La loi ALUR et les baux d`habitation
Transcription
La loi ALUR et les baux d`habitation
Études 1 LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 La loi ALUR et les baux d’habitation Béatrice VIAL-PEDROLETTI, maître de conférences à l’Université d’Aix-Marseille La loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR », a profondément impacté la réglementation des baux d’habitation avec pour finalité récurrente la protection des locataires tant pour accéder à un logement que pour y demeurer. À cette fin, des mesures phares ont été prises qui portent, en particulier, sur les loyers et les congés. La liberté des bailleurs n’existe plus également concernant les locations en meublés qui seront dorénavant soumises à l’essentiel des dispositions de la loi du 6 juillet 1989. En définitive, une loi très polémique qui risque de dissuader un peu plus les investisseurs... au détriment des locataires. 2 1 - Incontestablement, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR », en date du 24 mars 2014 est une loi importante, une loi « fleuve » composée de 177 articles, qui impacte aussi bien la copropriété que les professions immobilières, les logements sociaux ou les logements locatifs privés. 2 - Dans le domaine des baux d’habitation, les modifications sont substantielles. Contrairement aux différents « toilettages » opérés sur la loi du 6 juillet 1989 depuis sa promulgation, le projet de loi ALUR initié par la dorénavant ex-ministre Cécile Duflot avait pour ambition de moderniser en profondeur cette loi. Et elle y est parvenue puisque c’est la loi dans son ensemble qui est retouchée, de son domaine d’application qui est étendu aux locations en meublés, au contrat de bail qui est davantage encadré, sans parler des mesures très polémiques relatives aux loyers ou aux congés. La réforme est tellement dense qu’il apparaît difficile, même dans le cadre de ce hors-série consacré à la loi « ALUR », de traiter de façon totalement exhaustive et approfondie des nouvelles mesures. Des études complémentaires plus ciblées seront opportunes, par exemple, sur les locations en meublés, les congés ou encore la colocation ; d’autres seront nécessaires dès la parution des décrets d’application, en particulier ceux attendus sur le bail type ou sur les loyers. 3 - Il ressort à l’évidence de cette loi un renforcement des droits des locataires, ce qui n’est pas étonnant compte tenu des objectifs de la réforme. L’exposé des motifs de la loi indique que le législateur a voulu « réguler le marché locatif privé » par l’instauration d’un régime d’encadrement des loyers destiné à combattre la crise du logement, « apaiser les rapports locatifs » et « renforcer les droits des locataires ». Sur ce dernier point, il a été remarqué que ce renforcement permettrait de restaurer un équilibre qui s’était fragilisé au fil du temps, au détriment des locataires. Il semblait pourtant que les différents toilettages intervenus postérieurement à la loi de 1989 aient été plutôt favorables aux locataires : l’instauration de nouvelles clauses réputées non écrites ou de nouveaux cas de réduction du délai de préavis, la prorogation de la durée du bail en cas de vente à la découpe ou encore la réduction du dépôt de garantie à un mois n’en sont que quelques exemples. 4 - Ce nouvel « équilibrage » – terme qui ne paraît pas des mieux adaptés – a été critiqué par les professionnels inquiets sur les perspectives à venir, sur les risques de désengagement des propriétaires pour l’investissement locatif en raison de l’encadrement des loyers et des congés, deux mesures phares de la loi. Une partie des politiques a également tenté d’obtenir un infléchissement du contenu de la loi, en pointant les graves atteintes portées au droit de propriété et à la liberté contractuelle. Mais la saisine du Conseil constitutionnel par les députés et sénateurs de l’opposition n’a rien donné. Par décision n° 2014-691 du 20 mars 2014, le conseil n’a censuré que quelques dispositions ponctuelles. Deux d’entre elles portaient sur l’encadrement du loyer 1 ; une troisième était relative à la protection des locataires âgés ne disposant que de faibles ressources 2. La dernière concernait la location de meublés touristiques de courte durée 3. 5 - La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 est donc applicable depuis le 27 mars, lendemain de sa publication au Journal officiel. Les dispositions transitoires (5) seront envisagées à la fin de cette étude dont l’objet est de mesurer l’impact de la loi ALUR sur le domaine d’application de la loi du 6 juillet 1989 (1), le contrat de bail (2), les obligations des parties (3) et la cessation des relations locatives (4). 1. Domaine d’application de la loi du 6 juillet 1989 A. - Maintien du domaine d’application traditionnel 6 - Locations de locaux nus (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 2). – Le domaine d’application d’origine de la loi, à savoir les locations de locaux nus à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation ainsi que les locaux loués accessoirement au local principal par le même bailleur (garages et autres...), n’est pas modifié en substance. L’apport principal réside dans la précision apportée à la notion de résidence principale, qui est substituée à celle d’habitation principale dans l’article 2. Ainsi, les locaux loués à 1. Le Conseil constitutionnel a censuré la limitation du complément de loyer pouvant être prévu au-delà du loyer de référence majoré en fonction des caractéristiques « exceptionnelles » de localisation ou de confort du logement. Il a censuré également les dispositions permettant de faire varier le loyer de référence majoré et le loyer de référence minoré « en fonction de la dispersion des niveaux de loyers observés ». Le loyer de référence majoré ne pourra qu’être supérieur de 20 % au loyer de référence et le loyer de référence minoré inférieur de 30 %). 2. Est censuré l’article 5 de la loi ALUR qui étendait cette protection au locataire ne répondant pas à ces critères, dès lors que vivait avec lui une personne à charge aux faibles ressources. 3. Le Conseil constitutionnel sanctionne l’article 19 permettant à l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble de décider à la majorité des copropriétaires de soumettre à son accord « toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage ». Études LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 usage d’habitation doivent-ils constituer la résidence principale du preneur, entendue comme devant être « occupée au moins huit mois par an sauf obligation professionnelle, raison de santé, ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du Code de la construction et de l’habitation » 4. L’indication d’une durée de huit mois n’est pas inédite. La loi du 1er septembre 1948 5 s’y réfère et le Code de la construction et de l’habitation aussi. La définition donnée ici de la résidence principale est d’ailleurs reprise de celle figurant dans l’article R. 351-1du Code de la construction et de l’habitation, texte qui fixe le domaine d’application de l’aide personnalisée au logement. En n’exigeant qu’une durée minimale d’occupation, la loi vient confirmer une jurisprudence qui a plusieurs fois affirmé que le bénéfice de la loi du 6 juillet 1989 ne supposait pas une occupation permanente des lieux et que des impératifs professionnels pouvaient même justifier que le locataire n’occupe les lieux que quelques mois dans l’année, voire les week-ends uniquement 6. 7 - Les locaux exclus du domaine de la loi restent les mêmes, sauf à remarquer que la location saisonnière, remplacée en première lecture par la notion de location meublée touristique « définie comme des logements meublés offerts en location à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile », n’est même plus mentionnée dans la version finale de l’article 2. Il faut dire qu’il était inutile de mentionner ce cas d’exclusion dans la mesure où la limitation du domaine d’application de la loi aux locations qui constituent la résidence principale les exclut déjà implicitement. 8 - Il est également à noter que les titulaires de logements de fonction, ainsi que les travailleurs saisonniers, pourront dorénavant, en vertu de l’article 24-1 de la loi du 6 juillet 1989, se faire représenter par une association à l’occasion d’un litige locatif avec leur bailleur. 9 - Locations relevant de régimes spécifiques (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art.40). – Les modifications apportées à l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989 qui énumère, a contrario les dispositions de la loi qui sont applicables aux logements appartenant à des organismes HLM, aux locations soumises à la loi du 1er septembre 1948, aux logements conventionnés ou autres logements visés par le texte, sont pour l’essentiel des modifications de coordinations. 10 - À noter cependant que dans le secteur HLM, le législateur a entendu protéger les descendants pour qu’il puisse bénéficier du transfert du bail prévu par l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 alors qu’il n’en respecte pas les deux conditions spécifiques posées par l’article 40. Ainsi est-il rajouté dans l’article 40-I que « lorsque le bénéficiaire du transfert est un descendant remplissant les conditions de ressources mais pour lequel le logement est inadapté à la 4. Selon l’article R. 351-8 du CCH, sont considérés comme personnes à charge sous réserve qu’ils vivent habituellement au foyer : – les enfants ouvrant droit aux prestations familiales et ceux qui, bien que n’ouvrant pas droit à ces prestations, doivent être considérés comme à charge au sens des 1° et 2° de l’article L. 512-3 et de l’article L. 513-1 du Code de la sécurité sociale et ont un âge inférieur à l’âge limite fixé au premier alinéa de l’article D. 542-4 du Code de la sécurité sociale en application du dernier alinéa de l’article L. 512-3 du même code ; – les ascendants du bénéficiaire ou de son conjoint qui sont âgés d’au moins soixante-cinq ans ou de soixante ans en cas d’inaptitude au travail et dont les ressources déterminées dans les conditions prévues à l’article R. 351-5 n’excèdent pas le plafond individuel prévu à l’article L. 815-9 du Code de la sécurité sociale en vigueur au 31 décembre de l’année de référence, multiplié par 1,25 ; – les ascendants, descendants ou collatéraux au deuxième ou au troisième degré du bénéficiaire ou de son conjoint qui sont atteints d’une infirmité entraînant une incapacité permanente au moins égale à un pourcentage fixé par décret ou qui sont, compte tenu de leur handicap, dans l’impossibilité reconnue par la commission technique d’orientation et de reclassement professionnel, prévue par l’article L. 323-11 du Code du travail, de se procurer un emploi et dont les ressources déterminées dans les conditions prévues à l’article R. 351-5 n’excèdent pas le plafond individuel prévu à l’article L. 815-9 du Code de la sécurité sociale en vigueur au 31 décembre de l’année de référence, multiplié par 1,25. 5. L. n° 48-1360, 1er sept. 1948, art. 10-2°. 6. CA Toulouse, 11 oct. 2005, n° 04/02306 : JurisData n° 2005-288619 – CA Versailles, 29 sept. 2009, n° 08/06967 : JurisData n° 2009-379215. taille du ménage, l’organisme bailleur peut proposer un relogement dans un logement plus petit pour lequel l’intéressé est prioritaire ». 11 - L’article 40 est en outre complété par un VIII qui énumère a contrario les dispositions de la loi de 1989 qui sont applicables aux résidences universitaires, nouvelles promues dans le Code de la construction et de l’habitation. Un nouvel article L. 631-12 leur est consacré qui définit la résidence universitaire comme « un établissement destiné au logement collectif à titre de résidence principale dans des immeubles comportant à la fois des locaux privatifs, meublés ou non, et des locaux affectés à la vie collective. Cet établissement accueille des étudiants, des personnes de moins de trente ans en formation ou en stage et des personnes titulaires d’un contrat de professionnalisation ou d’apprentissage. À titre exceptionnel, cet établissement peut accueillir des enseignants et des chercheurs ». 