 'a lte rn a ti­
ves politique s crédibles cons­
tru ite s à la base et pour la base.
L a m u ltip lic a tio n des revendica­
tio n s quotidiennes sans un pro­
jet global qui les unisse, isole
le mouvement ouvrier, l'o ffre ,
s a n s /p ro te c tio n , à l ' é c h e c . 1
/D 'a u ta n t plus que les a tta­
ques se sont précisées, tant sur
le plan in te lle c tu e l que physique.
Côté cour, nouveaux philosophes
et nouvelle droite paradent sous
les feux des médias. Il ne faut
pas croire cela sans importance,
car c 'e s t bien de ces idées que
se nourrit la d r o ite : le fascisme
est aussi un mouvement m y s ti­
que. Désarmer l'id é o lo g ie d 'e x ­
trême-droite et humaniste c 'e s t
armer la pensée lib e rta ire . Côté
ja rd in : la violence physique fas­
c is te sans réponse adéquate dé­
moralise et dém obilise. Depuis
que les démocrates bourgeois se
sont emparés de l'a n tifa s c is m e ,
le légalism e et le défaitism e
vont de pair. Pourtant, seule une
résistance réelle et autogérée
pourrait mettre un frein aux am­
b itio n s des p e tits coqs d 'e x trê ­
me-droite. Sur ce point de l'a u to ­
défense, Nanterre montre le che­
min mais offre aussi l'o cca sio n
de rappeler quel piège ce serait
que de reléguer au second plan
les o b je c tifs in it ia u x de lutte
sous prétexte de «priorité a n ti­
fasciste».
Recrudescence f a s c i s t e ?
certes pas. Mais paravent du
«fascisme doux» giscardien, cer­
te s oui. L e s terrains sont tracés
pour le jeu traditionne l de l'o p ­
pression. L e s lib e rta ire s sau­
ro n t-ils , enfin, sauter le pas et
s'emparer résolument de l'a c tu a ­
l it é ? Pour cela, il nous faudrait
devenir disp o n ib le s à une remise
en cause de nos pratiques h is to ­
riques,
accepter d'abandonner
notre manichéisme habituel. Y
sommes-nous prê ts ? ■
Nous l'avons dit, l'id é o lo g ie
a n tifa s c is te réformiste se propo­
se de sauver la démocratie bour­
geoise par tous les moyens et
donc est prête, pour cela, à-dé­
sarmer toute opposition de gau­
che. Lorsqu'on réclame quelque
d issolution que ce so it (c e lle de
la CSL ou, ironiquement, c e lle
de la police), quelque répression
que ce soit («les fa s c iste s en .
prison» ?) on fa it le travail à I a é
place des démocrates, on s 'e n t­
remet à l'E t a t pour é viter le pire.L ' E t a t redevient non pas un or-e
gane d'oppression de c la ss e ,g
mais une sorte «d'entité méta- .
physique» au-dessus d e s c la s s e s ,|
j
EN MARGE
Comment être juif
quand on est libertaire?
Comment être libertaire
quand on est juif?
Des choses dont on parle peu dans le mouvement.
E t pourtant, les copains juifs
ne manquent pas.
Jean-Marc est de ceux-là. M ilitant organisé, plombier,
nous lui avons demandé ce qu'il en pensait.
■ Copernic a eu lieu. Ça se
traduit comment, être juif
et libertaire et prendre le
journal ou écouter la radio
et entendre cette informa­
tion ?
a II y a eu deux choses par
rapport à la rue Copernic. D'une
part au niveau ju if, je me suis
dit ça peut recommencer... je me
s u is senti visé directement. En
même temps, des déclarations,
comme c e lle de B loch dénon­
çant les a n ti-s io n is te s , m 'ont
écœuré. D 'au tre part, au niveau
p o litiq u e , tous le s copains lib e r­
taires sont descendus dans la
rue, so it samedi, s o it mardi. 1
Pourtant, historiquement, il y a
eu beaucoup moins de ju if s dans
6
le mouvement lib e rta ire que, par
exemple,
dans le mouvement
trotskyste. 'De ce fait, les anars
sont passés à côté de problèmes
te ls que les «juifs honteux», le
sionisme, les flic s . . . Bien sûr
il y a des analyses, mais ce
sont les éte rn e lle s analyses sur
le fascism e: «fascisme et social-
démocratie, deux a sp ec ts de la
même bourgeoisie»... 1 ça c 'e s t
des mots pour m o i . ' I l faudrait
tout repenser. En tant que j u if
je ressens cette absence d'a na­
lyse beaucoup plus et, re la tiv e ­
ment, je le v is mal. De plus, je
pense qu'on n'a jamais su répon­
dre à toutes les questions des
m inorités nationales et je n 'a r r i­
ve pas à savoir pourquoi, alors
qu'on a pas mal d'idées et de
pratiques sur le fédéralism e.
Mais ça n'a jamais été appro­
fondi.
■ Tu disais que les lib e rta i­
res sont passés à côté de
problèmes, tel celui des
flic s ?
□ Moi, ce qui m'a choqué
dans l'a tte n ta t de la rue Coper­
nic, c 'e s t qu'on dise q u'il y a
des fa s c is te s dans la police
française. Et tout le monde sem­
ble découvrir cette évidence,
alors que c 'e s t inhérent à ce que
sont l'armée et la police. C 'e s t
un moyen de répression, il est
donc apte à engager des f a s c is ­
tes. 1Qui a fa it le V e l ' d ' H i v ?
C 'e s t la police française, pas
les f l i c s allemands. E l le a même
raflé les gosses et le s a remis
aux allemands, alors que ceux-ci
n'en voulaient pas, ne savaient
pas quoi en foutre des mômes.
Le mensonge à dénoncer, en tant
que lib e rta ire s , c 'e s t justement
l'id é e q u 'il pourrait y avoir une
p o lic e démocratique. Ç a n 'e x is te
pas! L e truc génial c 'e s t «Libé»,
tro is jours après Copernic, ba­
lançant un a rtic le sur le massa­
cre des maghrébins au moment
de la guerre d 'A lg é rie . Parce
que la po lice c 'e s t le V e l'd 'H iv ,
c 'e s t 58, c 'e s t aujourd'hui Co­
pernic, et puis demain ce sera
la répression et le massacre des
ethnies, des m ilita n ts politiq u e s .
L a p o lic e est fa sc is te , e lle l'a
toujours été et le sera toujours.
Il faut abattre la p olice. L e s l i ­
bertaires devaient avancer cela.
Il n 'y avait pas à s 'a lig n e r sur
les
réform istes pour gueuler
«Bonnet démission». Remplacer
un m inistre de l'in t é r ie u r par un
autre m in is tre de l'in té rie u r, ça
rime à quoi ?
■ Alors, fascisme et démo­
cratie bourgeoise, même
capitalism e ?
a Certes, mais c 'e s t un pro­
blème que je me pose, par exem­
ple par rapport à la période de
40. Je pense que tout en étant
libertaire, ju if, etc., je me serai
retrouvé du côté g a u llis te . Pas
dans les organisations g a u llis ­
tes, mais dans la R é s istance, et,
pour écraser le fascisme, prêt à
m 'a llie r avec toutes les forces
démocratiques. L e fascism e est
e ffectivem ent une forme du capi­
talism e, m ais c 'e s t la pire. 1
C 'e s t vrai qu 'il y a une frac­
tion de la bourgeoisie qui est
démocrate et dans laquelle se
retrouvent les ju i f s ; parce qu'eux
ne peuvent pas être fasc is te s.
Mais, j'en ai marre de me faire
tra ite r de «juif honteux» par ma
fa m ille parce que je su is a n ti­
sio n iste . 1 L e s a n ti-s io n is te s étaient, eux aussi, dans la rue,
alors que la bourgeoisie juive,
pour des questions de fric , est
prête à s 'a l l ie r avec des mecs
comme Giscard qui tolèrent les
bandes armées fa scistes. Il est
essentiel de dire qu'aujourd'hui,
c 'e s t B lo ch , Weil, Stoléru qui
sont des
nous !
«juifs
honteux». 1Pas
■ On a souvent parlé de com­
munauté juive...
□ L a communauté juive est
souvent id e n tifié e au sionisme.
Mais elle n 'e st pas que cela.
E ll e est aussi regroupée c lé r i ­
cal ement. E lle a existé aussi
par rapport à la répression, et
ce lle -c i ce n 'e s t pas uniquement
45. C 'e s t ma grand-mère qui
s 'e s t barrée de son v illa g e à
cause des pogroms et qui a ba­
lancé des grenades sur la gueule
des soldats du Tsar. C 'e s t mes
oncles, en 36, alla n t tous les
dimanches sur les marchés du
18ème, faire le coup de poing
contre les Croix-de-Feu..v J uif,
c 'e s t aussi une communauté c u l­
tu re lle marquée également par
Ut- „ hVOKT
« r
,,J JW6
t
la religion. Mais avec les idées
du X IX 0 siècle, avec le dévelop­
pement du capitalism e, e lle a
donné naissance à un fort cou­
rant de gauche dont je me reven­
dique. 'La communauté juive rus­
se a joué un rôle important dans
le mouvement de 17. L e journal
révolutionnaire américain écrit
en yiddish, «Freie Arbeiter Stimme»... ce sont mes références
c u ltu re lle s .
Le sionisme, c 'e s t ju s t ifie r
l'E t a t d'Israël par les m illio n s
de morts ju ifs. C 'e s t le trauma­
tisme de la guerre qui crée le
sionisme. Mais les morts ju ifs ,
aussi nombreux s o ie n t- ils , ne
ju s tifie ro n t jamais les bombes
au napalm et les bombes à b ille s
sur les camps p a le s tin ie n s, ni
l'e x is te n c e de la torture en Is­
raël. Je pense qu'aujourd'hui,
la crise, le coût de la v ie ... don­
nent beaucoup plus d 'a p titu d e s
à la réorganisation d'un mouve­
ment ouvrier en Israël; la lutte
va reprendre le pas sur l'u n ité
face au monde arabe. En France,
la situation est différente; le
sentiment de «peuple juif» se
trouve renforcé par l'ab sence
quasi-totale d 'o uv riers et par
l'omni-présence
de la p etite
bourgeoisie dans la communauté
juive. Mais il va y avoir, du fa it
de la p rolétarisatio n, de plus en
plu s de ju ifs , et j'en s u is le ty ­
pe même, qui vont se retrouver
dans la classe ouvrière, ç a po­
sera alors, de façon plus accrue,
des problèmes de classe à l ' i n ­
térieur de la communauté.
■ Au moment de la création
des kibboutz, certains li­
bertaires ont défendu Is­
raël, voyant là une expé­
rience
autogestionnaire.
Avec le recul, que peut-on
en dire?
□ C 'e st comme les l ib e r t a i­
res qui sont rentrés à F . 0.1 L e s
kibboutz c 'e s t 7 % de l'économ ie
israélienne, quant au soc ia lism e
là-dedans... Je ne peux pas être
d'accord avec Israël parce que,
d'abord, c 'e s t le représentant de
l'im p é ria lis m e américain, le gen­
darme du Moyen-Orient, et qu'en­
suite c 'e s t un Etat. Je ne vois
pas poi rquoi, d'un point de vue
lib e rta ire , je ju s t i f i e r a i s plus
tel E tat que tel autre. L e seul
truc c 'e s t que je me refuse à y
mettre les pieds. Y'en a qui boy­
cottent les oranges Outspan, moi
je boycotte Israël ! ■
7
Pologne
Syndicat :1
Démocratie =0
D epuis cet été, l'h is to ir e court v ite
en Pologne. A l'e n th o u s ia sm e des mois de ju il le t et août
a succédé une réalité
plus complexe. Une sacrée partie d'échecs où l'e s p o ir
reste encore présent..1
L ’ ECONOMIE MALADE DE
LA PL A N IF IC A T IO N
e s t m ain te n a n t devenu une
b a n a lité que de s o u lig n e r le
marasme dans le q u e l se dé­
bat l'é c o n o m ie p o lo n a is e . T o u te s
le s grèves ont tém o ig n é des d if f ic u l­
tés a lim e n ta ire s e x is ta n t dans le
pays. L e s re v e n d ic a tio n s o u v riè re s
C
8
*
sont é c la ira n te s , non seulem ent sur
le s carences en p ro d u its de prem iè­
re n é c e s s ité , m ais égalem ent sur
les in co h ére n ce s de la p ro d u ctio n
e t de la d is trib u tio n . B re f, sur l'é ­
chec, à tous les n iv e a u x , de la p la ­
n ific a tio n . Un exem ple, parmi ta n t
d 'a u tre s : les d o cke rs, a doptant une
p o s itio n
ra d ic a le , ont re fu sé de
charger des bateaux e x p o rta n t des
denrées a lim e n ta ire s fa is a n t d éfaut
en P o lo g n e même.
L 'e n d e tte m e n t v is -à -v is des pays
o c c id e n ta u x (E ta ts -U n is in c lu s ) est
de l'o rd re de 2 1 m illia r d s de d o lla rs .
E t K a n ia , nouveau prem ier s e c ré ta i­
re p o lo n a is , a obtenu, lo rs de sa
v is it e à Moscou le 3 o cto b re d e rn ie r,
des prê ts en d e v is e a in s i que des
liv ra is o n s de c é ré a le s . A ce n ive a u ,
l'a c c o rd e n tre le s b o u rg e o is ie s , de
l'O u e s t comme de l'E s t , a été to ta l :
a id e r au maximum l'E t a t p o lo n a is à
m a in te n ir son p o u v o ir. Il e s t v ita l
pour les d iffé re n ts b lo c s que le gou­
vernem ent de P o lo g n e p u is s e a p a i­
ser le mouvement o u v rie r et il n 'e s t
d 'a ille u r s pas im p o s s ib le que, mo­
m entaném ent du m oins, c e r t a i n s
p a llia tifs s o ie n t tro u v é s à la s itu a ­
tio n .
I
: SANS F R O N T IE R E S
ce» en appelant à ses côtés le géné­
ral M oczar, A in s i la b o u rg e o is ie
p o lo n a is e , re n o u ve lée au sommet,
e s s a ie de c o n c ilie r to u te s les fra c ­
tio n s qui la com posent. M ais les
lu tte s o u v riè re s , h a b itu é e s à ces
tra d itio n n e ls changem ents d 'a c te u rs ,
demandent des g a ra n tie s à ce tte
n o u v e lle a llia n c e .
SOLIDARNOSC : BRECHE OU
POTION MAGIQUE?
a cré a tio n des s y n d ic a ts lib re s
et leur lé g a lis a tio n ont s u s c ité
la
q u a s i-u n a n im ité dans la
c la s s e o u vriè re . E xacerbées par la
m auvaise v o lo n té des a u to rité s à reco n n a ftre ces n o u v e lle s s tru c tu re s ,
les lu tte s se sont souvent a m p li­
fié e s . L a m ise en p la ce des s y n d i­
ca ts, par la dynam ique re v e n d ic a tiv e
q u 'e lle n 'a pas manqué de su s c ite r,
a provoqué un moment de pa n iqu e au
sein de to u te s les c la s s e s d irig e a n ­
tes du Comecon, et même bien audelà. L a peur q u 'il s 'a g is s e d'un
prem ier pas vers la rem ise en cause
de toute la stru ctu re p o litiq u e les a
h antés et les hante p a rfo is encore.
M a is, a u jo u rd 'h u i, le s y n d ic a t
« S o l i d a r i t é » né de ces lu tte s , est
reconnu comme « u n e f o r c e d e p r o ­
g r è s » ta n t par l ’ U nion s o v ié tiq u e que
par les pays de l'O u e s t. E t il faut
L
F a b r ic a t io n des tr a c ts e t du j o u r n a l à G d a n s k
EN CAS DE CRISE,
PURGEZ L ’A P P A R E IL
u sei n du P O U P , et dès le
m ois d 'a o û t, le tra d itio n n e l
remède de la purge a été a p p li­
qué, Au nom du «renouveau» du p a rti,
K an ia a a in s i lim ogé douze p ré fe ts,
sans trop fa ire de b ru it. Ils ont to u t
sim plem ent été rem placés par d 'a n ­
cie n s bu rea ucra te s. M ais to u s les
lim ogeages n 'o n t pas connu une
te lle d is c ré tio n , te l c e lu i du préfet
de C ze sto ch a va , W ie rz b ic k i, qui fa ­
ce à la menace de grève du 10 no­
vembre a v a it, avec b e a u c o u p de
zè le , préparé l'é ta t de siè g e de la
v i 11 e.
L e plus souvent, ce sont les
o u v rie rs eux-mêmes qui m ettent en
cause les bureaucrates «incompé­
tents» ou peu scru p u le u x; le p o u vo ir
ne fa is a n t q u 'e n té rin e r c e tte dénon­
c ia tio n . On p o u rra it se demander si
à tra v e rs c e tte attaque co n tre les
«qualités» de c e rta in s bureaucrates
ne se p ro file pas une rem ise en cau­
se du rô le du p a rti. En ré a lité , la
c ritiq u e im p lic ite e x is te (au niveau
de la ju s tic e , de la p o lic e , de la
p la n ific a tio n ! mais ne tro u ve aucun
débouché e x p lic ite . E s t-c e ré a lism e
et prudence face au risq u e d'une
in terve ntio n s o v ié tiq u e ? V o lo n té de
s'en te n ir là ? L a le c tu re a tte n tiv e
des d éclaratio n s de W alesa ou de
Kuron montre q u 'il n 'a ja m a is été
question « d ' a b o r d e r l e p o l i t i q u e », et
il est c la ir, s e m b le -t-il, que la gran­
de m a jo rité de la c la s s e o u v riè re
s 'e s t trouvée réunie d e rriè re cet
o b je c tif.
A
C e la même fix e une échéance à
la n o u v e lle b o u rg e o is ie : agrandir et
c o n s o lid e r son a s s is e s o c ia le d 'ic i
le Congrès e x tra o rd in a ire du parti
aux m ois de m ars-a vril 81. Or, à la
base ymême du parti sont apparus
des m o u v e m e n t s c o n te s ta ta ire s .
Dans douze v ille s (dont L o d z , Torun, Radom, C ra co vie ) des m ilita n ts
ont m is en place des s tru c tu re s ho­
riz o n ta le s entre s e c tio n s d 'e n tre p ri­
se et q u a r t i e r s . L e s nouveaux
bureaux élus ont été trè s rapidem ent
e t trè s vive m e n t condamnés par le
dernier Plénum de novembre. C 'é ta it
pourtant là l'am orce de la recher­
che d ’ un consensus qui p e rm e ttra it
à une n o u ve lle fra c tio n de la bour­
g e o is ie d 'a c c é d e r puis de se m ain­
te n ir au p o u vo ir. A m b ig u ité qui fa it
que K ania, to u t en c ritiq u a n t une
te lle p ra tiq u e n'e n est pas m oins
amené à in té g re r au Bureau p o lit i­
que des personnes garantes de ce
renouveau. A m b ig ü ité encore qui le
porte à rassurer l'a ile « co n se rva tri­
d ire que l'a ttitu d e «réaliste» des
membres de la com m ission n a tio n a le
de «S o l i d a r n o s c » ne peut que leur
donner raison. D e p u is fin -a o û t, leurs
appels à la re p rise du tra v a il e t au
retour au calm e, se m u ltip lie n t. En
août, déjà, le MKS et le gouverne­
ment, dans un appel c o n jo in t «de,r i d e n t à t o u t e s l e s e n t r e p r i s e s d e
s e j o i n d r e au MKS. m a i s q u ' e l l e s n e
s e m e t t e n t p a s e n g r è v e » . En novem ­
bre, les seules grèves e n visa g é e s
par la d ire c tio n sont d 'u n e durée l i ­
m ité e (de 1 à 24 heures) e t p o rte n t
« Non, pas è nouveau ! » vitrine polonaise à Katowice.
9
SANS F R O N T IE R E S
uniquem ent sur la re co n n a issa n ce du
fa it s y n d ic a l.
Q uant aux s a la ire s , «S o lid a rité »
v e u t n é g o cie r un com prom is n a tio n a l
lim ité aux bas s a la ire s et co n ce r­
nant les seuls tr a v a ille u r s «qui rem­
p l is s e n t une jo n c tio n s o c ia le impor­
ta n te » (1). On e s t trè s lo in des
re v e n d ic a tio n s de j u il le t : 2 0 0 0 z lo ­
ty s d 'a u gm e n ta tio n pour to u s les
tr a v a ille u r s ! Quant à la «jo n c tio n
s o c ia le im p o rta nte », on s a it comment
e lle se d é fin it à l'O u e s t comme à
l'E s t. «S o lid a rité » a v ite a p p ris de
ses hom ologues e u ro p é e n s...
M a is p lu s im p o rta n t, e t donc plus
grave pour l'a v e n ir du mouvement
o u v rie r, que ces re tra its q u a n tita tifs ,
e s t le net recu l de la dém ocratie d i­
re c te qui a v a it été m ise en p la ce et
v é cu e pendant le s lu tte s au m ois de
j u i l l e t (2). A G danzk, en a o û t, a v a it
été créé un c o m ité in te r-e n tre p ris e
form é de délégués é lu s par l'e n s e m ­
b le des u s in e s en grève. A la fin du
m o is , ce co m ité désigna un p ré s i­
dium . A in s i n a q u it, m i-septem bre, la
co m m ission n a tio n a le de «S o lid a rité ».
En p rin c ip e donc, ce n 'e s t qu'une
c o o rd in a tio n p ro v is o ire . L a p u b lic ité
des débats e t les nom breux m eetings
ont été te ls ju s q u 'à c e tte date, que
l'o n peut raiso n n a b le m e n t penser
que les délégués ont été constam ­
ment c o n trô lé s par la base.
M a is, depuis que
l'e m p o rte , le s m icros
le ré a lism e
fo n c tio n n e n t
m oins bie n . Ce sont m a in te n a n t des
perm anents a p p o in té s, sans aucun
c o n trô le de la base, qui n é g o c ie n t
d 'é g a l à égal avec le p o u v o ir. P rê ts
à a s s o c ie r les tra v a ille u rs à la ges­
tio n de la c ris e , to u s le u rs appels
vo n t dans le sens d'u n e c e n tra lis a ­
tio n : accords n a tio n a u x (revus à la
b a is s e ), appel à la re p ris e dans les
e n t r e p r i s e s m ais m ise en place
d 'u n e grève n a tio n a le d'u n jo u r (le
3 octobre) pour la re co n n a issa n ce
du syn d ic a t.
TOUT N ’ EST PAS
AUSSI SIMPLE QUE
WALESA LE DIT
es m illio n s d 'a d hé re n ts de «So­
lidarité» ne s 'id e n tifie n t pas
tous avec leurs d irig e a n ts et
m algré l'in s is ta n c e des appels à la
re p rise , les grèves se sont p o u rsu i­
v ie s . L e s d irig e a n ts s y n d ic a u x ont
même été amenés, sous peine de dé­
bordem ent, à épouser c e rta in e s re­
v e n d ic a tio n s de la base. A ce tte
heure, il s e ra it cependant absurde
de d ire q'y'un réel d iv o rc e e x is te au
sein du s y n d ic a t. A la base, ce qui
sem ble dom iner, c 'e s t l'in d iffé re n c e
à l'é g a rd des a ttitu d e s p rise s par la
d ire c tio n : les lu tte s par se cte u r se
m a in tie n n e n t. M ais ce qui e s t c e r­
ta in , comme nous le d is io n s p lus
L
haut, c 'e s t le re cu l rap id e de la dé­
m o c ra tie d ire c te .
C e tte c o m b a tiv ité dans le s lu tte s ,
à la base, re p résente un danger ta n t
pour le POUP que pour les h ié ra r­
c h ie s s y n d ic a le s . L e risq u e de con­
ta g io n le plus g ra ve e st là, e t c 'e s t
ce que c ra in t le p lus la bo u rg e o isie
du Comecon. L 'in te rv e n tio n s o v ié ti­
que, quoi qu'on en d is e , ne peut
s 'e n v is a g e r que s i c o m b a tiv ité et
dém ocratie sont m a intenues et dé­
ve lo p pé e s par le p ro lé ta ria t po lo ­
n a is . L à est à Ip fo is le risq u e e t la
brèche. Dans l'é ta t a c tu e l du monde
s o c ia lis te , c e tte d e rn iè re ne peut
s 'a m p lifie r sans risq u e , qu'en comp­
ta n t avec la s o lid a rité a c tiv e des
c la s s e s o u v riè re s des pays de l'E s t .
C 'e s t la se u le q u e stio n d 'im p o rta n ­
ce. D 'a u ta n t p lu s im portante, q u 'a ­
près un m a g n ifiq u e bond en avant,
le p ro lé ta ria t p o lo n a is risq u e fo rt de
se re tro u ve r bien q u a d rillé par un
s y n d ic a t «new look», n é g o c ia n t peu
à peu son in té g ra tio n dans le s orga­
nes de d ire c tio n du p ays. ■
MARCOS.
20 décembre 1980.
( 1) E x t r a i t d'ur. texte s ig n é par Wa­
lesa, C w ia zd a ( Gdanz) et B u ja k
( Varsovie).
(2) V o ir «Démocratie d ire c te ? O ui,
m erci I», A go ra n ° 3, automne 80.
SANS F R O N T IE R E S
Turquie
APRES LE COUP D’ETAT
L E COUP D’ E T A T MILITAIRE
DU 12 SEPTEMBRE 80
t t e s t fin a le m e n t l'a rm é e qui
' v i e n t de ré g le r, de façon bru­
ta le , la guerre de c la s s e que
co n n a ft la T u rq u ie d epuis p ra tiq u e ­
m ent tr o is a n s ...
C
O b é issa n t au c a p ita l in te rn a tio ­
nal (USA et R F A ) e lle e s t in te rv e ­
nue avec l'a p p u i in c o n d itio n n e l de
l'O T A N (des manoeuvres m ilita ire s
de c e tte dernière se d é ro u la ie n t en
même temps en T h ra c e T u rq u e !).
L e général T a s h in Sahinkaya
(chef d 'E ta t-M a jo r des fo rce s aé­
riennes) re v e n a it des USA avec,
dans ses poches, le so u tie n e t l'a s ­
surance de l'a id e du super-grand
dans ce qui d e v ie n t, décid ém e n t, le
lot q u o tid ie n du peuple tu r c ! Un
coup d 'E ta t bien fom enté, ré g lé de
main de m aftre, sans e ffu s io n de
sang ou presque (le s d ic ta te u rs
la tin o -a m é rica in s en prendront de la
g ra in e ...). L a te ch n iq u e a c o n s is té
en c u e illir le peuple turc à «l'heure
du la itie r» : im aginez d 'a rriv e r au
tra v a il un beau m atin et de tro u ve r
des tan ks devant la porte; de bran­
cher la té lé pour les in fo s de m idi
et, au lie u de re tro u ve r G icq u e l, d 'y
v o ir Mas su ... vous aurez to u t com­
p ris !
Ce coup d 'E ta t des c in q géné­
raux -a n n o n c é par p lu s ie u rs m ises
en garde de l'arm ée dont la d ernière
en date rem onte à la F ête des F o r­
ces Armées — n 'a apparemment sur­
p ris personne dans les m ilie u x f i ­
n a n cie rs. L e nouveau gouvernement
a reçu le soutien im m édiat du Fond
M onétaire In te rn a tio n a l, de la Ban­
que M o n d ia le , de la Banque C e n tra ­
le, de la C EE et de l'O C D E .
Seules notes d is c o rd a n te s : la
suppression du d ro it de grève, la
ferm eture des locaux syndicaux,
l'a rre s ta tio n des m ilita n ts p o lit i­
ques (en m a jo rité de «gauche»), l 'i n ­
te rd ic tio n des m a n ife s ta tio n s et des
journaux d 'e xtrê m e -g a u ch e ... pécad i Ile s en quelque s o rte !
LES
L
rapide de la «démocratie», fa is a n t
a in si co n fia n c e , en qu elque sorte,
au C o n s e il N a tio n a l de la S é cu rité ,
d irig é par le général Kenan Evren
qui passe pour ê tre un m odéré...
I l fa u t d ire que ce coup d 'E ta t a
posé problèm e aux id é ologue s de
gauche car l'a rm é e a re n ve rsé un
gouvernem ent de d ro ite en la per­
sonne de D em irel et de son p a rti de
la J u s tic e . A lo rs , que p e n se r? Que
c 'e s t la gauche qui a fa it le coup
d 'E ta t ou qui en p ro fite ra ? P lu ­
s ie u rs h yp o th è se s em barrassantes
v o ya ie n t le jour, à s a v o ir q u 'il pou­
v a it e x is te r des p u tschs m ilita ir e s
servant la «gauche». P our le s T u rcs
de P a ris , du m oins ceux org a n isé s
dans la C F D T , les choses ont été
c la ire s dès le d é p a rt: c 'é ta it un
coup d 'E ta t fa s c is te . Des fa s c is te s
re n ve rsa n t d 'a u tre s fa s c is te s , c 'e s t
surprenant et in h a b itu e l entre eux!
CLAIR E T LOGIQUE
REACTIONS
a ré a ctio n au niveau in te rn a ­
tio n a l a été bien fa ib le , la
gauche européenne se co n te n ­
ta n t de souhaiter le ré ta b lis s e m e n t
L
ans
a ré a lité e s t beaucoup p lu s
c la ire et lo g iq u e . L a T u rq u ie
co n n a ft, d epuis au m oins tro is
(v o ir «Agora» n°3 ) un c o n flit
11
SANS F R O N T IE R E S !
n e s s e s c o l a r i s a b l e des « m a u v a is e s
id é e s » !
A lo rs ,
pour l ' e x e m p l e e t pour
m o n tre r q u ' i l ne f a i b l i r a pa s, le
C o n s e il
N a tio n a l
de l a S é c u r i t é
v i e n t de f a ir e e x é c u t e r pa r p e n d a i­
son, à A n k a r a , d e u x e x t r é m i s t e s ,
l' u n de d r o i t e e t l ' a u t r e de g a u c h e
(c e s o n t le s p r e m iè r e s e x é c u t i o n s
o f f i c i e l l e s d e p u is 7 2 . . . ) .
L a s t r a t é g i e d é c i d é e s e m b le ê t r e
le r e n fo r c e m e n t du p o u v o i r du c h e f
de l ' E t a t au d é t r i m e n t du P a r l e m e n t ,
en s ' i n s p i r a n t de la C o n s t i t u t i o n de
la V° R é p u b li q u e , en r e n f o r ç a n t e t
en u n i f i a n t le s « d r o ite s f r a t r i c i d e s » .
De t o u te f a ç o n , le r ô l e de K e n a m
E v re n e t des m i l i t a i r e s f i n i r a l o r s ­
que le s U S A et la b o u r g e o i s i e t u r ­
que l ' e s t i m e r o n t n é c e s s a i r e .
E n a t t e n d a n t , le g o u v e r n e m e n t
p r o v i s o i r e a t t e n d un s u r s a u t n a t i o ­
nal e t d e s . . . «s a c r i f i c e s i n d i s p e n s a ­
p e r m a n e n t, un e v é r i t a b l e gu e rre de
c l a s s e (5241 t u é s e t 1 4 .152 b l e s s é s
au c o u r s de s d e u x d e r n i è r e s a n n é e s ) .
C e c i p e r t u r b a i t en p e rm a n e n c e le s
p r o f i t s de s t r u s t s n a t io n a u x e t i n t e r ­
n a t io n a u x ; le s c o n f l i t s e t le s g rè v e s
s ' é t e r n i s a i e n t s u r de lo n g s m o is ,
v o i r e de s a n n é e s . .. O r, po ur le pa­
t r o n a t et la f in a n c e , t o u t d o i t a v o ir
une f i n , même si l a d r o i t e , h a b i t u e l ­
le m e n t
tra tio n
c h a rg é e de g é re r l ' a d m i n i s ­
du p a y s , e s t au p o u v o ir .
D ' u n a u tre c ô té , il n ' e s t pas
p o s s i b l e po ur l ' O c c i d e n t c a p i t a l i s é
de l a i s s e r la T u r q u i e da ns un é ta t
de z i z a n i e pe rm a n e n t, d ' a u t a n t plus
que l a R u s s i e e s t là , t o u t e pro c h e .
A l o r s , une s o l u t io n c o n s i s t e en l ' u ­
t i l i s a t i o n de ce qui e s t f i a b l e , bê te
et d i s c i p l i n é : l ' A r m é e ! On r e s s o r t
l e t r u c de l ' e n n e m i i n t é r i e u r . . .
12
E n c o r e une le ç o n pour le s t e ­
n a n ts de l'a r m é e et le s l é g a l i s t e s
o c c i d e n t a u x de t o u s bo rds c a r a u ­
j o u r d 'h u i , en T u r q u ie , l e s p r o l é t a i ­
res s o n t en t r a i n de d é g u s t e r . . .
P o u r le m om e nt, e t comme lo r s
des p r é c é d e n t s c o u p s d ' E t a t m i l i ­
t a i r e s , le p r o l é t a r i a t r é v o l u t i o n n a i r e
fa it
le «dos rond» a t t e n d a n t des
jo u rs m e i l l e u r s e t le r é t a b l i s s e m e n t
d 'u n g o u v e r n e m e n t c i v i l .
Po u r l'h e u r e , il lu i s e r a i t s u i c i ­
d a i r e de se m a n if e s t e r o u v e r t e m e n t ,
d o n n a n t a i n s i un p r é t e x t e a u x m i l i ­
t a ir e s pour j u s t i f i e r le n e t t o y a g e
e n t r e p r i s pa r ce c o u p d ' E t a t .
L a «grande l e s s iv e » a d ' a i l l e u r s
d é jà com m e nc é à l ' E d u c a t i o n N a t i o ­
n a le et dans le s e c t e u r a d m i n i s t r a t i f
ju g é tr o p à «gauche». L ' o p é r a t i o n
v i s e é v id e m m e n t à é c a r te r la je u ­
b l e s d e la p o p u l a t i o n . L a f i n d e s
g r è v e s qui o n t c a u s é d e g r a n d e s
p e r t e s à l ' é c o n o m i e t u r que e t qui
n ô u s ont f a i t pe r d r e 130 à 2 0 0 m i l ­
l i o n s de d o l l a r s d ' e x p o r t a t i o n e s t
un g ra n d a v a n t a g e p o u r l e p a y s et
pour l e s ouv ri ers eux -m êm es n (Turg u t O z a l, c o n s e i l l e r é c o no m iq u e de
Sule ym a n D e m ir e l , c h a m p io n de la
l i b e r t é d ' e n t r e p r i s e e t de l ' é c o n o m i e
de m arch é, V i c e - P r e m i e r M i n i s t r e
du n o u v e a u g o u v e r n e m e n t ).
P o u r n o s c a m a ra d e s T u r c s , de
t o u t e f a ç o n , le c o m b a t c o n t in u e i c i
et là -b a s po ur qu e le p r o l é t a r i a t
s ' o r g a n i s e et se d o te de m o y e n s
s u f f i s a n t s po ur q u 'à l ' a v e n i r n o u s
c e s s i o n s de r e s t e r des m a r i o n n e t t e s
e n t r e le s m a in s du p o u v o i r f i n a n c i e r ,
pour q u 'à l ' a v e n i r le r a p p o rt des
f o r c e s s o i t in v e r s é . ■
Yusuf D Â G .
SANS F R O N T IE R E S
A u stra lie
libertaires
en
mouvement
" a h ! M A IS I L Y
A DES AN A RS EN A U S T R A L IE ? " D E M A N D E ­
R O N T SANS D O U T E C E U X Q U I, SE S O U V E N A N T D E Q U E L Q U E S
V A G U E S IM A G E S D E K A N G O U R O U S E T D E K O A L A S , A U R O N T
R E U S S I A R E P O N D R E A F F I R M A T I V E M E N T A^ L A Q U E S T I O N
PRECEDENTE:
L ^ T fU S T R A L IE , Ç A E X I S T E ? "
E T B IE N OUI Ÿ L ’ A U S T R A L IE E X IS T E . M A L G R E L A C O N S T A N T E
E N I G M E C O N C E R N A N T L A P O S I T I O N R E S P E C T I V E D ES P I E D S
E T D E S T E T E S D E SES 14 M I L L I O N S D ’ H A B I T A N T S , E L L E
E X IS T E . E T SUR C E T E R R IT O I R E , M I - D E S E R T , M I- J A R D IN
P O T A G E R , Q U E LQ U E S C E N T A IN E S DE CAMARADES L U T T E N T
C O N T R E N OS E N N E M I S C O M M U N S .
L e mouvement lib e rta ire aus­
t r a l i e n e s t pa rmi le s p l u s je u n e s
du m o n d e : en t a n t que m o u v e ­
m en t il a t o u t j u s t e u n e d i z a i n e
d 'a n n é e s d ' e x i s t e n c e r é e l l e . C e c i
ne l ' a pas e m p ê ch é de d e v e n ir
l'u n e des f o r c e s d ' o p p o s i t i o n le s
p lu s im p o r t a n te s du p a y s . M a is ,
c e c i ne lu i a pas é v i t é , no n p l u s ,
d ' im p o r t e r t o u t e s le s d i v i s i o n s
dans l e s q u e l l e s se d é b a t t e n t les
l i b e r t a i r e s du m on de e n t ie r .
G E O -P O L IT IQ U E
A N A R C H IS T E
Avec
u n e p o p u la t io n
( 1 3 ,5
m i l l i o n s d ' h a b i t a n t s ) qui ne d é ­
p a s s e pas les 3% de la p o p u la t io n
eu ro p é e n n e m a is qui se r é p a r t i t
s u r un t e r r i t o i r e é q u i v a l e n t aux
3 / 4 de l'E u r o p e , l ' A u s t r a l i e v o i t
le s 86% de sa p o p u la t io n c o n ­
c e n t ré s d a n s le s v i l l e s de ses
s ix E ta ts e t de ses deux t e r r it o i­
res. L e s f i e s s o n t p r a t i q u e m e n t
i n h a b it é e s , e x c e p t é e la T a s m a ­
n ie ,
e t e n c o re , c e t t e d e r n iè r e
e s t-e lle
peu l i é e à la grande
T le - c o n t in e n t .
L e p re m ie r o b s t a c l e que re n ­
c o n tre l ' a n a r c h i s t e a u s t r a l i e n e s t
do nc un o b s t a c le g é o g r a p h iq u e .
A l'é n o rm e d i s t a n c e qui le s é p a ­
r e de s a u tre s c e n t re s du m o u v e ­
m en t a n a r c h is t e m o n d i a l, v i e n t
s ' a j o u t e r la d i s t a n c e im p o r t a n te
e n t re le s v i l l e s où l' a n a r c h i s m e
a u s t r a li e n d é v e lo p p e ses a c t i v i ­
tés.
L e g r o u p e de P e r t h , par
e x e m p le , e s t à 2 7 00 k i l o m è t r e s
du c e n t r e l i b e r t a i r e le p lu s p ro ­
che, e t e n tre le s v i l l e s c ô t iè r e s
de l ' E s t et du Sud (C a m b e rra , la
c a p i t a l e a v e c ses 2 1 0 .0 0 0 h a b i ­
t a n t s ; S id n e y a v e c 3 m i l l i o n s ;
M e lb o u rn e , 2 ,7 m i l l i o n s ; B r is b a ne, 1 m i l l i o n ; A d e l a i d e , 0 , 9 m i l ­
lio n ) qui s o n t les v i l l e s où l ' a c ­
t i v i t é l i b e r t a i r e e s t la p lu s g r a n ­
de, il y a, en m oye n n e , q u e lq u e s
8 0 0 k il o m è t r e s .
C e c i e x p l i q u e non s e u le m e n t
que l ' h i s t o i r e r é c e n te de l' a n a r c h is m e
a u s tra lie n
ne
c om p te
q u 'u n e v in g t a i n e d ' a n n é e s , m a is
a u s s i que la c o o r d i n a t io n m i n i ­
mum p o u v a n t p e r m e t t re de p a r le r
d 'u n
«m ouvem ent l i b e r t a i r e » ne
da te que de c e s d i x d e r n i è r e s an ­
n é e s . De n o m b r e u x v o y a g e s e n tre
les v i l l e s des c ô t e s E s t e t Sud,
e n t re c e l l e s - c i e t l ' E t a t de l ' A u s ­
t r a l i e O c c i d e n t a l e ou l ' E t a t de
T a s m a n ie , o n t pe rm is la c o n s t i ­
t u t i o n de ce je u n e m o u ve m e n t.
I l n e f a u t c e p e n d a n t pas c r o i ,
re qu e ces l i e n s a i e n t e n t ra î n é
une
q u e lc o n q u e u n i f o r m i s a t i o n .
