bases de genetique et de selection animale - Tours
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BASES DE GENETIQUE ET DE SELECTION ANIMALE -Eléments de génétique moléculaire -Hérédité des caractères non quantitatifs -Hérédité des caractères quantitatifs -Sélection intra-race -Croisements -Dispositif génétique Français - Perspectives -Vocabulaire et abréviations -Formulaire Jean-Pierre HALLAIS Enseignant en zootechnie au Lycée agricole de TOURS-FONDETTES Février 2012 / version janvier 2014 Ce cours est destiné aux apprenants. En dehors de l'accord écrit de son auteur, toute diffusion ou publication par des organismes de formation, des formateurs, des particuliers ou des entreprises est interdite. De la même façon, toute parution en téléchargement ou en consultation sur tout autre site que celui ToursFondettes agrocampus est interdite. JP Hallais 1 Sommaire 1 ère partie : Éléments de génétique moléculaire 7 1 – Le matériel génétique 1.1 – Les chromosomes 1.2 – L'acide Désoxyribonucléique 7 2 - Expression du matériel génétique 2.1 – Transcription de l'ADN en ARNm 2.2 – La traduction de l'ARNm en protéine 9 3 – La variabilité génétique 3.1 – Les mutations 3.2 – Le hasard de la méiose et de la fécondation 3.3 – Le crossing-over 10 2 ème Partie : Hérédité des caractères non quantitatifs 14 1 – Expression des caractères non quantitatifs 1.1 – La dominance 1.2 – La codominance 1.3 – Pénétrance incomplète d'un gène 1.4 – Expressivité variable 1.5 – La pléiotropie 1.6 – L'épistasie 1.7 – Expression des séries alléliques 1.8 – Gènes portés par le chromosome X, l'hérédité liée au sexe 14 2 – Transmission des caractères non quantitatifs : les lois de Mendel 2.1 – Monohybridisme 2.2 – Dihybridisme 18 3 – Gestion des anomalies génétiques dues aux mutations. 3.1 – Quelques exemples 3.2 - Leur gestion 20 4 – Structure génétique d'une population et son évolution 4.1 – Structure pour un locus à 2 allèles 4.2 – Evolution entre 2 générations 4.2.1– En équilibre de Hardy et Weinberg 4.2.2 - Effets de la sélection 21 JP Hallais 2 3ème partie : Hérédité des caractères quantitatifs 26 1 – Déterminisme génétique des caractères quantitatifs 1.1 – Des caractères mesurables 1.2 – Le milieu (E ou M) influence leur expression 1.3 – Leur déterminisme génétique 26 2 – Paramètres génétiques d'une population 2.1 – La variabilité génétique σ2A 2.2 – L'héritabilité des caractères 2.2.1– Notion d'héritabilité 2.2.2– Valeurs de h 2 et conséquences 2.3 – Les corrélations génétiques entre les caractères 31 4 ème partie : Sélection intra-race 36 1 – Notion de population 1.1 – Définition 1.2 – Caractéristiques générales 36 2 – Objectifs et critères de sélection 37 3 – Etude d'un exemple de programme de sélection 3.1 - Notion de base de sélection 3.2 - Le choix des méthodes de sélection 3.3 - Exemple : sélection des taureaux de races allaitantes 38 4 – Evaluation de la valeur génétique additive : les index 4.1 - Définition et caractéristiques générales 4.2 - Principe de l'indexation sur un seul caractère 4.2.1 – Démarche générale 4.2.2 - Le BLUP appliqué au modèle animal 4.2.3 – Les index SAM 4.2.4 – Le coefficient de détermination CD 4.3 – Intérêt des index combinés ou indices de sélection 41 5 – La réponse à la sélection : supériorité et progrès génétique 5.1 – Définitions 5.2 – Facteurs de variation du progrès génétique annuel 5.2.1 – La variabilité génétique 5.2.2 – L'intensité de la sélection (i) 5.2.3 – La précision de la sélection R (A, Â) 5.2.4 – L'intervalle de génération T 5.3 – Interactions entre les paramètres du progrès génétique annuel 48 6 – Limites de la sélection en race pure 55 JP Hallais 3 5 ème partie : Les croisements 57 1 – Objectifs des croisements 1.1 – Créer ou améliorer une population animale 1.2 – La complémentarité et l'hétérosis 1.2.1– La complémentarité entre les aptitudes des races 1.2.2– L'hétérosis 1.3 - Race pure et croisements sont complémentaires 57 2 - Principaux types de croisements 60 2.1 – Croisements à finalités génétiques ou continus 2.1.1 - Croisement de métissage 2.1.2 - Croisement d'amélioration 2.1.3 - Croisement d’absorption ou de substitution 2.1.4 - Croisement alternatif 2.2 - Croisements à finalités commerciales ou discontinus 2.2.1 - Croisement à un étage 2.2.2 - Croisement à deux étages 6 ème partie : Dispositif Génétique Français (DGF) 66 1 - Pilotage du DGF 2 - Les organismes généraux 3 - L'insémination animale 4 - La circulation de l'information du SIG Perspectives 68 Vocabulaire et abréviations 70 Formulaire 75 Principales sources documentaires JP Hallais 4 83 AVANT-PROPOS Enseignant le cours de génétique et sélection animale en BTSA PA depuis plus de 25 ans au lycée agricole de Tours-Fondettes, j'ai souhaité réaliser un manuel de formation destiné aux élèves et étudiants de l'enseignement agricole. Il est bâti sur mon cours de BTSA PA et l'ouvrage « JUSSIAU R, MONTMEAS L, PAPET A, Amélioration génétique des animaux d'élevage, bases scientifiques, sélection et croisements, educagri ed 2010, 322 p ». Mon objectif est d'apporter un outil complémentaire aux supports documentaires et pédagogiques déjà disponibles. Ce document n'est pas un cours d'auto-apprentissage, il propose aux élèves de Bac Professionnel et de Bac Technologique à dominante élevage une base élargie de cours, incluant des acquisitions fondamentales et des approfondissements. Par contre, les étudiants de BTSA PA devront dépasser les notions développées, en particulier avec des exercices nécessaires à leur appropriation. A cette fin, le formulaire peut leur être d'un réel secours. Les annales des sujets d'examen, accessibles sur le site www.chlorofil.fr situent les niveaux d'acquisition et d'utilisation des connaissances requis selon les diplômes. Les programmes de sélection spécifiques des différentes espèces ne sont pas présentés dans ce manuel. Ils demanderaient une mise à jour trop fréquente, en particulier depuis le développement des méthodes de sélection adaptées aux nouvelles connaissances du génome. Des documents et des interventions, proposées par les entreprises et organismes de sélection, permettent d'accéder à une connaissance actualisée de leurs programmes de sélection. Ce manuel est la production d'un seul rédacteur, quelques erreurs et fautes de frappe ont inévitablement échappé à ma vigilance. Merci de votre indulgence Bonne lecture JP Hallais Ce cours est destiné aux apprenants. En dehors de l'accord écrit de son auteur, toute diffusion ou publication par des organismes de formation, des formateurs, des particuliers ou des entreprises est interdite. De la même façon, toute parution en téléchargement ou en consultation sur tout autre site que celui ToursFondettes agrocampus est interdite. JP Hallais 5 BASES DE GENETIQUE ET DE SELECTION ANIMALE La génétique, science de l'hérédité étudie : 1 - la structure cellulaire de l'hérédité, le génome 2 – sa transmission entre les générations 3 – son expression dans les caractères d'un individu. Découvertes et sélection se sont développées en parallèle : 1 – Les travaux de Mendel (moine Autrichien 1822-1884) s'intéressent à la transmission des caractères, alors que les livres généalogiques et la création des races se développent, surtout en Angleterre. 2- Au début du XX ème siècle, les travaux de Mendel son vérifiés chez les animaux et la notion de chromosome est évoquée. En même temps, les syndicats de contrôle laitier (DK et F) se développent, ainsi que le contrôle de performances en porcs (DK). 3 – La deuxième moitié du XX ème siècle apporte des connaissances importantes : ADN, ARNm, code génétique, début du séquençage du génome, génie génétique … En élevage, l'insémination artificielle (IA), la sélection des caractères de production, l'indexation selon la méthode du BLUP sont à l'origine d'un progrès génétique rapide et accessible à tous les éleveurs. Des races spécialisées se développent, cependant d'autres races sont menacées d'extinction et bénéficient de programmes de sauvegarde. 4 – Le début du XXI ème siècle s'enrichit des connaissances de la génomique qui étudie la structure du génome (séquençage), son fonctionnement et son expression. Elle s'applique aux QTL utilisés dans la sélection assistée par marqueurs (SAM). La prochaine étape pourrait être la véritable sélection génomique, basée sur la lecture complète et globale du génome. JP Hallais 6 1 ère partie : Éléments de génétique moléculaire (rappels de biologie) 1 – Le matériel génétique 1.1 – Les chromosomes Ce sont les supports du matériel génétique, situés dans les noyaux des cellules eucaryotes. Dans les cellules ordinaires ou somatiques, ils sont présents par paires de chromosomes homologues, formant des cellule diploïdes. Ainsi, les cellules somatiques ont 2n chromosomes, n étant le nombre de paires. Leur nombre et leur taille sont caractéristiques de chaque espèce. Espèces Nombre de chromosomes Nombre de paires Humains 46 23 Chevaux 64 32 Bovins et Caprins 60 30 Ovins 54 27 Porcs 38 19 Poule 78 39 Chez les espèces sexuées, les chromosomes sont de deux types : 1 – les autosomes, chromosomes d'une paire, identiques par la taille et la forme, au nombre de 2n-2 2 – les hétérosomes ou chromosomes sexuels qui constituent une paire de chromosomes différents (X et Y), Y détermine le sexe mâle des mammifères et le sexe femelle chez les oiseaux. Les cellules sexuelles, produites lors de la méiose, ne possèdent qu'un seul exemplaire de chaque paire, ce sont des cellules haploïdes à n chromosomes. Puis, lors de la fécondation, les chromosomes se réunissent à nouveau par paires homologues pour former un individu à 2n chromosomes : Parents Méiose Mâle à 2n spermatozoïdes à n Femelle à 2n Ovule à n Fécondation + > cellules à 2n Quand la fécondation à lieu entre deux espèces, l'hybridation donne des descendants généralement stériles, par exemple le mulet (63 chromosomes), produit d'une jument fécondée par un âne. Le caryotype est le classement des chromosomes par paires d'après leur forme et leur taille (au stade métaphase, ils sont observables à l'état condensé et composés de 2 chromatides reliés par un centromère). Son observation permet d'identifier la présence d'anomalies : 1 – De nombre de chromosomes, par exemple la trisomie 21 chez les humains JP Hallais 7 -2 allèles identiques, l'individu est homozygote au locus -2 allèles différents, l'individu est hétérozygote au locus. Exemple du locus de cornage à deux allèles. Leurs arrangements possibles chez un individu forment 2 génotypes homozygotes P//P ou p//p et 1 seul génotype hétérozygote P//p (dans cette convention d'écriture des génotypes, la double barre // symbolise une paire de chromosomes, il est aussi admis de n'utiliser qu'une seule barre ou aucune). 2 - Expression du matériel génétique L'expression des gènes aboutit à la synthèse de protéines qui peuvent être de structure (protéines musculaires …) ou fonctionnelles (hormones, neurotransmetteurs …) chargées d'organiser l'activité des cellules ou des organes. On distingue deux étapes : -la transcription de l'ADN en ARNm -la traduction de l'ARNm en synthèse d'une protéine. 2.1 – Transcription de l'ADN en ARNm Le code génétique porté par un gène est « emprisonné » dans son noyau. Il nécessite la synthèse d'un messager chargé de transmettre son information génétique jusqu'aux organites du cytoplasme de la cellule animale, lieu de la synthèse protéique. La séquence nucléotidique du gène est ainsi transcrite en Acide Ribonucléique messager ARNm qui migre hors du noyau. Formé d'un seul brin, l'ARNm est complémentaire de la séquence du brin d'ADN correspondant à un gène. Ses bases complémentaires sont celles de l'ADN : C ---> G et G--->C mais T est remplacée par l'Uracile (U), d’où la transcription A ---> U et T ---> A Exemple : séquence d'ADN ARNm transcrit T A C C G A ... A U G G C U... Le principe de base est donc 1 gène transcrit en 1 ARNm, lui-même traduit en 1 protéine responsable de l'expression d'un caractère. En pratique, seulement 3 à 5% de l'ADN des chromosomes est transcrit en ARNm, on les appelle les exons. Mais lors de sa formation, l'ARNm subit des maturations complexes : 1 – Certaines parties de l'ADN sont lues spécifiquement selon les cellules ou les tissus (fonctionnements différents d'une cellule de peau et d'une cellule musculaire …) 2 – Des épissages (soudures de fragments d'ARNm après élimination de séquences nucléotidiques) modifient la séquence finale de l'ARNm et donc la protéine synthétisée. Ils sont contrôlés par des régulateurs moléculaires (micro-ARN, méthylations …) portés par le génome, mais aussi influencés par l'environnement. Par exemple, chez les bovins de race normande, un modification du régulateur de l'insertion des pigments rouges par le gène agouti produit des robes bringées plus ou moins foncées (bringée = poils noirs avec insertion de pigments rouges). On estime qu'environ 25 000 gènes chez les mammifères produisent 450 000 ARNm différents et 1 à 10 millions de protéines différentes selon les cellules. JP Hallais 9 2.2 – La traduction de l'ARNm en protéine C'est la synthèse des protéines par les ribosomes. Elle fait correspondre la lecture du code génétique, par séquences de 3 nucléotides (lecture par triplets), à l'insertion d'un acide aminé correspondant dans la chaîne protéique synthétisée. Exemple : triplets de séquences nucléotidiques synthèse d'un peptide à 2 acides aminés AUG / AGA / GUU / UGA Départ / Arginine / Valine / Stop Après traduction, la protéine peut encore subir des modifications qui multiplient ses variants synthétisés. Ainsi, la série de 15 allèles différents au locus de la caséine alpha s1 des caprins subit des épissages lors de la traduction, suivis de modifications post-traductionnelles produisant jusqu'à 24 formes moléculaires de la protéine synthétisée pour 1 allèle initial. 3 – La variabilité génétique Si tous les individus d'une même espèce ont en commun le même nombre de chromosomes, chacun est unique dans sa séquence d'ADN. Cette variabilité génétique a pour origine principale : les mutations, le hasard de la méiose et de la fécondation, ainsi que le crossing-over. 3.1 – Les mutations Naturelles et rares, ou provoquées (UV du soleil, toxines …), elles modifient un nucléotide ou un triplet, et par conséquent, la synthèse d'une protéine de fonction plus ou moins altérée (favorablement ou non). Plus de 95 % de l'ADN n'étant pas directement transcrit dans l'ARNm, les mutations affectent plus fréquemment les régions non codantes. Elles sont utilisées dans la sélection assistée par marqueurs (SAM) quand une mutation non codante peut être associée à la proximité immédiate d'un gène sur le même chromosome. On distingue les microsatellites qui sont des sites de répétitions plus ou moins nombreuses d'une séquence très courte de nucléotides, comme CA, répétées de 1 à 25 fois selon les génomes (CA, CA-CA, CA-CA-CA …). Leur utilisation permet le contrôle des filiations et la traçabilité des produits. Les reproducteurs largement utilisés ou de valeur commerciale élevée, les produits issus de transplantation embryonnaire … ont obligation de contrôle de filiation. Une identification génétique sur 10 à 25 microsatellites selon les espèces, permet d'identifier les individus avec un risque proche de zéro pour que deux d'entre-eux aient le même génotype. De même, une filiation est déclarée compatible si, à chacun des microsatellites, le génotype du produit peut être expliqué par la transmission de séquences issues des parents présumés. La précision est proche de 100%. Exemple : soit 5 microsatellites (tableau 1.1 ci-après) que nous appellerons A, B, C, D, E par simplification d'écriture, chacun pouvant présenter un polymorphisme élevé et stable dans la vie de l'animal. Ce polymorphisme est représenté par le nombre de répétitions du motif de base. Au microsatellite A le produit A1//A5 possède 1 motif de base sur l'un des chromosomes et 5 répétitions du motif de base sur le chromosome homologue. JP Hallais 10 Locus aux Microsatellites A B C D E Produit A1//A5 B3//B9 C2//C2 D3//D14 E8//E11 Mère supposée A2//A5 B3//B5 C2//C6 D4//D14 E2//E8 Père supposé A1//A6 B9//B9 C2//C5 Tableau 1.1 : Contrôle de filiation d'après 5 microsatellites D2//D11 E6//E8 Le filiation est compatible au microsatellite A, la mère pouvant avoir transmis A5 et le père A1, mais elle devient non compatible au microsatellite D, le produit n'ayant pu recevoir D3 de l'un de ses parents présumés. De plus la paternité est rejetée avec certitude, au microsatellite D le père n'ayant pas pu transmettre l'une de ses séquences à son produit. La compatibilité de la mère ne pourrait être validée qu'à l'examen d'un plus grand nombre de microsatellites. Plus nombreuses, donc avec une plus grande probabilité d'être voisines d'un gène d'intérêt, des mutations ponctuelles appelées SNP (Single Nucléotide Polymorphism) sont exploitées comme marqueurs dans la SAM. Soit un fragment d'ADN, présentant une mutation T/A, située à proximité d'un locus susceptible de porter 2 allèles d'intérêt zootechnique : A T C A [Gène d'intérêt n°1] Brins d'ADN A A C A [Gène d'intérêt n°2] mutation SNP La sélection d'un individu porteur de la mutation T aboutit, à la sélection indirecte du gène n°1 qui lui est associé, ils constituent un groupe de liaison (ou haplotype) sur le même chromosome. Il en est de-même entre la mutation A et le gène n°2. Ainsi l'intérêt génétique d'un reproducteur peut être indirectement évalué par le génotypage des SNP associés aux gènes influençant l'aptitude recherchée. 3.2 – Le hasard de la méiose et de la fécondation Le génome contenu dans un gamète est le fruit du hasard de la distribution de chacun des 2 chromosomes des n paires contenues dans les cellule souches. Ce hasard est doublé de celui de la rencontre d'un gamète mâle et d'un gamète femelle lors de la fécondation. 3.3 – Le crossing-over (figure 1.2) Lors de la méiose, de nombreux échanges de brins de chromatine entre les chromosomes d'une même paire se produisent, c'est le crossing-over. JP Hallais 11 2 chromosomes d'une même paire échange réciproque d'un fragment entre les 2 chromosomes Figure 1.2 : crossing-over Ces échanges entraînent une forte augmentation de la variabilité des assemblages de gènes transmis par un chromosome. A l'opposé, quand lors de la méiose, une portion entière d'un chromosome est conservée sans crossing-over, on parle de linkage ou d'un groupe de liaison entre gènes. Exemple (figure 1.3) pour 3 locus A, B, C, chacun à 2 allèles A1, A2 ; B1, B2 ; C1, C2 situés sur la même paire de chromosomes : A1B1- -A2 -B2 Cellule souche en méiose Point de jonction et d'échange entre 2 chromsomes d'une même paire lors d'un crossing-over C1- -C2 A1B1- -A2 -B2 A1B1- -A2 -B2 + C2- -C1 C2- Crossing-over avec C -C1 Types de gamètes obtenus Figure 1.3 : Conséquences du linkage et du crossing-over : groupes de liaison et recombinaisons JP Hallais 12 Dans les deux types gamètes obtenus, les arrangements entre les gènes portés par un même chromosome montrent : -le maintien des combinaisons parentales A1 + B1 et A2 + B2 du au linkage entre les locus A et B -de nouvelles combinaisons C2 + (A1 et B1) ainsi que C1 + (A2 et B2), dues au crossing-over avec C Ces phénomènes trouvent deux applications liées au : 1 – Crossing-over, avec l'établissement de cartes génétiques. Plus 2 gènes sont éloignés sur un même chromosome, plus la probabilité de crossing-over augmente, et inversement. On peut ainsi représenter l'ordre d'arrangement des locus par l'étude de leurs distances (en centimorgans),. 2 – Linkage, avec la SAM qui sélectionne indirectement un gène d'intérêt mais de séquence inconnue (cf : 3.1). Les puces à ADN sont capables d'identifier spécifiquement un très grand nombre de SNP d'après leurs mutations (génotypage). Il devient alors possible de calculer l'index SAM des candidats à la sélection, après évaluation de l'effet zootechnique (sur les performances des animaux) des gènes associés aux SNP. Toutes ces sources de variabilité génétique et donc de combinaisons génétiques originales, font que la reproduction des espèces sexuées est une véritable procréation. Chaque individu, à l'exception des clones, peut être considéré comme étant unique dans son génome. A l'opposé, la reproduction aboutissant à des copies identiques à l'original, ne concerne que les espèces asexuées comme les bactéries. Les 2 bactéries filles sont identiques à leur mère qui s'est reproduite par division. JP Hallais 13 2 ème Partie : Hérédité des caractères non quantitatifs Elle étudie l'expression et la transmission des gènes codant pour les caractères dits Mendéliens ou qualitatifs. Leurs caractéristiques sont : 1 – Un déterminisme génétique contrôlé par un ou quelques locus occupés chacun par de petites séries alléliques, souvent à 2 allèles. 