sommaire - Amejjay
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2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 1 DOSSIER FMC DYSTHYROÏDIES Dosez la TSH SOMMAIRE !Dysthyroïdies : dosez la TSH P.2 !Tsh augmentée Ralentissement global P.3 !Dysthyroïdies : dosez la TSH P.2 !Iatrogène L’iode en cause P.5 ! Conduite à tenir Que faire devant une TSH isolément abaissée ? P.6 !TSH BASSE Hyperthyroïdie et maladie de Basedow P.8 D.R. !Nodulaire Fruste ne veut pas dire bénin P.10 N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 1 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 2 DOSSIER FMC Dysthyroïdies: dosez la TSH D.R. " Les dysfonctionnements thyroïdiens sont l’une des principales préoccupations diagnostiques en médecine générale, car ils sont fréquents et peuvent avoir des répercussions masquées chez les personnes âgées. Les formes monosymptomatiques et paucisymptomatiques, voire paradoxales, des dysthyroïdies sont désormais aisément confirmées… à condition d’y penser. "Pour vous y aider, ce dossier coordonné par le Pr Jean-Louis Schlienger*. séméiologie des dysthyroïdies a dû être réécrite à la lumière des performances d’une biologie triomphante. Les dosages suivants peuvent être obtenus en routine : TSH ultrasensible (il n’y a plus que celle-là), fractions non liées, dites libres, de la thyroxine et de la triiodothyronine (T4L et T3L) et anticorps antithyroïdiens. Encore faut-il s’en servir à bon escient. Les recommandations de l’Anaes constituent un guide précieux. Elles n’ont pas pour objectif de se substituer au bon sens. Elles ne concernent pas la maladie de Basedow évidente ou le myxoedème caricatural. Elles visent cette multitude de situations incertaines qui suscitent d’innombrables dosages d’hormones thyroïdiennes imparfaitement soutenus par l’argumentaire clinique. Quel que soit le type de dysthyroïdie, la TSH est l’examen de première intention. Lorsqu’elle est anormale, il convient de la documenter par le dosage de la T4L. Sauf exception, une TSH normale élimine la possibilité d’une dysthyroïdie. Ce n’est qu’en cas de conviction clinique forte qu’il convient de poursuivre l’exploration par un dosage de T4L. Idéalement, une fois le dosage de la TSH effectué, le sérum devrait être conservé au laboratoire (au maximum sept jours) pour permettre les dosages en seconde intention de T4L et T3L. A L Hyperthyroïdies : TSH basse [voir page 8] ! Dans l’hyperthyroïdie patente, la TSH est effondrée et la T4L ou la T3L est augmentée. En pra- tique, le dosage de la T3L ne devrait être effectué que lorsque la T4L est normale. L’élévation isolée de la T3L survient dans 5 à 10 % des hyperthyroïdies, particulièrement lorsqu’elles sont dues à un adénome toxique. En réalité, le dosage de la TSH seul, qui assure l’approche diagnostique, ne suffit pas pour affirmer l’hyperthyroïdie. ! Dans l’hyperthyroïdie fruste, la TSH est isolément abaissée, la T4L et la T3L étant normales. Cela ne laisse préjuger ni des répercussions cliniques (notamment cardiaques et osseuses) ni de l’évolution. Ce type d’hyperthyroïdie est fréquent chez la personne âgée porteuse d’un goitre multinodulaire toxique. Le diagnostic étiologique de l’hyperthyroïdie repose sur la détermination du taux des anticorps et sur la pratique d’une scintigraphie. ! Les anticorps antithyroperoxydase (anti-TPO) confirment le climat auto-immun. L’élévation des anticorps antirécepteurs de la TSH (souvent appelés TRAK) confirme la maladie de Basedow lorsque celle-ci ne s’impose pas cliniquement. ! La scintigraphie précise le type de fixation isotopique : – nodulaire ou multiple, avec extinction du reste du parenchyme, elle définit l’adénome toxique ou le goitre multinodulaire toxique ; – diffuse, elle est en faveur d’une maladie de Basedow ; – absente, elle suggère une hyperthyroïdie à l’iode. L’augmentation de la CRP, associée à une hypofixation thyroï- dienne, évoque une thyroïdite. La thyrotoxicose factice est suspectée devant une absence de fixation associée à une thyroglobuline basse. Le test à la TRH, utile à l’époque où la TSH n’était pas suffisamment sensible, n’a plus guère d’intérêt qu’en cas de suspicion d’adénome thyréotrope associant une TSH normale ou augmentée, non réactive à la stimulation, à une élévation des taux des hormones thyroïdiennes. Hypothyroïdies : TSH élevée [voir page 3] ! L’hypothyroïdie patente est caractérisée par une élévation de la TSH et une diminution de la T4L. La TSH est l’examen de référence. Un taux normal de TSH élimine une hypothyroïdie primaire. Le dosage de la T3L n’apporte rien au diagnostic. En effet, sa concentration est abaissée dans toutes les situations comportant une inhibition de la conversion extrathyroïdienne de T4 en T3 : traumatisme, chirurgie, maladie générale, prise d’amiodarone ou de propranolol, examens avec agents de contraste iodés. ! L’hypothyroïdie fruste est définie par une élévation isolée et modérée de la TSH. La coexistence d’une augmentation des anti-TPO accrédite l’hypothèse d’une hypothyroïdie fruste. Le dosage des anticorps anti-TPO précise le caractère auto-immun de l’hypothyroïdie périphérique. ! Dans l’hypothyroïdie centrale, isolée ou associée à une insuffisance hypophysaire, la TSH, LEXIQUE ! CPK = Creatine Phosphokinase ! CRP = C-Reactive Protein. ! HDL = High Density Lipoproteins ! INR = International Normalized Ratio ! LDL = Low Density Lipoproteins ! TPO = Thyroperoxydase ! TRH = Thyrotropin Relasing Hormone ! TSH = Thyroid Stimulating Hormone abaissée ou normale, est associée à une T4L abaissée. ! Dans le rare syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes, l’élévation de la TSH est associée à une élévation de T4L, tout comme dans l’adénome à TSH. C’est donc le couple TSH-T4L qui fournit la clé diagnostique dans la grande majorité des dysthyroïdies, contribuant notamment au diagnostic différentiel entre les formes centrales et périphériques. Les autres dosages sont facultatifs et n’ont d’intérêt éventuel que pour préciser le diagnostic étiologique. ■ * Service de médecine interne et nutrition, CHU Strasbourg-Hautepierre, 67098 Strasbourg Cedex. Référence générale La thyroïde, sous la direction de J. Leclère, J. Orgiazzi, B. Rousset, J.L. Schlienger et J.L. Wémeau, 1 volume, deuxième édition, 2001, Elsevier. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 2 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 3 DOSSIER FMC TSH AUGMENTÉE Ralentissement global "L’hypothyroÏdie caricaturale est rare. Cette affection, au demeurant fréquente, avance souvent Elle a 78 ans et son état de santé décline (perte de l’appétit, tendance dépressive avec désintérêt progressif), mais ne perd pas de poids, bien au contraire. Son médecin, qui ne l’a pas vue depuis des lustres (son passé médical se limite à un traitement par iode 131 il y a cinq ans pour un goitre toxique), est surpris par sa pâleur et son aspect bouffi, avec un faciès de bouddha cireux. D’une voix rauque, elle se plaint d’avoir toujours froid, d’être constipée et de ressentir de pénibles et fréquentes crampes des membres inférieurs. Son entourage familial avait attribué ces symptômes à l’âge. Le premier bilan est le bon et confirme l’impression clinique : TSH à 120 U/l et T4L à 2 pg/ml (normale entre 9,5 à 18). A prédominance du sexe féminin dans l’hypothyroïdie est marquée (l’incidence annuelle est de l’ordre de 3 ‰ chez la femme et de 0,5 ‰ chez l’homme). L’incidence croît avec l’âge pour atteindre 14 ‰ par an après 75 ans. L’hypothyroïdie comporte une séméiologie riche dont l’expression dépend beaucoup de la sévérité et de l’ancienneté. Le syndrome hypométabolique de l’hypothyroïdie rend compte d’un ralentissement global des principales fonctions de l’organisme. Asthénie, frilosité, gain pondéral constant et anorexie en sont les principaux éléments. Le ralentissement de la contractilité et l’hypotonie favorisent la constipation et les manifestations dyspeptiques. Les signes cutanéo-muqueux, tardifs, contribuent à la reconnaissance de la maladie : sécheresse, pâleur et froideur de la peau, pigmentation jaune orangé palmoplantaire, érythrocyanose localisée aux lèvres et aux pommettes, L BURGER /PHANIE masquée. Lors de son installation, elle se pare de signes discrets, volontiers trompeurs, voire paradoxaux, à tel point que certains ont proposé un dépistage systématique, que les données épidémiologiques ne justifient cependant pas. "Le diagnostic en est d’autant plus intéressant que le traitement est simple, performant et peu coûteux. PAR LE PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER D’une voix rauque, elle se plaint d’avoir toujours froid. contrastant avec la pâleur et l’infiltration cireuse, ferme quoique pseudo-œdémateuse, siégeant au niveau du visage, sur les paupières et boudinant les doigts, sont autant de signes d’appel. Ce myxœdème, terme utilisé improprement pour désigner l’hypothyroïdie, ne prend pas le godet. L’infiltration concerne aussi les muqueuses : macroglossie, raucité de la voix, nasonnement, ronflement avec, parfois, apnées du sommeil. Les phanères sont altérés : cheveux secs et cassants, raréfaction des sourcils (le fameux et si peu spécifique signe de la queue du sourcil) et de la pilosité pubienne et axillaire, ongles cassants, striés et amincis. Les manifestations cardio-vasculaires, quasi constantes, sont LE CAS PARTICULIER DE L’HYPOTHYROÏDIE CENTRALE Représentant moins de 1 % des hypothyroïdies, l’hypothyroïdie centrale est habituellement associée à une insuffisance hypophysaire plurihormonale. Chez l’adulte, elle est presque toujours d’origine lésionnelle. Les signes cliniques sont plus modérés que dans l’hypothyroïdie primaire. Il n’y a ni goitre ni infiltration myxœdémateuse. La fatigue physique et psychique, la frilosité et la dépilation dominent le tableau. Le profil hormonal se singularise par un taux de TSH normal ou abaissé, avec une T4L abaissée. Ici, le test à la TRH a un intérêt théorique pour distinguer l’insuffisance hypophysaire de l’insuffisance hypothalamique au cours de laquelle la réponse est conservée sur un mode décalé. L’hyponatrémie est plus fréquente et plus sévère. Son traitement repose également sur l’administration de lévothyroxine, mais l’objectif est de corriger la T4L plasmatique. La surveillance ne doit d’ailleurs se fonder que sur le taux de T4L, le dosage de TSH n’étant d’aucun intérêt, une fois le diagnostic établi. longtemps occultes, allant de la bradycardie — qui procède de l’hypométabolisme — à l’insuffisance cardiaque, associée ou non à une cardiomégalie, due à une infiltration myxœdémateuse du cœur. De plus l’hypothyroïdie favorise l’athéromatose : il existe une coronaropathie longtemps silencieuse qui se révèle volontiers lors du traitement, du fait de l’augmentation du travail myocardique. Le syndrome neuro-musculaire est fréquent. Myalgies, crampes musculaires, sensation d’enraidissement prédominant aux racines et déficit rhizomélique (le signe du tabouret), allongement du temps de décontraction des réflexes ostéo-tendineux (à l’origine du désuet réflexogramme achilléen), compressions canalaires avec paresthésies sont des signes d’appel trop méconnus. Mentionnons encore l’hypoacousie réversible ou l’exceptionnel coma myxœdémateux. L’appareil ostéo-articulaire peut également être concerné : tendinites d’insertion, douleur des grosses articulations avec épanchement articulaire visqueux, pseudoarthrite aiguë et pseudocrise de goutte avec ou sans chondrocalcinose. Les répercussions endocriniennes sont surtout nettes chez la femme jeune : anovulation, spanioménorrhée ou aménorrhée avec même, parfois, une galactorrhée due à une hyperstimulation des cellules lactotropes par la « défreination » de la TRH à l’origine d’une hyperprolactinémie. L’infertilité est fréquente. Chez l’homme, ce sont les troubles de la libido qui dominent. L’hypométabolisme sévère peut s’accompagner d’une insuffisance surrénalienne fonctionnelle, réversible lors du traitement, à ne pas confondre avec l’insuffisance surrénalienne autoimmune associée à une hypothyroïdie auto-immune dans le syndrome de Schmidt. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 3 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 4 DOSSIER FMC Diverses anomalies biologiques non spécifiques escortent l’hypothyroïdie. La classique hypercholestérolémie avec augmentation des LDL (sans diminution des HDL mais athérogène) est parfois à l’origine de la découverte de l’hypothyroïdie. L’hyponatrémie de dilution est rarement sévère dans les formes communes. L’hyperuricémie est commune. Une anémie de type varié, hypochrome, normochrome ou macrocytaire, rappelle l’impact pluriel des hormones thyroïdiennes. L’hyperprolactinémie n’est pas exceptionnelle chez la femme jeune. L’augmentation des CPK témoigne de la fréquence de l’atteinte musculaire. L’élévation de la TSH est quasi pathognomonique Le diagnostic positif de l’hypothyroïdie est aisé. Il se fonde sur la TSH dont l’élévation est quasi pathognomonique et renseigne sur la sévérité de l’hypothyroïdie. Toutefois, une élévation modérée et isolée (il est toujours sage d’associer un dosage de T4L) doit faire envisager une hypothèse iatrogène (antagoniste dopaminergique de type métoclopramide et neuroleptiques, ou antagonistes des récepteurs alpha-2-hypophysaires de type clonidine) ou une interaction avec des anticorps anti-TSH ou antihétérophiles. De principe, il convient d’envisager une sécrétion inappropriée de TSH par un improbable adénome thyréotrope ou une résistance généralisée aux hormones thyroïdiennes. Le test de stimulation par la TRH n’a plus de place dans l’exploration standard d’une hypothyroïdie périphérique. Le plus souvent auto-immunes L’auto-immunité est responsable de la majorité des hypothyroïdies acquises spontanées. Divers antigènes servent de cibles aux anticorps. Les anticorps antithyroperoxydases entraînent une inhibition de l’organification de l’iode. Les anticorps antithyroglobulines ont un rôle pathogène mal élucidé. La présence d’anticorps antirécepteurs de la TSH, rarement impliqués dans les hypothyroïdies, explique quelques formes cliniques déroutantes où une maladie de Basedow évolue par phases successives d’hyperthyroïdie et d’hypothyroïdie. La