PARAMÈTRES DE CONTRÔLE DE LA TROMPETTE PENDANT LE
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PARAMÈTRES DE CONTRÔLE DE LA TROMPETTE PENDANT LE
Stage de Master 2 – Rapport bibliographique PARAMÈTRES DE CONTRÔLE DE LA TROMPETTE PENDANT LE JEU Mesure simultanée des paramètres de jeu in vivo sur différents trompettistes Stage de Master 2 – Lionel Velut Avril 2012 à Septembre 2012 Maître de stage : Christophe Vergez (LMA, CNRS UPR 7051) Encadrement : Christophe Vergez, Philippe Guillemain Master Mécanique, Physique et Ingénierie – Ecole Centrale Marseille, Université d’Aix-Marseille Option Acoustique – 2ème année Ecole Centrale Marseille – 3ème année Parcours Acoustique Industrielle Sons et Environnement 6 Mai 2012 Table des matières Introduction 3 1 Fonctionnement des cuivres 1.1 Modèle des lèvres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2 Couplage entre lèvres et instrument . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3 Les pistons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 5 6 7 2 Paramètres de contrôle de la trompette 2.1 Pression dans la bouche, impédance du conduit vocal 2.2 Caractéristiques mécaniques des lèvres . . . . . . . . 2.3 Débit moyen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.4 Appui sur les pistons . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Mesures à réaliser 3.1 Impédance de l’instrument . . . . . . . . . . . 3.2 Pressions et impédance du conduit vocal . . . 3.3 Estimation du débit moyen . . . . . . . . . . 3.4 Mesures sur les lèvres . . . . . . . . . . . . . . 3.4.1 Force d’appui sur les lèvres . . . . . . 3.4.2 Caractéristiques mécaniques des lèvres 3.5 Suivi de la course des pistons . . . . . . . . . 3.6 Pistes pour le protocole expérimental . . . . . Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 9 9 9 10 . . . . . . . . 11 11 11 12 13 13 14 14 14 16 Introduction Les trompettistes ont de nombreux paramètres à disposition pour contrôler le son qu’ils produisent. Si le fonctionnement des instruments de type "cuivres" est aujourd’hui assez bien connu [2], les relations entre les paramètres de contrôle et leur influence sur le son a peu été étudiée, ou de manière plus parcellaire. L’objectif de ce stage est de mesurer in vivo et simultanément les paramètres nous semblant importants, afin de comprendre leurs relations avec le son généré (ceci peut-être en fonction du trompettiste). Pour cela on choisira différents paramètres à mesurer, et des méthodes de mesure limitant au maximum la gêne causée au musicien. Cette série de mesures permettra d’une part d’identifier les différences de technique entre divers musiciens (dont Ibrahim Maalouf, connu pour avoir une technique de jeu et une sonorité particulières 1 ), et d’autre part de déterminer les éléments invariants, nécessaires pour produire un son de trompette. Ces informations ont, en plus, un intérêt pédagogique : elles peuvent améliorer la compréhension de certains gestes et habitudes techniques par les musiciens et les élèves. Ces données peuvent servir d’assise à des modèles physiques de trompette, et également servir de référence pour confronter des résultats de simulation à la réalité. Enfin, des bouches artificielles sont de plus en plus utilisées en laboratoire pour s’affranchir des contraintes d’un sujet humain : l’acquisition de paramètres de jeu variés est un premier pas vers des bouches artificielles plus évoluées, reproduisant plus fidèlement toutes les actions du musicien. Certains paramètres sont impossibles à mesurer durant le jeu car le protocole est long et/ou intrusif ; par exemple, la mesure des caractéristiques mécaniques des lèvres par les méthodes classiques semble irréalisable durant la performance. En effet, la contrainte principale, dans les mesures que nous souhaitons réaliser, est de perturber au minimum le musicien : si les conditions de jeu de celui-ci sont trop différentes de ses conditions habituelles et induisent une gêne, les mesures cherchant à caractériser la technique particulière de chaque trompettiste seront faussées et inexploitables. Cela nécessite des méthodes de mesures (éventuellement indirectes) qui seront présentées dans le présent rapport. Certaines parties techniques sont ou seront faites avec l’aide de Nicolas Pansieri, stagiaire d’IUT de mesures physiques dans l’équipe durant les 10 premières semaines de mon stage. Dans ce rapport bibliographique, on présentera d’abord l’état des connaissances sur le fonctionnement des cuivres, avant de détailler les paramètres de contrôle qu’on veut mesurer. Puis on expliquera les moyens qu’on se propose de mettre en œuvre pour réaliser les mesures. 1. Voir par exemple le titre "Beirut" disponible à l’adresse http://www.youtube.com/watch?v=_MM-I9LAQZE 3 Figure 1 – les différentes parties d’une trompette en Sib (source : Musikia.com) 4 Chapitre 1 Fonctionnement des cuivres Le son d’un instrument de musique acoustique est généré par le couplage d’un excitateur (peau de tambour, anche, archet...) et d’un résonateur (colonne d’air, corde...). Le système composé par ces deux éléments transforme l’énergie fournie par l’instrumentiste en une onde acoustique. La trompette, et les vents en général, se trouvent dans la catégorie des instruments auto-entretenus : le couplage entre l’excitateur (lèvres) et le résonateur (colonne d’air contenue dans la tubulure) transforme une énergie continue (la pression statique que fournit la respiration du musicien) en vibration [1]. On est face à une onde acoustique produite par un mécanisme non linéaire, on peut donc étudier le fonctionnement d’un instrument à vent comme un système dynamique non linéaire. Les instruments de la famille des cuivres ont une spécificité : l’excitateur est constitué par les lèvres du musicien (anche labiale). Le contrôle de l’instrument repose donc sur la source d’énergie continue que fournit le musicien, mais aussi sur le contrôle musculaire que celui-ci a sur ses lèvres, qui dépend de ses particularités physiologiques et de son entraînement physique ("masque musculaire"). En faisant agir les muscles faciaux, le trompettiste peut modifier les caractéristiques physiques, et donc la réponse mécanique, de ses lèvres. Notons que ce contrôle permet en particulier la maîtrise du débit d’air et de la pression statique en entrée de cet oscillateur. Plus en amont, la forme du conduit vocal peut changer, ce qui modifie ses caractéristiques acoustiques : cela pourrait être utilisé lors du jeu de trompette, comme c’est le cas pour le saxophone [3] et le trombone [4] mais cela n’a pas encore été montré clairement (malgré des études préliminaires [14]). Enfin, on peut modifier le résonateur en appuyant sur les pistons, ce qui allonge plus ou moins la colonne d’air, et en modifie donc les fréquences de résonance. 1.1 Modèle des lèvres On peut modéliser l’effet d’une anche (en roseau ou labiale) par l’action d’une valve à un degré de liberté (transformation de la pression statique de la bouche en pression acoustique oscillante). Les lèvres d’un joueur de cuivre correspondent géométriquement à une valve "outward" [5] : la valve s’ouvre quand la pression dans la bouche est supérieure à celle de l’embouchure, ce qu’on écrit (+,–) (cf. Figure 1.1). Ce modèle, pourtant cohérent avec la morphologie de l’anche labiale, n’est pas exact : on a constaté [6], pour certaines notes, une fréquence de résonance des lèvres supérieure à la fréquence du jeu, ce qui est un comportement incompatible avec ce modèle ; d’autre part, des observations en caméra haute vitesse [7] montrent aussi un mouvement vertical, caractéristique d’une valve coulissante (+,+) ; ce modèle de valve est compatible avec les mesures