Consommation de viande et risque de cancer

Transcription

Consommation de viande et risque de cancer
Consommation de viande et risque
de cancer
Revue de la bibliographie
pour le CIV
Septembre 2010
Mise à jour Août 2011
OCNH (Cyrille Costa)
Sommaire
I.
Contexte ............................................................................................................................. 3
II.
Consommation de viande et risque de cancer : .............................................................. 5
A.
Ce que nous enseignent les études ................................................................................. 5
B.
Viandes et risque de cancer colorectal............................................................................. 7
1. Un risque relatif peu élevé et pas toujours significatif ................................................... 7
2. Des données significatives qui masquent des facteurs de confusion ......................... 13
3. L’absence d’une relation de type dose-réponse ......................................................... 17
4. Une grande variabilité homme/femme et suivant le site de la tumeur (rectum / colon
proximal / colon distal) ....................................................................................................... 17
5. Quantités consommées : une triple problématique..................................................... 18
C.
Viandes et risque d’autres cancers ................................................................................ 19
III.
Hypothèses mécanistiques de l’action des viandes sur le risque de cancer .......... 19
A.
Le contenu en graisses .................................................................................................. 20
B.
Les méthodes de cuisson .............................................................................................. 20
C.
Les composés nitrosés .................................................................................................. 22
D.
Le fer héminique ............................................................................................................ 22
IV.
Conclusion ................................................................................................................... 23
V.
Références bibliographiques .......................................................................................... 24
Annexes ................................................................................................................................... 33
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I.
Contexte
Le cancer est une maladie chronique multifactorielle. Les facteurs de risque les plus évoqués
sont ceux liés à l’environnement (produits toxiques, pratiques professionnelles, rayonnement
solaire), à la génétique, aux hormones et à des comportements individuels. Parmi ces derniers,
figurent la consommation d’alcool, le tabagisme, la sédentarité et les habitudes alimentaires.
L’identification des habitudes alimentaires ou du rôle des facteurs nutritionnels susceptibles
d’intervenir sur le risque de cancer ont fait l’objet de nombreux travaux depuis près de 40 ans.
Une expertise collective internationale de grande envergure a été mise en place pour analyser
l’ensemble de ces données. Cette expertise, coordonnée par le World Cancer Research Fund
(WCRF) en collaboration avec l’American Institute for Cancer Research (AICR), a publié en
1997 un premier rapport intitulé « Alimentation, Nutrition, Activité Physique et Prévention du
Cancer : une Perspective Mondiale ». En 2007, le WCRF et l’AICR ont publié une mise à jour de
ce rapport prenant en compte l’évolution des connaissances. Ce document officiel repose sur
des revues systématiques et des méta-analyses réalisées à partir de 7 000 articles scientifiques
publiées jusqu’en 2005 et qui ont été soumises à l’évaluation d’un panel de 21 experts
internationaux. Les relations entre de nombreux facteurs alimentaires et de style de vie et 17
types de cancers ont été analysées.
Dans le chapitre consacré à la viande, volaille, poisson et œufs, le panel d’experts émet les
conclusions suivantes :
- « La viande rouge est considérée comme une cause « convaincante » du cancer
colorectal ». Entre 1997 et 2007, la relation statistique entre la viande rouge et le cancer
colorectal est passée du statut de « probable » à celui de « convaincant ». Une métaanalyse des 16 études de cohortes qu’ils ont prises en compte indique un risque relatif 1
(RR) d’avoir un cancer colorectal attribué à la consommation de viande rouge de 1.43
(IC 1.05-1.94) par nombre de consommations/semaine et de 1.29 (IC 95 % 1.04 -1.60)
par 100 g consommé /jour.
- « Les preuves suggérant que la viande rouge est une cause de cancer de l’œsophage,
du poumon, du pancréas et de l’endomètre sont limitées ».
- Les preuves sont également limitées concernant l’implication de la viande rouge dans le
risque de développer d’autres types de cancers
Pour autant, le rapport ne suggère pas d’exclure la viande rouge de l’alimentation. Il
recommande aux individus de limiter leur consommation à moins de 500 g de viande rouge par
semaine, dont une part minime ou nulle de charcuterie.
Cette partie du rapport ne fait pas consensus au sein de la communauté scientifique. Certains
chercheurs s’interrogent sur le choix des études incluses (méthodologie floue, éléments
1
Rapport entre l’incidence d’une maladie chez des sujets exposés à un facteur de risque et l’incidence de cette même
maladie chez des sujets non exposés. Une valeur supérieure à 1 indique une augmentation du risque tandis qu’une
valeur inférieure à 1 correspond à une diminution du risque. Exemple : un risque relatif de 1,28 indique une
augmentation du risque de développer un cancer de 28 % chez des gros consommateurs par rapport à de petits
consommateurs de viande.
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confondants, ...), sur le nombre insuffisant d’études significatives servant au calcul des risques,
sur la grande variabilité parmi les études en terme de nombre de sujet, de durée de suivi ou
encore de produits carnés considérés. Ils remettent en question les conclusions du rapport à
l’image de l’Australien Truswell AS qui note un certain nombre d’erreurs et d’omissions dans
celui-ci.
Depuis 2005, 222 études ont été publiées sur l’association viande et cancer parmi lesquelles
des études de grande envergure et des méta-analyses dont on ne peut, aujourd’hui, ignorer les
résultats.
Fin 2010, une équipe d’experts du WCRF situés à l’Imperial College of London, a publié une
mise à jour des données du rapport de 2007 concernant le cancer colorectal (WCRF/AICR
Systematic Literature Review - Continuous Update Project Report). 263 nouvelles publications
ont été intégrées. Concernant les « viandes rouges et produits dérivés », les données de 10
nouvelles études ont été ajoutées aux 14 études analysées dans le rapport de 2007.
Le risque relatif de cancer colorectal lié à chaque 100g supplémentaire de « viande rouge et
produits dérivés » a été réévalué à :
- 1.17 (IC95 % : 1.05-1.31, p=0.48, 8 études), et l’analyse stratifiée selon le sexe indique un
risque relatif de 1.28 pour les hommes (0.49-3.35, p=0.09, 2 études) et de 1.05 pour les femmes
(0.78-1.42, p=0.28, 3 études)
- 1.12 pour le cancer du colon (IC95 % : 0.97-1.29, p=0.89, 9 études), et l’analyse stratifiée
selon le sexe indique un risque relatif de cancer de 1.06 pour les hommes (0.75-1.50, p=0.977,
2 études) et de 1.00 pour les femmes (0.72-1.38, p=0.6, 4 études)
- 1.18 pour le cancer rectal (IC95 % : 0.98-1.42, p=0.67, 7 études), pas d’analyse stratifiée
selon le sexe.
Concernant les viandes rouges seules, 6 nouvelles études de cohorte ont été intégrées (Butler
et al, 2008 ; Lee et al, 2009 ; Sorensen M et al, 2008 ; Cross AJ et al, 2010 ; Oba S et al, 2006 ;
Nothlings U et al, 2009). La méta-analyse dose-réponse a pu être mises à jour avec l’inclusion
de 2 nouvelles études (Lee et al, 2009 ; Nothlings et al, 2009). Comme la définition de la viande
rouge varie suivant les études (viande rouge fraiche, viande rouge ou combinaison de bœuf,
porc et agneau), les experts ont exclu 3 études ne fournissant pas de détail sur la définition de la
viande rouge (Jarvinen R et al., 2001 ; Lee SA et al., 2009 ; Nothlings U et al., 2009).
L’analyse finale sur le risque de cancer colorectal porte donc sur 12 études de cohorte. Huit
d’entre elles rapportent une augmentation du risque entre les apports les plus élevés et ceux les
plus faibles de viande rouge, dont une est à la limite de la significativité. Deux études rapportent
l’absence d’association et deux autres observent une association inverse mais non
statistiquement significative.
Le risque relatif associé à la consommation de 100 g/ jour supplémentaire de viande rouge
seule a été estimé à :
- 1.21 (IC95 % : 1.06-1.37) pour le cancer colorectal
- 1.12 (0.97-1.31) pour le cancer du colon
- 1.20 (0.99-1.47) pour le cancer rectal.
