N° 17, Décembre 2007 Lycée international 1 rue des Pontonniers
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N° 17, Décembre 2007 Lycée international 1 rue des Pontonniers
Lycée international 1 rue des Pontonniers 67081 STRASBOURG N° 17, Décembre 2007 1 Sommaire Editorial P. 3 Actualité Du fric pour les pays en difficulté économique P. 5 Dossier : Environnement Al Gore, prix Nobel, ou comment l'écologie est revenue à la mode… Une Vérité qui Dérange - An Inconvenient Truth Le grenelle de l’environnement : la France se réveille (?) Un jour sur Terre P. 7 P. 8 P. 9 P. 11 Opinions Le sport, l'Education nationale et le Ministère de la jeunesse, de la santé et des sports font mauvais ménage Le vrai cinéma Publicité pour Lindt (Novembre 2007) P. 12 P. 13 P. 17 Culture et loisirs : Cinéma : Le cinéma Grindhouse Ton nom est Justine de Franco de Pena Le Rêve de Cassandre ou l'éternel retour de Woody Allen... Cocktail psychédélique avec un Dujardin en pleine forme : 99 francs de Jan Kounen Œuvre viscérale et forte - L’ennemi intime de Florent Emilio Siri avec Benoît Magimel et Albert Dupontel (France, 2007) Le deuxième souffle - Adaptation cinématographique trop fidèle au roman de Giovanni réalisée par Corneau (France, 2007) P. 14 P. 16 P. 17 P. 18 P. 19 P. 20 Musique : “Et Justice pour tous” The Klaxons, « le mythe du futur, le must du présent » P. 21 P. 22 Littérature : Ce cher Tintin ! Le nouveau livre de Philippe Claudel conjugue talent d’écriture et thèmes importants À l’abri de rien d’Olivier Adam : une femme esseulée et perdue (France, 2007) P. 23 P. 24 P. 24 P. 25 Théâtre Sivadier adapte Shakespeare : regard moderne sur une pièce à dimension intemporelle P. 26 Art Un anniversaire mémorable P. 27 Sport Les lauriers de la désillusion Le Badminton P. 29 P. 31 Cuisine Enfin Noël ! P. 32 Créations C’est pas compliqué La fête En ouvrant ma fenêtre La jalousie Photographies P. 33 P. 33 P. 34 P. 35 P. 36 Humour Vive l’Alsace ! Langue européenne P. 25 P. 11 Yasmina Khadra, L’attentat Perles de profs et perles d’élèves à savourer au fil des pages... 2 Editorial La sortie de la nouvelle extension des Sims est prévue pour début 2009. En avant-première, nous avons pu expérimenter cette version améliorée d’un des jeux les plus populaires au monde (54 millions d’exemplaires vendus depuis sa création). Dans Les Sims 3, le concept est toujours le même que pour les premiers Sims ; le joueur doit gérer une famille et la faire évoluer dans un environnement stérile et construit de toutes pièces. On appelle d’ailleurs également ce jeu « le simulateur de vie ». La même idée a été reprise dans les extensions suivantes, avec des particularités propres à chaque version ; les Sims peuvent travailler, sortir, interagir avec d’autres personnages, se cultiver, avoir des animaux de compagnie, aller dans les magasins, se divertir et bien plus encore, dans une mise en scène plus que réaliste. Cette fois-ci, on retrouve toutes ces libertés, avec un seul changement, sur lequel repose tout l’intérêt du jeu, un nouveau défi pour le joueur ; gérer trente familles -nouvelles venues à Simsland- en même temps. Le premier problème auquel nous fûmes tout de suite confrontés fut un problème de place. En effet dans les Sims 3, toutes les maisons sont déjà construites et il n’y a plus que trois terrains libres pour bâtir des habitations pour les nouvelles familles. Heureusement, les concepteurs du jeu avaient tout prévu ; on a ainsi la possibilité de construire des bâtiments de plusieurs étages, qu’on peut cloisonner pour créer des appartements indépendants les uns des autres. Nous disposions d’un budget convenable (à compter en simflouz), mais qui fut amené à diminuer considérablement après la construction nécessaire des trois immeubles, résidences que nous avions nommées Sim-patik, Sim-illère et Sim-illion. Nous fûmes ensuite confrontés au souci de l’ameublement. Ne disposant plus que de quelques milliers de simflouz, nous pouvions à peine équiper les appartements des trente familles de Sims. Néanmoins ce problème est courant en début de partie, et était déjà présent dans les Sims 1 et 2. Les personnages devront décrocher un travail afin d’améliorer leur confort et leur train de vie. Une fois nos familles installées et plutôt bien réparties, nous commençâmes à gérer leur vie, ce qui consistait principalement à faire se rencontrer les personnages et les faire discuter et jouer ensemble, car nous de disposions pas encore d’assez d’argent pour aménager des places de jeux et des centres d’activités. Cependant ce n’était pas un grand problème, car les Sims s’entendaient très bien. Néanmoins, nous constatâmes que les autres Sims, ceux que nous avions créés et qui vivaient dans les maisons voisines, ne venaient que très rarement rendre visite aux nouveaux personnages, et que si c’était le cas, ils ne parvenaient pas à fraterniser. Comme nous désirions agrandir les bâtiments de nos familles, et améliorer leur confort en leur achetant des objets de divertissement et des moyens pour s’entretenir physiquement et mentalement, nous décidâmes de faire chercher du travail à nos Sims (ce qui se fait par petite annonce dans les journaux). Le concept de ce jeu est très bien imaginé. Pour décrocher un métier convenable, il faut que le personnage ait 5 barres de culture et 5 barres de santé physique. Pour que le Sim parvienne à ce niveau, il faut le faire lire, regarder la télé, utiliser des jeux ludiques, nager, s’entraîner et encore plus. Ainsi, plus le personnage gagne d’argent, plus il se cultive, plus son job devient important, et plus son salaire le devient. Nous épluchâmes les offres d’emploi, réalisant rapidement qu’elles n’étaient que des propositions misérables qui ne payaient que très peu. Néanmoins, nous rappelant la règle, nous comprîmes que cet état de fait était tout à fait normal. Considérant le fait que nos Sims ne vivaient qu’avec le strict minimum, ils ne pouvaient gagner en capacité mentale et physique. Nous acceptâmes donc ces métiers, en attendant de gagner assez pour aider nos personnages à grimper les échelons. Nous attendîmes. Pendant ce temps, nous nous occupions des Sims qui n’avaient pas de travail. Ce processus consistait à les faire se lever, manger, se laver, aller aux toilettes, discuter avec d’autres personnages, manger, aller aux toilettes, discuter, manger, se laver et se coucher. Nous attendîmes. L’argent qui rentrait ne suffisait que pour l’achat de nourriture et le paiement des factures. Nous attendîmes. De temps en temps un voleur s’aventurait dans le quartier et dérobait une table ou une chaise, les seuls objets de valeur que les Sims possédaient. Impossible de l’attraper si l’appartement n’est pas équipé d’une alarme. Nous attendîmes. « Prévoir pour agir, c’est comme un cercle carré. » 3 Editorial Il était de plus en plus difficile d’obtenir 5 barres de niveau dans l’humeur des personnages. Las d’attendre, nous laissâmes les ordinateurs en veille et abandonnâmes quelques heures nos Sims à leur routine quotidienne. Les Sims ont une conception particulière de l’heure, et chez eux, elle tourne beaucoup plus rapidement que dans notre monde. Ainsi en revenant, nous vîmes avec étonnement que tous les Sims s’étaient regroupés dans un des appartements, et des symboles de mécontentement s’affichaient