C h a q u e gro upe a m a in t e n u ses
c a r a c t é r i s t i q u e s , ses d i ff é r e n c e s ;
i l le s a même, p a r f o i s , a c c e n ­
tuées. L e s a c tio n s c o n crè te s res­
t a n t le p o in t de r e n c o n tr e le p lu s
f r é q u e n t. L ' i s o l e m e n t des v i l l e s
13
• Katheri
SANS F R O N T IE R E S
a u s t r a l i e n n e s s ' e s t r é p e r c u té s u r
le s gro up es qui y a g i s s e n t e t
c ' e s t a i n s i que c h a c u n e des t e n ­
d a n c e s (en f o r ç a n t un peu l ' i m a ­
ge) a une v i l l e p o u r c a p i t a l e . L e
c o n s e i l l i s m e (en t o u t cas sa v a ­
r ia n t e a u s t r a l i e n n e ) e s t c o n c e n ­
t r é à B r i s b a n e ; la g ra n d e v i l l e de
S id n e y r a s s e m b le le s c o u ra n ts in ­
d iv id u a lis te s
et sp o n ta n é is te s ;
a l o r s que M e lb o u r n e e s t le re n ­
d e z - v o u s des l i b e r t a i r e s q u i o n t
c h o is i de p o r te r le u rs e f f o r t s sur
le s s y n d i c a t s .
UN
P EU
D ’ H IS T O IR E
L e p r e m ie r g ro u p e a u s t r a li e n
m é r i t a n t le q u a l i f i c a t i f a n a r c h i s ­
te , t i e n t sa r é u n io n c o n s t i t u t i v e
le 1° mai 1886 à M e lb o u r n e . M a is
le s c o u r a n ts i n d i v i d u a l i s t e s et
c o m m u n is t e s
qui
le ^c o m p o s e n t
f i n i r o n t pa r se s é p a r e r t r o is ans
a p rè s , le s p r e m ie r s r e j o i g n a n t le
P a r t i T r a v a i l l i s t e e t le s s e c o n d s
le P a r t i C o m m u n is te . M a l g r é son
p e t i t nom bre d ' a d h é r e n t s ( i l n ' a
ja m a is d é p a s s é 7 5 p e rs o n n e s ) ,
ce g ro up e é t a i t la s e u le o r g a n i ­
s a t io n de ga u ch e e x i s t a n t s u r la
v i l l e à c e t t e é p o q u e . Il p e rm e ttra ,
d i x an s p l u s ta rd , la n a is s a n c e
du groupe a n a r c h i s t e de S id n e y .
Q u e lq u e s ja lo n s p e r m e t t e n t de
s u i v r e le f i l h i s t o r i q u e d 'u n m o u ­
v e m e n t d o n t la n a i s s a n c e r é e l l e
e s t t o u te r é c e n t e : c ' e s t le ca s du
courant
a n a r c h o - c o m m u n i s t e de
S id n e y dans le s a n n é e s qui p r é ­
c é d è r e n t la 1° gu e rre m o n d ia le ,
c ' e s t é g a l e m e n t le c a s de «Chummy» F l e m i n g , f o r t e p e r s o n n a l it é
des a n n é e s 50.
M a l g r é le d é v e l o p p e m e n t p ré ­
c o c e d ' u n s y n d i c a l i s m e de c la s s e
(en p a r t i c u l i e r chez le s m in e u rs
e t le s be rg e rs), une s é r i e de d é ­
f a i t e s o u v r iè r e s dans le s années
1890, o r i e n t è r e n t le m o u v e m e n t
s y n d i c a l v e rs le p a r le m e n t a r is m e
e t lu i d o n n è r e n t un r ô l e de mé­
d i a t e u r ; te n d a n c e s q u i, a u jo u r ­
d ' h u i e n c o r e , s o n t re s t é e s d o m i­
n a ntes.
Le
s y n d ic a lis m e ré v o lu tio n ­
n a ire
a r r i v e en A u s t r a l i e , v i a
l' A m é r i q u e , au c o u r s de la p é r i o ­
de 1905 e t 1908, e t d e v i e n t un
courant
s y n d ic a l p u is s a n t ju s­
q u 'e n
1921. C ' e s t p o s t é r i e u r e ­
ment au C o n g rè s de S id n e y en
1908, qu e se c r é e n t , d a n s les
v i l l e s le s p l u s im p o r t a n t e s , des
c lu b s IWW, q u i se s i t u e n t ho rs de
la li g n e du P a r t i S o c i a l i s t e du
T r a v a i l ou de c e l l e s t r i c t e m e n t
s y n d i c a l e ( C h ic a g o ) . Une im p o r ­
t a n te c am p ag ne d ' a g i t a t i o n s ' e n ­
ga ge e t v a c u l m i n e r a v e c , d ' u n e
p a rt la m is e h o r s - l a - l o i des IWW
s u i t e à le u rs m o b i l i s a t i o n s c o n ­
tr e le r e c r u te m e n t m i l i t a i r e l i é à
la 1° gu e rre m o n d i a le , e t , d ' a u t r e
p a rt, a v e c l' a d o p t i o n d 'u n p ro ­
14
gramme de ba se d 'u n s y n d i c a t
u n iq u e ( T h e O ne B i g U n io n ) par
le C o n s e i l des S y n d ic a t s de N o u ­
v e l l e s G a le s du Sud e t par des
s e c tio n s
im p o r t a n te s
du
P arti
T r a v a illis te (P T ).
J u s q u e d a n s les années 6 0 le
s y n d i c a l i s m e r a d ic a l ( e t sa «va­
r ia n t e
a u s t r a li e n n e » :
le
p a rti
c o n t r ô l é p a r le s s y n d i c a t s ) ne
r e p r é s e n t a q u 'u n e des te n d a n c e s
de la p o l i t i q u e s y n d i c a l e des t r a ­
v a illis te s
e t des c o m m u n is t e s .
C ' e s t à p a r t i r de c e t t e d a te que
va se d é v e l o p p e r , de fa ç o n n o t a ­
b le , l ' a c t i v i t é p o l i t i q u e d i r e c t e
des s y n d i c a t s . D 'u n e p a r t, comme
c o n s é q u e n c e du re fu s des s y n d i ­
c a t s d 'a s s u r e r le p a ie m e n t des
am endes im p o s é e s par le T r i b u ­
n a l I n d u s t r ie l aux g r è v e s i l l é g a ­
le s; d ' a u t r e p a rt à c a u s e de la
r a d i c a l i s a t i o n q u 'e n t r a î n a la p a r­
tic ip a tio n
de l ' A u s t r a l i e à la
g u e rre du V ie t n a m . L e d é m a n tè ­
le m e n t du s y n d i c a t le p lu s c o m ­
b a t i f , c e l u i du b â t im e n t des N o u ­
v e l l e s G a le s du Sud, p ro v o q u a le
d é p a r t de membres du P a r t i C o m ­
m u n is t e d ' A u s t r a l i e (qu i n ' e s t ni
m o s c o v it e , ni c h i n o i s ) v e rs des
gro up es
a n a rc h is te s .
Avec
la
d i s s o l u t i o n du g o u v e r n e m e n t t r a ­
v a i l l i s t e en 1 9 7 5 , la n é c e s s i t é
d ' i m p u l s e r un p o u v o ir s y n d i c a l
in d é p e n d a n t ( e t non p a r le m e n t a i­
re) se g é n é r a li s e da ns le s ran gs
de la g a uch e.
LA
NAISSANCE
MOUVEMENT
DU
L IB E R T A I R E
C e n ' e s t q u 'à p a r t i r des a n ­
nées 60 que l' o n p e u t p a r le r d 'u n
mouvement lib e rta ire a u s tra lie n ,
j u s q u ' a l o r s l i m i t é et r e p l i é da ns
des z o n e s u r b a i n e s . Il s ' a g i t do nc
d 'u n m o u v e m e n t e x t rê m e m e n t je u ­
n e e t d i v e r s . Sa b rè v e h i s t o i r e
e s t un v é r i t a b l e magma de s i g l e s ,
f u s io n s , s é p a r a t i o n s . Il pre nd ses
s o u rc e s da ns le s gro up es d ' e x i ­
lés ( i t a l i e n s , r u s s e s , e s p a g n o ls ,
b u lg a re s ) q u i, s ' i l e s t v r a i q u ' i l s
n ' o n t eu, po ur a i n s i d ir e , au cun
p o id s s u r la s o c i é t é a u s t r a li e n n e
d ' a l o r s , o n t pa r c o n t r e marq ué
le u rs propres e n f a n t s . C e s d e r­
n i e r s , a i n s i que d ' a u t r e s é m ig ré s
non a n a r c h is t e s , des t r a v a i l l e u r s
p r o v e n a n t du P C e t du P T , des
s e c t e u r s u n i v e r s i t a i r e s , des je u ­
nes, s o n t le s p r i n c i p a l e s com po­
s a n te s du m o u v e m e n t a c t u e l.
Il e s t s i g n i f i c a t i f de n o t e r que
l ' a n a r c h is m e a u s t r a li e n r e n a î t à
p a r t i r d 'u n groupe de S id n e y f o r ­
mé pa r des d i s s i d e n t s du P C et
de la li b r e pe n sé e ( S o c i é t é L i b e r ­
t a ir e ) . En e f f e t , l ' i n t e r p é n é t r a t i o n
de s p a r t i s p o l i t i q u e s , des s y n d i ­
c a t s e t des gro up es li b e r t a i r e s
e s t sa n s d o u te le t r a i t le p lu s
s u r p r e n a n t du m o u v e m e n t a n t i ­
~ Désert
de Tanami
GRAND DÉSERT
DE SABLE
^ M a rb le
Bar
B arro w
M fg M c D onne
T
e
R
DESERT
VICTOR
/
M e e k a th a rra
G a ld s to n e
L a ve rto n
Leonora
G e ra ld to n
K a lg o o rlie
’ E R TH *^
M e rre d in
*
^ or sef!K5J^,
P o rt
AUSTRALIEN
a u to rita ire
de ce p a y s .
S c h é m a t iq u e m e n t , a u jo u r d ' h u i
le s g ra n d e s te n d a n c e s ( c ' e s t - à d i r e a y a n t une n e t te d é f i n i t i o n
i d é o lo g iq u e e t o r g a n i s a t i o n n e l l e )
s o n t au no m bre de t r o i s . L e Se l f M a n a g e m e n t Group (SMG, g ro up e
po ur l ' a u t o g e s t i o n ) f o r t e m e n t i n ­
f l u e n c é par le s id é e s de C a s t o ­
r i a d i s , t r a n s m i s e s en A u s t r a l i e
par le groupe a n g l a i s « S o lid a rity » ,
d o n t la p ro pa gan de a r e n c o n t r é un
é c h o d a n s t o u s le s E t a t s . L a F é ­
d é r a t i o n S o c i a l i s t e L i b e r t a i r e (F
S L ) qui a xe son in t e r v e n t i o n p r i o ­
r i t a i r e m e n t s u r le s s y n d i c a t s . E n ­
f in ,
la
Fédération
Anarchiste
Australienne
(FA A )
né e a v e c
l ' a m b i t i o n de re g r o u p e r l ' e n s e m ­
b le du m o u v e m e n t, m a is q u i, a u ­
j o u r d ' h u i , se r e t r o u v e , de f a i t , à
la t ê t e d ' u n e a u tre t e n d a n c e , p lu s
m é f ia n t e à l'é g a r d du r ô le d 'u n e
o r g a n is a t io n m i l i t a n t e .
L e SMG n a i t en 1970, e t se
s i t u e sur c e t t e f r o n t i è r e f l u c t u a n ­
te q u i, da ns c e r t a i n s c a s , s é p a r e
(ou u n it ) le c o n s e i l l i s m e e t le
c o m m u n is m e l i b e r t a i r e . A v e c u n e
c e n t a in e de m i l i t a n t s d a n s ses
m e i l l e u r s m o m e n ts , i l a r é u s s i à
ê tr e le c o u r a n t l i b e r t a i r e o r g a n i s é
le p l u s i m p o r t a n t q u ' a i t con nu
l ' A u s t r a l i e , a i n s i qu e d ' a i l l e u r s
le
g ro up e d ' e x t r ê m e - g a u c h e le
p l u s a c t i f e t le p l u s d é v e l o p p é ( i l
f a u t s a v o i r que le p a r ti le p lu s
p u i s s a n t de la g a u c h e a u s t r a l i e n ­
ne, le P C A , ne c o m p te que 3 0 0 0
a d h é r e n t s ) . L a p r é s e n c e du SMG
s ' e s t a m e n u is é c e s d e r n iè r e s a n ­
n é e s , à la s u i t e des s c i s s i o n s
s u c c e s s i v e s de c e u x qui o n t o p té
po ur de s o r i e n t a t i o n s a u s s i d i ­
v e r g e n te s que la c o n t r e - c u l t u r e
ou le lé n i n i s m e le p lu s o r t h o d o x e .
M algré
son o r i e n t a t i o n
so cia -
C arpentane ^ L a u rà \^ ÿ — —
•
iather
#VcôokTown;
: SANS F R O N T IE R E S
Cairns
CHEMINS DE (C ON-)FUSION
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N e w c a s tle
Vr ' ' V , - » ^ - W o H o n g o n g
ADELAÏDE
C a n b e rra "!!
VI CTORI A
G e ç long ^
M ELBOURNE
l i s t e h u m a n is t e , c e r t a i n s gro up es
r e p r o c h e n t au SMG son p e n c h a n t
« a u to rita ire » , da ns la m e su re ou
son
m ilita n tis m e
exacerbé
l'a
c o n d u it à se d o t e r d ' u n e o r g a n i­
s a t io n
qu e c e r t a i n s d é n o n c e n t
comme « t r o t s k y s t e » , e t q u 'e u x mêmes j u s t i f i e n t par la d u re ré­
p r e s s io n r é g n a n t sur la T e r r e de
la R e in e . «N o t r e g r o u p e r e s t e r a
c l a n d e s t i n a u s s i l o n g t e m p s que
le s affrontements ne seront pas
a s s u m é s p a r V e n s e m b l e d e s tra­
v a i l l e u r s » p e ut-on l i r e da ns leur
o rg a n e d ' e x p r e s s i o n , le «Libertarian Worker». A n t i m a r x i s t e s , i l s
s ' o p p o s e n t é g a le m e n t à ce q u ' i l s
a p p e l l e n t les «fronts i n t e r c l a s s i s tes», comme le fé m in is m e e t l'a n t i m i l i t a r i s m e . M a is le p o in t le
p l u s a f f ir m é chez e u x , e s t l ' a n t i s y n d i c a l is m e .
«L e s
syndicats,
rouages in te rm éd iai res entre le s
t r a v a i l l e u r s e t le p a t r o n a t , n ’a r t i ­
culent
pas
une contradiction,
mais
r é a l i s e n t u n e s y m b i o s e »,
i des b e s o i n s a l i m e n t a i r e s , d e l o ­
g e m e n t , d ’amour, d e c o n t r ô l e s u r
l e u r v i e p a r l e s t r a v a i l l e u r s , n ’o n t
j a m a i s f a i t l ’o b j e t d e l u t t e s s y n ­
d i c a l e s .. .» , m a is, «nous ne p r ô ­
n ons pa s pour autant d e s s y n d i ­
c a t s n o u v e a u x , qui, d a n s la s i ­
tuation a ct u el le ,
s u b i r a i e n t la
m ê m e é v o l u t i o n qu e c e l l e d e s
s y n d i c a t s que n o u s c o n n a i s s o n s
a u j o u r d ’h u i ».
L a qu asi t o t a l i t é d e s membres
du SMG r é s i d e n t à B r is b a n e . I ls
in t e r v i e n n e n t da ns d i v e r s s e c ­
t e u rs du monde o u v r ie r , en p a r t i ­
c u l i e r le s e c t e u r s a n té , où i l s
d é f e n d e n t un e o r g a n is a t io n d é ­
c e n t r a l i s é e e t no n h i é r a r c h i q u e
r e p o s a n t s u r des c e n t r e s c om m u­
n a u t a i r e s de s a n té r e g ro u p é s au ­
tour d 'h ô p ita u x s p é c ia lis é s .
y
L ' i m p u l s i o n en d i r e c t i o n d 'u n
m ou v e m e n t l i b e r t a i r e de c a r a c t è ­
re in t e r n a t i o n a l pre nd sa sou rc e
v e r s 1970 a u to u r de la F é d é r a t i o n
d ’A n a r c h i s t e s A u s t r a l i e n s , à t r a ­
vers un e s é r ie de c o n f é r e n c e s e t
du b u l l e t i n «F é d é r a t i o n ». Si la
F A A c o n n a ft pa r la s u i t e des
s u c c è s e t des é c h e c s , c ' e s t m a l­
gré t o u t à p a r t i r de c e s i n i t i a t i ­
v e s que se s o n t d é v e lo p p é e s les
t e n d a n c e s a c t u e l l e s au r a s s e m ­
b le m e n t.
La
C o n fé r e n c e
N a tio n a le
« A n arch i s t e - L i ber ta ire - A u to g e s t io n n a ire » ,
convoquée
pa r les
gro up es des u n i v e r s i t é s de M e l­
bourne, L a T r o b e , S id n e y , et p ré­
paré e en c o l l a b o r a t i o n a ve c des
membres de la C N T e s p a g n o le en
e x i l , r é u n it en 1975 q u e lq u e s 300
c am a rad es de to u te s t e n d a n c e s et
v e n a n t des p r i n c i p a l e s v i l l e s . L a
FAA
a i n s i a f f ir m é e , r e c u e i l l e ,
b ie n que d 'u n e façon éphém ère,
le gros de l ' a n a r c h is m e m i l i t a n t
a u s t r a l i e n , et son b u l l e t i n «F é d é ­
rations > e s t p ris en c h a rg e s u c c e s ­
s iv e m e n t par le s d i f f é r e n t s g ro u ­
pes qui la c o m p o se n t.
M a is la F A A é t a i t la c o n v e r ­
ge nce de f o r c e s t r o p h é té r o g è n e s :
gro up es de d i f f é r e n t e s v i l l e s , o r i ­
g in e s s o c i a le s , s t r u c t u r e s o r g a n is a t io n n e l le s ,
o p t io n s
id é o lo g i­
qu es et p o l i t i q u e s e xtrê m e m e n t
d i v e r s i f i é e s . U n e p re m iè re r u p tu ­
re ne tarde pas à se p r o d u ir e . Sa
f r o n t iè r e e s t p lu s ou m o in s r é g io ­
n a le , et le s a c c u s a t i o n s r é c i p r o ­
ques t o u rn e n t a u t o u r de I ' « a u t o r i ­
ta ris m e » e t ( ' « i r r e s p o n s a b ili t é » .
L a 11° C o n f é r e n c e de la F A A à
M e lb o u rn e o f f i c i a l i s e ces d i v i ­
s i o n s : la F é d é r a t io n y perd la
m a j o r i t é de ses f o r c e s . A u x mê­
mes d a te s , un g ro up e im p o r t a n t
r e j o i n t le s p o s i t i o n s s y n d i c a l i s ­
t e s e x p r im é e s pa r la re vu e de
M elbo urne :
« L i b e r t a r i an S oc i al i s t ». L a F é d é r a t i o n S o c i a l i s t e
L i b e r t a i r e e s t né e.
A u j o u r d ' h u i la F A A in t e r v i e n t
s u r t o u t à S id n e y , v i l l e où le s idé es li b e r t a i r e s s o n t trè s i n f l u e n ­
te s . E l l e sert de p o in t de r é f é r e n ­
ce au x a c t i o n s s p o n ta n é e s , p lu s
ou m o in s i n d i v i d u a l i s t e s ^ e t au
m ou vem e nt l i é à la c o n t re - c u l tu r e ,
da ns la m es u re où le s m i l i t a n t s
l i b e r t a i r e s de s a u tre s o r g a n is a ­
t io n s r e f u s e n t d 'a s s u m e r ( ' « i r r e s ­
p o n s a b il it é » d ' i n t e r v e n t i o n s de ce
ty pe .
LES S Y N D IC A L IS T E S
~
M e lb o u r n e e s t le s e c o n d c e n ­
t r e de l' a n a r c h i s m e a u s t r a l i e n .
I c i , le s a c t i v i t é s se d é v e l o p p e n t
sans
i n t e r r u p t i o n d e p u is 19 66 .
N é e s à l ' U n i v e r s i t é , le s id ées
l i b e r t a i r e s g a g n è r e n t r a p id e m e n t
d ' a u t r e s m i l i e u x , y c o m p ris c e l u i
de l ' i m m i g r a t i o n . C ' e s t à M e l ­
bourne q u ' a g i t le g ro up e le p lu s
im p o r t a n t de la F é d é r a t i o n S o ­
c i a l i s t e Lib er tai re (F S L ). C e lle ci e s t é g a l e m e n t p r é s e n te à S id ­
ney, A d é l a ï d e e t en T a s m a n ie .
Sa s t r a t é g i e se c a r a c t é r i s e pa r la
v o l o n t é de s ' a s s o c i e r «à t o u t e s
l e s a c t i o n s p r o g r e s s i s t e s » dans
les s y n d i c a t s en p r i o r i t é , m a is
san s e x c l u r e des i n t e r v e n t i o n s
ave c des p a r t i s comme le P a r t i
C o m m u n is te ou T r a v a i l l i s t e . C e
«pra gm atism e» a c réé de n o m b re u ­
ses te n s io n s à l ' i n t é r i e u r de la
F S L . En p a r t i c u l i e r en 1977 où
tro is
tendances
c o -e x is ta ie n t:
certains
membres
s 'o rie n ta ie n t
vers
l'a n a rc h o -s y n d ic a lis m e ,
d ' a u t r e s v e r s le P T e t le m o u v e ­
m e n t s y n d i c a l , d 'a u t r e s e n f in t e n ­
t a i e n t d ' é l a b o r e r une s o rte de
m a rx is m e -lib e rta ire .
Tout
ceci
d é b o u c h a i t s u r des a l l i a n c e s des
p lu s f a r f e lu e s , s o u r c e s , à le u r
t ou r, de n o u v e l l e s d i v e r g e n c e s .
A u j o u r d ' h u i , la F S L v i t un p r o ­
c e s s u s de r é u n i f i c a t i o n .
«Po ur c o m p r e n dr e n o s i n t e r ­
v e n t i o n s , v i s a n t à t r a c er u n e v o i e
e x t r a - p a r l e m e n t a i r e p o u r l ’e n s e m ­
b l e de la g a u c h e a u s t r a l i e n n e
—nous e x p l i q u e l' u n des membres
les p lu s en vue de la F é d é r a t i o n —
il f a u t v o i r c e q ue s o n t a u jo ur ­
d'hui le s s y n d i c a t s australiens.
Ils n'o nt de p a re n té a v e c aucun
a ut r e m o d è l e s y n d i c a l d a n s le
monde. T o u t au p l u s p o u r r i o n s n o u s trouver, s o u s c e r t a i n s a s ­
pects, des re sse m bla nce s avec
l e s s y n d i c a t s b r i t a n n i q u e s ». O r ­
g a n i s é par E t a t s e t tr è s l i é au
P arti
T ra v a illis te ,
VAustralian
Co un ci l of Trade Union s c o n s ti­
tue une fé d é r a t io n s y n d i c a l e u n i ­
que en son ge nre. «Le P T n e l e
c o n t r ô l e p a s p l u s q u ’il n e le c o n ­
t r ô l e : il s ' a g i t p l u t ô t d ' u n e s y m ­
bi os e». P o u r la F S L , se c o u p e r
du t r a v a i l l i s m e e n t r a î n e r a i t un
é lo ig n e m e n t d e s s y n d i c a t s et, par
c o n s é q u e n t, u n e c o n d a m n a t io n à
la m a r g i n a l i s a t i o n la p lu s s t é r i l e .
«P r e n d s e n c o m p t e —i n s i s t e
le ca m a ra d e , i n q u i e t d ' ê t r e in ­
c o m p r i s — q u ' i l e s t i m p o s s i b l e en
Australie
vaillisme
de d i s t i n g u e r le T r a ­
du s y n d i c a l i s m e ». I n ­
la F S L l ' e s t par c e r­
c o m p r is e ,
ta in s lib e rta ire s a u s tra lie n s . P our
e u x , e l l e n ' e s t q u 'u n e o r g a n is a ­
tio n
« o u v r ié r is t e »
e x tr ê m e m e n t
c o m p r o m is e a v e c la b u r e a u c r a t ie
s y n d ic a le o f f ic ie lle . Q uoi q u 'il
en soit,, la F é d é r a t io n c o n s t i t u e
le m o u v e m e n t l i b e r t a i r e a c t u e l ­
le m e n t le p l u s p u i s s a n t s u r le
c o n t in e n t .
15
SANS F R O N T IE R E S r
En d e h o r s de c e s t r o i s «grands»
c o u r a n ts o r g a n is é s — SMG, F A A
e t F S L — i l e x i s t e d 'a u t r e s g r o u ­
pe s
de m o in d re im p o r t a n c e et
in o r g a n i s é s : le groupe de Cambe rra , c o n s t i t u é pa r des é c o l o ­
g i s t e s , des f é m in is t e s e t par les
« c o u ra n ts pour un mode de v ie
a l t e r n a t i f » ; les gro up es a c t i v i s t e s
de P e r t h , v i l l e d o n t le D é p a r t e ­
m e n t du S e r v i c e M i l i t a i r e a été
p a r t i e l l e m e n t d é t r u i t pa r u n e bom­
be au d é b u t de s a n n é e s 7 0 ; le
C l u b D é m o c r a t iq u e q u i, à S id n e y
comme à M e lb o u r n e , r é u n i t les
e x i l é s e s p a g n o ls de l ' U G T e t de
la C N T ; q u e lq u e s m em b res de
l' I n t e r n a t i o n a l e S y n d i c a l e R é v o ­
lu t i o n n a i r e
IWW;
le W o o d s to c k
A n a r c h i s t P a r t y , f i e f de s «fémi­
n is te s
i n s u r r e c t io n n e l le s » ,
des
« a n a r c h o - s u r r é a lis t e s » , e t c .
ATOMES, IN D IG E N ES
___________E T L U T T E S __________
Ce
p o r t r a i t du m ou vem e nt,
b ie n qu e c h a o t iq u e , r e t r o u v e une
p l u s g r a n d e c o h é r e n c e lo rs des
a c t i v i t é s u n i t a i r e s que les g ro u ­
pe s d é v e l o p p e n t p a r -d e là le u r pe­
t i t monde de s i g l e s e t de p r o c l a ­
m a tio n s .
L ' A u s t r a l i e e s t un de s rares
p a y s où la l u t t e a n t i - n u c l é a i r e
s o i t e s s e n t i e l l e m e n t a n im é e par
le s t r a v a i l l e u r s de ce s e c t e u r .
O b l i g é s de m a n i p u l e r un m a t é r i e l
dangereux,
ces
de rn ie rs
sont
c o n v a i n c u s que l ' é n e r g i e n u c l é a i ­
re c o m p o r t e p lu s de r i s q u e s que
L e f r o n t é c o l o g i q u e e s t la rg e
e t tou s le s l i b e r t a i r e s s ' y i m p l i ­
q u e n t d ' u n e fa ç o n ou d ' u n e a u t re .
E m p ê c h e r , pa r t o u s le s m o y e n s ,
le s c o u p e s s a u v a g e s d ' a r b r e s qui
o n t f a i t d i r e que « l ' A u s t r a l i e e s t
la f o r ê t du Japon», e s t sa n s au­
cun d o u t e l ' o b j e c t i f e s s e n t i e l des
é c o lo g is te s . A cela s 'a jo u te l 'o p ­
p o s itio n
au x
a u t o r o u te s ( a v e c
b a r r ic a d e s , o c c u p a t i o n s de f e r ­
m es e x p r o p r ié e s , e t c . . . ) . C e l l e s ci c o n s t i t u e n t de v é r i t a b l e s f r o n ­
t i è r e s i n t e r n e s e t m e n a c e n t de
p a r a c h e v e r la d é s e r t i f i c a t i o n du
pays.
c e s f a m e u x 5 % de chô m ag e a v e c
le s q u e l s on le s m en ace c o n s t a m ­
m e n t. A u t o u r de ce la rg e m o u ve ­
m en t c o n v e r g e n t to u s le s gro up es
l i b e r t a i r e s , le P C , la ga u c h e du
P T , a i n s i que to u te s le s n u a n c e s
d e l' e x t r ê m e - g a u c h e . L ' i d é e que
s e u ls le s t r a v a i l l e u r s o r g a n is é s
p e u v e n t en f i n i r a v e c le t r a f i c
d 'u r a n iu m e s t t r è s ré p a n d u e . A
t e l p o in t , q u ' i l y a d e u x an s le s
t r a v a i l l e u r s du po rt s o n t p a r v e n u s ,
m a lg r é de du rs a f f r o n t e m e n t s a v e c
la p o l i c e , à b o y c o t t e r l ' a r r i v é e
d 'u n e g ra n d e q u a n t i t é d 'u r a n iu m
à Meilbourne (r e v e r s de la m é d a i l ­
l e : les d o c k e r s de B r is b a n e se
p r o p a g è re n t po ur l ' a s s u r e r ) . En
f é v r i e r 1978 a eu lie u un c o n g rè s
s y n d ic a l
à c a r a c tè r e n a t i o n a l ,
qui s ' e s t c o n s a c r é e x c l u s i v e m e n t
à u n i f i e r les p o s i t i o n s s u r c e s u ­
je t .
L e m o u v e m e n t in d ig è n e ( i l ne
r e s t e p lu s que q u e lq u e s 2 0 0 . 0 0 0
d e s c e n d a n t s des p o p u la t io n s o r i ­
g i n e l l e s des Pie s: m o in s de 2 %
de la p o p u la t io n g l o b a le a c t u e l l e )
se m o b i l i s e da ns le s l u t t e s c o n ­
tr e le s e n t r e p r i s e s m i n iè r e s qui
m e n a c e n t de v e n ir à b o u t de q u e l ­
qu es te r re s que le s in d ig è n e s e x ­
p l o i t e n t e n c o re et d o n t un e bonne
p a r ti e e s t c o n s a c r é e au p â tu ra g e .
L e s groupes l i b e r t a i r e s , en gra n­
de m a j o r i t é u r b a in s , ne s e m b le n t
pas p a r t i c u l i è r e m e n t s e n s i b i l i s é s
pa r ce pro b lè m e , même si la s o l i ­
d a r it é a ve c ce s lu t t e s a é té à
l ' o r i g i n e de la c r é a ti o n de c e r ­
t a in s d ' e n t r e eu x.
Q u e lq u e t i m i d e t e n t a t i v e de
c o m m u n a u té a g r i c o l e , l ' a p p a r i t i o n
s p o r a d iq u e de g ro u p e s a n a r c h o f é m i n i s t e s , l ' e x i s t e n c e de cou rs
sur l ' a n a r c h i s m e p r i s en c h a rg e
pa r des l i b e r t a i r e s d a n s d e u x u n i ­
v e r s i t é s , t e l l e p o u r r a i t ê tr e la
t o i l e de fon d de l ' a n a r c h i s m e a u s ­
t r a l i e n . Un a n a r c h is m e qui n ' e s t
p a s , à p r o p re m e n t p a r le r , a u x a n ­
t ip o d e s du n ô tre com m e l ' e s t c e t ­
t e A u s t r a l i e que l ' O c c i d e n t v i t
n a î t r e un beau jo u r de 1788 l o r s ­
que les A n g l a i s y m ir e n t le g ra p ­
pin d e s s u s pour en f a i r e un e c o ­
lo n ie p é n ite n tia ire .
L ' a v e n i r du m o u v e m e n t l i b e r ­
t a i r e y e s t un e in c o n n u e . L e m i ­
m é t is m e qui l ' a a m e né à im p o r te r
le s m i l l e e t une d i v i s i o n s d e ^ ,
l ' O c c i d e n t eu ro p é e n e t n o r d - a m é ­
ric a in
—d i v i s i o n s
qui t r o u v e n t
t o u t j u s t e le u r p l a c e dans une po ­
p u la t i o n a u s s i r é d u i t e e t r e p lié e
s u r e lle - m ê m e — uni à une a b s e n ­
ce p re s q u e t o t a l e de r a c i n e s h i s ­
t o r iq u e s , p e u v e n t l ' e n t r a î n e r v e rs
un f r a c t io n n e m e n t p r o g r e s s i f , en
t o u s p o in t s s t é r i l e . M a is c e t t e
a b s e n c e même de bon s e n s , qui
lu i a p e r m is de p a s s e r , en peu de
te m p s ,
du n é a n t à l ' e x i s t e n c e
d 'u n m o u v e m e n t au p o id s n a t i o n a l
in d é n ia b l e , pe ut é g a l e m e n t a m p l i ­
f i e r la r é a p p a r it io n p r é s e n t e de
l ' e s p r i t de t o l é r a n c e qui a v a i t
c a r a c t é r i s é le d é b u t de s a n n é e s
7 0 . S e u le c e t t e s o l i d a r i t é p e u t
l ' a i d e r à d e v e n ir un m o u v e m e n t
p u i s s a n t qui ne p e rd e pas de sa
d iv e rs ité . ■
SANS F R O N T IE R E S
T r o i s ans après un a tte n ta t c rim in e l
qui d e v a it c o û te r la v ie de quatre tr a v a i ll e u r s ,
s ix m ilita n ts lib e rta ire s
p a s s a ie n t en p ro c è s en décembre d ernier. P o ur t r o i s d 'e n tr e eux
leu r in n o ce n ce vaudra 17 ans fe rm e s !
u c o u r s de l ' a u t o m n e 7 7 , la
C N T d é v e lo p p a i t une in te n ­
se
cam pagne
co n tre
le s
é l e c t i o n s s y n d ic a le s e t le p a c te
d e la M o n c l o a . C ' e s t d a n s c e c l i ­
m a t d e m o b i l i s a t i o n e t s u r la l a n ­
c é e de la lu tt e de s p o m p is te s
q u ' e l l e a p p e l a i t , l e 15 j a n v i e r 78
à une m a n ife s ta tio n qui d e v a it
r a s s e m b le r p lu s d e 1 0 .000 p e r­
s o n n e s d a n s l e s r u e s de B a r c e ­
lo n e .
A
Q u e lq u e s
m in u te s
après
la
d is p e rs io n et à p lu s ie u rs k ilo m è ­
t r e s du l i e u d e l a m a n i f e s t a t i o n ,
la s a l l e d e s p e c t a c l e s «S c a la »
é ta it
in c e n d ié e ,
e n tra fn a n t
la
m o r t de q u a t r e t r a v a i l l e u r s . L e
s o i r m ê m e , la p r e s s e e t la t é l é
l a i s s a i e n t s o u s - e n t e n d r e q u e la
C N T é ta it à l'o r ig in e de l'a t t e n ­
ta t. Une o rg a n is a tio n à la q u e lle
a p p a r te n a ie n t le s 7 0 % des t r a ­
v a i l l e u r s de « S c a la » . . . u n e o r g a ­
n is a t io n à la q u e lle a v a ie n t adhé-V.
rés deux des t r a v a i lle u r s d é c é ­
dés !
L a ca m p a g n e de d i s c r é d it e s t
c o m m e n c é e . L e le n d e m a in , une
d iz a in e de lib e r t a ir e s s o n t a rrê ­
té s , a c c u s é s d 'ê t r e le s a u te u rs
de l ' i n c e n d i e . L a f o r t e m o b i l i s a ­
t i o n a l l a i t p e r m e t t r e le r e t r a i t de
l 'a c c u s a t io n d '« o rg a n i s a tio n te r­
r o r is te » la n c é e par le M in is tè r e
de
l'In té rie u r
co n tre
la C N T .
M a is t r o is ans p lu s tard, qu atre
des in c u lp é s c r o u p is s a ie n t to u ­
j o u r s en p r i s o n e t d e u x d e l e u r s
com pagnes
é ta ie n t
en
lib e rté
s ou s c a u tio n . P a r c o n tre , J o a q u in
G a m b in , in d ic a te u r in f i lt r é dans
le m o u v e m e n t li b e r t a ir e a u q u e l
on d o i t t o u t e s c e s a r r e s t a t i o n s
a i n s i q u e, s e lo n l'e n q u ê t e de la
C N T , l ' i n c e n d i e d e «Sca la », l u i
c o u rt to u jo u rs ... M ie u x : fa is a n t
l ' o b j e t d 'u n m a n d a t d 'a m e n e r e t
a l o r s q u e p l u s i e u r s j o u r n a u x ne
c e s s e n t d 'in d i q u e r son d o m ic il e ,
la p o lic e d é c la r e ne pas c o n n a î­
t r e s o n l i e u de r é s i d e n c e !
B ie n d 'a u tre s p o in ts re s te n t
o b s c u rs d a ns c e t t e a f f a ir e . En
e ffe t:
l'in c e n d ie
a causé
le s
p l u s g r o s d é g â t s à l ' a r r i è r e de
l ' é d i f i c e a lo r s qu e s e lo n la p o l i ­
c e le s c o c k t a i l s m o l o t o v o n t é t é
l a n c é s d a n s le h a l l d ' e n t r é e ; le s
décom bres
ont é té d é b la y é s
a v a n t q u e l e s e x p e r t s a i e n t pu
t e r m i n e r l ' e x a m e n d e s l i e u x ; le
s e u l t é m o i n o c u l a i r e « n e u tr e » (un
c o m m e r ç a n t t e n a n t un k i o s q u e à
j o u r n a u x f a c e à « S ca là » ) d e v a i t
t r o u v e r l a m o r t pe u a p r è s d a n s
Espagne
CNT
PROCES
SCALA
des c irc o n s ta n c e s
é c la irc ie s ...
to u jo u rs
pa s
P e u i m p o r t e , la p o l i c e a a r r ê ­
té des m i l i t a n t s a n a r c h is t e s qui
o n t re c o n n u a v o ir fa b riq u é des
c o c k t a i l s la v e i l l e e t a v o ir p a r t i ­
c ip é
à
la m a n i f e s t a t i o n
avec
le u rs e n g in s . .. D e p lu s , n 'o n t - ils
pas fin i par a v o u e r le u r f o r f a i t ?
Il e s t v r a i qu e d e s m é d e c i n s o n t
a p p o rté le u r té m o ig n a g e c o n f ir ­
m a n t q u e le s i n c u l p é s a v a i e n t
é t é t o r t u r é s . . . On v o i t d e s u i t e
q u e l l e p e u t ê t r e la v a l e u r d e c e s
a v e u x . C o m m e d e v a i t le d é c la r e r
l ' u n d e s i n c u l p é s en p l e i n p r o ­
c è s : «D a n s d e t e l l e s c o n d i t i o n s ,
j ' a u r a i s reconnu n 'im p o r te quoi:
l ' a s s a s s i n a t d e F r a n c o , c e l u i de
Carrera B la n c o et m ê m e le vôtre,
Mr l e J u g e /».
L e p r o c è s s ' e s t o u v e r t le 1°
d é c e m b r e d e r n i e r . U n a b s e n t de
m a rq u e : l ' i n d i c J o a q u in G a m b in
qui
sera
ju g é ...
par d é fa u t? !
Q u a n t à la t o i l e d e f o n d du p r o ­
c è s , e l l e r e s t e b i e n peu o r i g i n a ­
l e : a r r e s t a t i o n s de c o l l e u r s d ' a f ­
fic h e s
e t de d i s t r i b u t e u r s d e
tra c ts ; une s a lle d 'a u d ie n c e fa r­
c i e de f l i c s en c i v i l ; un c o n t r ô l e
s e r r é de t o u t e s l e s e n t r é e s au
P a l a i s d e J u s t i c e ; un q u a d r i l l a g e
d u q u a r t i e r à g r a n d s r e n f o r t s de
je e p s ,
p o lic e m o n té e , b rig a d e s
a n ti- é m e u te s . Q u a tre jo u rs d u r a n t
l e s q u e l s p l u s i e u r s c e n t a i n e s de
lib e r t a ir e s v e n u s s o u te n ir le s in ­
c u l p é s d e v a n t le P a l a i s d e J u s t i ­
ce s e ro n t v io le m m e n t c h a rg é s par
la p o l i c e . C h a q u e s o i r , l e c e n t r e
de
B a rc e lo n e
é ta it
le t h é â t r e
d 'a ffro n te m e n ts
e n tre
m a n ife s ­
ta n ts e t p o lic ie r s .
S ig n a lo n s , to u te fo is , une c h o ­
se. S e u le I a C N T - h i s t o r i q u e s e m ­
b le a v o ir o r g a n is é la m o b i l i s a ­
tio n ,
c o lla n t
des
a ffich es,
d is tr ib u a n t de s t r a c ts , a p p e la n t
à des m e e tin g s et d e s m a n if e s t a ­
tio n s à B a rc e lo n e , à M a d rid ...