12 - Le texte fixe les conditions spécifiques du bail conclu avec les occupants de ces résidences, notamment sa durée qui est au maximum d’un an, mais qui peut être renouvelée. B. - Extension aux locations en meublés 13 - D’un régime libéral à un statut légal. – Les locations en meublés auront connu de belles heures ; celles où les propriétaires bénéficiaient du régime libéral du Code civil et pouvaient encore, par ce biais, échapper à la réglementation contraignante de la loi du 6 juillet 1989. L’encadrement progressif de ces baux, en premier lieu par la loi du 28 juillet 1998, puis par des lois postérieures a permis d’assurer une protection minimale à ces locataires. Pour autant, les propriétaires conservaient une marge de liberté conséquente à laquelle la loi ALUR a entendu mettre fin. L’objectif affiché de renforcer la protection des locataires en meublés se traduit par l’extension de bons nombres de dispositions de la loi de 1989 à ce type de locations, tout en tenant compte de leur spécificité. Bien entendu, les locations à titre de résidence secondaire restent régies par le Code civil, sous réserve du respect de règles particulières aux meublés touristiques de courtes durées 7. 14 - Dispositions applicables aux meublés loués en résidence principale. – La loi ALUR insère, après le titre premier de la loi du 6 juillet 1989 un titre 1er bis intitulé « des rapports entre bailleurs et locataires dans les logements meublés résidence principale » 8 qui se substitue aux dispositions relatives aux locations en meublés qui figuraient dans les articles L. 632-1 et suivants du CCH. Pour autant, ce texte n’est pas abrogé puisqu’il contient toujours des dispositions spécifiques à la location d’un meublé situé dans un établissement recevant du public aux fins d’hébergement (hôtel meublé, maison de retraite). Ces locations-là sont également soumises au titre 1er bis de la loi du 6 juillet 1989, à l’exception des articles 3-2, 3-3, 18, 24-1, 25-4 et 25-11. 15 - Ce titre 1er bis n’est applicable ni aux logements-foyers, ni aux logements faisant l’objet d’une convention avec l’État portant sur leurs conditions d’occupation et leurs modalités d’attribution. Il ne régit pas non plus les logements attribués ou loués en raison de l’exercice d’une fonction ou de l’occupation d’un emploi et les locations consenties aux travailleurs saisonniers. 16 - L’article 25-3 nouveau de la loi du 6 juillet 1989 énumère les dispositions de cette loi qui sont applicables aux baux en meublés. Il s’agit des articles : 1er (discriminations), 3-2 (état des lieux) ; 3-3 (dossier de diagnostics techniques) ; 4 (clauses réputées non écrites) ; 5 (rémunération des intermédiaires) ; 6 et 7 (obligations des parties) ; 7-1 (prescription des actions dérivant du bail) ; 8 (cession et sous-location) ; 8-1 (colocation) ; 18 (décret d’encadrement des loyers) 20-1 (obligation de mise en conformité en cas d’indécence) ; 21 (quittance) ; 22 (dépôt de garantie) ; 22-1 7. V. CCH, art. L. 631-7 : afin de lutter contre la pénurie de logements, la loi ALUR prévoit un régime d’autorisation pour la location de meublés touristiques dans les zones tendues. – V. infra Loyers et copr. 2014, Hors-série n° 1, étude 2. 8. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 25-3 à 25-11, nouveaux. 3 Études (cautionnement) 22-2 (pièces justificatives exigées du candidat à la location) ; 24 (clause résolutoire) et 24-1 (associations mandatées pour régler les litiges). 17 - Outre ces textes, les locations en meublés sont régies par des dispositions complémentaires. 18 - Ainsi, le bail meublé est dorénavant défini par la loi, comme devant porter sur « un logement décent équipé d’un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d’y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante » (la liste des éléments que doit comporter ce mobilier doit être fixée par décret). C’est ce que la jurisprudence exigeait déjà des propriétaires pour que la qualification de meublé soit justifiée. 19 - Comme pour les baux de locaux non meublés, le contrat de location doit respecter un contrat-type auquel sont joints un inventaire et un état détaillé. Il reste, comme auparavant un bail conclu pour une durée d’au moins un an (l’article L. 632-1 du CCH ne prévoyait pas un minimum, mais une durée d’un an), avec une possible réduction à neuf mois lorsqu’il est consenti à un étudiant. Dans ce cas, il n’y a pas de tacite reconduction au terme du bail. 20 - Pour s’en tenir aux nouveautés par rapport au régime initial instauré par l’article L. 632-1 du CCH, il y a lieu de noter que le loyer initial est encadré dans les zones tendues, comme pour la location de locaux nus, mais en adaptant à cette catégorie de logements les dispositions du nouvel article 17 de la loi de 1989. Ainsi une majoration unitaire par mètre carré aux loyers de référence est prévue pour tenir compte du caractère meublé du logement. De même, le complément de loyer tient compte des équipements et services associés au logement. La révision du loyer est soumise au même régime restrictif de mise en œuvre que pour les baux non meublés. Le régime des congés est également affecté. Alors qu’aucun formalisme n’était jusqu’ici prévu, il faudra à l’avenir notifier les congés par acte d’huissier ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (mais curieusement pas par une remise en main propre, procédé prévu par le nouvel article 15). La reprise pour habiter n’est plus aussi libre puisque les bénéficiaires, comme dans l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 sont listés par la loi 9 et il s’agit des mêmes personnes. Enfin, le bailleur qui entend congédier pour l’un des trois motifs prévus par la loi est soumis à l’obligation de proposer un relogement lorsque le locataire est âgé de plus de soixante-cinq ans et à des ressources inférieures à un plafond qui est celui en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés. C’est le même régime que pour les baux non meublés (avec la même exception au profit du bailleur âgé ou aux ressources inférieures au seuil précité), à une différence près qui ne s’explique que par une négligence des parlementaires qui ont saisi le Conseil constitutionnel. En effet, même s’il ne satisfait pas à ces seuils d’âge et de ressources, le locataire bénéficiera néanmoins de cette protection dès lors qu’il a à sa charge une personne vivant habituellement dans le logement et répondant aux conditions précitées, alors qu’une disposition semblable qui figurait dans l’article 15 de la loi de 1989 modifié par la loi ALUR a été censurée par le Conseil constitutionnel. 21 - Un régime dérogatoire est prévu pour le montant du dépôt de garantie, afin de tenir compte du coût de remise en état lié à l’ameublement du logement. Le montant maximum est fixé à deux mois, alors qu’il est d’un mois dans la loi du 6 juillet 1989. 22 - Il en va de même des charges locatives. Il est prévu deux modalités d’imputation de celles-ci : soit un mécanisme de provision de charges régularisables comme dans l’article 23 de la loi de 1989 ; soit un forfait versé simultanément au loyer, dont le montant et la périodicité sont prévus dans le contrat et qui ne peut donner lieu à complément ou régularisation ultérieure. 4 9. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 25-8-I, al. 5. LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 2. Contrat de bail 23 - Documents exigés d’un candidat à la location ou de sa caution. – Pour éviter que la recherche d’un logement ne se transforme en « parcours du combattant » et aussi pour limiter la demande de certains justificatifs jugés discriminatoires ou portant atteinte à la vie privée, l’article 22-2, introduit dans la loi du 6 juillet 1989 par la loi du 17 janvier 2002 fixait une liste de documents qui ne pouvaient être demandés à un candidat à la location. La loi nouvelle supprime cette liste qui avait été plusieurs fois complétée par des lois postérieures. À sa place, le nouvel article 22-2 prévoit qu’un décret en Conseil d’État énumérera la liste des seules pièces justificatives pouvant être exigées du candidat à la location ou de sa caution par le bailleur, préalablement à l’établissement du contrat de location. 24 - Le texte précise également qu’« en préalable à l’établissement du contrat de location, le bailleur ne peut imposer la cosignature d’un ascendant ou d’un descendant du candidat à la location ». 25 - Pour rendre plus effectives ces interdictions, une amende administrative est envisagée par l’article 22-2 : prononcée par le représentant de l’État dans le département, son montant ne peut être supérieur à 3 000 € pour une personne physique et à 15 000 € pour une personne morale. A. - Parties au contrat 1° Cotitularité légale : extension aux partenaires pacsés 26 - Cotitularité subordonnée à une demande. – La cotitularité légale du droit au bail, jusqu’ici réservée aux époux, est étendue aux partenaires pacsés. Le droit au bail portant sur le logement familial est donc réputé appartenir aux deux partenaires alors même que le contrat de location n’aurait été conclu que par un des partenaires, sous réserve, précise l’article 1751 modifié, d’une demande conjointe des partenaires. Le bailleur ne devrait pas pouvoir la refuser. Cette extension était prévisible dans un contexte de rapprochement de la réglementation du pacs et du mariage. Elle doit être approuvée, au moins pour des raisons de cohérence juridique avec l’article 9-1 de la loi du 6 juillet 1989 qui impose de notifier tous les actes jalonnant le bail à la personne liée au locataire par un Pacs, bien que celle-ci ne soit pas locataire de par la loi. 27 - Attribution judiciaire du droit au bail. – Un nouvel article 1751-1 du Code civil prévoit également la possibilité d’une attribution judiciaire du droit au bail suite à une rupture du pacs : « en cas de dissolution du pacte civil de solidarité, l’un des partenaires peut saisir le juge compétent en matière de bail aux fins de se voir attribuer le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l’habitation des deux partenaires, sous réserve des créances ou droits à indemnité au profit de l’autre partenaire. Le bailleur est appelé à l’instance. Le juge apprécie la demande en considération des intérêts sociaux et familiaux des parties. ». Cette appréciation du juge d’instance (et non du JAF comme pour les époux) laisse une latitude pour refuser la demande d’attribution du bail s’il apparaît, notamment au vu des arguments soulevés par le bailleur, que le partenaire n’est pas suffisamment solvable pour rester locataire à lui tout seul, compte tenu du fait que la rupture du pacs fait cesser la solidarité. L’attribution du droit au bail pourrait dans ce cas être subordonnée à la fourniture d’une caution. 2° Cotitularité conventionnelle : encadrement de la colocation (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 8-1) 28 - Définition de la colocation. – Face à la pratique courante que constitue la colocation, la loi ALUR a décidé de l’encadrer par quelques dispositions spécifiques contenues dans un article 8-1 nouveau de la loi du 6 juillet 1989. Ces dispositions qui Études LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 s’appliquent aux baux de locaux nus comme aux baux de locaux meublés, viennent se surajouter ou déroger aux autres règles générales de la loi du 6 juillet 1989. En effet le texte précise que « chaque contrat de bail formalisant une colocation respecte les chapitres Ier, II et III du présent titre Ier ou, s’il concerne un logement loué meublé, du titre Ier bis de la présente loi ». 29 - Le texte commence par définir la colocation comme « la location d’un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale et formalisée par la conclusion d’un contrat unique ou de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur ». Cette définition rend compte de la variété des cas de colocation. Soit un seul bail est conclu entre un bailleur et des locataires ; soit il y a autant de contrats qu’il y a de locataires, parce que le propriétaire loue plusieurs chambres dans un même appartement à des locataires distincts. Bien qu’il y ait dans cette configuration plusieurs contrats différents conclus entre locataires et bailleur, il s’agit bien d’une colocation dans la mesure où les différents locataires d’un même appartement partageront les pièces communes (cuisine, salle de bains, etc.). 30 - Cette colocation « à baux multiples » révèle des difficultés, déjà dénoncées dans cette revue 10, auxquelles l’article 8-1 a entendu remédier. D’abord et à l’évidence, dans ce type de colocation, les critères de la décence définis pour un bail unique sur un appartement ne peuvent être respectés 11. D’où la prévision d’un décret en Conseil d’État pour adapter aux logements loués en colocation les dispositions du décret relatif à la décence du 30 janvier 2002. 