au-dessus de leur tête, ne s’effaçant que pour laisser place à des smileys en colère. En cliquant sur nos personnages, nous réalisâmes alors que de nouvelles propriétés étaient apparues ; nous pouvions ordonner aux Sims de faire plus d’actions qu’auparavant ! Les laisser entre eux avait donc porté ses fruits ! Au milieu des actions ordinaires apparaissant dans des petits rectangles bleus, « Boire » « S’asseoir » « Discuter », nous découvrîmes avec stupeurs des indications telles que « Argumenter » « Insulter » « Se révolter ». Nous ne pûmes nous empêcher de cliquer sur ces indications, ne serait-ce que par curiosité. En l’espace de quelques secondes –c’est-à-dire une dizaine de minutes pour les Sims-, les personnages étaient tous aux pieds de Sim-patik, Sim-illère et Sim-illion, brandissant des panneaux en tout genre, hurlant des slogans en langage Sims. Cinq heures plus tard, les personnages se tenaient toujours au pied des immeubles. Nous ne pouvions rien faire excepté les regarder, impuissants. Dix heures plus tard, ils y étaient toujours. Personne ne venait. Nous sélectionnâmes donc les Sims une nouvelle fois, et découvrîmes de nouvelles actions «Frapper » « Détruire » « Brûler ». Heureux de voir qu’il y avait un moyen d’attirer l’attention afin d’améliorer le quotidien de nos Sims, nous leur ordonnâmes d’effectuer ces actes. Une heure plus tard, il ne restait rien des trois immeubles. Les pompiers vinrent, éteignirent le feu, et repartirent. Nos Sims étaient debout dans la rue, de nuit, au milieu d’un brasier encore fumant. Ne voyant aucune solution, nous quittâmes la partie. N’aimant pas les échecs, nous jugeâmes bon de recommencer le jeu. Mais ne sachant que faire pour échapper à l’inévitable et ne voyant pas d’alternative à ce dont nous venions d’être les témoins, nous décidâmes de commencer plus simplement, avec une seule famille dans une maison déjà construite. C’était déjà bien assez dur comme ça. Marie Turcan, TS2 Courrier des lecteurs . Courrier des lecteurs. Courrier des lecteurs. Un article t’a intéressé tout particulièrement ? Tu as trouvé les propos d’un des journalises convaincants, surprenants ou encore révoltants ? Fais nous part de tes réactions par mail à l’adresse du PONTOnews : [email protected] Nous nous ferons un plaisir de te répondre ! Courrier des lecteurs . Courrier des lecteurs. Courrier des lecteurs. « Le contraire de manger de la choucroute, ce n’est pas faire du bateau-mouche ! » 4 Actualité Du fric pour les pays en difficulté économique Fondé officiellement le 27 décembre 1945, le FMI (Fonds Monétaire International) a plusieurs fois changé d’objectifs, pour finalement être vu aujourd’hui comme un instrument de régulation économique et d’aide financière aux pays en difficulté. Le texte suivant est une étude très courte de cette organisation doublée d’un résumé des dernières nouvelles concernant son nouveau directeur général. Initialement, il s’agit d’un cadre de coopération destiné à éviter les le juge nécessaire, il peut prêter à un pays jusqu’à 125 % de plus que désastres liés à la mauvaise gestion des biens et des dépenses, qui son quote-part ordinaire. avaient contribué à la Grande Dépression des années 30 et engendré Les interventions majeures du FMI restent celle en 1997 lors de la crise la prolifération et le développement du fascisme. asiatique, marquée par une dépréciation de monnaie de plus de 45% À partir de 1971, le « marché » que propose l’organisation est clair : par rapport au dollar en l’espace de moins de trois semaines ainsi que prêter de l’argent à des pays ne pouvant régler eux-mêmes leur déficit, celle de la crise mexicaine un an plus tard, due à une dévaluation du mais qui devront mettre en œuvre des moyens politiques pour parvenir peso mexicain. à l’équilibre harmonieux de leur balance de paiements. Elle s’attache Qualifié de « gendarme » et de « pompier », le FMI limiterait la par conséquent à promouvoir la croissance et la stabilité économique souveraineté des économies nationales par une politique des à échelle mondiale tout en s’efforçant de ajustements structurels (PAS) et conduirait à réduire la paupérisation (objectifs énoncés des conséquences néfastes pour les pays en par les Statuts du FMI). Plus voie de développement, faute de préconiser concrètement, elle fait en sorte que les les mêmes recommandations économiques banques centrales défendent leur monnaie pour chaque pays. Certaines manifestations sur le marché des changes. populaires ont voulu mettre en évidence ces problèmes, telle que celle qui s’est déroulée à Si on examine de plus près le FMI, on Jakarta en 2004. s’aperçoit que son importance est incontestable et peu négligeable, son Mais comme le dit Dominique Strauss-Kahn, nouveau directeur général de l’organisation, projet de régulation économique nommé le 28 septembre 2007, « le Fonds est concernant 185 pays et le fait qu’il compte confronté à un monde plus complexe, comme 2 635 employés à son service, originaires le prouve la crise des crédits hypothécaires à de 143 pays différents. Dominique Strauss-Kahn, directeur Général du FMI risques, partie des Etats-Unis. Comment Ce qui fait preuve à la fois d’injustice humainement et de logique économiquement, c’est que le droit de vote maîtriser, en effet, un système qui interconnecte les marchés et diffuse et la capacité à tirer sur les ressources du Fonds en cas de besoin est les crises à grande vitesse ? ». Serait-il alors adéquat de nos jours de conditionné par un apport en dollars. En effet, à l’instar du mode de redéfinir la portée d’un système de gestion des biens internationaux décision de la Banque mondiale, celui du FMI prend en compte le face à la complexité de situations économiques sempiternellement montant de la cotisation des Etats membres, selon le principe « 1 changeantes ? dollar, 1 voix ». Cela fait que les dix premiers pays, qui représentent Cependant, les Français n’ont pas l’air de prêter beaucoup d’attention plus de la moitié du PIB mondial, ont la majorité des droits de vote. à cette question – comme l’estiment les journaux, 99% de la population De plus, seules 8 nations ont un représentant permanent (Etats-Unis, ignore le rôle exact du FMI. France, Allemagne, Royaume-Uni, Japon, Chine, Russie et Arabie On pourrait peut-être imaginer que l’intérêt va croître, vu que c’est Saoudite) ; certains pays sont privilégiés, puisque bénéficiant du droit l’ancien ministre de l’économie du territoire hexagonal qui a en été élu le directeur général. de veto (Etats-Unis, l’Union européenne dans son ensemble). Néanmoins le fonctionnement mentionné n’est pas très rigide – les Si Strauss-Kahn a donc des responsabilités au sein de cette droits de vote diffèrent légèrement des quotes-parts, même les pays organisation internationale, il n’a pas l’air de renoncer totalement à la les plus petits ayant le droit à un minimum de droit de vote ( les politique française, évoquant une éventuelle campagne présidentielle Etats-Unis ont 17,09 % de quotes-parts pour 16,79 % de droits de vote, en 2012. Il pourrait écourter son mandat, comme l’avait fait Horst tandis que la Turquie a 0,55 % de quotes-parts pour 0,55 % de droits Köhler, l’un de ses prédécesseurs, élu président de l’Allemagne en de vote). Chaque pays membre du Fonds peut obtenir 2004. «Ce