Mise en page 1 - Conseil Général de l`Aude
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le tocsin 2007 N°8 20/06/07 9:33 Page 1 La lettre de la Mission audoise pour la célébration de 1907 Conseil Général de l’Aude Edito JUIN 2007 N°9 Vignerons en révolte De la parole aux actes… uin 1907. Après avoir, durant trois mois, réclamé en vain l’aide du gouvernement de la République, 800 000 manifestants, venus de tous les départements du Midi viticole, se retrouvent à Montpellier, pour, dans un dernier meeting, crier leur misère et leur déception. Le 10 juin, les municipalités envoient leur démission et la grève de l’impôt est proclamée. J uin 1907. Le gouvernement se refuse à toute conciliation et fait arrêter les leaders du mouvement viticole, provoquant l’indignation de la population et des mouvements hostiles. Les 19 et 20 juin, le sang coule à Narbonne ; les soldats tirent sur la foule, faisant six victimes civiles. J uin 1907. Une première loi contre la fraude est votée, donnant un début de satisfaction aux vignerons. C’est une étape importante dans l’intervention de l’Etat pour réguler l’économie de marché dans le domaine agricole. J uin 2007. L’Aude n’a pas oublié et le Département a souhaité faire de ce dernier mois du printemps un moment fort de la célébration du centenaire de 1907. Soyez nombreux au rendez-vous. J Marcel Rainaud, Sénateur de l'Aude, Président du Conseil Général e 10 juin 1907, au lendemain du meeting de Montpellier, le Comité d’Argeliers invite les «fédérés» à ne plus payer l’impôt direct et toutes les municipalités à adresser dans les trois jours, par lettre recommandée, au préfet de leur département, une démission collective. C’est l’entrée dans la désobéissance civile, revendiquée et assumée délibérément par les élus méridionaux qui lancent ainsi un véritable défi au gouvernement. e même jour, dans la soirée, le conseil municipal de Narbonne démissionne au cours d’une séance extraordinaire suivie d’une cérémonie publique dont le déroulement a été soigneusement orchestré par Ernest Ferroul et qui n’est pas sans rappeler dans sa dramaturgie la proclamation de la Commune de Narbonne faite au même endroit trente-six L L ans plus tôt par Emile Digeon. Sur la place de l’hôtel de ville se presse une foule considérable, appelée là depuis la fin de l’aprèsmidi au son lugubre du tocsin qui résonne dans toute la ville. Après une courte délibération, le maire démissionnaire apparaît au balcon et prononce un discours solennel dénonçant la politique gouvernementale et le peu d’intérêt témoigné par les députés à la crise viticole : «La Chambre ayant résolu de s’occuper, aux séances spéciales du matin, de notre malheureuse viticulture réunissait à peine 25 députés, et cela à deux jours de l’échéance de l’ultimatum». Dans une ultime envolée lyrique, il abandonne ses pouvoirs entre les mains de ses administrés : «Citoyens, citoyennes, tenant notre pouvoir de vous, nous vous le rendons. Vous redevenez les maîtres. Nous brisons avec ceux dont nous étions les collaborateurs, avec les agents du pouvoir central et avec lui. Nous rentrons dans vos rangs. Nous y continuerons la lutte pour la justice et pour la vie, pour notre droit et notre pain, avec toutes nos énergies inlassables. Le conseil municipal quitte l’hôtel de ville. La grève municipale commence. Demain elle s’étendra dans les quatre départements fédérés, et plus loin peut-être. Nous ne rentrerons ici que sur les ordres du peuple». Aussitôt après, un huissier descend le drapeau tricolore, remplacé en signe de deuil par un voile de crêpe noir. Puis la foule entame un défilé à travers la ville, pour lequel on a ressorti une fois encore drapeaux et pancartes. Démission d’Ernest Ferroul à Narbonne, extrait de Le Petit Parisien, 30 juin 1907 (A. D. Aude, 15 Dv 14/31) le tocsin 2007 N°8 20/06/07 9:33 Page 2 N'OUBLIEZ PAS 28-30 juin 2007 Colloque international à Carcassonne « L’Aude et la vigne, cent ans de passion » Inscription obligatoire auprès des Archives départementales de l’Aude ([email protected]) 29 juin 2007, 18 h Inauguration de l’exposition « Vignerons en révolte, 1907 dans l’Aude » présentée par les Archives départementales de l’Aude à Carcassonne, Maison des Mémoires, 53 rue de Verdun (du mardi au samedi de 9h à 12h et de 14h à 18h) Edité par le Conseil général de l’Aude Centre administratif départemental 11855 Carcassonne cedex 9 Directeur