de fréquence. On peut donc modéliser des lèvres comme une combinaison d’anches (+,-) et (+,+) avec une prédominance de chaque type selon la hauteur et la nuance de jeu [7]. Notons qu’une valve "inward" (–,+), qui se ferme quand la pression de la bouche est supérieure à celle de l’embouchure, accepte aussi des fréquences de résonance des lèvres supérieures à la fréquence de jeu, mais ne correspond pas à la géométrie des cuivres (plutôt celle des bois à anche simple). Les modélisations mathématiques de la dynamique de ces valves sont nombreuses dans la littérature [5] [6]. 5 Figure 1.1 – Les différents types de valves modélisant les anches d’instruments à vent : "inward" (–,+) "porte battante amont" (a), "outward" (+,–) "porte battante aval" (b) et (+,+) "porte coulissante" (c) (sur les schémas, la bouche est à gauche et l’instrument à droite). Source : [8]). 1.2 Couplage entre lèvres et instrument Le phénomène d’auto-oscillation des instruments à vent est bien connu : l’onde de pression émise par les lèvres se propage dans la colonne d’air de l’instrument et, après réflexion au niveau du pavillon (rupture d’impédance importante) revient à l’embouchure, ce qui tend à fermer les lèvres [9]. Ce mécanisme bouclé "informe" les lèvres de la fréquence à laquelle vibrer pour être en accord avec la résonance de l’instrument. Ceci est d’autant plus efficace que la pression acoustique est élevée soit, en supposant le débit constant de part et d’autre des lèvres, que l’impédance acoustique à l’entrée de l’instrument Z(w) = P (w)/U (w) est importante (où P (w) est la pression et U (w) le débit à l’entrée de la trompette). Le couplage aéroacoustique entre la bouche et l’instrument est étudié dans la thèse de Christophe Vergez [10]. L’écoulement dans la bouche et entre les lèvres est supposé laminaire et incompressible, et il devient turbulent à l’entrée dans l’embouchure où on néglige la récupération de pression (cuvette de l’embouchure de très grande dimension par rapport au canal entre les lèvres). La transformation de l’écoulement d’air et de la pression statique dans la bouche en onde acoustique suit donc un mécanisme non linéaire complexe. Des modèles de celui-ci ont été proposés en mécanique des fluides [11]. En première approximation, on peut considérer que les fréquences de résonance de l’impédance correspondent aux fréquences des différents registres de jeu (harmoniques de l’instrument) bien qu’en toute rigueur, cela soit modifié par le couplage non linéaire avec l’excitateur [12]. Les fréquences de résonnance de l’impédance d’entrée suivent assez précisément la série harmonique, à l’exclusion du 1er pic (note pédale) qui n’est pas utilisé dans le jeu normal de la trompette (voir Fig. 1.3). La légère inharmonicité de l’instrument est compensée par le musicien, qui arrive à "jouer juste" sur un instrument a priori faux : on s’intéressera à la manière de compenser. Il convient de noter que, pour les nuances les plus fortes, la propagation acoustique dans le résonateur ne peut plus être considérée comme linéaire [13] : c’est ce qui provoque le changement de timbre (le "cuivrage") caractéristique de ces instruments. Ceci implique des modifications du modèle de fonctionnement de la trompette. Dans le cadre des mesures, on veillera à rester dans le domaine linéaire du résonateur. 