serait faire injure à sa sincérité que de lui prêter je ne sais automatiquement 25% de sa quote-part (c’est-à-dire un droit de tirage quel calcul. Mais Dominique ne se désintéresse pas de la France. La supérieur) en cas de déséquilibre de sa balance de paiement. Si le FMI politique est dans ses gènes. L'avenir n'est pas écrit. Et il dure « Un bruit sonore ? Oui, ça c’est sûr ! » 5 Actualité longtemps...» affirme Pierre Moscovici, secrétaire national du PS (Parti Socialiste). De plus, l’ancien ministre semble avoir fait l’unanimité, remportant l’adhésion à la fois dans l’électorat français de gauche et celui de droite, recevant des louanges de la part de François Villeroy de Galhau, son ex-directeur à Bercy, de Stéphane Fouks, co-président d’Euro RSCG Worldwide, ne pouvant faire plus de trois pas dans les rues de Paris sans se faire interpeller par des passants désireux de lui témoigner leur sympathie. Il n’est pas le premier Français à avoir été élu directeur général du FMI, on comptait déjà avant lui Pierre-Paul Schweitzer, Jacques de Larosière et Michel Camdessus. Notons aussi que le nouveau directeur général souhaite une collaboration étroite avec le nouveau président de la Banque mondiale, Robert Zoellick. Ajoutons que les deux organisations sont liées, ayant été conçues à peu près simultanément et travaillant souvent de concert, le « Comité de développement » les rapprochant. Matthias Turcaud, 2nde10 Sources pour le texte : - Fonds monétaire international [en ligne]. Fonds monétaire international, 2007 [consulté le 28 octobre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.imf.org/external/french/index.htm. - Le Fonds Monétaire International. In : La Documentation Française [en ligne]. La Documentation Française, 2007 [consulté les 26, 27 et 28 octobre 2007]. Disponible à l’adresse : http:// www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/banque-mondiale-fmi/fmi.shtml. - Fonds monétaire international. In : Wikipédia [en ligne]. Wikimedia, 2007 [consulté les 27 et 28 octobre 2007]. Disponible à l’adresse : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fonds_mon%C3%A9taire_international . - Chussodovsky, Michel. The Globalisation of poverty. Zed Books, 1997. - « Dominique Strauss-Kahn : ‘Le FMI ne peut plus se contenter d’être un gendarme’ », propos recueillis par Alain Faujase . In : Le Monde, mardi 02 octobre 2007, page 14. Sources pour les images : - Photographie de Dominique Strauss-Kahn extraite de : Le Figaro [en ligne). Le Figaro, 2007 [consulté le 28 octobre 2007]. Disponible à l’adresse : http://medias.lefigaro.fr/ - Carte extraite de : Mémo : voyagez à travers l’histoire [en ligne]. Mémo, 2007 [consulté le 28 octobre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.memo.fr « Vous écrivez comme si vous étiez sous calmants ! » 6 Dossier : Environnement Al Gore, prix Nobel, ou comment l'écologie est revenue à la mode… "Et l'Oscar du meilleur film documentaire va à… Al Gore et son film 'Une vérité qui dérange'!!!" Un applaudissement tonitruant retentit ce soir du 25 février 2007 dans le "Kodak Theatre" où se déroule l'édition 2007 de la cérémonie des Oscars. Malgré la présence de Scorsese ou d'autres personnalités bien connues, la vraie star de cette soirée sera Al Gore, politicien converti à l'écologisme. Albert Arnold Gore Jr., dit Al Gore, est né le 31 mars 1948 à Washington D.C., USA. Cet homme politique américain a été membre de la Chambre des Représentants de 1977 à 1985, sénateur du Tennessee de 1985 à 1993 et vice-président de Bill Clinton de 1993 à 2001; il a fait ses études à la prestigieuse université d'Harvard. En 1999, Al Gore se présente aux élections présidentielles des États-Unis, en tant que membre du parti démocrate; il devient l'adversaire de George W. Bush, du parti républicain, au dernier tour. Aux ÉtatsUnis, on élit le président au suffrage indirect: dans chaque État, la population élit plusieurs « grands électeurs »; ensuite, ce sont ces électeurs qui élisent le président. Ainsi, le 7 septembre 2000, Al Gore avait 550 000 voix de plus que Bush au niveau national, mais un des deux candidats devait obtenir la voix de la Floride pour être élu. Bush, dont le frère est gouverneur de l'Etat, y obtient 2 700 voix de plus que Gore. Finalement, après un mois de décomptes incertains, la Cour Suprême décide d'attribuer la fonction de président à G. Bush, qui a officiellement 537 voix de plus que Gore, sur 6 millions. Pourtant, en 2001 et 2002, de nouveaux recomptes financés par des grands journaux américains montrent que la différence de bulletins entre les deux candidats dépend de la façon de compter: selon celle-ci, Bush l'emportait avec plus de 3000 voix, ...ou perdait avec 3 voix de retard. Après sa défaite, Al Gore se consacrera presque pleinement à son combat pour l'environnement et à l'écologie. Son film "Une vérité qui dérange" est le fruit de ce combat pour la vie et nous montre les effets dramatiques du réchauffement climatique sur la planète Terre (voir critique ci-après). Contre toute attente, ce film rencontre un grand succès auprès du public américain appartenant pourtant à la nation réputée être la plus pollueuse. Les deux Oscars (Meilleur film documentaire, Meilleure chanson originale) encourageront les derniers retardataires à voir ce film. Assez inhabituel puisqu'il n'y a pas de happy end et que ce n'est pas une fiction. Ce film réussira-t-il à réveiller la conscience planétaire pour réagir contre le réchauffement climatique? Cette année 2007 a été jalonnée par bien des indicateurs du dérèglement climatique (inondations hors du commun en Angleterre, en Asie ou sécheresse et canicule impressionnantes dans le Sud de l'Europe). Aussi, à la suite du succès d'"Une vérité qui dérange" et de l'attention portée à Al Gore lui-même, beaucoup de pays ont décidé d'agir (enfin!! diront les écologistes de première heure), comme par exemple l'Allemagne ou l'Union Européenne. L'écologie aurait aussi dû être un sujet central de la campagne présidentielle 2007 en France, mais malheureusement, lors du débat télévisé Sarkozy-Royal, seules quelques minutes y ont été consacrées. Heureusement, Nicolas Hulot, le "Al Gore français", s'est attelé à la tâche pour rappeler à nos chers politiciens que la maison brûle et leur a fait signer un "pacte écologique". Aussi le G8, qui annonçait pourtant avec beaucoup d'éclat que des décisions importantes allaient être prises sur le plan de l'écologie, a apporté des résultats finalement pas aussi satisfaisants que l'auraient voulu les écologistes. Faut-il voir dans le discours écologique une simple mode pour attirer l'attention du public? Pour nous prouver le contraire et pour rassurer les écologistes sceptiques, le prix Nobel de la paix 2007 a été attribué le 12 octobre dernier au GIEC (Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat) et à Al Gore. « Il est probablement l'individu qui a fait le plus dans le monde pour une meilleure compréhension des mesures nécessaires contre le réchauffement de la planète», déclare le comité d'Oslo, qui lui a décerné la prestigieuse distinction. Ce titre fait donc d'Al Gore un "roi" et il ne nous reste plus qu'à suivre son exemple ou plutôt ses conseils si nous voulons que nos enfants et petitsenfants vivent sur une planète habitable. Je disais “conseils” car l'exemple que le "dieu de l'écologie" nous donne n'est pas vraiment prestigieux. Ainsi, des enquêtes ont été menées et il est prouvé que la maison d'Al Gore rejette plus de CO2 que celle d'un Américain moyen. Exemple à méditer… Enfin reconnu officiellement comme un problème réel qui nous touche tous, le réchauffement climatique n'en arrête pas son ascension vertigineuse et chaque jour, chaque minute, chaque seconde des tonnes de CO2 sont rejetées dans notre atmosphère. Aideznous à le combattre! Il fait bien mieux vivre sur une Terre propre… Le défi vaut la peine d'être relevé, il ne faut jamais désespérer… Car qui aurait pu penser en 2000, après les élections présidentielles aux Etats-Unis, que le malheureux perdant deviendrait le héros de toute une nation, de toute une planète? Et de plus couronné par deux Oscars et le Prix Nobel de la Paix? Al Gore a gravi une pente raide depuis qu'il a touché le fond. Nous ne pouvons qu'espérer que ses efforts ne resteront pas vains… Clara Burgard, 2nde10 Elise Jost, 2nde10 Source de l’image d’Al Gore : Jakouiller. Le film d’Al Gore projeté aux députés et sénateurs – Jakouille la fripouille. In : Jakouille la fripouille [en ligne]. Jakouiller, 13 octobre 2006 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible sur : http://www.jakouiller.com/index.php/2006/10/13/701-le-film-dal-gore-projete-aux-deputes-et-senateurs 7 Dossier : Environnement Une Vérité qui Dérange - An Inconvenient Truth Le film Une Vérité qui Dérange, en américain An Inconvenient Truth, est en fait un documentaire sur la situation climatique actuelle de notre chère planète. Tout d'abord, ce film est une sorte de retransmission des nombreuses conférences d'Al Gore, vice-président des États-Unis. On le voit, parcourant le monde, pour réveiller les gens de tous les pays (certains spectateurs avertis se demanderont: pourquoi le voit-on circuler en voiture, un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre?). Mais oui, le réchauffement climatique est une menace bien réelle qu'il nous faut considérer, que nous le voulions ou non. Tous les experts sont d'accord: l'Homme est responsable de ce réchauffement. Ce film présente non seulement des données, les courbes d'émission de gaz à effet de serre, par exemple, mais aussi des images, des séquences vidéo de catastrophes naturelles. À la fin du film, on est choqué (c'est bien cette planète sur laquelle on habite ?), on se rend bien compte de ce que c'est que le réchauffement climatique et on se promet de faire attention; pourtant, combien de ces spectateurs s'engageront véritablement pour l'environnement? Rien que la bande-annonce en dit long: - les 10 dernières années les plus chaudes dans le monde ont été ces 14 dernières années, et parmi elles, la plus chaude, 2005 -combien de personnes sont victimes de la canicule ou de la chaleur chaque année? - si la fonte des glaciers en Arctique continue, le niveau des mers va monter de 6 mètres en l'espace de 10 ans à peine ! Les conséquences seraient désastreuses: la Floride submergée, la région de Calcutta, en Inde (60 millions d'habitants), la région de Shanghaï, en Chine (40 millions d'habitants), sous les eaux; même le monument à la mémoire Disparition des neiges éternelles du Kilimanjaro du World Trade Center, à New York City, USA, serait submergé. Si vous savez l'impact causé par un exode de 200 000 réfugiés, songez à l'impact de 100 millions de réfugiés obligés de reculer devant la montée - le réchauffement est aussi la cause des ouragans et cyclones, qui du niveau de la mer ! deviendront de plus en plus nombreux et dangereux, comme l'ouragan Katrina qui a fait des dégâts terribles en août 2005, en Louisiane, aux USA. Deux questions qu'il faudra aussi retenir sont les suivantes -Al Gore les pose- : Devons-nous nous préparer à une autre menace que le terrorisme? Le réchauffement climatique est-il une question politique... ou morale? À voir d'urgence, pour ceux qui ne connaissent pas, et à revoir toujours et encore, et surtout, à prendre en compte. Fonte des glaciers au Groenland - dans dix ans, les neiges éternelles du Kilimandjaro, en Afrique, n'existeront plus; tout comme en Patagonie, où les glaces disparaissent à une vitesse impressionnante et affolante L’ouragan Katrina Clara Burgard, 2nde10 Elise Jost, 2nde10 8 Dossier : Environnement Le grenelle de l’environnement : la France se réveille (?) L’écologie, véritable sujet de mode ces derniers mois, pourtant nécessaire depuis de nombreuses années et acquis dans d’autres pays comme l’Allemagne depuis bien longtemps, est un enjeu qui n’a pas échappé à Nicolas Sarkozy. Présente dans la majorité des discours des candidats à l’élection présidentielle, cette mode (bien qu’utile) a peut-être été l’un des facteurs de l’effondrement des Verts dans les urnes le 22 avril dernier. Ceci dit, le «grenelle» de l’environnement promis par notre président a bien eu lieu et s’est achevé le 26 octobre. Suite aux discours alléchants, faut-il alors s’attendre à de véritables changements dans notre vie quotidienne et peut-on parler de réelles avancées sur le plan du développement durable? Bilan de ces quelques jours qui permettront peut-être à la France de combler son retard. Pour préserver la santé humaine, l’interdiction, dès 2008, des produits phytosanitaires les plus dangereux. Pour instaurer une « démocratie écologique », l’entrée de partenaires environnementaux dans le Conseil économique et social, la mise en place de commissions parlementaires « développement durable » au Parlement, la généralisation des enseignements sur l’écologie à l’école, l’association à la carte d’étudiant d’une carte de transport en commun, le renforcement de la lutte contre le commerce du bois, la création éventuelle de l’ONUE (organisation des Nations unies pour l’environnement). La multitude de mesures s’avère plus ou moins réaliste, plus ou moins concrète… Petit tour des mesures Le grenelle, qui s’ouvrait sur 4 directions, avait 13 objectifs et, à chaque fois, des mesures à la clé, plus ou moins claires et convaincantes. Voici un aperçu très global des plus importantes. Pour moderniser le bâtiment en ville, l’incitation à rénover, l’obligation de construire selon de nouvelles normes (« basse consommation »). Pour réduire les émissions de CO2, la mise en place d’une taxe carbone sur les transports (à cela s’ajoute l’idée de bonus malus pour les voitures) mais aussi sur des produits non écologiques. Pour diversifier le flux énergétique français, un programme favorisant les énergies renouvelables et intensifiant la recherche sur le nucléaire. Pour relancer l’urbanisme, la limitation d’extension des villes et des zones urbaines tout en relançant la dynamique des centres-villes, la création « d’écoquartiers ». Pour renouveler la mobilité, le gel des constructions routières (sauf en cas de sécurité ou de congestion), l’augmentation, jusqu’au double, des réseaux de LGV (lignes de trains à grande vitesse) et de transports en commun, le développement des biocarburants. Pour passer à l’agriculture biologique (AB), l’augmentation du crédit d’impôt pour les paysans pratiquant l’AB ainsi qu’une aide financière aux jeunes se lançant dans le bio, la rénovation des labels de qualité pour l’agro-alimentaire (notamment AOC et AB), réduire les pesticides