L e 3 d é c e m b re , s e p t de ses m i l i ­
ta n ts
é ta ie n t a rrê té s à S é v ille
p o u r u n e a c t i o n en s o u t i e n a u x
in c u lp é s to u t com m e tro is a u tre s
c a m a r a d e s à M a l a g a 1} P a r c o n t r e ,
(nous s o u h a ite rio n s ê tre c o n tre ­
d i t s c a r , d a n s le c a s c o n t r a i r e ,
le
fa it
s e r a it très
g r a v e ) , la
C N T - r é n o v é e s e m b le a v o ir f a i t
p re u ve d 'u n m u tis m e t o t a l ! S 'i l
e s t v r a i q u e B a r c e l o n e r e s t e un
b a s tio n des « h is to riq u e s » e t que
le s
in c u lp é s
lu?
sont p lu tô t
f a v o r a b le s , une c h o s e ne s a u r a it
en j u s t i f i e r u n e a u t r e . L a sim ple s,
s o l i d a r i t é f a c e à la r é p r e s s i o n '
a u r a i t dû ê t r e de m i s e ! !
Une
« in n o v a tio n » c e p e n d a n t
au c o u r s de c e p r o c è s : d a n s la
s a lle d 'a u d ie n c e même, d e v a n t
p l u s de 150 p e r s o n n e s , l e s f l i c s
o n t c o n t i n u é à b r u t a l i s e r le s i n ­
c u lp é s . A lo rs q u 'il t e n ta it d 'e m ­
b r a s s e r sa c o m p a g n e , J o s é C u e vas é ta it v io le m m e n t b o u s c u lé .
P l u s t a r d , c ' é t a i t L u i s M u n o z qui
r e c e v a i t un b r u t a l c o u p de p i e d
d a n s le b a s - v e n tr e . E t p u is c o m ­
me t o u s d e u x a v a i e n t « l ' i n s o l e n ­
ce» de t e n t e r d e se p r o t é g e r
m a lg ré le s m e n o tte s , p lu s ie u r s
f l i c s le u rs s o n t to m b é s d e s s u s !
L e 9 d é c e m b r e , le T r i b u n a l
d o n n a i t l e c t u r e d e la s e n t e n c e .
José C uevas C asad o, F ra n c is c o
J a v ie r C anadas G ascon e t A rtu ro
P a l m a S e g u r a : 17 a n s d e p r i s o n .
L u i s M unoz G a r c ia qui a d é jà
f a i t t r o i s a n s d e d é t e n t i o n : 1 an
e t d e m i. M a ria R o s a L o p e z J im e nez : 5 m o is q u 'e lle a d é jà la r g e ­
m ent e ffe c tu é s . M a ria P il a r A lv a ­
re z , e n f in , qui a f a i t p l u s ie u r s
m o is
de
p ris o n
é t a it re la x é e .
Q u a n t a u x i n d e m n i t é s , le m o n t a n t
t o t a l s ' é l è v e à 3 0 0 m i l l i o n s de
p e s e ta s (d a n s le s 2 m i l l i a r d s de
c e n tim e s ) !
U n e a f f a i r e à s u i v r e de p r è s
c a r le s a v o c a ts o n t bien l ' i n t e n ­
t i o n de f a i r e a p p e l . ■
S olon.
17
SANS F R O N T IE R E S :
A p r è s 35 jo u rs de grève,
l e s t r a v a i l l e u r s de F i a t ont vu le s d ir e c t io n s
s y n d i c a l e s brader leu r lu t te . Une
e x p é rie n c e don t on f e r a i t bien de t i r e r des l e ç o n s :
on s a it ja m a is , des f o i s que..1.'
I ta lie
PLUS DURE SE
a ren tré e s o c ia le ita lie n n e a
t e c h n iq u e s o i t s u p p o r té , r o t a t i v e d é m a r ré s u r le s c h a p e a u x de
m en t, par le s 7 8 . 0 0 0 t r a v a i l l e u r s de
rou es : dè s le 4 s e p te m b r e , la
T u r i n . A t t a q u é e d a n s l ' u n e d e ses
d i r e c t i o n de F i a t a n n o n ç a it un v a spt el a c e s f o r t e s , e l l e ne p e u t que s u i ­
p la n d ' a s s a i n i s s e m e n t . B ie n sû r, à
v r e l e m o u v e m e n t de g rè v e la n c é le
T u r i n , on le s e n t a i t v e n i r d e p u is
11 se p te m b re et qui s ' e s t g é n é r a l i s é
p l u s i e u r s m o i s . D 'a b o r d , la d i r e c t io n
à to u te s le s u s in e s du g r o u p e , dès
n e c e s s a i t de s e p l a in d r e du «trop
le le n d e m a in . D ' a u t a n t p l u s qu e 4 5 %
des t r a v a i l l e u r s t o u c h é s s o n t de s
grand nombre d'avantages sociaux»
d o n t j o u i s s e n t s e s s a l a r ié s . E t p u is ,
d é lé g u é s d ' a t e l i e r s e t des m i l i t a n t s
le P C I se la m e n t a i t de la f a i b l e p ro ­
s y n d i c a u x . . . d ' a u t a n t p l u s a u s s i que
d u c t i v i t é des t r a v a i l l e u r s e t il en
l a g a u c h e e x t r a - p a r l e m e n t a ir e e s t
f o r t e , b ie n im p la n t é e e t m en ace d 'u n
a v a i t t r o u v é la c a u s e : la du rée du
d é b o r d e m e n t ! L e c o n f l i t v a d o n c se
t r a v a i l c h e z F i a t c o m p te parmi le s
d u r c i r : b l o c a g e t o t a l de la p r o d u c ­
p l u s c o u r t e s de t o u t le s e c t e u r a u t o ­
m o b ile e u r o p é e n !
t i o n , p i q u e t s de grè ve m a s s i f s , m a­
n i f e s t a t i o n s m o n s tr e s , a s s e m b lé e s
Ces
s ig n e s a v a n t - c o u r e u r s ne
q u o t id ie n n e s .
l a i s s a i e n t r ie n a u g u re r de bon po ur
L
la p lu s g r o s s e b o f t e p r i v é e d ' I t a l i e
qui c o m p te 1 4 0 .0 0 0 t r a v a i l l e u r s da ns
le seu l s e c t e u r a u t o m o b ile . T o u t e s
le s u s i n e s s o n t c o n c e n t r é e s da ns
un e r é g io n où le m o u v e m e n t o u v r ie r
a une lo n g u e t r a d i t i o n de l u t t e s . P a r
a i l l e u r s , le s t r o i s c e n t r a le s s y n d i c a ­
le s ( C G I L , C I S L e t U I L ) se r e t r o u ­
v e n t au sein d ' u n e F é d é r a t i o n
u n i t a i r e d e s T r a v a i l l e u r s de la M é ­
t a l l u r g i e ( F . L . M . ) . A u s s i , lo r s q u 'a u
r e t o u r des v a c a n c e s d ' é t é le p a tro ­
n a t d é v o i l e ses p e n s é e s , la r é s i s ­
t a n c e o u v r i è r e ne t a r d e pas à s ' o r ­
ganiser.
L 'a rg u m e n ta tio n
p a t ro n a le e s t,
du re s t e , d e s p l u s c l a s s i q u e s qui
s o i t : le s e c t e u r a u t o m o b ile v a mal,
c ' e s t la c r i s e , le s s t o c k s ne c e s s e n t
d 'a u g m e n t e r . . . On c o n n a it la r e n g a i ­
ne. Q uand la b o u r g e o i s i e p ré pa re un
m a u v a i s c o u p , quand e l l e s ' a p p r ê t e
à f a i r e pa ye r sa c r i s e a u x t r a v a i l ­
le u r s , e l l e a i n l a s s a b l e m e n t r e c o u r s
aux « e x i g e n c e s de l ' é c o n o m i e n a ti o ­
n a l e » e t a u x «f é r o c e s l o i s d u ma r c h é »
pour t o u t j u s t i f i e r . A i n s i d o n c , pour
e l l e , la r e s t r u c t u r a t i o n c h e z F i a t
p a s s e r a i t pa r le b lo c a g e du «turn
ove r» ( le n o n - r e m p la c e m e n t des d é ­
p a r ts ) , le s m is e s à la r e t r a i t e a n t i ­
c ip é e , le s d é p a r ts v o l o n t a i r e s , la
m o b ilité
e xté rieu re
( r e c o n v e r s io n
dans d 'a u tre s secteurs). Dans l 'im ­
m é d ia t , le ch ô m a g e t e c h n iq u e pour
22.884 tr a v a ille u r s .
L E B A L L E T DE L A F .L .M . :
_______ UN PAS EN A V A N T . ■■_______
ou r la F é d é r a t io n s y n d ic a le ,
ce n ' e s t pas la c r i s e qui e st
re m ise
en ca u s e , pas p lu s
d ' a i l l e u r s q u e l ' o b l i g a t i o n de r é d u i ­
re de 2 0 % 1° p r o d u c t i o n p o u r é c o u le r
le s
s t o c k s e x c é d e n t a i r e s . . . M a is
e l l e n ' a c c e p t e p a s la m o b i l i t é e x t é ­
r ie u r e et p r o p o s e que le ch ô m a g e
P
18
A v e c la c h u t e du g o u v e rn e m e n t
C o s s i g a le 27 se p te m b re , le p a tro n
d e F i a t , A g n e l l i , r e t i r e le s m e su re s
a n n o n c é e s . Un «beau geste» en v a laTft b ie n un a u tre , le s t r o i s c e n t r a ­
le s fftrspendent à le u r t o u r la g rè v e
g é n é r a le a p p e lé e p o u r le 2 o c to b r e !
E t , sur la la n c é e , e l l e s en p r o f i t e n t
pour a p p e le r le s t r a v a i l l e u r s à des
form es m o in s d u re s de l u t t e . L e s
v i v e s r é a c t i o n s p ro v o q u é e s pa r c e t t e
p r o p o s it io n ne d é b o u c h e r o n t c e p e n ­
d a n t pas, lo rs des a s s e m b l é e s du 8
o c t o b re , sur le v o te de l ' o c c u p a t i o n
des u s i n e s . Une e rre u r t a c t i q u e que
c e r t a i n s v o n t m e ttr e à p r o f i t . Ce
même jo u r com m ence, en e f f e t , l ' o f ­
f e n s i v e des c a d re s e t a g e n ts de
m a f t r is e a v e c la s ig n a tu r e d ' u n d o ­
cu m e n t c o n t r e la g rè v e . L e s t r a v a i l ­
le u rs d e m an den t que le s n é g o c i a ­
t i o n s a i e n t li e u s u r p l a c e , à T u r i n .
Q u 'à c e la ne t ie n n e , p a t r o n a t / g o u ­
v e r n e m e n t / s y n d ic a t s r e p re n n e n t le s
p o u r p a r le r s . . . à R o m e ! P a r a l l è l e m e n t
la m u n i c i p a l i t é de T u r i n a y a n t à sa
t ê t e un m a ire c o m m u n is t e a d o p te à
l ' u n a n i m i t é une m o tio n c o n t re le s
l i c e n c i e m e n t s e t pour la m o b i l i t é
exté rie u re .
.. .D E U X PAS EN A R R IE R E !
omme on le v o i t , le s jo u rs
p a s s e n t à un e v it e s s e v e r t i g i ­
ne u s e .
Il e s t b ien lo in ce
d é b u t s e p te m b re quan d le s d i r e c ­
tio n s s y n d ic a le s é ta ie n t encore con­
t r e la m o b i l i t é e x t é r i e u r e . B ie n lo in
a u s s i c e t t e f in s e p te m b re a v e c un
B e r l i n g u e r jo u a n t au
dém ago
en
d é c la r a n t , s a n s r i r e , que son p a rti
s o u t i e n d r a i t la l u t t e j u s q u 'a u bout,
y c o m p ris en ca s d ' o c c u p a t i o n . L a
d é m o b i l i s a t i o n e s t m a i n t e n a n t en ­
c le n c h é e , le s d i r e c t i o n s s y n d i c a l e s
se p ré p a re n t à po rte r l' e s t o c a d e . L a
F .L .M .
e x p liq u e aux tra v a ille u rs
q u ' i l s s o n t i s o l é s , q u ' i l ne re s t e
C
p l u s q u 'à r e p re n d r e le t r a v a i l . L a
p re uv e de l ' i s o l e m e n t ? Eh b ie n , un e
m a n i f d e s . . . c a d r e s e t a g e n ts de
m a P tris e ! ( l )
L e p r o t o c o l e d ' a c c o r d e s t s ig n é
le 15 o c t o b r e . Il p r é v o i t : l ' a c c e p t a ­
t io n du b lo c a g e du «turn over», le
m a in t ie n d e s 2 2 .8 8 4 m is e s en c h ô ­
mage t e c h n iq u e , la r e c o n n a i s s a n c e
à p e in e v o i l é e de la m o b i l i t é e x t é ­
r ie u r e . V o i l à , le t o u r e s t jo u é . A p r è s
a v o i r f r e i n é le m o u v e m e n t, l ' a v o i r
i s o l é dès le d é b u t, la F . L . M . r a t i f i e
un a c c o rd sur le s m êm es b a s e s que
:SANS F R O N T IE R E S
E HA LA CHUTE
c e l l e s qui o n t p ro v o q u é la g rè v e .
C ' e s t d ' a i l l e u r s c e qu e d e v a i t c o n ­
f ir m e r un a d m in is t r a t e u r de la F i a t ,
R o m it i, qui d é c l a r a i t le 17 o c t o b r e :
«L ' a c c o r d s i g n é a u j o u r d ' h u i e s t , d e
f a i t et en s u b s t a n c e , i d e n t i q u e à
c e l u i qui a v a i t é t é p r o p o s é d è s l e
d é b u t a u x o r g a n i s a t i o n s s y n d i c a l e s ii.
C ' e s t une v i c t o i r e , no us d it - o n , c a r
le s 14.600 li c e n c i e m e n t s p ré v u s au
d é p a r t, n 'a u r o n t pas l i e u ! C ' e s t , du
r e s t e , ce qui v a ê tr e le p l u s d i f f i c i l e
à f a ir e a v a le r a u x 2 3 .0 0 0 t r a v a i l ­
le u r s
c o n c e r n é s pa r le chô m ag e
te c h n iq u e . En e f f e t , le 16 o c t o b r e
o n t li e u p l u s i e u r s a s s e m b l é e s g é n é ­
r a l e s . S ' i l e s t v r a i que c e l l e s du
m a tin a u x q u e ll e s a s s i s t e n t en fo rc e
c a d re s e t a g e n ts de m a f t r i s e v o t e n t
d e ju s t e s s e la r e p r is e du t r a v a i l ,
c e l l e s de l' a p r è s - m i d i qui c o m p te n t
s u r la p ré s e n c e m a s s i v e d e s ou ­
v r ie r s
v o t e n t la p o u r s u it e de la
g r è v e . . . On l' a u r a c o m p r is , le «réa­
lism e» s y n d ic a l v e u t q u 'o n ne prenne
en c o m p te que c e l l e s du m a t in . U n e
m a g o u ill e ro n de m ent menée qui a
n é a n m o in s f a i l l i c o û t e r c h e r au bu ­
r e a u c r a te de s e r v i c e , le s e c r é t a ir e
de la C I S L , je té comme un m a lp r o p r e
p a r de s t r a v a i l l e u r s n ' a y a n t r ie n
c o m p r is à la p o rté e d e la g ra nd e
v i c t o i r e , le s i n g r a t s ! ( v o i r e n c a d ré ).
FACE
AU
"R E A L IS M E "
En I t a l i e comme en F ra n c e , e l l e s
a p p e l l e n t à lu t t e r b o f te par b o f te , à
d é m a rre r le m o u v e m e n t q u an d le s
a u t re s l ' o n t d é jà a r r ê t é . . . On com ­
pre nd m ie u x l ' i m p a c t (?) d ' u n t e l
t y p e de l u t t e lo r s q u 'o n l i t le s dé ­
c l a r a t i o n s f a i t e s pa r A g n e l l i , le 19
o c t o b r e , au jo u r n a l o u e s t - a l le m a n d
«Der S p i e g e l »: « L a s i t u a t i o n d e F i a t
au c o u r s d e c e m o i s d e g r è v e n e
s ' e s t p a s a f f a i b l i e , à t e l p o i n t (pie
le m ois prochain la s o c i é t é augmen­
t e r a s o n c a p it a l . M ê m e s u r l e p l a n
d e s v e n t e s n o u s n ’a v o n s s u b i a u c u ­
n e p e r t e c ar n o u s a v o n s l e s d é p ô t s
p l e i n s de m o d è l e s à éco ulem.
P o u r l ' h e u r e , la is s o n s le s ca m a ­
ra d e s a n a r c h o - s y n d i c a l i s t e s i t a l i e n s
qui in t e r v i e n n e n t d a n s la m é t a l l u r ­
g ie , n o u s f a ir e p a r t d e q u e lq u e s u n e s de le u r s c o n c l u s i o n s : «A not r e
a v i s , a u j o u r d' hu i , il y a p l u s i e u r s
c h o s e s à n e p a s fai re. L a p r e m i è r e
serait de minim iser l 'a tt a q te portée
c h e z Fi at . L a s e c o n d e s e r a i t d e
ans l ' a c t u e l c o n t e x t e de re­
dire qu'il s ' a g i t d ' u n e d em i- vi ct o ir e
s t r u c t u r a t i o n du s e c te u r a u t o ­
p a r c e que l e s l i c e n c i e m e n t s n e s o n t
m o b ile , le c o n f l i t chez F i a t
p a s p a ss é s. L a troisième e s t de
pre nd le r e l a i s des l u t t e s c o n tre le
s re que l a s e u l e s o l u t i o n c o n s i s ­
croi
li c e n c i e m e n t s p ro n o n c é s c h e z B ri t e en a b a n d o n n e r l a l u t t e s o u s p r é ­
t i s h L e y l a n d en G rand e B r e ta g n e ,
texte
qu'elle sera inévita blem en t
de c e u x d é jà r é a lis é s ou en p e r s ­
b r a d é e » (2).
S Y N D IC A L , N E JE TO NS
_________PAS L ’ EPO NG E_________
D
p e c t i v e ch e z F o rd , C i t r o ë n e t G e n e ­
ral M o to rs en F r a n c e . Au c o u rs de
ce p r o c e s s u s de c o n c e n tr a ti o n des
e n t r e p r i s e s , d ' u n i f i c a t i o n de s mar­
ch é s co m m e rcia u x , le s a t t a q u e s pa­
tr o n a le s ne p e u v e n t que se m u l t i ­
p l ie r .
D 'où l' im p o r t a n c e du cou p r é a l i ­
sé chez F i a t c a r is o l e m e n t des lu t ­
t e s e t d i v i s i o n du m o u v e m e n t r e s t e n t
le s c o n s t a n t e s a c t u e l l e s de s s tra ­
t é g ie s des d i r e c t i o n s s y n d i c a l e s .
Solon A M O R O S .
( 1) m a n i f e s t a t i o n p r é p a r é e , s u r l e
p l a n n a t i o n a l p a r l e p a t r o n a t et
qui d e v a i t r é u n i r 10. 000 p e r s o n ­
n e s . Q u a n d on s a i t que l a s e u l e
F i a t re g r o u p e p l u s d e 15. 000
cadres et ag ents de maîtrise...
( 2 ) « L o t t a di c la s s e » n ° 6, n o v e m ­
bre 80.
L’ART D'ACCOMMODER UB BUREAUCRATE
U n e a s s e m b l é e à l ' u s i n e m é c a n i q u e de M irafiori. Il f a it e n c o r e so m b re e t u n e
p l u i e d é s a g r é a b l e tom b e quand C a m i t i c o m m e n c e à p arler. Il e s t r a p i d e m e n t
interrompu par u n e a v a l a n c h e d e s i f f l e t s e t d ' i n s u l t e s ; i l c e s s e d e p a rler e t c è d e
l a p a r o le aux d é l é g u é s . - I l s ' a g i t , à u n e é c r a s a n t e m a jo r it é , d ' i n t e r v e n t i o n s c o n ­
tre l ' a c c o r d : e l l e s ex p rim en t la c o l è r e , l ' i m p u i s s a n c e , le s e n t i m e n t d ' a v o i r é t é
t r a h i s , v e n d u s ; l a t e n s i o n ne p a r v i e n t p a s a d im in u er.
Sur l a p l a c e , l e s g e n s so n t g r o u p é s par s e c t e u r s ; au fo nd s e tr o u v e l e g r o u p e
d e c a d r e s et a g e n t s de m a î t r i s e : i l s s o n t v e n u s en n ombre , i l s s e d é p l a c e n t en
c o r t è g e d 'une a s s e m b l é e à l 'a u tre , v o t a n t a i n s i p l u s i e u r s f o i s ; au c e n t r e s e trou­
v e l a m a jo rité d e s o u v r i e r s , l e s i n d é c i s : i l s a s s i s t e n t , i n c e r t a i n s , à un c o m b a t
d on t i l s s e s e n t e n t e x c l u s ; tout autour e t au p i e d d e la tribune s e t i e n n e n t l e s
d é l é g u é s , l e s o u v r ie r s a c t i f s , c e u x qui on t p a r t i c i p é à l a l u t t e d e t o u t l eu r p o i d s .
A p r è s l e s i n t e r v e n t i o n s d e s d é l é g u é s , C a r n it i re prend l a p a r o l e e t p a r v i e n t , non
s a n s m al, à fa ir e so n d i s c o u r s . On en v i e n t au v o t e : c ' e s t l a c o n f u s i o n , l e s
p a r a p l u i e s e m p ê c h e n t d ' y v oir, nom breux s o n t c e u x qui d i s e n t q u e l e s c a d r e s e t
a g e n t s d e m a î t r i s e n e d o i v e n t p a s v oter.
L o r s q u e le s e c r é t a i r e d e la CISL a n n o n c e que l ' a c c o r d a é t é ap p ro u vé à l a
m a jo r it é , i l fa it un p e t it bond de s a t i s f a c t i o n . C ' e s t l a g o u t t e d ' e a u qui f a it d é­
border l e v a s e . B e a u c o u p s e m e tt e n t à p leu rer, c e r t a i n s s ' é v a n o u i s s e n t . L e s
p l u s p r o c h e s s e l a n c e n t en d i r e c t i o n d e l a t rib u n e, C a r n it i t e n t e d e t ro u v er l a
s o r t i e , s e u l l e s e r v i c e d'ordre s y n d i c a l c h e r c h e à l e p r o t é g e r . Il e s t a t t e i n t par
d e s c o u p s de p i e d s , de p a r a p l u i e s , par d e s c r a c h a t s ; d e p u i s le mur d ' e n c e i n t e
s o u s l e q u e l i l d o it p a s s e r , l e s p i e r r e s p l e u v e n t . L a p r e m iè r e v o i t u r e a v e c l a q u e l ­
l e il t e n t e d e partir e s t e n c e r c l é e e t p r e s q u e f r a c a s s é e ; il p a r v i e n t à en prendre
u n e autre qui e s t a t ta q u é e à c o u p s d e p i e r r e s . L e s v i t r e s v o l e n t en m i l l e mor­
c e a u x , l'un d e s é c l a t s l e b l e s s e l é g è r e m e n t au v i s a g e . Un membre du s e r v i c e
d'ord re d o i t ê t r e t ra n sp o rté au C e n t r e de t r a u m a t o l o g i e .
T r o i s h e u r e s p l u s tard, à l'ab ri d a n s u n e p e t i t e s a l l e d e l a B o u r s e du T r a v a i l ,
C a rn iti p a rlera d 'u n e «in fim e minorité» d e v o y o u s , i l d ira que « le m o u v e m e n t s y n ­
d i c a l d oit s'armer o r g a n i s a t i o n n e l l e m e n t pou r e m p ê c h e r d e t e l l e s c h o s e s d e s e
reproduire». M ais que v e u t - i l dire par l à ? Que l a p r o c h a i n e f o i s i l d o u b l e r a l e s
e f f e c t i f s d e so n s e r v i c e d'ordre? Et d e q u el m o u v e m e n t s y n d i c a l p a r l e - t - i l ? D e
c e l u i q u ' i ls ont d étru it à Mirafiori, p e u t - ê t r e ?
D e « L o t t a di c l a s s e » n ° 6 , n o v e m b r e 8 0 .
19
SANS F R O N T IE R E S
Uruguay:
VIVRE
EN
AUTOGESTION
D e p u is 1955 (da te de sa c ré a tio n )
la «Comunidad del Sur» a re p ré se n té la p lu s
im p o rta n te e x p é rie n c e
de v i e co m m un au ta ire r é a lis é e par des m i l i t a n t s a n a rc h is te s .
L 'i n t e r v e n t i o n m i l i t a i r e d e v a it m ettre fin à
20 années d 'a u to g e s tio n .
L e s a u to r ité s m i l i t a i r e s d é c la r a ie n t, en 1976, que
l 'e x i s t e n c e même de la Com munauté
é t a i t in c o m p a tib le a vec le
«nouvel» U ruguay.
De novembre 1974 au début a v r il 1975,
une camarade de Rome a vécu au se in de la «Comunidad del Sur».
C a r ia n o ù s ra co n te ic i son e x p é rie n c e . !
□ Ma p r e m iè r e i n t e n t i o n é t a i t d ' y
r e s t e r un p e t i t m o is a f in de v i v r e à
fo n d c e t t e e x p é r i e n c e qui me sem­
b l a i t d é c id é m e n t tr è s in t é r e s s a n t e .
M a is u n e f o i s là - b a s , je me s u is
a p e r ç u e qu e q u e lq u e s s e m a in e s ne
m ' a u r a i e n t pa s s u f f i pour c o n n a f t r e
e t c o m p re n d re t o u t c e qui me t e n a i t
à c œ u r . C ' e s t p o u r q u o i j ' a i d é c id é
de p r o lo n g e r mon s é jo u r .
p l u s ie u r s t y p e s de r é u n i o n s pour
d i s c u t e r a ve c c e t t e p e rs o n n e , g é n é ­
r a le m e n t a ve c d e u x ou t r o i s c a m a r a ­
d e s au m a xim u m . L e r é s u l t a t de ces
ré u n io n s e s t f i n a le m e n t s o u m is à
l ' a s s e m b l é e e t c ' e s t e l l e qui ju g e
d e la m a t u r i t é du n o u v e a u v e n u da ns
le but de l ' i n t é g r e r à to u s le s a s ­
p e c t s de la v i e c o m m u n a u ta ire .
D ' u n e fa ç o n g é n é r a le , e t t o u t en
a y a n t u n e g r a n d e e s t im e pour le s
c a m a ra d e s de « C om u nid ad del Sur»
e t le u rs r é a l i s a t i o n s , t o u t en s a ­
c h a n t a u s s i co m b ie n de sang, de
s o u f f r a n c e s e t de s a c r i f i c e s le u r a
c o û t é e une t e l l e e x p é r i e n c e , pe r­
s o n n e lle m e n t j ' é m e t s q u e lq u e s r é ­
s e r v e s q u a n t à la v a l i d i t é a b s o lu e
d 'u n t e l t y p e de v i e . J ' e n ai p a r lé
a v e c le s c a m a ra d e s là -b a s , en le ur
e x p l i q u a n t q u ' i l me s e m b l a i t — q u ' i l
me s e m b le t o u jo u r s — que de t e l l e s
e x p é r i e n c e s n é c e s s i t e n t un e e x c e s ­
s i v e d i s p e r s i o n d ' é n e r g i e en t o u t
g e n r e po ur le f o n c t i o n n e m e n t « in t e r ­
ne»; é n e r g ie s qui s o n t par c o n s é ­
quent dé tourn ée s d 'u n e u t ilis a t io n
«externe» p o s s i b l e . C ' e s t pourq uoi
je n e c r o y a i s pas p o u v o ir v i v r e en
p e r m a n e n c e da ns la c o m m u n a u té ,
même s i , m a i n t e n a n t , je ne s a i s
plu s ...
■ Comm ent é ta it o rg an isée
«Comunidad del Sur»?
■ Com m ent e n tra it-o n
com m unauté ?
dans
la
□ D è s l ' i n s t a n t que q u e lq u 'u n
de m a n d e à ê tr e a d m is d a n s la c o m m u n a u té , on c h e rc h e à ê t r e a v e c lu i,
à a g ir e t t r a v a i l l e r a v e c l u i ; il y a
20
la
□ «C om unid ad del Sur» é t a i t f o r ­
mée pa r un n o y a u s o c i a l re g ro u p a n t
q u a tre «centres de travail » a u to n o ­
m e s : la t y p o g r a p h ie , le ja r d in p o t a ­
ger, l ' a t e l i e r a r t is a n a l e t la crè ch e ;
c h a c u n a v a i t un e s t r u c t u r e in d é p e n ­
d a n te qui lu i p e r m e t t a it de s ' o u v r i r
s u r l ' e x t é r i e u r . D a n s le s c e n t r e s
p r o d u c t i f s t r a v a i l l a i e n t , o u t re le s
m em b res de la com m u n a u té , des c a ­
m a ra de s qui sa n s en f a i r e p a r tie
é t a ie n t en a c c o r d a v e c le s p r i n c i ­
pes de c o o p é r a t iv is m e et sur la mé­
th o d e d ' a u t o g e s t i o n . T o u s p a r t i c i ­
p a ie n t sur un même p ie d d ' é g a l i t é ,
a u s s i b ien au n i v e a u é c o n o m iq u e
que d é c i s i o n n e l . C h a q u e c e n tre p ro ­
d u c t i f é t a i t o r g a n is é en t a n t que
c o o p é r a t iv e .
L a v i e de
cha cun de s c e n tre s
é t a i t r é g lé e par des a s s e m b lé e s
a b o r d a n t t o u s le s p r o b l è m e s : é c o ­
n o m iq u e s , s o c i a u x e t p e r s o n n e ls .
Il e x i s t a i t un moment de c o o r d i n a ­
t io n g é n é r a le c o n s t i t u é pa r l ' a s s e m ­
b lé e m e n s u e lle à l a q u e l l e a s s i s ­
t a i e n t to u s le s c a m a ra d e s , m em bres
ou pas de la c o m m u n a u té , y c o m p r is
ceux
qui
é t a ie n t m o m e n ta n é m e n t
d a n s le s s e r v i c e s d o m e s t iq u e s ou
le s s e c t e u r s non p r o d u c t i f s .
D a n s c h a q u e c e n t re de p r o d u c ­
t i o n , le s mem bres de la co m m u n a u té
r e c e v a i e n t un s a l a i r e q u ' i l s r e v e r ­
s a i e n t im m é d ia te m e n t da ns la c a i s ­
se
c o m m u n a u t a ir e .
Ces
fonds
é ta ie n t c o lle c tiv e m e n t a d m in is tré s .
L ' i n s t i t u t i o n fa m ilia le étant a b o lie
(du m o in s sous son a s p e c t é c o n o m i­
qu e), c h a q u e i n d i v i d u r e c e v a i t en
f o n c t i o n de s es n é c e s s i t é s et, n a t u ­
r e l le m e n t , s e lo n le s d i s p o n i b i l i t é s
de la c a i s s e c o m m u n e . L e s p e r s o n ­
nes qui n ' é t a i e n t pas en m e s u r e de
p r o d u ir e , comme le s v i e u x , le s en ­
f a n t s ou le s m a la d e s , r e c e v a i e n t un
r ev e nu en f o n c t i o n de le u r s b e s o i n s .
L ' a s s e m b l é e de la co m m u n a u té ,
à l a q u e l l e p a r t i c i p a i e n t le s a d u l t e s
a i n s i qu e le s a d o l e s c e n t s qui se
s e n t a i e n t c a p a b le s d ' y a s s i s t e r , se
t e n a i t c h a q u e s e m a in e e t e l l e é t a i t ,
d a n s t o u s le s se n s du m ot, l' o r g a n e
d é c i s i o n n e l . O u t r e le s p r o b lè m e s
é c o n o m iq u e s e t l o g i s t i q u e s , on y
a b o r d a it to u s le s s u j e t s qui pou­
va ie n t
in té re sse r
la co m m u n a u té
d a n s son e n s e m b le , t a n d i s qu e le s
p r o b lè m e s p e r s o n n e ls é t a ie n t d i s c u ­
t é s d a n s des r é u n io n s p l u s r e s t r e i n ­
te s e t le s r é s u l t a t s é t a i e n t r a p p o r ­
t é s d e v a n t l ' a s s e m b l é e , c e c i pour
d 'é v id e n te s ra is o n s p ra tiq u e s .
L e c r i t è r e o r g a n i s a t i o n n e l en ce
qui
c o n c e r n e la p r o d u c t i o n é t a i t
c e l u i de la r o t a t i o n de s t â c h e s ,
a u s s i b ie n à l ' i n t é r i e u r de l a c o m ­
m u n a u té ( c u i s i n e com m u ne , s e r v i ­
c e s , e t c . ) qu e d a n s le s d i v e r s c e n ­
t r e s p r o d u c t i f s . C e c i ne v e u t pas
d i r e qu e l ' o n ne t e n a i t p a s c o m p te
de la p r o d u c t i o n , m a is p a rto u t où
c e l a é t a i t p o s s i b l e , on a p p l i q u a i t
la r o t a t i o n .
S U IT E
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►
»
SANS F R O N T IE R E S
STO C KH O LM
20 S E P T E M B E R
14
comunidad
U ru g u a y a une v i e i l l e tr a d itio n de lu tte s .
L a 1° In te rn a tio n a le y e s t née a n t i a u t o r it a i ­
re et «bakouniniste» à M on té vid é o (1) et
l 'a n a r c h is m e a é té le moteur de la lu tte o u v riè re et
r é v o lu tio n n a ir e d e p u is le p rem ier quart de ce s iè c le
ju s q u 'à se tro u v e r mêlé aux o r ig in e s de l ' a c t u e l l e
l u t t e c la n d e s tin e . 1
L
se crée le groupe d 'é d i t i o n «Accion Directa» qui
p u b lie , e ntre a u tr e s : «La insurgencia estudiantil»;
«Formas y tendencias del anarquismo» de René
F u rth ; «El izquierdismo, remedio a la enfermedad
senil del comunismp» de D a n y et G a by C o h n - B e n d it;
«Revolucion no e s dictadura» de L u i g i F a b b r i; «Explotacion y dominacion» d 'A l f r e d o E rrandonea.
C 'e s t là qu'en 1955, quatre c o u p le s de je u n e s
é tu d ia n t s a n a rc h is te s re s s e n te n t le b eso in d'un
t r a v a il en commun, sur de n o u v e lle s b ases. L a pre­
m iè re so u rce de reve nu s a été un a te lie r de cé ra m i­
que qui a donné n a is s a n c e à l ' a c t i v i t é ty p o g ra p h i­
que. P a r la s u ite , c e tte d erniè re a été le p rin c ip a l
axe d ' a c t i v i t é des camarades ju s q u 'à d e v e n ir l ' i m ­
p rim e r ie la p lu s im p o rta n te du p ays quant au hombre de t i t r e s p u b li é s â rtfqjellem ent. 1
D urant ses v i n g t années de v ie , e ll e se ra un pô­
le de regroupem ent du m ouvement a n a rc h is te u ru­
guayen. M a is dans ce p a y s en c r is e , fa c e à une
fo rte a g ita tio n o u v r iè r e et é tu d ia n te , la s o c ié té
lib é r a le je tte son m asque et s o r t l e s b a ïo n n e tte s . 1
K
L e p re m ie r siè g e de la «Comunidad del Sur» est
un grand appartem ent, dans le q u a rtie r sud de la
v i l l e - d ' o ù le nom de la c o m m u n a u té - . Ce n 'e s t
q u'en 62-63 q u ' e l l e se tra n s p o rte dans une autre
zone de M o n té v id é o où s ' é t a b l i t le siè g e d é f i n i t i f
avec l ' a c q u i s i t i o n d 'u n ou deux h e c ta re s de te rre s
sur le s q u e lle s , t r a v a i l l a n t le s jo u rs fé rié s , le s ca­
m arades c o n s tr u is e n t to u s l e s b â tim e n ts n é c e s s a i­
res pour y v iv r e e t t r a v a i l l e r . T e l l e a été la pre­
m iè re p é rio d e de «Comunidad del Sur», tr è s dure
p u is q u e p en d a n t p lu s i e u r s années i l s n 'o n t eu la
p o s s i b i l i t é de prendre qu'un seul repas par jour, à
l 'e x c e p t i o n des e n fa n ts a u x q u e ls i l s ont to u jo u rs
cherché à g a r a n tir to u t le n é c e s s a ire . '
Peu à peu, la communauté s ' é l a r g i t . ' E l l e sera
formée, en m oyenne, de quarante p ersonnes, a d u l­
te s et e n fa n ts . T o u t e s les d é c is io n s sont p r is e s en
a s s e m b lé e et il n 'e x i s t e aucun organism e d irig e a n t.
A p a r tir d 'u n c e rta in âge, l o r s q u 'i l s a tte ig n e n t
l'â ge de la s c o la r i s a t i o n , les e n fa n ts ne v iv e n t
p lu s dans le noyau fa m i l i a l p a re n ta l. ' I l s in tè g re n t
des g ro u p e s d 'â g e a yant des chambres, des a c t i v i ­
té s et des d é c i s i o n s qui le u rs so nt propres.
L e s m i l i t a n t s a n a rc h is te s qui crée nt «Comunidad
del Su r» adhèrent en ta n t que «Groupement Libertai­
re du Sud» à la Fédération A narchiste Uruguayenne
( F . A . U . ) ju s q u 'à la s c i s s i o n survenue au début des
années 60 ( 2 ) . ' I l s in tè g re n t e n s u ite l e s Groupes
d'Action Libertaire ( G .A . L .) '. E n même te mps, le u rs
a c t i v i t é s s 'o r ie n t e n t en d ir e c t io n des b a n lie u e s , de
l'o r g a n is a t io n et a nim a tio n des q u a rtie rs . 'D e rn iè re ­
ment, peu a v a n t l ' e x i l , i l s c ré è re n t une Fédération
des Coopératives d'H abitation et d1Entraide.
Comme leu r o u t i l de t r a v a il e st l'im p r im e r ie ,
une grande p a r tie de le u r s a c t i v it é s se c e ntre sur
c e tte base, to u t en donnant lie u aux p re m ie rs é c la ­
tem ents ( le s quatre c e n tre s d ' a c t i v i t é : im p rim e rie ,
jardin potager, a te lie r a rtis a n a l et crèche). E n 1968
D è s 1969, le h a rc è le m e n t s y s té m a tiq u e commen­
ce. 'M is e s à part le s p r e s s io n s et le s p é rio d e s de
ferm eture de l 'i m p r i m e t i e - q u i le s empêche de
s u b s is te r é con om iquem ent - p o l i c e et armée p re n ­
nent la fâ c h e u s e h a b itu d e de leu r rendre des v i s i t e s
ré g u liè re s . En 1971, s i x d e s c e n te s ; en 72, quatre;
en 74, deux. E n 1975 deux d e s c e n te s et une r a f f le
générale qui ne l a i s s e en l ib e r t é que le s e n fa n ts et
un v i e u x camarade de p lu s de 80 ans. 1
V e r s !à fin 75, la «Comunidad del Sur» d é c id e
d 'é v a c u e r le pays. Un groupe d 'u n e d iz a in e de p er­
sonnes part pour le P é rou où, à la s u it e du coup
d 'E t a t m i l i t a i r e , il e s t v iv e m e n t i n v i t é à q u itte r le
p a y s ..1. Sept autres membres p a rte n t pour l ' A r g e n t i ­
ne où i l s re s te ro n t en p riso n durant p lu s d 'u n an
sans le m oindre c h e f d 'i n c u l p a t i o n . En fé v r ie r 77,
grâce à A m n e s ty In te rn a tio n a l, le s p re m ie rs l i b é r é s
p euvent gagner la Suède où une p a r tie des e n fa n ts
a trou vé refuge. '
A u j o u r d 'h u i, dans to u te l'A m é r iq u e L a t i n e , le s
m i l i t a i r e s ont occupé le te rra in et ne l a i s s e n t pas
la m oind re p la c e à la «Comunidad del Sur».
L e s rescapés, e x il é s en Suède, p o u rs u iv e n t
l e u r e xp é rie n ce com m unautaire et p u b lie n t un b u l ­
le t in , «Comunidad» (3) qui c o n tie n t, o utre d e s a r t i ­
c l e s th é o riq u e s rig o u re u x m a is o u v e r ts , une bonne
in fo rm a tio n sur le mouvement l i b e r t a i r e dans le s
p ays n ordiq ue s, en p a r t i c u l i e r en ce qui concerne
le s communautés. 'M a is pour eux, l e s c h o s e s so nt
c l a i r e s : «Tôt ou ta rd , nous reviendrons» et, entre
temps «notre p lu s grande r e s p o n s a b ilit é e s t de
nous préparer à la r é v o lu t i o n . . . en la f a is a n t!» , éi
se c r é e l a F é d é r a t i o n O u v r i è r e
s e c t io n de l ' A I T . Sa c r é a ­
tio n é t a n t p o s t é r ie u r e à la s c i s s i o n du C o n g r è s de
L a Haye, e lle n a it donc a n ti-a u to rita ire .