6 1.3 Les pistons Pour pouvoir jouer toutes les notes de la gamme occidentale, les trompettes sont équipées de pistons qui, lorsqu’ils sont enfoncés, allongent la colonne d’air de l’instrument en la faisant passer par une dérivation (appelée "coulisse") plus ou moins longue (Fig. 1.2) : ceci modifie la courbe d’impédance d’entrée (diminution d’un ton, 1/2 ton et un ton 1/2 respectivement pour le 1er, 2eme et 3eme piston). Les combinaisons des 3 pistons, couplées aux changements de registre (commandés par l’excitateur) permettent d’atteindre toutes les notes de la gamme. La longueur de chaque coulisse est fixée 1 pour optimiser la justesse, quel que soit le registre utilisé. On étudiera les conséquences du jeu avec ou sans allongement de la coulisse. Le temps de mouvement du piston, quoique court, ne permet pas a priori de considérer le changement de longueur de tube comme instantané : la durée du mouvement est nettement supérieure à la période du son. Il y a donc un transitoire entre le trajet "long" (comprenant la coulisse) et le trajet "court" pendant lequel les deux circuits communiquent, via des orifices de taille variant avec le mouvement du piston. Or, les trompettistes arrivent à faire une transition sans à-coups lors de l’appui du piston, même durant le jeu legato. Une étude de l’évolution des paramètres au moment des mouvements des pistons peut s’avérer intéressante pour comprendre les phénomènes qu’implique cet évènement non stationnaire. Figure 1.2 – Schéma de principe d’un piston. Source : Wikimedia Commons 1. à l’exception de la coulisse du 3ème piston, mobile, qu’on allonge pour jouer le B3 et le C4 7 Figure 1.3 – Module de l’impédance d’entrée de la trompette en Sib Yamaha YTR 1335 utilisée pour les expériences, en position 000 (tous pistons levés). Le 1er pic vers 80Hz n’apparaît que partiellement sur cette mesure préliminaire. 8 Chapitre 2 Paramètres de contrôle de la trompette Ce chapitre passe en revue les principaux paramètres de contrôle dont le trompettiste dispose pour émettre et modifier le son. 2.1 Pression dans la bouche, impédance du conduit vocal La pression dans la bouche est un des paramètres de contrôle cruciaux dans la pratique de la trompette : elle est la source d’énergie que le système bouclé oscillateur-résonateur transforme en énergie acoustique, et son bon dosage est déterminant pour la production du son. Les pressions amont et aval de l’anche labiale sont gouvernées par 2 impédances acoustiques : l’impédance de l’instrument ZT rp et celle du conduit vocal ZCV [14]. L’impédance de l’instrument est caractéristique de celui-ci (pour une position de pistons donnée) ; mais le conduit vocal contient un certain nombre d’éléments mobiles (langue, palais mou, cordes vocales et glotte en général) dont les positions respectives sont susceptibles de modifier l’impédance acoustique en amont des lèvres. Certains trompettistes (Ibrahim Maalouf en particulier) disent utiliser consciemment ces mouvements pour modifier le timbre de leur son. Chen et al concluent (de manière réservée) que ces mouvements pourraient être utilisés par les trompettistes dans les registres aigus [14]. Ce contrôle du jeu instrumental en modifiant le conduit vocal est avéré pour certains modes de jeu du trombone [4] et du saxophone [3]. 2.2 Caractéristiques mécaniques des lèvres La particularité des cuivres vient du fait que la partie mobile de l’oscillateur est une partie du corps, les lèvres : à ce titre, le musicien peut modifier très rapidement les caractéristiques mécaniques des lèvres, en particulier leur fréquence de résonance. Les lèvres sont particulièrement soumises à 3 contraintes qui modifient la réponse mécanique : la tension des muscles faciaux (contrôlée ou due à une crispation parasite), la force d’appui de l’embouchure sur les lèvres, et les contraintes dues aux pressions dans la bouche et dans l’embouchure. Ces contraintes modifient profondément le fonctionnement de l’oscillateur (amortissement, raideur, géométrie) et ont donc une influence cruciale sur le son produit [16]. Savoir maîtriser cette fréquence de résonance (par l’équilibre entre la tension des muscles faciaux, l’appui de l’embouchure et la pression imposée dans la bouche) est crucial pour l’apprentissage de l’élève trompettiste : c’est ce qui lui permet de sélectionner les registres de son instrument, en couplant ses lèvres avec un mode acoustique (concordance des fréquences de résonnance). 