de moitié d’ici fin 2012. Pour préserver l’eau, l’installation de quotas pour prélever l’eau pendant les périodes de sécheresse, la mise aux normes des stations d’épuration. En ce qui concerne les OGM, l’adoption d’une loi sur les biotechnologies et un débat public national sur la question de la non brevetabilité du vivant en 2008. Pour préserver la biodiversité, l’aménagement du territoire en créant des domaines « trame verte et bleue » protégeant les espaces naturels sur terre et en mer, l’instauration de quotas de pêche sur le thon rouge. Une révolution verte? Tous réunis à une même table, les PDG de grands groupes, les associations et les politiques ont donc parlé environnement et développement durable pendant 3 jours. Et depuis longtemps, les plus grands espoirs, comme les plus grands doutes se sont posés sur l’efficacité de ce grenelle. En effet, c’est bien la première fois que l’écologie est au centre de la politique française, alors que les problèmes étaient connus depuis bien longtemps, les premiers militants avaient d’ailleurs débuté dès les années 70. Une grande satisfaction s’affichait depuis de nombreux mois sur les visages de certains, pendant que d’autres forçaient leur sourire, car combien de congrès ont été organisés sur ce sujet sans résultats ? Qui se souvient d’AddisAbeba en 2004 ou encore d’Heiligendamm cette année, pour ne citer que deux exemples ? Pour le discours de conclusion de Nicolas Sarkozy, des invités de marque s’étaient rendus à l’Elysée, comme Wangari Maathai ou encore Al Gore, respectivement prix Nobel de la paix en 2004 et en 2007, tous « La calvitie, pas la chauveté ! » 9 Dossier : Environnement deux fervents défenseurs de la planète. Et réservé : « Le diagnostic qui a été finalement la quasi-totalité des invités a posé est bon. (…) Mais beaucoup de applaudi les décisions prises. mesures phares sont reportées à plus tard (…) On peut donc craindre L’ancien vice-président des Etats-Unis a parlé « d’un véritable coup d’accélérateur » qu’elles s’enlisent. ». à la lutte contre le réchauffement Tout le monde reconnaît le pas de climatique et de « début d’un processus géant qu’a fait la France, qui était historique » tout en félicitant le chef de jusqu’ici en retard sur ce plan, en l’Etat. Al Gore a par ailleurs souhaité la s’engageant sur la voie du tenue d’un grenelle mondial. développement durable, mais Nicolas Hulot, qui est probablement à beaucoup se demandent si les l’origine du débat sur le climat pendant les mesures vont devenir une réalité. présidentielles avec son « pacte Les sénateurs ont, dès la fin du écologique », a énoncé sa satisfaction : congrès, exposé le problème du « 18/20 ». financement, astronomique. Oui, après la belle déclaration, il faut Les associations les plus craintives ont, encore faire voter les différentes elles aussi, exprimé leur soulagement. Ainsi le président de WWF France a mesures par le parlement : la Nicolas Sarkozy et Nicolas Hulot déclaré : « On craignait que la montagne fameuse loi d’application du accouche d'une souris mais il faut reconnaître que la France vient de grenelle qui pourrait être déclinée sur certains points en raison du s'engager sérieusement sur la voie de l'excellence environnementale budget ou de désaccords (après tout, il n’y a que 4 députés verts à (…) nous resterons vigilants et positifs comme nous avons su l'être l’Assemblée nationale). jusqu'à présent. ». Même Greenpeace, qui est sans doute l’affiliation Finalement, derrière la si jolie vitrine qu’était le grenelle de environnementale la plus active au monde, a esquissé un sourire : l’environnement, on pourrait penser à un coup de publicité… Restons « L'urgence écologique et la pertinence de nos analyses et des prudents et attendons 2008 pour d’éventuels changements. En campagnes que nous menons depuis des années sont enfin attendant, il est toujours possible d’agir chez soi en ayant de bons reconnues » déclare Yannick Jadot, porte-parole français de réflexes… l’association, mais il a ajouté : « il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. (…) Nous ne lâcherons pas ! ». Du côté des politiques, les Verts reconnaissent comme positive, l’avancée apportée par la conférence, mais préfèrent rester prudents. Mais c’est finalement Jacques Moret, du parti socialiste, qui reste le plus Enzo Dauphinot, 2nde8 Sources : Le Grenelle Environnement. [En ligne]. Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.legrenelle-environnement.fr/ Le Blog du secteur développement durable. [En ligne]. Parti Ssocialiste, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://environnement.parti-socialiste.fr/ Les Verts. [En ligne]. Les Verts, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://lesverts.fr/ S’informer, comprendre et agir avec la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme. [En ligne]. Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l'Homme, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.fondation-nicolas-hulot.org/ Greenpeace. [En ligne]. Greenpeace, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.greenpeace.org/france/ WWF – Organisation mondiale de protection de l’environnement. [En ligne]. Fondation WWF France, 2006 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.wwf.fr/ Le Monde.fr. [En ligne]. Le Monde Interactif, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.lemonde.fr/ Enviro2B, le portail info, emploi, services de l’environnement et du développement durable. [En ligne]. Web2B, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.enviro2b.com/ Images : Nicolas Sarkozy propose un Grenellle de l’environnement. In : Mon soutien militant à Nicolas Sarkozy [en ligne]. Hi-Media Publishing Network, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible sur : http://rollingstones.blogspace.fr/294950/NICOLAS-SARKOZY-PROPOSE-UN-GRENELLE-DE-L-ENVIRONNEMENT/ Grenelle. In : Le grenier du lin… La boutique qui a la fibre !!! [en ligne]. Gandi, 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible sur : http://blog.legrenierdulin.com/tag/GRENELLE « Aujourd’hui, les rapports sexuels avant le mariage, ça ne fait plus chaud ni froid, plutôt chaud d’ailleurs. » 10 Dossier : Environnement Un jour sur Terre Un jour sur Terre, c’est une exposition des plus beaux endroits de notre planète appelée d’ailleurs, comme l’annonce aussi la commentatrice au début, la « planète-miracle » par nombreux de ses habitants… Le film nous emmène dans un voyage partant du Pôle Nord pour terminer au Pôle Sud en passant par la toundra arctique, la taïga russe, les régions autour de l’Amour, l’Himalaya, la forêt tropicale au niveau de l’Equateur, la savane africaine et le désert du Kalahari. Malheureusement, la voix aiguë au son artificiel de la commentatrice gâche tout le plaisir. Les expressions comme « qu’est qu’ils sont mignons » ou « va-t-il survivre ?» commencent à taper sur les nerfs au bout de la 10eme fois. Aussi les éternelles scènes de chasse entre guépard et gazelle ou lion et éléphant que tout le monde connaît des documentaires de la télé paraissent être des recettes réchauffées… Pourtant ce film vaut d’être vu car les scènes sont très impressionnantes. Des panoramas exceptionnels de la plus grande cascade du monde (Salto Angel en Amérique du Sud) ou d’autres cascades gigantesques (Saltos do