Comme les analyses du rapport de 2007 combinaient des études sur le cancer colorectal et sur
le cancer du colon et étaient séparées selon les unités de mesures considérées (grammes ou
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fréquence/jour), les auteurs de cette mise à jour ne peuvent pas comparer leurs nouvelles
données à celles de 2007.
L’objet de ce document est de faire le point sur la relation entre la consommation de viande et le
risque de cancer en reprenant les données disponibles jusqu’à fin 2010 sur le sujet.
II.
Consommation de viande et risque de cancer :
Au fil des années, les chercheurs ont travaillé sur une grande quantité d’études de types
différents : études écologiques, études de cohorte, études cas-témoins, essais de prévention,
essais contrôlés randomisés, méta-analyse. Aucune d’entre elle ne peut à elle seule fournir
l’ensemble des informations sur le lien complexe existant entre un facteur de risque et une
pathologie. C’est pourquoi connaître la définition de chaque étude, leurs points forts et leurs
limites peut permettre de mieux évaluer la signification de leurs résultats pour avoir une vision
exhaustive du sujet.
A. Ce que nous enseignent les études
Les études examinant l’association entre l’alimentation et le risque de cancer sont, pour
l’essentiel, des études épidémiologiques. Celles-ci procèdent à l’observation de groupes de
personnes sur une période donnée et établissent une corrélation entre leurs caractéristiques
alimentaires et leur risque de cancer.
Il existe trois grandes catégories d’études épidémiologiques : les études transversales, les
études prospectives de cohorte et les études cas-témoins. A celles-ci s’ajoutent des études
d’intervention de deux types, les essais de prévention et les essais contrôlés, dont la
méthodologie n’est pas toujours adaptée à l’étude de la relation entre facteur nutritionnel et
risque de cancer pour des raisons éthiques ou de difficulté de mise en place.
-
-
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Les études transversales analysent la corrélation entre la fréquence d’un cancer dans
diverses populations et, par exemple, les apports alimentaires de ces populations. Elles
ont révélé, par exemple, qu’une communauté asiatique, dont l’alimentation comporte
beaucoup de poisson, a un taux de cancer très bas. Ces études permettent seulement la
suggestion d’une relation et ne peuvent pas prouver de lien de cause à effet. En effet, les
populations comparées, souvent définies sur une base géographique, diffèrent à priori
sur bien d’autres facteurs que le facteur alimentaire étudié.
Les études prospectives de cohorte assurent la collecte de données sur un groupe de
personnes en bonne santé suivi sur de longues années. Elles présentent l’avantage de
mesurer le facteur (apport alimentaire ou statut biochimique) avant que la maladie ne soit
déclarée et d’être menées sur de longues périodes, fait important car le cancer peut
mettre de longues années à se développer. Elles peuvent répondre à une question du
type : les personnes en bonne santé ont-elles consommé davantage de fruits et légumes
? Elles visent à montrer l’existence d’une séquence chronologique entre l’exposition et la
survenue de la maladie, d’un effet dose-réponse (plus l’exposition est importante, plus le
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-
risque est élevé), et d’un effet de protection (si l’exposition est réduite, la fréquence de la
maladie diminue). Cependant, il n’est pas possible de contrôler l’ensemble des facteurs
pouvant intervenir dans la relation alimentation/cancers, notamment ceux relatifs au
mode de vie (sédentarité, tabagisme, surpoids...). Aussi, la mise en évidence d’une
association ne permet pas de prouver de lien de cause à effet.
Les études cas-témoins / cas-contrôle comparent la consommation alimentaire de
sujets atteints de cancers et de sujets qui en sont exempts, issus d’une même
population. Ces études permettent d’estimer l’existence d’une relation individuelle entre
le facteur et la maladie. Cependant ce type d’étude a ses limites. Les « cas » et les «
témoins » peuvent avoir un souvenir erroné de leur alimentation notamment lorsqu’il
s’agit de se souvenir des aliments consommés durant les dix années passées. Elles
peuvent aussi avoir modifié leur régime alimentaire après le diagnostique de leur
maladie. Ces phénomènes induisent des biais qui ne permettent pas de conclure à une
relation causale.
Ces trois types d’études ont la même limite : elles ne permettent pas de prouver de lien de
cause à effet entre un facteur nutritionnel et la survenue d’un cancer.
-
-
Les essais de prévention : ils visent à démontrer que la modification d’un facteur
alimentaire associé à l’apparition d’une maladie entraîne une diminution de la fréquence
de cette maladie. Il peut s’agir, par exemple, de l’évaluation de l’effet d’une
supplémentation protéino-énergétique chez la personne âgée sur le risque de
malnutrition. Ces essais permettent d’attribuer un sens causal à la relation, même si les
mécanismes cellulaires ou moléculaires ne sont pas clairement démontrés. Cependant,
ils ont leurs limites : ils dépendent de la bonne adhésion des participants à l’intervention
et, conduits le plus souvent sur un échantillon particulier d’individus, leurs résultats ne
sont pas directement généralisables à l’ensemble des populations. Enfin, il n’est pas
toujours acceptable d’un point de vue éthique de conduire ce type d’étude, surtout si l’on
s’intéresse à des facteurs délétères pour la santé.
Les essais contrôlés randomisés sont des études d’intervention nutritionnelle qui
permettent de modifier de manière contrôlée la consommation d’un facteur alimentaire
par les participants pour en mesurer l’impact. La répartition aléatoire (randomisée) des
sujets dans les groupes (intervention ou témoin) doit permettre de réduire l’importance
de facteurs de confusion (ex. : âge, sexe, statut tabagique…). Ils sont réalisés autant que
possible en « double aveugle », c’est-à-dire que ni les volontaires ni l’expérimentateur ne
connaissent cette répartition. Cependant, à moins d’utiliser des suppléments alimentaires
comme cela a été le cas dans l’essai SUVIMAX (supplémentation par des antioxydants à
doses nutritionnelles fournis dans des capsules), il est difficile d’intervenir sur
l’alimentation sans que les participants en aient conscience. Par ailleurs, la difficulté de
réaliser des interventions de longue durée peut en limiter la portée sur une maladie telle
que le cancer dont le développement se déroule sur plusieurs décennies.
Quant aux méta-analyses, elles consistent à rassembler les données de différentes études
portant sur une même question en calculant, via une méthode statistique, une moyenne des
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relations observées dans plusieurs études. Elles peuvent être conduites à partir de données
agrégées (analyse statistique sur les estimations de l’association issues des études) ou de
données individuelles (analyse sur les observations individuelles de plusieurs études). Cette
estimation moyenne est pondérée sur les particularités de chaque étude, comme le nombre de
sujets. Les méta-analyses sont un complément intéressant en épidémiologie pour juger la
relation entre un facteur alimentaire et les cancers.
A ces études s’ajoutent celles réalisées in vitro (sur cellules ou tissus) et in vivo (sur modèles
animaux). Elles permettent le contrôle de plusieurs variables et l’étude de points précis. Elles
apportent ainsi des indices supplémentaires.
La méthode la plus rigoureuse consiste à combiner l’ensemble des résultats obtenus par ces
différentes approches (épidémiologiques, mécanistiques) et à rassembler les preuves à partir
desquelles il est possible de tirer des conclusions. Il s’agit de l’approche « portefeuille » ou
« portfolio ».
B. Viandes et risque de cancer colorectal
Un nombre considérable d’études prospectives de cohorte portant sur la relation entre les
habitudes alimentaires et le risque de cancer, a fournit des données sur l’association entre la
consommation de viande et le risque de cancer colorectal. Malgré plus de 50 études
épidémiologiques publiées jusqu’en Septembre 2010 sur la viande rouge et le cancer
colorectal 2, dont plus de 30 études prospectives parues ces 20 dernières années, la relation
potentielle entre les apports en viande rouge et le cancer colorectal est encore équivoque. De
fait, il est difficile de comparer les résultats d’études en raison de nombreuses différences
existant dans la conception des études, la taille de l’échantillon, la culture alimentaire des
populations (selon les pays), la méthode d’estimation des données alimentaires (estimation des
quantités de viandes consommées, viandes rouges et produits dérivés combinés ou non), s’il
s’agit d’incidence de cancers ou d’adénomes ou encore si les sites de localisation du cancer ont
été distingués ou regroupés (rectum/colon, proximal/distal). Quelques éléments semblent
ressortir de l’analyse de ces études prospectives.