31 - Ensuite, l’ouverture de la colocation à des baux multiples, passés avec chacun des colocataires, pourrait permettre à des bailleurs peu scrupuleux d’organiser des colocations abusives en termes de caractéristiques des locaux, de nombre de personnes colocataires et de montant des loyers. De plus, ces nouvelles dispositions pourraient, indirectement, favoriser le développement des marchands de sommeil. Afin de prévenir de telles dérives, et sur proposition de la Commission des affaires économiques et sociales 12, l’article 8-1 a été complété par l’Assemblée nationale pour soumettre cette colocation aux règles générales de division contenues dans les articles L. 111-6-1 et L. l11-6-1-1 du Code de la construction et de l’habitation 13 et aux normes de peuplement énoncées à l’article L. 831-3-I du Code de la sécurité sociale, qui doivent être définies par voie réglementaire. 32 - Enfin, pour éviter que ce cas particulier de colocation ne permette au bailleur de contourner l’encadrement des loyers – les loyers de référence étant fixés par appartement et non par chambre – l’Assemblée nationale en deuxième lecture est venue rajouter que l’addition des loyers perçus au titre de ces multiples baux ne devait pas dépasser le loyer de référence majoré, tel que défini à l’article 3 du projet de loi. 33 - Régime de la colocation. – Comme pour le bail consenti à un unique locataire, le contrat devra respecter un contrat-type défini par décret en Conseil d’État. 34 - Concernant l’assurance que doit souscrire un locataire, les parties au contrat peuvent se mettre d’accord pour que le bailleur souscrive, comme en matière de bail non meublé, une assurance pour compte récupérable auprès de locataires. 10. B. Vial-Pedroletti, Locations de chambres dans un appartement : aménagements conventionnels et difficultés juridiques : Loyers et copr. 2008, étude 1. 11. CA Paris, 14 nov. 2013, n° 12/02146 : JurisData n° 2013-025885 ; Loyers et copr. 2014, comm. 5, faute d’une alimentation en eau et d’un coin cuisine aménagé, la chambre louée dans un appartement ne respecte pas les critères de décence. 12. Rapp. Goldbert et Linkenheld, 19 déc. 2013, n° 1670. 13. Ces règles interdisent notamment la division d’un logement d’une superficie de moins de 14 m2 ou d’un volume habitable de moins de 33 m3 ou qui ne sont pas pourvus d’une installation d’alimentation en eau potable, d’une installation d’évacuation des eaux usées ou d’un accès à la fourniture de courant électrique. 35 - Par dérogation au régime instauré par l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989, les parties au bail ont le choix entre deux modalités de récupération des charges locatives : – soit dans les conditions prévues à l’article 23, lorsqu’il s’agit de provisions pour charges ; – soit sous forme d’un forfait versé simultanément au loyer, dont le montant et la périodicité de versement sont définis dans le contrat et qui ne peuvent donner lieu à complément ou à régularisation ultérieure. Pour éviter cependant un « gonflement » des charges destiné à contourner l’encadrement des loyers, la loi prend soin de préciser que le montant ne doit pas être manifestement disproportionné au regard des charges dont le locataire ou, le cas échéant, le précédent locataire se serait acquitté. 36 - Enfin, la mesure la plus importante concerne sans nul doute l’étendue dans le temps des effets de la solidarité entre colocataires et entre locataire et caution que la loi a voulu limiter. Contrairement au principe jusqu’ici dégagé par la jurisprudence, le congé délivré en cours de bail par un locataire met fin à son engagement solidaire ainsi qu’à celui de la personne qui s’est portée caution pour lui. L’extinction de la solidarité suppose néanmoins qu’un nouveau locataire figure au bail. À défaut, la solidarité du colocataire sortant s’éteint au plus tard à l’expiration d’un délai de six mois. L’acte de cautionnement des obligations d’un ou de plusieurs colocataires résultant de la conclusion d’un contrat de bail d’une colocation identifie nécessairement, sous peine de nullité, le colocataire pour lequel le congé met fin à l’engagement de la caution. 37 - Il est opportun de préciser que l’ensemble de ces règles et en particulier la limitation dans le temps de la solidarité ne concerne que les baux d’habitation relevant de la loi du 6 juillet 1989. Les titulaires de baux relevant du Code civil, en particulier les baux professionnels ou commerciaux, ne bénéficient pas de cette limitation. B. - Conclusion du contrat 38 - Instauration d’un bail-type. – L’article 3 précise que le contrat de bail doit respecter un modèle-type, défini par décret en Conseil d’État. Comme l’a indiqué le rapporteur, ce modèle de contrat introduit une simplification : au lieu d’acheter dans le commerce un formulaire type qui peut être imprécis ou contenir des erreurs, les propriétaires qui louent leurs biens de manière autonome, sans passer par un professionnel auront à leur disposition un document très clair et exhaustif. Députés et sénateurs de l’opposition se sont élevés contre cette atteinte à la liberté contractuelle. En vain et la saisine du Conseil constitutionnel sur ce point n’a pas davantage prospérée. 1° Contenu du contrat 39 - Ce contenu qui était jusqu’ici concentré dans l’article 3, est désormais l’objet de plusieurs articles. La loi ALUR rajoute de nouvelles dispositions, relatives à la sanction d’une surface erronée 14, à l’état des lieux 15 et au dossier de diagnostic technique 16. 40 - Clauses imposées. – Le contenu minimal obligatoire reste listé par l’article 3 de la loi. Outre les mentions obligatoires imposées jusqu’ici (identité du bailleur, date de prise d’effet et durée, consistance et destination du bail, désignation des locaux et équipements d’usage privatif, surface habitable, montant du loyer, du dépôt de garantie), de nouvelles clauses devront figurer dans les futurs baux. À côté du nom ou de la dénomination du locataire et d’une mention relative aux équipements d’accès aux technologies de l’information et de la communication qui jusqu’ici faisait l’objet d’un document annexé au contrat, les autres nouvelles mentions sont essentiellement de nature financière. Ainsi, devront être mentionnés au contrat : 14. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-1, nouveau. 15. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-2, nouveau. 16. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-3 nouveau. 5 Études 6 LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 bailleur ou prononcée par le juge rétroagira à la date de signature du bail. En revanche, si elle intervient plus de six mois à compter de la prise d’effet du bail, la diminution de loyer prendra effet à la date de la demande. 46 - La sanction prévue par la loi ALUR a le mérite de mettre fin aux hésitations jurisprudentielles qui étaient sources d’insécurité juridique. En effet, faute de sanction spécifique, les tribunaux hésitaient à dédommager le locataire. Face à des demandes de réduction de loyer, généralement formulées par le preneur au terme du bail à l’occasion d’un règlement de comptes avec le bailleur, certains tribunaux y faisaient droit dès lors qu’ils estimaient que la différence de surface, relativement importante, était nécessairement préjudiciable au preneur 20 tandis que d’autres la refusaient considérant que la surface n’est pas un élément déterminant du consentement 21. 47 - Clauses réputées non écrites. – De nouvelles clauses sont réputées non écrites par l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989. Parmi elles, la clause pénale a suscité de vives discussions lors des débats parlementaires. Malgré un vote en leur faveur en première lecture par l’Assemblée nationale qui avait considéré que, par soucis d’équilibre, le locataire devait être pénalisé en cas de retard de paiement des loyers et charges puisque le bailleur lui-même était contraint de payer une pénalité de 10 % du dépôt de garantie par mois de retard dans le remboursement, les clauses pénales ont finalement été censurées. Dans la nouvelle version de l’article 4, elles sont interdites en tant que « pénalité », au même titre que les amendes. 48 - Une autre clause est réputée non écrite ; celle qui impose au locataire en plus du paiement du loyer, de souscrire un contrat pour la location d’équipements. Enfin, deux clauses qui existaient déjà sont réécrites. C’est le cas de la clause qui impose au locataire la facturation de l’état des lieux lorsque celui-ci n’est pas établi par huissier dans le cas prévu par l’article 3. Comme le coût de l’état des lieux d’entrée est dans le nouvel article 5 pour partie à la charge du locataire, c’est uniquement le coût de l’état des lieux « de sortie » qui ne peut pas par une clause du bail être imposé au preneur. Est également modifiée la clause, réputée non écrite, qui interdit au locataire de demander une indemnité au bailleur lorsque celui-ci réalise des travaux : le seuil au-delà duquel l’indemnisation du locataire est imposée n’est plus de quarante jours, mais de vingt et un jours. Ce même seuil remplace dans l’article 1724 du Code civil, texte applicable à tous les baux, mais non impératif, le seuil de quarante jours. – le loyer de référence et le loyer de référence majoré, correspondant au type de logement et définis par le représentant de l’État dans le département sur les territoires mentionnés à l’article 17 17 ; – le montant et la date de versement du dernier loyer acquitté par le précédent locataire, dès lors que ce dernier a quitté le logement moins de dix-huit mois avant la signature du bail. La mention de la date de versement va permettre au locataire de vérifier la date de fin du précédent contrat 18 ; – la nature et le montant des travaux effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat de location ou depuis le dernier renouvellement du bail 19. 41 - La finalité de ces indications est de contrôler que le bailleur respecte les nouvelles règles d’encadrement de loyers, qu’il s’agisse du loyer initial, réglementé par le nouvel article 17 ou du loyer à la relocation, encadré par les décrets successifs du 1er août 2012 et 2013 et par les futurs décrets qui seront pris en application de l’article 18 de la loi du 6 juillet 1989. En effet, ces décrets autorisent, par dérogation au blocage de principe du loyer demandé à un nouveau locataire, une augmentation en cas de travaux d’un certain montant, ce qui justifie la mention imposée par l’article 39°. 42 - Le renoncement, le cas échéant, au bénéfice de la garantie universelle des loyers (dont l’entrée en vigueur est différée au 1er janvier 2016), telle que prévue à l’article 24-2 nouveau de la loi, devra également être expressément mentionné dans le contrat de location. À défaut, le bailleur s’engage à déclarer le contrat de location auprès de l’agence mentionnée au II du même article 24-2. La GUL est donc perçue, semble-t-il, comme une garantie supplétive qui s’appliquera dès lors que les parties n’ont pas manifesté un choix différent. 43 - Sanctions. – Après avoir rappelé que chacune des parties a la possibilité d’exiger de l’autre l’établissement d’un contrat conforme aux dispositions légales, l’article 3 in fine rajoute une sanction spécifique en cas d’absence dans le contrat de location d’une des informations relatives à la surface habitable, aux loyers de référence et au dernier loyer acquitté par le précédent locataire. Dans ce cas, le locataire peut, dans un délai d’un mois à compter de la prise d’effet du contrat de location, mettre en demeure le bailleur de porter ces informations au bail. À défaut de réponse du bailleur dans le délai d’un mois ou en cas de refus de ce dernier, le locataire peut saisir, dans le délai de trois mois à compter de la mise en demeure, la juridiction compétente afin d’obtenir, le cas échéant, la diminution du loyer. 