2 – L'effet de chacun des gènes est important dans l'expression des caractères. On parle de gènes à effet majeur. Ainsi, le génotype (assemblage des gènes chez l'individu) peut être facilement identifié à partir de l'observation du phénotype. Par exemple, un bouc avec cornes [p] est de génotype p//p. 3 – La distribution des phénotypes est caractéristique des variables qualitatives, prenant des modalités bien distinctes, présence ou absence de cornes, couleurs de la robe des animaux... 4 – Le milieu n'influence généralement pas l'intensité d'expression des gènes dans le phénotype. 1 – Expression des caractères non quantitatifs Les mécanismes intervenant dans l'expression du matériel génétique, étudiés dans la première partie, sont à l'origine d'une diversité des modes d'expression des gènes. 1.1 – La dominance Un gène dominant masque l'expression d'un allèle récessif. Par convention d'écriture, le gène dominant est écrit en majuscule et le gène récessif en minuscule. Pour un locus à 2 allèles A et a nous obtenons : 3 génotypes possibles A//A A//a 2 phénotypes [A] a//a [a] La dominance s'observe chez l'hétérozygote, dont le phénotype correspond à l'expression du gène dominant. Exemples de caractères commandés par des gènes dominants ou récessifs d'intérêt zootechnique : En porcs, le gène s de sensibilité à l'halothane et au stress est indésirable à l'état homozygote chez les porcs charcutiers. De même, le gène RN- s'accompagne d'une diminution du rendement de la transformation des viandes lors de la cuisson, accompagnée d'une chute excessive de l'acidité de la viande... JP Hallais 14 En bovins, afin de ne plus avoir à les écorner, dans le respect du bien-être animal, la sélection du gène P absence de cornes est engagée dans plusieurs races. En race charolaise, le gène C responsable de la dilution des couleurs observée dans les croisements est spécifique à cette race. Il permet de garantir l'origine de la viande de race charolaise.... Chez les poules, les gène de couleur de la peau, W blanche ou w jaune, permettent d'adapter la présentation des poulets de chair aux attentes traditionnelles des marchés régionaux. Le gène NA, cou-nu, produit des volailles plus tolérantes aux températures caniculaires. Des gènes de coloration du duvet et des plumes, portés sur l'hétérochromosome X permettent d'autosexer les poussins dès la naissance... Remarque : quand le gène récessif a est responsable d'une anomalie (A est son allèle dominant), sa présence est entretenue dans une population. En effet, une partie des individus [A] est hétérozygote A//a et ils transmettent le gène a dans 50% de leurs gamètes. Un génotypage avec une sonde à ADN permet d'identifier sa présence et ainsi d'éradiquer l'anomalie. Cette technologie est fréquemment appliquée, comme dans la lutte contre le gène responsable du « Complex Vertébral Malformation (CVM) » chez les bovins prim'holsteins. 1.2 – La codominance C'est l'expression conjointe de deux allèles différents chez les hétérozygotes. Le phénotype est alors la juxtaposition des effets des deux allèles. Exemple : le locus de la kapa caséine du lait des bovins accueille 2 allèles A et B. Ce dernier est favorable au rendement fromager et à la tenue du caillé. Il est plus fréquent en race Normande. L'analyse du lait et les génotypages produisent alors : 3 génotypes 3 phénotypes A//A [A] A//B [A et B] B//B [B] On détecte les deux variants de caséine A et B dans le lait des vaches hétérozygotes A//B. 1.3 – Pénétrance incomplète d'un gène Elle se mesure par le pourcentage réel d'individus exprimant le caractère attendu pour un génotype donné. C'est donc sa fréquence d'expression parmi les individus ayant ce génotype. Par exemple, le caractère culard des bovins, du à l'allèle mh (hypertrophie musculaire), a une pénétrance de 0,9. En moyenne, 90% des mh//mh sont [mh], les 10 % restants sont normaux. Le gène s de sensibilité à l'halothane des porcs a une pénétrance proche de 0,8. 1.4 – Expressivité variable Elle se mesure par une variation de l'intensité d'expression d'un caractère selon les individus. Les bovins de type culard expriment le caractère de manière plus ou moins marquée. On note son intensité selon une échelle de 1 à 20 points. Certaines caractéristiques ne s'expriment que JP Hallais 15 pendant une période de leur vie comme l'hypertrophie de la langue que se résorbe généralement quelques semaines après la naissance. 1.5 – La pléiotropie C'est le résultat de l'action d'un gène sur plusieurs caractères à la fois et qui n'ont pas de lien fonctionnel entre-eux. Chez les caprins, le gène P absence de cornes à l'état homozygote, produit des femelles sans cornes (motte) mais stériles. Ainsi, on ne sélectionne que des boucs cornus p//p afin de ne pas obtenir de chevrettes P//P stériles. Les femelles P//p , bien que mottes restent fertiles. Le gène mh affecte la fertilité et les autres aptitudes maternelles des vaches culardes, mais il améliore la tendreté des viandes. 1.6 – L'épistasie C'est l'interaction entre 2 locus différents qui agissent sur un même carctère. Un gène épistatique masque l'expression d'un gène non allèle. Les gènes de contrôle du dépôt des pigments du plumage ou des poils sont soumis à l'effet épistatique de gènes non allèles inhibiteurs de leur activité. On produit ainsi des poulets de chair standards à plumage blanc à partir de poules rousses (leur coloration permet de les autosexer à la naissance) accouplées avec des coqs porteurs du gène autosomal d'inhibition à l'état homozygote. 1.7 – Expression des séries alléliques Un locus peut être occupé par plusieurs gènes, cependant, chez un individu, on ne trouve que deux allèles à la fois, un sur chaque chromosome. Parmi les 15 allèles au locus caséine alpha s1 des caprins, 7 sont exploités en sélection. Ils font varier le taux protéique du lait : allèles A,B,C à fort taux protéique allèle E à taux intermédiaire allèles D,F,0 à faible taux Le génotypage des boucs diffusés en insémination artificielle permet de distinguer les C++ porteurs de 2 allèles favorables des C+ porteurs d'1 allèle favorable. Ainsi, une chevrette issue d'un bouc C++ recevra au moins 1 allèle favorable au taux protéique et à l'aptitude fromagère de son lait. Chez les ovins, la sensibilité à la tremblante, maladie à prion dégénérative du cerveau et fatale, dépend de leur génotype (les lettres désignent les différents acides aminés de la protéine prion issus de mutations génétiques). En plus de gènes aux effets intermédiaires, on note les allèles : ARR = grande résistance VRQ = grande sensibilté JP Hallais 16 Le génotypage des béliers et la sélection des ARR//ARR ont permis une quasi éradication de la tremblante avec la production d'agnelles porteuses d'au moins 1 allèle ARR qui les protège de la maladie (sauf avec le génotype ARR//VRQ). 1.8 – Gènes portés par le chromosome X, l'hérédité liée au sexe Les gènes liés au sexe sont localisés sur X, alors que leur locus n'est pas présent sur Y ( contrairement aux caractères influencés dans leur expression par le sexe, comme la lactation, qui sont contrôlés par des gènes autosomaux). Chez les volailles, les femelles sont hétérogamètiques XY. Exemple 1 : les gènes d'autosexage chez les volailles On peut sexer les volailles d'après : - leur dimorphisme sexuel, l'aspect du coq diffère de celui de la poule, mais tardivement - l'examen du cloaque des poussins - des gènes d'autosexage, dont chez la poule – la vitesse d'emplumement (K = emplumement lent et k = rapide) – la barrure du plumage noir (B = barré et b = noir uniforme) – la dorure du plumage (S = duvet jaune puis plumage argenté et s = duvet roux puis plumage doré) Le schéma de production de poulettes destinées à la ponte et autosexées d'après le gène de dorure du plumage est le suivant (figure 2.1) : mâle doré Xs Xs x femelle argentée XS Y- Xs XS mâles [S] duvet jaune à 100% Xs Y- femelles [s] duvet roux à 100% Figure 2.1 Schéma d'autosexage des poussins au locus de dorure du plumage Exemple 2 : gène de nanisme chez la poule Au locus à deux allèles, DW = taille normale et dw = nain (dwarf), l'utilisation de poules naines [dw] permet de réduire le coût de production de poussins de taille normale [DW] en souche chair (figure 2.2 page suivante). Plus petites, elles ont des besoins alimentaires d'entretien réduits et elles produisent des œufs normaux. JP Hallais 17 Poules naines Xdw Y- x coqs normaux XDW XDW Xdw XDW mâles [DW] normaux Y- XDW femelles [DW] normales Figure 2.2 : Utilisation du gène de nanisme dw en production de poulets de chair 2 – Transmission des caractères non quantitatifs : les lois de Mendel 2.1 – Monohybridisme Il décrit la transmission d'un caractère commandé par un locus à 2 allèles, en partant de 2 parents homozygotes. 1ère loi : Homogénéité des hybrides de première génération : 100% des F1 sont de même génotype et de même phénotype.(figure 2.3) 2ème loi : Disjonction ou ségrégation des caractères parentaux : la F2 est hétérogène. (figure 2.4) Exemple du locus couleur de la robe des bovins à deux allèles N = noir et r = rouge génotypes gamètes Vache pie-noir [N] N//N x Taureau pie-rouge [r] r//r N (1) F1 -génotypes -phénotypes r (1) N//r (1) [N] (1) Loi n°1 100% des F1 sont pie-noir Figure 2.3 : Vérification de la première loi de Mendel JP Hallais 18 F1 gamètes F2 x F1 N (½) ou r (½) N (½) ou r (½) -génotypes N//N (¼) -phénotypes N//r r//r (½) (¼) [N] (¾) LOI n°2 la F2 est hétérogène [r] (¼) Figure 2.4 : Vérification de la deuxième loi de Mendel 2.2 – Dihybridisme Il étudie la transmission de deux caractères n°1 et n°2, commandés chacun par un seul locus, mais situés sur deux paires de chromosomes différentes (la 1ère loi de Mendel reste vérifiée). 3ème loi : Ségrégation indépendante des caractères chez la F2, les distributions des caractères n°1 et n°2 sont indépendantes.(figure 2.5) Exemple chez lez bovins : -caractère n°1 couleur de la robe à 2 allèles N et r -caractère n°2 coloration de la tête, avec 2 allèles H = tête blanche et c = tête colorée. Montbéliard tête blanche, robe rouge [H,r] F1 F2 x Prim'holstein tête colorée robe pie-noir [c,N] 100% [H,N] (tête blanche et robe pie-noir) la loi 1 est vérifiée. Elle résulte de l'accouplement des F1 entre-eux. La distribution des phénotypes suit le développement de (3+1)2 (l'exposant correspond au nombre de caractères indépendants étudiés), soit 9-3-3-1 ce qui donne en fréquences 9/16, 3/16, 3/16, 1/16. Ces fréquences sont celles des phénotypes, en partant du double dominant vers le double récessif. [H , N] 9/16 Tête blanche, robe pie-noir [H , r] 3/16 Tête blanche, robe pie-rouge [c , N] 3/16 Tête colorée, robe pie-noir [c , r] 1/16 Tête colorée, robe pie-rouge Figure 2.5 : Application de la troisième loi de Mendel JP Hallais 19 La 3ème loi est vérifiée, la distribution de la coloration de la tête et de la couleur de la robe se font indépendamment l'une de l'autre. 3 – Gestion des anomalies génétiques dues aux mutations. Une anomalie génique est une déviation par rapport au gène normal. Elles peuventêtre indésirables quand elles causent une baisse des performances ou la létalité (mort), mais certaines présentent des effets favorables, amélioration de la conformation bouchère, résistance à la chaleur des volailles... 3.1 – Quelques exemples -La race Prim'holstein a subit l'effet défavorable de mutations du -gène BLAD, déficience immunitaire et mort en phase d'élevage -gène Bulldog, déformation osseuse et mort très précoce -gène CVM, malformation osseuse létale -La race Charolaise subit encore l'effet d'un gène récessif à pénétrance incomplète, responsable de la flexion permanente des membres et du palais fendu ce qui les rend non viables (syndrome d'arthrogrypose et palatoschisis). -En porcs, le gène RN-, introduit avec la race Hampshire, affecte le rendement technologique lors de la cuisson de la viande et produit des viandes acides. 3.2- Leur gestion La gestion des anomalies s'appuie sur deux types d'actions, informer et limiter leurs fréquences. 1-En cas d'observation d'une anomalie indésirable, l'éleveur doit informer l'organisme de sélection des reproducteurs, inséminateur, sélectionneur de cochettes… Ainsi, en race Montbéliarde, l'anomalie SHGC, appelée « tête de chevreuil » donnant des veaux à squelette très fin, un faible poids, mais viables a-t-elle été identifiée grâce à son signalement. 2-Retirer de la reproduction tout animal ayant une anomalie, ainsi que ses ascendants. 3-Si une anomalie est confirmée, il peut-être procédé à son génotypage -direct avec une sonde à ADN (gènes BLAD, CVM ...) -indirect à l'aide de marqueurs, microsatellites ou SNP, associés au gène indésirable (SHGC) 4-Eviter la consanguinité, c'est à dire des accouplements entre des ascendants apparentés sur 2 à 3 générations. Sinon, une anomalie récessive issue d'un ancêtre commun, risque d'être portée à l'état hétérozygote mais non exprimée par les 2 parents. Elle aura alors 1 chance sur 4 d’apparaître à l'état homozygote chez le produit, lequel exprimera l'anomalie. 5-Equilibrer la descendance des mâles d'insémination artificielle pour éviter de diffuser une anomalie, comme cela s'est produit en Prim'holstein, mais aussi afin de préserver une variabilité génétique suffisante dans la population. JP Hallais 20 6-Une anomalie peut présenter à la fois des avantages et des inconvénients. C'est le cas le la sensibilité à l'halothane des porcs. Elle est due à un gène autosomal récessif à pénétrance incomplète avec des effets pléiotropes noté s (N étant l'allèle normal) : -à l'état homozygote, les animaux sont sensibles au stress, avec davantage de mortalité et leur viande est de mauvaise qualité, dite PSE (Pale-Soft-Exudative) -à l'état hétérozygote, les défauts de s sont masqués par son allèle dominant, mais il conserve un effet favorable pour le taux de muscle. Il est exploité dans les schémas de production de porcs charcutiers croisés (figure 2.6). La race Piétrain est porteuse de ce gène avec une forte fréquence, la race Large-white est considérée indemne et il a été éradiqué en Landrace français. On peut citer aussi les gènes de nanisme dw ou encore cou-nu NA en volailles. Ce dernier procure une meilleure résistance à la chaleur. En ovins, le gène Booroola, découvert en mérinos d'Australie améliore la prolificité etc … Large-white N//N x Landrace Français N//N Cochettes F1 N//N x verrats Pietrain forte fréquence de s porcs charcutiers N//N ou N//s 100% [N] normaux et bénéficiant d'une augmentation du taux de muscle apportée par s chez les hétérozygotes. Figure 2.6 : Gestion du gène de sensibilité à l'halotane dans la production de porcs charcutiers croisés 4 – Structure génétique d'une population et son évolution (étudié en BTSA PA) 4.1 – Structure pour un locus à 2 allèles L'étude des populations s'intéresse à la distribution des gènes et des génotypes, c'est à dire à leurs fréquences (un exemple chiffré avec p (A) = 0,7 et q (a) = 0,3 servira d'illustration au paragraphe 4) : 1 - Les fréquences géniques pour un locus à 2 allèles A dominant et a récessif, sont notées par des variables p (A) et q (a) avec p + q = 100% ou 1. JP Hallais 21 2 – Dans une population, les fréquences génotypiques et phénotypiques résultent du hasard des fécondations (tableau 1.1) Gamètes mâles p (A) q (a) p (A) p2 (A//A) pq (A//a) q (a) pq (A//a) q2 (a//a) Gamète femelles Génotypes et fréquences Tableau 1.1 : Echiquier de la transmission des gamètes lors de la fécondation Les fréquences obtenues au tableau 1.1 sont regroupées dans le tableau 1.2 : Structure génotypique Génotypes Structure phénotypique Phénotypes Fréquences génotypiques Fréquences phénotypiques A//A A//a 2 p 2pq a//a 2 q [A] [a] p + 2pq q2 2 Somme 1 ou 100% 1 ou 100% Tableau 1.2 : Structure génotypique et phénotypique d'une population pour un locus à 2 allèles de fréquences p (A) et q (a) L'application à l'exemple chiffré, p (A) = 0,7 et q (a) = 0,3 donne les fréquences -génotypiques : (A//A) = 0,72 = 0,49 (A//a) = 2 x 0,7 x 0,3 =0,42 (a//a) = 0,32 = 0,09 -phénotypiques : [A] = 0,49 + 0,42 = 0,91 et [a] = 0,09 NB : Quand les fréquences géniques ne sont pas connues, il est possible de les retrouver à partir : -De la fréquence du phénotype récessif [a] dont la fréquence génotypique est q 2 (a//a). La fréquence génique de a est : q = √q2 . Si q2 (a//a) = 0,09 alors q (a) = √0,09 = 0,3 (Si les allèles sont codominants, les fréquences phénotypiques reprennent celles des génotypes correspondants) -De la connaissance du génotype des individus de la population, par exemple le nombre d'individus selon les génotypes est (A//A) =12 ; (A//a) = 15 ; (a//a) = 3 JP Hallais 22 (total = 30 animaux). La fréquence d'un gène est la proportion de ce gène parmi tous les gènes au locus dans la population, soit pour A = nombre d'exemplaires de A / nombre de gènes totaux, d'où p (A) = [(2 x12) + (1 x15) + (0 x3)] / [2x30] = 39 /60 = 0,65 q (a) = 1 – p = 0,35 4.2 – Evolution entre 2 générations 4.2.1 – En équilibre de Hardy et Weinberg Dans une population de grande taille, en panmixie, sans mutations, migrations ni sélection, les fréquences géniques et génotypiques ne changent pas de générations en générations. Panmixie = accouplements au hasard pour le locus considéré (en pratique, l'existence du locus est ignorée lors des accouplements raisonnés) Migration = passage d'individus d'une population à une autre (en pratique, ce sont les croisements) Sélection = gamète favorisé (sélection pour) ou défavorisé (sélection contre) lors de la procréation de la génération suivante, soit par la sélection opérée par l'éleveur, soit par sélection naturelle. Dans ces conditions, les structures : -géniques pour un locus à 2 allèles de fréquences p (A) et q (a) -génotypiques p2 (A//A) ; 2pq (A//a) ; q2 (a//a) dont la somme des fréquences p2 + 2pq + q2 = 1 ne changent pas de générations en générations. Cette situation, bien qu'elle soit théorique et en opposition au principe de l'évolution des espèces, permet de décrire la structure d'une population pour un locus répondant aux conditions d'équilibre : race pure et pour un caractère non sélectionné. (paragraphe 4.1 ci-dessus, avec q (a) = √q2 ) 4.2.2 - Effets de la sélection Il y a sélection, quand les individus d'un génotype subissent une diminution de leur contribution à la procréation de la génération suivante. Elle peut être naturelle, due à un gène qui diminue la fertilité ou la viabilité (gène létal). Elle est aussi due aux choix des éleveurs qui retirent de la reproduction des individus non sélectionnés ou présentant des anomalies indésirables. Le chiffrage de son impact dans une population peut être abordé selon 2 situations : JP Hallais 23 Situation 1, la sélection concerne l'ensemble de la population quand un gène défavorable provoque une baisse de la fertilité ou de viabilité dans la population, par exemple si le gène (a) de fréquence q = 0,3 est létal. A la génération initiale n, on aura la population (tableau 1.3) : Génotypes A//A A//a 2 a//a 2 Fréquences à la fécondation p = 0,49 2pq = 0,42 q = 0,09 Contribution à la génération n+1 100% des A//A ou 1 100% des A//a ou 1 0 % car les individus [a] ne sont pas viables 0,49 / (0,49 + 0,42) = 0,538 0,42 / (0,49 + 0,42) = 0,462 0 Fréquences après sélection contre a//a Tableau 1.3 : Structure génotypique d'une population après sélection contre [a] Les gamètes produits par les reproducteurs viables de la génération n seront de fréquences : -p'(A) = (0,538 x 100% des gamètes de A//A) + (0,462 x 50 % des gamètes de A//a) = 0,769 -q'(a) = 1 – p' = 0,231 L'échiquier des fécondations entre les gamètes de la génération n permet de prévoir la génération n+1 de structure génotypique (tableau 1.4) : 0,591 (A//A) + 0,356 (A//a) + 0,053 (a//a) L'effet de la sélection aura donc été de -réduire la fréquence génique de l'anomalie : Δq = q' – q = 0,231 – 0,3 = - 0,069 -réduire la fréquence des homozygotes a//a = 0,053 – 0,09 = - 0,037 Gamètes mâles p' (A) 0,769 q' (a) 0,231 p' (A) 0,769 p'2 (A//A) 0,7692 = 0,591 p'q' (A//a) 0,769 x 0,231 = 0,178 q' (a) 0,231 p'q' (A//a) 0,769 x 0,231 = 0,178 q'2 (a//a) 0,2312 = 0,053 Gamète femelles Tableau 1.4 : Procréation de la génération n+1 JP Hallais 24 Situation 2, la sélection concerne un échantillon de la population : Par décision de sélection, certains génotypes seront moins ou pas du tout utilisés. Si parmi 30 mâles génotypés 12 (A//A) + 15 (A//a) + 3 (a//a) l'éleveur décide de retirer de