Iguaçu, les chutes Victoria), des prises étonnantes de requins blancs, de baleines à bosse, mais aussi d’animaux très rares comme les magnifiques lynx ou les rarissimes léopards de l’Amour… et, finalement, le spectacle hilarant de quelques singes effrayés par l’eau… Malheureusement, le message final censé choquer et appeler à combattre le Réchauffement Climatique arrive trop tard. Les spectateurs sont agacés par les multiples effets de fin et remballent déjà leurs affaires en pensant que c’est le générique qui passe. À voir donc pour les amoureux de la Nature et des panoramas exceptionnels… Clara Burgard, 1S4 Source de l’image : Magdelaine, Christophe. Sortie du film « Un jour sur Terre » : un hymne à la magnificence de notre planète- notre-planète.info. In : Environnement, écologie, photos, changements climatiques- notre-planète.info [en ligne]. Christophe Magdelaine, 10 octobre 2007 [consulté le 2 décembre 2007]. Disponible sur : http://www.notre-planete.info/actualites/actu_1367_un_jour_sur_terre_film.php Humour Unique, l'Union européenne Objet : Langue européenne Strasbourg, capitale de l'Europe est confirmée définitivement. Vive l'Europe !!! On rame déjà avec l'euro, alors imaginez une langue européenne... La Commission Européenne a pourtant finalement tranché : après la monnaie unique, l'Union européenne va se doter d'une langue unique, à savoir le Français !!! Trois langues étaient en compétition : - le Français (parlé par le plus grand nombre de pays de l'Union : la France, la Belgique, le Luxembourg - l'Allemand (parlé par le plus grand nombre d'habitants de l'Union) - et l'Anglais (langue internationale par excellence). L'Anglais a vite été éliminé, pour deux raisons : l'Anglais aurait été le cheval de Troie économique des Etats-Unis et les Britanniques ont vu leur influence limitée au profit du couple franco/allemand en raison de leur légendaire réticence à s'impliquer dans la construction européenne Le choix a fait l'objet d'un compromis, les Allemands ayant obtenu que l'orthographe du Français, particulièrement délicate à maîtriser, soit réformée, dans le cadre d'un plan afin d'aboutir à l'Eurofrançais. - La première année, tous les accents seront supprimés et les sons actuellement distribués entre "s" , "z" , "c", "k" et "q" seront répartis entre "z" et "k" , ze ki permettra de zupprimer beaukoup de la Konfuzion aktuelle. - La deuzieme année, on remplazera le "ph" par "f" , ze ki aura pour effet de rakourzir un mot comme "fotograf" de kelke vingt pour zent. - La troizieme année, des modifikations plus draztikes zeront pozibles, notamment ne plus redoubler les lettres ki l'étaient : touz ont auzi admis le prinzip de la zuprezion des "e" muets, zourz éternel de konfuzion, en efet, tou kom d'autr letr muet. - La katriem ané, les gens zeront devenus rézeptifs à des changements majeurs, tel ke remplazer "g" zoi par "ch" , zoi par "j", zoi par "k", zelon les ka, ze ki zimplifira davantach l'ékritur de touz - Duran la zinkiem ané, le "b" zera remplazé par le "p" et le "v" zera lui auzi apandoné, au profi du "f". Efidamen, on kagnera ainzi pluzieurs touch zu le klafié. Un foi ze plan de zink an achefé, l'ortokraf zera defenu lochik, et les chen pouron ze komprendr et komunike. Le ref de l'Unite kulturel de l'Europ zera defenu realité . La réchion la mieu préparé en Europ est....l'Alzaz. 90% de la bopulazion le pratik décha kouramen. Pour les autres...bonchour l'Ankoiz. Bon chourné ! 11 Opinions Le sport, l'Education nationale et le Ministère de la jeunesse, de la santé et des sports font mauvais ménage S'il est une chose, rien qu'une, qui m'excède, c'est le sport et plus particulièrement le sport à l'école, que l'on ose encore, quelle provocation, appeler «Education Physique et Sportive». Cet article n'engage personne, juste un individu qui en a assez, mais qui ose le dire tout en assumant pleinement son acte et les potentielles conséquences liées aux quelques lignes qu'il va écrire, contrairement à ceux qui restent muets ou qui tapent dans la balle sans le moindre signe de réflexion. Car, oui, l'hypocrisie de l'Education Nationale, du Ministère de la jeunesse, de la santé et des sports ainsi que des cours de sport est insupportable. Il est nécessaire, pour comprendre mon point de vue, de connaître la vérité sur le sport, le vrai sport. Ah! Le sport! Le sport, qu'est-ce donc? Le sport, c'est l'apprentissage dès le plus jeune âge de notions fondamentales et jusqu'à présent intemporelles: le respect, le dévouement, le courage, la solidarité, l'honnêteté; c'est beau, le sport, c'est cela dont on a envie, cela qu'on aime. Mais ce temps est indéniablement et définitivement révolu. Aujourd'hui, on veut, on recherche absolument d'autres choses, des schémas tactiques, de la violence, de l'opposition à tout prix, des résultats avant du jeu, sans prendre de plaisir à taper dans le ballon, prêts à insulter la dignité et les parents des adversaires, à se cracher dessus, se filer des coups de boule, à faire ressurgir l'état animal de l'Homme à travers des gestes dégradants, oubliant toute pudeur, toute raison car, c'est bien connu, la sobriété ne l'emporte jamais. Pas sur les terrains de sport. Mais le pire, car malheureusement on a été capable de faire pire, c'est ce que les spectateurs, ou même les joueurs apprécient: combien de fois, je vous le demande, n'a-t-on pas subi, si vous ne vous êtes pas encore laissés emporter par la folie de ces petits jeux sadiques mais avec lesquels on s'amuse tellement, les insultes criées lâchement, permettant de se défouler contre un joueur, peu importe lequel, pourvu qu'il soit un adversaire (la couleur de la personne l'emportant parfois sur la couleur du maillot), qui pourtant, aux yeux de personnes raisonnées, reste un être humain, incapable, dans ce genre de circonstances, de se contrôler, répondant par des gestes choquants de vérité, qui mettent mal à l'aise. Eh oui, le sport professionnel, sans parler du fric, des sponsors, de la corruption et des transferts, c'est cela, et rien que cela. Combien le transfert de Zidane au Real Madrid, combien ? 75 millions d'euros. 75 millions d'euros ! Une somme qui fait mal, mais qui ne surprend pas quand on est supporter. Le maillot jaune, quelle vitesse, lors de la 789ème étape, en pleine asension d'un sommet, vers midi, un jour de juillet ? C'est choquant. Vous me direz, je sais, que le sport, ce n'est pas toujours ainsi, regardez tel ou tel joueur, ses dribbles, ses feintes de frappes... Si vous parlez de cette personne, c'est qu'elle est connue, qu'elle peut influencer bon nombre de spectateurs, qu'elle a de fortes chances d'être blanche et qu'elle pose pour une marque de rasoirs. Maintenant, quel rapport avec l'Education Nationale et l' Education Physique et Sportive, beau nom bien soutenu qui ne s'applique jamais qu'à ceux qui sont susceptibles de jouer avec des raquettes ? A votre avis ? L'EPS, et cela me fait encore rire, c'est l'une des plus grosses impostures du siècle ! On y méprise le sport, le vrai sport, on y bafoue toute valeur, on favorise la compétition, cellelà même qui amène les professionnels à ingérer certaines substances en provenance d'un pays lointain et encore inconnues donc indétectables du jury avant que le scandale, qui rime à présent avec banal, n'éclate ; les médecins