2.3 Débit moyen Le débit d’air dans la trompette (à ne pas confondre avec le débit acoustique) est évidemment l’un des paramètres systématiquement cités par les trompettistes qui évoquent leur manière de jouer, en pa9 rallèle avec la pression dans la bouche. Selon la formation et les styles de musique joués, les trompettistes contrôlent (et réduisent) plus ou moins leur débit d’air : la mesure de ce paramètre et la comparaison avec le discours des trompettistes à ce sujet peut s’avérer très intéressante pour les musiciens. Malgré cela les exemples sont assez rares dans la littérature : citons par exemple Fréour et col. [15] qui ont comparé différents moyens de mesurer ce débit. 2.4 Appui sur les pistons Les pistons permettent à la trompette d’être chromatique. Le repérage des positions respectives de chacun des 3 pistons nous intéresse en particulier pour étudier les transitions entre 2 positions : en effet, le mouvement du piston n’est pas instantané et crée des modifications instationnaires de la géométrie de l’instrument (trous qui se bouchent pendant que d’autres s’ouvrent). Une trompette étant dotée de 3 pistons, il y a 8 combinaisons possibles (comme presque tous les cuivres à piston). 10 Chapitre 3 Mesures à réaliser Dans ce chapitre, on fait état de nos premières réflexions relatives aux mesures à réaliser et les moyens à mettre en oeuvre. On souhaite effectuer toutes les mesures de paramètres simultanément, afin de pouvoir ensuite analyser les évolutions des uns par rapport aux autres. On procèdera donc à l’acquisition synchrone de caractéristiques de l’instrument, de paramètres physiques propres au musicien et au jeu, des variables acoustiques (pressions). On garde bien sûr un enregistrement du son rayonné par la trompette pendant les mesures, qui permettra éventuellement des analyses du timbre. Les mesures d’impédance d’entrée de la trompette sont réalisées au préalable, dans toutes les géométries utilisées pour le jeu. 3.1 Impédance de l’instrument On mesurera l’impédance d’entrée : Zin = PT rp (w)/UT rp (w) de la trompette, pour chaque combinaison de pistons (PT rp (w) et et UT rp (w) étant la pression et le débit acoustique à l’entrée de l’embouchure). Pour les 2 doigtés correspondant aux notes B3 et C4 (en ut), on dédoublera la mesure : dans ces configurations, en effet, il faut mesurer l’impédance lorsque la coulisse de 3ème piston est dans sa position de repos, mais aussi dans la position assurant la justesse de ces notes (coulisse tirée d’environ 20mm et 28mm respectivement pour C4 et B3, ce qui allonge la colonne d’air de 40mm et 56mm respectivement). La mesure d’impédance de l’instrument est réalisée avec le pont d’impédance développé dans ce but par le Laboratoire d’Acoustique de l’Université du Maine et le Centre de Transfert de Technologie du Mans [17]. Celui-ci permet la mesure de l’impédance d’entrée de tout circuit acoustique qui lui est relié. Le travail d’Alexis Guilloteau lors de son stage de Master [19] dans l’équipe a permis de déterminer un protocole optimal de mesures et de développer des outils fiables d’analyse des résultats. 3.2 Pressions et impédance du conduit vocal Pour mesurer les caractéristiques de la colonne d’air, on utilisera le travail précédemment effectué sur le saxophone dans l’équipe [3]. La pression acoustique dans la bouche (identique à celle du conduit vocal PCV ), celle dans l’embouchure PT rp et les impédances respectives ZT rp et ZCV de l’instrument et du conduit vocal sont liées : on peut en effet considérer le débit constant à travers les lèvres, soit UCV = UT rp . En partant des définitions des impédances : ZCV (w) = PCV (w) −UCV (w) et ZT rp (w) = On peut obtenir l’impédance du conduit vocal : ZCV = −PCV .ZT rp PT rp 11 PT