la sélection les a//a, les gamètes des 27 individus conservés transmettront leurs gènes selon les fréquences suivantes : -p''(A) = [(12 x 100% des gamètes de A//A) + (15 x 50 % des gamètes de A//a)] / 27 = 0,722 -q'' (a)= 1 – 0,722 = 0,278 La génération suivante est obtenue en construisant l'échiquier des fécondations (tableau 1.5). On suppose que les fréquences géniques des femelles sont représentatives de la population étudiée en situation n°1. La structure génotypique de leur descendance est alors : -génotypes A//A A//a a//a -fréquences 0,555 0,381 0,064 Il suffit ensuite de calculer les fréquences géniques à la génération n + 1 : -p'''(A) = (0,555 x 100% des gamètes de A//A) + (0,381 x 50 % des gamètes de A//a) = 0,746 -q'''(a) = 1 – p' = 0,254 Gamètes mâles p'' (A) 0,722 q' (a) 0,278 p' (A) 0,769 (A//A) 0,722 x0 ,769 =0,555 (A//a) 0,769 x 0,278=0,214 q' (a) 0,231 (A//a) (a//a) 0,231 x 0,722 = 0,167 0,278 x 0,231 = 0,064 Gamète femelles Tableau 1.5:Procréation de la génération n+1 Puisqu'à chaque génération, l'efficacité de la sélection est fonction de la fréquence génique initiale, son impact est maximal pour une population présentant une forte proportion d'hétérozygotes, c'est à dire de fréquences géniques p et q équilibrées, proches de 0,5. Cette observation se retrouve dans la sélection des caractères quantitatifs dont l'efficacité repose sur une variabilité génétique σA suffisante de la population (4ème partie). Par contre l'efficacité de la sélection tend à se réduire quand la fréquence d'un gène est élevée ou à l'opposé très faible. Il est donc difficile de fixer un gène ou de l'éliminer complètement d'une population sans procéder au génotypage des animaux. JP Hallais 25 3ème partie : Hérédité des caractères quantitatifs 1 – Déterminisme génétique des caractères quantitatifs Les bases de la génétique des caractères non quantitatifs restent vérifiées dans l'expression et la transmission de caractères quantitatifs, cependant des spécificités viennent les compléter. Les caractères quantitatifs sont : -mesurables -leur déterminisme génétique réunit les effets des gènes majeurs, des QTL et des polygènes -leur expression est influencée par le milieu d'élevage. Ces caractères sont les productions : les quantités (lait, croissance, ponte …) mais aussi la qualité des productions (composition des produits, indice de qualité de la viande de porc …). Cette 3 ème partie fera référence aux résultats d'une série de 30 veaux mâles, pour lesquels nous disposons (tableau 3.1): -des poids à 210 j (P210) exprimés en écarts à la moyenne nationale de leur race (écarts phénotypiques ΔP) -des index génétiques, calculés à partir de leurs propres performances (en contrôle individuel), et exprimés en écarts à la moyenne raciale ( écarts génétiques ΔA). NB : Les valeurs ont été arrondies en unités entières pour en faciliter l'utilisation. Numéros 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 ΔP 33 30 24 22 21 19 18 15 13 13 12 11 10 10 9 8 7 ΔA 9 3 8 6 -3 2 4 -4 -2 1 2 -1 -5 1 -6 3 -4 Numéros 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 ΔP 6 5 4 3 2 1 -1 -2 -5 -8 -9 -13 -15 ΔA -5 0 -3 -5 -4 1 -9 -9 -1 -11 -7 -16 -11 Moyennes Ecarts types 8,1 11,87 -2,2 5,79 Tableau 3.1 : Poids à 210 j (ΔP) et index (ΔA) d'une série de 30 veaux, exprimés en écarts à la moyenne. 1.1 – Des caractères mesurables (formulaire n°1) Un caractère quantitatif est mesurable, c'est une performance appelée valeur phénotypique Pi d'un individu n°i. JP Hallais 26 La distribution des valeurs prises par une variable quantitative suit une courbe de Gauss (figure 3.1). La classe des + 10 kg est la plus importante avec 6 animaux, alors que les valeurs extrêmes sont globalement moins fréquentes. Figure 3.1 : Poids à 210 j moy = 8,1 kg écart-type = 11,87 kg 7 6 Effectifs 5 4 3 2 1 0 -18 -14 -10 -6 -2 2 6 10 14 18 22 26 30 34 Valeurs centrales des classes de poids (kg) Deux indicateurs statistiques permettent de décrire et résumer cette courbe : -la moyenne P = 8,1 kg c'est le paramètre de position centrale -l'écart-type σP = 11,87 kg c'est le paramètre de dispersion des valeurs autour de la moyenne. On peut regrouper leur écriture : poids moyen = 8,1 ± 11,87 kg La distribution des performances d'une population ne respecte pas toujours les caractéristiques d'une courbe de Gauss. Une correction mathématique est alors appliquée avant le calcul des index génétiques qui nécessite une distribution dite normale. Chez les chevaux de sport, on utilise le logarithme des gains ou des points. En effet, leur attribution lors des compétitions suit une distribution déséquilibrée : la plupart des chevaux recueillent de faibles gains ou points alors qu'une petite élite engrange l'essentiel des dotations. Cette correction mathématique conserve la hiérarchie entre les chevaux lors du classement obtenu par les indices annuels et génétiques, et elle produit une distribution des données compatible avec le calcul du BLUP. 1.2 – Le milieu (E ou M) influence leur expression Les effets du milieu regroupent les actions, favorables ou défavorables de l'alimentation, de la conduite sanitaire …. Ainsi, un même individu réalise une production plus ou moins importante selon ses conditions d'élevage. Les effets du milieu ont trois conséquences en sélection : 1 – Ils ne permettent pas de superposer le niveau des performances et la valeur génétique des individus. Dans l'exemple, le veau n°5 réalisant une performance élevée à 210 j (+21 kg) ne se JP Hallais 27 classe en réalité qu'en 16 ème position pour son index (valeur génétique -3 kg). 2 – Ils augmentent l'hétérogénéité des performances. Ainsi, les index des 30 veaux sont moins variables (écart-type σ = 5,79 kg) que les poids constatés (σP = 11,87kg) (figure 3.2). Figure 3.2 : INDEX (Â) des poids à 210 j (kg) moy(Â) = -2,2 kg σ = 5,79 kg 10 Effectifs 8 6 4 2 0 -15 -11 -7 -3 1 5 9 Valeurs centrales des classes d'index 3 – Le milieu commun à un groupe d'animaux peut soit les favoriser, soit les défavoriser par rapport à la moyenne de la race. Dans l'exemple, la moyenne du P 210j des 30 animaux élevés dans le même troupeau (+ 8,1 kg) , est très supérieure à celle de leur valeur génétique estimée par leurs index (-2,2 kg). On peut conclure que leurs conditions d'élevage ont eut un effet globalement plus favorable à l'expression de leurs aptitudes génétiques que celles de la moyenne raciale. Cet écart entre les moyennes -2,2 et +8,1 kg s'appelle un biais du aux conditions de milieu. Afin de minimiser les biais dans les calculs d'index, on peut soit : -Regrouper les candidats à la sélection (ou leurs apparentés) dans une même station de contrôle de performances, c'est le cas du contrôle de la descendance pour les aptitudes bouchères des bovins et des ovins. Les conditions de contrôle sont alors plus homogènes que dans la diversité de leurs fermes d'origine. La sélection est alors plus précise. -Estimer l'effet des conditions d'élevage sur les performances des groupes d'animaux élevés dans les mêmes conditions, par exemple le numéro de mise bas pour les aptitudes maternelles, le sexe pour la croissance ou encore l'effet troupeau. On évalue ce dernier en réalisant des connexions génétiques entre les élevages. L'insémination artificielle, en diffusant des reproducteurs communs dans un grand nombre d'élevages, est le principal moyen de connexion entre troupeaux. 1.3 – Leur déterminisme génétique Trois catégories de gènes, différenciés par l'importance de leurs effets individuels, contrôlent les caractère quantitatifs. JP Hallais 28 1 – Les gènes majeurs ont un effet individuel important. Il est alors possible d'établir un lien direct entre les performances et les génotypes des individus. En pratique, comme dans l'étude des caractères non quantitatifs, on peut distinguer des sous-groupes dans une population selon la présence ou l'absence du gène majeur. Exemple : le gène Booroola (F) a un effet additif (additif = qui se cumule aux effets de tous les autres gènes contrôlant le même caractère) par rapport à son allèle (noté +), d'environ + 0,75 agneau par mise bas. La distribution de la prolificité selon le génotype au locus Booroola pour une population est schématisée ci-après (figure 3.3). Porteurs d'un exemplaire du gène F les +//F ont une supériorité moyenne de 0,75 agneau né par rapport aux +//+ et les homozygotes F//F ont une supériorité de 0,75 + 0,75 = 1,5 agneau. prolificité génotypes : 1,4 +//+ 2,15 +//F 2,9 F//F Figure 3.3 : Effet du gène majeur Booroola sur la prolificité dans une race NB : à chaque génotype, l'hétérogénéité de la prolificité est due à l'action des autres gènes cumulée à celle du milieu. 2 – Les gènes portés aux QTL (Quantitative Trait Locus) occupent des locus contrôlant une part importante de la variabilité des caractères quantitatifs. Si leur effet individuel reste assez important dans la variabilité des performances, il n'est pas suffisant pour associer directement performances et génotypes des QTL. Leur détection est permise par le génotypage des candidats à la sélection aux marqueurs associés (les SNP) et leurs effets génétiques sont intégrés dans les index SAM (indexation des bovins laitiers depuis 2010). Cette avancée technologique a doublé le niveau de précision des index calculés dès la naissance des veaux. Ainsi la sélection des taureaux utilisés en insémination artificielle peut être plus précoce. Elle se réalise sans testage, avant même que les animaux atteignent l'âge physiologique de mise en reproduction, ce qui réduit l'intervalle de génération. De plus, elle apporte un gain significatif de précision dans la sélection de caractères peu héritables, comme la fertilité femelle. 3 – Les polygènes ont chacun un effet très faible sur la variabilité des performances, mais globalement, du fait de leur grand nombre, leur impact est important dans la valeur génétique des individus. Leur effet global est calculé par une méthode d'estimation (le BLUP) qui produit les index. Elle s'appuie sur le modèle polygénique qui distingue dans une performance : -l'effet du milieu (§1.2) -l'effet génétique, appelé valeur génotypique (notée G), due à l'assemblage des gènes JP Hallais 29 de l'individu. Elle se décompose elle-même en 2 types d'effets génétiques : -Effets additifs, ou effets spécifiques à chaque gène, qui se transmettent avec lui de générations en générations. Chez un individu, leur cumul pour un caractère s'appelle valeur génétique additive, notée A. En moyenne, lors de la méiose, chaque gamète transmet la moitié de la valeur génétique additive du géniteur. Ainsi en moyenne, un descendant reçoit la moitié de la valeur génétique additive de chacun de ses parents : A individu = ½ A père + ½ A mère. -Effets non additifs ou d'interaction entre les gènes, notés I. C'est l'ensemble des effets d'interaction entre allèles (dominance) et entre gènes non allèles (épistasie) qui apparaissent au hasard des assemblages de gènes réunis lors de la fécondation. Ils sont imprévisibles car ils se recréent à chaque génération. Ils ne sont donc pas transmissibles ni sélectionnables. D'où : P=G+E Valeur phénotypique = valeur génotypique + valeur des effets du milieu G=A+I Valeur génotypique = valeur génétique additive + valeur des effets d'interaction et P = A + I + E En pratique, la sélection ne porte que sur les effets additifs (ceux des polygènes + QTL + gènes majeurs) car ce sont les seuls effets génétiques transmissibles aux descendants. Cependant, dans une performance, la valeur génétique additive se confond avec les effets d’interaction et ceux du milieu. Il faut donc l'estimer, c'est le but de l'indexation  de la vraie valeur A . Le graphique page suivante (figure 3.4) décrit la relation entre les performances P210 et les index des 30 veaux pris en exemple. Il montre que : – Les variations des index et celles des performances P210 sont liées et elles suivent une tendance résumée par la droite de régression – Sélectionner d'après les performances est imprécis, en effet : -des animaux aux performances comparables, peuvent présenter un intérêt génétique différent. Le veau n° 15 de performance + 9 kg est génétiquement sans intérêt avec un index  = - 6, alors que le n° 16, de P 210 j = + 8 kg est à préférer comme reproducteur avec une supériorité  = + 3. -les 15 meilleurs d'après leurs performances (seuil représenté par la ligne verticale en pointillés), de supériorité phénotypique moyenne +17,33 kg ont une supériorité génétique moyenne ΔA = + 1. Mais les 15 meilleurs pour leurs index (seuil donné par la ligne horizontale en pointillés) produit un groupe de niveau génétique supérieur, en moyenne ΔA = + 3,1 bien qu'en moyenne leur P 210 j soit plus faible (P = + 14 kg). JP Hallais 30 Cependant, l'index n'est qu'une estimée de la valeur génétique additive vraie. Il comporte un degré d'imprécision qui est chiffrée par le coefficient de détermination (CD). Index des poids à 210 j en écarts à la moyenne Figure 3.4 : Relation entre les poids à 210 j et les index (en écarts à la moyenne de la race) 15 10 5 0 -20 -10 0 10 20 30 40 -5 -10 -15 -20 Poids à 210 j en écarts à la moyenne (kg) 2 – Paramètres génétiques d'une population sélectionnée pour un caractère quantitatif Ces paramètres permettent de calculer les index et d'estimer le progrès génétique ou réponse à la sélection. 2.1 – la variabilité génétique σ2A C'est une caractéristique génétique de la population. Il faut la préserver tout en conciliant l'efficacité de la sélection qui repose sur le choix d'un nombre restreint de reproducteurs. On peut la calculer à partir de la variance des performances σ2P et du coefficient d'héritabilité h2 : σ2A = h 2 x σ2P . Une valeur approchée peut être obtenue à partir de la connaissance des index d'une population, dans l'exemple des poids à 210 jours des 30 veaux, σ2A= 5,792 = 33,5 kg. NB : la variance est un paramètre statistique qui décrit la dispersion des valeurs prise par les individus d'une population, elle doit se comprendre comme une mesure de l'étendue des différences entre les individus (formulaire 1). JP Hallais 31 La variabilité génétique conditionne : 1 - L'efficacité de la sélection. Elle est d'autant plus élevée que σ2A est grande. Nous avons vu dans le paragraphe 1-3 que les 15 meilleurs individus sélectionnés d'après leurs index avaient une supériorité moyenne ΔA = + 3,1 kg. Avec une plus faible variabilité du caractère, par exemple d'étendue comprise entre - 5 et + 2, la supériorité des 15 meilleurs aurait été nécessairement inférieure à + 2 kg. 2 - Le maintien d'une fréquence élevée d'hétérozygotes. Les anomalies génétiques récessives sont alors masquées par leurs allèles dominants et ne s'expriment pas, ou moins fréquemment. La variabilité génétique est donc l'opposé de la consanguinité. De plus, dans une population à fort degré d'hétérozygotie, les phénomènes d'interaction (I) entre les gènes sont favorisés (dominance et épistasie). Ils tendent à augmenter les performances (P = A + I + E) de reproduction , viabilité et dans une moindre mesure les quantités produites. Préserver la variabilité génétique, c'est en pratique lutter contre l'augmentation de la consanguinité en : -accouplant entre-eux des individus non apparentés -augmentant et en diversifiant le nombre de reproducteurs mâles diffusés en insémination artificielle -élargissant la base de sélection à de nouveaux élevages, voire avec des croisements à finalité génétique. Les petites populations sont les plus exposées à la baisse de leur variabilité génétique. Il faut alors organiser des échanges de reproducteurs entre les élevages pour éviter les accouplements consanguins. 2.2 – L'héritabilité des caractères (formulaire 3) 2.2.1 – Notion d'héritabilité On appelle héritabilité la part moyenne de la variabilité phénotypique qui est d'origine génétique additive pour un caractère et une population donnée. Elle a pour formule de base h 2 = σ2A / σ2P Dans l'exemple du P 210 j des veaux, sa valeur est h 2 = 5,792 / 11,872 = 0,24 Ainsi, pour ce caractère de croissance des bovins, environ ¼ de la variance phénotypique (différences de performances entre les individus) est d'origine génétique additive, et donc sélectionnable. Le reste de la variance phénotypique revient à l'influence du milieu et aux effets génétiques non additifs. Ce caractère a une héritabilité dite moyenne. En sélection individuelle, l'héritabilité est le rapport entre les supériorités génétiques ΔA et phénotypique ΔP moyennes d'un groupe d'individus sélectionnés. On parle aussi de réponse à la sélection (R) par rapport à la différentielle de sélection (S) : h 2 = ΔA / ΔP ou R /S JP Hallais 32 Sa valeur peut être approchée dans l'exemple. La supériorité phénotypique du groupe de 15 veaux sélectionnés d'après leurs performances est ΔP = Ps – P (performance moyenne des individus sélectionnés Ps moins performance moyenne des candidats à la sélection P). ΔP = 17,33 – 8,1 = + 9,23 kg. Leur supériorité génétique additive, estimée par les index est ΔA = As – A, soit ΔA = 1- (- 2,2) = + 3,2 kg. Ainsi h 2 = ΔA / ΔP = 3,2 / 9,23 = 0,35 Cette valeur s'écarte de celle obtenue par la formule de référence, car à défaut de connaître les vraies valeurs génétiques des veaux, nous avons utilisé les index avec leur imprécision. 2.2.2 – Valeurs de h 2 et conséquences Les valeurs prises par le coefficient h 2 sont comprises entre 0 et 1 Proche de 0, l'héritabilité est nulle. Elle résulte : -d'une absence de variabilité génétique, le cas extrême serait une population de clones et la sélection devient impossible -d'un caractère dont le déterminisme génétique est essentiellement non additif (effets de dominance et d'épistasie), comme la fertilité. Dans ce cas la sélection est peu précise puisque les différences de performances entre les individus n'ont qu'une très faible origine génétique additive. Proche de 1, l'héritabilité est totale. Près de 100% des différences de performances entre les individus est d'origine additive, ce qui n'est pas observé pour les caractères quantitatifs dont la valeur de h 2 est rarement supérieure à 0,7. En pratique, on distingue trois classes de valeurs de h génétique des caractères (tableau 3.2): Valeurs de h 2 Déterminisme Efficacité de Intérêt des génétique la sélection croisements des polygènes Faible h ≤ 0,20 2 Essentiellement non additif Moyenne Mixte, additif 0,2 < h 2 < 0,4 et non additif Elevée h 2 ≥ 0,4 Essentiellement additif selon le déterminisme Exemples de caractères Très faible Elevé, ils favorisent les effets d'interaction Reproduction, viabilité Moyenne Moyen à faible Quantités produites, (lait, croissance ...) Elevée Nul Qualité et composition des productions (TP du lait, rendement en carcasse ...) Tableau 3.2 Valeurs du coefficient d'héritabilité et ses conséquences JP Hallais 2 33 En plus du déterminisme génétique des caractères, h 2 varie en fonction de : -la variabilité génétique du caractère qui est modifiée avec la consanguinité, laquelle diminue σ2A et h 2. -l'homogénéité du milieu, plus il est homogène plus σ2E diminue sans pour autant modifier les valeurs génétiques des animaux ( σ2A inchangée). Ainsi les différences de performances (σ2P) sont mieux reliées aux valeurs génétiques h 2 augmente. C'est l'intérêt des stations de contrôle de performances qui garantissent une meilleure corrélation entre les performances et les valeurs génétiques des candidats. Les index sont alors plus précis. et La valeur de h 2 conditionne donc la précision de la sélection. Plus elle est élevée, plus les index sont précis (à méthode de sélection identique) et plus le progrès génétique apporté par la sélection est important. En sélection individuelle, on peut augmenter la précision des index en augmentant le nombre de performances réalisées par individu. Cependant, le gain de précision dépendra de la répétabilité des performances (formulaire n°5). Le coefficient de répétabilité, noté ρ mesure la corrélation entre les performances P1,P2 … successives des mêmes individus pour un caractère donné. Plus ρ est faible, plus il devient intéressant de disposer de 2 ou 3 répétitions des performances de chaque candidat à la sélection (par exemple, jusqu'à 3 lactations sont intégrées dans le calcul des index laitiers). En effet si les performances successives ne sont pas liées (ou assez peu), elles apportent chacune leur part d'information supplémentaire qui contribue à l'augmentation de la précision des index. Par exemple, en passant de 1 à 3 performances, le coefficient de détermination des index est multiplié par 2 si ρ = 0,2, contre 1,5 si ρ = 0,5. Cependant, la décision de cumuler plusieurs mesures sur chaque candidat avant de procéder à la sélection doit être prise en considérant l'allongement de l'intervalle de génération et le coût supplémentaire des mesures. 