44 - Sanction d’une surface erronée (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-2). – La surface habitable est un critère déterminant dans le choix d’un logement qui justifie que le locataire puisse être dédommagé lorsque la surface annoncée par le bailleur ne correspond pas à la réalité. Et pourtant, il aura fallu attendre cette loi pour que soit comblé un vide législatif ; l’absence de sanction dans la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 qui a rendu obligatoire la mention de la surface habitable du bien loué. 45 - Inspiré directement de la « loi Carrez », le nouvel article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 permet au locataire d’exiger du bailleur une diminution de prix au prorata du nombre de mètres carrés manquants lorsque la surface habitable du bien loué est inférieure de plus d’un vingtième à celle annoncée dans le bail. Le texte précise la procédure à suivre : si le bailleur ne répond pas dans un délai de deux mois à compter de la demande en diminution de loyer, le juge peut être saisi, dans le délai de quatre mois à compter de cette même demande, afin de déterminer, le cas échéant, la diminution de loyer à appliquer. Le locataire a tout intérêt à formuler sa demande assez rapidement. En effet, s’il agit dans les six premiers mois du bail, la diminution de loyer acceptée par le 49 - État des lieux complété (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 32). – La nécessité d’établir un état des lieux à l’entrée comme à la sortie du contrat demeure et le principe d’un établissement contradictoire, soit à l’amiable entre les parties (ou par un tiers mandaté), soit par huissier aussi. Dans le projet adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, il était question d’imposer, comme pour le bail, un document-type. Le texte définitivement adopté se contente de préciser que l’état des lieux est établi selon des modalités définies par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de concertation. 50 - Parmi les nouveautés, il y a lieu de mentionner que les états des lieux d’entrée et de sortie sont complétés par un relevé de différents compteurs (installation de chauffage ou d’eau chaude sanitaire individuelle, ou collective avec un comptage individuel), ce qui était déjà le cas dans la pratique. Ces données pourront sur leur demande être mises à la disposition des entreprises chargées d’effectuer le diagnostic de performance énergétique, afin de 17. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3- 7°. 18. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-8°. 19. L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-9°. 20. CA Versailles, 7 sept. 2010, n° 09/06554 : JurisData n° 2010-019719 ; Loyers et copr. 2011, comm. 4. 21. CA Paris, 11 janv. 2011, n° 08/12907 : JurisData n° 2011-000630. 2° Documents annexes Études LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 rendre ce dernier plus fiable en l’appuyant sur des données de consommation réelle. 51 - Par ailleurs, le texte autorise le locataire à demander au bailleur ou à son représentant de compléter l’état des lieux dans un délai de dix jours à compter de son établissement. Si cette demande est refusée, le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation territorialement compétente. Ce délai est évidemment opportun car il laisse le temps au locataire, qui peut ne pas prendre tout de suite possession du logement, de constater les défauts dont il ne se serait pas rendu compte au moment de la signature de l’état des lieux. Cette pratique, régulièrement constatée sur le terrain, a recueilli, semble-t-il, l’assentiment des professionnels. Il n’empêche qu’elle peut être source d’abus si dans les dix jours le preneur a commis des désordres de son propre fait dans le logement. À défaut d’intermédiaire professionnel pouvant justifier de l’auteur des désordres et refuser, en conséquence, de rectifier l’état des lieux, il appartiendra au locataire de démontrer que les dégradations sont antérieures à l’état des lieux. 52 - Dossier de diagnostic technique renforcé (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 3-3). – Le dossier de diagnostic technique, que le bailleur doit fournir et annexer au contrat de location lors de sa signature ou de son renouvellement, s’alourdit. En plus du diagnostic de performance énergétique (CCH, art. L. 134-1), du constat de risque d’exposition au plomb (C. santé publ., art. L. 1334-5 et L. 1334-7) et de l’état des risques naturels et technologiques (dans les zones mentionnées au C. env., art. L. 125-5 I) devront être joints au bail : – une copie d’un état mentionnant l’absence ou, le cas échéant, la présence de matériaux ou produits de la construction contenant de l’amiante, un décret en Conseil d’État devant en définir les modalités d’application, notamment la liste des matériaux ou produits concernés ; – un état de l’installation intérieure d’électricité et de gaz, dont l’objet est d’évaluer les risques pouvant porter atteinte à la sécurité des personnes. Un décret en Conseil d’État doit en définir les modalités d’application, ainsi que les dates d’entrée en vigueur de l’obligation en fonction des enjeux liés aux différents types de logements, dans la limite de six ans à compter de la publication de la loi ALUR. 53 - Ces exigences relatives aux installations d’électricité et de gaz figurent déjà dans le décret sur la décence. La fourniture d’un diagnostic permettra de vérifier que le bailleur respecte bien, sur ces points son obligation de délivrer un logement décent. 54 - Notice d’information. – À l’avenir, une notice d’information relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs ainsi qu’aux voies de conciliation et de recours qui leur sont ouvertes pour régler leurs litiges devra être annexée au contrat de location. Cette notice d’information précise également les droits, obligations et effets, pour les parties au contrat de location, de la mise en œuvre de la garantie universelle des loyers, telle que prévue au même article 24-2. Un arrêté du ministre chargé du Logement, pris après avis de la Commission nationale de concertation, doit déterminer le contenu de cette notice. 3° Rémunération des intermédiaires 55 - Partage d’honoraires liés à certaines prestations. – Un nouvel article 5, I, qui remplace l’article 5 pose en principe que la rémunération des personnes mandatées pour se livrer ou prêter leur concours à l’entremise ou à la négociation d’une mise en location d’un logement, qu’il s’agisse d’un non meublé ou d’un meublé, est à la charge exclusive du bailleur. Par exception, sont partagés entre bailleur et locataire les honoraires des personnes mandatées pour effectuer la visite du preneur, constituer son dossier, rédiger un bail et l’état des lieux, dernier acte qui était jusqu’à présent à la charge exclusive du bailleur. 56 - Ce partage n’est pas forcément égalitaire, le texte se contentant de préciser que le preneur ne peut payer une somme supé- rieure à celle pesant sur le bailleur. De plus, la part incombant au preneur sera plafonnée par décret. En effet l’article 5-1 indique que le montant toutes taxes comprises imputé au preneur pour ces prestations demeure inférieur ou égal à un plafond par mètre carré de surface habitable de la chose louée, fixé par voie réglementaire et révisable chaque année, dans des conditions définies par décret. Le plafonnement des frais et leur décorrélation avec le montant des loyers a été l’objectif du législateur. Il en résulte que les intermédiaires ne pourront plus facturer au locataire le classique mois de loyer qu’ils exigeaient au titre de la constitution de son dossier. 57 - Ces honoraires sont dus à la signature du bail ou à compter de la réalisation de la prestation s’agissant de l’état des lieux. Attention : Afin d’améliorer l’information du locataire, les trois premiers alinéas de l’article 5, I ainsi que les montants des plafonds qui y sont définis doivent être reproduits, à peine de nullité, dans le contrat de bail lorsque celui-ci est conclu avec le concours d’une personne mandatée et rémunérée à cette fin. Les intermédiaires doivent donc être vigilants sur ce point, à défaut de quoi les parties, et particulièrement le locataire, seraient en droit de refuser de payer les honoraires ou de réclamer restitution de l’indu. 3. Obligations des parties A. - Relations financières 1° Loyer a) Fixation du loyer 58 - Encadrement du loyer initial dans les « zones tendues » (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 17). – C’est sans doute la mesure la plus polémique de la loi ALUR, celle sur laquelle même le conseil d’analyse économique, rattaché au Premier ministre a rendu un rapport très mitigé, constatant que le dispositif risquerait « d’engendrer des inefficacités dans le parc locatif privé et qui avait recommandé avant toute généralisation, de procéder à une expérimentation dans les zones pilotes. ». 59 - Malgré cela, la majorité a maintenu le cap et décider d’encadrer le loyer initial dans les zones dites « tendues », c’est-à-dire selon le nouvel article 17, I, « dans les zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social ». Un décret est attendu qui doit fixer la liste des communes comprises dans ces zones. Dans les autres zones, le loyer initial est totalement libre. 60 - Dans les zones tendues, le représentant de l’État dans le département fixe chaque année, par arrêté, en s’appuyant sur des données fournies par l’observatoire local des loyers, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique. L’article 17-I précise que le loyer de référence majoré ne peut être fixé à un montant supérieur de 20 % au loyer de référence, tandis que le loyer de référence minoré ne peut être fixé à un montant supérieur au loyer de référence diminué de 30 %. À partir de ces principes, il est prévu que le loyer initial est plafonné au loyer de référence majoré et, en cas de dépassement, le locataire peut intenter une action en diminution du loyer. 61 - Un complément de loyer peut néanmoins être appliqué au loyer de base dès lors que le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort par leur nature et leur ampleur par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans 7 Études le même secteur géographique. Dans le texte tel que voté en dernière lecture par le Sénat le 20 février 2014, le complément de loyer devait être « exceptionnel » et justifié par des caractéristiques de localisation ou de confort elles-mêmes exceptionnelles. Le Conseil constitutionnel a cependant censuré ce qualificatif jugé trop attentatoire au droit de propriété. Il en résulte qu’il devrait être plus facile a priori d’exiger un complément de loyer, sous réserve de la façon dont les juges saisis appliqueront le texte. Quoiqu’il en soit, les modalités d’application de cette disposition doivent être précisées par décret en Conseil d’État. 62 - Le preneur peut contester le complément de loyer en respectant une procédure précise : Il doit impérativement commencer par saisir dans un délai de trois mois à compter de la signature du bail la commission départementale de conciliation. Il appartient alors au bailleur de démontrer que les caractéristiques de localisation ou de confort, de par leur nature et leur ampleur justifient un dépassement du loyer de référence majoré. À défaut de conciliation, le locataire dispose d’un délai de trois mois à compter de la réception de l’avis de la commission départementale de conciliation pour saisir le juge d’une demande en annulation ou en diminution du complément de loyer exceptionnel. La fin de non-recevoir tirée de l’absence de saisine préalable de la commission départementale de conciliation peut être soulevée d’office par le juge. 63 - Le loyer résultant du document de conciliation ou de la décision de justice rétroagit à compter de la prise d’effet du bail. 64 - Révision du loyer en cours de bail (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 17-1). – La révision annuelle du loyer, limitée à l’indice de référence des loyers (IRL), intervient dans les mêmes conditions que celles prévues initialement dans la loi de 1989, moyennant certaines modifications. La révision reste subordonnée à la présence d’une clause spécifique dans le bail, contrairement à ce qui avait été décidée en première lecture. En revanche, l’important à noter est que cette clause d’indexation ne joue plus automatiquement, comme auparavant, ce qui permettait au bailleur qui n’avait pas réclamé les augmentations en temps utile de réclamer les arriérés d’indexation sur une période de cinq ans. Désormais, l’application de la révision du loyer suppose une manifestation de volonté du bailleur et si celui-ci ne s’est pas manifesté dans un délai d’un an suivant sa date de prise d’effet, il est réputé avoir renoncé au bénéfice de cette clause pour l’année écoulée. Autrement dit, l’action en révision est prescrite au bout d’un an, l’objectif étant d’éviter les révisions tardives qui entraînaient un rappel de loyers conséquent pour le locataire. Dans le même esprit, il est prévu que si le bailleur manifeste sa volonté de réviser le loyer dans le délai d’un an, cette révision de loyer prenne effet à compter de sa demande, sans rétroactivité donc. 65 - La révision du loyer en cours de bail peut également résulter de l’accomplissement de travaux d’amélioration par le bailleur. Le principe d’une majoration de loyer par accord des parties en prévision ou suite à des travaux d’amélioration est maintenu ; il est seulement précisé que la majoration ainsi définie ne peut ouvrir droit au locataire d’engager une action en diminution du loyer. Autrement dit, le montant de la majoration est librement fixé par les parties, comme l’avait d’ailleurs déjà affirmé la Cour de cassation 22 et le locataire ne pourrait objecter qu’il dépasse le loyer médian de référence, voire le loyer majoré appliqué par le bailleur. 