thyroïdite lymphocytaire chronique de Hashimoto touche la femme d’âge moyen. Elle comporte un goitre diffus, indolore, non compressif, d’échostructure hétérogène. Elle est presque toujours marquée par un titre d’antiTPO très élevé. La thyroïdite lymphocytaire chronique s’installe insidieusement chez la femme après la ménopause. Elle aboutit à une atrophie thyroïdienne. Les antiTPO sont élevés de façon plus inconstante. La thyroïdite lymphocytaire des adolescents se caractérise par l’apparition, à la période pubertaire, d’un goitre, d’une hypothyroïdie fruste qui n’est définitive que dans un tiers des cas. La thyroïdite du post-partum survient au décours de l’accouchement, parfois après une brève phase d’hyperthyroïdie, chez des femmes ayant un titre élevé d’antiTPO tout au long de la grossesse. L’hypothyroïdie est spontanément régressive après quelques mois et ne persiste que chez moins de 20 % des jeunes mères. Elle est parfois confondue avec le « baby blues ». Le risque de récidive lors des grossesses ultérieures est de l’ordre de 30 %. Fréquemment iatrogènes Les hypothyroïdes iatrogènes sont fréquentes. Elles peuvent être induites par l’iode contenu dans des médicaments (l’amiodarone en est l’exemple type) ou apporté lors d’examens radiologiques avec agent de contraste (le scanner « injecté » est un gros pourvoyeur d’iode). L’hypothyroïdie est due à une autorégulation défaillante, avec blocage persistant de l’organification de l’iode. L’arrêt de l’apport en iode suffit souvent à corriger l’hypothyroïdie dans un délai variable. Néanmoins, en cas de nécessité, il est possible de corriger l’hypothyroïdie sans interrompre l’agent causal. D’autres médicaments sont susceptibles de provoquer une hypothyroïdie. Les antithyroïdiens de synthèse, bien sûr, mais aussi le carbonate de lithium utilisé dans le traitement de la psychose maniaco-dépressive ou les cytokines utilisées lors du traitement des hépatites virales B ou C. Dans ce dernier cas, l’hypothyroïdie correspond à l’exacerbation d’une thyroïdite auto-immune latente par l’interféron. Il est de règle de dépister périodiquement la dysthyroïdie chez les patients traités DISCORDANCES HORMONALES : IL N’Y A PAS QUE LES DYSTHYROÏDIES FRUSTES Irremplaçable, le dosage hormonal est un point essentiel de la stratégie diagnostique et décisionnelle. Il n’empêche que le clinicien peut se trouver confronté à des résultats étonnants. La confrontation du dosage de la TSH avec ceux des hormones thyroïdiennes et avec le statut clinique du patient met la puce à l’oreille. En cas de discordance, il est souhaitable de refaire le dosage de TSH à l’aide d’une trousse de dosage différente afin d’écarter certaines interférences liées à la présence d’anticorps inhabituels. Il en est de même pour la T4L, dont le dosage peut être perturbé par la présence d’anticorps anti-T4 ou anti-T3 ou par une anomalie des protéines de transport. Ainsi, la dysalbuminémie familiale est associée à une hyperthyroxinémie euthyroïdienne en raison de l’affinité accrue de l’albumine pour la T4. La discordance entre une TSH perturbée et des hormones thyroïdiennes normales, ou vice et versa, doit faire considérer, outre les dysthyroïdies frustes, les effets des médicaments ou des pathologies associées. Les maladies graves aiguës ou chroniques, la dénutrition, déterminent les dyshormonémies des affections non thyroïdiennes caractérisées par une T3L effondrée, parfois une T4L basse et une TSH basse réversibles avec l’amélioration clinique. par ces médicaments. La détermination de la TSH suffit. L’hypothyroïdie qu’elle soit induite par l’iode ou par les médicaments est habituellement rapidement réversible après arrêt de l’agent causal. L’hypothyroïdie radique est par trop méconnue. Toute irradiation cervicale antérieure externe peut être à l’origine d’une hypothyroïdie dans les mois ou années qui suivent. Ainsi, à dix ans, on note une hypothyroïdie fruste ou patente chez 25 % des patients irradiés pour lymphome hodgkinien. Le traitement par iode 131 d’une hyperthyroïdie détermine une hypothyroïdie souvent tardive, mais définitive, chez un grand nombre de patients, d’autant plus que l’hyperthyroïdie était diffuse. La chirurgie thyroïdienne occasionne une hypothyroïdie, voulue ou non. L’hypothyroïdie survient immédiatement ou durant les deux ans qui suivent, selon la nature du geste. La carence iodée majore le risque. Traitement : préférer la lévothyroxine sodique Le traitement est simple, performant et peu coûteux. Il suffit de normaliser la TSH (entre 0,5 et 2 mu/ml) en administrant la dose adéquate de lévothyroxine sodique de préférence à toute autre hormone thyroïdienne. Cette forme a tout pour elle : — forme lévogyre active de la thyroxine ; — demi-vie longue (une semaine) ; — absorption satisfaisante à jeun ; — présentation commode de 25 µg à 200 µg par comprimé (les besoins sont estimés à 0,4 microgramme par kilo et par jour chez l’adulte). L’utilisation de la triiodothyroxine, préférable d’un point de vue théorique puisqu’il s’agit de l’hormone se liant au récepteur, est difficile et nécessite trois prises par jour. Le mélange de T4 et de T3, destiné à mimer la thyroïde (qui sécrète simultanément T4 et T3 dans une proportion de 80 et 20 %), se révèle de maniement difficile et ne doit pas être privilégié car il expose au risque de surdosage intermittent en T3. Attention au risque coronarien ! La mise en route du traitement peut être rapide, avec prescription d’une dose proche d’emblée de la dose substitutive chez des sujets jeunes (75 à 100 µg chez la femme, 100 à 150 µg chez l’homme), ayant une hypothyroïdie récente (postchirurgicale) et n’ayant aucun N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 4 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 5 DOSSIER FMC risque d’insuffisance coronarienne. En revanche, chez les personnes âgées, a fortiori chez les coronariens connus, la mise en route du traitement doit être précautionneuse et progressive (de 6,25, 12,5 ou 25 µg par paliers de quinze jours ou plus). Par principe, il convient de ne pas « res- IATROGÈNE pecter » l’hypothyroïdie dans les situations à risque coronarien, mais de la traiter avec doigté. Tout au plus peut-on attendre le bénéfice d’une chirurgie de revascularisation ou d’une angioplastie avant de normaliser la TSH. Un traitement adjuvant par bêtabloquants minimise le risque coronarien. En cas d’hypothyroïdie fruste, définie par une TSH modérément et isolément augmentée, l’intérêt d’un traitement visant à corriger la TSH est encore l’objet d’un débat, bien que les preuves indirectes et épidémiologiques de l’intérêt du traitement s’accumulent. La présence d’anticorps anti-TPO est considérée comme un argument supplémentaire de traitement. La surveillance du traitement repose sur le dosage de la TSH tous les six mois, autant pour adapter la dose de lévothyroxine sodique que pour vérifier l’observance. ■ L’iode en cause "L’iode administré en excès, principalement sous forme médicamenteuse ou d’agent iodé, peut être à l’origine, chez des sujets prédisposés, soit d’une hyperthyroïdie, soit d’une hypothyroïdie. PAR