2.3 – Les corrélations génétiques entre les caractères (formulaires n° 2 et 4) Cette notion permet d'évaluer la réponse indirecte à la sélection d'un caractère sur d'autres caractères qui lui sont génétiquement corrélés. Par exemple la sélection de la croissance (GMQ) engendre une réponse indirecte et favorable sur l'efficacité alimentaire mesurée par l'indice de consommation IC. Le coefficient de corrélation génétique entre deux caractères A1 et A2, noté Rg (A1, A2) mesure le sens et l'importance de la liaison entre leurs valeurs génétiques additives dans une population. -1 ≤ Rg ≤ +1 -Si Rg est proche de 0, les deux caractères varient indépendamment l'un de l'autre. -Si Rg est proche de + 1 ou - 1, ils sont étroitement liés dans leurs variations. Le signe + précise qu'ils varient dans le même sens, ou en sens contraire avec le signe -. JP Hallais 34 Exemples et conséquences : 1-Les aptitudes d'élevage ont des corrélations nulles ou plus souvent défavorables avec les caractères d'engraissement et de carcasse. -En porcs, Rg (prolificité,GMQ) ≈ 0. Ces caractères sont donc génétiquement indépendants et peuvent ainsi être sélectionnés, chacun indépendamment de l'autre. -En bovins allaitants, les conditions de vêlage et la musculature sont génétiquement assez corrélées et de façon défavorable (Rg ≈ - 0,4). Sélectionner sur la conformation bouchère dégrade en moyenne, les aptitudes à la mise-bas. 2-La croissance des veaux jusqu'à l'âge de 4 mois, comme celle des agneaux jusqu'à 1 mois, sont fortement corrélées avec la production laitière de leurs mères (Rg ≈ + 0,8). Il est donc possible de sélectionner indirectement la valeur laitière des vaches et des brebis d'après la croissance de leurs produits, mesurée respectivement par les poids à 120 j et à 30 j. 3-En production laitière, la quantité de lait (QL) a une corrélation négative et défavorable avec la composition TP et TB (Rg ≈ - 0,4). Cette opposition a motivé la recherche d'un critère de sélection qui lève cet antagonisme quantité-qualité. L'INEL pour les bovins (index économique laitier) et l'ICC (index combiné caprin), fortement corrélés à QL et neutres à légèrement favorables vis à vis des taux, ont été optimisés afin de répondre aux demandes de maintien des taux exprimées par la filière fromagère. JP Hallais 35 4 ème partie : Sélection intra-race L'amélioration des espèces domestiques repose sur l'exploitation de leur variabilité génétique : 1-A l'intérieur d'une population, elle réside dans les différences de valeur génétique additive entre les individus d'une même race. L'objectif est alors d'améliorer la valeur génétique additive moyenne de la population tout en conservant sa variabilité, c'est le but de la sélection. 2-Entre les populations, elle résulte des différences entre les races. L'objectif est de bénéficier à la fois : -de leurs qualités complémentaires, par exemple les aptitudes d'élevage d'une race et les aptitudes bouchères d'une autre, -des effets favorables des interactions entre les gènes chez les individus croisés qui se manifestent par l'hétérosis. Dans ce cas, les croisements sont associés à la sélection. 1 – Notion de population 1.1 – Définitions Une race, d'après sa définition de 1969, est constituée d'un ensemble d'animaux d'une même espèce présentant entre-eux suffisamment de caractères héréditaires communs : morphologiques qui sont repris dans le standard, physiologiques ou de production et aussi des particularités biologiques codées par des gènes majeurs, comme les caséines du lait. Une race est le résultat de la sélection d'une population, souvent initiée depuis le XIX ème siècle, partant de populations locales initialement adaptées à un milieu et à un usage (fréquemment une mixité combinant élevage + lait + viande + travail). Elles sont passées de « populations terroirs » à des « races production » améliorées pour quelques caractères et élevées dans des conditions standardisées. Selon les races et les espèces, cette évolution a été plus ou moins intense (races spécialisées ou races rustiques) et obtenues, pour certaines, à l'aide de croisements (ovins d'origine Anglaise, porc Large White, chevaux pur-sang Arabe ou Anglais introduits chez le Percheron ou le Normand …) alors que d'autres sont restées à l'écart des croisements (bovins Salers). Les animaux sont dits de race pure quand ils sont issus de parents appartenant à la même race. Ils tendent vers l'homozygotie pour les caractères de standard à déterminisme génétique simple (couleur, cornage …). La notion de race pure s'oppose à celle de croisement. Les individus d'une lignée sont généralement de la même population qui peut être une race, mais ils se distinguent par des aptitudes spécifiques, comme les lignées hyperprolifiques porcines. On les associe aux rameaux. Les individus d'une souche constituent un ensemble d'animaux issus de reproducteurs d'origines diverses, croisés entre-eux, puis conduits en troupeau fermé dans un milieu donné. JP Hallais 36 Ce sont les souches synthétiques (ou composites) exploitées en aviculture et en sélection porcine, ou encore les souches INRA 95 (bovins culards) et INRA 401 (ovins viande), cette dernière souche est maintenant reconnue comme race, appelée Romane. En pratique, lignée et souche sont deux termes confondus dans le vocabulaire des éleveurs, voire des sélectionneurs. 1.2 – Caractéristiques générales Chaque race est décrite par un standard qui énumère ses caractéristiques, pour lesquelles on recherche : -l'homozygotie des caractères distinctifs : couleur, cornage … -une variabilité génétique suffisante des caractères de production qui font l'objet d'une sélection : lait, viande, œufs … La sélection Française s'appuie largement sur les races. Ainsi, les filiations sont consignées dans des livres généalogiques depuis la deuxième moitié du XIXème siècle. Ces enregistrements sont exploités par les méthodes de calcul d'index comme le modèle animal. De plus, ils sont utiles à la sélection sur ascendance et au contrôle de l'évolution de la consanguinité lors des accouplements raisonnés. Leurs noms sont d'origine Anglaise (Studbook, Herd-book, Flock-book) qui ont été les premiers à les développer. Le fichier racial centralise les informations, performances et index, nécessaires à la sélection collective quand la base de sélection fermière est dispersée dans de nombreux troupeaux. A l'opposé, les lignées et les souches sont généralement détenues par des firmes de sélection, elles se rencontrent principalement chez les monogastriques et sont largement diffusées en croisements. 2 – Objectifs et critères de sélection On distingue : 1-Les objectifs de sélection, ou caractères pour lesquels on recherche l'amélioration de la valeur génétique additive. Ce sont obligatoirement des critères ou des combinaisons de critères zootechniques, gain moyen quotidien GMQ, indice de consommation IC … Ils ne sont pas nécessairement mesurables, comme le rendement de carcasse dont la mesure nécessite l'abattage de l'individu, mais ils doivent répondre à l'objectif global regroupant les attentes d'une filière de : production – transformation – distribution. 2-Les critères de sélection sont les caractères sur lesquels portent directement l'indexation et le classement des candidats à la sélection. La réponse à la sélection est directe si le critère est lui-même l'objectif de sélection, elle est indirecte si le critère n'est pas l'objectif de sélection, mais lui est génétiquement corrélé. Par exemple, la sélection sur le critère GMQ a une réponse directe sur l'objectif « améliorer la croissance » et une réponse indirecte sur « améliorer l'efficacité alimentaire ». En effet, GMQ et IC sont génétiquement liés par une corrélation élevée, négative et favorable Rg ≈ - 0,7. JP Hallais 37 Un bon critère de sélection doit présenter certaines qualités : -Il est nécessairement mesurable, sur l'individu ou ses apparentés. -Sa mesure doit-être, si possible, précoce pour réduire l'intervalle de génération et être d'un coût acceptable par rapport à l'amélioration génétique engendrée par la sélection. -Quand il n'est pas lui-même l'objectif de sélection, il présente une corrélation génétique élevée et favorable avec l'objectif de sélection, elle conditionne la réponse à la sélection. -Il a une héritabilité aussi élevée que possible pour réaliser une sélection précise. -Il n'a pas de corrélations génétiques défavorables vis-à-vis des caractères qui ne sont pas retenus comme objectifs de sélection, mais qui peuvent présenter un intérêt dans d'autres conditions d'élevage. Par exemple le GMQ, retenu comme seul critère de sélection n'est pas satisfaisant car il entraîne une réponse indirecte et défavorable sur l'augmentation du poids de gras contenu dans les carcasses (Rg ≈ + 0,45). De même, la sélection sur la vitesse de traite a un effet défavorable sur l'augmentation du taux cellulaire du lait. On préfère alors des index synthétiques combinant plusieurs caractères. Ils donnent une réponse à la sélection équilibrée pour les différentes composantes de l'objectif de sélection (quantités / qualités) comme l'INEL en bovins laitiers, l'IVMAT en bovins allaitants. Cependant, le calcul des index élémentaires reste un préalable à l'édition d'un index de synthèse. 3 – Etude d'un exemple de programme de sélection 3.1 - Notion de base de sélection La population utile à la sélection est appelée base de sélection. Ce sont les individus répondant à la double condition, être : -Identifiés pour assurer la traçabilité de l'information au cours de sa chaîne de traitement, depuis le contrôle des performances, jusqu'au calcul des index, la sélection et l'utilisation des reproducteurs. -Contrôlés, car l'enregistrement des performances est à la base du calcul des index. Une base de sélection doit réunir si possible deux qualités : -Son étendue qui conditionne les possibilités de choix parmi un nombre suffisant de candidats à la sélection. -La variabilité génétique du caractère sélectionné, qui détermine la supériorité génétique moyenne des individus sélectionnés pour un taux de sélection donné. Avant toute démarche de sélection, il faut connaître les valeurs des paramètres génétiques des caractères étudiés : -variabilité génétique σA -héritabilité h 2 -corrélations génétiques entre les critères et les objectifs de sélection Rg JP Hallais 38 3.2 - Le choix des méthodes de sélection Les méthodes de sélection se différencient selon les méthodes d'obtention de l'information qui sert au calcul des index. Elle peut être obtenue : -Directement sur l'individu, par la mesure de ses propres performances, c'est la sélection individuelle ou massale, -Indirectement, chez des apparentés au candidat à la sélection. Ce sont les sélections sur ascendance ou généalogique, sur collatéraux (frères sœurs) ou sur descendance appelée testage. Quand plusieurs sources d'information sont disponibles, provenant d'apparentés et des performances du candidat, on parle de sélection combinée. C'est le cas des index de production des porcs qui combinent les performances des candidats maintenus en élevage de sélection ( GMQ, épaisseur de lard dorsal …) à celles d'un collatéral, issu de la même portée et contrôlé en station, puis abattu ( mesures portant sur la croissance, l'efficacité alimentaire, les caractéristiques de la carcasse et la qualité de la viande). Chez les bovins laitiers, les index SAM combinent la sélection polygénique et la sélection de gènes favorables aux aptitudes recherchées, portés sur les QTL. Le choix des méthodes de sélection conditionne l'efficacité de la sélection et le progrès génétique espéré en agissant sur : -La précision de l'évaluation de la valeur génétique additive (CD des index) et la précision de la sélection R (A, Â). Elle dépend du nombre et de la qualité des performances enregistrées. -L'intensité de la sélection (i) liée à la sévérité du tri permise par le nombre de candidats qu'une méthode de sélection permet d'évaluer pour un budget de contrôle de performances donné. -L'intervalle de génération (T), influencé par le délai nécessaire à l'obtention des performances. Il est toujours plus long avec la sélection sur descendance. 3.3 – Exemple de programme de sélection des taureaux de races allaitantes (Figure 4.1) Le programme de sélection enchaîne plusieurs méthodes de sélection : (1) : La sélection sur ascendance, consiste concrètement à accoupler les meilleurs reproducteurs femelles et mâles de la race. On recherche une forte intensité de sélection (choix sévères) tout en préservant la variabilité génétique par la diversité des origines des animaux accouplés. Elle n'allonge pas l'intervalle de génération. (2) : La sélection individuelle est réalisée entre le sevrage et l'âge de mise en reproduction. Elle fait appel à deux types de stations : JP Hallais 39 -Centres d'élevage (Lanaud en race limousine …) qui doivent évaluer, à coût modéré, un nombre relativement élevé de taureaux destinés à la monte naturelle. Les conditions de milieu sont plus homogènes qu'en ferme (h2 augmente) ainsi la sélection est plus précise. Par contre l'intensité de sélection est moyenne avec environ 50% des candidats qualifiées en fin d'évaluation. -Stations de contrôle individuel des candidats à l'insémination artificielle. Elle permet de réaliser un tri avant le testage, à coût modéré et avec une précision suffisante pour les aptitudes d'engraissement (h2 moyenne et caractères exprimés chez les candidats). Cette sélection, réalisée avant l'âge de mise en reproduction, n'allonge pas l'intervalle de génération. (3) : La sélection sur descendance ou testage permet de réaliser une sélection précise (CD ≥ 0,6), y compris pour des caractères non exprimés chez les mâles (fertilité femelle, facilité de vêlage, valeur d'allaitement), ou encore de carcasse (rendement). Elle est coûteuse et allonge considérablement l'intervalle de génération du fait de la nécessité d'attendre les résultats de la descendance, jusqu'au sevrage des veaux issus des femelles de testage. Ensemble des femelles de la race Base de sélection Mères à taureaux (1) x Pères à taureaux Monte naturelle Veaux mâles (2) Station de contrôle de performances et de la spermatogénèse (3) Testage Aptitudes Bouchères Aptitudes Maternelles Figure 4.1 : Programme de sélection des taureaux d'une race allaitante JP Hallais 40 Insémination artificielle 4 – Évaluation de la valeur génétique additive : les index 4.1 - Définition et caractéristiques générales L'index est l'estimée  de la valeur génétique additive A d'un individu à un moment donné. Il permet le classement des candidats à la sélection avec une précision chiffrée par le coefficient de détermination CD. Ses principales caractéristiques sont : 1-L'index est une valeur estimée par le BLUP (Best Linear Unbiaised Predictor) à partir des performances de l'individu ou de ses apparentés. 2-L'index peut être constitué d'un seul critère de sélection, par exemple le taux protéique du lait, ou regrouper un ensemble de caractères dans un même index synthétique ou indice combiné. L'INEL est construit à partir de 4 index élémentaires MP, MG, TP, TB. 3-En France, l'index estime la propre valeur génétique additive d'un reproducteur, lequel transmet en moyenne, la moitié de la valeur de son index à sa descendance. 4-L'index est un outil de classement des candidats à la sélection. Sa présentation est généralement standardisée avec une moyenne égale à 0 ou 100, ainsi les animaux améliorateurs auront des index supérieurs à ces moyennes. La référence 0 ou 100 est appelée base mobile car elle change chaque année. C'est par exemple la valeur moyenne des veaux de la race nés au cours des 5 dernières campagnes pour les index IBOVAL des bovins allaitants, ou encore l'index moyen des vaches laitières nées 6 à 8 ans avant la campagne d'édition des index des bovins laitiers. L'étendue des index d'une population peut être exprimée : -en unités physiques du caractère, QL en kg, Taux en ‰ … -standardisée avec un écart-type égal à 1 (index morphologie des bovins laitiers) ou égal à 10 (index des bovins allaitants) … (formulaire n°6). 5-Les index sont actualisés afin de considérer l'évolution du niveau génétique moyen de la population et l'arrivée de nouvelles informations. Le dernier index publié doit être retenu pour la sélection. 6-La précision des index est chiffrée par le coefficient de détermination CD = R2 (A, Â), de valeur comprise entre 0 et 1. Plus elle est élevée, plus l'index est précis. 4.2 – Principe de l'indexation sur un seul caractère 4.2.1 – Démarche générale Partant de la performance P = A + I + E d'un individu, il faut estimer sa valeur génétique additive A par son index Â. Les méthodes d'indexation procèdent en 2 étapes de calcul simultanées : JP Hallais 41 Etape 1 : Epurer la performance P des effets dus au milieu identifiable et mesurable, c'est l'étape de correction des performances brutes qui produit des performances corrigées Pc. Les principaux facteurs de milieu, appelés aussi F effets fixes, sont des conditions de production qui peuvent influencer favorablement ou non les performances moyennes d'un groupe d'individus : -l'élevage ou troupeau dans lequel séjourne l'animal, par son effet global : alimentation, santé... -le numéro de lactation ou de mise-bas pour les femelles, -le sexe pour les animaux en croissance, -la campagne ou année de production ...etc Ainsi, une vache laitière qui produit 7200 kg de lait en première lactation, dans des conditions globalement défavorables (somme des facteurs de milieu F = - 300 kg), aura une performance corrigée en écart à la moyenne (6800kg) de sa race : Pc = (P - P) - Σ F = (7200-6800) - (- 300) = + 700 kg Les valeurs des performances corrigées ne sont généralement pas accessibles aux éleveurs, sauf celles des chevaux de sport qui disposent un indice annuel de performance. Il est édité par discipline équestre, corrigé de l'effet du sexe et de l'âge. Ce sont les indices ISO pour le saut d'obstacle, ICC pour le concours complet … linéaire Etape 2 : Estimer la valeur génétique additive  selon le modèle mathématique y = ax + b En sélection individuelle, pour un caractère et une performance, il prend la forme suivante :  = h2 x Pc d'où l'index de la vache, avec h2 = 0,3  = 0,3 x (+ 700) = + 210 kg de lait. Le coefficient de détermination CD a pour valeur, dans cette sélection individuelle avec une performance : CD = h2 = 0,3 cet index est donc peu précis. Ainsi, la performance brute de cette vache a été corrigée des effets de milieu globalement défavorables qu'elle a rencontrés et on a retenu la part moyenne de sa supériorité phénotypique qui est d'origine génétique additive. 