rp (w) UT rp (w) La mesure de la pression interne de la bouche est compliquée par la nécessité de placer un capteur de pression dans la bouche en gênant le moins possible le musicien, et sans endommager le capteur (humidité, coups de langue, dents...). De nouveau, on envisage de s’inspirer des expériences menées sur le saxophone : Le capteur Endevco 8507C utilisé sera placé au bout d’un capillaire flexible, aboutissant dans la bouche du musicien (en passant par la commissure des lèvres pour minimiser la gêne). Il faudra s’assurer que le diamètre du capillaire est suffisant pour garantir une bande passante suffisante (0 – 4kHz) mais reste suffisamment faible pour ne perturber ni les lèvres du musicien qui l’enserrent, ni les caractéristiques du conduit dans lequel il mesure : en effet, l’impédance acoustique de ce tube sonde doit rester très élevée devant celle de l’instrument, car elle est montée en parallèle et ne doit pas la perturber (modification des conditions de jeu). On peut dimensionner la plage de mesure de pression statique dans la bouche en se basant sur une large campagne expérimentale [15] qui a mesuré des pressions allant de 1 à 10 kPa. Il faudra faire la mesure de pression dans l’embouchure de manière totalement similaire à la mesure dans la bouche (capteur Endevco 8507C équipé d’une sonde capillaire). Deux capteurs de pression identiques (capillaires identiques et de même longueur, distance équivalente de part et d’autre des lèvres...) permetteront que les fonctions de transfert h(w) des dispositifs de mesure de pression s’annulent lors du calcul de l’impédance du conduit vocal : PT rp (w).h(w) PT rp (w) = PCV (w).h(w) PCV (w) Afin d’avoir une représentation temps-fréquence de l’évolution de l’impédance du conduit vocal (plus exactement, de l’évolution du rapport des impédances échantillonné aux multiples de la fréquence de jeu), on utilisera les outils de traitement de signal développés dans le travail sur le saxophone de Guillemain et al [3]. Le masque de Gabor permet en effet, aux fréquences multiples de la fondamentale du son qu’on étudie, de trouver la fonction de transfert entre les deux impédances acoustiques. On aimerait compléter l’étude du conduit vocal en plaçant une caméra endoscopique miniaturisée dans la bouche pour étudier les divers mouvements : langue, gorge etc. qui sont les causes probables des changements d’impédance du conduit vocal. Ce type d’observation, plus qualitative, serait plus facile à mettre en regard avec le discours des musiciens vis a vis de ce qui se passe dans leur bouche. À notre connaissance, l’imagerie endoscopique n’a pas encore été mise en œuvre pour la trompette, cependant de nombreuses observations de cordes vocales de chanteurs[24] [25] et même de saxophonistes [26] semblent un bon point de départ pour placer l’endoscope et exploiter les résultats. Les résultats pourraient être mis en relation avec les prises IRM de Kaburagi et col. [22] qui donnent un panel d’images net du conduit vocal pendant le jeu. Cependant, on ne dispose pas pour l’instant du matériel nécessaire, et l’aide d’un ORL est incontournable pour manipuler et exploiter au mieux l’endoscope. 3.3 Estimation du débit moyen Le capteur de débit (ou de vitesse) devra être adapté aux conditions d’une trompette (air humide, vitesses faibles) et être de dimensions suffisamment faibles pour ne pas perturber l’écoulement, avec un temps de réponse suffisamment court pour suivre au mieux les transitoires des actions du musicien. Là encore, on dimensionne la plage de mesures en se basant sur les mesures précédentes [15] donc pour un débit de 30 a 600 cm3/s. Cet article utilise un anémomètre à hélice inséré dans la coulisse d’accord de la trompette, dont l’inertie semble trop importante pour mesurer les phases transitoires et les petites valeurs de manière