66 - Réajustement du loyer au moment du renouvellement de bail (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 17-2). – Les modalités de réajustement du loyer diffèrent selon que le logement loué se trouve en zone tendue ou non. 67 - Dans les zones tendues, l’article 17-2, I envisage deux actions : 8 22. Cass. 3e civ., 5 juin 2002, n° 00-18.697 : JurisData n° 2002-014791 ; Loyers et copr. 2002, comm. 254 ; AJDI 2002, p. 609, note Y. Rouquet ; Rev. Administrer aout-sept. 2002, p. 51, note B. Gauclère. LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 – une action en diminution de loyer engagée par le locataire si le montant du loyer fixé au contrat de bail, hors montant du complément de loyer le cas échéant, est supérieur au loyer élevé. L’exclusion du complément de loyer s’explique par le fait que ce dernier doit être contesté dans un délai de trois mois à compter de la signature du bail. S’il ne l’a pas été à ce moment-là, il ne pourra plus l’être au moment du renouvellement. La règle est différente concernant le loyer de base à propos duquel l’article 17-2, relatif au loyer initial, prévoit déjà, sans limitation dans le temps, qu’une action en diminution de loyer peut être engagée si le loyer de base est supérieur au loyer élevé. Ce loyer de base pourra donc être contesté par le locataire soit au cours du bail initial, soit s’il ne l’a pas fait, au moment du renouvellement ; – une action en réévaluation engagée par le bailleur dès lors que le loyer est inférieur au loyer médian de référence minoré. 68 - Dans ces deux cas, l’une ou l’autre des parties peut proposer un nouveau loyer à son cocontractant, au moins six mois avant le terme du contrat pour le bailleur, et cinq mois seulement pour le locataire, afin de bloquer la possible réaction du bailleur qui notifierait un congé pour éviter de subir une diminution du loyer. Le locataire peut contester une action en réévaluation de loyer en produisant des références de loyers de voisinage – les éléments constitutifs de ces références devant être définis par décret en Conseil d’État – dont le nombre minimal à fournir est toujours de trois ou de six dans les communes, dont la liste est fixée par décret, faisant partie d’une agglomération de plus d’un million d’habitants. 69 - En cas de désaccord donc entre les parties sur ce réajustement, il est prévu une procédure amiable de règlement du litige devant de la commission départementale de conciliation préalablement à la saisine du juge, le tout avant le terme du contrat dans des délais strictement déterminés. En cas de hausse de loyer, un mécanisme d’étalement de cette hausse dans le temps est également prévu. En somme, l’article 17-2 adapte le dispositif prévu actuellement à l’article 17 c) au nouveau dispositif d’encadrement des loyers, en se référant aux loyers médians de référence. Mais à la différence de ce que permettait l’article 17-2, le bailleur n’est plus libre, dans les zones tendues, d’aligner le montant du loyer sur la moyenne du marché. Pour éviter une augmentation aussi importante du loyer, le rattrapage ne pourra aller au-delà du loyer de référence minoré. 70 - Dans les zones non tendues, la loi maintient le principe antérieur, à savoir que le loyer ne donne lieu à réévaluation que s’il est manifestement sous-évalué. Si tel est bien le cas, le bailleur devra respecter la même procédure (saisine impérative de la commission et du juge avant le terme du contrat) et produire les mêmes références comparatives de loyers que celles exigées par l’ancien texte. b) Paiement du loyer 71 - Deux dispositions intéressent ce paiement. L’article 7 a) est complété par la loi nouvelle afin de préciser que le paiement partiel du loyer effectué en application des articles L. 542-2 et L. 831-3 du Code de la sécurité sociale ne peut être considéré comme un défaut de paiement du locataire. Cette disposition ne peut être comprise que reliée aux textes précités qui confèrent aux organismes payeurs des allocations familiales ou sociales le pouvoir de sanctionner le bailleur dont le logement n’est pas décent en suspendant le paiement de l’allocation logement jusqu’à ce que le bailleur ait mis les locaux en conformité. Pendant cette période, le locataire ne paie plus au bailleur que le loyer diminué du montant des allocations sans que cette diminution puisse fonder une action du bailleur à son encontre pour obtenir la résiliation du bail. Ces nouvelles mesures n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2015. 72 - L’article 21 relatif à la quittance indique en complément du principe de transmission gratuite de la quittance, qu’« aucuns frais liés à la gestion de l’avis d’échéance ou de la quittance ne peuvent être facturé au locataire ». Pour éviter les frais d’envoi de quittance, Études LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 le bailleur ou son mandataire pourra à l’avenir avec l’accord du preneur transmettre celle-ci par voie dématérialisée. 2° Charges locatives 73 - Régularisation des charges. – La loi ALUR n’est pas revenue sur les principes directeurs posés dans l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989. Le principe reste la transparence des charges avec une liste limitative résultant du décret n° 87-713 du 26 août 1987 qui reste applicable malgré son ancienneté, dans l’attente de la parution d’un nouveau décret annoncé par l’article 25 nouveau de la loi du 6 juillet 1989. En fait, les seules améliorations du texte porte sur la régularisation annuelle des charges. Ainsi, lorsque cette régularisation n’est pas effectuée avant le terme de l’année civile suivant l’année de l’exigibilité, le locataire peut demander que le paiement des sommes qu’il doit soit fait par douzième. La loi nouvelle a également fait passer d’un mois à six mois la durée pendant laquelle les pièces justificatives doivent être tenues « dans des conditions normales » (ce qui est d’une grande précision !) à la disposition des locataires suite à l’envoi du décompte par nature des charges. Enfin, le preneur aura le choix à compter du 1er septembre 2015 de demander la transmission par voie dématérialisée ou par voie postale du récapitulatif des charges. 3° Garanties de paiement 74 - Dépôt de garantie. – L’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 est modifié sur certains points qui ont tous trait à la restitution du dépôt en fin de bail. La loi ALUR prévoit deux délais de restitution. Le dépôt doit être restitué dans un délai de deux mois sauf lorsque l’état de lieux de sortie est conforme à l’état des lieux d’entrée, autrement dit lorsqu’il n’y a aucune dégradation et travaux de remise en état à envisager. Dans ce cas, il doit être restitué dans un délai maximal d’un mois, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, en lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées. Ces délais courent à compter de la restitution des clés par le locataire, dont les modalités sont précisées par le texte. Il pourra s’agir d’une remise en main propre des clés au bailleur ou à son mandataire, seul cas de figure jusque-là admis en jurisprudence, ou d’un envoi à ces mêmes personnes par LRAR. 75 - Par ailleurs, pour que la sanction en cas de rétention illégale soit dissuasive, ce qui n’était pas le cas avec la rédaction initiale du texte où le solde du dépôt non restitué dans les délais produisait intérêt à un taux légal proche de 0 %, l’article 22 modifié prévoit que le bailleur qui ne restitue pas dans les délais devra verser au preneur une pénalité équivalente à 10 % du dépôt pour chaque période mensuelle commencée en retard. 76 - Un traitement particulier est cependant réservé au bailleur dont les lieux loués se situent dans un immeuble en copropriété. Pour tenir compte du fait que l’arrêté définitif des comptes qui se fait généralement en fin d’année ne correspond pas forcément à la date de restitution des lieux, la loi autorise le bailleur à procéder à un arrêté des comptes provisoire et à conserver une fraction du dépôt limitée à 20 %, au-delà du délai légal de restitution jusqu’à l’arrêté annuel des comptes de l’immeuble. La Cour de cassation et une réponse ministérielle avaient déjà préconisé cette solution équitable dans le silence du texte initial. 77 - Cautionnement. – L’objectif du législateur était au départ de supprimer cette garantie, jugée trop difficile à obtenir pour les locataires. Cette suppression supposait l’instauration d’une garantie universelle de loyer obligatoire, non cumulable avec un cautionnement, comme le précise l’article 22-1 de la loi de 1989. Finalement, la GUL étant facultative pour le bailleur, celui-ci conserve le choix du recours à un tiers garant. 78 - Quelques précisions sont apportées à la réglementation du cautionnement. La règle du non-cumul d’un cautionnement avec une assurance déjà souscrite est étendue à toute autre forme de garantie, telle que la GUL ou la GRL. En revanche, elle ne s’applique pas au dépôt de garantie. Il est également précisé que le non-respect de cette interdiction est sanctionné par la nullité du cautionnement. 79 - Garantie universelle des loyers (GUL). – La garantie universelle des loyers est l’une des mesures les plus décriées de la loi ALUR. Son but initial était de faciliter l’accès au logement de locataire tout en sécurisant les bailleurs. À cette fin, elle devait être obligatoire pour tous les propriétaires du parc locatif privé (meublé ou non meublé), interdisant par voie de conséquence le recours au cautionnement, et financée à parts égales par les bailleurs et les locataires. Finalement après deux passages devant les chambres du parlement, cette « sécurité sociale du logement » n’a plus rien d’universelle ; elle est facultative (sous réserve de renoncement dans le contrat de bail) et le bailleur pourra lui préférer le cautionnement. De plus, elle sera gratuite pour les parties et son financement sera pris en charge par l’État. 80 - Applicable à compter du 1er janvier 2016, la GUL est minutieusement réglementée par un nouvel article 24-2 de la loi du 6 juillet 1989. De nombreux décrets sont cependant attendus pour fixer se modalités d’application, en particulier le montant minimal d’impayés ouvrant droit à la garantie, le plafond pris en compte pour le calcul de l’aide, les modalités d’application de la franchise ou encore la durée maximale d’octroi de l’aide. Un établissement public administratif devrait être créé pour gérer cette garantie. B. - Autres obligations 81 - Assurance imposée au locataire. – L’obligation pour le locataire de s’assurer contre les risques locatifs est maintenue dans son principe, de même que la clause de résiliation de plein droit pour défaut d’assurance. Dans l’article 7 g) modifié de la loi du 6 juillet 1989, une alternative est cependant laissée au bailleur lorsque le preneur ne lui remet pas l’attestation d’assurance exigée. Plutôt que de faire jouer la clause résolutoire, et après un délai d’un mois à compter d’une mise en demeure non suivie d’effet, il peut prendre l’initiative de souscrire lui-même une assurance pour le compte du locataire, récupérable auprès de celui-ci. Le texte précise que le montant total de la prime d’assurance annuelle acquittée par le bailleur est récupérable par douzième à chaque paiement du loyer. Par souci d’indemniser le bailleur de ses démarches et aussi pour ne pas déresponsabiliser le preneur face à son obligation d’assurance, la loi permet au bailleur de majorer le montant de la prime, dans des limites qui seront fixées par décret en Conseil d’État. Ce contrat d’assurance sera résilié par le bailleur dès lors que le locataire souscrit lui-même sa propre assurance ou, en cas de départ de ce dernier, avant le terme du contrat d’assurance. L’avenir le dira, mais il paraît peu probable que beaucoup de bailleurs se transforment en « bon samaritain » et souscrivent à leurs frais une assurance dont il n’est pas certain qu’ils pourront recouvrer le montant, de surcroît par douzième. 