(1) L e
25
ju in
1875,
Régionale Uruguayenne,
(2) L a F . A . U . e s t « d is s o u te » pa r le g o u v e rn e m e n t en
1967. E l l e e n t r e d a n s la c l a n d e s t i n i t é et se t r o u v e
à l'o r ig in e de la R. O.E .
( R é s i s t a n c e O u v r ie r s E t u d ia n t s ) .
(3) «C o m u n i d a d »,
Box
15128,
10465 S t o c k h o lm , Suède.
21
SANS F R O N T IE R E S
►
s u it e
de la
pag e
20
■ D a n s q u el s e c t e u r de la c o m ­
m u n a u té a s - t u t r a v a i l l é ?
□ En s a c h a n t , dè s le d é p a rt, qu e
mon s é j o u r s e r a i t b r e f e t que mon
b u t é t a i t de c o n n a ft r e la «Comunidad del Sur» s o u s t o u s ses a s p e c t s ,
i l a é t é d é c i d é a v e c le s c a m a ra d e s
que je p a s s e r a is par to u s le s po s ­
t e s , mon te m p s d ' a r r ê t da ns ch a c u n
d ' e u x é t a n t p lu s c o u r t que c e l u i qui
é t a i t h a b i t u e l pour le s m em bres de
la c o m m u n a u té .
Il s e r a i t in t é r e s s a n t de p a r le r de
c h a q u e t r a v a i l , m a is pour ne pas
n o u s é t e n d re t r o p , je p ré fè re p a rle r
s u r t o u t de la t y p o g r a p h ie qui é t a i t
d ' a i l l e u r s le p r i n c i p a l s e c te u r p ro ­
d u c t i f e t c e l u i qui i m p l i q u a i t le p lu s
g r a n d n o m bre de camarades_(<HiSnd
j ' y é ta is , v in g t personnes y t r a v a i l­
la i e n t d o n t d i x de la c o m m u na uté).
L a t y p o g r a p h ie é t a i t gé rée par
une a s s e m b lé e h e b d o m a d a ir e . L e s
t h è m e s f i x e s en é t a i e n t : 1°) B i l a n
du t r a v a i l de la s e m a in e p r é c é d e n t e
qui c o m p r e n a it a u s s i b ie n le s h e u ­
re s de t r a v a i l e f f e c t u é e s pa r c h a q u e
p e r s o n n e que la p r o d u c tio n de c h a ­
que tâ c h e ; 2°) B i l a n des e n tré e s et
de s s o r t i e s de la s e m a in e é c o u lé e ;
3°) P la n n i n g de t r a v a i l (a v e c le
nom bre de p e rs o n n e s n é c e s s a ir e s
po ur ch a q u e t â c h e ) pour la se m a in e
en c o u r s .
A pa rt c es t r o i s a s p e c t s , chaque
a s s e m b l é e a b o r d a it le s pro b lè m e s
de la c o h a b i t a t i o n com mune da ns le
c a d r e de la t y p o g r a p h ie .
■ Q u 'im p rim a it-o n
p h ie ?
à la t y p o g r a ­
□ L a t y p o g r a p h ie f a i s a i t un t r a ­
v a i l c o m m e r c ia l qui en é t a i t son
s u p p o r t. En des te m p s de m o in d re
r é p r e s s io n , le s m em bres de la com ­
m u n a u té
a v a ie n t
pu r é a l i s e r un
pro gra m m e d ' é d i t i o n p ro p re d a n s le
but de d i v u l g u e r le s id é e s c om m u­
n a u t a i r e s , a n a r c h is t e s e t même p lu s
la r g e m e n t d ' é m a n c i p a t i o n s o c i a l e ,
de c u l t u r e a l t e r n a t i v e , de pé d a g o g ie
l i b e r t a i r e . . . Il y a v a i t même eu une
a c tiv ité
de
presse
c la n d e s tin e !
M a is lo rs de mon p a s s a g e , le c l i m a t
p o l i t i q u e a v a i t c o n t r a i n t à ré d u ire
au s t r i c t m in im um ce ty p e d ' a c t i v i t é .
■ Q u e ls é t a i e n t le s ra p p o r ts e n ­
tr e la com m u na uté e t le s gen
du q u a r t ie r ?
22
□ L e s ca m a ra d e s de «C om u nid ad
d e l Sur» o n t t o u j o u r s a c c o r d é un e
g ra n d e im p o r t a n c e à c e t a s p e c t de
le u r v i e «extérie ure» .
L o rs q u 'ils
h a b i t a i e n t d a n s le
« q u a rtie r sud» ( v o i r e n c a d ré ) i l s dé­
v e l o p p a i e n t un in t e n s e m i l i t a n t i s m e
da n s le q u a r t ie r qui s ' e s t p o u r s u iv i
e n s u i t e a u t o u r du n o u v e a u s iè g e ,
m a is so u s de s form es d i f f é r e n t e s .
A v e c l' a v a n c é e de la r é p r e s s io n ,
ce tte a c tiv ité m ilita n te s 'e s t to u ­
jo u r s p l u s r é d u i t e . A u c o u r s de la
p é r io d e où j ' y a i t v é c u , on ne po u ­
v a i t p l u s v r a i m e n t p a r le r de m i l i t a n ­
t i s m e b ie n q u ' i l y a i t eu de no m ­
b r e u s e s r e l a t i o n s de t y p e s o c i a l e t
hu m a in , s u r t o u t à t r a v e r s la c rè c h e
qui a c c u e i l l a i t , en p lu s de s e n f a n t s
de la c o m m u n a u té , un e v i n g t a i n e
d ' e n f a n t s du q u a r t ie r .
■ A to n a v i s , la v i e d a n s le c a ­
d re c o m m u n a u t a ir e n ' é t a i t - e l l e
pas un peu l i m i t é e , f e rm é e ,
t o u j o u r s r e s t r e i n t e (ou p r e s ­
qu e) aux mêmes ge ns ?
□ Il e s t c e r t a i n qu e le s ra p p o rts
p a r t i c u l i è r e m e n t é t r o i t s qui s ' é t a ­
b l i s s e n t d a n s un e v i e c o m m u n a u t a i­
re o n t t e n d a n c e à «renfermer» un peu
l' a m b ia n c e ; m a i s , fo n d a m e n t a le m e n t,
je c r o i s qu e pour a v o i r é t é une c o m ­
m u n a u té , c e l l e du Sud a t o u jo u r s
été p a r t i c u l i è r e m e n t o u v e r te . S ache,
e n t r e a u t r e s c h o s e s , q u 'a u cou rs
de s f i n s de s e m a in e s , la c o m m u n a u ­
t é r e c e v a i t des v i s i t e u r s l e s q u e ls
ne se l i m i t a i e n t pas à « jou er aux
cu r ie u x » m a is p a r t i c i p a i e n t , même
po ur peu de te m p s , à de n o m bre ux
a s p e c t s de la v i e c o m m u n a u ta ire .
L e s é c h a n g e s e t le s r a p p o r ts a ve c
l' e x t é r i e u r
o n t t o u jo u r s été un e
r é a l i t é im p o r t a n te .
P re n d s en co m p te le f a i t que la
co m m u n a u té a t o u jo u r s c o n s t i t u é un
p ô le de r é f é r e n c e po ur le m ou vem e nt
a n a r c h i s t e uru gu ayen (en même d 'a u - ,
t r è s p a y s ) e t ne s ' e s t ja m a is c o m ­
p o r té e comme un î l o t ferm é â la
r é a l i t é des a u tre s cam a rad es. Il e s t
c e r t a i n qu e le s l i e n s à l ' i n t é r i e u r )
é t a i e n t v r a i m e n t t r è s é t r o i t s , en
r è g le g é n é r a le . J e p e n s e au x pro­
fo n d e s r e l a t i o n s que j ' a i pu é t a b l i r
a v e c de s m em bres de «Com unid ad
d e l Sur» en q u e lq u e s m o is s e u le m e n t
e t e l l e s me p e r m e t t e n t de c o m p r e n ­
d re q u e ls d o i v e n t ê tre le s l i e n s
d 'a m itié
u n i s s a n t c e s c a m a ra d e s
qui v i v e n t l' e x p é r i e n c e d e p u is d i x
ou v i n g t arts.
■ Q u e l t y p e de v i e c u l t u r e l l e se
d é r o u l a i t au s e in de la c o m ­
m u n au té ?
□ Même de c e p o i n t de v u e , la
v i e de la c o m m u n a u té é t a i t a c t i v e ,
r i c h e en s t i m u l a n t s . L e s d i s c u s ­
s i o n s p o l i t i q u e s é t a i e n t fré q u e n te s
e t c o n c e r n a ie n t un pe u t o u t; il y
a v a i t é g a le m e n t d e s c o n f é r e n c e s et
de p e t i t s c o u r s sur de s t h è m e s p ré ­
c is (h is to ire , p o litiq u e , p h ilo s o p h ie ,
li t t é r a t u r e , g é o g r a p h ie , e t c . ) . Une
atte n tio n
to u te p a r tic u liè r e é ta it
p o rté e à l a v i e c u l t u r e l l e d e s e n ­
f a n t s e t des a d o l e s c e n t s . L e p r o b l è ­
me fo n d a m e n t a l é t a i t s ans a u cun
do u te c e l u i des d i f f é r e n c e s c u l t u r e l ­
le s e n g e n d ré e s par la s o c i é t é a u to ­
r i t a i r e e t i n é g o l i t a i r e : au s e in de la
c o m m u n a u té on e s s a y a i t de r é g le r
ce s p ro b lè m e s en le s p r e n a n t pa r la
racine .
■ P o u r c o n c lu r e , que v o u d r a i s - t u
d ire
aux
cam arades,
après
a v o i r v é c u un te m p s d a n s la
« C om u nid ad d e l Sur»?
□ Je c r o i s que t o u s le s c a m a r a ­
d e s d e v r a i e n t f a i r e un e f f o r t pour
c o m p re n d r e c e q u 'a v r a i m e n t pu ê tre
l ' e x p é r i e n c e de la «C o m u n id a d d e l
Sur» e t la v a l e u r r é e l l e d e le u r s r é a ­
l i s a t i o n s a u s s i b ie n d a n s le d o m a i­
ne du t r a v a i l a u t o g é r é que d a n s
c e l u i de la v i e c o m m u n a u t a ir e . P o u r
m o i, ( C o m u n id a d del Sur» r e p r é s e n t e
une e x p é rie n c e dont nous devon s
t i r e r b e a u c o u p de le ç o n s , m a is s u r ­
t o u t c e l l e - c i : t e n t e r de m e t t r e en
p r a t i q u e no s id é e s , dè s a u j o u r d ' h u i ,
en le s t r a n s f o r m a n t a i n s i en un e
r é a lité â c o n s tru ire tou s ensem­
b le . ■
p ro p o s r e c u e i l l i s par
« A . - R i v i s t a A na rchica»,
SANS F R O N T IE R E S
A P R E S L E T R E M B L E M E N T DE T E R R E , L ’ E T A T I T A L I E N A D ’ AB O R D
L O N G U E M E N T T A R D E A M E T T R E EN P L A C E L E S SECOURS; E N S U I T E ,
S P E C U L A T I O N S DE LA M A F F I A E T M A G O U I L L E S P O L I T I C A R D E S N ’ ON T
CESSE DE L ES F R E I N E R . . . SUR L E TAS, LES S I NI S T RE S O N T DONC DU
S’ A U T O - O R G A N I S E R : U N E M O B I L I SA T I O N A L A Q U E L L E LES A N A R C H I S ­
T E S NE P O U V A I E N T QUE P A R T I C I P E R COMME EN T E M O I G N E N T CI DESSOUS DES C A M A R A D E S I T A L I E N S ;
D a n s un d é s a rro i t o t a l , le p r e m ie r jo u r f u t m arqué par le s t e n t a t i v e s
d e r e p r i s e de c o n t a c t a v e c le s c a m a r a d e s ; n o u s é t io n s t o u s « v ic tim e s »
du t r e m b l e m e n t de t e r re .
L e v e n d r e d i 25 n o v em b re, la p re m iè r e a s s e m b lé e au c e n t r e d ' é t u d e s
l i b e r t a i r e se d é r o u la d a n s une a tm o s p h è r e de d i f f i c u l t é s e t de pe ur. L à ,
f u r e n t d é c id é s la m o b i l i s a t i o n de t o u s le s c a m a ra d e s d i s p o n i b l e s , le ra­
m a s s a g e de m a t é r i e l e t l ' e n v o i d ' a i d e d a n s le s z o n e s le s p lu s t o u c h é e s ,
c e c i so u s l ' i m p u l s i o n du m ou vem e nt a n a r c h i s t e n a t io n a l qui n o u s a o f ­
f e r t t o u t le s o u t ie n et la s o l i d a r i t é p o s s i b l e s , qui nous a a id é à su rm o n ­
te r le c h o c i n i t i a l e t qui no us a p o u s s é à l ' i n i t i a t i v e .
M a rd i s o i r e s t re v e n u un c a m a ra d e de L i o n i a ve c le s p r e m iè r e s n o u ­
v e l l e s : d r a m a t iq u e s . «Il n ' y a p a s d e s e c o u r s , r e m u o n s - n o u s ». M e r c r e d i,
u n e p e rs o n n e en m oto e s t p a r t i e à la r e c h e r c h e des ca m a ra d e s i s o l é s e t
p o u r se ren dre c o m p te d e l ' é t e n d u e du d é s a s t r e . N u e s c o , L i o n i ; à A q u ilo n i a , peu de v i c t i m e s . ^ L e s ca m a ra d e s tf i c h è l e e t S y l v i a a v a i e n t d é jà
f a i t un to u r dans le s v i î î a g e s e n v ir o n n a n t s e t , s ' é t a n t rendues c o m p te
de la s i t u a t i o n c a t a s t r o p h i q u e , é t a ie n t en t r a in de s ' o r g a n i s e r au m ie u x
et de se m o b i l i s e r .
A G u a rd ia L o m b a r d i, la p o p u la t io n é t a i t s a in e e t s a u v e c a r (au mo­
men t de l a c a t a s tr o p h e ) p re s q u e to u s le s h a b i t a n t s é t a ie n t ra s s e m b lé s
s u r la p la c e à l ' o c c a s i o n de la F ê t e de s C h â t a i g n e s . A n t o n io G u iz z o
e s t s o r t i , pa r ch a n c e , in d e m n e , e x c e p t i o n f a i t e de q u elque s c o n t u s io n s
et b e a u c o u p de peur à c a u s e de l' é c r o u l e m e n t t o t a l des m a is o n s .
P a r a l l è l e m e n t des c o n t a c t s s ' é t a b l i s s a i e n t a v e c un cam arade p a rti
a v e c la c o l o n n e d ' a i d e o r g a n i s é e p a r la l i b r a i r i e V ln c o n t r o e t qui s ' é t a i t
é t a b l i e à T o r e l l a pour o r g a n is e r un g ra n d c e n t re de c o l l e c t e e t de t r ia g e
q u i, s e lo n les in t e n t i o n s , d e v a i t ê t r e a u to g é ré . T a n d i s que, de N a p le s ,
p a r t a i t la p r e m iè r e e x p é d i t i o n po ur L i o n i : un fourg on r e m p li de l a i t , v i ­
v r e s , v ê t e m e n t s , d é s i n f e c t a n t s , m é d ic a m e n ts , c o u v e r t u r e s , e t c .
C+
£3
CD
J e u d i , s o n t a r r i v é s de s s e c o u r s de P a le r m o , t e n te s e t b o t te s , tr è s
a p p r é c ié e s ; de M e s s i n e a u s s i qu i, ré u n is a ve c c e u x de la p r o v in c e de
N a p le s , o n t p e r m is d ' o r g a n i s e r d e u x e x p é d it io n s de m a t é r ie l a v e c s e p t
ca m a ra d e s p ré p a r é s , pour s ' é t a b l i r sur la zone.
A r r i v é e s au cam p de T o r e l l a , le s e x p é d it io n s se r e n d i r e n t co m p te
que t o u t é t a i t e n t re le s m a in s des i n s t i t u t i o n s ( s y n d i c a t s , armée, m a i­
r ie , p a r t i s ) o c c u p é e s à d ' o d i e u s e s s p é c u l a t io n s p o l i t i q u e s . E l l e s p r é fé ­
rè re n t c r é e r un camp de b a s e a u to g é ré à A q u i l o n i a d 'o ù , a v e c des c a m a ­
ra d e s du c o i n , e s t p a r t i e une e x p é d it io n d ' a i d e a u x ha m ea ux d i s p e r s é s .
N o u s ne som m e s pas en é t a t de d i r e , p o u r l ' i n s t a n t , c e qui e s t a r r i v é
da n s l e cam p i n s t i t u t i o n n e l , mai s n o u s po u vo n s s i g n a l e r qu 'u n c a m a rad e,
p r é s e n t au s e c r é t a r i a t t e c h n i c o - a d m i n i s t r a t i f du camp de T o r e l l a , un des
p r e m ie r s à a v o i r o r g a n is é le s s e c o u r s , s 'e n e s t a l l é é c œ u r é pa r le s
m a g o u i l l e s p o l i t i q u e s s p é c u l a t i v e s f a i t e s s u r le dos des s i n i s t r é s .
V e n d r e d i , un e a u tre e x p é d i t i o n e s t p a r tie a v e c des c o u v e r t u r e s , v i ­
v r e s , m é d ic a m e n t s e t d ' a u t r e s m a t é r i e l s , t o u jo u r s en l i a i s o n a v e c le
cam p d ' A q u i l o n i a .
T a n d i s que le s s e c o u rs p r o m is c o m m e n ç a ie n t à a r r i v e r de C a rra ra ,
G en ov a, Savo na , M il a n o , R om a, L i v o r n o , e n c o r e de P a le r m o , T o r i n o ,
V o g h e r a , de T o r i n o e s t p a r t i e une a u t re e x p é d it io n de t r o i s «campers»
ave c po ur d e s t i n a t i o n la z o n e de P o te n z a .
L e s s e c o u r s n ' o n t pa s été u n iq u e m e n t f o u r n is par le s a n p r c h is t e s .
L a p o p u la t io n en g é n é ra l a a l im e n t é n o tre a c t i v i t é comme, du re s te , ce
fu t j e cas p o u r t o u te s le s o r g a n is a t io n s qui se son t p r é o c c u p é e s de c o l ­
le c te r du m a t é r i e l. L e s p re m ie r s fo n d s o n t é té u t i l i s é s p o u r a c q u é r ir des
t e n te s , des s a c s de c o u c h a g e ( p o u r le s ca m a ra d e s r e s t é s sans a b r i) e t
des m é d ic a m e n ts . D è s qu e p o s s i b l e , n o u s f e r o n s un com p te -re n d u d é ­
t a i l l é des a id e s p a r v e n u e s et d i s t r i b u é e s .
T o u t e l ' a c t i v i t é e s t c o o rd o n n é e pa r l ' a s s e m b l é e des c a m a ra d e s p ré ­
sents au c e n tre d ' é t u d e s l i b e r t a i r e , r é u n ie en p e rm an ence . D e t o u te f a ­
çon, la s i t u a t i o n é v o lu e c o n t in u e ll e m e n t . N o u s f e ro n s un c o m p te -ren du
des c h a n g e m e n ts in t e r v e n u s pa r la s u i t e .
C o m i t é de r é d a c t i o n £/'«Umanità Nova» d e l a p r o v i n c e d e N a p l e s .
23
u
kiosques
kiosques
kiosques
RECHERCHES
D'ANTHROPOLOGIE
POLITIQUE
de
P ierre C la str e s
E d i t i o n s du S e u i l
— ■
248 p a g e s , P a r i s , 1980
% C e r e c u e i l d ' a r t i c l e s de
Pierre C lastres, parus dans
d i v e r s e s r e v u e s ent re 69 et
77, vient ainsi a c h e v e r l ' é ­
dition
des
travaux,
hélas
restés
in a c h e v é s , de l 'a u ­
t e u r ( *) .
On y r e t r o u v e r a p o s é e s
le s
questions essen tie lles
sur les s o c i é t é s prim itives:
le rôle de l ' é c o n o m i e , la re ­
l i g i o n , la g u e r r e . A u t a n t de
questions
qui d o i v e n t p e r ­
me ttr e de r é s o u d r e l ' i n t e r r o ­
gation centrale : quand, com ­
ment et pourquoi l ' E t a t est-il
apparu ?
Son d é c è s , s u r v e n u en
1977, e s t ven u in te r r o m p r e
1a r é d a c t i o n
d'un ouvrage
s u r le p o u v o i r e t l ’ E t a t . On
trouvera n é an m o in s dans ce
r e c u e i l d e u x t e x t e s qui d e ­
v a i e n t y p r e n d r e p l a c e : «Ar ­
chéo logie de la violence» et
«Malheur du g u e r r ie r s a u v a ­
ge». E n f i n , l e t o u t d e r n i e r
article,
un v é r i t a b l e p a m ­
phlet:
«Les
m arxistes
et
le ur a n t h r o p o l o g i e » .
C on tre le s m a r x i s t e s qui
affirm ent que l ' é c o n o m i q u e
a, d e t o u t t e m p s , p r i m é s u r
le p ol it iq u e et que, d o n c ,
les c l a s s e s son t apparues
a v a n t l’ E t a t , C l a s t r e s a r g u ­
me n te le c o n t r a i r e : « L ' é c o ­
nomique s 'e n g e n d r e à partir
du politique, les ra p p o rts de
production viennent d e s ra p ­
port s de pouvoir, l ' E t a t e n ­
g e n d r e l e s c l a s s e s » (p. 1 67).
Pour l ' a u t e u r , les ethnomarxistes
pla q u e n t s u r la
société primitive, in d iv is é e ,
s a n s E t a t , le m ê m e d i s c o u r s
que c el u i p orté s u r la s o c i é ­
té c a p i t a l i s t e , d i v i s é e , a v e c
E t a t . On s a i s i t i c i l ' i m p o r ­
t a n c e de s e s r e c h e r c h e s e t
l ' i n t é r ê t t ou t p a r t i c u l i e r q ue
les libertaires devraient por­
ter à ces te xt es.
Solon AMOROS.
(*) «Chronique d e s In d i e n s
Guayaki», é d i t i o n s Pion; «L e
Grand Parler», é d i t i o n s du
S eu il;
«La S o c i é t é contre
l'Etat», é d i t i o n s de Minuit.
24
AUX
LA F O I R E
I M MOR T E L S "
d 'E nki B ila l
Ed ition s
Dargaud.
• Ç a oui, c ' e s t de la B .D .
C e l l e qui e x c i t e n o s c e l l u ­
les
g rises,
qui n e n o u s
p rend pour d e s ad orateu rs
d e « B é c a s s i n e » , qui v a c h e r ­
c h er s o n i n s p i r a t i o n d a n s
l a m e i l l e u r e d e s S F . M ais
c h e z B i l a l , en prim e, il y a
la couleur d e s v ête m e n ts,
d e s rues, d e s v is a g e s . Une
h i s t o i r e qui s e d é r o u l e d a n s
un m o nd e où s o n t p r é s e n t s
tous
le s
in gréd ien ts
de
« 1984»: s o c i é t é d 'a p a r th e id ,
m i s è r e s u i n t a n t e du p e u ­
p l e qui n ' a p l u s d e m o ts
pour c r ie r , b ê t i s e e t v o l o n ­
t é m é g a l o m a n e du p o u v oir.
L ' E g l i s e , s e s g a d g e t s et
sa
c o rru p tio n ,
n 'échappe
p a s à B ilal. Ce n 'e st pas
pour n o u s d é p l a i r e . Même
l e s «dieux» s o n t d é r i s o i r e s
d a n s leu r é t h i q u e , leur e n ­
n u i im mort el trompe à c o u p s
d e M on o p o ly . P a s éton na n t
que parmi e u x o n tro u v e un
parano! V i o l e n c e s , f a s c i s ­
m es, dieu x t r is t e s , p u is­
s a n t s pourris, peuple sa n s
espoir. Tout ç a n 'e st pas
t r è s g a i m a i s fo r c e l'a d m i­
ra tio n . S u s au x im m o r t e ls !
J e a n K é h a y a n h u rle i c i s a
d iss id e n c e d 'avec l'aligne­
m en t p h i l o s o v i é t i q u e du P C ,
i l d é n o n c e l e p o i d s du s t a ­
lin ism e c h e z l e s m ilita n ts
c o m m u n istes, il lè v e le v o i­
le
sur l e f o n c t i o n n e m e n t
d 'u n p arti «où s e u l e s l e s
v o i x non c r i t i q u e s s o n t d é ­
m o c r a t iq u e m e n t c e n t r a l i ­
s é e s » (p. 3 4 ) .
Entendons-nous
bien!
L 'auteur r e s te très attaché
à d e s n o t i o n s co m m e : u n i o n
du p e u p l e de F r a n c e , u n i o n
d e la g a u c h e . Il r e s t e per­
s u a d é q u'on p e u t t ra n sf o r­
mer l e part i d e l ' i n t é r i e u r
e t l'on v o i t i m m é d i a t e m e n t
l e s l i m i t e s d e s o n c o m b a t.
J e a n K é h a y a n a e u l e tort
d e croire q u 'il p o u v a i t im­
p u n ém en t s 'a ffirm er « com ­
m uniste et an tiso v iétiq u e»
(p. 119)* N o u s s a v o n s au­
j o urd'h u i, a p r è s s o n e x c l u ­
s i o n , c e q u 'il faut en p e n ­
s e r . Un m i li t a n t s i n c è r e du
Parti
peut
effectivem en t
être com m uniste et a n tis o ­
v iétiq u e...
m a i s h o r s du
PCF !
Julien
DREUX
B r un o
d e G érard Dupré
C o l l . P o u r le p l a i s i r
d e s araign ées.
• «Entre un v a g a b o n d a g e
e t une solitude», l e s poè­
m e s du c a m a r a d e Dupré s o n t
f r a te r n it é e t d o n c , en c e s
t e m p s , d é s e s p é r a n c e . «Tant
d e m orts d o i v e n t e n c o r e n a î ­
tre !». Q ue t o u s c e u x d é j à
i n s t a l l é s « d a n s l e futur du
p r é s e n t» f a s s e n t l e détour.
(C .P .C .A .,
B .P . 21, 94190
V illen eu v e-S t G eorges).
LE T A B O U R f T
DE P I O T R "
de J e a n K é h a y a n
E d i t i o n s du S e u i l ,
159 p a g e s , P a r i s , 1980.
• P r e n a n t l a s u i t e de la
d é n o n c i a t i o n d e la nature
n o n - s o c i a l i s t e de l ’U R S S ,
N APPI.
A MES H I BO U X
DE C H E V E T "
d e R obert V i t to n
E d i t i o n s «La p e n s é e
u n i v e r s e l l e » (★)
# R o b ert V i t to n e s t né en
19 47 à T o u l o n . D è s l ' â g e
d e 14 a n s i l t r a v a i l l e à l'a r­
s e n a l où i l m i li t e e n tant
q u ' a n a r c h i s t e c e qui lu i
v au t c e n s u r e s e t b r im a d e s
d e t o u t e s p a r t s . Il s e p a s ­
s i o n n e , t r è s j e u n e , pour l a
p o é s i e et rend p u b li q u e u n e
p l a q u e t t e i n t i t u l é e « P rém i­
ces».
D a n s son r e c u e il intitu­
l é «A m e s h ib o u x d e c h e v e t »
TESTAMENT „
PHONOGRAPHE
d e L é o F erré
E d itio n s P la sm a .
MARCOS.
L E S JOURS ACI DES
il nous in v ite a v ec sim p li­
c i t é et s i n c é r i t é à u n e p o é ­
s i e t e n d r e e t dure où s ' e n ­
t r e m ê l e n t am our, r é v o l t e et
m éla n co lie , et ce, avec d es
m ots v e n u s d'une en cre n oi­
re.
«Si l ' o n me su p p r im a it l a
p lu m e
J 'écrirais avec m es on gles,
S i l ' o n me su p p r im a it l ' e n ­
cre
J ' é c r i r a i s a v e c mon s a n g ,
S i l ' o n me su p p r im a it l e p a ­
pier
J ' é c r i r a i s su r l e s murs,
S i l ' o n m e su p p r im a it
J e n 'é c r ir a is jam ais p lu s
J e v o u s e n d o n n e ma p a ro le
M a i s en a t t e n d a n t . .. » .
En a t te n d a n t , il d é d i e
c e s p oèm es à s e s compa­
g n o n s m é l a n c o l i q u e s d e la
n u i t , à s e s « fra n gins» anon y m e s du fo nd d e s b ru m e s,
à s e s o is e a u x d e s tén èb res
qui n ' o n t , n i l e s a i l e s e t l e
b e c c l o u é s , n i la v o i x em­
p r i s o n n é e d a n s c e qui r e s t e
d e forêt.
Il g l i s s e s o u s leu r m an ­
tea u la te n d r e ss e d e s f i ll e s
et l a fureur du p a v é .
• V o ici com bien de tem ps
d é j à q u 'il a b o u s c u l é la
chanson?
V oici
com bien
d ' é p o q u e s que n o u s b r ic o ­
lons dans c e s te x te s ! N ou s,
l e s in c o n d itio n n e ls de L é o ,
m a l g r é , e t p a r c e que, l e s
i r r i t a ti o n s ,
l e s c o u p s de
gu eu le m a lv en u s, le s p ied s
d a n s le p la t, l e s c o n t r a d i c ­
t i o n s ... L e s êtres vivan ts
d é r a n g e n t l e m o n d e, et c ' e s t
tant m i e u x . N o u s , l e s t e n u s
e n m arge, i l s n o u s p l a i s e n t .
(★) E d i t i o n s « La p e n s é e un i v e r s e l l e » , 3 b i s q uai aux
fleurs, 7 3004 P a r is .
L E MELOG
B . P . 20
7 5 6 8 0 - P A R I S C E D E X - 18
• L e s a r m e s d e l a b ande
à J im m y : «Sur l e zin c » , «La
c r é c e l l e n o i r e » ...
D e l'ironie à d écaper
l e s y e u x , la h a in e d e s c h e f s
e t a u t r e s s a u v e u r s , l'horreur
d e c e qui f r e i n e . F a i t e s cir­
c u ler.
C ' e s t un v i e u x p o t e F e r r é .
Il c r è v e r a j a m a i s de froid ,
p a s p a r c e q u 'il e s t r i c h e ,
m a i s p a r c e q u 'il y a tou ­
jo u r s une p l a c e au c h a u d ,
pou r lu i, c h e z l e s a n a r s .
A lors
ce
b o u q u in c o u s u
m ain ( v i e u x texte s^ à fre­
d o n n e r e t n o u v e a u x à mettre
e n m u s i q u e ) , un t e s t a m e n t ?
A l l o n s d o n c; u n e p r o m e s s e .
A p reu v e le d e r n i e r d i s q u e
( « L a v i o l e n c e e t l'en n u i» ).
D ' u n c ô t é , l e s r é v o l t é s le
m ange ro n t d e s o r e i l l e s ; de
l ' a u t r e , l e s a s s i s , en feront
un bon p l a c e m e n t . Merde,
encore
une con trad iction ,
v ' i à L é o F e r r é qui p a s s e .
Tony ALVAREZ.
REPERES
25
où sont passés les maos?
^
P qui
nui a
n ffrnnr»o
nu
ne
o tt
e
r a p p é rlo
de r\
p lI eo iinn ff o
le d e r n i e r c a rr é de s a d o r a te u r s
_
m a o ïs t e s o c c i d e n t a u x , c ' e s t la
c h u t e de le u r u l t i m e c r o y a n c e . Au
m o in s , p e n s a i e n t - i l s , le s C h i n o i s
m ange nt à le u r f a i m ! Il a f a l l u a t­
t e n d r e le s r é v é l a t i o n s a p p o rté e s pa r
l e p ro cè s de l a B a n d e des Q u a tre
pour c e r n e r l ' i d é o l o g i e de l a m is è r e ,
po ur c o m p t a b i l i s e r le s v i c t i m e s des
d i s e t t e s . L a C h in e r e s t e un p a ys
p a uv re où 8 0 % de la p o p u la t io n e s t
c o m p o s é e de p a y s a n s qui o n t sub i
le s e rre urs c a t a s t r o p h i q u e s d 'u n e
p o l i t i q u e qui v o u l a i t «r é s o u d r e l e
m
p r o b l è m e d e l a f ai m en p e i g n a n t d e s
g a l e t t e s ». U n e s i t u a t i o n é c o n o m iq u e
e t s o c i a l e c h a o t iq u e t é m o ig n e des
r é s u l t a t s , en même te m p s q u 'e l l e
a t t i s e la m is e en c a u s e d 'u n rég im e
é p ro u v é pa r la d i s p a r i t i o n de son
v êt r e s u p r ê m e ».
L A L O N G U E MARCHE
V E R S L E C A P IT A L IS M E
lo r s , on r e p a r t da ns l ' a u t r e
sens. Sous la b a n n iè r e des
«Quat re
m o d e r n i s a t i o n s », e t
a ig u illo n n é e
par l e n o u v e a u m o t
d ' o r d r e : via p r a t i q u e e s t l e s e u l cri­
t è r e p o u r é p r o u v e r l a véri té) >, la
C h i n e de D e n g X i a o p i n g s 'e n g a g e
r é s o lu m e n t da ns le c a p i t a l i s m e .
A
M e s u r e s de d é c o l l e c t i v i s a t i o n ,
re n fo r c e m e n t du p o u v o ir de s d i r e c ­
t e u rs d ' u s i n e s , r e to u r p r o g r e s s if aux
lo p in s p r i v é s , m is e en p l a c e de s t i ­
m u l a n ts m a t é r i e l s : b re f, la p a n o p lie
c la s s iq u e
du r é t a b li s s e m e n t de s
p r o f i t s . On to u rn e a i n s i , peu à peu,
le dos à l a p l a n i f i c a t i o n , pour se
r e t r o u v e r nez à nez a v e c l ' i n f l a t i o n .
En t o u t c a s , le s c a p i t a u x é t r a n ­
g e rs a f f lu e n t e t m o d è le r o n t, à c o u rt
term e, une n o u v e l l e C h i n e où l ' é c o ­
n o m iq u e ne se ra p l u s s ous l a b o tte
du p o l i t i q u e . L e r e n v e r s e m e n t en
c o u r s b é n é f i c i e , c e r t e s d 'a b o r d , à
l a c l a s s e d o m in a n te d o n t l ' a m b i t i o n
e s s e n t i e l l e e s t de c o m b le r le v id e
qui s é p a re , dès à p ré s e n t, le p a r ti
de s m a s s e s , sa n s po ur c e l a s ' a t t a ­
quer à s e s p ro p re s p r i v i l è g e s . M a is ,
p a r a l lè l e m e n t , le s c h a n g e m e n t s é c o ­
n o m iq u e s v o n t a v o i r de s c o n s é q u e n ­
ces im p o r t a n te s s u r la c o n s t i t u t i o n
même de la c l a s s e o u v r i è r e c h i n o i ­
se. P r i m e s e t h i é r a r c h i e s s a l a r i a l e s
v o n t , peu à peu, l a m o r c e le r en ca­
t é g o r ie s , la d i v i s e r p e u t - ê t r e . Co m ­
me si on a v a it p e u r de ses r é a c t i o n s
m a ssive s.
26
p
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F A I R E P E U R A U X SINGES
a p e r te de p r e s t i g e du p a r t i ,
le f a i t que s e s m o ts d ' o r d r e
n 'a ie n t p lus d 'im p a c t m o b ili­
L
s a t e u r , n ' e s t c e r t a i n e m e n t pa s l ' é l é ­
m en t le p l u s g ra v e de la c r i s e . L a
d i f f i c u l t é s u r g i t p a r a l lè l e m e n t d ' u n e
d i v i s i o n de l ' a p p a r e i l d i r i g e a n t . L e
n o u v e a u c o u r s c h i n o i s re n c o n tr e
d 'é n o r m e s r é s i s t a n c e s non s e u le ­
m e n t au s e i n de l' i m m e n s e b u re a u ­
c r a t i e p r o v i n c i a l e , m a is a u s s i au
se in de l 'a r m é e d o n t le r ô l e r e s t e
fondam e n t a i.
C e s f r a c t u r e s a l im e n t e n t la l u t t e
de te n d a n c e s d é c l e n c h é e en o c t o b r e
I 976 pa r l a c h u t e de la B a n d e des
Q ua tre . M a is e n t re la t e n d a n c e
«pragm atiq ue» qui s e m b le a v o i r le
v e n t en poupe e t la t e n d a n c e « in t é ­
g r is te » , il y a s u r t o u t t o u t e la b o u r­
g e o i s i e r o u g e p rê te à jo u e r n ' i m p o r ­
te q u e l le c a r t e à c o n d i t i o n de
s u r v i v r e en t a n t que c l a s s e . L a
r é a p p a r i t i o n , en j u i l l e t 77, de D e n g
X i a o p i n g , r é s u l t e d ' u n t e l c o m p ro ­
m is . M a is , t o u t en é l i m i n a n t p ro ­
g r e s s iv e m e n t l e s r e s p o n s a b l e s de
l a r é v o l u t i o n c u l t u r e l l e , le s t e n a n t s
d 'u n m ao ïsm e o r t h o d o x e , D e n g va
se h e u r t e r à un e d i f f i c u l t é de t a i l l e .
II lu i f a u t , p o u r ê t r e c r é d i b l e , rom­
pre a ve c un p a s s é d o n t il f a i t d ' a i l ­
le u r s p a r t i e , sa n s que c e t t e ru p tu re
p r o v o q u e u n e r e m i s e en c a u s e d 'un
ré g im e d o n t i l e s t a c t u e l l e m e n t le
p rin c ip a l a c tio n n a ire . T e l e s t l'e n ­
je u e t l ' a m b i g ü i t é du p ro c è s de
P é kin .
M a lg ré la p o l i t i q u e de r é h a b i l i ­
t a t i o n e n g a g é e pa r l e c o m i t é c e n t r a l,
i l e s t é v i d e n t que l e p o u v o i r r e s te
d é te n u pa r le s mêmes p e r s o n n e s , e t
c e c i , à to u s le s é c h e l o n s . On a jo u é
un r ô l e qui s a t i s f a i t à la f o i s le s
o b j e c t i f s d 'u n p o u v o ir b u r e a u c r a t i ­
qu e en d i f f i c u l t é e t c e r t a i n e s r e v e n ­
d ic a tio n s p o p u la ire s .
D a n s sa l u t t e po ur la d é m o c r a t i e ,
l e p r in te m p s de P é k i n a a i n s i pu
c r o i r e un i n s t a n t au s o u t ie n de D e n g
X ia o p i n g e t de sa t e n d a n c e . V i c t i ­
mes de la R é v o l u t i o n c u l t u r e l l e ,
c e u x - c i se s o n t, en f a i t , s e r v i s du
mouvement
démocratique
pour
a s s e o i r le u r p u i s s a n c e c o n t re la
t e n d a n c e m aoi'ste o rt h o d o x e . U n e
fo is ce la a tte in t, il s ont je té dans
le s b ra s de l a r é p r e s s io n un m o u v e ­
m en t qui ne le s s e r v a i t p lu s e t qui
risquait,
sur s a la n c é e , de les
re m e ttr e en c a u s e e u x - m ê m e s .
L e 6 dé c e m b re 1979 le m u r de la
d é m o c r a t i e de P é k i n e s t n e t t o y é .
L ' e s p o i r d 'u n c h a n g e m e n t pa r le
h a u t s ' é t e i n t . T o u t e s t à re c o m m e n ­
cer. ■
REPERES
UN PRINTEMPS
«T o u t c o m m e l ’e a u e t l e
jeu, un m o u v e m e n t de
m a s s e et u n e c l a s s e d o ­
m i n a n t e n e p e u v e n t co ­
e x i s t e r ».
Pi
«dépend toujours étroite­
ment des occasions que lui
offre la division du pouvoir cen­
tral». En C h in e e ll e aura la p o s ­
s ib ilité
de se c o n c r é tis e r et
d 'é c la t e r au grand jou r le 5 a v ril
1976 a vec la m a n ife s ta tio n de la
p la c e T ia n ' anmen. 1Au sommet,
le s l u t t e s des f r a c t io n s b a tte n t
le u r p le in et se ro n t marquées,
c e tte même année, par deux é vé ­
nements d 'im p o r ta n c e . L e 9 sep­
tembre, le Grand T im o n ie r Mao
d is p a r a ît. On a à p e in e le temps
de le p le u re r que le 6 octob re un
coup d 'E t a t ch a s se la Bande des
quatre et h is s e Hua Guofeng au
p ou voir. 1
>
K
tl
P
C
omme partout, l 'o p p o s i t i o n
*
Pi
P r o f i t a n t de ces remueménages de p a la is , la c o n te s ta ­
tio n s 'e n g o u ffre dans la p ra tiqu e
de la l ib e r t é d 'e x p re s s io n . 1De
novembre 1978 à mars 79, la
C hin e va co n n a ître un «printemps
en plein hiver». J a m a is on n'a ura
a s s is t é à une t e l l e flo ra is o n de
revues
n o n - o f f i c i e l l e s , à une
t e l le c r it iq u e d ir e c te du régime.