4.2.2 - Le BLUP appliqué au modèle animal Le BLUP (Best Linear Unbiaised Predictor) ou meilleur estimateur linéaire sans biais, présente les caractéristiques suivantes : -Meilleur estimateur linéaire : c'est la propriété de l'estimation linéaire y = ax + b qui rend minimale l'erreur moyenne de l'estimation pour une population. -Sans biais pour les facteurs de milieu F communs à des groupes d'animaux d'effectifs suffisamment importants pour en estimer les valeurs. La mesure de l'effet des conditions d'élevage sur les performances moyennes d'un troupeau, impose d'établir des connexions génétiques entre eux. Ce sont les descendances de mâles réparties dans divers élevages, en particulier avec l'insémination artificielle. A défaut, les index ne permettent qu'un classement intraJP Hallais 42 troupeau (bovins allaitants ne pratiquant pas l'insémination artificielle). Les autres facteurs de milieu sont plus facilement accessibles, car les calculs d'index sont centralisés au niveau national. Par exemple l'effet des sexes mâle et femelle sur la croissance s'obtient par leur différence moyenne de croissance, corrigée elle-même de tous les autres facteurs de milieu. Le modèle animal fait converger l'ensemble des informations disponibles vers l'estimation de la propre valeur génétique additive du candidat : ses performances et les informations produites par ses apparentés selon la Figure 4.2. Les contributions des trois sources d'information sont pondérées de l'intérêt relatif qu'elles présentent dans le calcul de l'index. L'index  de l'animal est égal à : contribution de son index sur ascendance + contribution de ses performances corrigées + contribution de son index sur descendance Exemple des contributions aux index laitiers : -veau à la naissance  = 100 % index sur ascendance -vache avec une lactation terminée  = 77% index ascendance + 23 % performance corrigée -taureau testé (50 filles)  = 7 % index sur ascendance + 93 % index sur descendance NB : La contribution des collatéraux transite par l'index des parents communs. Père Mère Index sur ascendance Collatéral Performances corrigées ANIMAL INDEXE Index sur descendance Performances des descendants Figure 4.2 : Schéma du modèle animal JP Hallais 43 4.2.3 – Les index SAM Depuis 2010/2011 les index polygéniques  des bovins laitiers, sont enrichis de la connaissance des effets de gènes portés par les QTL. Ils peuvent expliquer jusqu'à 70% de la variabilité génétique selon les caractères. Les 3 grandes races bovines laitières sont les premières à bénéficier de cette connaissance car elles disposent d'une base de référence, à la fois génotypée et indexée, suffisamment importante. Pour les caractères de production et les aptitudes fonctionnelles, cette base de référence permet d'établir une correspondance entre les génotypes aux marqueurs SNP et les effets quantitatifs associés des gènes portés aux QTL. La lecture automatisée d'un grand nombre de marqueurs est réalisée à l'aide de puces à ADN. Fin 2011, trois types de puces sont disponibles pour le génotypage des bovins : Puce bovine SNP50. Elle porte environ 54 000 SNP bien répartis sur le génome. Sa densité d'information suffit pour sélectionner les caractères laitiers et fonctionnels des 3 grandes races laitières avec un CD de 0,5 à 0,6. Elle s'applique à la sélection individuelle des mères à taureaux et des taureaux d'insémination artificielle. Puce bovine LD7. Elle ne porte que 7 000 SNP distribués sur l'ensemble du génome, tous présents sur la puce de référence bovine SNP50. On estime alors les typages manquants par rapport à la puce de référence, ce qui permet d'imputer un génotypage standard tout en utilisant une puce moins coûteuse. Cependant, cette imputation réduit la précision des index et limite son usage à la sélection des femelles de renouvellement. Puce bovine HD800. Avec près de 800 000 SNP, sa densité permet d'établir des références multiraciales, voire entre espèces. Son utilisation ouvre des perspectives d'élargissement à la sélection assistée par marqueurs vers d'autres races et espèces d'élevage. L'index SAM est un index synthétique : I SAM = (a x Â) + ((1 – a) x effets des gènes portés aux QTL) Le coefficient « a » et son complémentaire (1 – a) dépendent de la contribution des QTL dans la connaissance de la valeur génétique de l'individu. -Plus le nombre de QTL et leurs effets sont importants, plus leur pondération (1 – a) dans l'index SAM est élevée. -Plus le CD de l'index polygénique est élevé, plus il pèse dans l'index global. Le gain de précision apporté par l'index SAM est d'autant plus élevé que le CD de l'index  est faible : -à la naissance d'un veau, le CD des index de production passe de 0,3 à environ 0,6 avec la prise en compte des QTL. La précision des index devient suffisante pour procéder à la sélection de taureaux sans testage. Ils sont dits « génomiques ». La connaissance de leur descendance, consécutive aux inséminations artificielles, permet de confirmer leur sélection précoce. -de même, avec la SAM, les index des caractères très peu héritables (h2 fertilité = 0,05) voient leur CD dépasser 0,5 valeur qui n'était pas atteinte lors du testage, compte tenu de h2 . JP Hallais 44 Enfin, la SAM apporte une précision de la sélection des mères à taureaux égale à celle des mâles et elle permet de réduire le délai de mise en service des taureaux qui sont sélectionnés avant même leur âge de mise en reproduction. La figure 4.3 présente un schéma-type de programme de sélection de taureaux laitiers sans testage : Femelles de la race Femelles génotypées Meilleures nullipares Mères à taureaux x Meilleurs jeunes mâles à 18 mois pères à taureaux Transplantation embryonnaire I.A. Génotypage des veaux mâles et femelles Tri Mâles en station d'élevage -l ère lactation des mères terminée -contrôle de la spermatogénèse Tri Taureaux sélectionnés à 18 mois Production de semence et diffusion Figure 4.3 : Programme de sélection de taureaux laitiers incluant la SAM 4.2.4– Le coefficient de détermination CD (formulaire n° 7) Un index peut aussi bien surestimer que sous-estimer la valeur génétique additive d'un individu. Sa précision sera proportionnelle à la corrélation R (A, Â) entre les vraies valeurs génétiques A et celles estimées par les index Â, d'où CD = R2 (A, Â). NB : les formules de calcul du CD sont abordées au § 5.2.3 Le CD est un indicateur de la précision des index : proche de 0 l'index est imprécis, proche de 1 il est précis. En pratique, un CD ≥ 0,3 pour une femelle et ≥ 0,5 pour un mâle qui est destiné à produire davantage de descendants, sont des précisions déjà acceptables. JP Hallais 45 La valeur du CD et la précision des index augmentent avec : -l'héritabilité du caractère -le nombre de performances connues sur l'individu et ses apparentés. Cependant, il n'est pas toujours intéressant de conditionner la sélection des reproducteurs à l'obtention de CD élevés. Le coût et la durée du contrôle de performances augmentent de façon excessive par rapport au gain de précision apporté. On préfère fixer des seuils minimums en fonction de la diffusion des reproducteurs et des risques liés à l'imprécision des index. En France, les taureaux de race bouchère diffusés en insémination artificielle, doivent être indexés avec un CD ≥ 0,6 contre CD ≥ 0,7 pour les taureaux laitiers (la réglementation européenne retient le seuil CD ≥ 0,5). L'intervalle de confiance des index (IC) fournit la fourchette  ± IC susceptible d'inclure la vraie valeur génétique pour un seuil de confiance donné. (formulaire n°8) Par exemple, pour un risque α = 5% ou un seuil de confiance 1 – α = 0,95, l'intervalle de confiance de l'index quantité de lait est (tableau 4.1) : CD de l'index IC de l'index 0,3 ± 820 kg 0,5 ± 693 kg 0,7 ± 537 kg 0,9 ± 309 kg Tableau 4.1 : Intervalle de confiance de l'index QL en fonction du CD de l'index Plus le CD augmente, plus l'index est précis et moins la vraie valeur génétique additive risque de s'écarter de celle de l'index publié. Quand la sélection porte sur plusieurs animaux, par exemple un lot de N = 16 génisses de renouvellement avec un CD = 0,3 alors l'intervalle de confiance de l'index moyen du lot est pondéré du coefficient 1 / √N. L'intervalle de confiance de la moyenne des index du lot est IC = ± 820 / √16 soit ± 205 kg de lait. Le niveau génétique moyen du lot est estimé avec une bonne précision (± 205 kg de lait), cependant le classement des animaux à l'intérieur du lot sélectionné reste peu précis avec un IC des index individuels très étendu (± 820 kg). 4.3 – Intérêt des index combinés ou indices de sélection L'objectif de sélection regroupe généralement plusieurs caractères élémentaires qu'il faut améliorer simultanément. Ce sont par exemple les qualités maternelles recherchées par l'éleveur naisseur, les aptitudes de croissance musculaire au moindre coût espérées en engraissement, complétées des demandes de qualités de carcasse et de viande formulées par l'aval de la filière. La sélection de chaque critère, en fixant un seuil minimum à atteindre, indépendamment des autres caractères est la plus simple. Ainsi, France Limousin Sélection a JP Hallais 46 évalué le progrès génétique induit par la sélection de 27 % de sa base de sélection femelle répondant au double seuil CRsev > 100 et ALait > 100. Le progrès s'élève à + 5 points sur CRsev et à + 2,5 points pour ALait, soit un total de + 7,5 points. Cependant, cette méthode rejette des animaux qui ne répondent pas à l'un des seuils de sélection bien qu'ils soient très supérieurs à la moyenne pour l'autre caractère. Ils présentent un intérêt à condition de les accoupler avec des individus aux qualités complémentaires. De plus, en présence de deux caractères liés par des corrélations génétiques négatives, les animaux les mieux classés pour un premier critère sont généralement les plus faibles pour le deuxième. C'est le cas des index quantité de lait et taux protéique des bovins laitiers. Une sélection par seuils privilégie alors les individus moyens pour les deux caractères (figure 4.4). index TP individus sélectionnés Seuil pour TP Index QL Seuil pour QL Figure 4.4 : Effet de la sélection par seuils appliquée à 2 caractères liés par une corrélation génétique négative On préfère alors la sélection par index synthétique ou indice de sélection. Il combine, dans un critère unique et global : -tous les critères de sélection, -toutes les sources d'information apportées par les méthodes de sélection utilisées. La contribution de chaque index élémentaire à la construction de l'index synthétique, dépend : -de ses paramètres génétiques (h2 et σA), -de ses corrélations avec les autres caractères, -des priorités retenues parmi les caractères à améliorer, en fonction de leur importance économique et des attentes de la filière. La sélection par indice ou index synthétique est généralement plus efficace que la sélection par seuils. En reprenant l'exemple des vaches Limousines, sélectionnées cette fois avec l'index synthétique 1/2 (CRsev + Alait), le seuil de sélection correspondant aux 27 % JP Hallais 47 supérieures s'élève à 101,5 points et le progrès génétique induit atteint + 6 points d'index CRsev et + 2,6 points pour Alait. Le progrès cumulé est de + 8,6 points contre 7,5 en sélection par seuils. La sélection par index synthétique apporte ainsi 16 % d'efficacité supplémentaire. Exemples d'index synthétiques : INEL (Index Economique Laitier) de formule INEL = 0,98 (MP + 0,2 MG + TP + 0,5 TB). Il produit une réponse à la sélection équilibrée et économiquement optimisée pour la production laitière, c'est à dire une production élevée de matière utile du lait, sans dégrader les taux. ISEVR (Index de synthèse au Sevrage) qui combine la morphologie, la croissance et la facilité de naissance chez les bovins allaitants. IPC (Index Production Caprin), construit sur la même principe que l'INEL. Des index synthétiques, pondérés de la valeur économique des critères élémentaires (aptitudes de reproduction, d'engraissement et caractéristiques de la carcasse) sont calculés pour les porcs, dont les coefficients varient selon les objectifs de sélection des races. 5 – La réponse à la sélection : supériorité et progrès génétique 5.1 – Définitions (formulaire n°9) 1-La supériorité génétique additive moyenne (ΔA) des individus sélectionnés est la différence de valeur génétique additive moyenne entre les candidats sélectionnés (Ᾱs) et celle des candidats à la sélection ( Ᾱn) : ΔA = Ᾱs - Ᾱn Elle est fonction : -de la sévérité des choix, ou intensité de sélection (i) -de la précision des index, mesurée par le coefficient de corrélation R ( A, Â) entre les index  et les vraies valeurs génétiques additives A -de la variabilité génétique de la population, mesurée par l'écart-type génétique σA d'où la formule de base ΔA = i x R (A, Â) x σA 2-Le progrès génétique par génération (ΔG) est la différence de valeur génétique additive moyenne entre les individus de deux générations n et n+1 successives d'une même population : ΔG = Ᾱn+1 – Ᾱn En pratique, ΔG résulte de l'utilisation des reproducteurs sélectionnés, de supériorité génétique ΔA, ainsi ΔG = ΔA. Des exceptions sont possibles, comme les reproducteurs mâles sélectionnés pour la production de viande et utilisés en croisement avec une autre race. Ils ne contribuent pas au progrès génétique de leur propre race. Le progrès génétique dépend de la sélection et de la diffusion de reproducteurs selon 4 voies : 1 : père - fils JP Hallais 2 : père – fille 3 : mère – fils 48 4 : mère - fille La sélection réalisée sur chacune des 4 voies contribue au progrès génétique global de la population. Qui s'écrit : ΔG = Ᾱn+1 – Ᾱn = ¼ ( ΔA1 + ΔA2 + ΔA3 + ΔA4) 3-Le progrès génétique annuel (ΔG annuel) est le progrès génétique réalisé sur une unité de temps (l'année), il permet de comparer l'efficacité de méthodes de sélection qui n'aboutissent pas au même intervalle de génération (T exprimé en années et dixièmes) : ΔG annuel = ΔG /T Comme le progrès génétique par génération, T sera fonction des 4 voies déjà citées : T = ¼ (T1 + T2 + T3 + T4) 5.2 – Facteurs de variation du progrès génétique annuel 5.2.1 – La variabilité génétique C'est une caractéristique, à un moment donné, du degré d'hétérozygotie et de la diversité génétique des individus de la population. Son importance conditionne les possibilités de choix lors de la sélection. Une population sans variabilité génétique, qui à l'extrême serait composée de clones, ne peut pas progresser par sélection puisque tous les individus sont semblables. Il faut donc la préserver : -Eviter les accouplements consanguins qui augmentent de taux d'homozygotie par la transmission de copies identiques d'un même gène ancestral. Pour cela, il convient de renouveler assez rapidement les reproducteurs en diversifiant les origines sélectionnées. -Ne pas trop réduire le nombre de reproducteurs sélectionnés au profit de l'intensité de la sélection et équilibrer l'importance de leur diffusion. Le risque serait d'aboutir rapidement à une impasse lors du choix de candidats issus des mêmes parents. -Eventuellement introduire des reproducteurs extérieurs à la population par des croisements ponctuels et gérés. C'est parfois la seule solution dans une population d'effectif réduit ou bien quand le taux de consanguinité est déjà très élevé et constitue un obstacle à tout programme d'amélioration génétique. Malgré tout, la variabilité génétique de nombreuses races tend à se réduire du fait même de la sélection (porcs, bovins prim'holstein …) ou du faible nombre de reproducteurs (races en conservation). Certains caractères sont déjà affectés, en particulier la fertilité et la viabilité dont le déterminisme génétique est essentiellement non additif. Le maintien de ces aptitudes nécessite un degré suffisant d'hétérozygotie. JP Hallais 49 5.2.2 – L'intensité de la sélection (i) L'intensité de sélection mesure l'écart entre la moyenne des individus sélectionnés et celle de leur population d'origine. Elle est exprimée en nombre d'écarts-types et n'a pas d'unités. Cette notion peut aussi bien s'appliquer aux index qu'aux performances. Sa valeur est lue dans une table en fonction du taux de sélection p (tableau 4.2 ) où p est la proportion d'individus sélectionnés : Taux de sélection p Intensité de sélection i 0,01 2,665 0,05 2,063 0,1 1,755 0,2 1,400 0,3 1,159 0,4 0,966 0,5 0,798 0,6 0,644 0,7 0,497 Tableau 4.2 : Quelques valeurs extraites de la table de i en fonction de p p = nombre de candidats sélectionnés / nombre de candidats à la sélection ou p = besoin de renouvellement / disponibilité La figure 4.5 présente la relation entre p et i. L'écart entre la moyenne des individus sélectionnés (Ᾱs) et celle de la population (Ᾱ) est la valeur i x σA de la formule de base : ΔA = i x R (A, Â) x σA Si par un choix plus sévère des reproducteurs p diminue, alors l'écart (Ᾱs - Ᾱ) et i augmentent. Mais augmenter la sévérité des choix, en particulier avec p ≤ 0,2 apporte une progression de i de plus en plus faible et expose la population au risque d'une diminution de sa variabilité génétique. p % individus sélectionnés Valeurs génétiques Ᾱ Ᾱs i = (Ᾱs – Ᾱ) / σA Figure 4.5 : Relation entre p et l'intensité de la sélection i JP Hallais 50 Applications n°1 en sélectionnant d'après les index et n° 2 d'après les performances.: 1-Les éleveurs de vaches laitières sélectionnent en moyenne 70% de leurs femelles pour produire les génisses de renouvellement. Pour l'index quantité de matière protéique, d'écart-type σ = 16 kg, la supériorité moyenne d'index MP des vaches sélectionnées sera (en écart à la moyenne des candidates) : -p = 0,7 alors i = 0,497 -supériorité d 'index des femelles sélectionnées Δ = i x σ = 0,497 x 16 ≈ + 8 kg MP En pratique, ces femelles transmettent la moitié de leur index à leur descendance, soit + 4 kg. 2-Un éleveur d'ovins conserve 20 agnelles, sélectionnées sur le poids à 70 j d'écart– type phénotypique σP = 3 kg. Ce tri est effectué parmi 40 agnelles déjà sélectionnées d'après leur ascendance. -p = besoin / disponibilité = 20 / 40 = 0,5 alors i = 0,798. -leur supériorité phénotypique moyenne ΔP pour le poids à 70 j est ΔP = i x σP = 0,798 x 3 ≈ + 2,4 kg Le caractère poids à 70j a une héritabilité h2 = 0,25, on peut alors estimer la supériorité génétique moyenne du lot des 20 agnelles : ΔA = h2 x ΔP = 0,25 x 2,4 = + 0,6 kg. Elle est transmise en moyenne pour moitié à leurs descendants, soit + 0,3 kg à 70j. Les facteurs de variation de l'intensité de la sélection sont : 1-le besoin en reproducteurs sélectionnés, lui-même lié au : -Taux de renouvellement, plus il est élevé, plus le taux de sélection p augmente et plus l'intensité de la sélection i est faible. -Sexe, le nombre de mâles sélectionnés est généralement plus faible que celui des femelles, ce qui apporte une plus forte intensité de sélection aux mâles. -Mode de reproduction, l'insémination artificielle nécessite moins de mâles que la monte naturelle pour un même effectif de femelles à accoupler. D'où i plus élevé en IA. 2-La méthode de sélection qui conditionne la nombre de candidats qu'elle permet d'évaluer : -La sélection sur ascendance permet une forte intensité i dès lors que les ascendants sont déjà indexés. -La sélection individuelle permet encore une forte intensité i à condition que le coût du contrôle de performances soit modéré (c'est la limite des stations de contrôle individuel au coût de revient élevé) et que le caractère soit mesurable sur le candidat (croissance, conformation en vif …). -La sélection sur descendance a un coût très élevé et elle entraîne un allongement important de l'intervalle de génération qui ne permet pas de l'étendre à un grand nombre de candidats. JP Hallais 51 On la réserve ainsi aux mâles d'insémination artificielle qui nécessitent une sélection précise. Ils sont cependant susceptibles d'amortir le coût du testage par une large diffusion des reproducteurs sélectionnés. 5.2.3 – La précision de la sélection R (A, Â) C'est la précision du classement des candidats à la sélection d'après leurs index. On la mesure par le coefficient de corrélation R (A, Â) entre les vraies valeurs génétiques additives (A) et leurs estimées (Â). R (A, Â) est calculé à partir du coefficient de détermination : R (A, Â) = √CD. Plus sa valeur est proche de 1, plus la méthode de sélection est précise. En pratique, R (A, Â) est toujours inférieur à 1 car les index sont des valeurs estimées. C'est pourquoi il pondère le calcul du progrès génétique espéré, de formule : ΔA = i x R (A, Â) x σA . La précision de la sélection varie en fonction du coefficient de détermination. Elle augmente avec : -l'héritabilité du caractère, -le nombre de performances connues et elle dépend de la méthode de sélection. Le choix de la méthode de sélection influence directement la précision des index et celle de la sélection : 1 - En sélection sur ascendance le CD des index a pour formule CD asc = ¼ ( CD père + CD mère). La précision ne peut être que faible à modérée. Par exemple, avec CD père = 0,8 (taureau diffusé en IA) et CD mère = 0,4 (valeur moyenne pour les vaches), alors : CD asc = ¼ (0,8 + 0,4) = 0,3 et R(A, Â) = √0,3 = 0,55. Ainsi, la supériorité génétique attendue pour une intensité de sélection (i) donnée, est presque réduite de moitié ( ΔA = i x 0,55 x σA ) à cause du manque de précision de la méthode de sélection. 