82 - Mise en conformité d’un logement indécent. – La mise sur le marché de logements indécents est une préoccupation majeure qui a conduit le législateur à prendre de nouvelles mesures. Outre un rapport attendu sur l’opportunité de réviser le décret n° 2002120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent 23, la loi ALUR a doté les organismes payeurs des allocations familiales ou sociales de nouveaux pouvoirs de coercition à l’encontre du bailleur. Ainsi, lorsque l’organisme payeur a constaté l’indécence, l’allocation logement n’est pas versée au locataire ou au bailleur mais conservée par l’organisme tant que les travaux de mise en conformité ne sont pas effectués. Le bailleur doit les accomplir dans un délai de dix-huit mois maximum. Si le logement ne répond toujours pas aux caractéristiques de décence à l’issu de 23. Notamment sur la possibilité d’une évolution de la définition du seuil minimal de surface habitable en deçà duquel un logement est considéré comme indécent et d’une intégration de la performance énergétique parmi les caractéristiques du logement décent. 9 Études ce délai de mise en conformité, le bénéficie de l’allocation logement est définitivement perdu, étant précisé que le bailleur ne peut demander au locataire le paiement de la part de loyer non perçue correspondant au montant de l’allocation conservée. L’article 20-1 modifié de la loi du 6 juillet 1989 précise que l’information du bailleur par l’organisme payeur de son obligation de mise en conformité du logement, telle que prévue aux articles L. 542-2 et L. 831-3 du Code de sécurité sociale, tient lieu de demande de mise en conformité par le locataire. 83 - Travaux imposés au locataire. – L’article 7 e) de la loi du 6 juillet 1989 renforce la protection du locataire à qui certains travaux peuvent être imposés en cours de bail et qui doit permettre l’accès aux lieux loués pour la préparation et l’exécution de travaux d’amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, de travaux nécessaires au maintien en état ou à l’entretien normal des locaux loués, de travaux d’amélioration de la performance énergétique à réaliser dans ces locaux et de travaux qui permettent de remplir les obligations mentionnées au premier alinéa de l’article 6. Comme dans l’ancienne disposition, il est prévu que les deux derniers alinéas de l’article 1724 du Code civil sont applicables à ces travaux, sous réserve toutefois du respect de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l’amélioration de l’habitat. La nouveauté consiste à informer le locataire, avant le début des travaux, de leur nature et des modalités de leur exécution par une notification de travaux qui lui est remise en main propre ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Il est également précisé que les travaux ne peuvent être réalisés les samedis, dimanches et jours fériés sans l’accord exprès du locataire. Enfin, si les travaux entrepris dans un local d’habitation occupé, ou leurs conditions de réalisation, présentent un caractère abusif ou vexatoire ou ne respectent pas les conditions définies dans la notification de préavis de travaux ou si leur exécution a pour effet de rendre l’utilisation du local impossible ou dangereuse, il est prévu que le juge puisse prescrire, sur demande du locataire, l’interdiction ou l’interruption des travaux entrepris. 84 - Installation de détecteur d’incendie. – L’article 3 de la loi ALUR modifie l’article 2 de la loi n° 2010-238 du 9 mars 2010 qui rend obligatoire l’installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d’habitation au plus tard le 10 mars 2015. Tandis que cette obligation incombait au locataire, en tant qu’occupant du logement dans la version originaire du texte, codifié à l’article L. 129-8 du Code de la construction et de l’habitation, c’est désormais le propriétaire qui doit en assumer le coût et doit s’assurer de son bon fonctionnement lors de l’établissement de l’état des lieux. En revanche, c’est le locataire qui doit veiller à l’entretien de ce détecteur et à son remplacement en cas de nécessité. C. - Litiges entre parties 10 85 - Saisine de la commission départementale de conciliation. – Les contentieux entre bailleurs et locataires sont nombreux et variés. La plupart d’entre eux peuvent donner lieu, avant toute action judiciaire, à une saisine préalable de la commission départementale de conciliation dont la compétence a encore été élargie par la loi nouvelle. En effet, outre les litiges relatifs aux loyers, à la décence, à l’état des lieux, au dépôt de garantie, aux charges locatives et aux réparations, la commission se voit missionner pour tenter de résoudre les litiges relatifs aux congés. Comme auparavant, sa saisine reste facultative, sauf pour les litiges relatifs aux loyers résultant de l’application des articles 17, 17-1, 17-2 et 18 de la présente loi et des articles 30 et 31 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 (bail de huit ans permettant de sortir de la loi du 1er septembre 1948). 86 - Prescription des actions (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 71). – Par dérogation à la prescription quinquennale de droit commun jusqu’ici applicable et sans doute pour limiter dans le temps les sources de contentieux entre locataires et bailleurs, un nouvel article 7-1 limite à trois ans toutes actions dérivant d’un LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 contrat de bail, le délai courant « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer ce droit ». Par exception et dans l’intérêt bien compris du preneur « l’action en révision du loyer par le bailleur est prescrite un an après la date convenue par les parties dans le contrat de bail pour réviser ledit loyer. ». Un bel exemple de manquement au principe d’équilibre entre parties souligné lors des débats parlementaires : « Le locataire constatant qu’il a payé des montants indus peut les réclamer pendant trois ans ; en revanche, le propriétaire distrait ou ne suivant pas bien ses affaires qui aurait oublié d’appliquer les clauses de révision du contrat ne peut solliciter le paiement des sommes dues que pendant une durée d’un an » 24. 4. Cessation du contrat 87 - Protection renforcée des locataires. – Qu’il s’agisse de mettre fin au bail par le biais d’un congé ou par une action en résiliation du bail, le constat est le même : la loi a entendu renforcer la protection des locataires dans leur droit au logement et prévenir le mieux possible les expulsions locatives. A. - Congés 88 - Modes de notification. – À côté de la notification par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou de la signification par acte d’huissier qui demeurent, l’article 15 permet la remise du congé en main propre contre récépissé ou émargement. Cet allégement du formalisme est une bonne chose en ce qu’il permet d’éviter le coût d’un acte d’huissier ou l’incertitude de la lettre recommandée, fragilisée par la nécessité d’une réception effective par le destinataire pour marquer le point de départ du délai de préavis. Avec la remise en main propre, les parties disposent d’un procédé plus simple et tout aussi fiable que l’acte d’huissier puisque le recours au récépissé ou à l’émargement pourra attester qu’à telle date précise, le destinataire a bien été informé de la volonté de l’auteur du congé. Il faut remarquer d’ailleurs que la loi ALUR s’est contentée de transposer dans la loi de 1989 un principe introduit dans l’article 667 alinéa 2 du Code de procédure civile par le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012 : « La notification en la forme ordinaire peut toujours être faite par remise contre émargement ou récépissé alors même que la loi n’aurait prévu que la notification par la voie postale ». 89 - Notice d’information. – Une notice d’information devra être jointe au congé pour habiter ou pour vendre délivrée par le bailleur. Cette notice d’information, dont le contenu sera défini par le pouvoir réglementaire, est destinée à renseigner les locataires sur les obligations du bailleur et sur les voies de recours ainsi que les possibilités d’indemnisation dont ils disposent. 1° Congé par le bailleur 90 - La volonté de protéger les locataires dans un contexte de pénurie de logements jointe à celle de lutter contre les intentions spéculatives de certains propriétaires justifient de nouvelles restrictions au pouvoir de donner congé du bailleur. 91 - Congé différé en cas de vente ou de reprise pour habiter. – Le nouvel article 15-I de la loi de 1989 restreint la possibilité pour l’acquéreur d’un bien loué de pouvoir le récupérer relativement rapidement. S’il était tenu jusqu’ici de respecter le bail en cours jusqu’à son terme, il pouvait au moins donner congé pour ce terme. À l’avenir, le congé pour vente ne sera autorisé qu’au terme du premier renouvellement du bail en cours, précise le texte. Pour que cette disposition est un sens, le terme « renouvellement » doit être entendu ici dans son sens générique et non dans son acception strictement juridique. Le nouveau bailleur devra donc attendre trois ans, voire six ans de plus – durées des renouvellements – avant de 24. V. J.-M. Tétart, amendement 39. LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 congédier le locataire. Quant à la reprise pour habiter, elle est, elle aussi, différée si le terme du bail intervient moins de deux ans après l’acquisition, auquel cas elle ne pourra intervenir qu’après un délai de deux ans. 92 - Ces nouvelles règles sont le résultat d’un amendement adopté à l’initiative du groupe Ecolo afin de lutter contre les opérations immobilières purement spéculatives. Elles ne concernent que l’hypothèse où le congé est notifié par un nouveau propriétaire. En conséquence, le bailleur initial qui donne congé reste soumis aux règles classiques, étant observé que les locataires qui conservent le même bailleur tout au long du contrat sont, eux, moins bien traités puisqu’ils pourront être congédiés pour le terme initial du bail ! 93 - Suspension de la possibilité de donner congé en cas de procédure de péril ou d’insalubrité. – Dans le cadre de procédures visant à faire constater qu’un immeuble est insalubre ou dangereux, suivi d’une interdiction définitive ou temporaire d’habiter le logement, il peut être imposé au propriétaire la réalisation de travaux nécessaires et une obligation de relogement ou d’hébergement du locataire. Pour éviter de voir un propriétaire profiter de cette situation pour faire jouer un congé-reprise et se défausser de ses responsabilités, les dispositions suivant ont été prises : – le bailleur ne peut donner congé dès lors qu’il a reçu, soit un courrier du préfet l’informant de la tenue du Conseil départemental compétent en matière d’environnement, de risques sanitaires et technologiques, en vue de déclarer l’immeuble insalubre (C. santé publ., art. L. 1331-26 et L. 1331-27), soit un courrier du maire le mettant en demeure de faire les réparations nécessaires sur l’immeuble et l’invitant à présenter ses observations. Il s’agit de la procédure contradictoire préalable à la prise d’un arrêté de péril (CCH, art. L. 511) ; – lorsqu’aucun arrêté n’est pris, la suspension est levée à l’expiration d’un délai de six mois suivant la réception du courrier du préfet ou du maire. Lorsqu’un arrêté d’insalubrité ou un arrêté de péril ou encore lorsqu’un périmètre d’insalubrité est défini, le texte rappelle que les protections des occupants sont alors applicables (CCH, art. L. 5211 et s.) ; – la durée du bail est également suspendue sur cette période. 94 - Droit de préemption du locataire. – La réglementation du droit de préemption reste inchangée si ce n’est que la loi a limité au troisième degré inclusivement les ventes entre parents qui permettent d’échapper à ce droit. Avant la loi ALUR, le droit de préemption ne s’appliquait pas lorsque la vente intervenait entre parents jusqu’au quatrième degré. C’est encore ce seuil qui reste applicable aux deux autres droits de préemption accordés au preneur en application de l’article 10 et 10-1 de la loi du 31 décembre 1975. 95 - Protection des locataires âgés aux ressources limitées. – Les critères de protection des locataires âgés aux faibles ressources, qui interdisent au bailleur un congédiement sans offre de relogement, sont modifiés. La condition d’âge, qui était de 70 ans est rabaissée à 65 ans et le plafond de ressources n’est plus le SMIC, mais celui en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés. Les mêmes conditions s’appliquent au bailleur, mais de façon alternative. 