LE PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER Aspect scintigraphique caractéristique d’un adénome toxique. induite par l’iode est fréquente dans nos régions caractérisées par une subcarence iodée. Elle survient surtout lorsqu’il existe une pathologie thyroïdienne sous-jacente, connue ou non. La surcharge iodée massive induite, par exemple, par l’amiodarone (75 mg d’iode par comprimé) est à l’origine d’une hyperthyroïdie assez fréquente en cas de goitre multinodulaire. À la stimulation de la synthèse hormonale s’ajouterait un effet propre, à l’origine d’une sorte de thyroïdite. En fait, c’est devant toute hyperthyroïdie ne s’accompagnant pas d’une hyperfixation à la scintigraphie qu’il faut se faire « chercheur d’iode ». Une détermination de l’iodurie ou de l’iodémie peut être nécessaire pour faire la preuve d’une surcharge iodée lorsque l’interrogatoire ne lève pas le doute. Les diagnostics cliniques et biologiques ne présentent pas de particularité en l’absence de prise HYPERTHYROÏDIE L’ d’amiodarone. En fait, les effets bêtabloquantslike de l’amiodarone peuvent masquer longtemps les signes d’appels de la thyrotoxicose dont la reconnaissance n’est faite qu’à un stade avancé de la maladie : troubles du comportement, amaigrissement massif et surtout récidive des troubles du rythme. La preuve est apportée par l’effondrement de la TSH et l’augmentation de la T4L. Encore faut-il avoir à l’esprit qu’une élévation modérée de la T4L peut être la conséquence d’une modification du métabolisme hormonal dû à l’amiodarone indépendamment de toute hyperthyroïdie. Pour la même raison, l’élévation de la T3L est souvent tardive et différée par rapport à l’hyperthyroïdie. Le traitement des formes modérées repose sur la suppression de la cause de la surcharge. Les antithyroïdiens de synthèse sont peu efficaces. Dans les formes plus sévères, il est nécessaire de recourir à des traitements moins conventionnels : perchlorate de potassium, corticothérapie, voire plasmaphérèse ou thyroïdectomie. induite par l’iode est moins fréquente et réversible à l’arrêt de la surcharge iodée ou après administration de perchlorate de potassium qui assure une « vidange iodée » du parenchyme thyroïdien. Elle est la conséquence d’un blocage de la synthèse hormonale et de la poursuite du captage iodé, ce qui entraîne une accumulation iodée intrathyroïdienne et explique que la scintigraphie (qu’il ne faut pas faire) n’est pas blanche. Si le traitement iodé ne peut être interrompu, il suffit de corriger l’hypoHYPOTHYROÏDIE L’ thyroïdie par une substitution hormonale. En conclusion, hyperthyroïdie ou hypothyroïdie peuvent être induites par une surcharge iodée aiguë ou chronique. Dans ce dernier cas, dont l’exemple type est la surcharge en amiodarone, il est légitime d’instaurer une surveillance systématique de la fonction thyroïdienne avant traitement, puis un mois, puis tous les six mois après traitement. Un contrôle de la TSH est souhaitable chaque fois qu’apparaissent de nouveaux symptômes. ■ SCINTIGRAPHIE : SI TSH BASSE La scintigraphie apprécie le captage et la répartition d’un isotope radioactif de l’iode ou du technétium dans la thyroïde. Il s’agit d’un examen fournissant des indications morphologiques et fonctionnelles. Le versant morphologique est aujourd’hui relégué par les performances de l’échographie ; la séméiologie des « nodules froids » est obsolète. Seule demeure intéressante la mise en évidence d’une hyperfixation témoignant d’un hyperfonctionnement diffus ou nodulaire de la thyroïde. Cet examen reste indispensable dans le cadre de l’hyperthyroïdie, car il contribue au diagnostic étiologique et participe parfois aux choix thérapeutiques. En pratique, il ne devrait être effectué qu’en cas de TSH basse. Dans l’hyperthyroïdie, la scintigraphie peut orienter vers : – une maladie de Basedow : hyperfixation diffuse ; – un adénome toxique : plage hyperfixante extinctive ; – un goitre multinodulaire toxique : plusieurs plages hyperfixantes extinctives ; – une hyperthyroïdie induite par l’iode (pas de fixation) ; – une thyroïdite subaiguë (pas de fixation) ; – une hyperthyroïdie factice (pas de fixation). C’est dire que la scintigraphie thyroïdienne n’est ni nécessaire ni souhaitable en cas d’hypothyroïdie, de goitre simple ou de goitre uninodulaire ou multinodulaire à TSH normale. Par ailleurs, en l’absence de procédures thérapeutiques spécifiques (cancer, traitement par iode radioactif), il n’y a pas d’indication pour une seconde scintigraphie. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 5 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 6 DOSSIER FMC Que faire devant une TSH isolément abaissée ? CONDUITE À TENIR "La coexistence d’une TSH basse et de concentrations normales de T4L et T3L est une situation très fréquente posant de délicats problèmes diagnostiques et thérapeutiques. PAR LE PR BERNARD GOICHOT* E simple rappel de l’organisation de l’axe thyréotrope permet de comprendre qu’il existe deux grandes catégories de causes de diminution isolée de la TSH: — les causes extra-thyroïdiennes, notamment celles qui agissent sur le stimulus physiologique de la thyroïde, la TSH,comme l’insuffisance hypothalamo-hypophysaire, affections non thyroïdiennes graves, la prise de certains médicaments (hormones thyroïdiennes, glucocorticoïdes, dopamine, etc.) — les causes thyroïdiennes, un excès de sécrétion d’hormones thyroïdiennes se traduisant par une inhibition de la sécrétion de TSH, en raison du rétrocontrôle inhibiteur exercé physiologiquement par les hormones thyroïdiennes : par autonomisation (adénome toxique, goitre multinodulaire), stimulation thyroïdienne (indépendante de la TSH, maladie de Basedow, grossesse), ou destruction thyroïdienne (thyroïdite subaiguë ou silencieuse, thyroïdite du post-partum, de Hashimoto). L’hypophyse est particulièrement sensible aux variations des concentrations des hormones thyroïdiennes, avec une relation logarithmique inverse entre hormonémie thyroïdienne et TSH : une variation donnée de la T4L se traduit par une variation multipliée par dix de la TSH. La diminution de la TSH est donc le signe le plus précis et le plus sensible de l’hyperthyroïdie. — en cas d’hyperthyroïdie fruste, y a-t-il un bénéfice à traiter précocement certains patients ? L Que sont les hyperthyroïdies frustes ? Différents termes ont été proposés pour désigner la coexistence d’une TSH abaissée avec des hormones thyroïdiennes normales : hyperthyroïdie fruste, hyperthyroïdie infraclinique ou hyperthyroïdie occulte. Ces dénominations sous-entendent deux postulats, à vrai dire discutables : Diminution de la TSH thyroïdienne ou non ? PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER ! Les causes extra-thyroïdiennes de baisse de la TSH sont généralement facilement évoquées par le contexte, l’interrogatoire et l’examen clinique. Les maladies extra-thyroïdiennes s’accompagnent souvent de perturbations de l’hormonémie thyroïdienne, en particulier de la T3 (« syndrome de basse T3 ») et, dans des formes plus sévères, de la T4. Seules des maladies graves, menaçant le pronostic