2 - Le CD de la sélection individuelle avec une seule performance mesurée sur le candidat est : CD = h2. Pour les caractères exprimés par l'individu et bénéficiant d'une héritabilité moyenne à forte ( h2 ≥ 0,3), cette méthode de sélection est souvent privilégiée. Elle présente un double avantage. Son coût modéré permet de contrôler davantage de candidats que la sélection sur descendance et elle a un faible impact sur l'allongement de l'intervalle de génération, en particulier pour les caractères mesurés avant la maturité sexuelle. Face à des caractères moyennement héritables, il est possible d'augmenter la précision de la sélection en augmentant le nombre de performances connues par candidat. Le coefficient de répétabilité (ρ) du caractère permet de calculer le gain de précision apporté par les mesures supplémentaires. Cependant, il n'est pas toujours possible de procéder à de nouvelles mesures sur les mêmes individus (par exemple le poids à âge-type) et l'allongement de l'intervalle de génération engendré par l'attente de nouvelles performances (1 an par lactation en vaches laitières) en limite l'intérêt. Pour la quantité de lait produite par lactation (h2 = 0,3 et ρ = 0,4), le gain de précision apporté par la lactation n°2 peut être intéressant, alors qu'il se réduit au delà (tableau 4.3 page suivante). Enfin, plus h2 est élevé, moins il est intéressant d'attendre de nouvelles performances avant de procéder à la sélection car R (A, Â) évoluera peu. JP Hallais 52 Nombre de lactations CD des index Précision R (A, Â) 1 0,3 0,55 2 0,43 0,66 3 0,5 0,71 4 0,55 0,74 Tableau 4.3 : Evolution du CD et de R (A, Â) en sélection individuelle pour la quantité de lait, selon le nombre de lactations (h2 = 0,3 et ρ = 0,4) 3 - La sélection sur descendance permet de réaliser une sélection précise, à condition de disposer facilement d'un nombre élevé de descendants par candidat. Par exemple, quand h2 = 0,3 le CD atteint 0,7 avec une trentaine de descendants, contrôlés chacun sur une performance. Cependant, son coût et l'allongement de l'intervalle de génération en limitent l'intérêt : -aux caractère peu héritables (reproduction) -aux caractères non exprimés chez le sexe du candidat (qualités maternelles chez le mâle) -à la sélection de reproducteurs exigeant une précision élevée comme celle des mâles diffusés en insémination artificielle -aux caractères de carcasse, quand la mesure ne peut être réalisée indirectement sans abattage. Le développement de la sélection assistée par marqueurs va progressivement rendre obsolète le testage. La sélection combinant ascendance, gènes aux QTL et éventuellement performances propres du candidat apportera une précision suffisante pour sélectionner précocement les reproducteurs et réduire l'intervalle de génération. La connaissance des performances de leur descendance ne sera plus qu'une information destinée à vérifier et compléter le tri des reproducteurs diffusés. C'est le cas des taureaux laitiers depuis 2010/2011. 5.2.4 – L'intervalle de génération T C'est l'âge moyen des parents à la naissance de leurs produits susceptibles d'être conservés pour le renouvellement. Il mesure l'intervalle (en années et dixièmes, par exemple 4,7 ans) séparant deux états identiques entre deux générations consécutives dans une population. Son calcul nécessite de connaître (figure 4.6) : -l'âge auquel les reproducteurs sont sélectionnés, seules les naissances ultérieures sont susceptibles d'être candidates au renouvellement -la période, début et fin, de naissance de la génération destinée au renouvellement. JP Hallais 53 SELECTION Période de Début de sélection de diffusion la génération naprès sélection Naissance de la génération n PERIODE DE NAISSANCE DE LA GENERATION n+1 Intervalle de génération T Figure 4.6 : Etapes contribuant à l'intervalle de génération Au même titre que les autres paramètres du progrès génétique annuel, T dépend des quatre voies de sélection et de diffusion des reproducteurs de la génération n à la génération n+1. Facteurs de variation de l'intervalle de génération T : 1 - L'espèce : selon ses aptitudes physiologiques à la reproduction, âge à la puberté, rythme de mise-bas, on obtient en moyenne un intervalle T (tableau 4.4) : Espèces Volailles et lapins Porcs Intervalle de génération moyen (années) 1 1,5 à 3 Ovins et caprins 3à6 Bovins 5à9 Equins 10 à 15 Tableau 4.4 Intervalles de générations moyens 2 - La méthode de sélection : quand la sélection a lieu avant l'âge physiologique de mise en reproduction des candidats, elle n'allonge pas l'intervalle de génération. C'est le cas de la sélection sur ascendance, de la sélection individuelle ou sur collatéral chez le porc et les volailles quand elles ont lieu en période d'élevage (croissance, morphologie en vif, efficacité alimentaire, épaisseur de lard dorsal …). Il en est de même avec la sélection, dite génomique, des index SAM des bovins laitiers. Si la sélection a lieu après une première mise en reproduction (qualités maternelles et production laitière), la sélection individuelle allonge l'intervalle de génération. Cependant, c'est la sélection sur descendance, en particulier pour évaluer les qualités JP Hallais 54 maternelles et laitières qui allonge le plus l'intervalle de génération. Il peut atteindre alors le double de celui constaté en sélection individuelle, par exemple 6 à 9 ans pour les taureaux testés, contre 4 ans pour les femelles. 3 - La conduite des reproducteurs : une mise en reproduction précoce (vêlage à 2 ans), accélérée (3 agnelages en 2 ans) et un renouvellement rapide des reproducteurs réduisent l'intervalle de génération. Dans ce dernier cas, l'augmentation du taux de renouvellement entraîne une diminution de l'intensité de sélection. Renouveler rapidement les femelles reproductrices ne présente alors un intérêt que chez les espèces prolifiques, comme dans les élevages de sélection des volailles, lapins et porcs. 5.3 – Interactions entre les paramètres du progrès génétique annuel Les quatre paramètres i, R (A, Â), σA , T sont étroitement liés : -une forte intensité de sélection, en réduisant le nombre de reproducteurs diffusés, peut affecter la variabilité génétique et compromettre le progrès génétique des générations futures, -l'augmentation de la précision, en répétant les mesures sur les candidats et surtout en faisant appel au testage augmente l'intervalle de génération, -le gain de précision recherché avec les stations de contrôle individuel, engendre un coût qui limite le nombre de candidats évaluables et donc l'intensité de sélection. Quand la nature des caractères et leur héritabilité le permet, la sélection individuelle est généralement privilégiée car elle offre le meilleur compromis entre progrès génétique et coût de la sélection. La sélection sur descendance est à réserver à des situations spécifiques comme les caractères non mesurables chez le candidat ou nécessitant une grande précision des index. Elle est appelée à céder sa place à la sélection assistée par marqueurs. Enfin, les caractères zootechniques étant fréquemment reliés entre-eux par des corrélations génétiques, il convient de vérifier l'impact de toute démarche de sélection sur l'ensemble des objectifs de sélection. C'est la mesure de la réponse indirecte à la sélection (formulaire 10). 6 - Limites de la sélection en race pure L'élevage en race pure présente des avantages certains : -l'éleveur dispose d'un choix de races adaptées à ses objectifs de conduite de production, races spécialisées, mixtes, rustiques, -la sélection des races bénéficie d'une organisation collective pour les espèces détenues en base de sélection fermière, JP Hallais 55 -l'amélioration génétique des objectifs de sélection est assurée, -la diversité des races préserve une diversité génétique pouvant présenter un intérêt dans l'avenir. Mais la sélection et la diffusion des reproducteurs intra-race trouve ses limites dans plusieurs domaines : 1-Sa difficulté d'adaptation à l'évolution rapide des conditions économiques est liée aux intervalles de génération. Ainsi, le choix des objectifs de sélection relève de perspectives à moyen terme, ils doivent-être robustes face à l'évolution du contexte technico-économique. 2-Sa dépendance vis à vis des paramètres génétiques : -la sélection des caractères peu héritables manque de précision mais cette difficulté devrait s'estomper avec les avancées de la génomique, -l'amélioration génétique simultanée de plusieurs caractères est lente (une race spécialisée progresse toujours plus vite dans ses objectifs de sélection, moins nombreux qu'en race mixte), cette difficulté est accentuée quand les objectifs de sélection sont liés par des corrélations génétiques défavorables, -la recherche d'une forte intensité de sélection à court terme ou les faibles effectifs de certaines races tendent à appauvrir leur variabilité génétique. JP Hallais 56 5 ème partie : Les croisements Les croisements sont les accouplements entre des reproducteurs d'une même espèce, appartenant à des populations homogènes et génétiquement différentes (races, souches, lignées). La fécondation entre des individus d'espèces ou de genres voisins, comme l’âne avec la jument qui produit la mule, ou encore le canard commun (de Pékin) x canard de Barbarie donnant le mulard producteur de foie gras est appelée hybridation. 1 – Objectifs des croisements 1.1 – Créer ou améliorer une population animale : les croisements à finalité génétique En croisant plusieurs races ou lignées, apportant chacune ses aptitudes, il est possible de créer une souche composite. Elle cumule des caractéristiques héritées de ses parents fondateurs. Par exemple, la race ovine Romane est issue de la race Romanov aux aptitudes de reproduction exceptionnelles, croisée avec la race Berrichon du Cher qui apporte des qualités d'engraissement et de carcasse. Elle remplace et simplifie la production d'agnelles croisées (appelées F1) dans les élevages pratiquant l'auto-renouvellement. Un seul type génétique de reproductrice suffit à produire des agnelles de renouvellement en accouplant une partie du troupeau avec un bélier Romane. Le reste des brebis est destiné à la production d'agneaux de boucherie en les croisant avec des béliers de race bouchère. L'utilisation ponctuelle d'une race améliorée pour des caractères recherchés permet d'accélérer l'évolution génétique d'une race, voire de la remplacer en pratiquant des croisements répétés ou d'absorption. De même, si dans une petite population la variabilité génétique est devenue insuffisante, un croisement avec une race voisine apporte la variabilité génétique indispensable à sa sélection. Un choix judicieux des reproducteurs importés peut lui apporter des gènes d'intérêt. 1.2 – La complémentarité et l'hétérosis des croisements à finalité commerciale Ces deux objectifs sont systématiquement recherchés dans les programmes de sélection et de croisement développés en volailles, porcs ou lapins. Ils peuvent aussi intéresser les producteurs de viande des herbivores, ovins et bovins. 1.2.1– La complémentarité entre les aptitudes des races Dans la plupart des espèces, un antagonisme entre les aptitudes de production de viande et les aptitudes maternelles est constaté. L'extrême est représenté par les animaux de type culard aux qualités maternelles très dégradées. Séparer la sélection des aptitudes d'élevage de celles de production, chacune dans une race que l'on croise ensuite, apporte deux avantages : 1-Les produits croisés bénéficient de la complémentarité entre les qualités d'élevage apportées JP Hallais 57 par la femelle support du croisement et les qualités d'engraissement et de carcasse apportées par le mâle (tableau 5.1). 2-La spécialisation des races parentales sur un nombre limité d'aptitudes sélectionnées, élevage ou viande, permet de réduire le nombre de critères de sélection par race. Le progrès génétique de chaque race sera ainsi plus rapide, chacune dans sa spécialité. Espèces Races maternelles Races paternelles Porcs Large-White lignée femelle, Landrace Français, Meishan Piétrain, Large-White lignée mâle Hampshire Ovins Races rustiques du Massif Central, Île de France, mouton Charollais, Avranchin, Romane Vendéen, Berrichon du Cher Bovins Salers, Gascone, Normande, Montbéliarde, Prim'Holstein Charolais, Limousin, Blonde d'Aquitaine, Blanc Bleu Belge Tableau 5.1 : Exemples de races aux aptitudes complémentaires 1.2.2– L'hétérosis L'hétérosis (H) est l'expression des phénomènes d’interaction entre les gènes qui sont amplifiés avec le croisement de races ou de lignées génétiquement différentes : c'est la supériorité phénotypique moyenne des produits croisés par rapport à la moyenne des performances des populations parentales. L'hétérosis HF1 des F1 de performances moyennes PF1 issus du croisement entre deux populations A et B de performances moyennes PA et PB est : HF1 = PF1 – ½ ( PA + PB ) Sa valeur peut aussi être exprimée en pourcentage de la moyenne parentale afin d'apprécier son importance relative. Application numérique au nombre de porcelets sevrés par portée, selon deux croisements : Landrace (LF) 10,6 x Large White (LW) 10,9 Large White x (LW) 10,9 F1 (LW x LF) 11,4 Meishan (MS) 12,6 F1 (LW x MS) 13,5 HF1 (LW x LF) = 11,4 – ½ (10,9 + 10,6) = + 0,65 porcelet sevré par portée = [+ 0,65 / ½ (10,9 + 10,6)] x 100 = 6,05 % de la moyenne parentale HF1 (LW x MS) = 13,5 – ½ ( 10,9 + 12,6) = + 1,75 porcelet sevré par portée = [+ 1,75 / ½ (10,9 + 12,6)] x 100 = 14,9 % de la moyenne parentale JP Hallais 58 Les facteurs de variation de l'hétérosis sont : 1-Le déterminisme génétique des caractères. Les croisements augmentent l'hétérozygotie des descendants et génèrent un hétérosis d'autant plus élevé que les caractères sont commandés par des gènes soumis à des effets d'intéraction (dominance et épistasie). Ainsi, l'hétérosis varie en sens opposé de l'héritabilité, laquelle dépend de la part des effets additifs dans le déterminisme génétique des caractères (tableau : 5,2). Caractères Héritabilté Précision de la sélection individuelle Hétérosis Intérêt des croisements pour l'hétérosis Reproduction et viabilité Quantités produites Composition des (GMQ, QL) produits et de la carcasse Faible (h2 ≤ 0,2) Moyenne (0,2 < h2 < 0,4) Elevée (h2 ≥ 0,4) Faible Moyenne Elevée Elevé (HF1 de 6 à 20%) Moyen ( HF1 de 4 à 6%) Très faible à nul Elevé Moyen Nul Tableau 5.2 : Hétérosis et intérêt des croisement selon les caractères 2-L'éloignement génétique entre les populations croisées. Le calcul de l'hétérosis du caractère nombre de porcelets sevrés selon les croisements (page précédente) , montre un net avantage à celui réalisé entre les deux races génétiquement les plus différenciées LW x MS. Il atteint environ le double de celui des races européennes LW x LF. 3-La nature du croisement réalisé. Un croisement à deux étages est susceptible d'apporter un supplément d'hétérosis en combinant deux sources complémentaires. C'est le cas de la production de porcs charcutiers issus de mères LW x LF croisées avec des verrats Piétrain. Les terminaux cumulent la composante maternelle de l'hétérosis pour les aptitudes de productivité numérique et l'hétérosis direct des performances d'engraissement, du au fait que les porcs charcutiers soient eux-même croisés. Ainsi le caractère indice de consommation global, qui dépend de la productivité numérique des truies et de l'efficacité alimentaire des porcs charcutiers, cumule les deux effets d'hétérosis. 4-Le sens du croisement. Les aptitudes d'élevage de la femelle support du croisement modifient l'importance de l'effet d'hétérosis. Le croisement mâle Large White x femelle Meishan produit 2,7 porcelets sevrés en plus par mise bas que le croisement inverse mâle Meishan x femelle Large White. Cette différence est due à la composante maternelle supérieure de la race Meishan. 5-Les conditions de milieu sont susceptibles d'influencer l'hétérosis. Quand il est dégradé, la supériorité de viabilité des individus croisés est accentuée par rapport à celle habituellement constatée quand les conditions d'élevage sont maîtrisées. Les facteurs : importance des effets d’interaction selon le déterminisme génétique des caractères (notée « d » écart de dominance) et distance génétique entre les populations croisées (notée « y » différence de fréquence génique entre les deux populations), sont à la base d'une formule permettant d'estimer la valeur de l'hétérosis : HF1 = d . y2 JP Hallais 59 1.3 - Race pure et croisements sont complémentaires Ces deux méthodes d'utilisation des reproducteurs contribuent conjointement au progrès génétique et à l'amélioration des performances. La sélection des races, des lignées ou des souches est un préalable aux croisements, elle apporte le progrès génétique permis par les effets additifs. Les croisements permettent de simplifier la sélection et d'accélérer le progrès génétique en limitant le nombre de caractères sélectionnés dans chaque race. Le produit croisé bénéficie alors des progrès réalisés dans chaque race parentale, c'est la complémentarité et il valorise l'augmentation des performances due aux effets d’interaction ou effet d'hétérosis. 2 – Principaux types de croisements Les deux groupes d'objectifs cités au paragraphe 1 différencient deux familles de croisements : 1-Les croisements à finalité essentiellement génétique (ou continus). Ils sont destinés à améliorer génétiquement ou créer les reproducteurs d'une population sélectionnée. Cette population croisée bénéficie du cumul des aptitudes portées par les parents ainsi que d'un élargissement de sa variabilité génétique. 2-Les croisements à finalité essentiellement commerciale (ou discontinus). Les animaux issus du schéma de croisement sont des produits terminaux, destinés par exemple à l'engraissement et à l'abattage en production de viande. Il faut donc les renouveler à chaque génération, à partir des populations sélectionnées. 2.1 – Croisements à finalités génétiques ou continus 2.1.1- Croisement de métissage (figure 5.1) Race A x Race B F1 x F1 Les premières générations de croisement subissent une sélection sur les caractéristiques morphologiques de la population à créer F2 x F2 F3 x F3 Nouvelle souche ou race La nouvelle souche est sélectionnée comme une race pure Figure 5.1 : Schéma de croisement de métissage Il est à l'origine de nombreuses races actuelles, issues de l'importation de races améliorées Anglaises au cours du X1X ème siècle et croisées avec des populations régionales. Chez les bovins, la Durham a permis de créer la race Rouge des Prés à partir de la Mancelle, JP Hallais 60 on la retrouve aussi dans les origines de la race Normande. De nombreuses races ovines sélectionnées pour la production de viande proviennent de ce type de croisement, par exemple Dishley x Mérinos dans l'obtention de la race Île de France. Depuis, ce type de croisement sert à créer des souches synthétiques ou de nouvelles races. La souche bovine cularde INRA 95 est issue de métissages entre les races bouchères Françaises et le Blanc Bleu Belge. La race ovine Romane (INRA 401) a été créée en croisant la Romanov avec des Berrichons du Cher. La plupart des schémas de sélection et de croisement en volailles, porcs et lapins ont produit leurs propres souches. Les cochettes destinées à approvisionner les élevages de production sont fréquemment issues de croisements entre les races Large White, Landrace Français, Meishan. 2.1.2 - Croisement d'amélioration Par l'utilisation ponctuelle de mâles d'une race sélectionnée pour des caractères d'intérêt, on souhaite améliorer une race sans en dénaturer les caractéristiques. Une application a été tentée avec des taureaux Red Holstein utilisés en race Montbéliarde pour en améliorer les aptitudes laitières. La réduction des aptitudes de mixité de la Montbéliarde a remis en cause ce croisement. Chez les chevaux de Selle Français, l'utilisation d'étalons de races de selle d'origines étrangères est observé. La sauvegarde de races menacées d'extinction par manque d'effectif et une trop forte consanguinité peuvent justifier ce type de croisement à condition d'en gérer rigoureusement l'application. Le risque est de perdre l'originalité génétique la population menacée si elle est absorbée par la race supposée élargir sa variabilité génétique. 2.1.3 -Croisement d’absorption ou de substitution (figure 5.2) Femelles A x mâles B Femelles 50% B x mâles B Femelles 75% B x mâles B Femelles 87,5% B x mâles B Femelles 93,7% B x mâles B L'absorption d'une race demande 10 à 20 ans selon les espèces Femelles 96,9% B x mâles B Race A absorbée par la race B Figure 5.2 : Schéma de croisement d'absorption de la race A par la race B (% gènes B) JP Hallais 61 Ils procèdent par l'utilisation, à chaque génération, de reproducteurs mâles d'une race répondant aux objectifs de l'éleveur. A l'issue de 5 à 6 générations, la race initiale a été absorbée et présente des caractéristiques similaires à celles de la race recherchée. Ce croisement permet de faire une transition progressive dans la reconversion d'un élevage, par exemple lait – viande, ou mixité – spécialisation. Mais appliqué à l'échelle d'une race, celle-ci est alors menacée de disparition. Dans la période 1970/1990, de nombreuses races ont ainsi été absorbées : la Frisonne française par la Holstein, plusieurs races porcines locales par le Large White... Des programmes de conservation ont alors été mis en place afin de préserver la diversité génétique entre les races et au sein des races. En effet, près de la moitié des races répertoriées sont considérées à petits ou très petits effectifs et sont exposées au risque de consanguinité, voire d'extinction. Elles peuvent présenter un intérêt dans d'autres contextes économiques ou détenir des gènes d'intérêt valorisables dans les grandes races avec le développement des technologies du génome (gènes de résistance aux maladies, de qualité diététique des produits …). 