1. Un risque relatif peu élevé et pas toujours significatif3
Si dans les études prospectives de cohorte, la majorité des associations retrouvées entre la
consommation de viande rouge et le cancer colorectal montrent un risque relatif au dessus de
1.0, celui-ci n’est toutefois que légèrement élevé et en général inférieur à 1.5. De plus, ces
2
Seules 16 études de cohorte ont été analysées par le panel d’experts du WCRF
Un résultat est dit statistiquement significatif lorsqu'il est improbable qu'il puisse être obtenu par un simple hasard.
Habituellement, on utilise un seuil de probabilité de 5%. Si le résultat à moins de 5% de chances (soit p<0.05) d'être
obtenu par hasard, alors il est jugé significatif. Par opposition, un résultat non significatif est un résultat qu'il est
probable (plus de 5% de chances) d'avoir obtenu par hasard.
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études rapportent, pour la plupart, des associations non statistiquement significatives3 (c'est-àdire dont le seuil de probabilité n’est pas inférieur à 0.05).
• 19 études aux résultats non significatifs
Dix neuf études prospectives sont dans ce cas sur un total de 35 études prospectives publiées
jusqu’en 2010 :
Les études Nord-Américaines :
Cinq études sur des cohortes importantes rapportent une association non significative entre la
consommation de viande rouge et le risque de cancer avec des risques relatifs variant de 1.12 à
1.21 pour des consommations de plus d’une portion par jour (Kabat et al, 2007 ; Chao et al
2005 ; Chen et al, 1998 ; Chan et al, 2005 ; Singh et Fraser 1998).
Une étude de cohorte réalisée chez des policiers américains remarque une élévation du risque
de cancer colorectal de 90 % avec la consommation de 2 portions de viande rouge par jour,
mais celle-ci n’est pas non plus significative (Hsing et al 1998).
Les études européennes :
L’étude EPIC (Norat et al, 2005) rapporte une augmentation moyenne de 17 % du risque de
cancer colorectal (RR=1.17) avec la consommation de plus de 80g/jour de viande rouge mais
ceci reste non significatif. Par ailleurs, lorsque les auteurs prennent en compte l’apport en fibres,
seuls les petits consommateurs de fibres (<17g/j) présentent une élévation du risque de cancer
(RR=1.50). En Allemagne, Tiemersma et al (2002) rapportent une augmentation de 60 % du
risque de cancer colorectal non significative (RR=1.6) avec la consommation de 5 portions par
semaine de viande fraiche de bœuf et de porc. Dans une étude finlandaise, Jarvinen et al (2001)
observent une augmentation de 50 % du risque avec la consommation de plus de 206 g/jour de
viande rouge (consommation particulièrement élevée) mais encore une fois, les données ne
sont pas significatives.
Au contraire, quatre études, deux réalisées aux Pays-Bas (Brink et al, 2005 ; Luchtenborg et al,
2005), l’une en Finlande (Pietinen et al, 1999) et la dernière en Norvège (Gaard et al 1996)
observent une diminution non significative du risque de cancer colorectal avec la consommation
de viande rouge fraiche (RR=0.58 à 1.08).
Les études conduites en Asie (Japon et Chine) :
Elles n’observent, pour la plupart, aucune association entre la consommation de viande de bœuf
et le risque de cancer colorectal (RR proche de 1.0). L’association avec la consommation de
porc est plus variable suivant les études et le site du cancer (RR entre 1.46 et 1.90) mais reste
jusqu’à présent non significative (Sato et al, 2006 ; Kojima et al, 2004 ; Khan et al, 2004 ; Oba et
al, 2006 ; Chen et al, 2003). Les associations les plus fortes sont en général celles qui ne sont
ajustées que sur l’âge et le sexe. Lorsque ces études ajustent les données sur d’autres facteurs
de confusion (taille IMC, tabagisme, alcool, activité physique), les associations deviennent
beaucoup plus faibles voire nulles (RR varient de 0.32 à 1.11 suivant le type de viande et le site
de la tumeur), ce qui montre l’importance de contrôler les effets potentiels des facteurs de
confusion. De même, dans une étude plus récente réalisée auprès de femmes de Shanghai,
Lee et al (2009) observent une association inverse et dont le risque relatif varie de 0.6 à 1.0
selon les quintiles de consommation de viande rouge et selon le site de la tumeur (rectal ou
colon). Ces résultats sont toutefois à relativiser car les quantités de viande rouge consommées
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par les sujets de ces études asiatiques sont inférieures à celles observées dans les études
Nord-Américaines et Européennes.
• 7 études qui concluent à l’absence d’association
Sept études prospectives concluent à l’absence d’association entre la consommation de viande
rouge et le risque de cancer colorectal soit en raison d’un risque relatif proche de 1.0 (Bostick et
al, 1994 ; Nothling et al, 2009 ; Flood et al, 2003 ; Sellers et al, 1998 ; Butler LM et al, 2008 ;
Sorensen M et al, 2008) soit en raison de la non significativité de leurs données (Kato et al,
1997). Trois d’entre elles ont été prises en compte dans l’expertise du WCRF (Bostick et al,
1994 ; Sellers et al, 1998 ; Kato et al, 1997) et deux autres ont été ajoutées à la mise à jour du
rapport en 2010 (Butler LM et al, 2008 ; Sorensen M et al, 2008).
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Tableau 1 : Récapitulatif des 19 études prospectives non significatives portant sur l’association entre la viande rouge et le cancer colorectal.
Auteurs (année)
Etude, pays
Nb sujets
H/F
Type de viande
Nb de cas Comparaison
analytique
site
Risque relatif
Brink et al. 2005
Netherlands Cohort 2 948 H/F
Study
Bœuf
142
40
98
34
97
35
17
Quartiles de
consommation
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
1.28
0.92
0.77
0.70
0.93
1.01
1.21 (0.85-1.72)
NS
Age, sexe, IMC,
tabagisme, apports énergétiques,
antécédents familiaux de CRC
NS
210
96
116
64
124 H
86 F
NR
Quintiles de
consommation
Colon
Rectum
Colon prox
Colon Dist
Colon
colon
Consommation de Colon
porc oui/non
1.15 (0.90-1.46)
1.71 (1.51-2.52)
1.27 (0.91-1.76)
0.71 (0.47-1.07)
1.30 (0.93-1.81)
0.98 (0.68-1.40)
1.48 (0.85-2.59)
NS
Age, IMC, antécédents familiaux
de CRC, THS, endoscopie, usage
de multi-vitamines, usage régulier
d’aspirine
Age, sexe, énergie totale,
éducation, IMC, tabagisme, loisirs
sportifs, apports en multivitamines, aspirine, alcool,
thérapie hormonale, fruits,
Légumes, aliments complets
Apparié selon l’âge, le sexe, la
localisation résidentielles
Viande rouge (bœuf,
porc, agneau en plat
principal, plats
composés ou
Sandwich; hot dogs)
Norway
50 535 H/F Boulettes de viande
Ragoût de viande
Boulettes de viande
Ragoût de viande
Lutheran
17 633 H Viande rouge (bœuf et
Brotherhood (US)
porc frais, bacon,
jambon fumé)
Mobile Clinic Health 9 959 H/F Viande rouge
Examination
Survey (Finland)
43
+ 1 portion par jour
vs<0.5
1.17 (0.68-2.02)
NS
IMC, activité physique et alcool
15 H
11 H
13 F
9F
14
13
>5/mois vs <1
>5/mois vs <1
>5/mois vs <1
>5/mois vs <1
60 portions par
mois vs <15
colon
0.61 (0.22-1.69)
0.74 (0.21-2.64)
1.08 (0.31-3.79)
0.58 (0.16-2.13)
1.9 (0.9-4.3)
1.8 (0.8-4.4)
NS
Age
NS
Age, tabagisme, alcool, calories
totales
NR
Quartiles 4 vs 1
Colorectal
Colon
Rectal
1.50 (0.77-2.94)
1.34 (0.57-3.15)
1.82 (0.60-5.52)
NS
Kabat et al. 2007
National Breast
Screening Study
(Canada)
49 654 F
Viande rouge (22
viandes
bœuf, porc, jambon,
bacon, viande de porc
viandes froide s, veau)
NR
40.3g/j vs<14.25
Colorectal
Colon
Rectum
1.12 (0.86–1.46)
0.88 (0.64–1.21)
1.95 (1.21–3.16)
NS
Khan et al. 2004*
Japan
3 158 H/F
Viande sauf poulet
H
(porc, bœuf, mouton,
foie, jambon, saucisses)
2.0 (0.6-6.3)
NS
Age, sexe, IMC, occupations,
tabagisme, lieu d’habitation,
apports énergétiques, fruits et
légumes, céréales
Age, IMC, statut ménopausique,
Contraception orale, THS, régime
alimentaire (graisses, fibres, acide
folique, calories), tabagisme,
alcool, éducation, activité
physique
Age, tabagisme
Porc
Viande Froide
Chan et al. 2005*
Nurses’ Health
Study (US)
32 826 F
Bœuf, porc ou agneau
en plat principal
Chao et al. 2003
Cancer Prevention
Study II (US)
86 404 H
97 786 F
Viande rouge (bœuf,
porc, jambon, foie,
viandes fumées,
saucisses de francfort,
bacon frit, hamburger)
Chen et al. 2003
China
64 693H/F
Porc
Chen et al. 1998*
Physicians Health
Study (US)
22 071 H
Gaard et al. 1996
Hsing et al. 1998
Jarvinen et al.