de la publication : André Viola Rédaction : Archives départementales de l’Aude 41 avenue Claude Bernard 11855 Carcassonne cedex 9 Responsable de la rédaction : Sylvie Caucanas Photographies : A. Estieu, A. Fernandez (Archives départementales) Tirage : 3000 exemplaires, publication gratuite Compogravure : Imprimerie de Bourg (Narbonne) Imprimeur : Maraval imprimeurs S.A. (Saint-Pons) n deux ou trois jours, l’injonction du Comité d’Argeliers est suivie massivement et c’est une véritable marée de lettres de démission qui arrive sur le bureau des préfets des départements concernés. Intense au début, le flot des municipalités démissionnaires s’étale néanmoins sur plusieurs semaines. Au total, à la fin du mois de juin, la géographie des démissions indique clairement que le mouvement a touché prioritairement les départements de l’Hérault et de l’Aude. 258 municipalités héraultaises ont démissionné (soit 76 % du total) tandis que, dans l’Aude, ce pourcentage se monte à plus de 60 % (sur un total de 439 communes, 266 conseils municipaux ont démissionné en entier et 14 en partie). Dans le département des PyrénéesOrientales, cette proportion tombe en dessous de la moitié (44 %), alors que le département du Gard, pourtant largement viticole, ne compte que 24 démissions (7 %). Une telle répartition s’explique bien évidemment par la diversité géographique régionale. Dans leur ensemble, les zones non viticoles comme le Lauragais, la montagne catalane ou les Cévennes n’ont pas suivi le mouvement. Mais elle peut aussi être le résultat de discordances politiques comme dans les communes viticoles du Gard où les socialistes locaux sont très réticents. Des conseillers généraux et des conseillers d’arrondissement envoient également leur démission au préfet de l’Aude afin de marquer leur solidarité avec leurs électeurs. Les lettres de démission ont un contenu assez similaire. Elles sont généralement assez brèves mais, dans l’ensemble, font état des raisons qui ont motivé la démission (permanence des fraudes, inefficacité du Parlement qui n’a voté aucune mesure susceptible d’enrayer la fraude, indifférence de celui-ci à la misère du Midi). La plupart proclament leur attachement à la République et à ses valeurs. Dans les communes où les maires se montrent récalcitrants, les membres des comités de défense viticole n’hésitent pas à augmenter leurs pressions. E l’exemple de Narbonne, la démission des édiles municipaux s’accompagne, dans nombre de communes, de tout un cérémonial symbolique. Les annonces sont faites le plus souvent au son du tambour et du clairon et généralement suivies d’un défilé avec pancartes, bannières et drapeaux. A Tourouzelle, le drapeau tricolore qui flottait à la façade de la mairie est remplacé par un drapeau noir tandis que sonne le tocsin. A Castelnau-d’Aude, l’écharpe A -2- municipale et le sceau de la mairie sont enfermés dans l’urne électorale qui est scellée en présence de tous les spectateurs. A Capendu, les clés de la mairie sont envoyées à la préfecture sous pli recommandé. Dans cette dernière commune, comme à Villegly, à Villesèquedes-Corbières, à Fabrezan ou à Porteldes-Corbières, les écharpes tricolores des maires sont brûlées solennellement sur la place publique. Enfin, les portes des mairies sont murées à Sigean, à Portel et à Fraisse-des-Corbières où la cloison de plâtre entourée d’un bandeau noir est ornée de l’inscription suivante, offerte à tous : «Ici, tout le monde impôt paiera quand vin naturel se vendra et la mairie se rouvrira». ien entendu, la suspension de toute activité municipale dans les communes démissionnaires ne va pas sans avoir de sérieuses répercussions sur la vie administrative et quotidienne. Le fonctionnement des justices de paix cantonales, installées le plus souvent dans les mairies ou dans des locaux annexes, est parfois notablement perturbé. Toutefois, c’est bien sûr la non tenue des registres d’état civil qui crée les principaux conflits. Le procureur de la République de Narbonne résume ainsi, de façon quelque peu excessive, les «effets pervers» de cet arrêt dans le fonctionnement des institutions communales : «on naît, on meurt, sans que soient faites les déclarations prescrites par la loi, ce qui très certainement nécessitera une foule de jugements rectificatifs. Quant aux futurs mariés, ils sont réduits à vivre dans une sorte de concubinage forcé, ne pouvant