ayant réussi - les héros - à identifier une trace du produit quelques mois après la victoire du traître, du lâche qui a trompé son sport tout en ignorant que c'en était un. L'EPS, donc, l'Esprit Plutôt Sectaire est ingrat: le candidat est jugé sur ses capacités, peu importe, pour ne pas dire « on s'en fout », son physique ; petit, il saute moins haut, c'est-àdire, 8 sur 20 pour le saut en hauteur ; trapu, il court moins vite ; grand, aux muscles développés, c'est bon, 16 sur 20. C'est la dure loi du sport. On ne juge pas (quelle idée d'ailleurs que de mettre des notes au sport !) sur l'investissement, le progrès et le plaisir que prend la personne à pratiquer un sport, mais sur sa performance ! Un jour viendra où l'élève désespéré par cet esprit de compétition malsain qu'on cherche à nous imposer, qu'on nous a imposé, un jour viendra, où sa seule solution pour avoir un 15 12 sera de se doper, pour grimper à la corde ! « - 5,79 mètres en dix secondes et demi, candidat un, votre jeu de jambes était légèrement décevant... Candidat deux ! » « - Vous avez su jouer sur les faiblesses de votre adversaire, numéro seize, 14,5; votre revers n'est pas assez amorti. » « - Vous n'avez pas réussi à marquer le triplé que j'attendais de vous, qui portez sur votre maillot un sponsor de jus de fruits, très beaux vos coups de coude par derrière ! » L'Education Nationale et le Ministère du sport, de la santé et de la jeunesse (le sport n'admet pas non plus les personnes âgées) ne l'ont pas compris et pourtant, comment ne pas comprendre cela ! « Pratiquez, pour votre santé, une activité physique régulière ! » se contente-t-on de nous répéter toute la journée, avec deux jeunes, deux objets ne connaissant que la soumission, en train de marquer un point, sourire aux lèvres. Pourquoi n'a-t-on pas envie de faire du sport ? Parce que sport signifie association sportive, synonyme de compétition. Les épreuves physiques prennent toute leur ampleur, ne sont dignes d'intérêt que quand il ne s'agit plus d'épreuves, de tensions, mais de plaisir, c'est pourquoi seuls les amateurs sont agréables à voir jouer, parce qu'ils sont des Hommes, qui ratent leurs passes, leurs contrôles. Les deux Ministères concernés ont donc totalement raté la mission qui leur était confiée: faire en sorte que le sport ne soit qu'une simple distraction et non inculquer une culture de la triche, de la trahison, du mensonge, de la haine et de la compétition, toute la bêtise, pour ne pas dire un autre mot plus vulgaire qui conviendrait pourtant à la situation, capable d'être produite par les humains devenus animaux. C'est ainsi, une nouvelle dictature est en marche et gare à ceux qui oseraient s'y opposer. Lucien Dethurens, 2nde9 Opinions Le vrai cinéma Hollywood est intrinsèquement lié à ce qu’on pourrait nommer «cinéma industriel». Irait-on jusqu’à cantonner le cinéma à de simples recettes identiques, toujours pétries de la même farine? Je me suis tu trop longtemps. Il faut maintenant que je parle ouvertement. Trop longtemps, le cinéma a été bafoué, méprisé, offensé. Il est aujourd’hui encore souillé par un nombre malheureusement important de films industriels, de machines à sous, dont l’origine est ce que j’appellerais «Hollywood». Eh bien j’en ai assez de tout cela. J’en ai assez qu’on associe le cinéma à un éternel divertissement sans prétention, destiné à amuser. J’en ai assez de cette théorie qui déclare que la qualité d’un film est conditionnée par un apport en effets spéciaux, par le nombre de coups de poing qu’y distribue Bruce Willis ou par le nombre de grimaces qu’y fait Jim Carrey. J’en ai assez de ce concept qui affirme qu’ « aller au cinéma avec des pop-corn » est un pléonasme. J’en ai assez qu’Hollywood ressasse à perpétuité les mêmes schémas narratifs, les mêmes personnages, les mêmes péripéties, les mêmes plaisanteries. J’en ai assez de ce cinéma industriel, de ces choses sans cœur, sans âme et encore moins d’esprit, de ces machines à sous, ayant été réalisées à la chaîne. J’en ai assez de payer 6 euros 20 pour m’abrutir ou pour entendre toujours ce même refrain lassant, cette même mélodie épuisante, ces mêmes dialogues, parfois faussement philosophiques (« Un héros a des responsabilités » du Spiderman 1) ou tout simplement lamentables (« Je vais sauver la planète », « Je t’aime », et ainsi de suite). Quelqu’un m’a dit un jour : « si Hollywood ne maîtrise pas l’art du scénario, il maîtrise par contre l’art de l’image ». C’est faux. Affirmeraiton qu’une bonne mise en scène est celle qui fourmille d’éléments insérés à l’aide d’un ordinateur ? Une mise en scène doit nous faire, nous les spectateurs, ressentir quelque chose. Un gros plan met souvent en relief la psychologie d’un personnage, un plan d’ensemble nous place souvent dans la peau d’un témoin, et ainsi de suite. Et quelques fois, ce sont même les films les plus lents et les moins dynamiques qui sont les plus forts, car la tension qu’ils mettent en place est incommensurable (4 mois, 3 semaines, 2 jours de Cristian Mungiu, dont j’ai fait une critique dans le numéro précédent). L’art de la mise en scène, l’art du montage, l’art du montage sonore ne doivent pas être négligés, ne doivent pas être insultés par une kyrielle inutile d’effets spéciaux. Je n’ai rien en soi contre les effets spéciaux, mais c’est juste que cela me révolte de voir ces deux mots trop rapidement associés avec le mot « cinéma ». Mais pourquoi en est-on venu là ? Les Eisenstein, Renoir, Murnau, Fritz Lang, Fellini, Rossellini et autres Marcel Carné se sont sûrement retournés dans leur tombe, et probablement plusieurs fois. S’ils avaient été vivants, en chair et en os, à la fin du mois de mai 2007, s’ils avaient eu la fantaisie de se promener aux alentours de l’UGC Ciné Strasbourg, 25 route du Rhin, s’ils avaient eu l’envie incoercible de jeter un coup d’œil sur les films à l’affiche, ils auraient alors trépassé sur-le-champ, en voyant les Spiderman, Shrek, Pirates des Caraïbes et autres Ocean’s 13. Moi je veux le cinéma qui nous fait rire, pleurer, geindre, frémir, applaudir, crier, jubiler et gémir, qui ne nous laisse pas indifférents, qui nous transforme littéralement. Il existe encore aujourd’hui. Il existe, mais est trop souvent mis à l’arrière-plan par la dernière comédie potache d’Eddie Murphy, le dernier concentré d’action pur ou le dernier faux drame larmoyant. Allez au Star, allez à l’Odyssée, et vous saurez de quoi je parle. Et en ce moment, il m’est impossible de ne pas penser à François Truffaut qui, lorsqu’il était un critique de cinéma particulièrement intransigeant, vitriolait le cinéma français qu’il jugeait « insincère, conventionnel et sans audace ». On peut facilement faire le parallèle avec Hollywood. Et ce « cinéma industriel » m’offusque d’autant plus que je suis un grand adepte de cinéma et que je suis attentif aux enfants que celui-ci touche. En outre, lorsqu’on pose à quelqu’un la question « Quel est ton art préféré ? », il ne devrait pas répondre « la peinture », « la musique », « la littérature » ou « la photographie », il devrait répondre « le cinéma », puisque le cinéma est la Quintessence Absolue de tous les arts, puisqu’il conjugue la littérature (avec le scénario et les dialogues), la musique, la photographie (d’où le métier de directeur de photographie), la