2001*
0.5 vs . _0.5
portion par jour
Plusieurs fois par
sem ; chaque jour
vs jamais ;
Colorectal
Colon
signif
NS
Variables contrôlées
F
Kojima et al. 2004
Collaborative
Cohort Study
(Japan)
45 181 H
62 643 F
Boeuf
Porc
Boeuf
Porc
Lee et al. 2009*
Luchtenborg et
al.
2005
Shanghai
73 224 F
Women’s Health
Study (China)
Netherlands Cohort 2 948 H/F
Study
Viande rouge
Boeuf
Porc
Viande froide
Norat et
al.(2005)*
Oba et al. 2006*
Pietinen et al.
1999*
Sato et al. 2006
European
Prospective
Investigation into
Cancer and
Nutrition
(EPIC), 10
European
countries
Japan
478 040
H/F
Viange rouge (fraiche,
émincée, congelée,
bœuf, porc, veau,
agneau) + viandes
transformées
13 894 H
16 327 F
27 111 H
Viande rouge (boeuf,
porc)
Bœuf, porc, agneau
Viande rouge totale
Alpha-Tocopherol,
Beta-Carotene
Cancer Prevention
Study(Finland)
Miyagi Cohort
47 605 H/F Bœuf
Study (Japan)
Porc (sans jambon ou
saucisses)
Singh and Fraser
1998*
OCNH
Adventist Health
Study (California)
32 051 H/F Viande rouge (boeuf et
porc)
11 H
10 H
17 H
20 H
11 F
1F
20 F
3F
62
41
21
134
38
92
31
93
33
250
plusieurs fois par
an ; plusieurs fois
par mois
idem
3-7/sem
vs 0-2/sem
67g/j vs <24
Quartiles 4 vs 1
>80g/j vs <10
1.0 (0.3-3.0)
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colorectal
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colorectal
Colon
Rectal
Colon prox
Colon dist
1.46 (0.74–2.86)
1.38 (0.68–2.78)
1.14 (0.61–2.14)
1.11 (0.61–2.03)
1.11 (0.57–2.14)
0.37 (0.05–2.84)
0.93 (0.54–1.60)
0.32 (0.09–1.15)
0.8 (0.6-1.1)
0.9 (0.6-1.5)
0.6 (0.3-1.1)
1.29 (0.96–1.73)
0.95 (0.59–1.54)
0.77 (0.57–1.04)
0.70 (0.44–1.13)
0.93 (0.68–1.27)
1.01 (0.61–1.66)
1.17 (0.92–1.49)
1.20 (0.88–1.61)
1.13 (0.74-1.71)
1.18 (0.73-1.91)
1.24 (0.80-1.94)
NS
Age, antécédents familiaux de
CRC, IMC, alcool, tabagisme,
marche par jour, éducation, région
d’inclusion
NS
Age, éducation, revenus, saison,
conso de thé, AINS*, apports
énergétiques et fibres
Age, sexe, antécédents familiaux
de CRC, tabagisme, IMC, apports
énergétiques
NS
Sexe, âge, énergie, taille, poids,
sports loisirs, tabagisme, alcool,
fibres, pays
Colon
Colon
1.03 (0.64-1.66)
0.79 (0.49-1.28)
0.8 (0.5-1.2)
1.1 (0.7-1.7)
NS
0.93 (0.67–1.30)
0.84 (0.54–1.32)
1.01 (0.62–1.67)
0.97 (0.55–1.70)
1.06 (0.46–2.43)
1.13 (0.79–1.74)
1.46 (0.81–2.62)
0.74 (0.39–1.42)
1.05 (0.50–2.22)
1.90 (0.63–5.74)
1.41 (0.90-2.21)
NS
Age, taille, IMC, tabagisme,
alcool, activité physique
Age, groupe supplément,
tabagisme, IMC, alcool,
éducation, activité physique au
travail, calcium
Age, sexe, tabagisme, alcool,
IMC, éducation, antécédents
familiaux de CRC, marche, conso
de graisses, calcium, fibres
32 H
27 F
45 H
45 H
56.6g vs <18.7
42.3g vs <10.7
99g vs <36
203g vs <80
46
25
21
16
8
73
48
26
24
16
45
1-2/sem vs jamais Colorectal
Colon
Rectum
Colon prox
3-4/sem vs jamais Colon dist
Colorectal
Colon
Rectum
Colon prox
Colon dist
1/sem vs jamais
colon
11
Age, statut de santé, éducation
santé, tabagisme, suivi
Aout 2011
NS
NS
Age, sexe, IMC, activité physique,
tabagisme, alcool, aspirine,
histoire parental de cancer du
colon
Tiemersma et al.
2002*
Netherlands
~30 000
H/F
Viande rouge fraiche
(bœuf, porc)
45 H/F
30 H
15 F
+5/sem vs 0-3/sem
1.6 (0.9-2.9)
2.7 (1.1-6.7)
1.2 (0.5-2.8)
NS
Abréviations : AINS pour Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens ; THS pour Traitements Hormonaux Substitutifs
* Etudes prises en compte dans l’expertise du WCRF 2007
* Etudes ajoutées dans la mise à jour du WCRF 2010
OCNH
12
Aout 2011
Age, sexe, centre, apport
énergétique total, alcool, poids
2. Des données significatives qui masquent des facteurs de confusion
Neuf études prospectives rapportent une association positive et significative entre la
consommation de viande rouge et le risque de cancer colorectal. Les risques relatifs varient de
1.11 à 3.57 pour des apports considérés comme les plus élevés variants de 1 portion par jour à
1 portion par semaine.