vital, s’accompagnent d’une diminution du taux de la TSH. Un contrôle à distance de la phase aiguë permet de vérifier sa normalisation. Cette atteinte hypothalamohypophysaire doit être envisagée notamment lorsqu’il existe une discordance avec la clinique : tableau évoquant plutôt une hypothyroïdie, signes éventuels d’atteinte hypophysaire (syndrome tumoral et/ou endocrinien associé), voire panhypopituitarisme. La grossesse est une situation particulière où l’interprétation d’une diminution de la TSH (physiologique au premier trimestre) peut être délicate. Enfin, la TSH peut rester longtemps inhibée après le traitement d’une hyperthyroïdie, Aspect scintigraphique de goitre multinodulaire à la phase prétoxique (TSH isolément abaissée). — il existe un excès d’hormones thyroïdiennes au niveau des tissus périphériques : ce postulat, si l’on excepte les causes extrathyroïdiennes de diminution de la TSH, est vrai au niveau hypophysaire ; il est, en revanche, difficile à démontrer dans les autres tissus en l’absence de marqueurs tissulaires sensibles et spécifiques de l’action des hormones thyroïdiennes ; — cet excès n’a pas d’expression clinique, même à long terme : ce postulat est, quant à lui, clairement inexact, car il existe actuellement plusieurs arguments pour affirmer que ces situations s’accompagnent de complications cardiaques et osseuses à long terme. Pour ces raisons, et compte tenu du caractère peu spécifique de la sémiologie des dysfonction- nements thyroïdiens, le terme d’hyperthyroïdie fruste semble préférable. Devant une diminution isolée de la TSH, quatre questions se posent : — cette diminution est-elle réellement isolée ? (il faut en effet impérativement vérifier la normalité des deux hormones sécrétées par la thyroïde, la T4 et la T3, car il peut exister de véritables hyperthyroïdies à T3 avec une T4 normale) ; — cette diminution est-elle d’origine thyroïdienne ou extrathyroïdienne ? — en l’absence de cause extrathyroïdienne évidente, quels sont les critères qui doivent inciter à explorer les patients et avec quels examens ? N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 6 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 7 DOSSIER FMC notamment d’une maladie de Basedow, malgré le retour à l’euthyroïdie clinique et la normalisation de la T4L et de la T3L. Cette inhibition persistante doit être connue afin de ne pas modifier de façon inappropriée l’attitude thérapeutique. ! Les causes thyroïdiennes de TSH abaissée ne diffèrent pas des causes d’hyperthyroïdie avérée. Le problème est plus souvent soulevé chez le sujet âgé, la fréquence des dysthyroïdies augmentant avec l’âge, comme les risques de l’hyperthyroïdie, ce qui explique la prédominance étiologique des goitres multinodulaires et des adénomes toxiques. Sur quels critères explorer ? La décision d’explorer une diminution isolée du taux de TSH doit prendre en compte deux notions : — la performance du dosage utilisé et l’importance de la diminution de la TSH ; — le devenir, dans les études épidémiologiques, des patients ayant une TSH isolément abaissée. Les méthodes de dosage de la TSH ont beaucoup évolué depuis vingt ans. La quasi-totalité des méthodes actuellement utilisées permettent une précision de deux chiffres après la virgule, ce qui autorise à distinguer des valeurs de TSH effondrées (le plus souvent inférieures à 0,05 µU/l, traduisant une inhibition complète de la sécrétion hypophysaire), des valeurs plus modérément abaissées dont la signification est moins univoque. Cette distinction repose sur des études épidémiologiques qui, même si elles utilisent des dosages moins performants, ont montré que la quasi-totalité des patients ayant une TSH inférieure à 0,05 µU/l gardaient cette valeur abaissée après un an de surveillance, alors que les trois quarts des patients ayant une TSH modérément abaissée normalisaient cette valeur spontanément après un an. Il ne paraît donc pas illogique de prendre en compte l’importance de la diminution de la TSH dans le raisonnement diagnostique. La prévalence des TSH abaissées dépend de la population étudiée (âge, origine géographique, mode de recrutement) et du seuil inférieur de normalité retenu. Elle oscille généralement entre 3 et 6 %. Les études de suivi de sujets ayant une diminution isolée de la TSH donnent des résultats très variables : évolution vers une hyperthyroïdie avérée ou persistance d’une diminution isolée de la TSH dans des proportions allant de 0 à 50 %. Dans l’ensemble de ces études toutefois, la TSH se normalise spontanément après un délai variable, au moins une fois sur deux. Les causes de ces diminutions transitoires de la TSH ne peuvent être identifiées dans de telles études épidémiologiques. Ce constat incite cependant à une certaine prudence dans la démarche diagnostique et thérapeutique d’une TSH isolément abaissée. Répercussions cardiaques et osseuses La question longtemps débattue des éventuelles conséquences à long terme de l’hyperthyroïdie fruste a reçu, en 1994, une réponse claire. Dans l’étude de Framin- PRUDENCE DANS LA DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE ET THÉRAPEUTIQUE D’UNE TSH ISOLÉMENT ABAISSÉE. DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE gham, Sawin a démontré que 32 % des sujets ayant une TSH isolément abaissée développent dans les dix ans une arythmie complète par fibrillation auriculaire, contre 8 % des sujets ayant une TSH normale. Une TSH abaissée est donc un facteur de risque incontestable de développer une arythmie complète. Une étude récente a montré qu’une TSH abaissée était un facteur de risque de mortalité d’origine cardio-vasculaire. D’autres travaux ont apporté des arguments sur les conséquences néfastes de l’hyperthyroïdie fruste au niveau osseux, tout au moins chez la femme après la ménopause. Le bénéfice d’un traitement précoce des hyperthyroïdies frustes n’a cependant pas encore été démontré. Une extrapolation à partir de l’étude de Sawin a permis d’évaluer à 4,2 le nombre des personnes ayant une TSH abaissée à traiter pour éviter l’apparition d’une arythmie complète par fibrillation auriculaire dans les dix ans. Ce calcul n’est valable que si le traitement de l’hyperthyroïdie fruste est efficace à 100 % et ne s’accompagne d’aucun effet secondaire. La décision de traiter une hyperthyroïdie fruste doit donc actuellement s’appuyer sur deux éléments: — l’évaluation du risque d’évolution vers une hyperthyroïdie avérée ; — l’évaluation des risques de l’hyperthyroïdie pour un patient donné. Malgré l’absence de preuve scientifique, beaucoup d’auteurs proposent de traiter précocement les sujets à risque : patients âgés, cardiaques, femmes en postménopause ayant des facteurs de risque d’ostéoporose. T4L, T3L, scintigraphie… La surveillance biologique d’un patient dont la TSH est abaissée comprend obligatoirement les dosages de T4L et T3L. Le dosage des anticorps antithyroïdiens ou antirécepteurs de la TSH ne doit être envisagé que lorsque le contexte clinique est évocateur. Le test à la TRH a beaucoup perdu de son intérêt dans cette indication (ses résultats, dans la mesure où ils sont bien