totalement satisfaisante. La position perturbant au minimum l’écoulement est sans doute dans la branche de pavillon de la trompette, large et facile d’accès (Fig. 3.1) : les débits envisagés s’y traduisent par des vitesses moyennes de 0,04 à 3,5 m/s. L’air y est, du reste, moins humide que dans le reste de l’instrument. On a envisagé (en discutant avec C. Pinhède, M. Pachebat et D. Mazzoni, chercheurs du LMA) différentes technologies 12 d’anémomètre : ceux à hélice semblent être assez encombrants et présenter une trop grande inertie, les tubes de Pitot sont inadaptés aux vitesses prévues, et les fils chauds sont bien trop fragiles pour une instrumentation embarquée et un air humide. On ne peut pas envisager un suivi de traceurs (aérosols dans l’écoulement). Les anémomètres à boule chaude Air Velocity Sensors 12D et 24D proposés par Wimesure semblent avoir les caractéristiques requises (petite taille, robustesse, plage de mesure, vitesse de réaction) [18]. Pour évaluer le débit de l’air, à partir de la vitesse centrale de l’écoulement, on propose (en première hypothèse) l’approximation d’une conduite cylindrique (il s’agit en réalité d’un tronçon de cône d’angle 2,9˚). L’écoulement reste laminaire dans les 20 derniers cm de l’instrument ; plus loin du pavillon, le nombre de Reynolds dépasse les 2000 et le régime laminaire n’est plus assuré. A 20cm dans la branche du pavillon, on peut calculer (à vitesse maximale) : Re = u.L = 2300 ν (Où Re est le nombre de Reynolds et u, L et ν respectivement la vitesse caractéristique de l’écoulement, sa dimension caractéristique (soit le diamètre du tube), et la viscosité cinématique de l’air à 20˚C) On fait l’hypothèse consistant à approcher l’écoulement par un écoulement de Poiseuille où on mesure la vitesse centrale (donc maximale) de l’écoulement à l’aide du capteur situé au milieu du tuyau. On pourrait donc, grâce à un résultat classique de mécanique des fluides, évaluer la vitesse moyenne de l’écoulement vmoy = vmesure /2 et le débit par : vmesure ∗S Φ= 2 où S est la section du tube à hauteur de la mesure. Ces hypothèses seront validées par un étalonnage à l’aide d’un débitmètre externe et une source d’air comprimé. Figure 3.1 – Anémomètre à boule chaude envisagée, et principe du montage non intrusif prévu sur la trompette 3.4 3.4.1 Mesures sur les lèvres Force d’appui sur les lèvres On souhaiterait mesurer la force d’appui du trompettiste en adaptant la méthode utilisée par Petiot et al [20] sur un bugle : en intercalant un court tube d’adaptation entre l’instrument et l’embouchure (Fig. 3.2), coulissant librement dans la trompette et en installant un capteur de force (Force Sensitive Resistance) entre cette pièce et la trompette, on mesurera la force d’appui de l’embouchure sur les lèvres. Par rapport au bugle, pour lequel le "tuyau d’adaptation" est inclus dans la facture de l’instrument (il permet l’accordage), il faudra prendre garde à ne pas allonger la colonne d’air outre mesure (cet allongement doit être compensable en modifiant l’allongement de la coulisse d’accord de la trompette, située à l’autre extrémité de la branche d’embouchure). 13 Figure 3.2 – Montage envisagé pour mesurer la force d’appui de l’embouchure sur les lèvres 3.4.2 Caractéristiques mécaniques des lèvres On souhaiterait aussi pouvoir mesurer l’impédance mécanique des lèvres du musicien pendant le jeu : cela semble à première vue difficile car la méthode standard de mesure d’impédance implique une plaque, fixée à une tête d’impédance et reliée à un pot vibrant, posée sur les lèvres [21] ; cependant, on étudie la possibilité d’utiliser l’embouchure comme plaque de transfert : le problème étant que les vibrations du système de mesure risquent de perturber sérieusement le musicien. On peut également envisager un système ou un capteur sensible (type jauge de contrainte