L’analyse critique de ces études révèle la non prise en compte de certains facteurs de confusion
ayant pu contribuer aux résultats observés :
- Cinq études incluent des viandes transformées (hot-dog, charcuteries et saucisses) dans
la catégorie des viandes rouges (Cross et al, 2007 ; Larsson et al, 2005 ; Giovannucci et
al, 1994 ; Lin et al 2004 ; Willett et al, 1990). Or, ces produits, qui contiennent des
conservateurs, des nitrites ou nitrates et sont fumés ou salés seraient associés à une
risque plus élevé de cancer colorectal (Norat et al, 2005 ; Cross et al 2010). Dans une
analyse ultérieure de la cohorte de l’AARP Diet and Health Study, Cross et al (2010)
sépare les viandes transformées de celles non transformées. L’analyse révèle alors un
risque moindre lorsque les viandes rouges non transformées sont considérées seules
(RR=1.13 au lieu de 1.24).
- Trois études n’ajustent pas leurs données selon certains facteurs susceptibles d’être
associés à une augmentation du risque de cancer colorectal comme l’alcool, le
tabagisme, l’IMC ou les antécédents familiaux de cancer colorectal (Willett et al, 1990 ;
English et al, 2004 ; Fraser et al, 1999).
- Dans deux études de la même équipe (Cross et al, 2007 et 2010) et sur la même
cohorte, malgré une analyse ajustée selon de nombreux facteurs, les grands
consommateurs de viande étaient aussi de grands fumeurs, des sujets avec l’index de
masse corporelle (IMC) le plus élevé, les moins actifs physiquement, les moins éduqués,
ceux dont les apports en fruits et légumes étaient les plus faibles et dont les apports
caloriques étaient les plus élevés. Ces facteurs ont donc certainement contribué à
l’association positive observée.
- Dans une étude (Wei et al, 2004), les données sont peu cohérentes : L’analyse des
quintiles de consommation révèle un risque élevé chez les non consommateurs de
viande (1er quintile) et led gros consommateurs (5ème quintile) tandis que le risque est
plus faible pour les consommations intermédiaires (2ème, 3ème et 4ème quintiles). On
peut à juste titre se poser la question de la pertinence du choix d’un groupe de nonconsommateurs de viande comme groupe de référence. Au-delà des facteurs
alimentaires, le style de vie (tabagisme, consommation d’alcool, activité physique)
sépare ces « végétariens » des consommateurs de viande. Par ailleurs, les données
sont à la limite de la significativité (p=0.25)
- Dans six études, la durée entre le recueil des habitudes alimentaires et le diagnostic de
cancer s’étale de 6 à 13 ans (Willett et al, 1990 ; Cross et al, 2007 et 2010 ; Fraser et al,
1999 ; Larsson et al, 2005 ; Giovannucci et al, 1994). On peut supposer que
l’alimentation des sujets a pu se modifier durant cette période et mettre donc en doute la
validité sur la durée du recueil alimentaire.
- Dans une étude (Willett et al, 1990) les auteurs reconnaissent qu’une faible
consommation de fibres peut contribuer au risque de cancer du colon et que cette
relation n’est pas statistiquement indépendante de la consommation de viande.
L’importance de ce facteur alimentaire dans la relation viande/cancer colorectal est
évoqué dans quatre autres études (Norat et al, 2005 ; Cross et al, 2010 ; Fraser et al,
1999 ; Giovannucci et al, 1994).
OCNH
14
Aout 2011
Tableau 2 : Récapitulatif des 9 études prospectives significatives portant sur l’association entre la viande rouge et le cancer colorectal.
Auteurs (année)
Etude, pays
Cross et al. 2007
National
Institutes of
Health-AARP
Diet and
Health Study
(US)
294 724 H
199 312 F
Cross et al. 2010*
idem
idem
English et al. 2004*
Melbourne
Collaborative
Cohort Study
(Australia)
37 112
Fraser et al. 1999*
7th Day
Adventists
Health Study
(California)
34 192
Giovannucci et al.
1994*
Health
Professionals
Follow-Up
Study (US)
47 949 H
Larsson et al. 2005*
Swedish
Mammograph
Cohort
Nb sujets
H/F
61 433 F
Type de viande
Nb de
cas
Viande rouge : bœuf, porc 1190
and agneau; bacon, bœuf,
viandes froides, jambon,
hamburger, hot-dogs,
foie, porc, saucisses et
steak; viandes dans plats
composés (pizza, chilli,
lasagne et ragout)
Viande non transformées
séparées des autres
viande rouge fraiche :
veau, bœuf, agneau, porc
(rôti, steak, boulettes,
plats composes, émincés)
lapin, autre gibier
Viande rouge
site
signif
Variables contrôlées
1.24 (1.12-1.36)
1.17 (1.05-1.31)
1.45 (1.20-1.75)
S
Age, sexe, éducation, statut marital,
antécédents familiaux de cancer
CRC, origine ethnique, IMC,
tabagisme, activité physique intense,
apports énergétiques totaux, alcool,
fruits et légumes
Colorectal
1.13 (0.98-1.30)
S
idem
Colorectal
Colon
Rectum
1.4 (1.0-1.9)
1.1 (0.7-1.6)
2.3 (1.2-4.2)
NR
Quartiles de
consommation
NR
Parmi les
Colon
consommateurs
de viande
blanche
<1/sem :
viande rouge
>1/sem vs
jamais
129g/j vs 18.5 Colon
NR
Risque relatif
Quintiles de
Colorectal
consommation Colon
62.7g/1000kcal Rectum
vs 9.8
idem
Viande rouge (bœuf, porc 55
ou agneau en plat
principal, sandwich ou plat
composé; hamburger, hot
dog, bacon et charcuteries
(saucisses, salami et
roulades)
Bœuf, porc ou agneau en 16
plat principal
Viande rouge : bœuf,
viandes froides, bacon,
hot-dogs, jambon ou
autres viandes froides,
boudin, rognons ou foie,
pâté de foie)
Bœuf and porc (bœuf,
Viande froide)
Comparaison
analytique
>5 portions
/sem vs 0
NS
NS
S
Sexe, pays de naissance, apport
énergétique, graisses, produits
céréaliers
1.86 (1.15-3.02)
S
Age, sexe
1.71 (1.15-2.55)
S
Age, apport énergétique total,
antécédents familiaux de cancer
CRC, IMC, Tabagisme, activité
physique, alcool, endoscopie
3.57 (1.58-8.06)
94g/j vs <50
Colorectal
Rectal
Colon prox
Colon dist
1.32 (1.03–1.68)
1.28 (0.83–1.98)
1.03 (0.67–1.60)
2.22 (1.34–3.68)
4 portions/sem
vs<2
Colorectal
Rectal
Colon prox
Colon dist
1.22 (0.98–1.53)
1.08 (0.72–1.62)
1.10 (0.74–1.64)
1.99 (1.26–3.14)
S
Age
Age, IMC, éducation, apports
énergétiques, alcool, graisses
saturées, calcium, folates, fruits,
légumes, aliments complets
Lin et al. 2004
Wei et al. 2004*
Willett et al. 1990*
Women’s
Health Study
(US)
39 876 F
Health
Professionals
Follow-Up
Study (US)
Nurses’
Health Study
(US)
Nurses’
Health Study
(US)
46 632 H
87 733 F
88 751 F
Viande rouge (bœuf ou
30
agneau en plat principal,
bœuf, porc ou agneau
dans un
sandwich, hot dogs,
bacon,
charcuteries, hamburgers)
Bœuf, porc, agneau en
155 H/F
plat principal
31 H/F
32 H
7H
123 F
24 F
Viande rouge (bœuf, porc 44 F
ou agneau en plat
44 F
principal, sandwich ou plat
composé, hamburger,
hotdogs, charcuteries et
bacon
Bœuf, porc, agneau en
16 F
plat principal
>1.42 portion
par jour vs
<0.13
0.66 (0.40-1.09)
S
Age, randomisation, IMC, antécédents
familiaux, de polypes, activité
physique, tabagisme, alcool, THS,
apports énergétiques
+5/sem vs
0/sem
Colon
Rectum
Colon
Rectum
Colon
Rectum
1.43 (1.00–2.05)
0.90 (0.47–1.75)
1.35 (0.80–2.27)
0.90 (0.34–2.45)
1.31 (0.73–2.36)
0.92 (0.31–2.71)
S lim
NS
Age, antécédents familiaux, IMC,
activité physique, viandes
transformées, alcool, calcium, folates,
taille, tabagisme avant 30 ans,
endoscopie, sexe
+134 g/j vs <59
Colon
Colon
1.77 (1.09-2.88)
1.61 (1.03-2.53)
S
Age et apports énergétique
Age, apport énergétique et conso de
poulet et poisson
+1portion/j vs
<1 portion/mois
Colon
2.49 (1.24-5.03)
* Etudes prises en compte dans l’expertise du WCRF 2007
* Etudes ajoutées dans la mise à jour du WCRF 2010
OCNH
16
Aout 2011
Age
3. L’absence d’une relation de type dose-réponse
Une seule des études prospectives publiées jusqu’à présent rapporte une association de type
dose-réponse entre les quantités de viande rouge consommées et le risque de cancer
colorectal. Toutefois, elle n’observe cette relation que chez les hommes et lorsque les viandes
transformées (bacon, hotdogs,...) sont intégrées aux viandes rouges fraiches (Giovannucci et al,
1994). La relation n’est plus dose-réponse lorsque seules les viandes rouges fraiches sont
considérées (bœuf, le porc et agneau). Concernant les autres études, si globalement, le risque
relatif semble augmenter avec les quantités de viandes rouges consommées, ceci n’a pas lieu
de façon linéaire. Dans une dizaine d’études, le risque se stabilise, tandis que dans une dizaine
d’autres, il a tendance à diminuer pour les consommations moyennes (cf Annexe 1). Parmi ces
dernières études, celle de Wei et al (2004) qui combine la cohorte des infirmières américaines
(US Nurses’ Health Study, 87 733 femmes) à celle des professionnels de santé américains
(Health Professionals Follow-up, 46 632 hommes) est caractéristique. Alors qu’elle note une
association entre le cancer du colon et la consommation de bœuf, porc ou agneau en plat
principal, elle rapporte que cette association est plus forte chez les sujets qui consomment
moins d’une portion par semaine et chez ceux qui en consomment plus de 5 portions par
semaine (risque augmenté de 43 % dans les deux cas) que chez ceux qui en consomment une
fois par semaine (risque augmenté de 29 %) ou deux à quatre fois par semaine (risque
augmenté de 37 %).