corrélés avec ceux du dosage de la TSH ultrasensible n’apportent pas d’information supplémentaire). La mesure de certains indices biologiques d’activité des hormones thyroïdiennes (cholestérol, ostéocalcine…) n’a pas d’indication en pratique courante, car ces indices manquent de sensibilité et de spécificité. La scintigraphie thyroïdienne est l’examen le plus logique à proposer dans cette situation, car elle visualise l’autonomisation partielle (adénome toxique, goitre multinodulaire) ou complète de la glande. Elle permet également, lorsqu’elle est blanche, d’évoquer certains diagnostics différentiels (hyperthyroïdie à l’iode, thyroïdite, thyrotoxicose factice). L’appréciation du terrain et du risque d’évolution vers une hyperthyroïdie avérée détermine l’attitude thérapeutique. Un sujet porteur d’une cardiopathie ischémique sévère, d’une cardiopathie d’autre origine mal compensée, une femme ménopausée ostéoporotique bénéficieront d’un traitement radical précoce, même au prix d’une hypothyroïdie séquellaire. L’attitude sera plus difficile à adopter dans les autres situations en l’absence d’étude contrôlée [voir schéma]. ■ * Service de médecine interne et nutrition, CHU Strasbourg-Hautepierre, 67098 Strasbourg Cedex. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 7 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 8 DOSSIER FMC Hyperthyroïdie et maladie de Basedow TSH BASSE "La maladie de Basedow est fréquente (2 % des femmes en souffrent à un moment de leur vie) et Une femme de 34 ans, mère de deux enfants, consulte pour nervosité, perte de poids de six kilos en un mois et gêne oculaire. Ses antécédents se résument à un tabagisme. L’examen clinique montre un pouls à 110 par minute, un tremblement fin des extrémités. Les mains sont moites. La palpation cervicale décèle une thyroïde de petite taille. Le regard est brillant, les paupières supérieures sont rétractées et on constate une exophtalmie ; l’œil droit ne peut regarder vers le haut, ce qui entraîne une diplopie intermittente. S’y associe un larmoiement modéré. Le bilan hépatique ne montre qu’une cytolyse modérée (TGO à trois fois la normale, TGP à deux fois la normale sans cholestase). La TSH est effondrée (inférieure à 0,001 µU/ml), la T4L augmentée à 38 pg/ml (normale inférieure à 18 pg/ml) et la T3L à 8,2 pg/ml (pour une normale inférieure à 4,6 pg/ml). La recherche d’anticorps antirécepteurs de la TSH (TRAK) est positive à 4,5 U/l (normale au-dessous de 2 U/l), comme celle des anticorps antithyroperoxydase (TPO) à 800 UI/l (normale à moins de 60 UI/l). Il s’agit d’une hyperthyroïdie franche et symptomatique en rapport avec une maladie de Basedow, compliquée d’une ophtalmopathie basedowienne. Il n’existe pas de critère de gravité général, ni cardiaque ni psychiatrique. PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER représente l’étiologie prédominante de l’hyperthyroïdie de la femme jeune, puisque l’âge moyen de survenue est de 40 ans et que le sex-ratio est de dix femmes pour un homme. Patente ou fruste, l’hyperthyroïdie est confirmée par la constatation d’un taux de TSH bas . Une guérison définitive peut être obtenue dans 50 % des cas grâce au traitement médical. PAR LE DR FABIENNE GRUNENBERGER* L’œdème palpébral est la manifestation la plus commune de l’ophtalmopathie basedowienne. A maladie de Basedow est une pathologie auto-immune d’organe survenant sur un terrain génétiquement prédisposé. Elle est caractérisée par la production d’autoanticorps stimulant la fonction thyroïdienne — les anticorps antirécepteurs de la TSH (TRAK) — selon un mécanisme qui reste mal compris. Ces autoanticorps, associés à des cytokines d’action locale, sont responsables de modifications fonctionnelles (hyperthyroïdie), mais aussi anatomiques (goitre vasculaire le plus souvent, exophtalmie parfois, par infiltration lymphocytaire des muscles oculomoteurs et de la graisse orbitaire, myxœdème prétibial exceptionnellement). Des facteurs extérieurs, tels une infection (virale), un apport iodé excessif ou un stress, pourraient contribuer au déclenchement de la maladie de Basedow, d’ailleurs plus fréquente chez le fumeur. Le tabagisme majore L fortement le risque d’ophtalmopathie chez ces patients, qu’il multiplie par 7,7. Thyrotoxicose Les manifestations cliniques classiques de la maladie de Basedow sont celles de la thyrotoxicose : tachycardie, amaigrissement avec appétit conservé, thermophobie, nervosité et tremblement. Le goitre diffus et soufflant peut être absent. Les signes cardio-vasculaires sont présents chez près de 95 % des patients ; les diarrhées sont plus rares. Les critères cliniques de gravité doivent être systématiquement recherchés : — cardiothyréose : troubles du rythme (dont l’arythmie complète par fibrillation auriculaire), insuffisance cardiaque globale ; — troubles neurologiques (syndrome pyramidal ou neuropathie symptomatique) ou musculaires (myopathie des ceintures ou paralysie périodique) ; — troubles hépatiques (fréquence de la cytolyse, comme dans cette observation) ou digestifs (vomissements). Les manifestations oculaires, plus rares actuellement qu’il y a une vingtaine d’années, peut-être en raison du diagnostic plus précoce de la maladie de Basedow, compliquent 10 à 25 % des cas. Leur évaluation doit tenir compte de certaines manifestations oculaires, classées par gravité croissante : — troubles fonctionnels : rétraction de la paupière supérieure, rareté du clignement, asynergie oculo-palpébrale ; — atteinte inflammatoire : œdème des paupières, des conjonctives, etc. ; — degré de la protrusion oculaire (exophtalmie), avec éventuellement signes fonctionnels ; — atteinte des muscles extraoculaires avec paralysie et diplopie (comme dans cette observation) ; — atteinte cornéenne ; — atteinte visuelle par neuropathie optique. Confirmation biologique La confirmation biologique du diagnostic de maladie de Basedow repose sur l’association de signes d’hyperthyroïdie (TSH effondrée, augmentation de la T4 libre, rarement augmentation isolée de la T3 libre) et de signes d’autoimmunité d’organe (anticorps antirécepteurs à la TSH présents chez 80 % des patients, élévation fréquente des N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 8 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 9 DOSSIER FMC Une augmentation diffuse de la synthèse hormonale Le diagnostic étiologique de l’hyperthyroïdie est avant tout clinique. Il peut nécessiter une scintigraphie thyroïdienne. L’augmentation diffuse de la synthèse hormonale, qui caractérise la maladie de Basedow, est illustrée par une captation augmentée et homogène de l’isotope. La scintigraphie contribue surtout au diagnostic étiologique d’une hyperthyroïdie lorsque certains signes cliniques, en particulier le goitre vasculaire ou les manifestations oculaires, sont absents. Elle contribue essentiellement au diagnostic différentiel. De même l’échographie thyroïdienne, complétée par un examen Doppler, qui visualise une glande homogène avec une augmentation importante des flux vasculaires, peut contribuer au diagnostic différentiel. Il faut cependant tenir compte de