L e sym b o le d 'un te l mouvement
sera le Mur de X id a n . M a is P é k in
ne d o it p a s cacher que to u te s
le s grandes v i l l e s ont été em­
p ortée s dans le to u r b illo n de
lib e rté .
L E R E T O U R D ES
GARDES ROUGES
n ne tro u v e pas de to u t
d ans
ce q u'on appelera
fin a le m e n t
le M ouvem ent
D é m o cra tiq u e .
Ses a n im a te u rs
s o n t pour la p lu p a r t âgés de 20
à 30 ans. I l s s o n t de c e tte géné­
ra tio n h is t o r iq u e qui s ' e s t forg ée
p endant la R é v o lu tio n c u lt u r e l l e .
A n c ie n s G ardes Rouges, le s v o i ­
là a u jo u rd 'h u i o u v r ie r s d 'e n tr e ­
p r is e s , membres de p ro fe s s io n s
q u a li f i é e s ou c a d re s lo c a u x du
p a r ti. A la d if fé r e n c e des d i s s i ­
d e n ts des pays de l ' E s t , peu
nombreux s o n t le s i n t e l l e c t u e l s
et le s e n s e ig n a n ts . 1L e M ouve­
ment d é m o cra tiq u e c 'e s t d 'a bo rd
le mouvement o u v rie r, ou en to ut
ca s, l 'u n e de ses fran ge s.
O
Ce qui f r a p p e é g a le m en t,
dans sa c o m p o s itio n s o c ia le ,
c 'e s t que dans ce p a y s é m inem ­
ment a g r ic o le , le m ouvem ent se
d é ve lo pp e ra p re squ e e x c l u s i v e ­
ment dans le s v i l l e s . 'C e tte l i a i ­
son avec le s p a y s a n s se ra des
p lu s d i f f i c i l e s car le m ilie u a g r i­
c o le reste ré s o lu m e n t «à l'éc a rt
de
tout
pro ce ssu s
politique»,
comme la s s é par ta n t d 'a n n é e s
i d é o lo g iq u e s q u ' i l a payé de ses
fo rc e s et de sa sueur.
C e rte s , la p ie rre de touche
du mouvem ent sera la re v e n d ic a ­
tio n d é m o c ra tiq u e . 'Mais, il abor­
dera c e ll e - c i en s 'in te r r o g e a n t
p a r a llè le m e n t s u r la p la c e et le
r ô le du p a r ti, le s s tr u c t u r e s de
d é m o c ra tie s o c ia l is t e , la c o n ­
c e p tio n de l 'E t a t . , ' . 11Souvent, à
27
REPERES
L A F IN DES " Q U A T R E
GRANDES L IB E R T E S "
L
x
é c h e c e s s e n tie l du Mou­
vement d ém o cra tiq u e se­
ra de n 'a v o i r pas su se
l i e r é tro ite m e n t a vec une c o n te s ­
t a tio n s o c ia le qui va s 'e x p rim e r
s im u lta n é m e n t:
le
mouvement
des «plaignants».
Deng^waoping
p a r t i r de cas c o n c r e ts , d 'e x p é ­
r ie n c e s v é cu e s, le s revues et
d a z ib a o s n 'h é s i t e n t pas à se
la n c e r d an s de t e l s d é b a ts fo n ­
d am entaux. E t le u r p lan d 'a t t a ­
que se c o n c e n tre sim p le m e n t sur
deux p o i n t s : d 'a b o rd une m ise
en ca use ( c l a i r e ou v o ilé e ) de
Mao et des i n t é g r i s t e s à tra v e rs
une r e le c t u r e de la p é rio d e de la
R é v o lu tio n
c u lt u r e l l e ;
e n s u ite
une
lu t te
in tra n s ig e a n te pour
l 'o b t e n t i o n des li b e r t é s dém ocra ­
ti q u e s et des d r o it s de l'h om m e.
L e q u a d r illa g e de la v ie q u o ti­
d ie nn e c h in o is e donne to u te son
im p o rta n c e à ce d e rn ie r p o in t et
provoque to u te l'a m b ig ü ité du
P r in t e m p s de P é k in . 1
C ar le Mouvem ent d é m o c r a ti­
que e s t lo in d 'ê tr e homogène. 1
L e s c o u ra n ts s ' y c ô to ie n t, se
r e tr o u v a n t
u n iqu em e nt rassem ­
b lé s sur le s m ots d 'o rd re de l i ­
b erté. Quant au re ste , l'é v e n t a il
s 'o u v r e
large m en t, d e p u is le s
h u m a n is te s
(ro u ss e a u i'ste s )
et
le u rs i l l u s i o n s sur le s «démocra­
t i e s o c c id e n ta le s » , j u s q u 'a u x dé­
fe n s e u r s de c l a i r e s r e v e n d ic a ­
t i o n s s o c i a l i s t e s se ré c la m a n t
notamm ent de la Commune de
P a r is . ! L e 17 décem bre 78, un
d a z ib a o sig n é par un o u v r ie r des
c h em in s de fer de P é k in réclam e
«que le s dirigeants soient élus
et révocables par le peuple». 1
28
D e p u is son i n s t a l l a t i o n , en
1949, le régim e a co m m is bien
d ' i n j u s t i c e s et f a i t bien des v i c ­
tim e s. L e «feu vert» donné par le
p o u v o ir à une c r it iq u e «des er­
reurs passées» va perm ettre à
c e ll e s - c i de s 'e x p rim e r . 'Et e lle s
so nt nom breuses à a v o ir v io le m ­
ment subi le s c a ta s tro p h e s p o l i ­
t iq u e s du Grand T im o n ie r. ' L ' i n ­
c a p a c it é d 'o b t e n ir réparation sur
le u rs li e u x de résid e n c e où ré­
g nent encore en m aftre s le s mê­
mes re sp o n s a b le s , va c o nd uire
des m i l l i e r s de personnes à P é ­
k in où e l l e s e x p rim e ro n t leu rs
r e v e n d ic a tio n s à tr a v e r s de vé­
r it a b le s m a n if e s ta tio n s . '
C es «plaignants», qui s o n t - i l s ?
On y tro u ve des é tu d ia n ts en­
vo y é s à la campagne lo rs de la
r é v o lu tio n c u lt u r e lle , des m i l i ­
ta ir e s d é m o b ilis é s et, e n fin , des
p a y s a n s a yant s o u ffe r t le s va -e tv ie n t d'u ne p o l i t i q u e a g r ic o le
in c e rta in e .
L e m ouvement d ém o cra tiq u e
aura d 'é no rm es d i f f i c u l t é s ne
s e ra it-c e q u 'à re n tre r en c o n ta c t
a vec c e s m o b il i s a t i o n s . 'En réa­
l i t é , ces d eu x fo rc e s v o n t se
c o to y e r en s 'ig n o r a n t. ' S e ule s
q u e lq u e s personnes, comme Fu
Y uehua, seront c a p a b le s de se
tra n s fo rm e r en o rg a n is a tr ic e s du
m éco ntentem ent. 'Son a rre s ta tio n ,
le 18 ja n v ie r 79, fe ra d 'a i l l e u r s
l 'u n i t é c o n t r e la ré p re ssio n ,
m ais e lle marquera aussi la fin
de la c o e x is te n c e entre le mou­
vement et le p o u v o ir. D ès lo rs,
Deng X ia o p in g n 'a p lu s b eso in
d 'ê tre épaulé par la c r it iq u e des
m asses; il règne en maftre et
te n te de se d é b arra sser de ceuxlà mêmes qui l 'o n t aidé à se
h is s e r au p ou voir. 1
L e 6 décembre 79, le Mur de
X id a n reto urn e à l'a n o n y m a t, le s
d a z ib a o s so nt arrachés. D è s ja n ­
v ie r , la ré p re s s io n dém antèle le s
d if f é r e n t e s revues et la m a jo r ité
de le u rs a n im a te u rs se r e tr o u v e n t
a u jo u r d 'h u i
sous le s v e rro u s ,
dans ce s p ris o n s q u ' i l s a v a ie n t
si pui somment dén on cée s. ’ L e s
fa m e us e s «quatre grandes liber­
tés», («Les citoyens ont le droit
de recourir à la libre expression
d ' o p i n i o n , au large e x p o s é
d 'id ée s, au grand d é b a t et au
dazibao», art, 4 5) s o n t r e tir é e s
de la C o n s t i t u t i o n . 1 L a
se m b le b o u c lé e .
b o u c le
M ais, a v ec la r é s is ta n c e po­
p u la ir e , rie n n 'e s t ja m a is a c q u is .
1980 v o it r e s s u r g ir de n o u v e lle s
re v u e s qui, dès à p ré s e n t, e s ­
s a y e n t d 'é v it e r l ' o b s t a c l e ma­
je u r : c e lu i d 'u n e abse nce de
c o o r d in a tio n n a tio n a le d 'u n mou­
vem ent «encore fragmentaire et
idéologiquement hétérogène».
Si des em bryons de c o o r d in a ­
tio n a v a ie n t vu le jo u r au co urs
du P r in t e m p s de P é k in , e ll e s
n 'a v a i e n t ja m a is tro u v é l 'i m p a c t
et la c r é d i b i l i t é q u ' e l l e s sem­
b le n t a c q u é rir en fin d 'é té 1980.
L e 31 août, 17 re vu e s fo n d e n t le
C o m ité N a tio n a l pour la li b é r a ­
tio n de L i u Q in g, a n im a te u r de
la «Tribune du 5 avril», condam ­
né pour a v o ir d if f u s é le s m in u te s
du p ro c è s de Wei J in g s h e n g . L e
15 septembre, à C a n to n , e s t créé,
e n fin , un C o m ité N a tio n a l des
re vu e s d é m o c ra tiq u e s qui regrou­
pe 21 p u b li c a t i o n s e t qui se don­
ne un organe commun : «Zeren»
( L e D e v o ir). '■
REPERES
LA
VIE
D’UN
"BÉBÉ
REBELLE"
«S a n s un tyran p o u r ■v o u s
chevaucher
l' é c h i n e,
craignez- v o u s donc de
m u s envoler?s
j
(Wei J i n g s h e n g ) .
e 5 d é c e m b re 1978, sur le Mur
de X id a n , e s t a f f i c h é le d a z ibao le p l u s c é l è b r e du P r i n ­
tem ps de P é k i n . Q u e lq u e s pages e t
un t i t r e ir o n iq u e et a c c r o c h e u r : « L a
L
cinquième modernisation: la démo­
c r a t i e ». L e c o n t e n u c ' e s t a u s s i de
la d y n a m i t e : p o u r la p re m iè re f o i s ,
Mao Z e d o n g e s t d i r e c t e m e n t m is en
c a u s e , e t t r a i t é de «d i c t a t e u r » . On y
a f f ir m e que la s e u le m o d e r n is a t io n
p r o g r e s s is t e , d o n t d é p e n d e n t t o u te s
le s a u t re s , e s t c e l l e du s y s t è m e po­
l i t i q u e : v e rs la d é m o c r a t i e . M a lg r é
une
v is io n
plus
qu1i d é a l i s é e de
l ' O c c i d e n t , l ' a u t e u r , Wei J in g s h e n g ,
se p l a c e r é s o lu m e n t d a n s le cam p
des c o n t e s t a t a i r e s d 'u n rég im e qui
a o u b l i é le s o c i a l i s m e . I l d e v ie n d r a
le p r i n c i p a l a n im a t e u r de la re vu e
«E n q u ê t e s », la p lu s p e r ti n e n t e des
revues du M o u v e m e n t D é m o c r a tiq u e .
Wei e s t né en 1950 da ns la pro­
v in c e de l ' A n h u i . Il e s t is s u d 'u n e
f a m i l l e de v i e u x c a d re s du P a r t i .
Son père, v é té ra n de l'A r m é e P o p u ­
la ir e de l i b é r a t i o n , e s t a u jo u r d 'h u i
v ic e - p r é s i d e n t d ' u n d é p a r te m e n t de
l'im p o r t a n t e
C o m m is s io n
po ur la
C o n s t r u c t io n de base.
Wei p a r t i c i p e au m o u v e m e n t des
Gardes R o ug es p e n d a n t la R é v o l u ­
tio n c u l t u r e l l e e t a d hè re au L i a n dong ( C o m it é d ' A c t i o n u n ie ) qui
regroupe les f i l s de h a u ts c a d re s .
R é v o lt é c o n t re la b u r e a u c r a t ie , il
prendra c o n s c ie n c e , en 1967 , que
les G ardes Roug es o n t é té m a n ip u ­
lés par des f r a c t io n s du p o u v o ir en
lu tte c on tre d ' a u t r e s f r a c t i o n s . Il
fera p a r tie de c e u x que M ao a p p e la i t
le s « b é b é s r e b e l l e s s et qui v o n t
s 'o p p o s e r dès lo r s à J ia n g Q in g .
F i n 1967, le C o m it é e s t in t e r d i t et
ses membres e m p ris o n n é s . P l u s de
de ux c e n t p e rs o n n e s du C o m ité ,
dont Wei, purgent t r o i s m o is de p r i ­
1 / W ei Jingsheng, la figure la plus représentative d u P rin ­
tem ps de Pékin, qui purge une peine de quinze ans de
prison. (Col l . V. Sidane.)
s o n . En 1968, il re n tre t r a v a i l l e r à
A n h u i , dans son v i l l a g e n a t a l . S o l­
d a t de 1969 à 1973, i l o b tie n t, (à sa
d é m o b i l i s a t i o n , un e m p lo i d ' o u v r i e r
é l e c t r i c i e n au z o o de P é k i n .
L e 8 ja n v i e r 1979, p a r a f t le pre­
m ie r nu m éro de la re v u e T a n s y o
( E x p l o r a t i o n s ou E n q u ê te s ) qui re­
p r o d u it , à 150 e x e m p l a ir e s , « L a c i n ­
q u i è m e m o d e r n i s a t i o n s de Wei J i n g ­
sh e n g . «E n q u ê t e s s ne c o m p te ra que
5 num éros ( p l u s un nu m éro s p é c ia l)
a v a n t de s 'i n t e r r o m p r e s o u s le p o id s
de s a c c u s a t i o n s de « m e n é e s contrer é v o l u t i o n n a i r e s s qu'on lu i a t t r ib u e .
C e t t e re v u e sera en e f f e t le p o in t de
m ir e du m o u v e m e n t car e l l e défend
des id é e s , c e r t e s m in o r i t a i r e s , m a is
qui ne s 'e m b a r a s s e n t pas de la la n ­
g ue de b o is de l ' i d é o l o g i e d o m in a n ­
te . A n t i - c o m m u n i s t e , Wei e s t le seul
à a v o ir , d è s le s p r e m ie rs jo u r s , vu
dans Deng X i a o p i n g un da nger pour
le s l u t t e s d é m o c r a t i q u e s . D a n s la
b a t a i l l e de c l a n s po ur le p o u v o ir , il
se r e fu s e à pre n d re p o s it io n en fa­
v e u r des «m o dernis tes» ou de s « in t é ­
g ris te s » . P o u r l u i , D e n g e s t le f i d è ­
le h é r i t i e r de Mao . Com m e c e l u i - c i ,
il se s e r t du m ou v em e nt d é m o c r a t i­
que pour m a s q u e r le s é c h e c s é c o n o ­
m iq u e s e t p o l i t i q u e s du ré g im e . En
mars 79, Wei a f f i r m e à c o n tre c o u r a n t, que la p o l i t i q u e de Deng
n ' e s t q u 'u n « n o u v e a u d e s p o t i s m e s .
E t même si c e t t e v i s i o n c l a i r e se
m ê le c h e z lu i d ' u n e i d é a l i s a t i o n du
li b é r a l i s m e c l a s s i q u e , il sera un de
c e u x qui t e n t e r o n t de l i e r le m o u v e ­
m en t a u x m o b i l i s a t i o n s d e s « p la i­
gn ants»,
en p a r t i c u l i e r à t r a v e r s
l ' a f f a i r e F u Y u e h u a e t au m oy e n de
s es d é n o n c ia t io n s du s y s t è m e c a r ­
c é ra l c h i n o i s ( « L a B a s t i l l e du X X 0
siècle,
l a p r i s o n Q i n c h e n g n° 1s,
«E n q u ê t e s s n ° 3 ) .
L e 29 m ars 79, Wei J in g s h e n g
e s t a r r ê té à son d o m i c i l e , en même
te m p s que C hen L i i , l ' u n des d i r i ­
g e a n ts de l ' A l l i a n c e pour le s D r o i t s
de l'H o m m e . L e s d e u x g ro u p e s les
p l u s r a d i c a u x s o n t a i n s i d é c a p it é s .
D é te n u au s e c r e t da ns la p r is o n n u ­
m éro un de P é k i n q u ' i l a v a i t d é n o n ­
cé, il s era a c c u s é d ' ê t r e un c o n tre r é v o l u t i o n n a i r e e t d ' a v o i r l i v r é des
s e c r e t s à l' é t r a n g e r . A v e c hu m o u r il
d é c la re ra :
«La S éc ur i té P u b li q u e
p r é t e n d que j ' a u r a i s dû r e s p e c t e r
l e s règlements concernant la protec­
ti on d e s s e c r e t s . J ' i g n o r e q u e l s s o n t
c e s r è g l e m e n t s . T o u t c e que j e s a i s
c ' e s t qu'ils s o n t e u x -m ê m e s se­
cret s». L e 16 o c t o b r e 1979 il e s t
condam né à 15 ans de p r i s o n .
L e s m in u t e s de son p ro c è s s o n t
d i f f u s é e s par le s r e v u e s p a r a l l è l e s
e t sa r é h a b i l i t a t i o n r e s t e l' u n e des
r e v e n d i c a t i o n s u n i f i a n t e s du m o u v e ­
m ent d é m o c r a tiq u e . ■
29
REPERES
«Q u a n d tu d e v i e n s m a nd a r i n , m ê m e
t e s p o u l e s e t t e s c h i e n s s ' e n v on t
au p aradi su.
FLEURS
DU
C
PRINTEMPS
- s
D a z ib a o s , revu es p o l i t i q u e s e t l i t t é r a i r e s , le c t u r e s p u b liq u e s .,,
l'e x p r e s s io n et sa l i b e r t é p rire n t
le u r e n vo l en C h in e . 'N o us a v o n s arraché q u e lq u e s f le u r s
de ce t immense b o u q u e t . 1
P o u r le re ste , a lle z donc f a ir e un tour
du cô té de «Un bol de nids d'hirondelles ne fait pas
le Printem ps de Pékin» (B o u r g e o is )
ou de «Printemps de Pékin» ( J u l l ia r d ) . 'De quoi rêve r
à une v é r i t a b l e r é v o lu tio n c h in o is e . 1
DE
LA
B U R E A U C R A T IE
• «Eh b ie n , v o y o n s c om m e nt nos
d i r i g e a n t s s ' y p re n n e n t po ur r é a l i s e r
le s Q u a tr e m o d e r n i s a t i o n s .
C e sont le s d irig e a n ts , alors,
b ie n sûr, i l s s o n t i n s t a l l é s d a n s des
b u r e a u x . C ' e s t v r a i m e n t t r è s rare de
le s v o i r f a i r e un t o u r da ns l e s a t e ­
l i e r s , e n c o r e p l u s de se m e t t r e de
te m p s en tem ps au b o u lo t, avec
n o u s , le s o u v r ie r s . Si je p e u x me
p e r m e t t r e de le d i r e fra n c h e m e n t, ça
n 'a rriv e
ja m a is .
A l o r s , q u 'e s t - c e
q u ' i l s f a b r i q u e n t du m a tin au s o i r ?
I ls a r r i v e n t quand même au
tra ­
v a i l pas t r o p ta rd : la t a s s e de t h é à
la m ain, la c l o p e au bec, i l s pa r­
c o u r e n t les «N o u v e l l e s d e référence-!/
(1) ou a lo r s i l s é c o u t e n t le s ra p p o rts
de le u rs m o u c h a rd s : mUntel a u j o u r ­
d ' h u i . . . » . En m o in s de r ie n , son cas
e s t ré g lé . S a v o ir si c ' e s t v r a i ou
non, ça, c ' e s t une a u tre a f f a i r e . De
to u t e f a ç o n , le s m o u c h a rd s ne se
tro m p e n t ja m a is .
S ' i l s ne sont pas o c c u p é s à ça,
i Is v o n t se c h e r c h e r des f i l l e s q u ' i l s
tr o u v e n t pas mal pour f I i r ta il 1er,
c e r t a i n s a l l a n t même j u s q u 'à c o u ­
c h e r ave c p l u s ie u r s d ' e n t r e e l l e s .
A p r è s to u t, i l s o n t le p o u v o i r e t peu
im p orte s ' i l s s o n t m o c h e s , i l s t r o u ­
v e ro n t t o u jo u r s des m ig n o n n e s . Eh
o u i ! Pou r peu qu'on rép o n d e à le u rs
a v a n ce s, on p e ut d e v e n ir a is é m e n t
membre du P a r t i ou des J e u n e s s e s
c o m m u n is te s et on ne ra te ra ja m a is
une a u gm e ntatio n de s a l a i r e . Si on
n ' o b t i e n t pas la prim e de t r a v a i l e x ­
c e p t io n n e lle , ce qui e s t v r a i m e n t in ­
h a b i tu e l, on e s t sûr d 'e n a v o i r au
m oins une parmi le s m e i l l e u r e s . R e­
garde bien le u r f a c e i l l u m i n é e quand
une p e t i t e je un e v i e n t d ' ê t r e e m b au­
ché e à l ' u s i n e . Ah la l a ! T s s . . .
T s s . . . ! E u x non p l u s , i l s n e man­
q u e r o n t ja m a is une a u g m e n t a t io n de
s a l a i r e . P o u rt a n t , i l s g a g n e n t d é jà
b e a u c o u p . A h ! m a is c ' e s t q u 'o n a
des r e l a t i o n s , on c o n n a î t de s gens.
I l s ont a u s s i t o u jo u r s des t a s d ' é ­
c h a n t i l l o n s e t des p r o d u i t s s o l d é s .
En t o u t c a s , t o u t ce q u ' i l s p e u v e n t
a c h e te r pour un yu a n , le p e t i t p e u p le
que n o u s som m es ne p e u t s o u v e n t
pas se le p r o c u r e r , même p o u r d i x
y u a n s . L e s m a r c h a n d is e s q u ' i l nous
fa u t a tte n d r e t r o i s a n s , c i n q ans e t
p lu s pour a c h e t e r a v e c de s t i c k e t s
— e t e n c o r e , c ' e s t p a s s û r qu 'o n en
t r o u v e — i l s le s o n t t o u t de s u ite .
N e te f â c h e pa s, ce s o n t d e s cad res,
je te d i s , i l s ont de s r e l a t i o n s et il s
savent y fa ire !
Q uand i l s en o n t m arre de r e s t e r
à P é k i n , i l s v o n t se p r o m e n e r à
Shangai', H a n g z h o n , C a n t o n , G u i l i n ,
en a v io n ou en t r a i n de p re m iè re
c l a s s e . D e t o u t e f a ç o n , i l s s o n t en
m i s s i o n e t ne d é p e n s e n t pa s le ur
pro pre a rg e n t. I l s f o n t du to u r is m e ,
d é g u s t e n t le s m e i l l e u r e s s p é c i a l i t é s
r é g io n a l e s , son t lo gé s d a n s des hô ­
t e l s de lu x e , t o u t e s t p a y é par l ' E ­
t a t . Il se p e u t même q u ' i l s n ' u t i l i ­
s e n t pas t o u s le u rs t i c k e t s de repas
ou b i l l e t s de t r a in e t le u r m i s s i o n
le u r r a p p o r te a lo r s un peu d 'a r g e n t .
Q uand i l s r e v i e n n e n t , on p e u t le s
v o i r e n c o m b ré s de t o u t e s s o r t e s de
s a c s et de p e t i t s p a q u e t s r e m p lis de
s o u v e n ir s . I l s en g a rd e n t q u e lq u e s u n s po ur eu x e t o f f r e n t le r e s t e à
le ur patro n : ç a le u r p e r m e ttra de
re p a rtir à nouveau.
E t t o u te s c e s s é a n c e s de c in é m a
e t e x p o s itio n s réservées à c e rta in s ,
a u x q u e l l e s no us, le p e t i t p e u p le ,
n o u s ne p o u v o n s ja m a i s a s s i s t e r ,
p o u r qui s o n t - e l l e s d o n c f a i t e s s in o n
pour ce s m e s s i e u r s le s d i r i g e a n t s ?
N o u s , en d e h o rs de q u e lq u e s jo u r ­
n é e s de fê te , on t r a v a i l l e san s a r r ê t
t o u te l' a n n é e , et en p l u s , la p l u p a r t
d ' e n t r e n o u s f a i t le s t r o i s h u i t . A u s ­
s i , on se dem an de b ie n ce qui se
p a s s e quand on v o i t no s d i r i g e a n t s
s ' e n f e r m e r à c l é d a n s le u r s b u r e a u x ,
a p rè s a v o i r c o n v o q u é le u r s m ou­
c h a r d s e t le s p e t i t s c h e f s . On le s
e n te n d d i s c u t e r en r i g o l a n t e t le u r s
p a la b r e s d u re n t f a c i l e m e n t p l u s i e u r s
h e u re s . Q u ' e s t - c e q u ' i l s f o n t ? I ls
son t en r é u n i o n ! Q u e l g e n re de r é u ­
n i o n ? N e s o i s pas a n x i e u x comme
ç a ! De t o u te f a ç o n , tu ne p e u x rie n
s a v o ir , c ' e s t c o n f i d e n t i e l ! A mon
a v i s , t o u t ce q u ' i l s f o n t , c ' e s t c o m ­
p l o t e r c o n tre le s ge ns qui ne le ur
r e v i e n n e n t pas.
A l l o n s , ne m é p r is e pas a i n s i t o u t
c e que f o n t le s c a d r e s . I ls s o n t en
e x c e l l e n t s te rm e s a v e c le u r s d i r i ­
g e a n ts à e u x ; e t po u rq u o i d o n c ?
P a r c e q u ' i l s a p p a r t i e n n e n t à la m ê­
me ra c e ! Il a r r i v e q u ' i l s ne p u is s e n t
p l u s c o n t in u e r à s é v i r . A l o r s , c ' e s t
s im p le , i l s d e m a n d e n t le u r m u t a t io n .
De to u te façon, c 'e s t pa rto ut p a re il,
i l s s e r o n t t o u j o u r s d i r i g e a n t s , où
q u ' i l s a i lle n t » .
( d a z i b a o d e X u n L e i , 6 a v r i l 1980).
(1) B u l l e t i n q u o t id ie n de n o u v e l l e s
d ' a g e n c e s de p r e s s e é t r a n g è r e s
d e s t i n é a u x c a d r e s du p a r t i .
DU DES P OTIS M E
• « A i n s i , d u r a n t c e s d e r n i è r e s dé ­
c a d e s , le p e u p le c h i n o i s a d o c i l e ­
m ent s u i v i un " g r a n d i o s e t i m o n i e r "
qui le n o u r r i s s a i t au m oye n de g a l e t ­
t e s p e in te s a v e c un p i n c e a u a p p e lé
"c o m m u n is m e ", e t qui le d é s a l t é r a i t
en lu i s u s p e n d a n t d e v a n t le ne z de s
p ru n e s b a p t i s é e s G ra n d B o n d en
a v a n t ou T r i p l e B a n n i è r e rouge. E t
le p e u p le m a r c h a it b r a v e m e n t de
l ' a v a n t en se s e r r a n t la c e i n t u r e . . .
A p r è s a v o i r s u p p o r té ce r é g im e - là
a v e c un e b e l l e c o n s t a n c e p e nd an t
t r e n t e a n s , il a f i n i pa r c o m p r e n d r e :
à ce j e u - l à , com m e le s s in g e s qui
v e u le n t r e p ê c h e r la lu n e «tombée»
REPERES
d a n s l' e a u , il é t a i t co n d a m n é à se
r e t r o u v e r é t e r n e l le m e n t b r e d o u i l l e , , . »
( Wei J i n g s h e n g , « L a c i n q u i è m e m o ­
d e r n i s a t i o n », 3 d é c e m b r e 1978).
9 «On s ' e s t f i n a l e m e n t rendu com p­
t e que c e t t e g ra n d e n a t io n p o rte aux
p ie d s d e u x s o u lie r s tr o p é t r o i t s qui
l' e n t r a v e n t :
l ' o b s c u r a n t i s m e e t le
de s p o t i sme».
(«Le Printemps
j a n v i e r 1979).
m
de
P ékim ,
n°l,
8
9 «L e p e u p le a beau être en t h é o r i e
le c r é a te u r e t m a f t re de l ' h i s t o i r e ,
s u r le p la n des r é a l i t é s son u n iq u e
r ô l e e s t de f o u r n ir des l é g io n s de
s e r v i t e u r s r e s p e c t u e u x et m u e ts , sa
f o n c t i o n e s t s e u le m e n t de c o n s t i t u e r
la p â te au s e in de l a q u e l l e se lè v e n t
c o n t i n u e l l e m e n t le s c h e f s qui v i e n ­
n e n t le d ir ig e r » .
( Wei J i n g s h e n g , « L a c i n q u i è m e mod e m i s a t i o m , 5 d é c e m b r e 1978).
eu de s a u v e u r
q u e lc o n q u e ,
N i d ' e m p e r e u r in un o rte l à qui c o n f ie r
son d e s t i n .
P o u r cré e r le b o n h e u r de l ' h u m a n i t é .
N e c o m p to n s que s u r n o u s - m ê m e s !».
9
«Il
n 'y
a
ja m a is
( d a z i b a o d e L i n Hu, 24 d é c e m b r e 78).
« C u lt e des m a s s e s , o u i ! C u l t e
d e la p e r s o n n a l i t é , n o n !
»
I
Le
c u l t e de l a p e r s o n n a l it é ,
c ' e s t e x a g é r e r le r ô l e de l ' i n d i v i d u
d a ns l ' h i s t o i r e e t c o n s id é r e r que
c ' e s t une m i n o r i t é de h é ro s qui dé­
t e r m in e
le d é v e l o p p e m e n t et le s
t r a n s f o r m a t i o n s de l ' h i s t o i r e de l ' h u ­
m a n ité .
C h a n te r a v e u g lé m e n t le s
l o u a n g e s des p e r s o n n a g e s d ' e x c e p ­
t io n ,
c ' e s t a b s o l u t i s e r le u r rôle.
D i r e qu e ce s o n t ces s o i - d i s a n t «hé­
ros» qui c r é e n t les s i t u a t i o n s , c ' e s t
c e l a même l ' e s s e n c e du c u l t e de la
p e rs o n n a lité .
DU SOCIALISME
• «Nous p e n s o n s que le s c o u c h e s
d i r i g e a n t e s v i v e n t la p é r io d e de la
c o n s o l i d a t i o n de le u r p o u v o i r en t a n t
que c la s s e . Non s e u le m e n t le s p r i v i ­
lè g e s d o n t j o u i s s e n t d e p u is lo n g ­
t e m p s le s membres du p a r ti v o n t
s ' a c c u m u le r , m a is i l s v o n t p re nd re
un c a r a c tè r e de p lu s en p lu s tra n s m i s s i b l e : le s f i l s de ca d re s s e ro n t
c a d r e s , le s f i l s de p a y s a n s , p a y s a n s
On a s s i s t e , ap rès t r e n t e an s de po u ­
v o i r du P . C . , à l ' a b o u t i s s e m e n t d 'u n
p r o c e s s u s h i s t o r i q u e : une b u re a u ­
c r a t i e qui à l ' o r i g i n e a r e c r u t é da ns
le s c o u c h e s p o p u la i r e s , e t qui a
é lim in é
—s o u v e n t p h y s iq u e m e n t —
les a n c ie n n e s c la s s e s d i r i g e a n t e s ,
se c o n s t i t u e à son to u r en c la s s e » .
( H u a n g He, 6 f é v r i e r 1980).
• «L a C h in e e s t un p a y s c a p i t a l i s ­
te sans b o u r g e o is ie , où règ ne la d i c ­
t a t u r e du p a r t i . (N ous ré c la m o n s ) un
c o n t r ô le d i r e c t e t d é m o c r a tiq u e des
m o y e n s de p r o d u c tio n par le s t r a ­
v a i l l e u r s . N o t r e id éa l de d é m o c r a tie
s o c i a l i s t e ne se r é a lis e r a q u 'a u s e in
de r a p p o rts s o c i a u x fo n d é s s u r l ' a u ­
t o g e s t io n com m u na utaire ».
( Wa n g X i z h e , «N o u v e l l e s e x i g e n c e s
p o u r l a d i c t a t u r e du p r o l é t a r i a t »,
j u i l l e t 1979).
9 « R é a lis e r la d e s t r u c t io n de l ' a p ­
p a r e il d ' E t a t : c e n ' e s t que sur c e t t e
b a se que la m o d e r n is a t io n e t t o u t
a u t re d é v e lo p p e m e n t p r o g r e s s is t e ra­
p id e pourra s 'e f fe c t u e r » .
( Ho
Qui, j a n v i e r 1980).
9 « Q u 'e s t- c e que la d é m o c r a t i e ?
L a v é r i t a b l e d é m o c r a ti e , c ' e s t la
re m is e de to u s l e s p o u v o i r s à la
c o l l e c t i v i t é des t r a v a i l l e u r s » .
( We i J i n g s h e n g , « L a c i n q u i è m e mod e r n i s a t i o m , 5 d é c e m b r e 1978).
DES L IB E R T E S
• «Vous
g lo rifie z
le s m i l l e e t un e
f a c e t t e s de la n a tu r e et le s t ro u v e z
t o u te s p l u s b e l l e s le s u n e s que les
a u tre s ; v o u s ne v o u d r i e z pas que la
ro s e e t la v i o l e t t e a i e n t le même
parfum, p o u rq u o i d o n c e x i g e z - v o u s
q u ' i l n ' y a i t q u 'u n e s e u le forme
d ' e s p r i t ?».
( «A u j o u r d ' h u i », n° 1, d é c e m b r e 1978).
9 «Même si
d é m o c r a tie ,
on a b a t
ce
le m ur de la
n 'e s t
pas
g ra v e ;
c e l u i qui e s t dans la t ê t e du p e u p le
a d é jà des b a s e s
s o l id e s » .
(Fruit d'Automne).
9 « C e r ta in s no us d i s e n t " b a i s s e z
votre tê te e t éco ute z -n o u s , nous
cré e ro n s
une v i e m e i l l e u r e pour
v o u s , n o u s vo u s o u v r i r o n s une v o ie
m a g n i fi q u e po ur le f u t u r " . N o t r e ré ­
p o n s e e s t non ! M a i n t e n a n t q u e le
f u t u r e s t n ô t re , p o u rq uoi ne p o u r­
r io n s - n o u s c h o i s i r n o t r e f u t u r n o u smêmes, cré e r n o t re p ro p re v i e e t ne
pa s l a i s s e r le s a u tre s l i e r no s m a in s
et m a n ip u le r n o s c e r v e lle s » .
( « L e D e v o i r », s e p t e m b r e
1 980).
L a C h i n e a p r a ti q u é le c u l t e de
la p e r s o n n a l i t é à u n e t r è s la r g e éc h e l l e , p e n d a n t tr è s lo ng te m ps et
de d i v e r s e s m a n iè re s , comme peu de
pays l ' o n t c on nu ( . . . ) . Non s e u le ­
ment le p r é s i d e n t Mao a v a it t o u jo u r s
r a is o n à 10 0% , m a is il a été a d ulé
à te l p o in t q u ' i l e s t devenu le s a u ­
veur du p e u p le c h i n o i s , comme si,
sans
lu i,
la r é v o l u t i o n c h i n o i s e
n ' a u r a i t j a m a is pu ê tre v ic t o r i e u s e
et le p e u p le c h i n o i s s e r a i t t o u jo u r s
au ss i m i s é r a b l e ( . . . ) .
L a r é v o l u t i o n e s t - e l l e v r a im e n t
l ' a f f a i r e d ' u n seul ho m m e? N o n ! L a
n o u v e lle
C h in e
a -t-e lle
é té v é ­
r it a b le m e n t c r é é e par un seul hom­
m e ? N o n ! C e s o n t le s m a s s e s po ­
p u la ir e s qui c r é e n t l ' h i s t o i r e . L a
r é v o lu t i o n e s t le p r o d u it des l u t t e s
e t des e f f o r t s com muns de p l u s i e u r s
m i l l i o n s de p e rso n n e s .»
( d a z i b a o de L i n Hu, 2 4 d é c e m b r e 78)
31
REPERES
"rendez,
nous
notre
jeunesse f
d e v a i t se p r o d u ir e . A u t o u r de la p l a ­
ce , le s murs des b â t im e n ts s o n t
c o u v e r t s d ' a f f i c h e s : le s p l u s r é c e n ­
n f é v r i e r de c e t t e an n é e o n t
t e s r e c o u v r a n t le s p lu s a n c ie n n e s .
eu lie u , à Shangai', d i v e r s r a s ­
L e s unes p lu s lo n g u e s qu e le s a u ­
s e m b le m e n ts e t m a n i f e s t a t i o n s
t r e s , au to n p lu s g r a v e a u s s i , p a r­
de p r o t e s t a t io n . I l s é t a i e n t o r g a n i ­
le n t de «l a d é m o c r a t i e e t l a v a l e u r
sés par les é t u d i a n t s et le s je u n e s
d e s loi s», « l e s d r o i t s d e l ' h o m m e »,
i n t e l l e c t u e l s q u 'o n a v a i t , au c o u r s
«l e s f o n d e m e n t s s o c i a u x d e l a bu­
de ce s d i x d e r n i è r e s a n n é e s , e n ­
re a u c r a t i e » , e t c . En p l u s d e s a f f i ­
v o y é s de f o r c e t r a v a i l l e r da ns les
ch e s , le s murs s o n t t a p i s s é s p a r l e s
cam p ag nes . A l ' o c c a s i o n du jo u r de
p a ge s de jo u r n a u x et de re v u e s ,
l'a n c h in o is , ils é ta ie n t ren tré s à
t e l l e s «L a v o i x du P e u p l e », «l e M o i ­
Shangai', v e n a n t de s p l u s d i v e r s e s
n e a u du P r i n t e m p s » . M a lg ré la d i f f i ­
lo c a lité s .
c u l t é pour le s d é c h i f f r e r , la m aje u re
En v é r i t é , c e r t a i n s d ' e n t r e e u x
p a r t i e de l ' a s s i s t a n c e le s l i t p a ­
a v a ie n t d é jà c o m m e n cé à o r g a n is e r
t ie m m e n t , l' u n e ap rès l ' a u t r e et du
des m a n i f e s t a t i o n s sur la P l a c e du
d é b u t à la f in .
P e u p l e de Shangaî', d è s c e t a u to m n e .
A o n z e h e u re s , sur le s fa ç a d e s
L e s je u n e s se s o n t s p o n t a n é ­
de s m a is o n s qui b o r d e n t l'a v e n u e du
ment o r g a n is é s et o n t p ro lo n g é , p a r­
T h i b e t , a p p a r a is s e n t q u e lq u e s d ra ­
f o i s sur p l u s i e u r s jo u r s , le u r s r a s ­
p e a u x. P u i s , s o n t p l a c a r d é s des
s e m b le m e n ts .