4. Une grande variabilité homme/femme et suivant le site de la tumeur
(rectum / colon proximal / colon distal)
Colon proximal, colon distal, rectum
Il semble d’après quelques travaux que l’association entre la consommation de viande rouge et
le risque de cancer soit plus forte pour le cancer rectal que pour le cancer du colon (Chao et al,
2005 ; Cross et al, 2007 et 2010 ; English et al, 2004 ; Jarvinen et al, 2001 ; Kabat et al, 2007).
Les résultats des travaux faisant la distinction entre le colon proximal de celui distal sont
également très variables. Toutefois, l’association semble être plus forte lorsque le cancer est
localisé en partie distale (Larsson et al, 2005 ; Norat et al, 2005 ; Sato et al, 2006). Les études
prenant en compte le site de la tumeur sont cependant encore trop peu nombreuses pour
réellement conclure. Par ailleurs, aucun mécanisme biologique ne peut, pour l’instant, expliquer
une différence de risque suivant le site de localisation de la tumeur.
Différence homme/femme
Les résultats concernant l’association entre la viande rouge et le risque de cancer colorectal
sont très variables selon le sexe. La douzaine d’études prospectives distinguant les données
chez les hommes de celles chez les femmes n’indiquent pas d’association viande rouge/risque
de cancer colorectal chez ces dernières. Les risques relatifs des études de cohorte réalisées
chez les femmes varient de 0.66 à 1.04 (Chao et al, 2005 ; Lin et al, 2004 ; Flood et al, 2003 ;
Bostick et al, 1994 ; Lee et al, 2009). Les risques retrouvés chez les hommes leur sont, en
général, supérieurs de 10 à 30 %. Cette disparité ne semble pas provenir d’une différence
d’apports en viande rouge en termes de quantités puisque dans l’étude de Lin et al, (2004) les
femmes dont la consommation approche 1.5 portion par jour présentent une réduction
significative de 34 % de leur risque de cancer colorectal (RR=0.66) par rapport à celles n’en
consommant que 0.13 portion par jour (étude non intégrée dans l’analyse du WCRF). De même
l’étude de Bostick et al (1994) rapporte une association nulle (RR=1.04) pour des
consommations atteignant 11 portions de viande rouge par semaine (versus moins de
4/semaine).
Deux hypothèses sont évoquées. Elles impliquent les variations hormonales chez la femme et
leur prédisposition à développer des tumeurs dans le colon proximal tandis que les hommes
auraient plutôt tendance à développer des tumeurs dans le colon distal et au niveau du rectum
(Jacob et al, 2007).
5. Quantités consommées : une triple problématique
- Des quantités consommées très variables selon les pays.
Les habitudes de consommations varient fortement d’un continent à un autre. C’est ainsi que les
populations asiatiques présentent les consommations de viande rouge les plus faibles (926g/jour) tandis que les populations européennes ont une consommation moyenne (35-47g/jour)
et que les consommations les plus fortes sont observées parmi les populations NordAméricaines (57-85g/jour), Australiennes (84-125g/jour) et d’Amérique latine (122-168g/jour)
(Norat et al, 2002). Dans le cas de la France, les consommations moyennes de viande rouge
(estimées en 2007) sont inférieures aux quantités maximales publiées et correspondent environ
à la moitié des quantités maximales françaises de l’étude EPIC (Norat et al, 2005) et des études
parues en 2009 et 2010 (Sinha et al, 2009 ; Cross et al, 2010). Il est donc essentiel d’avoir
connaissance des quantités consommées par une population avant de conclure à un risque de
cancer. Enfin, au delà des consommations de viandes, celles de légumes sont aussi différentes
selon les continents. Les populations asiatiques présentent par exemple une consommation
bien plus importante de légumes et de légumineuses que les Européens et les Nord-Américains
(Wu et al, 2009). Or, les légumes (et les fibres qu’ils contiennent) modulent la relation entre la
viande et le risque de cancer.
- Une estimation difficile des quantités réellement consommées
Il est difficile de mesurer précisément les apports en viande car une partie d’entre eux sont
consommés sous forme de plats composés dont la proportion varie, par ailleurs, beaucoup d’un
pays à l’autre. Or, la plupart des études surestiment les quantités de viande dans ces plats soit
en incluant le poids des os, soit en comptabilisant le poids total des plats composés (pizza,
pâtes,...) et donc celui de la part non carnée de ces plats. Deux études ont cherché à estimer
plus précisément les consommations de viande issues de ces plats composés auprès de
populations britanniques et irlandaises (Prynne et al, 2009 ; Cosgrove et al, 2004). Elles ont
évalué à 32% et 43 %, les surestimations des apports en viande totale. Ces études révèlent de
plus qu’en ne prenant en compte que la seule composante carnée des plats composés, une
large majorité d’Irlandais (88%) et de Britanniques (80-90%) consomment moins que la limite
maximale recommandée dans le rapport du WCRF (71g/jour de viande rouge). Une
OCNH
18
Aout 2011
surestimation des quantités consommées dans les différentes études prises en compte dans le
rapport du WCRF a donc pu conduire à une surestimation des risques de cancers.
- Une expression des niveaux de risque discutable
Plusieurs études expriment le risque de cancer pour 100g de consommation de viande (totale)
quotidienne supplémentaire (incrément). Ceci signifie une augmentation des apports de
100g/jour pendant toute la durée de l’étude (3 à 32 ans). Si l’on prend le cas de la France, un
incrément de 100 g par jour conduirait à une augmentation de 40 à 50 % des apports en viande
chez les hommes et de 90 à 150 % ceux des femmes étant donné leurs consommations
actuelles (147g/j et 94g/j, respectivement). Le calcul d’une augmentation du risque par portion
de 100 g est donc une présentation statistique éloignée de la réalité.
C. Viandes et risque d’autres cancers
Les études fournissent des résultats très hétérogènes et donc peu concluants sur l’association
entre la consommation de viande rouge et le risque de cancer de la prostate, du poumon, de la
vessie, de l’œsophage ou du pancréas.