la forte prévalence des nodules thyroïdiens en France (15 à 25 % selon les régions et les tranches d’âge) pour interpréter cet examen complémentaire ; la présence d’un ou plusieurs nodules échographiques lors d’une hyperthyroïdie clinique n’excluant absolument pas le diagnostic de maladie de Basedow. Dans l’observation rapportée ici, la réalisation d’examens complémentaires d’imagerie ne s’impose pas, les données cliniques et biologiques n’autorisant aucun doute diagnostique. Traitement médical d’abord Plusieurs modalités thérapeutiques de la maladie de Basedow sont possibles et il est nécessaire de choisir une stratégie en concertation avec le patient. L’attitude classique est de privilégier le traitement médical en première intention. Celui-ci débute par un antithyroïdien de synthèse, le plus souvent le carbimazole, à raison de 20 à 60 mg (un à trois comprimés) par jour, pendant quatre à six semaines, durée nécessaire à l’inhibition de la production hormonale. Le traitement est ensuite ajusté en ramenant cet antithyroïdien de synthèse à la dose quotidienne de 20 mg, à visée bloquante, et en lui associant des hormones thyroïdiennes — à visée substitutive (25 à 75 µg par jour de lévothyroxine) — afin d’éviter une hypothyroïdie iatrogène et des ajustements posologiques itératifs. La durée de traitement recommandée est de dix-huit mois, avec l’objectif de limiter le risque de nouvelle poussée. Une surveillance de la numération leucocytaire tous les quinze jours pendant les deux premiers mois de traitement est nécessaire devant le risque de leucopénie et d’agranulocytose. thèse, a l’avantage d’être immédiatement efficace et d’éviter, si la thyroïdectomie est totale, tout risque de récidive. Il nécessite un chirurgien expérimenté pour limiter le risque des complications que sont la paralysie récurrentielle et l’hypoparathyroïdie, observées dans 0,5 à 3 % des cas selon les équipes. La complication la plus habituelle est l’hypothyroïdie définitive. Elle est parfois souhaitée lorsque l’hyperthyroïdie est particulièrement difficile à maîtriser. Un traitement chirurgical peut être proposé en première intention lorsque le goitre est très volumineux, compressif ou inesthétique, Le myxœdème prétibial est un symptôme exceptionnel de la maladie de Basedow qui rappelle que cette maladie thyroïdienne auto-immune se manifeste par des signes extra-thyroïdiens : exophtalmie et myxœdème prétibial (1 % des cas). PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER anticorps anti-TPO). Une anémie microcytaire s’observe assez souvent au moment du diagnostic de maladie de Basedow, ainsi qu’une élévation des transaminases. Ces anomalies se corrigent rapidement après la mise en route du traitement. La survenue d’une intolérance cutanée, articulaire ou hépatique, complications non exceptionnelles avec ce traitement, justifie en première intention de remplacer le carbimazole par un thiouracile sous surveillance clinique et biologique plus rapprochée (toutes les deux semaines, puis tous les mois). Ce schéma thérapeutique médical offre une possibilité de guérison définitive sans séquelles dans 50 % des cas. Ses inconvénients sont la nécessité de consultations répétées, les risques d’allergies et le risque de rechute à l’arrêt dans 50 % des cas, dans les deux ans qui suivent la poussée. Traitement chirurgical : après préparation Le traitement chirurgical, effectué après une préparation médicale par antithyroïdien de syn- lorsque le patient suit mal le traitement médical ou encore chez la femme qui souhaite rapidement un enfant. Il est proposé en seconde intention lors d’une récidive après traitement médical. Iode radioactif : traitement simple mais pas pour tous L’administration d’iode radioactif a l’avantage de la simplicité. Son délai d’action est retardé (de plusieurs semaines à trois mois au minimum) et le risque d’hypothyroïdie secondaire s’élève progressivement pour atteindre plus de 50 % à dix ans. Ce traitement est contre-indiqué chez la femme enceinte, l’enfant et, dans une certaine mesure, l’adolescent. Son administration doit être discutée en cas d’ophtalmopathie associée, qu’il peut alors exacerber. Par tradition, il est moins utilisé dans le traitement de la maladie de Basedow en France que dans d’autres pays. Il est choisi lors de récidives en particulier postopératoires ou chez des patients plus âgés. Le choix thérapeutique dans notre observation doit tenir compte de l’opinion de la patiente, de son souhait d’une éventuelle nouvelle grossesse et de l’état oculaire. La maladie de Basedow au cours de la grossesse comporte un risque, faible, d’hyperthyroïdie fœtale, par passage transplacentaire des anticorps (TRAK) de la mère. De plus, il existe un passage transplacentaire systématique de tous les antithyroïdiens de synthèse qui entrave la fonction thyroïdienne fœtale. Le retentissement de la grossesse sur l’atteinte oculaire est mal connu. Ces données incitent à ne pas encourager une grossesse chez cette patiente en ce moment. Un traitement par carbimazole est débuté, en évitant toute évolution vers une hypothyroïdie qui risque de majorer les manifestations oculaires. Un suivi médical rapproché est souhaitable pour dépister une manifestation allergique. Après contrôle de l’ECG, un traitement symptomatique par bêtabloquant (propranolol, trois comprimés de 40 mg par jour) est proposé pendant quelques semaines. La sévérité de l’ophtalmopathie (paralysie oculomotrice) justifie une prise en charge ophtalmologique spécialisée avec éventuellement port de lunettes à prisme, pour lutter contre la gêne occasionnée par la diplopie. Un traitement spécifique par corticoïdes oraux (0,5 à 1 mg par kilo) doit être proposé. Selon l’évolution fonctionnelle après quelques semaines de corticothérapie, une radiothérapie orbitaire rétro-oculaire peut être nécessaire en seconde intention. Il est par ailleurs indispensable de recommander l’arrêt du tabac. ■ * Service de médecine interne et nutrition, CHU Strasbourg-Hautepierre, 67098 Strasbourg Cedex. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 9 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 10 DOSSIER FMC NODULAIRE Fruste ne veut pas dire bénin "Le goitre multinodulaire toxique est l’aboutissement d’une autonomisation de certaines plages parenchymateuses ou nodules dans le cadre d’un goitre multinodulaire banal évoluant souvent depuis de très nombreuses années. Non traité, il n’est pas sans conséquences cardiaques ou osseuses. PAR LE DR ALAIN PRADIGNAC* s’agit donc d’une hyperthyroïdie périphérique fruste, en rapport avec un goitre multinodulaire toxique de faible volume et non compressif. Cette hyperthyroïdie est qualifiée de fruste dans la mesure où la TSH est abaissée (voire indosable), alors que les hormones thyroïdiennes (T4L et/ou T3L) restent dans les zones de la normalité. Il n’en demeure pas moins que ces hyperthyroïdies frustes, si L I ADÉNOME TOXIQUE PR JEAN-LOUIS SCHLIENGER Mme R…, 75 ans, présente une altération de l’état général. Elle se plaint de palpitations, de nervosité et d’une perte de l’appétit d’installation progressive sur deux