régulièrement faire célébrer leur mariage par un officier de l’état civil ». B Pas de revenus ! Pas d’impôts ! ontrairement à la démission des municipalités, la grève de l’impôt décrétée également par le Comité d’Argeliers ne peut être suivie d’un effet immédiat. Pourtant, dans la réalité, le mouvement de contestation fiscale n’a pas attendu le mot d’ordre de 1907 pour surgir et il est déjà bien présent depuis 1905 au cœur des difficultés économiques du Midi viticole. De tous les côtés, inlassablement, les élus des départements concernés attirent constamment l’attention de l’administration sur la grave situation des contribuables méridionaux et tentent d’obtenir pour eux des allègements ou des dégrèvements d’impôts. C le tocsin 2007 N°8 20/06/07 9:33 Page 3 es exigences fiscales de l’administration sont devenues insupportables pour des populations dont l’existence s’est considérablement fragilisée. Les saisies, effectuées par des huissiers aux domiciles des contribuables endettés, ne sont plus tolérées par les villageois qui décident de s’y opposer physiquement. A l’entrée du village de Saint-Jean-de-Barrou, sur le mur de la maison appartenant à Joseph Mieille immortalisée par la carte postale, figure ainsi cet avertissement adressé aux visiteurs indésirables : «Percepteurs, huissiers, garnisaires, demi-tour !» (garnisaires : gardien judiciaire établi chez un particulier saisi ou un débiteur du fisc). Sur les premières maisons d’Embres, c’est l’inscription : «Percepteur, huissier et Cie au large !» qui accueille le visiteur. Le 25 avril 1907, à Coursan, une foule hostile d’environ 1500 personnes s’oppose aux saisies de mobilier qui doivent être opérées chez quatre propriétaires de la commune pour défaut de paiement d’impositions. L lus difficile à apprécier globalement que la démission des municipalités, la grève de l’impôt n’en réussit pas moins à perturber également le fonctionnement administratif des départements méridionaux. Elle est desti- P née, elle aussi, à susciter l’inquiétude du gouvernement qui peut alors craindre un important manque à gagner dans ses recettes fiscales. Elle cherche aussi, avant tout, à attirer l’attention des gouvernants, comme le signale avec humour une complainte diffusée alors et intitulée Le Noël du Midi ou La grève des contribuables, chantée sur l’air de La Nouvelle Marseillaise et œuvre d’un certain L. Armand : «Ils se moquent de ta misère Et de tes râles d’agonie De Bercy ils sont actionnaires Ces bons Messieurs que tu supplies Refuse de payer la dîme A tous ceux qui vivent de toi, Travailleurs, soyons unanimes, Appliquons la suprême loi.» Les douze degrés de patience ou moments d’une révolte Lecture à deux voix par la Compagnie théâtrale « Les Frocs du Ciel » (interprètes : Guilaine Maucorps et Claude Gau) avec la participation de la chorale « Le Chiffon Rouge » (Martine Vidal, chef de chœur) Nouvelle représentation aux Archives départementales de l’Aude le 25 juin 2007 à 21 h. Entrée gratuite, inscription obligatoire ([email protected]). Pour découvrir le mouvement viticole sous un jour nouveau, au travers de chants créés pour soutenir la révolte et de documents authentiques (rapports du corps préfectoral et des officiers militaires, articles de presse, discours et témoignages des acteurs de la révolte, correspondance privée…). Venez nombreux. Refrain : «Tu t’éveilles, tu t’éveilles, Paysan crie à ces suppôts : Je ne veux plus payer l’impôt, Tu leur feras dresser l’oreille.» ace à la désobéissance civile et à la désorganisation administrative, le président du Conseil Georges Clemenceau adresse, le 14 juin 1907, une lettre circulaire aux maires démissionnaires leur demandant de revenir sur leur décision. Après avoir longuement développé les arguments qu’il juge de susceptibles c o nv a i n c r e , Clemenceau termine sa lettre par la menace. Face à un mouvement qui franchirait les limites de l’inacceptable, il sera intransigeant et sans faiblesse : « quoi qu’il arrive, force restera à la Loi ». F A suivre… Pancarte de Lauraguel (Mairie de Lauraguel ; A. D. Aude, 15 Dv 18/1) -3- Le film « 1907 La révolte des gueux » nominé au festival international Oenovidéo à Sierre (Suisse) Récit de Rémy Pech, historien et écrivain ; participation de Claude Marti. Vous pouvez vous procurer ce DVD conçu par Georges Chaluleau et réalisé par Jean-Paul Therby au prix de 20€ (Contact Image, 7 promenade