Une étude de cohorte réalisée auprès de femmes anglaises a observé une relation significative
entre une consommation de plus de 57g/jour de viande rouge et le risque de cancer du sein
chez des femmes post-ménopausées (RR=1.56) (Taylor et al, 2007) tandis que quatre études
plus récentes concluent à l’absence d’une association (Wu K et al, 2010 ; Kabat et al, 2009 ;
Pala V et al, 2009 ; Larsson et al, 2009). La seule méta-analyse disponible sur le sujet conclut à
l’absence d’association et révèle des variations considérables entre les études en termes de
méthodologie du recueil des consommations de viande (Missimer et al, 2002). Parmi les études
disponibles, celles qui prennent en compte les méthodes de cuisson des viandes rapportent des
résultats variables. Certaines ne montrent pas d’association entre la viande rouge très cuite et le
risque de cancer du sein (Kabat et al, 2009 ; Wu K et al, 2010) tandis que d’autres en rapportent
une (Larsson et al, 2009 ; Pala V et al, 2009).
Les résultats concernant l’association entre les viandes rouges très cuites et le risque de cancer
de la prostate sont également très variables d’une étude à l’autre. Trois études observent un
doublement du risque avec une consommation élevée de viande rouge bien cuite (Michaud DS
et al, 2001 ; Rodriguez C et al, 2006 ; Cross AJ et al, 2005) tandis que deux études n’observent
pas d’association (Sharma S et al, 2010 ; Rohrmann S et al, 2007).
Des études sont donc encore nécessaires afin de clarifier la relation entre la consommation de
viande rouge et le risque de cancer.
III.
Hypothèses mécanistiques de l’action des viandes sur le
risque de cancer
Un grand nombre d’hypothèses tente d’expliquer l’association entre la consommation de viande
et le risque de cancer. Celles-ci évoquent la promotion de la cancérogénèse par des apports
OCNH
19
Aout 2011
élevés en graisses, par la production de composés mutagènes au cours de la cuisson des
viandes, la formation endogène de composés nitrosés ou encore par la promotion de la
cancérogénèse par le fer. L’hypothèse concernant les composés mutagènes formés au cours de
la cuisson des viandes est la plus étudiée. Cependant, aucune de ces hypothèses ne parvient à
expliquer clairement le lien entre la consommation de viande rouge et le risque de cancer.
A. Le contenu en graisses
Cette hypothèse s’appuie plus sur le régime alimentaire en général que sur la viande en ellemême. Bien que les graisses issues de la viande aient été soupçonnées d’être le lien entre le
risque de cancer colorectal et les apports en viande, aucune étude expérimentale n’a montré de
résultat convainquant et les études épidémiologiques n’ont pas confirmé ce lien (Santarelli et al,
2008). D’ailleurs, les deux études d’interventions réalisées auprès de la Women’s Health
Initiative portant sur une alimentation pauvre en graisse n’ont pas observé de réduction du
risque de cancer colorectal (Prentice et al, 2008 ; Beresford SA, 2006). Concernant les autres
cancers, le lien avec les apports en graisses est plus ou moins convainquant. Dans une étude
n’observant pas de lien entre le risque de cancer intestinal et la consommation de viande, Cross
et al (2008) notent un triplement du risque de cancer chez les individus dont les apports en
graisses saturées sont les plus élevés. Cette association entre les graisses et le risque de
cancer n’est pas confirmée dans le cas du cancer de la prostate (Crowe et al, 2008), mais est
soupçonnée dans le cas du cancer du sein (Schulz et al, 2008), du carcinome hépatocellulaire
(Freedman et al, 2010) et du cancer du pancréas (Thiebaut AC et al, 2009). Les données sont
toutefois trop peu nombreuses pour conclure.
B. Les méthodes de cuisson
La cuisson des viandes à haute température (grillées, frites, cuites au barbecue) et sur une
longue durée est à l’origine de la formation de deux types de composés mutagènes : les amines
hétérocycliques et les hydrocarbures aromatiques polycycliques.
Les hydrocarbures aromatiques polycycliques, issus de la combustion incomplète de composés
organiques, trouvent leur origine dans de nombreux aliments et sont aussi une composante
importante de la pollution environnementale. Très peu d’études se sont spécifiquement
intéressées à eux, ce qui explique le manque de données et de conclusion sur leur relation avec
le risque de cancer.
Les études s’intéressant aux amines hétérocycliques sont plus nombreuses. Le PhIP 4 et le
MeIQx 5 sont les amines hétérocycliques les plus retrouvées dans la viande cuite. Les études sur
animaux ont prouvé leurs propriétés cancérigènes sur de multiples sites (glandes mammaires,
poumon, colon, estomac, prostate). Récemment, des associations d’amines hétérocycliques
avec l’ADN (« adduits d’ADN ») ont été détectées dans des tissus variés chez l’homme (sein,
4
5
PhIP : 2-amino-1-méthyl-6-phénylimidazo[4,5-b] pyridine
MeIQx : 2-Amino-3,8-dimethylimidazo[4, 5-f]quinoxaline
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colon, rectum et prostate), suggérant que les tissus humains sont eux-aussi vulnérables aux
attaques de ces composés (Turesky RJ et al, 2004 ; Malfatti MA et al, 2006 ; Zhu J et al, 2006 ;
Tang et al, 2007a et 2007b) et qu’une exposition à ces composés pourrait augmenter le risque
de cancer chez l’homme.
Parmi les études épidémiologiques récentes, intégrant des questions sur les méthodes et les
préférences de cuisson des viandes, sept d’entre elles ont observé une association entre le
risque de cancer colorectal et des niveaux élevés de consommation d’amines hétérocycliques
(Augustsson et al, 1999; Kampman et al, 1999; Le Marchand et al, 2001; Nowells et al, 2002;
Butler et al, 2003; Murtaugh et al, 2004; Navarro et al, 2004) avec une relation dose-réponse
dans deux études (Nowell et al, 2002 et Butler et al, 2003).
Dans sa mise à jour de 2010, le rapport du WCRF identifie 5 études portant sur les méthodes et
préférences de cuisson et le risque de cancer colorectal : Nothlings U et al, 2009, Sorensen et
al, 2008 ; Lee et al, 2009 ; Iso et al, 2007 ; Yeh et al, 2006. La première étude n’observe pas
d’association avec la préférence pour la viande bien cuite tandis que la seconde identifie une
augmentation du risque de 36 %. La troisième étude n’observe pas d’association avec les
différentes méthodes de cuisson et les deux dernières n’observent pas d’association avec la
consommation d’aliments frits (dont les légumes) ou fumés.
Deux études portant sur les amines hétérocycliques sont aussi analysées dans cette mise à
jour : Nothlings U et al, 2009 et Cross AJ et al, 2010. La première ne rapporte pas d’association
avec le MeIQx et le PhIP tandis que la seconde observe une association positive entre le risque
de cancer colorectal et les consommations de MeIQx (RR=1.19), de Di-MeIQx (RR=1.17),
l’activité mutagène (RR=1.14), mais pas avec le PhIP, ni le Benzo(a)Pyrène.
Les amines hétérocycliques ne peuvent pas à elles seules expliquer la relation entre la viande et
le risque de cancer colorectal. La volaille grillée contient, par exemple, des niveaux d’amines
hétérocycliques plus importants que la viande de bœuf alors que sa consommation n’est pas
associée au risque de cancer colorectal (Cross AJ et al., 2010 ; Heddle JA et al, 2001 ; Norat T
et al., 2002 ; Larsson SC et al, 2006). Par ailleurs, des risques élevés de cancer et d’adénomes
du colon ont été associés à certaines amines hétérocycliques seulement comme le MeIQx. Il
semble de plus que certains sujets soient plus sensibles que d’autres aux amines
hétérocycliques en raison de polymorphismes génétiques des enzymes de détoxification ou
d’activation des amines hétérocycliques.