96 - Il en résulte que le locataire est mieux protégé qu’auparavant tandis que le bailleur perd l’une des rares dispositions qui était en sa faveur. Certes, il pourra toujours tenir en échec ce régime protecteur et congédier le locataire sans offre de relogement, s’il justifie soit qu’il a lui-même de faibles ressources, soit qu’il est lui-même âgé. Mais tandis que le texte initial se contentait d’un propriétaire âgé de soixante ans, le nouveau texte aligne la condition d’âge du bailleur sur celle du locataire. 97 - Il faut mentionner que le Conseil constitutionnel a invalidé l’extension de la protection, alors même que le locataire ne remplirait pas ces conditions, à la personne à charge vivant avec lui dès lors qu’elle remplit lesdites conditions. Études 98 - Lutte contre les congés frauduleux. – La loi nouvelle a décidé de renforcer la lutte contre les congés frauduleux. Ainsi, il est dorénavant imposé au bailleur de préciser dans le congé la nature du lien existant entre le bénéficiaire de la reprise et le propriétaire du logement, afin de permettre au locataire de vérifier la légalité de la procédure. L’article 15 impose également au bailleur de justifier du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise pour permettre au juge, en cas de contestation, de vérifier la réalité de la situation. En conséquence, le bailleur devra motiver précisément le congé, préciser les raisons qui justifient que la reprise n’est pas un vague projet, mais une certitude au jour de sa notification. De façon plus générale, la loi nouvelle donne au juge le pouvoir de vérifier, même d’office, la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues à l’article 15. Le juge pourra donc effectuer un contrôle a priori, ce qui lui était jusqu’à présent refusé, sauf cas d’intention frauduleuse manifeste. La loi lui permettant de ne pas valider un congé qui ne serait pas justifié par des « éléments sérieux et légitimes », la question se posera sans doute de savoir si le contrôle judiciaire se limite à un contrôle de réalité du motif ou s’il pourra aller jusqu’à un contrôle d’opportunité. 99 - Enfin, la loi ALUR renoue avec le dispositif adopté en son temps par la loi du 22 juin 1982 en instaurant une sanction pénale. Une amende pénale conséquente (6 000 € maximum pour une personne physique, 30 000 € maximum pour une personne morale), à vertu dissuasive, est prévue à l’encontre du bailleur qui aurait délivré frauduleusement un congé pour vente ou pour reprise à son locataire. La nature de cette amende a évolué au cours de la navette législative. À une amende administrative, prononcée par le représentant de l’État dans le département, a été substituée en 2e lecture au Sénat une amende pénale. Le locataire sera recevable en qualité de partie civile et pourra obtenir réparation du préjudice subi. 100 - Règles spécifiques aux « ventes à la découpe ». – Le régime spécifique des congés pour vendre notifiés en application de l’article 11-1 de la loi du 6 juillet 1989 est étendu aux immeubles vendus par lot de plus de cinq logements, et ce afin de protéger un plus grand nombre de locataires. Il faut rappeler que ce régime qui ne concerne que certains propriétaires-bailleurs – ceux des secteurs locatifs définis aux alinéas 4 et 5 de l’article 41 ter de la loi du 23 décembre 1986, c’est-à-dire en fait tous les bailleurs personnes morales à l’exclusion des bailleurs sociaux et des SCI familiales – permettait jusqu’à présent au locataire qui recevait un congé pour vendre dans le cadre d’une vente par lots de plus de dix logements dans le même immeuble, d’obtenir une prorogation de son bail de sorte qu’il disposait du logement qu’il occupait pour une durée de deux ans à compter de la notification du congé. Dorénavant, le bailleur sera contraint de proroger les baux dès lors que l’opération porte sur plus de cinq logements dans le même immeuble. Attention : Cette nouvelle règle est d’application immédiate et concerne les congés délivrés après le 27 mars 2014. 101 - Un nouvel article 11-2 instaure un autre cas de prorogation du bail « lorsqu’un immeuble indivis ayant cinq locaux d’habitation ou plus est mis en copropriété ». Dans ce cas, les baux en cours sont prorogés de plein droit d’une durée de trois ans de plus que leur durée contractuelle ou légale antérieure. Cette disposition ne joue que dans les zones tendues, telles qu’envisagées par l’article 17-I de la loi de 1989. 102 - L’objectif du législateur a été là encore de protéger les locataires lors de la mise en copropriété d’un immeuble qui débouche souvent sur des ventes à la découpe jugées spéculatives. Plutôt que de subordonner la mise en copropriété à un permis préalable de diviser, ce qui reste à l’étude 25, celle-ci s’accompagnera d’une prorogation de la durée des baux préexistants. 25. L’article 175 de la loi ALUR prévoit que dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un 11 Études Remarque : L’article 11-2 ne manquera pas de soulever des interrogations en doctrine. D’abord quant à son domaine d’application car, malgré le terme « indivis » utilisé dans le texte, il est peu probable que le législateur ait entendu limiter cette disposition au cas d’immeuble détenu par plusieurs propriétaires ; c’est certainement l’immeuble non encore divisé qu’il a voulu viser, qu’il appartienne à une seule personne ou à plusieurs. Ensuite, on comprend mal pourquoi le seuil de déclenchement du texte est de « cinq logements ou plus » alors qu’il est par ailleurs, c’est-à-dire dans l’article 11-1 de la loi de 1989 comme dans l’article 10-1 de la loi du 31 décembre 1975 de « plus de cinq logements ». Il n’y a aucune explication cohérente à cette différence. Cette différence de seuil est d’autant plus illogique que la question de l’articulation de l’article 11-2 avec l’article 11-1 et du cumul des cas de prorogation pourrait se poser. 103 - Enfin, deux mesures ont été prises qui concernent les droits de préemption générés par les ventes intervenants en cours de bail : – s’agissant du droit de préemption institué par la loi Aurillac, qui figure dans l’article 10-1 de la loi du 31 décembre 1975, la loi ALUR modifie le seuil de déclenchement de ce droit. Dorénavant, la vente en bloc d’un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte de plus de cinq logements (et non plus de dix comme avant) générera un droit de préemption au profit de locataires sur le local qu’ils occupent, sauf si l’acquéreur pressenti s’engage à proroger leur baux pour une durée de six ans à compter de la signature de l’acte authentique de vente ; – s’agissant du droit de préemption accordé au locataire lors de la première vente par lot suivant la mise en copropriété de l’immeuble 26, la loi ALUR instaure un nouveau droit de préemption au profit de la commune lorsque le locataire refuse de préempter. Une déclaration d’intention d’aliéner doit alors être transmise sans délai au maire de la commune, contenant le prix et les conditions de la vente de l’ensemble des locaux pour lesquels il n’y a pas eu acceptation de ces offres, l’objectif étant d’assurer le maintien des locataires dans les lieux. À défaut, toute vente à un autre acquéreur est nulle. 2° Congé par le locataire 104 - Motifs de préavis réduit. – Si l’article 15-I, alinéa 2 réaffirme que le délai de préavis est normalement de trois mois lorsqu’il émane du locataire, la suite du texte révèle que ce délai de trois mois risque de devenir, en fait sinon en droit, l’exception. 105 - En effet, la loi nouvelle généralise le délai de préavis d’un mois à tous les logements situés en zones tendues. Cette évolution a été justifiée par le fait que dans ces zones, il ne serait pas difficile pour un bailleur de trouver un nouveau locataire dans un délai court. En réalité, tout dépend de la localisation géographique et du type de logement et si le constat d’une relocation rapide se vérifie sans doute pour les petits logements parisiens, il n’en va pas de même pour les logements situés dans d’autres grandes villes où le délai de rotation entre deux locataires dépasse très largement un mois. 106 - Pour les logements situés en zones non tendues, le preneur peut se prévaloir de certains motifs de préavis réduit. La loi nouvelle a maintenu les cas de préavis réduit qui existaient auparavant, sauf à signaler que l’état de santé du locataire qui justifie un changement de domicile est pris en compte quel que soit son 12 rapport sur l’opportunité et les modalités de mise en œuvre d’un permis de diviser. Ce permis de diviser serait délivré lors de toute division par lots et mise en copropriété d’un immeuble comprenant au moins cinq locaux à usage d’habitation. Le rapport étudie la possibilité de subordonner la délivrance de ce permis à des engagements garantissant la pérennité des situations d’occupation locative existant. 26. L. n° 75-1334, 31 déc. 1975, art. 10. LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 âge alors qu’il fallait qu’il ait plus de soixante ans dans le texte antérieur. Cet état de santé doit être attesté par un certificat médical. 107 - Elle a rajouté deux nouveaux motifs à la liste initiale ; le locataire bénéficiaire de l’allocation adulte handicapé et le locataire qui s’est vu attribuer un logement défini à l’article L. 351-2 du Code de la construction et de l’habitation, c’est-à-dire un logement locatif conventionné. 108 - Justification du préavis réduit. – La loi nouvelle rompt avec la jurisprudence antérieure qui se contentait d’une justification a posteriori du motif de préavis réduit 27. Dorénavant, le locataire souhaitant bénéficier des délais réduits de préavis mentionnés devra préciser le motif invoqué et le justifier au moment de l’envoi de la lettre de congé. À défaut, le délai de préavis applicable à ce congé sera de trois mois. B. - Résiliation du bail et expulsion 109 - Dans le cadre d’un chapitre IV dont l’objet est d’améliorer la prévention des expulsions, de nouvelles dispositions sont prises afin de traiter encore plus en amont les impayés dans le but d’éviter au maximum les expulsions locatives. Pour ce faire, l’article 24 sur les clauses résolutoires est modernisé en profondeur et de nouveaux délais sont prévus en matière d’expulsion. 110 - Modifications apportées à l’article 24 de la loi. – L’article 27 de la loi ALUR réorganise l’écriture de l’article 24 de la loi de 1989 qui est restructuré en plusieurs paragraphes. Les dispositions existantes relatives au commandement de payer, à son formalisme, son contenu, sa transmission à l’éventuelle caution du locataire dans un délai de quinze jours suivant sa transmission au locataire, à l’effectivité de la clause résolutoire pour défaut de paiement du loyer deux mois suivant un commandement de payer demeuré infructueux, sont reprises. 111 - Parmi les dispositions nouvelles, il y a lieu de noter : – qu’à partir du 1er janvier 2015, tout bailleur personne morale (hors SCI familiales jusqu’au quatrième degré) devra saisir la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) au moins deux mois avant l’assignation, sous peine d’irrecevabilité de celle-ci. Jusqu’ici, l’obligation de saisine d’une autorité publique avant l’assignation ne concernait que les bailleurs sociaux pour leurs locataires bénéficiaires des aides au logement. Cette saisine, qui pourra s’effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret, est cependant réputée constituée dès lors que la situation d’impayé a été signifiée aux organismes payeurs des aides au logement ; – concernant les bailleurs personnes physiques ou société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu’au quatrième degré inclus, des arrêtés préfectoraux sont attendus pour fixer le montant et l’ancienneté de la dette au-delà desquels les commandements de payer, délivrés à compter du 1er janvier 2015 sont signalés par l’huissier de justice à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; – les délais de paiement que le juge peut accorder, même d’office, ne sont plus limités à deux ans, mais à trois ans. 112 - Nouveaux délais en matière d’expulsion. – L’article L. 412-6 du Code des procédures civiles d’exécution est modifié afin de rallonger le délai de la trêve hivernale. Celle-ci débute toujours le 1er novembre, mais interdira à l’avenir les expulsions jusqu’au 31 mars au lieu du 15 mars. De plus, contrairement à ce qui était prévu antérieurement, les personnes dont l’expulsion a été ordonnée et qui étaient entrées dans les locaux par voie de fait, autrement dit les squatters, bénéficient désormais de ce sursis, sauf décision contraire du juge (CPC, art. L. 412-6, al. 2, ancien). Enfin, la durée des délais que le juge peut accorder pour quitter les lieux, qui ne pouvait pas être inférieure à un mois et supérieure à un an 27. Cass. 3e civ., 13 déc. 2005, n° 04-19.585 : JurisData n° 2005-031365 ; Loyers et copr. 2005, comm. 29, obs. B. Vial-Pedroletti ; AJDI 2006, p. 568, obs. F. de la Vaissière. Études LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 est aussi revue à la hausse ; elle ne pourra à l’avenir être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans (CPC, art. L. 412-4, ancien). 