mois. Elle est habituellement traitée par inhibiteur de l’enzyme de conversion, diurétique, digoxine et antivitamine K pour une insuffisance cardiaque avec arythmie complète par fibrillation auriculaire. L’examen clinique objective une arythmie avec un rythme cardiaque à 122 par minute, ainsi qu’un goitre multinodulaire de faible volume, prédominant au niveau du lobe droit, sans troubles compressifs locorégionaux. La TSH est indosable, la T4L normale à 12,7 pg/ml et l’INR au-dessus des zones thérapeutiques anticoagulantes (5,42). L’échographie thyroïdienne confirme le caractère multinodulaire du goitre, avec un lobe droit de plus gros volume que le lobe gauche. La scintigraphie thyroïdienne objective une fixation hétérogène, avec des zones d’hyperfixation correspondant aux nodules échographiques, côtoyant des zones hypofixantes. En vieillissant, les goitres multinodulaires se compliquent souvent d’une hyperthyroïdie, par autonomisation de la fonction. Il s’agit ici d’un goitre toxique dont les risques sont les troubles du rythme cardiaque, l’amaigrissement et les troubles psychiques. elles ne sont pas traitées, peuvent évoluer vers des formes franches, surtout lorsqu’elles sont en rapport avec un goitre mutinodulaire et qu’il existe une surcharge iodée, éventualité non rare à cet âge de la vie. Elles exposent par ailleurs aux mêmes complications que l’hyperthyroïdie patente : fibrillation auriculaire et risque d’embolies systémiques, altération des capacités systoliques et diastoliques du cœur, ostéoporose. Elles justifient de ce fait une enquête étiologique appropriée, ainsi qu’un traitement spécifique. Hyperthyroïdie à T3 ? Le bilan préthérapeutique comprend toujours un diagnostic hormonal avec dosage de la TSH et de la T4L, paramètres habituellement nécessaires et suffisants pour préciser à la fois le type de dysthyroï- die et l’importance du trouble hormonal actuel. Ces deux dosages ne permettent cependant pas de poser avec précision le diagnostic d’hyperthyroïdie à T3, préférentiellement rencontrée au cours des adénomes toxiques et dans certains goitres hétéromultinodulaires toxiques. Un dosage de la T3L doit alors être réalisé, surtout s’il existe une discordance entre des signes cliniques importants de thyrotoxicose et une T4L normale. Après l’étape hormonale, le bilan préthérapeutique est complété par une échographie thyroïdienne, dont la finalité est de réaliser un bilan morphologique du parenchyme thyroïdien, avec dénombrement et mensurations des différents nodules, pas toujours tous palpables cliniquement. La scintigraphie est utile pour préciser le caractère hyperfixant des nodules « toxiques » à l’origine de L’adénome toxique représente un cas particulier. Cliniquement, les signes fonctionnels sont superposables à ceux du cas décrit ci-dessus alors que l’examen physique objective un nodule thyroïdien isolé. Les complications évolutives demeurent les mêmes. Le bilan hormonal est similaire, si ce n’est qu’il est caractérisé par une plus grande fréquence des formes d’hyperthyroïdie à T3L. L’échographie montre un nodule solitaire, hyperfixant et extinctif vis-à-vis du parenchyme adjacent et controlatéral à la scintigraphie. Le traitement radical de première intention est chirurgical avec la réalisation d’une loboisthmectomie emportant le lobe où siège le nodule toxique, après normalisation des hormones thyroïdiennes. L’administration d’iode 131 demeure l’alternative en cas de contre-indication chirurgicale. A distance, il n’est pas rare de voir apparaître un autre nodule dans le lobe controlatéral. la diminution de la TSH et s’assurer de l’absence de surcharge iodée pouvant perturber une éventuelle administration d’iode 131. Il n’y a pas lieu ici de déterminer les anticorps antithyroïdiens. Le goitre multinodulaire toxique est l’aboutissement d’une autonomisation de certaines plages parenchymateuses ou nodules dans le cadre d’un goitre multinodulaire banal évoluant souvent depuis de très nombreuses années. Cela justifie la réalisation pério- N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 10 2187-dysthroîdies.pdfd 11/06/02 15:51 Page 11 DOSSIER FMC dique (tous les ans ou tous les deux ans) d’un dosage de TSH en cas de goitre multinodulaire ancien, a fortiori lorsque apparaissent des signes cliniques plus ou moins atypiques (palpitations et autres troubles du rythme, troubles de l’humeur, amaigrissement). Traiter pour protéger le cœur et les vaisseaux Un traitement à visée thyroïdienne s’impose ici car l’hyperthyroïdie fruste, fréquente lors des goitres multinodulaires vieillis, si elle est négligée, constituera un facteur d’aggravation cardio-vasculaire notable chez notre patiente. Le traitement radical le plus approprié, car techniquement le plus simple, consiste en l’administration d’iode 131. Ce traitement peu invasif doit être réalisé après la normalisation des taux d’hormones thyroïdiennes (T4L et/ou T3L). Dans les formes frustes (notre observation), il pourra être réalisé d’emblée alors que, dans les formes franches, il sera nécessaire, pour optimiser son efficacité, d’avoir recours à l’administration temporaire d’antithyroïdiens de synthèse, qui seront interrompus une dizaine de jours avant l’administration d’iode 131. Une surveillance postirathérapie doit être mise en place, avec réévaluation de la fonction thyroïdienne deux et six mois après l’administration d’iode pour s’assurer tant du retour progressif à l’euthyroïdie, que de l’absence d’évolution vers une éventuelle hypothyroïdie, toujours possible après ce traitement. L’alternative thérapeutique à l’iode 131 demeure l’option chirurgicale avec une thyroïdectomie totale. Outre les risques anesthésiques, elle expose toujours à une atteinte des nerfs récurrents. Elle doit être préférée chez des patients jeunes ou sans polypathologie, dans les cas de goitres hyperfonctionnels de gros volume, pour lesquels l’iode 131 a souvent une efficacité limitée, ou encore de goitres compressifs, car l’iode 131 peut être à l’origine d’une augmentation transitoire mais potentiellement sévère des troubles compressifs. AVK + hormones thyroïdiennes: une interaction à connaître Cette observation illustre également les interactions éventuelles entre les antivitamines K et les hormones thyroïdiennes, ces deux molécules étant en effet véhiculées dans le plasma par l’albumine. Or l’affinité des hormones thyroïdiennes pour l’albumine est plus élevée que celle des antivitamines K. A dose d’antivitamine K constante, l’élévation de la T4L provoque l’augmentation de l’INR, une diminution s’observant dans le cas contraire. Cela nécessite donc de diminuer temporairement la posologie de l’antivitamine K chez cette patiente, de façon à ramener son INR dans les zones thérapeutiques. La posologie devra secondairement être réaugmentée au fur et à mesure du retour à l’euthyroïdie, en l’adaptant en fonction des valeurs de l’INR dont le dosage sera plus fréquent. ■ * Service de médecine interne et nutrition, CHU Strasbourg-Hautepierre, 67098 Strasbourg Cedex. N° 2187 - MARDI 26 MARS 2002 11
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