Les
m a n ife s ta n ts ,
p a n n e a u x p o r ta n t le s no ms des d i f ­
regroupés d e v a n t le s iè g e du c o m i t é
f é r e n t e s p r o v in c e s ( Y u n a n , K w a n g r é v o l u t i o n n a i r e , o n t c o u p é le s l i ­
t u n g , H e i lu n g k a in g , e t c . ) , s o u s l e s ­
gn es é l e c t r iq u e s du ré s e a u de t r a m ­
quels
d o i v e n t se r a s s e m b le r les
w a ys, a rrê té le s ra m e s, b lo q u é le
d iffé re n ts groupes. L e s gens com ­
t r a f i c , o cc u p é le s b â t im e n t s g o u v e r ­
m e n c e n t à fo rm e r des a t t r o u p e m e n t s
n em enta ux et a g r e s s é le s f o n c t i o n ­
e t à d i s c u t e r le s p ro b lè m e s de s é t u ­
n a ire s du p a r ti.
d i a n t s e t je u n e s i n t e l l e c t u e l s en­
Ce qui s u it, e s t le c o m p te - r e n d u
v o y é s au t r a v a i l à la cam pagne.
d 'u n tém oin o c u l a i r e de s m a n i f e s t a ­
C e u x qui d i s c u t e n t , s o n t je u n e s en
t io n s de c e p re m ie r f é v r i e r .
m a j o r i t é , et tr è s v i t e le ur n o m bre
a t t e i n t le m i l l i e r . L ' u n d ' e u x g r i m ­
pe sur le t o i t d ' u n e m a is o n e t an­
E T U D IA N T S
ET
n o n c e que la m a n i f e s t a t i o n v a d é b u ­
IN T E L L E C T U E L S
t e r . Un m orceau de p a p ie r en fo rm e
de c ô n e lu i s e rt de m égap hon e. Il
Shangai', c ' e s t une jo u r n é e de
e x p l i q u e le s r a i s o n s de la m a n if e s ­
s o l e i l . Sur le s t o i t s , d a n s le s
t a t i o n : il d i t que le s é t u d ia n t s et
rues, la n e ig e c o m m e n c e à
i n t e l l e c t u e l s q u i, t r è s je u n e s , afondre. Comme d ' h a b i t u d e , l' a v e n u e
v a i e n t é té e n v o y é s a u x c ha m ps au ­
de N a n k in g g r o u i l l e de mon de , e t
jo u r d 'h u i o n t g ra n d i e t v e u l e n t lu t t e r
sur la P la c e du P e u p le , de n o m b re u ­
pour le u rs d r o i t s , r e v e n i r t r a v a i l l e r
ses p e rs o n n e s s ' a r r ê t e n t pour l i r e
en v i l l e e t v i v r e ave c le u r f a m i l l e .
le s da z ib a o . Il y a, dans l ' a i r , un e
Il a n n o n c e que, d é jà d a n s d ' a u t r e s
atm osphère
d 'a t t e n te ,
comme
si
v i l l e s , i l s se s o n t m o b i l i s é s sur le s
quelque c h o s e d 'im p o r t a n t , d ' e x i t a n t
m e m e s o b j e c t i f s . E n s u it e , i l f a i t la
E
A
32
le c t u r e d ' u n e «l e t t r e o u v e r t e a u x c a ­
m ar ade s de Sh ang ai » dans la q u e lle
on a p p e l l e le s c i t o y e n s à e x p r im e r
le u r s o l i d a r i t é . E n f i n , i l m et en g a r ­
de le s p a r t i c i p a n t s , c o n t r e d ' é v e n ­
tu e lle s
p ro vo ca tio n s
de l a pa rt
d ' é l é m e n t s é t r a n g e r s au m o u v e m e n t.
U n e f o u le de p rè s de d e u x m i l l e
p e rs o n n e s e s t a l o r s r a s s e m b lé e .
C O R R IG E R T O U T E S L ES
ER R E U R S
COMMISES
in a le m e n t, le c o r t è g e s ' é b r a n ­
le. L e s o r g a n is a t e u r s d i r i g e n t
le s m a n i f e s t a n t s ; le s e r v i c e
d ' o r d r e po rte des b r a s s a r d s de r e ­
c o n n a is s a n c e . T o u s le s p a s s a n t s
s o n t i n v i t é s à se jo in d r e au c o r t è g e .
Au dé bu t, c e r t a i n s h é s i t e n t , m a is un
g ro u p e de je u n e s fe m m e s d o n n e
l ' e x e m p l e , et peu à peu t o u s r e j o i ­
g n e n t le s m a n i f e s t a n t s . A p r è s a v o i r
t r a v e r s é la p l a c e et p a r c o u r u l ' a v e ­
nue de C a n to n , en p a s s a n t d e v a n t
l a b i b li o t h è q u e m u n i c i p a l e , le c o r ­
tè g e t o u rn e da ns l ' a v e n u e de N a n ­
k in g . C e l l e - c i qui e s t r e m p l i e de
m on de et d é jà p l u t ô t a n im é e , s e p a ­
r a l y s e c o m p lè te m e n t . L e s p a s s a n t s ,
pour qui c e n ' e s t pas la p re m iè r e
m a n i f e s t a t i o n p o l i t i q u e de c e t y p e ,
ne s 'é t o n n e n t pas o u t r e m e s u r e :
c e r t a i n s se b o r n e n t à re g a rd e r p a s ­
ser le c o r t è g e , d ' a u t r e s s ' a j o u t e n t
aux m a n ife s ta n ts . L e s p a rtic ip a n ts
scandent
d e s s l o g a n s : «R e n d e z la
n o u s n o t r e j e u n e s s e , n o s d r o i t s de
l ’h om me , n o s d r o i t s d e r é s i d e n c e /»,
«L a p o l i t i q u e du C o m i t é C e n t r a l n e
d oi t p a s être faite à m o it ié : il faut
corriger t o u t e s l e s erreurs com mi­
s e s ! » . L e c o r t è g e , qui r e m p l i t t o u te
l ' a v e n u e o b l i g e le s t r a m w a y s à r o u ­
l e r au pa s e t le s p a s s a g e r s , im p a ­
tie n ts , v e u le n t de scen dre. F in a le ­
m e n t, le s m a n if e s t a n t s a r r i v e n t d e ­
REPERES
v a n t le s iè g e du C o m it é R é v o l u t i o n ­
n a ir e de Shangai'. I l s s o n t a l o r s p lu s
de c i n q m i l l e .
L a f o u l e se r a s s e m b le d e v a n t
l ' e n t r é e du p a l a i s . L e s m a n if e s t a n t s
c o n t i n u e n t à s c a n d e r des s lo g a n s .
On e n t o n n e «l' Internationale », p u is ,
«■l'Union fait l a force ». L e n o m b re de
g e n s a u g m e n te t o u jo u r s , de p lu s en
p l u s r a p id e m e n t. Il y a d e s a d o l e s ­
c e n t s , m ais a u s s i de s p e rs o n n e s de
4 0 ou 50 ans, des o u v r ie r s et des
i n t e l l e c t u e l s . C e p e n d a n t , l'é n o r m e
m a j o r it é e s t je u n e , ho mmes e t f e m ­
m es, e t c e s d e r n i è r e s ne s o n t pas
le s m o in s e n t h o u s ia s t e s .
L e p o r t a i l du p a l a i s e s t c l o s e t
s u rv e illé
par d e u x m i l i t a i r e s de
l ' A r m é e P o p u l a i r e de L i b é r a t i o n ,
d r o i t s e t i m m o b il e s c om m e de s s t a ­
t u e s au m i l i e u de la f o u le . A u x f e ­
n ê t r e s du p re m ie r é ta g e , d e r r iè r e le s
v i t r e s , q u e lq u e s f o n c t i o n n a i r e s du
p a r ti o b s e r v e n t en s i l e n c e la m as se
des m a n i f e s t a n t s . A t r a v e r s le s f e ­
n ê t r e s du re z - d e - c h a u s s é e , on v o i t
d 'a u tre s
f o n c t i o n n a i r e s , a s s i s en
g ro u p e et a b s o r b é s par la le c t u r e de
jo urnaux.
Il s ' a g i t , p ro b a b le m e n t,
d e f o n c t i o n n a i r e s d 'u n g ra d e peu
élevié, a t t e n d a n t le s d i r e c t i v e s du
s o m m e t.
L a f o u ie , qui d o i t co m p te r, m a i n ­
t e n a n t , 7 à 8 00 0 p e r s o n n e s , se
p r e s s e e t o n d o ie sous l ' e f f e t de
c e u x q u i, s e t r o u v a n t à la p é r ip h é r i e
du r a s s e m b le m e n t, e s s a y e n t de se
d i r i g e r v e r s le c e n t r e . L e s o r g a n i­
s a t e u r s de m a n d e n t a u x m a n if e s t a n t s
d e s ' a s s e o i r par t e r r e : prè s d 'u n
m i l l i e r de p e rs o n n e s r é p o n d e n t à
l ' i n v i t a t i o n . On s c a n d e le s s l o g a n s ,
on e n to n n e des c h a n t s , et, à un c e r ­
t a i n moment, le s g e n s c o m m e n ce n t
à r é c la m e r que P e n g C h u n g , un des
d irig e a n ts
du C o m it é M u n i c i p a l ,
v ie n n e p a r le r a v e c le s m a n i f e s t a n t s .
L a dem ande se f a i t de p lu s en p l u s
p r e s s a n te . Q u e lq u 'u n a p p a r a f t au
b a lc o n du pre m ie r é ta g e e t c r o y a n t
q u ' i l s ' a g i t de Peng, la f o u l e e s t
s e c o u é e par un f r i s s o n d 'é m o t io n .
M a i s c e n ' e s t q u 'u n f o n c t i o n n a i r e
parm i t a n t d 'a u t r e s qui d i s p a r a f t r a ­
p id e m e n t à la grande d é c e p ti o n de
t o u s . V e r s t r o i s h e u re s de l'a p r è s m id i, des v o i x a f f ir m e n t qu e P eng
e s t en t r a in de s o r t i r en c a c h e t t e
par un e p o rte s e c o n d a ir e où l ' a t t e n d
u ne a u t o m o b i l e . Im m é d ia te m e n t,
l ' a u t o e s t en to u ré e . I l f a u d r a de
n o m bre uses e x p l i c a t i o n s e t de lo n ­
gu es n é g o c i a t i o n s pour que le
c h a u f f e u r p u is s e p o u r s u iv r e sa rou­
te . Un p e t i t gro upe de m a n if e s t a n t s
r e s t e e n c o re sur p l a c e pour s u r v e i l ­
le r c e t t e s o r t ie se c o n d a ire .
A V E N U E NANKING B LO Q U E E
V
e rs t r o i s he ure s e t de m ie ,
d 'u n e t r a n s v e r s a l e à l'a v e n u e
de N a n k i n g ,
dé bo u ch e un
d e u x iè m e co rtè g e de 4 à 5 0 0 p e r ­
son ne s qui, b r a n d is s a n t des b a nd e­
r o le s e t sc a n d a n t de s s lo g a n s , se
d i r i g e à son t o u r v e r s le p a l a i s du
C o m ité R é v o lu tio n n a ire M u n ic ip a l ,
L e c o r t è g e e s t fo rm é p a r des é t u ­
d i a n t s de l ' é c o l e m o ye n n e s p é c i a l e
de fo r m a t io n d i p l o m a t i q u e de 6 8 - 6 9 .
O f f i c i e l l e m e n t , i l s a u r a i e n t dû ê tr e
e m p lo y é s d a n s le s u s i n e s de S ha n­
gai', m a is j u s t e a p r è s a v o i r o b te n u
le u r d i p lô m e , i l s o n t é t é e n v o y é s
d a ns d e s com m unes r u r a le s , et, à
c e t t e d a te , i l s n ' o n t pas e n c o r e é té
a f f e c t é s à le u r u n it é d ' o r i g i n e . L e s
r e v e n d ic a t io n s q u ' i l s a v a n c e n t s o n t,
en to u s p o in t s , s e m b la b le s à c e l l e s
des a u tre s m a n i f e s t a n t s . A r r i v é s
d e v a n t le p a l a i s , i l s se m ê l e n t à la
f o u l e p ré s e n te .
V e r s q u a tre h e ure s , l ' a v e n u e de
N a n k in g e s t b lo q u é e po ur la t r o i s i è ­
me f o i s par un g ro up e de 6 à 7 00
s o l d a t s d é f i l a n t de fa ç o n c o m p a c te
e t en u n if o r m e . A t t i r a n t p a r t i c u l i è r e ­
m e n t l ' a t t e n t i o n des p a s s a n t s , i l s
r é c l a m e n t , e u x a u s s i, que le g o u ­
v e rn e m e n t le ur g a r a n t i s s e de s co n ­
d itio n s
a d é q u a te s de t r a v a i l . I ls
s ' u n i s s e n t d o n c au s i t - i n g é n é r a l.
A s i x h e u re s , le s o i r d ' h i v e r
s ' i n s t a l l a . A p r è s d ' a u t r e s s lo g a n s
e t d ' a u t r e s c h a n t s , la m a n i f e s t a t i o n
se d é f a i t au m oment où c o m m e n c e n t
à s ' a l l u m e r le s la m p a d a ir e s . P e n ­
d a n t t o u te la jo u r n é e , pas un des
f o n c t i o n n a i r e s ou d e s d i r i g e a n t s du
C R M n ' a v a i t a c c o rd é d ' a u d i e n c e au x
m a n if e s t a n t s , ni n ' é t a i t s o r t i le u r
p a r le r . ■
Lee YU S E E .
33
1920:
LES
CONSEILS
OUVRIERS
ITALIENS
I
N E X P E R IE N C E
S e p te m b re 1920 - T u r in , U ne mitrailleuse
D ES C O N S E IL S O U V R I E R S I T A L I E N S , SI R I C H E E N E N S E I G N E -
" M EN TS POU R L E M O U V E M E N T O U V R IE R , EST S O U V E N T E V O Q U E E . M A L H E U » R E U S E M E N T , NOUS POSSEDONS EN F R A N C E B IE N P E U D E D O C U M E N T S E T
D ’E TU D E S
CONCERNANT
E F F E C T IV E S
O R G A N IS M E S
LA
BREVE
CETTE
P E R IO D E
QUE L E P R O L E T A R IA T
DE CLASSE.
ETUDE
H IS T O R IQ U E
IT A L IE N
ET
L E S R E A L IS A T IO N S
A ENGENDRE
A TRAVERS
CES
Q U E N O U S P R O P O S O N S A NOS L E C T E U R S A P O U R O B J E T
DE P A L L IE R P A R T IE L L E M E N T A CE M A NQ UE D ’ IN F O R M A T IO N E T DE M IE U X
P R E C IS E R L ’ IM P O R T A N C E H IS T O R IQ U E E T P O L IT IQ U E QUE R E V E T C E M O U V E ­
M E N T OU L E S A N A R C H I S T E S J O U E R E N T UN R O L E N O N N E G L I G E A B L E .
L ’ IT A L IE
D’ A PR ES-G U ER RE
I t a l i e r e s s e n t i t p lu s du re m e n t que le s a u tre s pa ys
c a p i t a l i s t e s o c c i d e n t a u x le s e f f e t s de la gu erre
m o n d i a le .
L ' e n t r é e en gu e rre de l ' I t a l i e a v a i t é t é un e a u b a in e
po ur le c a p i t a l i s m e i t a l i e n en p ro ie , à la v e i l l e du c o n ­
f l i t , à de s d i f f i c u l t é s in s u r m o n t a b l e s . L a gu e rre f a v o r i s a
l ' a c c e n t u a t i o n du p r o c e s s u s de c o n c e n t r a t i o n i n d u s t r i e l ­
l e et l i q u i d a le s a r c h a ï s m e s é c o n o m iq u e s . A i n s i , d u ra n t
l a p é r io d e a l l a n t de 1915 à 1917, le t a u x de p r o f i t
m oyen p a s s a de 4 , 2 6 à 7 , 7 5 % e t po ur le s p r i n c i p a l e s
b r a n c h e s de l ' i n d u s t r i e de 8 % à 15 et même 3 0 % (auto mobi le).
P a r a l l è l e m e n t à c e t t e e x p a n s io n a f f e c t a n t l e N o r d
i n d u s t r i e l , l ' I t a l i e m é r i d i o n a l e , e s s e n t i e l l e m e n t a g ra ire ,
v o y a i t la p r o d u c t i o n d e s d e n ré e s a g r i c o l e s c h u t e r pen­
34
da n t la g u erre . L a m o b i l i s a t i o n , t a n t m i l i t a i r e q u ' i n d u s ­
t r i e l l e , e n t r a f n a un e p o n c t io n f o r m id a b le de m ain d ' œ u ­
v re qui c o n t r i b u a à an ém ier le s z o n e s a g r a i r e s . P a r
a i l l e u r s , la c o n c e n tr a ti o n i n d u s t r i e l l e p r o l é t a r i s a b r u t a ­
le m e n t t o u t e une f r a c t io n de la p e t i t e - b o u r g e o i s i e q u i,
a p r è s - g u e rr e g r o s s i t le s ra n g s d e s c h ô m e u r s . A ce t a ­
b le a u , a j o u to n s les e f f e t s de l ' i n f l a t i o n g a lo p a n t e , la
d é v a l u a t io n de la l i r e ( 8 0 % de 1914 à 1920) et la b a is s e
f o r m id a b le du n iv e a u de v ie .
L a b o u r g e o i s ie i t a l i e n n e , qui e s c o m p t a i t t i r e r de
l'e n g a g e m e n t du p a y s au c ô t é de l ' E n t e n t e (G rand eB r e ta g n e , F r a n c e , R u s s ie ) un e s t a b i l i s a t i o n de la s i t u a ­
t io n s o c i a le , un r é a ju s te m e n t de ses s t r u c t u r e s é c o n o m i­
ques e t un g a in t e r r i t o r i a l , p e n s a i t que la g u e rre s e r a it
de c o u r te du rée e t f i n a n ç a le c o n f l i t de m a n iè r e c o m p lè ­
te m e n t in c o n s id é r é e si b ie n qu e le d é f i c i t de l ' E t a t
pa s s a de 214 m i l l i o n s de l i r e s en 19 14-15 à 3 4 5 m i l l i o n s
en 1 9 1 8 - 1 9 e t le g r o s de s d é p e n s e s f u t s u p p o r té pa r la
p e t i t e - b o u r g e o i s i e e t le s c l a s s e s e x p l o i t é e s .
os
use
>ostée sur la terrasse d ’un im m eu ble pour faire face aux grévistes de T u rin . (P hoto Keystone.)
L a g u e r re c o û t a en o u t re à l ' I t a l i e 6 0 0 .0 0 0 m o rts et
5 0 0.00 0 m u t i l é s e t ne lu i r a p p o r ta q u a s im e n t rie n au re­
gard d e s d r o i t s de r é p a r a tio n e t des t e r r i t o i r e s o b te n u s
par la F r a n c e e t I '( A n g le t e r r e .
A p r è s - g u e r r e , l a c r i s e qu e l a b o u r g e o i s ie a v a it c h e r ­
ché à e f f a c e r p a r le c o n f l i t , r e s s u r g i s s a i t de faço n p lu s
aigüe. I l f a l l a i t r e m e tt r e le s u s i n e s en m arche, t r a n s f o r ­
mer le s i n d u s t r i e s a r t i f i c i e l l e m e n t g o n f lé e s pa r la p r o ­
d u c tio n de g u e rre , r e c l a s s e r le s m i l i t a i r e s d é m o b ili s é s ,
e n raye r la m o n té e du c hô m ag e que le s r e s t r i c t i o n s à
l' é m i g r a t i o n a u x E t a t s - U n i s a g g r a v a ie n t .
De 1 0 2.00 0 c h ô m e u rs en dé ce m b re
passa à 6 0 6 . 0 0 0 en j a n v i e r 1922.
1920,
le c h i f f r e
L a b o u r g e o i s i e i t a l i e n n e se m o n t r a it in c a p a b l e de
m a î t r is e r l a s i t u a t i o n q u ' e l l e a v a i t en g e n d ré e . L a m onté e
des l u t t e s o u v r i è r e s e t l' o c c u p a t i o n d e s l a t i f u n d i a du
Sud pa r le s p a y s a n s h é r i t i e r s du m ou v em e nt des f a s c i
s i c i l i e n s , la p a u p é r i s a t i o n des c o u c h e s p e t i t e s - b o u r g e o i ­
ses, le s m o u v e m e n ts r é v o l u t i o n n a i r e s en R u s s ie , en A l ­
lemagne, en H o n g r ie , d é b o u c h a ie n t en 1919 sur une
s it u a t io n i n s u r r e c t i o n n e l l e .
LE
MOUVEMENT
DES CONSEILS
e M o u v e m e n t des C o n s e i l s f u t e s s e n t i e l l e m e n t
l o c a l i s é a u x g r a n d e s v i l l e s du N o r d e t p r i n c i p a ­
lem ent à T u r i n qui f u t à l' a v a n t - g a r d e des l u t t e s .
T u r in f i t tr è s t ô t f i g u r e de b a r o m è tre de la c o m b a t i v i t é
o u vriè re . L a c r é a ti o n de la F i a t en 1889 e s t à l ' o r i g i n e
de cet é t a t de f a i t . L a F i a t , qui ne c o m p t a it lo rs de sa
créa tion que 50 o u v r ie r s , en e m p l o y a i t p l u s de 5 0 .0 0 0 en
1920 et c o n t r ô l a i t q u a s im e n t t o u te s le s p e t it e s i n d u s ­
tr ie s lo c a le s . T u r i n a v a i t d o n c en son s e in un p r o l é t a r i a t
L
p a rfa ite m e n t h o m o g è n e et uni par ses t r a d i t i o n s de lu t t e s
qui sut, po ur re p ren dre l a fo r m u le de M a rx, t r a n s f o r m e r
le s id ées en f o r c e s m a t é r i e l l e s dès le s p re m iè re s he ure s
du Mouvem ent. En 19 17 , T u r in a v a i t é t é le t h é â t r e d ' é ­
meutes a n t i - m i l i t a r i s t e s s a u va g e m e n t r é p r im é e s : 500
morts, des m i l l i e r s d ' o u v r i e r s e m p r is o n n é s ou e n v o y é s
au front.
ORG ANI S AT I O NS P O L I T I Q U E S P R E S E N T E S DANS
L E M O U V E M E N T DES C O NS E I L S
U .S .I. : U n io n S y n d i c a l e Ita­
lien n e ( s y n d ic a lis t e révolu­
t i o n n a i r e ) . C r é é e en 1912 au
C o n g r è s d e M odène par l e s
a n im a t e u r s de l a t e n d a n c e
«A c t io n D i r e c t e » de l a C G L .
O r g a n e : «Guerra di c l a s s e » .
U .A .I • : U n i o n A n a r c h i s t e It a lie n n e (com m uniste liber­
t a i r e ) a n im é e par E r rico Ma­
l a t e s t a e t L u i g i F a b b r i.
O rg ane : «Um anità N ova».
G .L .T . : Groupe L ib e r t a ir e
T u r i n o i s a n im é par P i e t r o
F e r r e r o et M au rizio Garino.
• ORIGINE
DES
L e G . L . T . c o l l a b o r a à l'«Ordine
Nuovo»
d'A ntonio
G ram sci.
«ORDINE NUOVO»: s e c t i o n
s o c i a l i s t e turinoise anim ée
par A n t o n i o G r a m s c i , p u b li e
l e journal du m êm e nom.
«IL SO VIET»: groupe s o c i a ­
l i s t e d e N a p l e s an im é par
A m a d eo B o r d i g a , p u b l i e l e
j o ur nal du m êm e nom.
L e s g r o u p e s «Ordine Nu ov o»
e t «Il S o v i e t » d e v a i e n t c o n ­
co u rir à l a f o n d a tio n du
P . C . I.
CONSEILS
ITALIENS
i la c r é a t i o n des C o n s e i l s o u v r ie r s e s t un p r o c e s ­
sus h i s t o r i q u e qui se rép è te d a n s t o u t e r é v o lu t i o n
p r o lé t a r ie n n e en t a n t q u 'a f f i r m a t i o n de s c a p a c i t é s
a u t o - o r g a n is a t io n n e l le s de la c l a s s e o u v r iè r e , il e s t t o u t
de même n é c e s s a i r e de n o t e r q u ' i l y e u t à T u r i n une
s o rte de p r é f i g u r a t io n des C o n s e i l s q u i, sa n s a v o i r le
c a r a c tè r e r é v o l u t i o n n a i r e du C o n s e i l lu i-m ê m e , n 'e n d e ­
m eu re pas m o in s une e x p é r i e n c e d o n t le p r o l é t a r i a t sut
t i r e r en sa f a v e u r des e n s e i g n e m e n ts . En 19 06 , un c o n ­
t r a t c o l l e c t i f de t r a v a i l f u t s ig n é à T u r i n pa r la F . I . O . M .
( F é d é r a t io n I t a l i e n n e de s O u v r ie r s de la M é t a l l u r g i e ) .
C e c o n t r a t i n s t i t u a i t un o rg a n is m e b a p t is é «C o m m i s s i o n
I n t e r n e ».
S
C e l l e - c i a v a i t pour tâ c h e de r é g le r le s d i f f é r e n d s
p o u v a n t p o n c t u e lle m e n t o p p o s e r le s o u v r ie r s à la d i r e c ­
t i o n . C e s y s tè m e f u t tr è s v i t e g é n é r a li s é à t o u t e s le s
u s i n e s de la v i l l e . En a o û t 1919, après la d é m i s s i o n de
la «C o m m i s s i o n Internet) de l ' u s i n e F i a t - C e n t r e , le s ou­
v r i e r s p o s è r e n t le p r o b lè m e de sa r é é l e c t i o n e t de son
é l a r g is s e m e n t ; a u s s i p r o p o s è r e n t - i ls que c h a q u e s e c t e u r
de l ' u s i n e s o i t r e p r é s e n t é au s e in de la «C o m m i s s i o n I n ­
ternet), pa r un «C o m m i s s i o n n a i r e ».
35
N O T R E M EM O IR E
a n a r c h i s t e s de l ' U . A . I . , l e s a n a r c h o - s y n d i c a l i s t e s de
l 'U . S . I. et le s s o c i a l i s t e s r é v o l u t i o n n a i r e s de l ' « O r d i n e
N u ovo » u n i s s e n t le u rs f o r c e s c o n t r e l ' E t a t e t s o u t i e n n e n t
in c o n d i t i o n n e l l e m e n t le s o u v r ie r s da ns le u r l u t t e c o n t r e
le s b u re a u c r a t e s du P . S . I . e t de la C . G . L . qu i, d u r a n t
t o u t e la p é r io d e d e s o c c u p a t i o n s s e r e f u s è r e n t à c a u t i o n ­
ne r un m ou ve m e n t qui le u r é c h a p p a it . U n e d é l é g a t i o n des
C o n s e i l s se r e n d i t à M il a n où se t e n a i t le C o n s e i l N a ­
t i o n a l du P . S .I . a f i n d ' o b t e n i r l' a p p u i du p a r t i , m a is i l s
se h e u r t è r e n t à l ' h o s t i l i t é de s e s d i r i g e a n t s qui r e f u s è ­
re n t même de p u b l i e r da ns I ' « A v a n t i » un ap p e l de la s e c ­
t io n s o c i a l i s t e t u r i n o i s e a l o r s q u e T u r i n é t a i t a s s i é g é e
par 2 0 .0 0 0 p o l i c i e r s e t s o l d a t s .
L e 24 a v r i l , le s C o n s e i l s , i s o l é s , a ffa m é s pa r v i n g t
jo u r s de s iè g e , se re n d e n t et le s m é t a l l u r g i s t e s d é p o s e n t
le s arm e s .
L ' é c h e c du p a s s a g e de la g r è v e g é n é r a le arm ée à
l ' i n s u r r e c t i o n armée et à la r é v o l u t i o n e s t dû a u x o r g a n i ­
s a t io n s t r a d i t i o n n e l l e s de l a c l a s s e o u v r i è r e ( p a r t i s e t
s y n d i c a t s ) qui en p o r te n t en g ra n d e p a r t i e la r e s p o n s a b i ­
l i t é ; c e c i m arqua un re c u l du p r o l é t a r i a t e t un r e g a i n de
l ' o f f e n s i v e du p a t r o n a t ap p u yé pa r ses m i l i c e s e t ba n d e s
fa s c is te s .
L e 1° m a i, à T u r i n , la g a rd e r o y a le t i r e s u r le s m a n i­
f e s t a n t s et d a n s le s jo u r s s u i v a n t s , le s a g r e s s i o n s c o n ­
t r e le s m i l i t a n t s o u v r i e r s se m u l t i p l i e r o n t .
•
C e t t e r e v e n d i c a t i o n s ' é t e n d i t b i e n t ô t à t o u s le s au­
t r e s c e n t re s i n d u s t r i e l s . A i n s i , en o c t o b r e 1919, à la
p r e m iè re a s s e m b l é e g é n é r a le des C o m i t é s d ' U s i n e , p lu s
de 3 0 . 0 0 0 o u v r ie r s é t a i e n t r e p r é s e n t é s . L e s «C o m m i s ­
s i o n s I n t e r n e s » é l a r g i e s n ' o n t é v id e m m e n t qu e peu de
p o u v o i r d a n s l ' e n t r e p r i s e e t ce n ' e s t que la s t r u c t u r e de
c e s « c o m m i s s i o n s » e t l' e x p é r i e n c e des p ro b lè m e s de g e s ­
t io n que le s o u v r i e r s o n t pu y é t u d i e r qui le u r c o n f è r e n t
un e im p o r t a n c e t o u t e p a r t i c u l i è r e .
• LA
PREMIERE
VAGUE:
FEVRIER-M ARS
1 920
L
a r a d i c a l i s a t i o n de s l u t t e s o u v r iè r e s e n t r a f n a s i ­
m u l ta n é m e n t la c o n s t i t u t i o n de m i l i c e s p a t r o n a le s .
O u t r e la C o n f é d é r a t io n G é n é r a le de l ' I n d u s t r i e ,
fo n d é e en 1919, on c o m p te da ns le P ié m o n t de n o m b re u ­
ses o r g a n i s a t i o n s p a t r o n a le s qui f o u r n i r o n t au x gro up es
f a s c i s t e s u n e f o r c e d ' a p p o i n t pour f a i r e rég ne r l' o r d r e
da ns le s e n t r e p r i s e s e t jo u e r o n t le rô le de b r i s e u r s de
grè v e. T o u t e s c e s o r g a n i s a t i o n s t i n r e n t en mars 1920
un e c o n f é r e n c e à T u r i n po ur l u t t e r c o n t r e le s g r è v e s q u i,
au m o i s de f é v r i e r , s ' é t a i e n t é te n d u e s d a n s t o u t e la L i g u r ie . En m a rs, t o u t e s le s u s i n e s de T u r i n s o n t p a r a l y ­
sée s e t des C o n s e i l s a p p a r a is s e n t pour la p re m iè r e f o is
d a n s le sud de N a p l e s ,
L e 25 mars 1920, le s o u v r i e r s o c c u p e n t le s lo c a u x
de la F i a t et, f o r t s d e s li e n s é t a b l i s a v e c le p e rs o n n e l
t e c h n i q u e , t i r a n t p a r ti des e x p é r i e n c e s a c q u i s e s lo r s des
«C o m m i s s i o n s
I n t e r n e s », c r é e n t e t g é n é r a l i s e n t des
C o n s e ils d 'U s in e .
D e s s e c t i o n s a rm é e s d ' a u t o - d é f e n s e s o n t c r é é e s . L e
p a t r o n a t r é a g i t par le lo c k - o u t ; a i n s i 5 0 . 0 0 0 m é t a l l u r g i s ­
t e s e n t r e n t de f a i t en g r è v e .
L e s t r a c t a t i o n s e n t re le p a t r o n a t e t le s C o n s e i l s t r a î ­
n è r e n t d u r a n t 20 jo u rs p e n d a n t l e s q u e ls la g rè v e s ' é t e n d .
le
L e 14 A v r i l , la g r è v e g é n é r a le e s t d é c la r é e d a n s t o u t
P ié m o n t . L e 16, le s c h e m in o t s e n t re n t en g r è v e .
L e g o u v e r n e m e n t , p o u s s é à l ' a c t i o n pa r le p a t ro n a t,
d é c id e d ' e n v o y e r la t r o u p e m a is le s r é g im e n t s e n v o y é s à
T u r i n s o n t b l o q u é s par le s c h e m in o t s e t c e u x e n v o y é s à
G ên es par les m a r i n s . M a lg ré la m o b i l i s a t i o n , au cun s e r­
v i c e c i v i l de t r a n s p o r t n 'a c h e m i n a à bon p o r t le s t ro u p e s
de l'a r m é e . C e l l e - c i d u t c o m p te r sur ses p ro p re s m o y e n s .
D a n s la s e c o n d e m o i t i é d ' a v r i l , la g r è v e g é n é r a le e s t
t o t a l e e t en p a s s e de d e v e n ir i n s u r r e c t i o n n e l l e . L e s
LA
SECONDE
VAGUE:
SEPTEMBRE
1 920
e c o n te n u de s lu t t e s de s e p te m b re e s t q u a l i t a t i v e ­
m ent bien in f é r i e u r à c e l u i de s l u t t e s de f é v r ie r ,
mars e t a v r i l , e t le s p ro b lè m e s d ' o r d r e c a t é g o r i e l
( a u g m e n t a t io n de s s a l a ir e s ) e t de «c o n t r ô l e é c o n o m i q u e »
de l' e n t r e p r i s e p r i m e n t s u r le s p r o b lè m e s p o l i t i q u e s de
l' e x p r o p r i a t i o n des p a tro n s e t de la g e s t io n d i r e c t e de
l ' e n t r e p r i s e . A p r è s d e u x m o is de n é g o c i a t i o n , le p a t r o ­
n a t ro m p t le s p o u r p a r le r s le 13 a o û t 1920.
L
L e 30 a o û t, le s f o r c e s armées o c c u p e n t le s é t a b l i s ­
se m e n ts R o m eo à M i l a n . L e s o i r même, le s 300 u s i n e s
de M i l a n s o n t au x m a in s de s o u v r ie r s .
L e g o u v e rn e m e n t G i o l i t t i se c o n t e n t a de f a i r e e n c e r ­
c le r t o u te s le s u s i n e s par l'a r m é e e t il e n r a y a le m o u v e ­
men t de c e t t e f a ç o n . A u c u n e l i a i s o n n ' é t a n t p o s s i b l e , à
l ' é c h e l l e n a t io n a le , le m ou ve m e n t s ' e s s o u f l a b ie n p lu s
r a p id e m e n t que lo rs de la p r e m iè re v a g u e e t le s b u r e a u ­
c r a t i e s s y n d i c a l e s p u ren t d ' a u t a n t p l u s f a c i l e m e n t n é g o ­
c ie r a v e c le p a t ro n a t. L e s d i r i g e a n t s d e la C . G . L . , r é u ­
n i s à M i l a n , le s 9, 10 e t 11 s e p te m b r e , r e f u s è r e n t de
s o u t e n i r t o u te a c t io n r é v o l u t i o n n a i r e e t se c o n t e n t è r e n t
9 N O T R E M EM O IRE
de lu t t e r pour le p r i n c i p e de la r e c o n n a is s a n c e du c o n ­
t r ô l e s y n d i c a l d a n s l' e n t r e p r i s e .
L a l u t t e p l a c é e sur un t e l t e r r a i n ne p o u v a it é v i d e m ­
m e n t a b o u ti r à r ie n d ' a u t r e q u 'à la r e p r is e du t r a v a i l . L a
b a i s s e de la c o m b a t i v i t é du p r o l é t a r i a t , c o n s é c u t i v e à
l' é c h e c du m o u v e m e n t en a v r i l , e t le gra nd d é c o u ra g e ­
men t r é g n a n t d a n s le s rangs o u v r ie r s , p e rm ir e n t au x bu­
re a u c r a te s de f a i r e a d o p te r pa r le s C o n s e i l s un p r o je t
v i s a n t à la r e p r is e du t r a v a i l en é c h a n g e de l' o b t e n t io n
pa r le s s y n d i c a t s du d r o i t au «c o n t r ô l e é c o n o m i q u e » de
l ' e n t r e p r i s e . L e p r o je t f u t m is a u x v o i x e t l'e m p o r t a pa r
5 9 1 .2 4 5 v o i x c o n t r e 4 0 9 .5 9 6 e t 9 3 .6 2 3 a b s t e n t io n s .
L e 15
T u r i n les
s y n d ic a ts
Syndical»
te m b re et
l'Ita lie ,
s e p te m b re , le
rep ré s e n ta n ts
po ur m e t t r e au
de l ' e n t r e p r i s e .
le 4 o c t o b r e
LES
g o u v e rn e m e n t G i o l i t t i , r é u n it à
de la C . G . I . (p a tro n a t) e t des
p o in t l ' a c c o r d s u r le «Contrôl e
C e t a c c o r d f u t s ig n é le 22 sep­
le t r a v a i l r e p r e n a it dans t o u te
E NS E IG NE M E NTS
L e s C o n s e i l s r é a l i s e n t la g e s t i o n a u t o n o m e d e s u s i n e s
p a r d e s C o n s e i l s d ' E n t r e p r i s e é l u s e t c e l l e de T A g r i c u l ­
ture p a r d e s C o n s e i l s e t c o o p é r a t i v e s d e p a y s a n s : l e
t o u t d a n s l e c ad r e d ' u n e co nstruction fé d é ra lis te d e la
s o c i é t é f o n d é e s u r l ' a u t o n o m i e d e s c o m m u n e s ».
Le
C o n s e i l e s t une s t r u c t u r e o r g a n i s a t i o n n e l l e née
d i r e c t e m e n t des lu t t e s de c l a s s e s .
l ' h i s t o i r e c rée s p o n ta n é m e n t ses
l u t t e e t de g e s t io n ro m p an t avec le s
n e lle s tra d itio n n e lle s . L e C o n s e il
qu'e n p é rio d e r é v o l u t i o n n a i r e .
L e p r o l é t a r i a t da ns
propres org an es de
fo rm e s o r q a n i s a t i o n ne p e u t d o n c n a f tr e
P i e r C a r l o M a s i n i , dans son é t u d e : « A n a r c h i s t e s et
c o m m u n i s t e s d a n s le m o u v e m e n t d e s c o n s e i l s » é c r i t :
« L e s c o n s e i l s r e p r é s e n t e n t la r é e l l e p r é f i g u r a t i o n de la
s o c ié té socialiste. L e mouvement des co nseils constitue
l e p r o c e s s u s d e f o r m a t i o n m o l l é c u l a i r e de la s o c i é t é s o ­
c i a l i s t e ».
En I t a l i e , le s C o n s e i l s é t a i e n t en p a s s e d ' a s s u r e r le
p a ssag e de la s o c i é t é c a p i t a l i s t e à la s o c i é t é s o c i a l i s ­
te . L ' é c o n o m i e b o u r g e o is e é t a i t c o u r t - c i r c u i t é e . L a p ro ­
d u c t io n c o n t i n u a i t sur des ba s es a u t o g e s t i o n n a i r e s .
A i n s i M a s i n i c i t e le cas des u s in e s G a l i l e o de F l o r e n c e
m e n c e n o n s u r l a b a s e où d é b u t a l a p r é c é d e n t e m a i s en
p a r t a n t du p o i n t où l a r é v o l u t i o n a n t é r i e u r e a s u b i un
e n r a y e m e n t m o r t e l » ( L ' I n s u r r e c t i o n de K r o n s t a d t —L a
le cas de l ' u s i n e F i a t - C e n t r e à T u r i n qui p r o d u i s a i t qu o­
t id i e n n e m e n t 37 v o i tu r e s pa r jo u r c o n t re 6 7 -6 8 en tem ps
R é v o lu t io n
P ro lé ta rie n n e ,
s e p te m b r e
1938).
N o u s p o u v o n s lé g it im e m e n t no us dem ander com m ent
un m ou vem e nt de l ' a m p l e u r de c e l u i des c o n s e i ls i t a ­
li e n s p u t - i l ê t r e si f a c i l e m e n t d é f a i t et com m e nt le s bu­
r e a u c r a te s du P . S . I . e t de la C . G . L . qui ne jo u è re n t au­
cun r ô l e m o te u r da ns le s C o n s e i l s p u r e n t - i ls f in a le m e n t
c o n f is q u e r la p a r o le a u x C o n s e i l s e t n é g o c ie r en le ur
nom a v e c le p a t ro n a t. C e s q u e s t io n s d o iv e n t ê t r e po­
sées.