2.1.4 - Croisement alternatif L'utilisation de mâles de 2 à 3 races différentes dans un même troupeau est parfois constatée, particulièrement en élevage ovin. Cette pratique entretien un peu d'hétérosis chez les animaux croisés. Cependant, les objectifs poursuivis et la gestion des accouplements ne sont pas toujours clairement définis, alors que ce type de croisement demanderait une conduite rigoureuse de la diversité des femelles présentes en même temps dans l'élevage. 2.2 - Croisements à finalités commerciales ou discontinus 2.2.1 - Croisement à un étage On l'appelle croisement simple, de première génération ou industriel. Dans les élevages producteurs de viande, l'accouplement de deux races complémentaires : femelles avec des qualités d'élevage dominantes x mâles sélectionnés pour les aptitudes bouchères, produit des F1, tous destinés à l'engraissement. Le tableau 5.1 présente quelques exemples de races utilisées dans ce type de croisement Ce croisement, apparemment très simple, permet de bénéficier de la complémentarité entre la productivité numérique apportée par la race maternelle et la production de viande de la race paternelle. De plus, les produits croisés bénéficient d'un hétérosis direct sur la viabilité et la croissance. Les limites de ce type de croisement tiennent à la nécessité de destiner un part parfois importante du troupeau au renouvellement des femelles support du croisement. Les aptitudes d'élevage étant prioritairement sélectionnées dans race maternelle, les mâles de race pure en surnombre n'obtiennent pas une bonne valorisation bouchère. De plus, l'hétérosis n'est pas optimisé puisque sa composante maternelle n'est pas exploitée (les reproductrices ne sont pas elles-mêmes croisées). Principe du croisement à un étage, appliqué à un élevage ovin, de caractéristiques suivantes : (figure 5.3) JP Hallais 62 200 brebis de race rustique ou herbagère (notée A) Productivité numérique 140 % avec 50 % de femelles parmi les agneaux sevrés Taux de renouvellement 17 % Le nombre N de brebis accouplées en race pure A est fonction du besoin de renouvellement. L'équation suivante permet de calculer N : N x 1,4 agneau / brebis x 50% de femelles = 200 brebis présentes x 17 % de renouvellement N x 1,4 x 0,5 = 200 x 0,17 N = 49 brebis accouplées en race pure, soit 25 % du troupeau. Il reste 200 – 49 = 151 brebis à accoupler en croisement avec des béliers de race B spécialisée pour la production de viande La proportion de femelles A conduites en croisement est fonction de leur productivité numérique et du taux de renouvellement. Les bovins, pénalisés par leur faible productivité numérique, nécessitent d'accoupler environ 45 % des femelles en race pure pour assurer le renouvellement d'un troupeau allaitant. Seulement une petite partie des vaches laitières peut être croisée avec une race bouchère pour obtenir une meilleure valorisation des veaux destinés à l'engraissement. Le choix des vaches accouplées en croisement doit considérer leurs aptitudes de vêlage ainsi que la facilité de naissance des veaux produits par les taureaux de la race bouchère. Femelles de la race A (200) Meilleures reproductrices (49) Béliers A 34 agnelles AxA x Autres femelles (151) x Béliers B 34 mâles AxA Renouvellement 211 agneaux AxB Engraissement Figure 5.3 : Schéma de croisement à un étage appliqué à un troupeau ovin (effectifs de brebis) 2.2.2 - Croisement à deux étages (figure 5.4) Le premier étage du croisement consiste à produire des femelles F 1 aux aptitudes d'élevage dominantes qui sont accouplées avec des mâles C sélectionnés pour les aptitudes de production de viande. Les produits terminaux sont tous engraissés. JP Hallais 63 Selon le nombre de races utilisées, on parle de croisement à 3 voies : femelles F1 (A x B) x mâles C croisement à 4 voies : femelles F1 (A x B) x mâles F1 ( A x C) ou (C x D) Les firmes de sélection porcine et avicole ont créé des souches synthétiques qui apportent autant de variantes dans les programmes de croisement. Femelles A x Mâles B Femelles F1 x Les mâles C sont soit -une race spécialisée C -croisés A x C ou C x D Mâles C Terminaux engraissés Figure 5.4 : Principe du croisement à deux étages Ce type de croisement présente plusieurs avantages : 1-La complémentarité entre d'une part, les aptitudes d'élevage et d'adaptation à des conduites variées des femelles F1 (A x B) et d'autre part, les aptitudes de production de viande des mâles C. 2-Les produits terminaux bénéficient de la composante maternelle de l'hétérosis pour la productivité numérique et de l'hétérosis direct pour leur viabilité et leur croissance. 3-Géré à l'échelle d'une espèce, ce croisement permet de concentrer les efforts de sélection (et les coûts associés) sur un petit nombre de reproducteurs détenus dans des élevages de sélection. En porcs, les multiplicateurs produisent les femelles F 1 et les mâles C destinés à renouveler les élevages de production de porcs charcutiers. En volailles, les producteurs reçoivent directement les poussins terminaux, le sélectionneur – multiplicateur réalise le premier étage de croisement et le deuxième est réalisé chez des accouveurs. L'ensemble est organisé selon une structure pyramidale de la sélection – multiplication production (figure 5.5). Figure 5.5 : Organisation en porcs Effectif de truies par niveau Le sélectionneur (S) détient et sélectionne les souches et renouvelle les élevages de multiplication Le multiplicateur (M) réalise le premier croisement et renouvelle les élevages de production S M environ 7 % Le producteur (P) réalise le deuxième croisement et engraisse les porcs charcutiers JP Hallais moins de 2 % P 64 plus de 90 % Les programmes de sélection et de croisement ont supplanté l'utilisation des races pures en production porcine (figure 5.6), avicole et en lapins. Mais le mouvement d'animaux, depuis la sélection jusqu'à la production, exige un statut sanitaire irréprochable en sélection et en multiplication. De plus, cette organisation est très complexe à mettre en œuvre dans un seul élevage. Ainsi en ovins, l'INRA a créé la race Romane (Romanov x Berrichon du Cher) dont les caractéristiques proches des F1 supprime le premier étage de croisement. Son utilisation facilite la conduite du troupeau. L'éleveur n'a plus qu'à réaliser le deuxième étage du croisement, brebis Romane x béliers de race bouchère et à renouveler ses brebis Romane en race pure (paragraphe 2.2.1 ci-dessus). Large White x lignée femelle Landrace français Cochettes F1 x Verrats Piétrain ou Large White lignée mâle x Piétrain Porcs charcutiers Figure 5.6 : Schéma type de croisement à deux étages en espèce porcine NB : Selon les schémas développés par les firmes de sélection, la production des cochettes bénéficie de l'exploitation des gènes d'hyperprolificité et/ou de croisements avec la race Chinoise Meishan. De plus, elles ne sont plus porteuses du gène de sensibilité à l'halotane, éradiqué dans les lignées maternelles. De nombreuses variantes sont proposées parmi les verrats utilisés en 2ème croisement, avec le Duroc, le Hampshire, d'autres Landraces qui permettent aux firmes de se démarquer de la concurrence. JP Hallais 65 6 ème partie : Dispositif Génétique Français (DGF) La loi sur l'élevage de 1966 a été abrogée au 01/01/2007 et laisse place au DGF. Il organise la sélection collective des races détenues en base de sélection fermière. Les entreprises de sélection (porcs, volailles, lapins) développent une sélection autonome avec des souches et lignées exclusives. 1 - Pilotage du DGF Il revient à France Génétique Elevage (FGE) Cette structure inter-professionnelle nationale regroupe : les fédérations nationales des éleveurs de bovins, ovins et caprins, les chambres d'agriculture, le contrôle des performances, France UPRA sélection, l'insémination artificielle (UNCEIA) l'INRA et l'institut de l'élevage (IE) au titre de membres associés. Ses mission concernent l'organisation de la sélection, la diffusion des reproducteurs et la sécurité sanitaire. En pratique, elle définit les objectifs de sélection, les conditions de mise en œuvre du contrôle de performances, la gestion du système informatique (SIG) et la circulation des données. FGE gère les financements de l'amélioration génétique. L'état est chargé des missions de sécurité sanitaire, de la gestion de la diversité raciale, des attentes sociétales et éthiques et de la santé publique. Il est assisté à titre consultatif par la Commission Nationale d'Amélioration Génétique (CNAG), avec un comité par espèce. 2 - Les organismes généraux 1- L'INRA réalise le traitement de l'information et le calcul des index. Il conseille FGE dans la définition des objectifs de sélection, les protocoles d'évaluation et la gestion des populations. 2 -L'Institut de l'Elevage (IE) apporte son soutien technique dans la mise en œuvre de la sélection et réalise des recherches appliquées. 3-Les Organismes de sélection (OS), anciennement UPRA, sont soumis à un agrément ministériel, conditionné à leur représentativité équilibrée des partenaires de la sélection et des financeurs. Ils représentent une race, parfois une espèce (caprins). Leurs missions sont de : -orienter et représenter la race -définir les objectifs de sélection -gérer la variabilité génétique et l'adaptation territoriale des races en fonction des attentes des filières -certifier l'appartenance des animaux à la race pure -tenir à jour les livres généalogiques. JP Hallais 66 4-Le contrôle de performances est attribué par appel d'offre pour une période de cinq années par le Ministère et avis de la CNAG. La priorité est accordée aux structures interdépartementales 5-Les établissements de l'élevage, départementaux ou inter-départementaux, ont le monopole de l'identification et de l'état civil (parentés). 3 - L'insémination animale Une entreprise d'insémination doit faire l'objet d'une déclaration avec : -N° SIRET, n° de vétérinaire chargé du suivi du centre de production ou de stockage de la semence, liste des techniciens habilités. -Engagement à respecter les règles de traçabilité, de marche en avant et d'inventaire des doses, ainsi que la rédaction d'un bulletin d'insémination suivie de la transmission des informations au SIG. Un reproducteur peut être utilisé à condition d'être inscrit au livre généalogique et indexé avec un CD > 0,5 en races laitières, ou avoir fait l'objet d'une évaluation en station ou d'un testage en races bouchères. Tout technicien titulaire du Certificat d'Aptitude aux Fonctions de Technicien d'Insémination (CAFTI) peut inséminer en toute concurrence. Le CAFTI est délivré sur titre aux vétérinaires ou par réussite à une évaluation nationale. L'éleveur peut acquérir des doses du monde entier et réaliser lui-même l'insémination de ses propres animaux en respectant les règles de tout centre d'IA. Les zones à faible densité d'élevage bénéficient d'un service garanti avec compensation du surcoût par l'état. 4 - La circulation de l'information du SIG INRA IE OS Entreprises de sélection des mâles d'IA Centre national de traitement informatique CTI (indexation) Centres régionaux informatiques CRI Etablissements de l'élevage Contrôle de performances Identification Performances Elevages JP Hallais 67 Documents d'élevage Fiches individuelles PERSPECTIVES : Niveaux d'accès à l'information et perspectives de sélection Le développement des technologies associées à la génomique permet d'accéder plus facilement à de nouvelles données. Elles s'appliquent à l'identification des séquences codantes du génome (génotypage) mais surtout à leur expression mesurée par le phénotypage. La mesure du phénotype, traditionnellement associée à l'expression des caractères zootechniques d'intérêt, peut être développée en amont de cette approche et remonter jusqu'aux molécules issues de la traduction des gènes : ARNm, protéines et métabolites cellulaires ou circulants. Ainsi, il est envisageable de passer de la sélection ciblée pour quelques critères choisis en fonction des objectifs de sélection (GMQ, quantité de lait...), à un balayage systématique, aussi complet que possible et sans a priori de tous les indicateurs mesurables. Cette nouvelle approche, appelée phénotypage à haut débit, doit permettre : 1-D’accéder à de nouveaux critères de sélection (composition fine des produits en acides gras et protéines, résistance aux maladies ...). 2-D'identifier des eQTL (expressionnels) situés en colocalisation avec des gènes d'intérêt et parfois communs à plusieurs espèces. Ils contrôlent la variabilité d'origine génétique de l'expression des gènes. Leur connaissance permet d'affiner le choix des QTL d'intérêt utilisables dans la SAM et aussi le transfert de connaissances entre races ou espèces (identification des mutations responsables du caractère culard des bovins par analogie au génome de la souris). 3-De mieux comprendre les chaînes métaboliques impliquées dans l'expression des caractères d'intérêt. 4-De proposer des bio-marqueurs d'aide à la conduite d'élevage, alimentation, fertilité, santé... ou de valorisation des produits comme la tendreté de la viande. De plus, l'enregistrement systématique (si possible automatisé) de tout caractère zootechnique mesurable sur l'animal et ses produits, ou bien lors d'échographies, dissections et autopsies vient enrichir cette banque de données. Enfin, ces phénotypages doivent être appliqués à des populations de référence, d'effectifs suffisants pour déceler les mécanismes fins des voies métaboliques impliquées dans l'expression du génome et par la suite, établir des relations phénotypes/génotypes précises en vue de leur sélection. Tableau synthétique ci-après JP Hallais 68 NIVEAUX D'ACCES A L'INFORMATION ET PERSPECTIVES DE SELECTION Voies Niveaux d'accès Nature de l'information Technologies Gènes majeurs Séquence nucléotidique structurale Gènes aux QTL Marqueurs SNP Puces à ADN eQTL Sélection assistée par marqueurs Génétique quantitative Polygènes Contrôle de performances BLUP appliqué au modèle animal Index  des caractères quantitatifs ARNm Transcription des gènes Puces à ADN Séquençage à haut débit Traduction des ARNm Analyses par des méthodes spectrales Génomique Phénotypage expressionnel Protéines à haut débit Métabolites Modifications Analyses par des cellulaires, du postméthodes spectrales sang, de traductionnelles l'urine Caractères d'intérêt Phénotypage économique zootechnique Caractères élémentaires Autres caractères JP Hallais Sondes à ADN Exemples d'applications Performances et Index SAM marqueurs génétiques Anomalies géniques et sélection de gènes d'intérêt Connaissance des voies métaboliques : nouveaux critères de sélection et marqueurs biologiques pour la sélection et la gestion des élevages Sélection depuis 2010/2011 de 3 races bovines laitières Molécules des produits et sécrétions Analyse moléculaire Composition fine des produits et bio-marqueurs Toute expression zootechnique des caractères mesurables Contrôle des performances étendu à tout caractère mesurable Anatomie Échographies, Physiologie et dissections, autopsies anomalies géniques 69 Compréhension de la variabilité des réponses à la sélection des critères d'intérêt VOCABULAIRE ET ABREVIATIONS ADN = Acide désoxyribonucléique : chaîne de nucléotides contenue dans les chromosomes, il porte l'information génétique. Allèles : différents gènes, généralement issus de mutations d'un gène ancestral, pouvant occuper un même site sur un chromosome, leur liste constitue la série allélique du locus. ARNm = Acide ribonucléique messager : copie obtenue par transcription de la séquence nucléotidique d'un gène. Il migre dans le cytoplasme en franchissant la membrane du noyau où il est traduit par les ribosomes lors de la synthèse des protéines. Autosexage : utilisation de gènes portés par le chromosome X, codant l'aspect extérieur des volailles. Ils permettent de différencier, dès la naissance, les poussins mâles des femelles. Autosome : chromosomes présents par paires identiques dans les cellules somatiques, ce sont tous les chromosomes sauf les chromosomes sexuels X et Y. BLUP = Best linear unbiaised predictor = meilleur estimateur linéaire non biaisé : méthode de calcul des index selon le modèle d'estimation linéaire. Elle est corrigée, en moyenne, des effets des facteurs de milieu mesurés et identifiés qui sont communs à un groupe d'animaux (n° de mise-bas ou de lactation, troupeau à condition qu'il soit connecté ...). Caractère : élément de description du phénotype, pouvant porter sur -l'aspect des individus pour les caractères non quantitatifs (cornage, couleur …) -leurs productions, de déterminisme quantitatif (croissance, taux protéique du lait …) Caryotype : Représentation des chromosomes d'une cellule que l'on classe par paires homologues selon l'aspect. Il permet d'observer les anomalies chromosomiques. Chromosomes : c'est le support de l'hérédité. Ils sont par paires homologues (2n) dans les cellules somatiques ou à un exemplaire de chaque paire dans les cellules sexuelles. Leur nombre est une caractéristique de chaque espèce. Code génétique : correspondance entre les triplets de nucléotides de l'ARNm et l'ordre d'assemblage des acides aminés de la protéine synthétisée lors de la traduction. Codominance : expression conjointe des deux allèles chez l'hétérozygote. Son phénotype est la juxtaposition des phénotypes des deux homozygotes. Phénotype [A1 et A2] pour le génotype A1//A2. Corrélation génétique : liaison entre les valeurs génétiques additives A pour deux caractères quantitatifs n°1 et n°2. Elle est mesurée par le coefficient de corrélation R (A1, A2) et permet de prévoir la réponse indirecte à la sélection d'un caractère sur l'autre caractère corrélé. Formulaire n°4 JP Hallais 70 Coefficient de détermination CD : indicateur de la précision d'une estimée (index). C'est le carré du coefficient de corrélation entre les vraies valeurs génétiques A et leurs estimées  ; CD = R2 (A, Â). Il accompagne l'index et permet de calculer son intervalle de confiance. Formulaires n°7 et n°8 Complémentarité entre deux caractères : cumul d'aptitudes antagonistes chez un produit croisé, par exemple qualités d'élevage + qualités de production de viande, lesquelles sont sélectionnées séparément chez leurs parents. Connexion génétique : lien génétique établit entre différents élevages qui détiennent des descendants issus de parents communs. Elle sert à mesurer l'effet du facteur de milieu élevage ou troupeau par le BLUP. Consanguinité : résultat de l'accouplement entre des individus apparentés par des ancêtres communs. Critère de sélection : caractère mesurable sur lequel porte le calcul d'index et la sélection. Crossing-over : échange réciproque de fragments de chromatine entre deux chromosomes d'une même paire. Diploïde : cellule à 2 n chromosomes. Les cellules sexuelles, à n chromosomes sont haploïdes. Dominance : interaction entre deux allèles. Un gène dominant masque l'expression d'un allèle récessif chez l'hétérozygote. Effet additif : effet d'un gène pour un caractère quantitatif, transmis entre générations avec le gène. Le cumul des effets additifs chez un individu est sa valeur génétique additive A. Effets non additifs : effets d'interaction entre les gènes qui résultent de leur assemblage dans le génotype. On distingue la dominance entre allèles et l'épistasie entre gènes non allèles. Epistasie : interaction entre gènes non allèles, mais codant pour un même caractère. Un gène épistatique masque l'expression d'un gène situé sur un autre locus. Eucaryote : cellule dont le noyau est délimité par une membrane. Les bactéries, sont des procaryotes. sans noyau, Expressivité d'un gène : variation de son intensité d'expression selon les individus. Free martinisme : Anomalie génitale d'une femelle bovine, jumelle d'un mâle, qui la rend généralement stérile. Fréquence génique ou génotypique : proportion exprimée par rapport à génotypes d'une population. Gène : séquence d'ADN responsable de la synthèse d'une protéine. JP Hallais 71 tous les gènes ou Gène majeur : gène dont l'action importante permet d'identifier l'effet et le génotype d'un individu d'après l'observation de son phénotype. Génome : matériel génétique d'un individu. Génomique : étude du génome pour dresser l'inventaire des gènes, leurs fonctions et leur expression. Génotype : pour