113 - Sanction des expulsions illégales. – La loi ALUR crée une infraction pénale visant à dissuader les propriétaires de pratiquer des expulsions « manu militari ». Ainsi, un nouvel article 226-4-2 du Code pénal prévoit que « le fait de forcer un tiers à quitter le lieu qu’il habite sans avoir obtenu le concours de l’État dans les conditions prévues à l’article L. 153-1 du Code des procédures civiles d’exécution, à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende ». 5. Application transitoire de la loi ALUR 114 - Comme toujours, l’application transitoire d’une loi nouvelle n’est jamais évidente, même pour des juristes. La loi du 24 mars 2014, publiée le 26 mars et en vigueur depuis le 27 mars fixe dans un article 14 les règles applicables aux baux en cours (A). Quant aux baux conclus à partir du 27 mars 2014 (B), ils sont censés respecter la loi nouvelle, non sans difficultés, compte tenu des nombreux décrets ou arrêtés d’application attendus. A. - Règles applicables aux baux en cours 115 - L’article 14 de la loi ALUR, pose comme principe dans un alinéa premier que les contrats de location en cours au 27 mars 2014, date d’entrée en vigueur du texte, demeurent soumis aux dispositions qui leur étaient applicables. 116 - Dans ses alinéas suivants, le texte prévoit deux séries d’exceptions. 117 - Concernant les locaux loués vides, c’est-à-dire le domaine d’application traditionnel de la loi du 6 juillet 1989 tel que fixé à l’article 2, sont immédiatement applicables les dispositions suivantes : – les articles 7 (obligations du preneur), 17-1 (révision du loyer), 20-1 (mise en conformité des logements indécents), 21 (quittance de loyer) et 23 (charges locatives) de la loi de 1989, dans leur rédaction résultant de la loi ALUR ; – l’article 11-1 de la loi du 6 juillet 1989 (vente à la découpe), dans sa rédaction résultant de loi ALUR, leur est applicable pour les congés délivrés après le 27 mars 2014. 118 - Concernant les locaux loués meublés, sont applicables les dispositions suivantes : les articles 6 (obligations du bailleur), 7 (obligations du preneur), 20-1 (mise en conformité des logements indécents) et 25-11 (compétence de la commission départementale de conciliation pour l’examen des litiges relatifs aux logements meublés et relatifs aux loyers, aux congés, à l’état des lieux et du mobilier, au dépôt de garantie, aux charges locatives, aux réparations et aux caractéristiques du logement) de la loi du 6 juillet 1989, dans leur rédaction résultant de la loi ALUR. Exemple : application différée de la loi nouvelle en matière de congé Soit un bail qui a pour terme le 30 octobre 2014 : ‰ un congé notifié le 20 avril 2014 reste soumis à la réglementation antérieure à la loi ALUR. Il en résulte notamment : – que ce congé ne peut pas faire l’objet d’une remise en main propre ; – que le bailleur acquéreur du bien loué le 30 mars 2014 peut notifier un congé pour habiter pour le 30 octobre 2014, alors même que la durée du bail restant à courir est inférieure à deux ans. Il n’est pas soumis aux nouvelles dispositions restrictives de l’article 15-I de la loi du 6 juillet 1989 ; – que le locataire qui donne congé parce qu’il a des problèmes de santé ne peut se prévaloir d’un préavis réduit que s’il est âgé de plus de soixante ans ; ‰ un congé notifié à compter du 31 octobre doit, en revanche, respecter les nouvelles règles issues de la loi ALUR car le bail tacitement reconduit (ou renouvelé) est un nouveau bail. Mais si certaines de ces nouvelles règles nécessitent des décrets d’application non encore intervenus, les règles anciennes demeurent applicables. En conséquence : – le congé notifié par le locataire se verra appliquer toutes les nouvelles règles, sauf en ce qui concerne la possibilité de donner congé avec un préavis d’un mois dans les « zones tendues », subordonnée à la parution du décret définissant les communes concernées ; – pour le congé notifié par le bailleur, le problème ne se posera que dans trois ans au plus tôt et l’on peut espérer que les mesures d’application seront alors intervenues. B. - Règles applicables aux nouveaux baux 119 - Application différée de nombreuses règles. – Il est évident que la loi nouvelle est théoriquement applicable dans son intégralité aux nouveaux contrats. Cependant, en raison des nombreux décrets d’application et arrêtés attendus – une quarantaine environ – la loi ALUR voit une bonne partie de ses dispositions différées dans le temps 28. Par ailleurs, l’application de certains textes est expressément différée par la loi. C’est le cas de l’article 23 de la loi de 1989 qui autorise la transmission des pièces justificatives des charges par voie dématérialisée à compter seulement du 1er septembre 2015, ou encore de l’article 24-II relatif aux nouveaux délais à respecter (à compter du 1er janvier 2015) par les bailleurs personnes morales en matière de délivrance d’une assignation en résiliation du bail. 120 - Quid de la rédaction du « bail transitoire » ? – Les premiers décrets sont attendus pour cet été et ils devraient concerner le bail type, l’état des lieux et la rémunération des intermédiaires. C’est dire que les nouveaux baux conclus à compter du 27 mars 2014, auxquels la loi nouvelle s’applique, ne pourront respecter le formalisme imposé, faute de modèle-type à cette date 29. Ils ne pourront pas non plus mentionner le loyer de référence et le loyer de référence majoré, dans l’attente de décrets et arrêtés annoncés qui n’interviendront sans doute pas, dans le meilleur des cas, avant l’automne prochain. D’ailleurs outre la parution de ces textes, la réglementation du loyer initial est également subordonnée au fait que dans la zone concernée ait été implanté un observatoire de loyer opérationnel. Quant à la rémunération de l’intermédiaire, elle pourra comme par le passé consister à demander au locataire l’équivalent d’un mois de loyer. 121 - Il n’empêche que ces baux transitoires devront respecter les nouvelles règles qui sont immédiatement applicables. Ainsi, en cas de relocation, le bail devra mentionner le montant du loyer acquitté par le précédent locataire ainsi que la nature et le montant des travaux effectués dans le logement par le bailleur depuis la fin du dernier contrat de location ou depuis le dernier renouvellement du bail puisque le décret n° 2013-689 du 30 juillet 2013 reste applicable au moins jusqu’au 31 juillet 2014. De même, le bail devra également mentionner les nouvelles règles concernant la révision du loyer qui ne nécessitent aucune précision complémentaire. 122 - Ces quelques indications de mentions devant figurer ou ne pouvant figurer dans ce bail de transition sont révélateurs de la difficulté que les praticiens vont avoir pour établir un bail qui mixe les dispositions de la loi ALUR immédiatement applicables et celles du droit antérieur 30. 28. V. sur ce point, J. Lafond, Baux d’habitation : se préparer à la loi ALUR : JCP N 2014, n° 15, 1162, qui fait une synthèse sous forme de tableaux des dispositions de la loi ALUR qui ne peuvent pas s’appliquer immédiatement. 29. J. Lafond, Loi ALUR : l’impact sur la rédaction des baux régis par la loi du 6 juillet 1989 : JCP N 2014, n° 15, 1161. 30. V. la formule proposée par J. Lafond : JCP N 2014, n° 16-17, 1167. 13 Études 2 LOYERS ET COPROPRIÉTÉ - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - MAI 2014 Aperçu critique sur les dispositions de la loi ALUR relatives au contrôle de l’usage d’habitation Guillaume DAUDRÉ, et Patrick WALLUT, notaire assistant notaire honoraire La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (ALUR) modifie, sans bouleversement, certains aspects du contrôle de l’usage d’habitation issu de l’ordonnance n° 2005-655 du 8 juin 2005 et de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008. Une série de mesures contribue à étendre le champ territorial du contrôle tout en lui apportant quelques retouches techniques. Les dispositions les plus importantes, et les plus discutées par les parlementaires, s’attachent à recadrer le développement des meublés de tourisme. L’ensemble est entré en vigueur le 27 mars 2014. 1 - La loi ALUR « vise à mettre en œuvre une stratégie globale, cohérente et de grande ampleur destinée à réguler les dysfonctionnements du marché, à protéger les propriétaires et les locataires, et à permettre l’accroissement de l’offre de logements dans des conditions respectueuses des équilibres des territoires » 1. Il n’est guère surprenant que ses auteurs se soient intéressés à la réglementation des changements d’usage : celle-ci demeure un outil de protection des logements existants dans les centres urbains où s’exerce une forte pression pour transformer ceux-ci en bureaux, commerces ou cabinets de professions libérales. Ce texte fournit l’occasion au pouvoir normatif d’apporter quelques adaptations ou compléments d’ordre technique (1), avec en ligne de mire les locations meublées touristiques (2). Toutes ces mesures ont passé avec succès le filtre du contrôle de constitutionnalité, à l’exception d’une seule jugée trop contraignante pour les copropriétaires 2. Nombreuses sont les dispositions de la loi ALUR qui nécessitent un décret d’application. Celles ici commentées n’en font pas partie et ne prévoient pas de dispositif transitoire. Par conséquent elles sont entrées en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, soit le 27 mars 2014. 1. Dispositions communes à l’ensemble des changements d’usage 2 - La loi nouvelle procède à divers ajustements des dispositions du Code de la construction et de l’habitation (CCH) relatives aux changements d’usage des locaux d’habitation. A. - Champ d’application territorial du contrôle de l’usage 1° Application aux zones franches urbaines (L. n° 2014366, 24 mars 2014, art. 17) 3 - L’article L. 631-10 du CCH édictait que « Les dispositions de l’article L. 631-7 ne sont pas applicables dans les zones franches urbaines... ». 14 Ndlr : Cette étude a déjà été publiée au JCP N 2014, 1157. 1. V. l’exposé des motifs du projet de loi. 2. Cons. const., déc. 20 mars 2014, n° 2014-691 DC. La raison en est aisément compréhensible ; au sein de ces zones défavorisées, dans lesquelles le rapport emploi/habitat est le plus souvent défavorable à l’activité professionnelle ou commerciale, il avait été souhaité par le législateur que puissent s’implanter librement, soit des professions libérales, soit des activités industrielles ou commerciales génératrices d’emplois et de services de proximité. 4 - Il est donc étonnant que la loi ALUR abroge l’article L. 63110. Les raisons en restent obscures, ce d’autant que l’exposé des motifs du projet de loi et les débats dans chacune des assemblées ne nous éclairent pas sur la cause de cette abrogation 3, ni d’ailleurs sur ses effets sur la pérennité des changements d’usage opérés sous le bénéfice de l’article L. 631-10. 2° Faculté d’extension aux communes situées dans les « zones tendues » (L. n° 2014-366, 24 mars 2014, art. 16, 3°) 5 - L’article L. 631-9 du CCH prévoyait déjà une faculté d’extension aux communes non visées par l’article L. 631-7. Le maire, qui est pourtant l’acteur principal du contrôle de l’usage, n’est pas compétent pour décider de son application lorsqu’elle apparaît opportune et peut seulement proposer à l’autorité administrative de prendre la décision d’extension. 6 - La loi ALUR modifie la procédure existante mais uniquement pour les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants définie à l’article 232 du Code général des impôts (CGI). Pour rendre applicable l’article L. 631-7 sur tout ou partie du territoire de ces communes, une délibération de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de plan local d’urbanisme (PLU) ou, à défaut, du conseil municipal, suffira désormais. 7 - L’article 232 du CGI concerne la taxe annuelle sur les logements vacants ; elle « est applicable dans les communes apparte3. Selon les rapporteurs de la Commission des affaires économiques au Sénat, cette abrogation serait « pleinement cohérente » avec les autres dispositions de la loi ALUR renforçant la régulation de la location meublée temporaire (Rapp. n° 65, 9 oct. 2013, p. 99). Il est néanmoins permis de douter que les locations touristiques soient fréquentes dans les ZFU...