Concernant le risque de cancer du sein, 4 études ont publié des résultats similaires à ceux du
cancer colorectal (De Stefani et al, 1997; Zheng et al, 1998 ; Delfino et al, 2000; Sinha et al,
2000b) avec une association dose-réponse significative dans deux études (Zheng et al, 1998 ;
Sinha et al, 2000b). La relation entre la consommation de viande très cuite et le risque de
cancer du sein semble cependant très variable suivant les sujets et le polymorphisme de leurs
gènes codant pour les enzymes de détoxification ou d’activation des amines hétérocycliques
(Zheng et al, 1999, 2001, 2002; Deitz et al, 2000).
Pour le cancer de la prostate, les résultats sont plus mitigés : si deux études prospectives
rapportent une association avec la consommation de viande très cuite, aucune association avec
l’exposition aux amines hétérocycliques n’est observée (Cross et al, 2005 ; Koutros et al, 2008).
Quant au cancer du pancréas, trois études observent une association positive avec la
consommation de viande très cuite et l’exposition aux amines hétérocycliques (Anderson et al,
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2002 ; Li et al, 2007 ; Stolzenberg-Solomon et al, 2007) avec une association dose-réponse
dans l’une d’entre elles (Anderson et al, 2002).
Au sujet des cancers de l’estomac et de l’œsophage, trois études suggèrent le rôle possible de
l’exposition aux amines hétérocycliques (Ward et al, 1997; De Stefani et al, 2001; Terry et al,
2003). Une étude seulement rapporte une association entre le risque de cancer du poumon et
l’exposition aux amines hétérocycliques (Sinha et al, 1998).
Bien que les études prenant en compte les consommations d’amines hétérocycliques et les
modes et préférences de cuisson soient de plus en plus nombreuses, elles sont encore en
nombre insuffisant - notamment pour chaque type de cancer - pour qu’il soit possible de
conclure.
C. Les composés nitrosés
Les composés nitrosés sont produits par réaction des nitrites et des oxydes d’azote avec des
amines secondaires et des N-alkylamides. Ils sont présents dans certaines viandes
transformées, certains poissons fumés, fromages et peuvent être formés dans l’organisme après
la consommation de viandes rouges et de viandes transformées (Santarelli et al, 2008). La
formation de ces composés est aussi influencée par la présence de fer héminique, qui catalyse
la formation de composés nitrosés à partir de leurs précurseurs dans l’intestin. Comme la viande
rouge contient plus de fer héminique que la viande blanche, ceci pourrait expliquer que les
corrélations observées dans les études épidémiologiques soient plus convaincantes avec la
viande rouge qu’avec la viande blanche. Toutefois, les études sont encore trop isolées pour
conclure.
D. Le fer héminique
Huang et al (2003) rapportent une association forte entre la surcharge en fer et le risque de
cancer chez l’homme. Leur étude suggère alors que le fer serait un métal cancérigène. Il semble
que celui-ci ait plutôt des effets co-carcinogène en induisant des dommages oxydatifs sur l’ADN
ou sur les membranes cellulaires (peroxydation des lipides membranaires), en stimulant la
prolifération cellulaire et/ou la cytotoxicité de l’eau fécale ou en augmentant la formation
endogène de composés nitrosés. Ceci pourrait être à l’origine d’une instabilité du génome, de
réarrangements chromosomiques, de mutations des proto-oncogènes et des gènes
suppresseurs de tumeur. Le fer pourrait aussi agir en exacerbant l’inflammation (l’inflammation
chronique induit un stress oxydant qui stimule la dysplasie).
L’association entre le fer alimentaire total et le risque de cancer colorectal a été examinée chez
des modèles animaux et dans plusieurs études de population.
Le fer héminique a, en particulier été étudié chez l’animal. Jusqu’en 2004, les études ne
montraient pas d’association avec le cancer colorectal. Selon des chercheurs français, les
régimes alimentaires soumis aux animaux dans ces études, contenaient trop de calcium,
élément susceptible de bloquer l’hème dans la phase insoluble du contenu intestinal. Dans leurs
travaux, ces chercheurs suggèrent que la viande de bœuf pourrait être promotrice des stades
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précoces de la cancérogénèse colique lorsque le régime alimentaire contient peu de calcium
(Pierre F et al, 2003 et 2004).
Chez l’homme, une méta-analyse des études de population a montré une corrélation positive
entre le fer alimentaire et le risque de cancer colorectal (Nelson RL et al, 2001). Mais pour
l’instant, très peu d’études ont pu distinguer le fer héminique provenant de la viande, du fer non
héminique contenu dans d’autres aliments. La plupart des études portant sur le cancer
colorectal a estimé le fer héminique à partir des quantités totales de fer en utilisant un
pourcentage standard (40%) ou en appliquant un pourcentage selon le type de viande (Lee DH
et al, 2004 ; Kabat et al, 2007 ; Balder HF et al, 2006). Par ailleurs, dans ces études, les
associations observées semblent plus fortes chez les femmes consommant de l’alcool.
La mise à jour du rapport du WCRF (2010) a pris en compte ces études (Lee DH et al, 2004 ;
Kabat et al, 2007 ; Balder HF et al, 2006) ainsi que deux autres (Larsson et al, 2005 ; Cross AJ
et al, 2010) pour calculer le risque relatif de cancer colorectal, de cancer du colon et rectal.
Ceux-ci sont relativement modestes puisqu’ils sont évalués respectivement à 1.04 (IC95% :
0.97-1.12, p=0.53, 3 études), 1.12 (IC95%: 0.99-1.27, P=0.07, 5 études) et 1.09 (IC95%: 0.961.23, P=0.80, 3 études) pour chaque milligramme supplémentaire de fer héminique quotidien. Ils
ont pu estimer chez les femmes, le risque relatif de cancer du colon à 1.11 (IC95%: 0.93-1.33,
P=0.03, 4 études).
IV.
Conclusion
Bien que plusieurs études aient évalué l’association entre la consommation de viande rouge et
le risque de cancer, le rôle de cet aliment sur la cancérogénèse reste équivoque.
Si l’analyse de l’expertise internationale du WCRF/AICR (2007) conclut à un risque de cancer
colorectal plus élevé (pas des autres cancers) avec la consommation de viande rouge et de
charcuteries, des chercheurs s’interrogent sur la validité de cette expertise en raison de limites
méthodologiques et certaines incohérences identifiées : une majorité de données non
significatives, des risques relatifs de faible intensité, qui intègrent les viandes transformées aux
viandes rouges fraîches, qui ne prennent pas en compte tous les facteurs de risque de cancer,
se basent sur des habitudes alimentaires recueillies 6 à 13 ans avant le diagnostic de cancer ou
encore ne parviennent pas à démontrer d’augmentation du risque pour des consommations
moyennes de viande. Par ailleurs, la colinéarité entre les consommations de viande rouge et
d’autres facteurs alimentaires (grande consommation de produits raffinés, d’alcool, faibles
consommations de fruits, légumes et fibres) ou comportementaux (sédentarité, tabagisme, IMC
élevé) rendent impossible l’analyse isolée des effets indépendants de la consommation de
viande rouge. Si bien que les associations retrouvées pourraient être le fait d’un comportement
alimentaire et de vie « à risque » plutôt que seulement liées à la consommation de viande.
Si les données issues des études épidémiologiques disponibles à ce jour révèlent une
corrélation entre la consommation de viande rouge et le risque de cancer, elles ne permettent
pas de conclure à un lien causal entre la viande rouge et le cancer qu’il s’agisse de celui
colorectal ou d’autres. Des études complémentaires paraissent à l’évidence encore nécessaires.
Quant aux hypothèses mécanistiques tentant d’expliquer les données significatives retrouvées
dans certains travaux, elles nécessitent d’être appuyées par un plus grand nombre d’études
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pour être validées, y compris celle impliquant la formation de composés mutagènes au cours
des cuissons intenses.
V.
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Annexes
Annexe 1 : Pas de relation dose-réponse entre les apports en viande rouge et cancer colorectal (source :
Alexander et Cushing 2010).
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