un individu, assemblage des gènes à un locus ou pour un caractère. Haplotype : ensemble des gènes situés sur un même chromosome et transmis aux générations suivantes sans crossing-over. Héritabilité : part moyenne de la variance phénotypique σ2P due à la variance génétique additive σ2A . Elle est notée : h2 = σ2A / σ2P . C'est aussi en moyenne, la part de la supériorité phénotypique ΔP due à la supériorité génétique additive ΔA d'un groupe d'animaux sélectionnés : h2 = ΔA / ΔP. Formulaire n°3 Hétérosis : supériorité phénotypique moyenne des produits croisés par rapport à des races parentales. la moyenne Index : estimée  de la valeur génétique additive A pour un caractère quantitatif. Sa précision est chiffrée par le coefficient de détermination CD. Intensité de sélection (i) : supériorité moyenne des animaux sélectionnés, par rapport à la moyenne de leur population d'origine ; sa valeur dépend du taux de sélection (p), elle est fournie dans une table en nombre d'écarts-types. Intervalle de génération : âge moyen des parents à la naissance de leurs produits susceptibles d'être conservés pour le renouvellement. Létale : anomalie responsable de la mort de l'individu porteur. Lignée : sous-ensemble d'une population sélectionné pour des aptitudes particulières (lignées hyperprolifiques porcines). Locus : emplacement occupé par un gène sur un chromosome. Un locus ne porte qu'un seul allèle par chromosome. Marqueur génétique : caractéristique observable (aspect) ou analysable (microsatellites et SNP) que l'on peut associer à la présence d'un gène dans un haplotype. Le marqueur permet de sélectionner indirectement un gène d'intérêt. Méiose : formation des gamètes à n chromosomes à partir de cellules souches à 2 n chromosomes. Microsatellite : marqueur de courte séquence nucléotidique, dont les allèles sont différenciés selon le nombre de répétitions de leur séquence élémentaire. JP Hallais 72 Mutation : changement d'une base dans la séquence d'un gène. Nucléotide : éléments des acides nucléiques (ADN ou ARN), différenciés par leurs bases azotées. Leur enchaînement détermine le code génétique. Objectif de sélection : caractère(s) pour le(s)quel(s) on recherche une amélioration génétique. Quand il n'est pas mesurable, il peut être sélectionné indirectement par un critère de sélection corrélé PCR = Polymerase chain reaction : multiplication d'un fragment d'ADN par copies identiques. Elle permet de disposer d'une quantité suffisante d'ADN pour effectuer une analyse à partir d'un échantillon. Pénétrance d'un gène : fréquence d'expression pour un génotype donné. Si 90 % des a//a sont de phénotype [a] alors la pénétrance de (a) est égale à 0,9. Phénotype : expression des caractères pour un individu. On l'appelle valeur phénotypique pour un caractère quantitatif. Pléiotropie : action d'un gène sur des caractères n'ayant pas de liens fonctionnels entre-eux. Le gène p au locus de cornage des caprins produit des homozygotes p//p mottes et stériles. Polygènes : nombreux gènes aux effets individuels très faibles, dont le cumul pour un caractère quantitatif contribue à la valeur génétique additive A. Leur effet global chez un individu est estimé par les index. Programme de sélection : enchaînement de méthodes de sélection, ascendance + performances du candidat + descendance + … Progrès génétique par génération : augmentation de la valeur génétique additive moyenne d'une population entre deux générations successives. Divisé par l'intervalle de génération, il produit le progrès génétique annuel. Formulaire n°9 Puce à ADN : support de fragments d'ADN permettant de détecter la présence de séquences nucléotidiques complémentaires dans un échantillon. QTL = Quantitative trait locus : locus pouvant être occupé par des gènes aux effets quantitatifs intermédiaires entre ceux des polygènes et ceux des gènes majeurs. Leur sélection est réalisée grâce aux marqueurs SNP. Répétabilité des performances pour un caractère (ρ): elle est mesurée par le coefficient de corrélation entre les performances successives des mêmes individus. Elle intervient dans le calcul du CD en contrôle individuel. Réponse à la sélection : progrès génétique réalisé par la sélection. Elle est directe si le critère est aussi l'objectif de sélection ; elle est indirecte si le critère n'est pas l'objectif de sélection mais lui est génétiquement corrélé. Formulaire n°10 JP Hallais 73 SAM = Sélection assistée par marqueurs : elle combine dans un index synthétique (I SAM) l'index polygénique  et la supériorité génétique aux QTL influençant le caractère considéré. Séquence : ordre d'enchaînement des nucléotides. Son analyse s'appelle le séquençage. SNP = Single nucléotide polymorphism : séquence d'ADN modifiée pour une seule paire de bases. Les SNP, très nombreuses et bien réparties sur le génome, servent de marqueurs dans sa cartographie et dans la SAM. Somatique : cellule à 2 n chromosomes. Sonde à ADN : séquence nucléotidique complémentaire de celle à détecter dans le génome. Souche : population généralement issue de croisements puis conduite en population fermée (souches INRA 95 en bovins culards, ovine INRA 401 ; souches des sélectionneurs de porcs, volailles et lapins). Taux de sélection : noté p, c'est le rapport entre le nombre de candidats sélectionnés et le nombre de candidats à la sélection. Translocation : transfert d'un fragment de chromosome sur un autre chromosome d'une paire différente (4- / 14+ chez le porc). Quand l'ensemble d'un chromosome est transloqué, on parle de fusion centrique. Valeur génétique additive (A) : somme des effets additifs portés par les polygènes pour un caractère. Elle est estimée par les index (Â) et se transmet, en moyenne, pour moitié aux descendants. A = ½ A père + ½ A mère Variance (σ2) : paramètre statistique d'un caractère quantitatif mesurant la dispersion de ses valeurs autour de la moyenne. Sa racine carrée est l'écart-type (σ). JP Hallais 74 FORMULAIRE N°1 : Paramètres statistiques descriptifs d'une variable quantitative Notations usuelles de la valeur génétique additive A : moyenne A - estimée  - variance σ2A - écart -type σA Formules générales pour une variable X de valeurs xi décrivant une population de N individus Paramètre de position centrale de la distribution : la moyenne X= 1 ∑ xi N 1 σ2X = N ∑ ( xi – x )2 l'écart-type σX = √var (X) Paramètres de dispersion autour de la moyenne : la variance Propriétés de la distribution normale de moyenne X et d'écart-type σX (figure ci-dessous): -Symétrie par rapport à la moyenne -Points d'inflexion de la courbe à + 1 σX et – 1 σX -L'intervalle X ± 1 σX regroupe 68 % des individus -L'intervalle X ± 2 σX regroupe 95 % des individus -2σ -1σ x +1σ 68 % +2σ 95 % Application : pour l'index INEL des bovins laitiers, de moyenne 0 et d'écart-type ≈ 20 points, 68% des individus ont un index compris entre - 20 et + 20 points (± 1σ) 95 % des individus ont un index compris entre - 40 et + 40 points (± 2 σ) 2,5 % de la population a un index supérieur à + 40 points ( ≥ 2 σ) JP Hallais 75 N°2 : Paramètres statistiques descriptifs de la relation entre 2 variables quantitatives Formules générales pour deux variables X et Y de paramètres : X , σX et Y , σY NB : Les formules sont exprimées de façon générale pour X et Y. Il suffit de remplacer X et Y par les variables correspondantes en génétique (tableau ci-dessous) Formules de génétique Variables Variables représentées par X représentées par Y Corrélation entre A et P : R (A, P) A P Précision de la sélection : R (A, Â) A  Corrélation génétique entre 2 caractères A1et A2 : R (A1, A2) A1 A2 Estimation linéaire de A sur P : b (A, P) A P Coefficient de corrélation linéaire R(X, Y) R(X, Y) = Cov (X, Y) / (σX . σY) Il mesure le sens et l'importance de la liaison entre les variations de X et de Y. Sa valeur est comprise dans l'intervalle : -1 ≤ R(X, Y) ≤ +1 -proche de 0 : X et Y varient de façon indépendante, les variables ne sont pas corrélées -proche de 1 (-1 ou +1) : les variations de X et de Y sont liées. Le signe est positif si elles varient dans le même sens, il est négatif si elles varient en sens inverse. Coefficient de régression linéaire b (X, Y) b (X, Y) = Cov (X, Y) / (σ2X) Il permet d'estimer les valeurs de Y en fonction de celles de X quand les deux variables sont corrélées. NB : en génétique, b (A,P) est le « a » de l'équation y = ax + b. Il des index en contrôle individuel. JP Hallais 76 intervient dans le calcul Mode d'interprétation de la corrélation et de la régression en génétique: Ai b (A, P) Â1 P1 Pi Le nuage de points décrit la distribution d'une population de N individus pour lesquels les valeurs génétiques additives Ai et les performances Pi sont connues. -La corrélation entre les valeurs génétiques et les performances R (A, P) est d'autant plus élevée que la dispersion du nuage de points autour de la droite de régression est faible. Si le coefficient R (A, P) = 1 le nuage de points se confond avec la droite de régression, à l'opposé, quand R (A, P) est proche de 0, le nuage de points se disperse et tend vers un cercle. Dans la figure ci-dessus, sa forme en ellipse est caractéristique d'une corrélation moyenne. L'orientation de la droite de régression, de coefficient b (A, P), indique que le signe de la corrélation est positif car A et P varient dans le même sens. -Le coefficient de régression permet d'estimer la valeur génétique additive A 1 d'un individu n°1 par son index Â1 à partir de la connaissance de sa performance P1 : Â1 = b (A, P) x P1 avec b (A, P) = Cov (A, P) / (σ2P) coefficient de régression de A sur P Cependant, cette estimation comporte une incertitude, la performance P 1 pouvant être obtenue par plusieurs individus de valeurs génétiques vraies différentes. Sa précision est chiffrée par le coefficient de détermination CD = R 2 (A, Â) carré du coefficient de corrélation entre les valeurs génétiques vraies A et leurs estimées  (formulaire n° 7). 3 – Coefficients d'héritabilité ( h2 ) Ils mesurent la part moyenne de la variabilité phénotypique (différences de performances entre les individus) due à la variabilité génétique additive (différences de valeurs génétiques additives). Première formule : h2 = σ2A / σ2P C'est la part moyenne de la variance phénotypique σ2P qui est d'origine génétique additive σ2A . D'après les composantes de σ2P = σ2A + σ2I (variance d'interaction) + σ2E (variance due au milieu E ou M) : h2 = σ2A / (σ2A + σ2I + σ2E) JP Hallais 77 Deuxième formule : h2 = b (A, P) = cov (A, P) / σ2P C'est le coefficient de régression de A sur P. Il permet d'estimer la valeur génétique  à partir d'une performance P :  = h2 . P Troisième formule : h2 = R2 (A, P) = [cov (A, P) / (σA . σP)]2 C'est le carré du coefficient de corrélation entre A et P. Il traduit la précision de l'estimation des valeurs génétiques d'après les performances. Quatrième formule : h2 = ΔA / ΔP C'est l'efficacité moyenne de la sélection, mesurée par la réponse à la sélection ΔA obtenue pour une supériorité phénotypique ΔP en sélection individuelle. Les valeurs de h2 sont comprises dans l'intervalle : 0 ≤ h2 ≤ 1 si h2 ≤ 0,2 le caractère est peu héritable si h2 ≥ 0,45 le caractère est héritable NB : à partir de la connaissance du coefficient h2 et de σP il est possible de calculer σA : σA = √h2 . σP 4 – Coefficient de corrélation génétique entre deux caractères Pour deux caractères n°1 et n°2, de valeurs génétiques additives notées A1 et A2, le coefficient de corrélation génétique Rg (A1, A2) a pour formule : Rg (A1, A2) = cov (A1, A2) / (σA1 . σA2) Il permet de calculer la réponse indirecte à la sélection d'un caractère n°1 sur un caractère n°2 corrélé. (formulaire n°10) 5 – La répétabilité entre les performances successives P et P' des mêmes individus, notée rhô (ρ) C'est le coefficient de corrélation R (P, P') entre les performances P et P' successives des individus d'une population : ρ = cov (P, P') / (σP . σP') ρ pondère l'augmentation du coefficient de détermination CD en contrôle individuel selon le nombre de mesures disponibles par candidat à la sélection (formulaire n° 7). 6 – Standardisation des index pour la moyenne et l'écart-type Pour un individu d'index I et une population de moyenne I et d'écart-type σI, l'index standardisé Is de moyenne Is et d'écart-type σIs est obtenu selon la formule : JP Hallais 78 Is = Is + [σIs (( I - I ) / σI)] ( I - I ) centre les valeurs des index I autour de la moyenne . Is est alors écart en + ou en - à la moyenne. exprimé en La division par l'écart-type des index σI réduit la distribution des index à un écart-type égal à 1. En multipliant la valeur centrée et réduite (( I - I ) / σI) par σIs l'étendue des index est alors standardisée selon la valeur de σIs recherchée (1, 8 , 10 , 30... ) Enfin, en ajoutant la moyenne Is (0 ou 100 selon les caractères), le résultat aboutit à des index centrés sur la moyenne standardisée. Exemple : pour le caractère poids à 210 j des bovins allaitants avec σI = 7 kg, un veau d'index en écart à la moyenne I – I = + 2,2 kg aura un index édité et standardisé pour une moyenne = 100 et un écart-type = 10 points : Index standardisé Is = 100 + [10 x (2,2 / 7)] = 103 points Cette présentation facilite le classement et la sélection : -un animal améliorateur aura un index > 100 -16 % des animaux de la population ont un index > 110 (formulaire n°1) 7 – Coefficient de détermination CD Le CD est un indicateur de la précision des index et il permet aussi de calculer celle de la méthode de sélection utilisée R (A, Â). CD = R2 (A, Â) et 0 ≤ CD ≤ 1 La précision augmente avec la valeur du CD, elle devient satisfaisante pour des valeurs ≥ 0,5 à 0,7 Les formules du CD selon les principales méthodes de sélection sont : -Sélection individuelle avec k performances connues par candidat et ρ la répétabilité des performances : CD = k h2 / [1 + ( k - 1) ρ] si k = 1 alors CD = h2 -Sélection sur ascendance avec les CD des index du père et de la mère : CD = ¼ ( CD père + CD mère) sa valeur ne peut dépasser 0,5 JP Hallais 79 -Sélection sur descendance, avec n descendants par candidat à la sélection : CD = n h2 / [4 + (n – 1) h2 ] 8 – Intervalle de confiance d'un index (IC) L'intervalle de confiance d'une estimée a pour formule : IC =  ± a √1 - CD x σA L'étendue de l'intervalle de confiance dépend du coefficient a, lui-même fonction du seuil de confiance 1 – α de l'estimée. (tableau ci-dessous) 1 – α est la probabilité que la vraie valeur génétique additive de l'individu indexé soit comprise dans l'intervalle de confiance calculé. Son complémentaire α est le risque que la vraie valeur génétique additive de l'individu indexé ne soit pas incluse dans l'intervalle de confiance, par sous ou sur-estimation. Seuil de confiance Valeur du 1 – α (%) coefficient a 68 1 90 1,65 95 1,96 Par exemple, avec les données du formulaire n° 6 : -au seuil de risque α = 0,1 ou seuil de confiance 1 – α = 0,9 - = 103 points obtenu avec un CD = 0,3 (h2 = 0,3 et k =1 performance connue) -σA= 10 points IC = 103 ± 1,65 √1 – 0,3 x 10 = 103 ± 13,8 points d'index Ainsi, la vraie valeur génétique additive du veau a une probabilité égale à 0,9 d'être comprise dans l'intervalle ]103 – 13,8 ; 103 + 13,8[ soit ]89,2 ; 116,8[. Cet index est peu précis, l'étendue de son intervalle de confiance est de ± 1,38 σA. Le veau indexé peut aussi bien être améliorateur que détériorateur. Quand la sélection porte sur un groupe de N individus, l'intervalle de confiance de l'index moyen du lot (IC) est plus faible et s'établit selon la formule IC = IC individuel / √N L'intervalle de confiance (1 – α = 0,9 ) de l'index moyen d'un lot de 16 veaux sélectionnés dans les conditions de l'exemple ci-dessus (CD = 0,3 et IC = ± 13,8 points) est égal à : IC = ± 13,8 / √16 = ± 3,5 points Le risque pris dans l'estimation de la valeur génétique moyenne du lot devient alors très faible ( IC = ± 1/3 σA). Par contre, le classement des 16 candidats au sein du lot reste peu précis. JP Hallais 80 9 – Formules d'estimation du progrès génétique annuel En premier lieu, il convient d'identifier les voies impliquées dans l'étude : -de la sélection des individus de la génération Gn, de supériorité génétique ΔA -de la transmission de leur supériorité génétique à la génération G n + 1 avec un progrès génétique ΔG. On distingue 4 voies possibles : Gn : mâles femelles 2 3 1 Gn+1: mâles 4 femelles Le progrès génétique par génération : Pour une voie, ΔA = i x R(A, Â) x σA avec : -i = intensité de sélection, sa valeur est lue dans une table en fonction de p le taux de sélection. (p = nombre de candidats sélectionnés / nombre de candidats à la sélection) -R(A, Â) = √CD c'est la précision de la sélection -σA = écart-type génétique du caractère. Quand il n'est pas connu, on exprime le résultat en nombre d'écarts-types (sans unités) ou il peut éventuellement être calculé si l'on connaît l'écart-type phénotypique σP et h2 . Alors σA = √h2 x σP Pour 4 voies, le progrès génétique par génération ΔG : ΔG = ¼ ( ΔA1 + ΔA2 + ΔA3 + ΔA4) avec ΔAi = contribution de la voie n° i au progrès génétique ΔG ou ΔG = ¼ Σ (i x R(A, Â) x σA) pour les 4 voies Le progrès génétique annuel : ΔG annuel = ΔG par génération / T moyen avec L'intervalle de génération moyen T = ¼ (T1 + T2 + T3 + T4) Ti = intervalle de génération de la voie n°i Attention, le calcul suivant serait faux : ΔG annuel = (ΔA1 / T1) + (ΔA2 / T2) + (ΔA3 / T3) + (ΔA4 / T4 ) JP Hallais 81 10 – Réponses directe et indirecte à la sélection La sélection d'un critère n°1 produit une réponse à la sélection : -Directe sur le critère lui-même et sur l'objectif de sélection quand il est le critère de sélection. Par exemple la sélection sur le gain moyen quotidien (GMQ) produit une réponse directe sur l'objectif améliorer la vitesse de croissance pondérale. -Indirecte sur un autre critère (critère n°2) ou un objectif de sélection différent, qui lui sont génétiquement corrélés. Ainsi, la sélection sur le GMQ a une réponse indirecte favorable sur la réduction de l'indice de consommation, (mesure de l'efficacité alimentaire pour réaliser la croissance). Exemple chez les bovins laitiers : La sélection d'un lot de génisses de renouvellement porte sur un critère n°1 quantité de lait avec une supériorité génétique moyenne ΔA (QL) = + 400 kg. La réponse à la sélection de QL est directe sur l'objectif améliorer la productivité laitière. Elle est indirecte et défavorable sur le taux protéique (TP), du fait de la corrélation génétique entre les deux caractères Rg (QL, TP) = - 0,5. Le calcul de la réponse indirecte peut être abordé selon deux approches : 1-A partir du coefficient de régression linéaire b (A2, A1) c'est l'estimation linéaire de ΔA2 en fonction de la supériorité génétique ΔA1. ΔA2 = b x ΔA1 2-Avec le coefficient de corrélation génétique Rg (A1, A2) ΔA2 = ΔA1 x Rg (A1, A2) x (σA2 / σA1) Calcul appliqué à la production laitière avec σA(TP) = 1,3 g/kg et σA(QL) = 584 kg : ΔA(TP) = ΔA(QL) x Rg (QL, TP) x (σA(TP) / σA(QL)) ΔA(TP) = 400 x (-0,5) x (1,3 / 584) = - 0,445 g/kg La sélection du lot de génisses, exclusivement sur QL ( + 400 kg de lait), s'accompagne d'une diminution moyenne de leur niveau génétique pour le taux protéique (-0,445 g/kg). JP Hallais 82 Principales sources documentaires La rédaction de ce manuel s'appuie sur l'ouvrage de référence : JUSSIAU R, MONTMEAS L, PAPET A, Amélioration génétique des animaux d'élevage, bases scientifiques, sélection et croisements, educagri ed, 2010, 322 p. Un approfondissement peut être recherché auprès des organismes et leurs sites internet : Cours supérieur d'amélioration génétique des animaux domestiques (CSAGAD) : www.inapg.inra.fr/dsa/ger-genetique/csagat Institut de l'élevage : www.inst-elevage.asso.fr Institut National de la recherche agronomique (INRA) : www.inra.f Institut technique de l'aviculture (ITAVI) : www.itavi.asso.fr Institut du porc (IFIP) : www.ifip.asso.fr Les Haras nationaux : www.haras-nationaux.fr Union nationale des coopératives agricoles d'élevage et d'insémination animale (UNCEIA) : www.unceia.fr Des comptes rendus de journées d'étude sont accessibles en ligne : Journées de la recherche équine (Les Haras nationaux) Journées de la recherche porcine (INRA, IFIP) Journées Rencontres Recherches Ruminants (INRA, IE) Ce cours est destiné aux apprenants. En dehors de l'accord écrit de son auteur, toute diffusion ou publication par des organismes de formation, des formateurs, des particuliers ou des entreprises est interdite. De la même façon, toute parution en téléchargement ou en consultation sur tout autre site que celui ToursFondettes agrocampus est interdite. JP Hallais 83