L e s C o n s e i l s i t a l i e n s r é u n i s s a ie n t pre squ e to u te s
les c a r a c t é r i s t i q u e s du C o n s e i l , t e l l e s qu e le
dé fi­
n i t a s se z j u s t e m e n t A r t h u r L e h n i n g da ns «A n a r c h i s m e e t
m a r x i s me d a n s l a R é v o l u t i o n R u s s e » : « L e s C o n s e i l s o n t
pour c a r a c t è r e p a r t i c u l i e r d e n e pr e n d r e n a i s s a n c e que
p e n d a n t l a r é v o l u t i o n , d ' ê t r e d e s o r g a n e s f o n c t i o n n e l s de
,
n 'a v o ir une v ie e ffe c tiv e qu'après la d estru c tio n de to u ­
te forme d 'a p p a re il d 'E ta t c e n tra lis te e t b u reau c ratiq u e .
e s r é v o l u t i o n n a i r e s s e d o iv e n t de t i r e r les le ç o n s
d e s m o u v e m e n ts p a s s é s et d 'e n a n a l y s e r le s
é c h e c s . L a C o m m une de P a r i s , le s r é v o lu t i o n s
ru s s e e t a l le m a n d e , la r é v o lu t i o n e s p a g n o le s o n t a u ta n t
de pages de l ' h i s t o i r e du p r o l é t a r i a t s a n c t io n n é e s pa r le
t r io m p h e de la r é a c t i o n . N o u s ne d e v o n s pas no us c o n ­
te n te r de lo u e r le s r é a l i s a t i o n s de ce s r é v o lu t i o n n a i r e s
sans é t u d ie r le s c a u s e s de le ur é c h e c c a r nous p e n s o n s ,
a vec A n t o n C i l i g a , qu e « T o u t e r é v o l u t i o n n o u v e l l e c o m­
L
.•..'V--
la vie sociale et économique, d'être incompatibles avec
l a n a t u r e e t l e s b u t s d e t o u t p a r t i p o l i t i q u e , e n f i n de
qui m a i n t in r e n t la p r o d u c tio n à 9 0 % de la n o r m a le en
s u rm o n ta n t le s d i f f i c u l t é s t e c h n iq u e s , f in a n c i è r e s , o rg ani s a t io n n e l les de to u te s s o r te s et en a s s u r a n t la d é f e n ­
se armée de l'e n t r e p r i s e . N ous p o u v o n s é g a le m e n t c i t e r
n o rm a l. M a lh e u r e u s e m e n t la r é v o lu t i o n n ' é t a i t pas f a i t e
et d é ta c h e r la p h as e de p ro d u c tio n de la p h ase de la d i s ­
t r i b u t i o n r e v i e n t à n i e r t o u t p ro c e s s u s é c o n o m iq u e da ns
sa g l o b a l i t é . L 'é c o n o m i e i t a l i e n n e d u ran t c e t t e p é r io d e
n ' é t a i t ni c a p i t a l i s t e , ni s o c i a l i s t e m algré l ' a p p r o p r i a ­
t io n c o l l e c t i v e des m oyens de p r o d u c tio n et la g e s t io n
d i r e c t e des e n t r e p r i s e s .
L ' a n a r c h i s t e L u i g i F a b b r i r a p p o rte : «On t e n t a é g a l e ­
ment de conti nuer le s s e r v i c e s d'é ch a ng e et de v e n te
d e s p r o d u i t s e t d e s f o u r n i t u r e s en m a t i è r e s p r e m i è r e s .
On r é u s s i t en c e r t a i n s e n d r o i t s , m a i s s u r u n e p e t i t e
é c h e l l e , m a l g r é l ' a i d e d e s c h e m i n o t s e t d e s o u v r i e r s du
transport . On v i t que c ' é t a i t là l e p o i n t f a i b l e qui e m p ê ­
c h a i t l a p r o l o n g a t i o n du m o u v e m e n t e t le l i m i t a i t a u x
s e u l e s i n d u s t r i e s d e la m é t a l l u r g i e » (U m a n ita N o v a ,
s ep tem bre 1954).
....
37
N O T R E M EM O IRE
' ' L a d i s t r i b u t i o n sur des bases s o c i a l i s t e s n ' é t a i t au­
c u n e m e n t p o s s i b l e dans la m esure où l ' E t a t , a v e c sa
p o l i c e e t son armée, n ' a v a i t pas é t é d é t r u i t . L e s o u ­
v r i e r s i t a l i e n s s o u s - e s t im è r e n t l ' i m p o r t a n c e de l ' E t a t en
p e n s a n t a b a t t r e le s y s tè m e c a p i t a l i s t e par le seu l moyen
des o c c u p a t i o n s . A i n s i n ' y e u t - i l j a m a is q u 'u n e s i t u a t i o n
de «d o u b l e pouvoir,» a lo r s que t o u t é t a i t p o s s i b l e . L e s
a n a r c h is t e s é t a i e n t p a r fa it e m e n t c o n s c i e n t s de s i n s u f f i ­
s a n c e s du m ou v em e nt e t i l s in t e r v i n r e n t dans les c o n ­
s e i l s pour q u ' e l l e s s o i e n t d é p a s s é e s . M a s i n i se f a i s a i t
le ur i n t e r p r è t e : «L e s C o n s e i l s r é s o l v e n t à m o i t i é l e p ro­
b l è m e de l ' E t a t : i l s e x p r o p r i e n t l ' E t a t d e s e s f o n c t i o n s
sociales, mais ils ne lès e n t pas l'Etat dans s e s fonc­
t i o n s a n t i - s o c i a l e s . I l s r é d u i s e n t l ' E t a t à un p l é o n a s m e
m a i s i l s n' é l i m i n e n t p a s c e p l é o n a s m e , i l s v i d e n t l ' a p ­
p a re i l é t a t i q u e d e s o n c o n t e n u m a i s i l s n e l e d é t r u i s e n t
pas. Ma i s p u i s q u ' o n n e p e u t v a i n c r e l ' E t a t en l ' i g n o r a n t ,
du f a i t q u ' i l p e u t f a i r e s e n t i r à t o u t m o m e n t s a p r é s e n c e
en m e t t a n t en m a r c h e s o n m é c a n i s m e d e c o n t r a i n t e e t d e
s a n c t i o n , il f a u t d é t r u i r e a u s s i c e m é c a n i s m e . L e s C o n ­
s e i l s ne p e u v e n t a c c o m p l i r c e t t e o p é ra t i o n e t p o u r c e l a
i l s d e m a n d e n t V i n t e r v e n t i o n d ' u n e f o r c e p o l i t i q u e org a ­
n i s é e : le m o u v e m e n t s p é c i f i q u e d e l a c l a s s e , qui p o r t e
à terme u n e t e l l e m i s s i o n . C e n ' e s t q u ' a i n s i que l ' o n
peut évi te r que le bourgeois, j e t é à la porte da ns s e s
v ê t e m e n t s d ' i n d u s t r i e l , n e rent re p a r l a f e n ê t r e d é g u i s é
en p o l i c i e r ».
U n e des a u tre s c a u s e s de l' é c h e c du m o u v e m e n t e st
le m anque de c o o r d i n a t io n des c o n s e i l s e n tre eux. L a
p l u p a r t des v i l l e s i n d u s t r i e l l e s p o s s é d a i e n t de s c o n s e i l s
m ais la F é d é r a t io n des C o n s e i l s ne v i t ja m a is le jo u r.
L u i g i F a b b r i n o te à ce propos : «D a n s l e s g r a n d e s v i l l e s
il y a v a i t é g a l e m e n t d e s o r g a n e s e m b r y o n n a i r e s d e l i a i ­
s o n ent r e l e s u s i n e s , m a i s à vrai di r e b ie n i n s u f f i s a n t s .
L e s li ais ons entre l e s u s i n e s d e s d if f é r e n t e s pr o v i n c e s
é t a i e n t e n c o r e p l u s i n s u f f i s a n t e s , e t au m i e u x , f a i t e s
par la p r e s s e e t d e s e n v o y é s ».
T o u t e s le s t e n t a t i v e s v i s a n t à fé d é r e r le s C o n s e i l s
é c h o u è re n t, d 'u n e p a r t à c a u s e de l ' e n c e r c l e m e n t m i l i t a i ­
re des u s in e s et, d ' a u t r e p a rt, à c a u s e du t r a v a i l de s a ­
botage s y s t é m a t iq u e d é v e l o p p é par le s s y n d i c a t s e t le
P .S .I.
L e s C o n s e i l s , is o l é s le s uns des a u t r e s , ne p u ren t
pa ss er à l ' o f f e n s i v e de fa ç o n c o h é re n te e t le s a p p a r e il s
p o l i t i q u e s e t s y n d i c a u x p l u s s o l id e m e n t s t r u c t u r é s p u ­
rent c o n f is q u e r la p a role aux t r a v a i l l e u r s . L e s e f f o r t s
des bu re a u cra te s t e n d i r e n t c o n t i n u e l l e m e n t à p e rp é tu e r
l ' i s o l e m e n t des C o n s e i l s ; a i n s i , da ns les u s i n e s , le s
m i l i t a n t s a n a r c h is t e s e t s o c i a l i s t e s r é v o l u t i o n n a i r e s se
h e u rtè re n t co n s ta m m e n t à l ' i n e r t i e ou à l ' h o s t i l i t é des
a p p a r e iI s .
L a p o l i t i q u e c r i m i n e l l e de s d i r i g e a n t s s y n d i c a u x e t
des b u re a u c ra te s du P . S .I . d e v a i t ê tre s a n c t io n n é e , d e u x
ans plus ta rd , par la p r i s e du p o u v o ir pa r M u s s o l i n i .
EXTRAIT
D’ UNE I N T E R V I E W DE M A U R I Z I O G A R I NO
(animateur du Groupe Libertai re Turi nois
pendant l e s occupat i ons d ’u s i n e s )
«Les C o n s e ils selon nous d ev a ien t représenter to us le s
o u v r i e r s et être d e s o r g a n i s m e s de b a s e , c o n t r a i r e m e n t au x
" C o m m i s s i o n s In tern es" m e n é e s par l e s d i r i g e a n t s s y n d i ­
c a u x , qui e l l e s , n e r e p r é s e n t a i e n t que l e s o u v r i e r s qui
payaient leu rs c o t is a t io n s .
«En c e qui c o n c e r n e l e s rapports d e s C o n s e i l s a v e c l e s
o r g a n i s a t i o n s s y n d i c a l e s , t r o i s t h è s e s furent s o u t e n u e s : la
prem ière v o u l a i t que l e s C o n s e i l s s o i e n t à l ' i n t é r i e u r d e s
s y n d i c a t s de f a ç o n à a n é a n ti r l ' a u t o n o m i e d e s C o n s e i l s . L a
s e c o n d e , s o u t e n u e par A n t o n i o G r a m s c i e t par l e s s o c i a l i s ­
t e s de «l 'O rd ine N u o v o » é t a i t o p p o s é e à c e t t e i n s e r t i o n et
c o n s i d é r a i t l e s C o n s e i l s comme d e s o r g a n e s r é v o l u t i o n n a i res. ^fn dant à l a p r i s e du p o u v o i r p o l i t i q u e . E t e n f i n , la
t r o i s i è m e , d é f e n d u e par n o u s , a n a r c h i s t e s , v o y a i t d a n s l e s
C o n s e i l s l e s o r g a n e s r é v o l u t i o n n a i r e s p a r - d e là l e s s y n d i ­
c a t s , c a p a b l e s , non de co n q u érir le p o u v o ir , m a i s d e l ' a b a t ­
tre.
« L ' o r g a n i s a t i o n d e s C o n s e i l s é t a i t c a r a c t é r i s é e par
la
r é v o c a b i l i t é i m m é d i a t e , d e la part de l a b a s e , d e t o u t e ch a r­
g e. C h a q u e d é p a r t e m e n t d ' u s i n e c h o i s i s s a i t un c o m m i s s a i r e
en l a p e r s o n n e d'u n ou v rier, qui d e v a i t é t u d i e r to u t le c y c l e
de p r o d u c ti o n e t co m m u n iq u er s e s c o n n a i s s a n c e s à s e s c a ­
m a r a d e s de d é p a r t e m e n t , c e c i afin d ' é v i t e r t o u t e h i é r a r c h i e
d a n s l e s f o n c t i o n s d i r e c t i v e s au s e i n de l ' u s i n e .
«Le C o n s e i l d ' U s i n e é t a i t nommé par l a réu n io n d e s
C o m m i s s i o n s de d é p a r t e m e n t . P a r a l l è l e m e n t , au n i v e a u n a ­
t i o n a l , on e s s a y a d ' o r g a n i s e r un c o n g r è s pou r l ie r f é d é r a t i v e m e n t l e s C o n s e i l s d ' U s i n e e t pour d é s a r ç o n n e r p a r t i s et
syn d icats.
«Le c o n g r è s fut rendu i m p o s s i b l e , p eu d e jour s a v a n t la
d a t e p r é v u e , par l ' o f f e n s i v e d e l a r é a c t i o n ( . . . ) .
«On p e u t affirmer que l e s C o n s e i l s ou v r ie r s s e f o r m a i e n t
en é p o u s a n t l e s s t r u c t u r e s c o m p l e x e s de l ' u s i n e e t s e d i f ­
f é r e n c i a i e n t d e s o r g a n i s a t i o n s s y n d i c a l e s en p r o d u i s a n t
deux faits nouveaux :
bL C o m b a tta n t d a n s
l ' o u v r ie r l a m e n t a l i t é de s a l a r i é ,
i l s lui ont f a it d é c o u v r i r la c o n s c i e n c e de p r o d u c te u r , a v e c
t o u t e s l e s c o n s é q u e n c e s d'ordre p s y c h o l o g i q u e e t p é d a g o ­
g i q u e que c e l a com p orte .
2°. E d u q u a n t et en tra în an t l e s o u v r ie r s à l ' a u t o g e s t i o n ,
i l s leu r f a i s a i e n t acq u érir l e s c o n n a i s s a n c e s n é c e s s a i r e s
à l a m arch e d e l ' u s i n e .
« A in si, le s C o n s e il s , à la d ifféren ce d e s p artis et d e s
sy n d ic a ts, n 'éta ie n t p a s seulem en t d e s o r g a n isa tio n s co n ­
t r a c t u e l l e s m a i s p lu tô t d e s a s s o c i a t i o n s n a t u r e l l e s , n é c e s ­
s a ir e s, in d iv isib les» .
!l
y a peu de m ois e st paru
(e n fin en F ra n ce ) le l i v r e de P aul F eyerabend, «Contre la méthode,
o s q u is s e d 'u ne th é o rie a na rch iste de
la c o n n a is s a n c e » (S e u il). L ' a r t i c l e qui s u it , p lu tô t
que d 'ê tre un compte rendu au sens s t r i c t , s o u h a ite r a it d'u ne part
dém ontrer que les «séduisantes» thèses de Feyerabend
n 'o n t rien à v o ir a ve c l'a n a rc h is m e
(s i ce n 'e s t le mot, u t i l i s é de façon ambiguë, comme s e u ls
les n o n -a n a rc h is te s sa ven t le fa ire ),
et d 'a u tre part
s e r v ir de base à un débat sur les problèmes
s p é c ifiq u e s de la s c ie n c e .
des m y th e s , t a n t il e s t vra i que
es p h ilo s o p h e s de la s c ie n c e
chaque n o u v e l événe m ent, n o u v e lle
( le s é p is t é m o lo g u e s ) qui ont
t h é o r ie ou n o u v e a u x f a i t s e x p é r i­
p ré c é d é F e y e r a b e n d ont t e n té ,
d 'u n e façon ou d 'u n e au tre , d ' o f f r im
r e n ta u x qui d é f ie n t les th è s e s p ré ­
é t a b li e s , pro voq ue chez le s a d ep te s
ou de d é c o u v r ir des m o d è le s dans
de ces d e rn iè r e s une «ré a c tio n de
le
d é v e lo p p e m e n t
s c ie n tifiq u e .
tabou». Un au tre p o in t e s s e n t ie l e s t
C ' e s t - à - d i r e q u ' i l s p a r t a ie n t du p o s ­
que le s t h é o r ie s s o n t im b ib é e s d ' i ­
t u l a t que le progrès de la s c ie n c e
d é o lo g ie , e t que l ' im a g e q u 'e n ont
r é p o n d a it à de s l o i s b ie n p r é c is e s ,
le s gens, à s a v o ir des c h o s e s pu res
q u ' i l s e s s a y a i e n t de fo r m u le r . D ' a u ­
de t o u te c o n t a m in a t io n id é o lo g iq u e ,
tr e s , s o u t e n a ie n t une t h è s e c u m u la ­
e s t du e se u le m e n t au ty p e d ' e n s e i ­
t i v e , à s a v o ir , ch a q u e t h é o r ie est
gnement m y s t i f i a n t d é l i v r é par l ' é ­
m e i l l e u r e que la p r é c é d e n te e t l ' e n ­
co le .
g l o b e comme c a s p a r t i c u l i e r .
B ie n q u ' i l a i t i n t i t u l é son li v r e
«C o n t r e la m é t h o d e », F e y e r a b e n d ne
se pose pas c o n tre la m éthode en
g é n é ra l, m a is p l u t ô t c o n tre l ' u t i l i ­
s a t io n non d i s c r im in a n t e des m é­
th o d e s
r a t io n n e ll e s .
En f a i t ,
il
N ’ IM P O R T E QUOI V A BIEN
suggère un mode i r r a t i o n n e l d ' a c ­
t i o n : la c o n t r e - in d u c t io n , c 'e s t - à d ir e
la c r é a tio n de norm es qui
s o ie n t c o n t ra ir e s aux h y p o t h è s e s
a s o r t ie du l i v r e de F e y e r a ­
ou aux f a i t s a s s u ré s . M a i s son «ob­
be nd a b o u l e v e r s é c e s fo rm u ­
je c ti f» n ' e s t pas de s u b s t i t u e r à un
la tio n s
ra tio n n e lle s
de
la
s c ie n c e , en c e c i il d é m o n tre q u 'iel n s e m b le de l o i s g é n é ra le s un autre
en s e m b le de l o is , m a is p l u t ô t de
n ' e x i s t e pas de lo i épi s té m o lo g iq u e
c o n v a in c r e le le c te u r que t o u t e s les
qui n ' a i t é t é v i o l é e e t que la s c ie n ­
m é t h o d o lo g ie s , même le s p lu s adé­
ce p r o g re s s e par des p e rs o n n e s qui
qu a te s , o n t des l i m i t e s .
s e n te n t le b e s o in de d é v ie r de s mo­
L
L
d è le s du r a t io n a lis m e . A l ' i n v e r s e ,
pour F e y e r a b e n d , le s t h é o r i e s sont
in c o m m e n s u r a b le s , c ' e s t - à - d i r e in ­
c o m p a ra b le s du p o in t de v u e lo g ic o s t r u c t u r e l, et s o n t a s s i m i l a b l e s à
L 'u n iq u e
lo i
m é th o d o lo g iq u e
q u ' i l pro po se e s t m ' i m p o r t e quoi va
b i e n », n ' i m p o r t e q u e l le h y p o th è s e ,
pour ab surd e q u ' e l l e s o i t , même
p o rté e par des c o n c e p t i o n s m é ta ­
p h y s iq u e s ou de s c r o y a n c e s m a g i ­
ques, p e ut être u t i l i s é e p o u r c r é e r
la c o n n a is s a n c e qui d e v i e n t a i n s i
«un o c é a n t o u j o u r s c r o i s s a n t d ' a l ­
ter natives réciproquement i n c o m p a ­
t i b l e s ».
UN
D A D A ÏST E n e f e r a i t
PAS DE MAL
A UNE M O U C H E "
ans c e «to u t v a b i e n » r é s i d e
l ' e s s e n c e de son a n a r c h is m e
é p i s t é m o lo g iq u e . J e p a r le d 'a n a r c h is m e é p is t é m o lo g iq u e , c a r le
«camarade»
F e y e ra b e n d
repère
l ' e x i s t e n c e de t r o i s t y p e s d 'a n a r c h i sme :
D
par
1°) le p o l i t i q u e qui se d é f i n i t
« son o p p o s i t i o n à l ' o r d r e d e s
c h o s e s c o n s t i t u é e s : à l ' E t a t , a ux
institutions,
a u x i d é o l o g i e s qui
soutiennent et glorifient ces insti­
t u t i o n s . L ' o r d r e c o n s t i t u é d o i t êt r e
d é t r u i t af i n que la s p o n t a n é i t é p u i s ­
se exerc er son droit à e xp ér i m e n t er
l i b r e m e n t l e s m e i l l e u r s m o y e n s ».
F e y e r a b e n d a s s u r e é g a le m e n t qu'u n
a n a r c h is t e p o l i t i q u e u t i l i s e la v i o ­
le n c e parce q u ' i l p e n s e q u ' e l l e e s t
«b é n é f i q u e p o u r V i n d i v i d u , en ce
s e n s q u ' e l l e l i bè r e s e s e x i g e n c e s
et lui p e r m e t d e s e rendre c o m p t e
39
ARG UM EN TS
de la force dont il d i s p o s e ». De
p l u s , un a n a r c h i s t e p o l i t i q u e c r o i t
en la r a is o n n a t u r e l l e e t é p ro u v e du
r e s p e c t pour la s c ie n c e , ( i l c i t e
p l u s i e u r s f o i s K r o p o t k i n e e t sa c o n ­
c e p t io n de la s c ie n c e , en se d e m a n ­
dant
com m e nt un a n a r c h i s t e qui
v e u t se l i b é r e r de t o u t po ur c o n q u é ­
r i r la li b e r t é , ne se l i b è r e pas de la
s c ie n c e ; q u e s t io n q u i, à mon sen s ,
e s t lo in d ' ê t r e s t u p id e ) .
2°) Il y a e n s u i t e l ' a n a r c h i s m e
re lig ie u x
qui
s e r a i t une e s p è c e
d ' é t a t a v a n c é de l ' a n a r c h i s m e p o l i ­
t i q u e . Un a n a r c h i s t e p o l i t i q u e de ­
v i e n t r e l i g i e u x quand il t r a n s c e n d e
le monde réel qui lu i p a r a i t ép hé m è­
re, c o rro m p u e t sa n s im p o r ta n c e , et,
en p l u s de n i e r le s i n s t i t u t i o n s e s t
am ené à n i e r t o u t e l o i , a u s s i bien
p h y s iq u e que m o ra le , et à c o n s i d é ­
re r le mode d ' e x i s t e n c e in d é p e n d a n t
du c o r p s . ( I l e s t sûr que je ne m ' e x ­
p l i q u e pas b ie n , car en r é a l i t é je
me s u i s s o u v e n t d e m an dé ce que
v o u l a i t d ir e F e y e r a b e n d sans t r o u ­
v e r de ré p o n s e s a t i s f a i s a n t e ) .
3°) i l y a e n f in l' a n a r c h i s m e ép isté m o lo g iq u e ,
le q u e l
n 'é p r o u v e
a u c u n s c r u p u le à d é fe n d r e ( d' asse r­
tion la p l us banale et m o n s t r u e u s e » .
T a n d i s qu e l ' a n a r c h i s m e p o l i t i q u e
(ou r e l i g i e u x ) v e u t a b a t t r e une c e r ­
t a i n e forme de v i e « / ' a n ar c hi s t e é-
p is t é m o l o g i q u e p e u t d é s i r e r la d é­
fendre car il n ' a aucun s e n t i m en t
éternel de f i d é l i t é ou d ' av er s io n
da ns la conf rontation a v e c quelque
i ns t i t u t i on ou i d é o l og i e ». Il e s t a s ­
s i m i l é au d a d a ïs t e et son u n iq u e
p ro gra m m e
e s t d ' ê t r e c o n t r e le s
p ro g ra m m e s : «il n ' e x i s t e p a s d ' o p i ­
nion, pour absurde et irréelle q u' e l ­
le soit, qu'il r e f use de prendre en
considérat ion,
ou en conf ormi t é
ave c l a qu e ll e il s e re f u se d'agir,
aucune mét hode n ' e s t c o n si dé r é e
i n d i s p e n s a b l e ». F e y e r a b e n d se d é ­
f i n i t d o n c comme un a n a r c h i s t e da ­
d a ï s te , en p a r t i c u l i e r p a rc e qu' «un
sein,
é c rit:
d 'é lé m e n ts
ra tio n n e ls .
Il
(da. s c i e n c e , t e l l e que n o u s
la c o n n a i s s o n s , p eu t s e u l e m e n t
e x i s t e r en l a i s s a n t tomber c e t t e
e x i g e a n c e ( c e l l e du r a t i o n a l i s m e
c r i t i q u e ds P o p pe r) et en re voy ant
notre méthodologie».
d a d aï s t e ne ferait pas de mal à une
mouche et encore mo i n s à un être
humain».
A p r è s une t e l l e a f f i r m a t i o n , on
se dem ande s p o n ta n é m e n t com m e nt
il e s t p o s s i b l e qu e da ns to u s le s
a r t i c l e s qui lu i s o n t c o n s a c r é s , il
s o i t d é f in i comme « / ' é p i s t é mo l o g ue
a n ar c hi s t e ». U n e ré p o n s e p o s s i b l e
peut ê tr e qu e le s i n t e l l e c t u e l s d ' E ­
t a t , pour é v i t e r qu e le s id é e s de
F e y e r a b e n d n ' e n t r a m e n t la re m is e
en c a u s e de la s c ie n c e en t a n t
q u 'o b j e t r a t io n n e l et o b j e c t i f , e s ­
s a ie n t de d i s q u a l i f i e r c e t i n d i v i d u ,
d o n t la s e u le f a u te e s t d ' a v o i r u t i l i ­
sé un mot a v e c a m b ig ü it é , en le
d é c r i v a n t comme une a n o m a lie . En
lu i c o l l a n t la b r u t a le é t i q u e t t e d ' a ­
n a r c h i s t e i l s s on ge nt a c r é e r chez
le s «hon nê te s gens» un p ré ju g é c o n ­
t r e le l i v r e lu i- m ê m e . M a i s i l s ne
se son t gu è re a p e rçu s qu e la t e n t a ­
t i v e de F e y e r a b e n d s ' i n s c r i t e l l e
a u s s i da ns l ' é t e r n e l p r o je t é p is t é m o l o g iq u e qui v i s e à im m u n is e r la
s c ie n c e . En f a i t , to u s le s é p is t é m o ­
lo g u e s , de Mach à L a k a t o s , ont e s ­
sayé de j u s t i f i e r le s c h o i x s c i e n t i ­
f iq u e s
par la j u s t e s s e
e t le
r a t io n a lis m e . Et F e y e r a b e n d ne f a i t
pas a u tre cho se, s a u f q u ' i l a dé ­
couvert
que la s c i e n c e p ro c è d e
aussi irra tio n n e lle m e n t et q u 'il re­
v e n d i q u e c e t t e i r r a t i o n a l i t é , sans
n ie r , comme n o u s l' a v o n s vu, la
p o s s ib ilité
d 'e x is te n c e ,
en
son
IL
F A U T CHANGER
LA SCIENCE
lo r s
que pour
F eyerabend,
l ' i m p o r t a n t n ' e s t pas de c h a n ­
ge r la s c ie n c e , m a i s de r e v o ir
la m é t h o d o lo g ie , je p e n s e , au c o n ­
t r a ir e , qu e po ur un p r o j e t r é v o l u ­
t i o n n a i r e v r a i m e n t c o m p le t, il e s t
im p o r t a n t,
non pas t e l l e m e n t de
r e v o ir une m é t h o d o lo g ie c r i t i q u e ,
m a is de c h a n g e r la s t r u c t u r e et la
d é fin itio n
de la s c ie n c e , c h o s e
d o n t,
é v id e m m e n t, un « a n a r c h is te
épi s t é m o lo g i que» ne se p ré o c c u p e
gu ère. F e y e r a b e n d n ' a c u r e de c e t
e n g a g e m e n t, i l p e nse p l u t ô t à des
«e x pé r i m en t at i on s
joyeuses»
qui
ir o n t à l ' e n c o n t r e de s «s t a n d a r d s »
ad m is , sans d ' a i l l e u r s f a i r e gra nd
cas de la c o h é r e n c e , p u i s q u ' i l e s t,
comme no us l ' a v o n s vu, un d a d a !
E t F e y e ra b e n d «dada» se pro tè g e
a i n s i de t o u t e c r i t i q u e p o s s i b l e . De
son li v r e on pe ut d i r e q u ' i l e s t c e r ­
t a in e m e n t une de c es «e x p é r i m e n t a ­
A
tions j o y e u s e s», e t d o n c un peu p r o ­
v o c a t r i c e s , m a is q u ' i l ne r e v ê t au ­
cun d a ng er pour la s c i e n c e a c t u e ll e .
En f a i t , il rompt s e u le m e n t a v e c
une v i e i l l e c o n c e p t i o n du pro g rè s
sc ie n tifiq u e .
C ' e s t p o u r q u o i,
le s
t h è s e s de F e y e r a b e n d p e u v e n t ê tr e
c o n s id é r é e s comme une t e n t a t i v e
d ' i n n o v a t i o n à l ' i n t é r i e u r même de
la s c ie n c e , E l l e s u b ir a do nc le
p ro c e s s u s qu e t o u t e i n n o v a t i o n a
subi : e l l e s e ra f o r t e m e n t c r i t i q u é e
par t o u s (comm e c e l a e s t en t r a in
de se p a s s e r pour c e l l e de F e y e r a ­
bend) et, si e l l e r é s i s t e à ces c r i t i ­
ques, ou p l u t ô t si l ' o n s ' a p e r ç o i t
q u ' e l l e e s t f o n c t i o n n e l l e po ur la
p e r p é t u a t io n du s y s tè m e s c i e n t i f i ­
que te l q u ' i l e s t a d m is a u jo u r d ' h u i
(e t c e l l e de F e y e r a b e n d , il me sem­
ble
e lle
a v o ir dé m o n tré q u ' e l l e l ' e s t )
se ra e n g lo b é e da ns la s c ie n c e
et d e v ie n d ra ,
m iq ue.
Ce
tôt
ou
ta r d ,
acadé­
n ' e s t donc pas une i n n o v a ­
t io n in te r n e à la s c i e n c e qui p o u rra
rompre avec sa s t r u c t u r e fo rte m e n t
v e r t i c a l e , m a is c ' e s t s e u le m e n t, et
ce c i e s t un e p r o p o s i t i o n de débat,
la d e s t r u c t io n de la s t r u c t u r e s c i e n ­
t i f i q u e e t son é v e n t u e lle r e c o n s ­
t r u c t i o n ( j ' i n s i s t e s u r é v e n t u e lle )
sur des b a s e s c o m p lè te m e n t d i f f é ­
r e n te s . ■
Nanni
40
B O N IO L O .
A RG UM EN TS
P LU S EN P L U S
ON T R O U V E SES T A B L E A U X
DANS L ES P U B L IC A T IO N S L I B E R ­
T A IR E S I N T E R N A T I O N A L E S .
GRANDS T R A IT S NOIRS E T C O L O ­
RIS P A S T E L S (A H ! SI NOUS AVIONS L A C O U L E U R DANS ' a g o ­
r a 'n . ON COMMENCE A SAVOIR
D E C H I F F R E R SON NOM, AU COIN
DE SES DESSINS.
MAIS
T IN I?
QUI
E ST F L A V I O COSTAN-
L ’ h is ­
t o i r e du mou­
ve m e n t a n a r c h is t e , ses
d é f is a u d a c ie u x , ses r é b e l l i o n s
et son r o m a n tis m e , e x e r c e sur de
n o m bre uses p e rs o n n e s un e f a s c i n a ­
t i o n s p é c if iq u e . L ’ a b o n d a n c e d ’ é v é ­
n e m e n ts h a u ts en c o u le u r s , t r a g i ­
ques, de t e n t a t i v e s e t d ’ e x p é r i e n c e s
m enées d a n s l e do m a in e de la r é v o ­
lu t i o n s o c i a l e , n ’ a ja m a is rendu f a ­
c i l e le t r a i t e m e n t s u p e r f i c i e l du
mou­
vement l i ­
b e r t a ir e , e x c e p t é pour
c e u x qui v o u l a i e n t en f i n i r , une
f o i s pour t o u t e s , a ve c le s u j e t . L e s
é c r i v a i n s , a n a r c h is t e s ou n o n , se
sont t r o u v é s en g a g é s p r o fo n d é m e n t
41
ARG UM EN TS
r ô l e da ns l ' œ u v r e de C o s t a n t i n i ,
b ie n a v a n t même q u ' i l se m e tte à
d e s s i n e r e t à p e in d r e . F l a v i o , âgé
a u jo u r d ' h u i de 47 an s, e s t le f i l s
d 'u n p ro fe s s e u r de l ' I t a l i e du N o r d .
I l c om m e nce sa c a r r i è r e p r o f e s s i o n ­
n e l l e en t a n t q u ' a r t i s t e g r a p h iq u e
c o m m e r c ia l e t m a q u e t t is t e sur t i s ­
s u s . D a n s une r é c e n t e i n t e r v i e w ,
C o s t a n t i n i d i s a i t : «J ’ai c o m m e n c é à
d e s s i n e r p a r c e que j ' a i lu l e s l i v r e s
d e K af k a . J e l e s ai b e a u c o u p a im é s ,
e t c o m m e il m ’é t a i t i m p o s s i b l e d ’é­
cri re c o m m e lui, j e m e s u i s m i s au
d e s s i n ».
L e s s u j e t s s o l i t a i r e s , b r im é s et
d é s o r i e n t é s des œ u v r e s de K a fk a ,
t o u jo u r s e n t re l ' h y s t é r i e et l ' e f f o n ­
dre m e n t, c a p t i v e n t C o s t a n t i n i e t i n ­
f lu e n c e n t
ses p re m iè re s œ u v r e s .
P a r a l l è l e m e n t , une a l t e r n a t i v e e x i s ­
t e : le c o m m u n is m e . Il s e ra c om m u­
n i s t e p e n d a n t t o u t e c e t t e p é r io d e ,
ju s q u 'à son v o y a g e en URSS en
1 962.
L A D E S IL L U S IO N S O V IE T IQ U E
o s t a n t i n i f u t à la f o is dé çu et
t r o u b l é par ce p a y s . A M o sc o u ,
C
l o r s q u ' i l s o n t eu à p a r le r de c e t t e
v o l o n t é de p u re té da ns le s id é a u x
et de s m a r t y r s t r a g i q u e s qui j a l o n ­
n e n t l ' h i s t o i r e a n a r c h is t e . A u j o u r ­
d ' h u i , le m ou vem e nt a t r o u v é son
c h r o n i q u e u r a r t i s t i q u e en la p e r s o n ­
ne de F l a v i o C o s t a n t i n i .
DE
KAFKA A RAVACHOL
b le a u x
sur
l'a s s a s s in a t
de Me
K i n l e y par C z o lg o s z e t s u r le m ar­
t y r de W o b b ly F r a n k J u n io r . D ' a u ­
t r e s son t en c h a n t ie r . L e s o r i g in a u x ,
p e in ts pa r C o s t a n t i n i , s o n t e n s u i t e
r e p r o d u it s
en s é r i g r a p h i e à 100
e x e m p l a ir e s à Z a g r e b ( Y o u g o s la v i e )
par son a s s o c ié .
Un a s p e c t de l'o e u v re de C o s t a n ­
t i n i s a u te im m é d ia te m e n t au x y e u x :
l ' a t t r a i t de la v i o l e n c e ( a s s a s s i n a t s ,
e x p lo s io n s ,
a rre s ta tio n s ,
exécu­
t i o n s ) . V i s i b l e m e n t R a v a c h o l e s t le
pe rso n n a g e qui l ' i n t é r e s s e le p lu s .
R a v a c h o l, c ' e s t l ' é l é m e n t c r i m i n e l
i n d i s c i p l i n é qui e f f r a i e la p lu p a r t
d e s p e r s o n n e s . C e s y m b o le de l ' a ­
n a r c h i s t e v i o l e n t , la n c e u r de bom­
bes et p i l l e u r de to m b e s , e s t e x p l o i ­
o n t r a ir e m e n t à d ' a u t r e s , C o s ­
t a n t i n i ne t r a i t e pas un ou
d e u x é v é n e m e n ts de l ' h i s t o i r e
a n a r c h i s t e pour se t o u r n e r e n s u ittée par les e n n e m is d ' u n e s o c i é t é
l i b r e . Il pro u v e , à le urs y e u x , le s
v e r s d ' a u t r e s th è m e s . C hez l u i , il y
d a n g e r s de c ha os qui no us g u e t t e n t
a le s o u c i c o n s t a n t de c ré e r, par
h o rs de s c o n t r a in t e s d 'u n P a r t i ou
ses t r a v a u x , un e d o c u m e n t a t io n a r­
d 'u n E t a t . C o s t a n t i n i s 'im p r é g n e de
t i s t i q u e e x h a u s t i v e , s y s t é m a t iq u e ,
l'h o m m e ré e l, du c a r a c tè r e i n d i v i ­
du m o u v e m e n t. L e s 43 p r e m ie r s t a ­
d u a l i s t e de R a v a c h o l, non comme
b l e a u x de c e t t e s é r i e s o n t r e p r o ­
un m o d è le , m a is a v e c la c o m p r é h e n ­
d u i t s d a n s « T h e A r t o f A n a r c h y i >,
s io n qui f u t c e l l e d 'E m m a G old m an
p u b l ié en s e p t e m b r e 1975 pa r «Cienpour L é o n C s o l g o s z , a s s a s s i n du
f u e g o s P r e s s » ( e t, m a lh e u r e u s e m e n t
p r é s id e n t Me K i n l e y . P o u r C o s t a n ­
é p u i s é à l' h e u r e a c t u e l l e ) .
t i n i , R a v a c h o l c ' e s t la v o l o n t é d ' a c ­
T r a v a i l l a n t da ns le s t u d i o de
t io n .
son a p p a rte m e n t de R a p p a lo ( I t a l i e ) ,
T r è s t ô t, K a f k a a jo ué un grand
i l v i e n t d ' a c h e v e r de n o u v e a u x t a ­
C
il v i t «un f l e u v e d e t o u r i s t e s ,
p a y s a n s é t r a n g é m e n t s i l e n c i e u x , 'ni
t r i s t e s ni h e u r e u x , c a n a l i s é s d a n s
c e p è l e r i n a g e i n c o n s c i e n t et d é s e n ­
c h a n t é . L e v i f p a s de l ' o i e d e s s o l ­
d a t s p e n d a n t l a r e l è v e de l a garde
d e v a n t le M a u s o l é e d e L é n i n e . D e s
v o i t u r e s d ' u n n o i r bri ll ant, a u x ri­
d e a u x tirés, f i l a n t à t ou t e al l ur e
I]
A RG UM ENTS
v e r s le s m a n i f e s t a t i o n s c o l l e c t i v e s .
L e s c o u ra g e s , le s v o l o n t é s i n d i v i ­
d u e l l e s d o m in e n t t o u t e s s e s œ u v r e s .
S e u le s , q u e lq u e s u n es, comme c e l l e
s u r le m a s s a c r e de s o u v r ie r s de Me
C o r m i c k à C h i c a g o en 1879, ou
c e l l e sur la r é v o l t e d e s p a y s a n s de
G h i b e l l i n a en 1894, t r a i t e n t d ' a c ­
t i o n s de m a s s e .
d a n s l e Kr eml i n . L a r é v o l u t i o n é t a i t
bi en f i n i e ».
Il r e l i t a l o r s un l i v r e h a ï ' e t ou ­
b lié , « L e s m ém o i re s d'un révo lutio n­
n a i r e s de V i c t o r Serge, c e t t e v o i x
i s o l é e m a i s i n s i s t a n t e . L a p a r ti e
su r le s a n a r c h i s t e s f r a n ç a is lu i d o n ­
ne un n o u v e l e s p o i r . D e p u is lo r s ,
d i t - i l , «j ' a i e s s a y é , d a n s l a m e s u r e
Il y a a u s s i un a u t r e é lé m e n t qui
e n t re en j e u : «Je r e s s e n t s t r è s pro­
de m e s p o s s i b i l i t é s , et s a n s com­
p ro m i s , d e p r o p a g e r c e t t e a l t e r n a ­
t i v e s.
I l e s t d 'a c c o r d a v e c Serge s u r le
f a i t que le s a n a r c h is t e s f r a n ç a i s ,
b ie n que «t r a v e r s é s p a r d e s contrad i c t i o n s s é t a i e n t d e s ge ns qui,
a v a n t t o u t e c h o s e , e x i g e a i e n t une
c o h é r e n c e e n t r e le s p a r o le s et le s
a c t e s . C ' é t a i e n t , le p l u s sou ven t,
des i n d i v i d u s i s o l é s , s e n s i b l e s , qui
ne p o u v a ie n t se c o n t e n t e r d ' e r r e r de
m a n iè re c o n f u s e e t d é s o r i e n t é e dans
ce monde d é c o n c e r t a n t . C ' e s t po ur­
q u o i, f a c e à la c o n f u s io n e t au
d é s a r r o i, le u r r é a c t i o n f u t p r é c i s é ­
m e n t d ' a g i r , de r e f u s e r de s e s o u ­
m e ttre .
D e s c r i t i q u e s o n t d i t que c e r t a i ­
nes g r a v u r e s de C o s t a n t i n i mon­
t r a i e n t un am our du d é c o r a t i f s o u ­
v e n t t r a h i par u n e i m p r e s s io n de
s o litu d e
p ro c h e de la m o r b id i té .
C o s t a n t i n i a j.o u te : « A v a n t m on v o y a ­
ge en URSS, j ' é t a i s i n f l u e n c é par
l ’oeuvre d e K af k a. M e s d e s s i n s de
c e t t e péri od e s o n t introvertis. J e ne
v e u x ; p a s dire que m o n o eu v r e d ' a u ­
jourd'hui e s t extravertie, mais je
p e n s e a v o i r a t t e i n t u n e p l u s g r ande
o b j e c t i v i t é . K a f k a a g r a n d i d a n s Ravachol. Ce dernier p la c e s e s e x p lo ­
s i f s à l a p o rt e d e s e s p e r s é c u t e u r s .