FSR, ou accéléromètre miniature) fixé aux lèvres [23] pour apprécier le mouvement des lèvres durant le jeu : il faut cependant bien garder en tête la volonté de minimiser la perturbation du musicien : dans cette optique, la fixation du capteur sur la lèvre et le passage du câble seront à réfléchir attentivement. Enfin, une récente publication utilisant un "électrolabiographe" (électroglottographe modifié) pour la mesure de la conductivité des lèvres pour estimer la surface des lèvres en contact, donne une bonne perspective pour acquérir des informations sur le mouvement des lèvres [27] et pour éventuellement remonter à leurs caractéristiques. 3.5 Suivi de la course des pistons Afin de suivre les modifications des paramètres et des variables (pressions, débit etc...) lors des changements de notes utilisant les pistons, on veut suivre leur trajectoire. Une étude similaire, utilisant des capteurs optiques, a déjà été réalisée sur le suivi des doigtés de flûte traversière [28]. S’il s’avérait que ces capteurs n’étaient pas adaptés aux pistons (dont la course est supérieure à celle d’une clé de flûte), on envisage aussi une autre solution : les pistons peuvent être considérés comme des ressorts simples, on peut donc déduire leur position de la force d’appui du doigt du musicien, qu’on peut mesurer avec des jauges de contraintes (FSR) peu onéreuses et simples à mettre en oeuvre. Une rapide mesure préliminaire indique une force de l’ordre de quelques dizaines de Newtons, incluant les effets dynamiques (vitesse du doigt frappant le piston). Cependant, les frottements viscoélastiques du piston (lubrifié), le choc du doigt sur le piston et l’hysteresis propres à ces capteurs de force sont à prendre en compte pour avoir une estimation précise de la position du piston. 3.6 Pistes pour le protocole expérimental On envisage déjà plusieurs expériences pour acquérir les données pendant des phases de jeu aussi variées que possible : on voudrait suivre l’évolution des paramètres selon la nuance de jeu, la fréquence, et le timbre que le trompettiste cherche à faire ressortir. On étudiera aussi les transitions entre les notes. – Pour suivre l’évolution des paramètres de jeu selon la fréquence et la nuance, on se basera du travail de Fréour et al [15] qui fait jouer 3 notes (grave, médium, aigüe) à 3 nuances différentes (pp, mf et ff), en ajoutant peut-être quelques notes selon les besoins qui se dégageront. 14 – Pour suivre les évolutions du timbre, on envisage de demander une ou plusieurs notes tenues durant lesquelles le musicien fait évoluer le timbre, ou la même note répétée à la même nuance mais avec des timbres différents. – Le suivi des transitions pendant le mouvement des pistons peut se faire en enregistrant des gammes chromatiques et des arpèges joués legato à différentes vitesses. Il faudra optimiser les séquences de note pour maximiser le nombre de transitions différentes entre les combinaisons de pistons, sur différents registres (ce pour quoi on peut s’inspirer de certaines méthodes de trompette visant à améliorer la vitesse des doigts [29]). – On aimerait aussi mesurer les déviations de fréquences qu’un trompettiste est capable de produire "à la bouche", sans manipuler les pistons (pitch bend). On demandera donc sûrement aux sujets de faire varier la fréquence pour un registre (et un doigté) donné, en analysant les déviations par rapport aux fréquences de résonance de l’instrument données par son impédance d’entrée. 15 Bibliographie [1] S.J. Eliott, J.M. Bowsher : "Regeneration in Brass Wind Instruments", Journal of Sound and Vibration 83 (2), pages 181–217. [2] M. Campbell : "Brass Instruments as we know them Today", Acta Acustica United With Acustica 90, pages 600–610, 2004. [3] P. Guillemain, C. Vergez, D. Ferrand, A. 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