des Platanes, 11 580 Alet-les-Bains) A voir Oc 1907, le spectacle original, créé à la demande du Conseil général de l’Aude par le Groupe Oc ([email protected]) 19 juin à Narbonne, Les Barques, 21h30 23 juin à Narbonne-Plage, Front de mer, 21h30 29 juin à Douzens, théâtre, 21h30 7 juillet à Malpas, amphithéâtre, 21h30 10 juillet à Tourbes (34), parc, 21h30 12 juillet à Gruissan, forum, 21h30 14 juillet à Béziers (34), allées Paul Riquet, 21h 18 juillet à Nébian (34), remparts, 21h30 20 juillet à Tuchan, 21h30 21 juillet à Mazamet (81), parc, 21h 24 juillet à Montséret, place, 21h30 3 août à Camplong-d’Aude, 20h 4 août à Ouveillan (Fontcalvy), grange cistercienne, 21h 9 au 18 août, Cité de Carcassonne, grand théâtre, 21h 29 septembre, Cessenon (34), 21h 7 octobre, Portel-des-Corbières, Terra Vinea, 18h le tocsin 2007 N°8 20/06/07 9:33 Page 4 La révolte viticole de 1907 à l’honneur dans les médias Les 6, 12, 18 et 23 juin, la chaîne de télévision L’Histoire diffuse le film 1907 la révolte vigneronne, réalisé par Michel Gayraud et produit par Mille et une production. Auparavant, au début du mois de mai, sur l’invitation de la même chaîne, M. André Viola, vice-président du Conseil général de l’Aude, et M. Jules Maurin, professeur émérite à l’Université de Montpellier, ont évoqué, dans le journal de l’Histoire, l’importance de la révolte viticole de 1907, M. Maurin insistant plus particulièrement sur l’aspect historique tandis que M. Viola mettait en évidence la dimension identitaire de la viticulture dans le Languedoc et le Roussillon. Le 1er juin, Rémy Pech, invité de l’émission « 2000 ans d’histoire », animée par Patrice Gélinet sur France Inter, évoquait le mouvement viticole avec toute la rigueur historique et la passion qu’on lui connaît. Des extraits de « Ces grappes de ma vigne » et des chansons de Claude Marti venaient illustrer son propos. Dernières parutions à découvrir 1907 La longue marche des vignerons du Midi Scénario de Claude Ecken et dessin de Benoît Lacou Le 24 mai au Conseil général, les jeunes nous parlaient de 1907 Une bande dessinée de qualité, reposant sur une solide connaissance des faits historiques et de leur iconographie. Patrimoines, vallées des Cabardès Dans la dynamique de la commémoration officielle des événements viticoles de 1907, plusieurs établissements scolaires audois ont abordé ce thème dans le cadre du volet culturel de leur projet d’établissement. Le 24 mai, en présence de M. Michel Moreau, Inspecteur d’Académie, et de M. Marc Deblonde, conseiller général, les élèves de treize collèges et lycées faisaient découvrir au grand public le résultat des travaux qu’ils avaient menés au cours de l’année dans le cadre d’ateliers pédagogiques pluridisciplinaires. Tous purent apprécier la qualité des réalisations et leur diversité. Expositions (oeuvres artistiques réalisées à partir de pancartes de 1907, travaux en occitan sur les slogans, etc.), diaporamas, productions littéraires et théâtrales, chansons, tous les travaux présentés témoignaient de l’enthousiasme et de la créativité de ces jeunes gens et du fort investissement des équipes pédagogiques qui les encadraient. Une exposition de la Bibliothèque départementale de l’Aude pour la jeunesse Les 25-28 mai derniers, dans la cadre de la manifestation Promaude qui se tenait à Lézignan-Corbières, était présentée au grand public l’exposition réalisée par la Bibliothèque départementale de l’Aude : 1907, la révolte des vignerons. Une histoire illustrée pour la jeunesse. Cette exposition, dont les illustrations et la maquette ont été réalisées par «Caféine», met à la portée des plus jeunes, sous une forme attrayante, l’histoire complexe d’un mouvement qui marqua profondément de son empreinte notre pays. Prêt gratuit. Renseignements : [email protected] -4- Le premier numéro de la revue d’une toute nouvelle association qui veut faire connaître les richesses patrimoniales d’un pays et qui consacre pas moins de 4 articles aux événements de 1907 sur ce territoire. Avis aux philatélistes et collectionneurs Le vendredi 29 juin, de 9h à 12h, à l’occasion du colloque international « L’Aude et la vigne cent ans de passion », La Poste tiendra un stand au Conseil général (plateau de Grazailles). Vous pourrez vous y procurer, si vous ne l’avez pas déjà fait, la série de prêts à poster spécialement édités à l’occasion du centenaire des événements de 1907.