A v e c K a f k a on r e s t e i s o l é , v u l n é r a ­
ble; a v e c R a v a c h o l n a î t l ' e s p r i t de
s o l i d a r i t é . Il a d é f i é l e s f o r c e s qui
n o u s défi ent/ ).
«En c e t e m p s - l à , d ' u n e p a r t j ' a i ­
m a i s K af k a, e t d ' a u t r e p a r t j ' é t a i s
co m m u n i st e à partir d'un c h oi x logi­
que, r a t i o n ne l , n o n s u b j e c t i f . J ' é ­
t a i s c o m m u n i s t e p a r c e que j e p e n ­
s a i s que l e c o m m u n i s m e é t a i t la
s e u l e so l u ti o n logiq ue et j u s t e pour
l ' h u m a n i t é . Q u e l q u e c h o s e qui p o u ­
vait
r e m p l a c e r l e m e n s o n g e du
c h r i s t i a n i s m e . Mon v o y a g e en U R S S
m ' a f a i t c o m p r e n d r e l ' é c h e c du s o ­
cialisme
aut o r i t ai r e .
A u j o u r d ’hui,
o b je ct iv em en t, je d é fe n d s le s o c i a ­
l i s m e l i be r t a i r e , m a i s p s y c h o l o g i ­
qu e me n t , j e s u i s a t t i r é p ar l ’anarc h o - i n d i v i d u a l i s m e . Mon i n d i v i d u a ­
l i s m e p r é c è d e m o n a n a r c h i s m e , il
e s t i n h é r e n t à ma p e r s o n n a l i t é . J e
n ' a i f a i t q u' un s e u l p a s en a v a n t :
je p e u x aujourd'hui an aly se r ma s o ­
l i t u d e . Mon c h o i x a c t u e l du s o c i a ­
lisme
libertaire
est pleinement
c o n s c i e n t ».
C o n t r e c e u x qui a m a lg a m e n t an a r c h i s t e s e t b a n d it s , C o s t a n t in i
a ffirm e :
«c e s g e n s - l à ("R avachol,
J a c o b , BonnotJ, m a l g r é l e s c o n s é - .
q u e n c e s m a l h e u r e u s e s d e l e u r s ac­
te s pour le mouvement, ont accom­
p l i q u e l q u e c h o s e . Il n ’y a v a i t p a s
d ' a u t r e c h o i x , à c e m o me n t - l à , il
f a l l a i t s e batt re. C ' é t a i t la guerre
de classe. L e s travailleurs étaient
t e l s d e s e s c l a v e s/ ) .
f o n d é m e n t la v i o l e n c e . J e s u i s t o u ­
j o u r s b o u l e v e r s é p a r c e s g e n s qui
on t do n n é leur vie pour d e s idées.
C ' e s t terrible pour moi de voi r tant
de g e n s lu tte r prop or tio nne ll em en t
au p o u v o i r qui s ' o p p o s e à eux/>.
D a n s l ' œ u v r e de C o s t a n t i n i , on
c o n s t a t e un c e r t a i n p a r a d o x e de
s t y l e . L e s p o r t r a i t s , le s v is a g e s
sont d e s s in é s d ire c te m e n t à p a rtir
de p h o t o g r a p h ie s , p a r f o is e x t r a i t e s
de s f i c h i e r s de la p o l i c e . C e t t e t o u ­
ch e de r é a l i s m e v a à c o n t r e - c o u r a n t
de la s i m p l i f i c a t i o n de l ' a c t e p h o t o ­
g r a p h iq u e . L e s p e r s o n n a g e s se re­
t r o u v e n t é t r a n g é m e n t f i x e s , le u r s
v is a g e s s o u v e n t to u rn é s d a n s des
d ire c tio n s
peu n a t u r e l l e s , comme
d i s t a n t s et o u b l i e u x de c e qui se
p a s s e a u t o u r d ' e u x . C ' e s t le t a b le a u
■ figé d 'u n é v é n e m e n t s p é c i f i q u e . Un
moment p r é s e r v é po ur le s p e c t a t e u r
e t qui lu i e s t p r é s e n té de fa ç o n dé ' c o n c e r t a n te .
A i n s i , le t r a v a i l d e C o s t a n t i n i
e s t à la f o is d o c u m e n t a ir e e t in n o ­
v a t e u r . Sa m a f t r is e t e c h n iq u e , sa
c o n n a is s a n c e du s u j e t s o n t é v i d e n ­
t e s et on ne p e ut qu e s a l u e r son t a ­
le n t e x c e p t io n n e l. L e la r g e é v e n t a i l
de son œ u v re d e v ie n t de p l u s en
p lu s f a m i l i e r , non s e u le m e n t a u x
a n a r c h is t e s , m ais a u s s i au x c r i t i ­
ques d ' a r t . C e l a d e v r a i t p e r m e ttre
une la rg e d i s c u s s i o n sur l ' a n a r c h i s ­
me e t un e m e i l l e u r e c o m p r é h e n s io n
des r é b e l l i o n s
h is to ire . ■
, o u r la m o r a l e b o u r g e o i se ,
e n g a g e r u n e guerr e n ' e s t
% P i p a s un crime, c ' e s t p r e s q u e
h o n o r a b l e. L ’é t h i q u e a n a r c h i s t e v o i t
en l a guerr e un cri me horrible. Il en
va de m ê m e p o u r l ' a c c u m u l a t i o n du
c a p i t al , e t c . . . A i n s i , le m ê m e act e,
p e u t être ou n o n c o n s i d é r é c o m m e
un cr i me s e l o n l a n o r m e d o n t on s e
s e r t p o u r l e juger. L e s c a m b r i o l a g e s
de b a n q u e s r é a l i s é s p a r Durrut i e t
Sabatèr n e s o n t pas, à mon avis,
d e s a c t e s c r i mi n e l s . L a b a n d e à
B o n n o t e s t un s y m b o l e . E l l e ma r q u e
l a f i n d e la p é r i o d e de l u t t e o u v e r t e ,
d e R a v a c h o l , e nt r e b o u r g e o i s i e e t
pro l ét a r i at , e t a n n o n c e c e l l e d e s
n é g o c i a t i o n s e t du c o n f o r m i s m e s y n ­
d i ca l .
L e s derniers irréductibles
f u r e n t i s o l é s du r e s t e du p ro l ét a r i at ,
et n 'eu re nt p l u s le c ho ix qu'entre
l ' i n t é g r a t i o n e t l a m o r t ».
qui o n t marqué son
B ill
N O W L IN .
P a r s o u c i du s u b j e c t i f , l ' i n t é r ê t
de C o s t a n t i n i se p o rte plus f a c i l e ­
ment v e r s le s a c t e s i n d i v i d u e l s que
43
JOURNEES LIB ERTAIRES
DE M O N T P E L L I E R
• On p e u t e s t i m e r à un
m i l l i e r le nombre de p e r s o n ­
n e s qui s o n t p a s s é e s , entre
l e s 22 e t 23 n o v e m b r e , à la
s a l l e d e s Arceaux, à l'o c­
c a s io n d e s journées liber­
t a i r e s de M o n t p e l li e r . L i e u
de
rencontre, d’ é c h a n g e s
d iv ers,
c e s j o u r n é e s ont
a u s s i été l'o c c a s io n de dé­
b a ts: « E c o lo g ie , écon o m ie
e t p e r s p e c t i v e s l i b e r t a ir e s» ,
«la p r e s s e lib e r t a ir e » , «l a
con tra cep tio n
m asculine»,
« l e t i ers-m o n d e» , e t c . Y ont
a s s i s t é l e s g r o u p e s e t pu­
b l i c a t i o n s s u i v a n t s ( s a u f ou­
b l i s ) : «C ourant Altern atif»
e t « A c i e r Inox» (O C L de P a ­
r i s e t L e Mans); « C i v i l i s a ­
tion
L i b e r t a i r e » , «Agora»,
« C . P . C . A . » , «Iztok», « I.R .L .»
« B a s ta » , « L a f e u i l l e d'A ix»,
« E sp oir» et «Courrier d e l ' é ­
d u c a t i o n lib erta ir e» ( C N T - f
de T o u lo u se et Lod ève);
« L e m o n d e lib e r t a ir e » ( F A
de Toulon); «Tout le P ou­
voir
au x T r a v a i l l e u r s » et
«Lutter» ( U T C L d e T o u l o u ­
se ); le C E R E L de C a rca ss o n n e ; le C e n t r o d e D o c u m entacion H isto rico -S o cia l
d e B a r c e l o n e , le C . I . R . A .
de M a r s e i l l e , d e s c o p a i n s
n éerla n d a is...
P a r a llè le m e n t, une s e ­
m aine de film s lib e r ta ir e s
é t a i t o r g a n i s é e du 19 au 25
n o v e m b r e ]Jar l ’A s s o c i a t i o n
d e D é b a t et E x p r e s s i o n L i ­
b erta ire.
Malgré d e s d é b a t s t r è s
s u p e r f i c i e l s (d o n t n o u s s o m ­
m e s t o u s c o u p a b l e s ) et d e s
l i e u x s e p rêta n t mal à c e
g e n r e d e réu n ion ( u n e s e u l e
grande s a l l e ) c e type de
r e n c o n t r e me s e m b l e t r è s
p ositif,
n e s e r a i t - c e que
pour l e s c o n t a c t s p e r s o n ­
n e l s e t l e s é c h a n g e s qu'il
p erm et , n e s e r a i t - c e a u s s i
q u e pour f i le r u n e p e t i t e
cla q u e d a n s la g u eu le de
c e t t e v i e i l l e p l a i e : le s e c ­
tarism e !
S.A .
F E T E DE «A B A T A L H A »
• En p r é s e n c e de p r è s de
10 00 p e r s o n n e s , l a f ê t e du
journal a n a r c h o - s y n d i c a l i s t e
«A B a ta lh a » s ' e s t d é r o u l é e
en p lu s ie u r s p a rties : m usi­
que p o p u l a i r e , ro ck , n e w
wave, chansons en gagées,
p o é s i e , t h é â t r e (un auteur
c l a s s i q u e p o r t u g a i s , M estr e
G il V ic e n t e , et une création
c o l l e c t i v e du T e a t r o Emarginato), et l e s interventions
d ’ E m i l i o su r l e jour nal et
de C a l a r a R o d a r t sur l e s
p r i s o n n i e r s au P o r t u g a l .
C O O R D I NA T I O N
DES L I B E R T A I R E S
DANS L ’ E D U C A T I O N
• L a C oordination d e s L i­
bertaires d a n s l'E d u cation
s ig n a le q u 'e lle diffère la
p a ru tion du n° 3 du «C an cre
. . . l a s ! » au m o i s de fév r ie r
1 98 1.
C e s e r a un numér o s p é ­
c i a l c o n s a c r é au «T ravail».
P ar a ille u r s , e l l e a une
n o u v e l l e a d r e s s e . P o u r tout
c o n ta ct, écrire à :
«Le C a n cre... la s!»
c / o L i b r a i r i e «Ch erche»
3 , rue Marx D orm oy
75018 P aris.
LIBER FORTI LIBERE
• Le
c a m a r a d e argen tin
L i b e r F o r t i , arrêté au s i è g e
d e l a C e n t r a l e O u vrière B o ­
l i v i e n n e l o r s du c o u p d ' E t a t
m i li t a i r e du 17 j u i l l e t der­
n i e r ( v o i r A gora n ° 3 ) , a é t é
l i b é r é à l a m i -o c t o b r e . Arri­
v é à P a r i s le 12 o c t o b r e , il
y a r e jo in t l e s c a m a r a d e s
d e la C o o r d i n a t i o n L i b e r t a i ­
re L a t i n o - A m é r i c a i n e pour
continuer la l u t t e , so u s
d'autres fo rm e s...
ANARS F L A M A N D S
• A B r u x e l l e s , une réunion
d ' a n a r c h i s t e s f la m a n d s av e c , pour l a B e l g i q u e , d e s
c a m a r a d e s de L o u v a i n , Bru­
x e l l e s , B r u g e s , Gand et An­
v e r s , e t pour l a H o l l a n d e ,
d e s cam arades de L a H aye,
A m s t e r d a m e t M iddelburg.
T h è m e s d e s d é b a t s : l'an arc h o s y n d i c a l i s m e , ia straté­
g i e d e s a u t o n o m e s , l e s pro­
b lè m e s d 'org a n isa tio n , le s
r e l a t i o n s en tre l i b e r t a i r e s .
On a d é c i d é de t e n i r p lu ­
s i e u r s r é u n i o n s par an, d ' é ­
c h a n g e r t r a c t s e t journaux,
e t d e t e n t e r d ' é d i t e r u n e re ­
vue
a n a r c h i s t e f lam an d e :
«P or ad o x».
RENCONTRE LIBERTAIRE
LATINO-AMERICAINE
• I n i t i a l e m e n t p rév u e pour
l e s 25 e t 26 o c t o b r e dern ier,
l a C o o r d i n a ti o n L i b e r t a i r e
L atino-A m éricaine (C L L A )
a re p o r t é e la ren c o n t r e aux
31 j a n v ie r e t 1° f é v r i e r 8 1 .
L a p r o p o s i t i o n d'ordre
du jour com p o rte : 1°) C om p ­
t e rendu d e s g r o u p e s et in­
d i v i d u s p r é s e n t s su r l e s a c ­
t iv it é s de so u tie n et l e s
c o n t a c t s é t a b l i s par c h a c u n
d ' e u x par rapport à l ' a c t u e l ­
le situ a tio n la tin o -a m érica i­
n e; 2°) P r o p o s i t i o n s d e c o ­
o r d in a tio n e t / ou c a m p a g n e s
d e s o u t i e n au x d é t e n u s et
r e c h e r c h é s d 'A m é r iq u e L a ­
t i n e ; 3°) U n e c o o r d i n a t io n
européenne e s t - e lle n é c e s ­
s a i r e ? S i o u i , su r q u e l l e s
b a s e s ? S i n o n , c o m m e n t am é lio r e r l ' a c t i v i t é que n o u s
m enons ?
P our tout co n ta ct :
C . L . L - A.
c / o C e r c le G arcia L orca
15, rue G r a c i e u s e
75005 P aris.
ABONNEZ-VOUS. AGORA
SEMINAIRE I N T E R N A ­
T I O N A L SUR L ’ U T O P I E
• A p r è s l e c o l l o q u e sur
l e s « N o u v e a u x P a tr o n s » qui
é t u d i a i t l a s t r u ctu re d e s
c l a s s e s dom in an tes a c tu e l­
l e s , e t c e l u i su r 1' « Auto­
g e s t i o n » où on t é t é d i s c u ­
t é s q u e l q u e s m o y e n s d'or­
g a n i s a t i o n d e l a s o c i é t é en
a n a r c h i e , l e «C en tro di Stu­
d i L ib erta ri» e t l e r é s e a u
« In terro ga tion s»
proposent
a u jo u rd 'h u i
une réflexion
sur 1' «U topie ».
L a forme p r o p o s é e d i f f è ­
re q u e l q u e p e u de c e l l e adoptée l e s a n n é e s p réc é­
d e n t e s . U n e q u i n z a i n e de
p erso n n es d ev a ien t envoyer
l e u r s t e x t e s a v a n t l a fin d é ­
c em b re 8 0 . Au p rin te m p s 8 1 ,
u ne rencontre serait organi­
s é e a v e c l e s a u te u r s . L e s
textes
et, éven tu ellem en t
le s résu ltats d es d is c u s ­
s io n s , feraien t l'o b jet d'une
p u b lic ation
u lté r i e u r e e n ,
au m o i n s , t r o i s l a n g u e s :
i t a l i e n , e s p a g n o l e t fran­
ç ais.
P o u r tout c o n t a c t :
«Cen tro di S tu d i Libertari»
v i a l e M o n za , 2 5 5
2 0 1 2 6 M ila n o.
GROUPE ANARCHISTE
DE B O R D E A U X
• Un n o u v e a u groupe lib e r ­
t a ire s ' e s t c o n s t i t u e à B o r­
d e a u x e t s e p r o p o s e d e réu ­
nir, e n d e h o r s d e t o u t e
organisation n a tion ale, le s
c a m a r a d e s d é c i d é s à mener
u n e a c t i o n o r i e n t é e par l e s
p r in cip es de l'a n a rch ie.
Il p ren d l e nom d e :
«G rou pe A n a r c h i s t e d e B o r ­
d eau x» e t s o n s i è g e e s t au :
7 , rue du Mu gu et
33000 Bordeaux.
Une
perm anence
sera
a s s u r é e le s a m e d i d e 14 à
18 h.
L e g ro u p e a é d i t é u n e
b ro ch u re su r l e sp o rt e t l a
p o l i t i q u e : « R é f l e x i o n s sur
l ' I n s t i t u t i o n Sport» que l ' o n
p e u t com m an d er à l a m êm e
a d r e s s e ( 1 2 F , port en s u s ) .
« GERMI NAL»
«CAHI ERS MAX N E T T L A U »
• Le
g ro u p e
anarchiste
d ' A m i e n s de la F A v i e n t d e
lan cer son «m ensuel de dé­
s i n t o x i c a t i o n s o c i a l e : Ger­
minal» qui c o n t i e n t d e s info s , d e s extraits de t e x te s
t h é o r i q u e s , u n e rubriq ue de
«Mémoire a n a r c h i s t e a m ién o i s e » e t b ie n d ' a u t r e s c h o ­
s e s en co re. Ils en sont déjà
au n° 2 (3 F r s c h a c u n ) e t on
p eu t l e s jo in d re à :
• D a n s le n° 1 d e c e «bul­
l e t i n d e r e c h e r c h e su r l a
t h é o r i e , l ' h i s t o i r e e t l a bi­
b l i o g r a p h i e du m o u v e m e n t
an arch iste
in te r n a tio n a l» :
b ila n d e la r e c h e r c h e u n i­
v e r s i t a i r e sur l ' a n a r c h i s m e ;
l a p r e s s e a n a r c h i s t e en 79;
des
sta tistiq u es récentes
sur l e m o u v e m e n t a n a r c h i s ­
t e en F r a n c e ; u n e a n a l y s e
du b u l l e t i n p u b l i é d e 6 6 à
6 8 par la c o m m i s s i o n d'or­
g a n i s a t i o n du C o n g r è s in­
ternational d e s F é d éra tio n s
A n a r c h i s t e s de Carrare; u n e
revue de p r e s s e .
G roupe A n a r c h i s t e d ' A m i e n s
B . P . n° 7
80338 Longueau.
« L ’ ABASAI RE»
P U B L I C A T I O N PAR
S O U S C R I P T I O N DES
E C R I T S DE M A K H N O
E T ARCHINOV
• Ayant entrepris d ep u is
u n e q u i n z a i n e d ' a n n é e s , un
t r a v a i l de c l a r i f i c a t i o n sur
l a r é v o l u t i o n r u s s e e t , en
p articu lier, sur l'œ u v r e d e s
lib erta ir es r u s s e s , A lex a n ­
dre S k ird a s e h e u r t e , d e p u i s
un c e r t a i n t e m p s , à d e s d if ­
f i c u l t é s pour en faire é d i t e r ,
d a n s de b o n n e s c o n d i t i o n s ,
le s résu ltats.
Il a d o n c d é c i d é , a v e c
l'a id e de q u e lq u e s am is,
d ' é d i t e r l u i -m ê m e c e s o u ­
v r a g e s e t s e r a i t h e u r e u x , vu
l e s r i s q u e s f i n a n c i e r s p er­
s o n n e ls, de constater le s
é c h o s c o n c r e t s que c e t t e
démarche peu t su s c ite r .
P o u r l ' i n s t a n t , l a paru­
t io n d e s d e u x o u v r a g e s s u i ­
v a n t s e s t p r é v u e pour l ' a n ­
n é e 19 81 :
□ «L es an arch istes
et
l'organisation». T e x t e de la
P la tefo rm e d ite d'A rchinov
et so n débat, a v e c d e s te x ­
t e s d ' A r c h i n o v , Makhno, Volin e,
M alatesta,
B e rn eri,
Id a Mett, Maria K o m , e t c . . .
D o s s i e r c o n s t i t u é et p r é s e n ­
t é par S k ir d a . Un o u v r a g e
d'environ 200 p a g e s. P rix
de s o u s c r ip tio n : 40 Frs (et
6 F r s de port en s u s s i v o u s
n e p ou v ez p a s s e r ret irer la
com m ande à la l i b r a i r i e
« L 'I n tr o u v a b le » , 2 rue R a y ­
mond du T e m p l e , 9 4 3 0 0 V i n cennes).
□ « N e s t o r M akhno, é c r i t s
p o l i t i q u e s » . T r a d u i t s et p r é ­
s e n t é s par S k ird a. Un o u ­
v r a g e d ' e n v i r o n 20 0 p a g e s .
P r i x de s o u s c r i p t i o n : id em .
E v e n t u e l l e s pu b lication s
u l t é r i e u r e s : « N e s t o r Makhno
m é m o ir e s»
(com p lets)
et
« P io t r A r c h i n o v : L a c o n t r e
r é v o l u t i o n b o l c h é v i q u e » , tra­
d u i t s et p r é s e n t é s par Skir­
da.
L e s règ lem en ts son t à
adresser à:
G u y M a lo u v ie r
4 , P a r c du Ch au ffou r
6 0 5 0 0 C h a n tilly
(m entionner, d a n s la co r r e s­
p o n d a n c e : s o u s c r i p t i o n Skir­
da).
« CAHI ERS DE L ' H E R E S I E
C ONT EMPORAI NE»
• P u b l i é par le grou p e an a r c h i s t e « S o l e i l Noir» d e
C a d i l l a c , l a s e c t i o n borde­
l a i s e d e « P . I . C .» e t l e grou­
pe com m uniste de c o n s e i l ,
l e n° 0 de c e n o u v e a u b u l l e ­
t in v i e n t de sortir pour pré­
s e n t e r s o n p ro j et.
P our tout c o n ta c t:
«Cahiers de l'h é r é s ie
co n t e m p o r a in e »
(J.T .)
B . P . 30
3 3 0 3 1-Bordeaux-M arne-Cédex
• «L e d estru cteu r» ( e n o c ­
c i t a n ) e s t le «journal d 'in ­
formation e t d e com b at d e s
co m m u n istes lib ertaires de
l'Aude». D a n s l e n° 1 d é j à
paru, on p eu t l i r e : P o l o g n e ,
d e s m ythes à la réalité; Bo­
l o g n e , m a s s a c r e d'E ta t; L i m oux, de l a m u s i c o t h é r a p i e
à la b ou ff o t h é r a p ie ; D e la
n é c e s s a i r e u n i té d e la c l a s ­
s e ouvrière...
Pour en voyer v o s lettre s
(et vos ch èq u es: c 'e st pas
p a r c e qu'y a p a s d e prix
marqué q u e . . . ) :
O .C .L .
B . P . 128
1 1000-C arcassonne-C édex.
A multiplication des opérations
policières à l'approche de la
sortie du numéro de rentrée
d'« Avis de recherche », n'a pourtant pas empêché celui-ci de paraître. Il est dès aujourd'hui en
vente dans les librairies parallèles
françaises et dans ies points de
vente militants habituels. Un « Avis
de recherche » nouvelle formule
avec 20 pages, de nouvelles rubriques. Un «Avis de recherche»
soutenu par un collectif de responsables de la publication, un collectif d'imprimerie et un collectif de
défense juridique.
L
Un a b o n n e m e n t f o r f a i t a i ­
re d e 5 0 ou 100 F r s v o u s
perm ettra , d ' u n e part d e l e
r e c e v o ir à d o m ic ile et, d'au­
tre part, d e r e c e v o i r , r e s p e c ­
t i v e m e n t , pour 7 2 ou 1 4 2 F r s
de p u b lic a tio n s.
R o l a n d B iard
B . P . 18
9 1 1 7 0 - V i r y C h atillon .
« ACT I ON
DIRECTE»
• L'U nion L o c a le de L ille
d e l a C N T é d i t e un b u l l e t i n
i n t i t u l é « A c t i o n D irecte» . Au
so m m a ire du n ° 4 que l'o n
p e u t s e p ro cu rer p o u r 5 F r s :
C h ro n iq u e A n t i m i l i t a r i s t e de
f é v r i e r à ao û t 80; F a i t s d i­
v e r s ; C a m p a g n e p our l ' a b o ­
lition d e s T P F A ; E lé m e n t s
sur l e « P a r tit o R a d i c a l e » . . .
U .L .-C .N .T .
c / o «P ot a u x r o s e s »
51, rue d e Gan d
59000 L ille .
Plus que jamais il faut I acheter,
le diffuser, le soutenir. Procurezvous du matériel d'information,
des posters de solidarité, des
brochures, des numéros d'« Avis
de recherche». Transmettez vos
commandes (chèques barrés non
libellés) aux diffuseurs militants,
dans les librairies-points de vente,
auprès des organisations libertaires, auprès des journaux anarchistes et antimilitaristes qui trans­
mettront. Renforcez les liaisonsréseaux. Gardez le contact. Nous
ne reculerons pas.
Ici ou ailleurs, à bientôt... »
E T SI V R A I M E N T LA
L U T T E DE CLASSE
EXISTAIT?
• D u b u r e a u c r a t e au cor­
beau,
du t e c h n o c r a t e au
g a r d e c h i o u r n e , du c h e f a i l lon au p a tro n, d e l ' é l u au
com m is
de
l'E tat,
c'est
l ' h e u r e b é n é f i q u e d e s e ré­
p art ir l e s p ro f its à ven ir.
D u r é f o r m is t e a f f i c h é au ré­
volu tion n aire
patenté,
en
p a s s a n t par l e r é a l i s t e re­
c o n n u , c h a c u n m a nie l e ver­
b e qui l e nourrit.
d a n s un u n ivers e n f i n d é ­
b a r r a s s é d e t o u s c e s ap p a­
r e i l s a u t o r i t a i r e s ( . . . ) p eu tê tre b ie n que c e jo ur-là l e s
m éd ias sa lu er o n t-ils la v e ­
nue de n o u v e lle s e s p è c e s
de fleu rs, d 'o is e a u x , d'a­
mour.
Edm ond ( T o u l o n ) .
LOUISE
ET,,,
MICHEL
NOUS,
(...)
A t t e n t i o n ! 1984 e s t d é j à
là. L e s tra v a ille ur s, et plu s
g é n é r a l e m e n t l e s o p p r im é s
o n t perdu d e v u e que « l ' é ­
m ancipation
d e s opprim és
s e r a l'œ u v r e d e s opprim és
eux-m êm es».
En P o l o g n e ,
l'ém anc ip ation d e s travail­
l e u r s e s t d é j à r é c u p é r é e par
l'ég lise
e t l a b a n q u e . Si
c e s d erniers n 'y parviennent
pas
en tièrem ent,
l'a rm ée
v eille.
En F r a n c e
les
m arins-pêcheurs
se
so n t
cassées
le s d e n ts après
l'in terv e n tio n de la R o y a leC R S. B âtim en ts d 'a ille ur s
fort b ie n e n t r e t e n u s par l e s
tra v a ille ur s,
s y n d i q u é s ou
p a s , qui n ' o n t p a s ju gé op ­
p ortun d e p r é v e n i r et d e s e
solid ariser
effectivem en t
avec
leurs
camarades
m a r i n s - p ê c h e u r s . P o u r Man u f r a n c e , a p r è s L i p et au­
t r e s, g r â c e à la co lla b o ra ­
t i o n é t r o i t e d e la m u n i c i p a ­
lité
de
gauche,
l'E tat
d ém o cra tiq u e
juge
utile
d ' e n v o y e r n o s d e n i e r s au
gouvernem ent p o lo n a is.
C e ne sont p a s l e s s l o ­
g a n s s t u p i d e s , i g n o b l e s , ou
l e s a f f i c h e s d é m a g o du P C F
e t d e l a C G T (pour n e par­
l er q u e d e s « r é v o l u t i o n n a i ­
res» , s t y l e « p r o d u i s o n s fran­
ç a i s » , c l a i r o n e t ch ar s o u s
co n trôle de l'E ta t, bien en ­
tendu!)
qui
au jo u rd 'h u i
m asqueront
l a f a i l l i t e du
m a r x i s m e et autre a u to r ita ­
rism e.
A u j o u r d 'h u i,
plus
que
j a m a i s , la l u t t e d e c l a s s e
e s t l ' a f f a i r e de c h a c u n d ' e n ­
tre n o u s , et non p a s l a pro­
p riété
des
syn d icats
ou
d ' a u t r e s qui ne d o i v e n t leur
e x i s t e n c e qu’à la c o e r c i t i o n
et l ' i g n o r a n c e .
(...)
Mais
peut-être
bien
qu'un
jour, l e s m é d i a s . . .
a p r è s la r é v o l u t i o n , s o c i a l e ,
46
• V o u s a v e z p u b li é d a n s
v o t r e d e r n ie r numéro un arti­
c l e d e P h i l i p p e L a m o t t e in­
t itu lé « L o u is e M ichel et l e s
a u tr es» qui c o n t e n a i t un ce r ­
t a in nombre d 'e r r e u r s g r o s ­
s i è r e s ou d e c o n t r e - v é r i t é s
m a n i f e s t e s q u 'il me parait
u t i l e —à titre d 'in fo rm a tio n —
d e r e c t i f i e r au m o i n s r a p id e ­
m en t p u i s q u e je s u i s d e
c e u x qui ont p a r t i c i p é au
C o l l o q u e sur L o u i s e M ic h e l,
à l ’e x p o s i t i o n qui lu i é t a i t
consacrée
e t que j ’é t a i s
p r é s e n t lors d e l 'in a u g u r a ­
t io n d ' u n e p l a q u e à s a mé­
moire.
J e d ira i d o n c s i m p l e m e n t :
1®) que l e s a r t i c l e s qui
ont é t é p u b l i é s d a n s l a p r e s ­
s e lo c a le à propos de c e s
m a n i f e s t a t i o n s n ’ é t a i e n t ni
« b é b è te s, ni hypocrites» et
que je l e s t i e n s à l a d i s p o ­
s it io n de c e u x qui v o u ­
d r a ie n t en prendre c o n n a i s ­
sance.
2°) que je n e s u i s p a s
c e « cert a in R .B .» qui a s i ­
g n é d e c e s i n i t i a l e s un arti­
c l e du P r o v e n ç a l , co m me
P h i l i p p e L a m o t t e ie l a i s s e
s u p p o s e r c e qui e s t d e s a
part pour le m o i n s m alhon ­
nête.
3°) C o n c e r n a n t l ' a p p o s i - .
t i o n d e la p la q u e co m m ém o ­
rative,
il e s t c u r i e u x de
c o n s t a t e r que l ' a u te u r d e
l ' a r t i c l e i g n o r e q u 'il y a eu
un c h a n g e m e n t de numér ota ­
t io n d a n s l a rue où e s t mor­
t e L o u i s e M i c h e l e t que
l ' H ô t e l d e l ' O a s i s , qui por­
t a i t l e n° 15, p orte aujour­
d ' h u i l e n° 19. Il p réfère
p e n s e r q u 'il y a e u «com­
plot» ( s i c ) d a n s « l e s h a u t e s
s p h è r e s m unicipales» (r e s ic )
p l u t ô t que d e s'in f o r m e r au
p réalab le...
Quant à l ' i n a u g u r a t i o n d e
c e t t e p l a q u e , e l l e a é t é fa i­
t e s a n s ‘d i s c o u r s o f f i c i e l s
p u i s q u e s e u l s ont é t é d é ­
c l a m é s d e u x p o è m e s à la
m ém o ire d e L o u i s e M ic h e l
( l 'u n d e H u g o , l ' a u tr e d e
V erlain e).
120
personnes
environ a s s i s t a i e n t à c e t t e
i n a u g u r a ti o n parmi l e s q u e l ­
l e s tren te à q uarante c o ­
p a in s (e sp a g n o ls, ita lien s,
f r a n ç a i s ) d o n t p l u s i e u r s de
l a C N T - E e t je n e v o i s p a s
au nom d e quoi on pourrait
l e leur rep roch er .
4°) L ' e x p o s i t i o n
sur
L o u i s e M i c h e l a d u rée tr o i s
sem ain es,
elle
réun issait
d e s d o c u m e n t s su r l a v i e ,
l ' œ u v r e e t la l é g e n d e qui
p r o v e n a i e n t du C IR A , de
l'Institut d 'H isto ire S o c ia le
d 'A m s t e r d a m , d e s A r c h i v e s
d é p a r t e m e n t a l e s d e la H a u t e
Marne, d e l a B i b l i o t h è q u e
Marguerite Durand ( P a r i s ) ,
d e la B i b l i o t h è q u e H i s t o r i ­
que d e l a v i l l e d e P a r i s , de
l'In stitu t F ra n ça is d 'H isto i­
re s o c i a l e e t d e d i v e r s e s
a r c h i v e s p r i v é e s . L e fait
que le Maire d e M a r s e i l l e
a c c o m p a g n é du gratin l o c a l ,
so it
allé
l 'in a u g u r e r lui
e n l è v e - t - i ' l de s a v a l e u r ?
J e c r o i s au con traire que la
p u b lic it é faite à c e t t e ex p o ­
s i t i o n a i n c i t é un c e r t a i n
n ombre d e m a r s e i l l a i s e t d e
m a r s e i l l a i s e s de to u te s con ­
d i t i o n s à v e n i r l a v o ir, et
p e r s o n n e l l e m e n t je m 'en ré­
j o u it ca r, c o n t r a i r e m e n t à
c e q u 'affirm e P h . L a m o t te ,
cette
e x p o s i t i o n retra ça it
f i d è l e m e n t l a v i e e t l'oeu vre
de L o u is e M ichel et e lle a
p u i s s a m m e n t c o n t rib u é à re­
m ettre l e s c h o s e s au point
pou r l e s m é m o i r e s d é f i c i e n ­
tes.
5°) Quant au c o l l o q u e , i l
a duré d e u x jo u r s. Il a eu
un c e r t a i n s u c c è s p u i s q u e
100 à 1 20 p e r s o n n e s on t a s ­
sisté
e n p e r m a n e n c e aux
c o m m u n i c a t i o n s e t aux d é ­
b a t s c e qui n ’e s t p a s mal
quand on s a i t en quoi c o n ­
s i s t e un c o l l o q u e u n i v e r s i ­
taire. L e s p articipants ve­
naien t d 'h orizon s d ifférents
b ie n e n t e n d u m a i s , à ma
co n n a issa n ce,
a u cu n
des
u n iversita ires
présents
n ' é t a i t c o n n u pour « sa q u er
s e s é t u d i a n t s » . M a is p eu têt re P h i l i p p e L a m o t t e , qui
s e r e f u s e à a v oir d e s rap­
p o r t s a v e c e u x ( c e qui e s t
son
droit) l e s c o n n a î t - i l
m i e u x que m o i? M a lh eu reu ­
s e m e n t , il n ' a p a s é t é d i s ­
c u t é au C o l l o q u e du «m es­
s i a n i s m e d e L o u i s e M ich el»
ni d e s o n h a g i o g r a p h i e co m ­
me le p rét e n d P h . L a m o t te
car l e s a u te u r s ont fa it d é ­
faut au d e r n i e r m omen t.
C ' e s t b i e n d o m m a g e pour
lu i qui n ' a a s s i s t é à a u cu n
m om ent au c o l l o q u e , n i par­
t i c i p é à a ucun d é b a t, c a r i l
d o n n e a i n s i une i d é e d e l a
valeur de s e s inform ations.
René
BIANCO.
les recettes de tatie cronstadt
MURS B E T O N N E S E T F R O ID S , S IL E N C E S
DEJA
R E P R E S S I F S . N O U S Y A IM O N S L E S
E C R I T U R E S A N O N Y M E S : DU C R I D E S C O E U R S
A U X C O L E R E S N O C T U R N E S ... MESSAGES A
TRANSMETTRE.
ON Y S O U H A I T E R A I T L A
C O U L E U R P A R C E Q U E NOS Y E U X Y V I V E N T .
L E S G R A F F IT I S S O N T L ’ A R T DU P E U P L E . . .
L E N O T R E . D O N N O N S L A P A R O L E A U X MURS!
R E A L IS A T IO N P R A T IQ U E D ’ U NE FR E S Q U E M U R A L E
1°) C h o i x du p r o j e t : d o i t ê t r e s im p le , f r a p p a n t, dé ­
c o r a t i f , l e t e x t e p e u t ê t r e in c l u s dans le d e s s in .
2°) P r e n d r e un grand c a r t o n as s e z r i g i d e qui s e r v i r a
de p o c h o ir ( 2 m X 2 m , par e x e m p le ).
3°) R e p r o d u i r e le d e s s in , p l u s
t e x t e , au c r a y o n sur le c a r to n .
sin
é v e n t u e lle m e n t
le
4°) A l ' a i d e d 'u n «cutter» d é c o u p e r le p r o f i l du d e s ­
e t le s l e t t r e s a f in qu e la r é a l i s a t i o n a p p a r a is s e .
5°) Il ne v o u s r e s t e p lu s q u 'à p la q u e r v o t r e p o c h o ir
s u r u n e s u r f a c e l i s s e ( é v i t e r le s c r é p is ) p u is , à l ' a i d e
de bom bes de d i f f é r e n t e s c o u le u r s , ou p e in tu r e s v i n y l i ques ou a c r y l i q u e s , p r o je te r ou p e in d r e s u r le p o c h o ir .
6°) L a j o i e qu e vo u s p ro c u re l ' a p p a r i t i o n de la f r e s ­
que ne d o i t pa s v o u s em p ê ch e r de v o u s m é f ie r de t o u t
v é h i c u l e a y a n t s u r son t o i t un e lu m iè r e b le u e c l i g n o ­
t a n te .
O r g a n i s a t i o n : é q u ip e de 4 à 6 p e r s o n n e s pour une
f r e s q u e de 2 m s u r 3. Si v o u s ê te s «pressés», p a rta g e z vo u s les t â c h e s : un e p e rs o n n e pa r c o u le u r ou pa r m o t if .
T o u t le monde d o i t t r a v a i l l e r en même te m p s . D e u x p e r ­
s o n n e s pour t e n i r le p o c h o ir e t la r é a l i s a t i o n prendra
m o in s de 3 m in u t e s .
A m i s a r t i s t e s , au t r a v a i l . C ' e s t f a c i l e , pas cher et
p a r fo is t rè s beau.
LA PAROLE DES MURS
Du 19 au 30 Janvier 1981 , à Paris, la Cour d’A ssises va
juger 11 libertaires, inculpés en 1974 , il y a sept ans On
les accuse de s'être trouvés à la périphérie des actions
anti-franquistes revendiquées par les «Groupes d’Action
Révolutionnaires
Internationalistes»
(G.A.R.I.)
qui
avaient pour but immédiat d'empêcher que le dernier
dictateur européen ne tue d’autres militants, après le
«garrotage» de l’anarchiste catalan SALVADOR PUIG
ANTICH.
Ce procès est «remarquable» à plus d'un titre :
- les inculpés sont en liberté depuis sept années, mais
devront connaitre à nouveau les prisons françaises.
- les inculpés espagnols, arrêtés en E spagn e sous le
règne de Franco , ont depuis lors été amnistiés par le
nouveau gouvernement espagnol.
- celui que l’on appelait «Franco la Muerte» est mort il
y a six ans et depuis le régime espagnol a changé, et avec
lui le contexte des relations internationales en Europe.
Dès lors la tentation peut être grande pour la Justice
de discourir sur les années 1980 , alors que la page d’his­
toire sanglante que le ministère public réouvre est celle
des années 1974 - 1975 :
- ce que furent les crim es politiques commis par ie
Caudillo èn 1974 et en 1975
- les prises de position, les mobilisations qui montrent
la sensibilité générale face à la situation que subis­
saient les opposants au régime franquiste, en Espagne.
- les positions spécifiques qui furent celles des
«G.A.R.I.» à ce moment-là, leurs actions et leurs revendi­
cations.
«MORALE»
Qu’on le veuille ou pas, c'est dans cette lumière
que baigne ce qu'il est convenu d’appeler «l’affaire Suarez», du nom du directeur de la Banque de Bilbao retenu
par les libertaires du 3 au 22 Mai 1974 . Il est enfin bon de
rappeler, pour la «morale politique» de cette lutte qu’on
peut constater qu’aucune peine de mort ne fut pronon­
cée contre les militants du «MIL» (Movimiento Iberico de
Liberacion) et du FRAP (Front Révolutionnaire d’Action
Patriotique) qui devaient passer devant les Tribunaux
militaires. Ce ne fut pas le cas, hélas, un an après. La
«morale politique», si elle est pour l’accusation, qu’un
homme -confortablement installé dans le «ron ron» des
rouages de l’Etat totalitaire- fut retenu 19 jours loin des
siens, elle est pour tous les anti-franquistes que cette
action des «GARI» contribua à ce que des prisonniers
soient libérés et que des vies hum aines soient épar­
gnées