peinture (les bons plans sont souvent composés comme des tableaux) ainsi que, évidemment, la vidéo. Je suis conscient que cet article va susciter des réactions diverses, je suis conscient qu’il est à l’origine d’une future polémique, mais c’est aussi le but recherché. Matthias Turcaud, 2nde10 « On devrait m’appeler Sainte Patience. » 13 Culture et loisirs : Cinéma Le cinéma Grindhouse Vous rappelez vous de Quentin Tarantino? Ses délires de cinéphile averti, illustrés par de petits bijoux emplis de musique rétro et de scènes cultes, tels que Kill Bill et Pulp Fiction (Palme d’Or 1994, tout de même!), pour ne citer que les plus connus… Evidemment, à moins de s’être exilé au Groenland pendant 13 ans pour étudier la fonte des glaces, vous devriez le connaître…Et Robert Rodrigue, réalisateur du bicolore Sin City, amas d’histoires tirés du comique éponyme de Frank Miller, ce nom vous dit quelque chose? Et bien, ces deux geeks du cinéma, amis de longue date, avaient envie de faire remonter le cinéma Grindhouse, genre des années 60-70 dont les principes sont quasi inconnus en Europe. Il s’agit de petits cinémas de quartier diffusant des séances tardives et nocturnes composées de deux films d’un peu plus d’une heure chacun visionnés à la suite. Les thèmes varient entre les westerns spaghettis, le gore, l’érotisme, bref, séries B et Z à fond les manettes. Hélas, ce genre de salles a été déserté et fermé depuis plus d’une dizaine d’années… Les envies de Quentin Tarantino et Robert Rodriguez n’étaient pas semblables, du moins en apparence. QT (à prononcer à l’anglaise s’il vous plaît !) rêvait depuis Kill Bill de réaliser un slasher, genre du cinéma d’horreur consistant à filmer un tueur totalement psychosé, qui tue les personnages les uns après les autres… Le genre existe depuis une trentaine d’années, avec des films tels que Texas Chainsaw Massacre (Tobe Hooper, 1974), Les Griffes de la nuit (1984, Wes Craven, le même qui a fait Scream !), Vendredi 13 (Sean S. Cunningham, 1980) ou Halloween (John Carpenter, 1978), pour ne citer que les plus connus… Et quand à Robert Rodriguez, il avait déjà touché au genre, si on en juge une scène en particulier de Sin City, c'est-à-dire celle de l’histoire de Elijah Wood, qui nous rappelle singulièrement un certain Hannibal Lecter… tant que barman, et, délaissant le tournage de son fake trailer, Eli Roth, réalisateur des deux volets de Hostel et de Cabin Fever, jouant un ami de ces charmantes créatures… Dans la deuxième partie du film, le profil des héroïnes changera peu, mis à part le fait que cette fois ci, elles ne se laisseront pas faire si facilement… La touche tarantinesque est bien remarquable dans le premier opus de Grindhouse, oscillant entre violence soudaine et humour noir : références à des road movies que seul Tarantino semble connaître, récurrence quelque peu fétichiste des gros plans sur les pieds (visionnez à nouveau Pulp Fiction ou Kill Bill, vous comprendrez de quoi je parle), ainsi que, petit clin d’œil à Kill Bill, la sonnerie d’une des filles qui n’est autre que le thème que sifflote Elle Driver, l’infirmière borgne…. Le film est donc divisé en deux parties : la première, Le Boulevard de la Mort (Death Proof en version originale) avec le vieux Kurt Russel, qui joue Stuntman Mike (ça claque quand même plus que le Cascadeur Mike en VF…) dont l’activité principale sera de tuer de belles demoiselles, à diverses occasions, mais de manière semblable… Non pas avec une banale arme blanche, mais avec sa voiture, rodée pour les cascades en tout genre! Dans la première partie du film, ses victimes seront une DJ avec ses amies ; l’action se passe dans un paysage typiquement américain : Texas, un petit bar à côté de la route, avec une musique bien rétro mais loin d’être dénuée de charme. On reconnaîtra Quentin Tarantino en Ensuite, la seconde partie, Planet Terreur (Planet Terror), est l’archétype du film de série B : budget en apparence minable, scénario à deux balles, effets spéciaux sanglants à prendre au second degré. Ici, Robert Rodriguez met en scène une infection de zombie (encore un fan de George Romero?) dans une ville à demi morte, dont les seuls survivants sont un couple de médecins (dont le mari supporte plutôt mal le fait que sa femme le trompe avec une autre), une danseuse du nom de Cherry Darling devenue unijambiste suite à une attaque, et Wray, son ex petit ami. Tandis que l’épidémie se propage, un groupuscule de survivants tente de s’en sortir… Contrairement au premier opus du diptyque Grindhouse, le film de Robert Rodriguez paraît moins accessible : le cinéma de genre, bien qu’il se soit largement popularisé ces dernières années (à en juger par le succès de films tels que Saw) reste néanmoins peu apprécié par le grand public, les amateurs de films pleins d’humour noir où les réalisateurs ne lésinent pas sur la quantité de sang déversé sur les acteurs, demeurant peu nombreux. La comparaison des entrées au box office en France des deux films est assez frappante : elle passe de 627 459 pour Death Proof à 134 427 pour Planet Terror, soit presque cinq fois moins… Ce qu’on pourrait se demander, c’est comment ces deux films ont réussi à avoir un effet réellement rétro et dans le genre des années 70 ! Eh bien un des points les plus importants est la musique ! Les amateurs de Quentin Tarantino doivent certainement le savoir, au vu des bandes originales absolument mythiques qu’il nous offre avec chacun de ces films… Mais il y a aussi un côté visuel aussi bien particulier : images de mauvaise qualité, pellicule qui saute (tout les réalisateurs, et surtout Eli Roth pour sa bande annonce, se sont bien éclatés à sauter dessus comme des barbares, pour les abîmer au maximum…) voire qui flambe, musique qui raille… Pire ! Dans la version américaine de Grindhouse, il y a mêmes des pellicules manquantes… Mais toute cette multitude de pseudo défauts a été volontairement ajoutée aux films, lui donnant un charme typiquement seventies En parlant du volume de la sonnerie du lycée : « Dans le bâtiment A, la douceur de Noël, c’est pire qu’un groupe de Heavy Metal ! » 14 Culture et loisirs : Cinéma Autre particularité non négligeable du genre : les bandes annonces. Avec le recul, elles paraissent souvent bien kitsch et ridicule, mais elles restent néanmoins délicieuses et délirantes à visionner… Faisant partie intégrante des films Grindhouse, elles annonçaient les prochaines sorties, mais faisaient aussi un peu de pub pour les restaurants ou bars locaux. Tarantino et Rodriguez n’ont donc pas zappé ces petits bijoux, et ont offert au public américain quatre faux génériques de film, qu’ont peu trouver aisément en France sur internet. Le premier, Machete, réalisé par Robert Rodriguez, met en scène Danny Trejo, un habitué des films d’action et récemment de ceux de Rob Zombie (il a incarné par exemple un gardien de prison dans le dernier Halloween), mais qui joue ici un « nettoyeur » mexicain apparemment pas très content d’avoir été trahi par une des personnes qui l’employait… Et comme on parle de ce cher Robert, il a aussi réalisé Werevolves Woman of the SS, qui met en scène sa femme, la belle Sheri Moon Zombie, ainsi que, dans le rôle bien surprenant de Fu Man Chu, Nicolas Cage, qu’ont croyait plus abonné au jeu de policier que de chinois agressif… Ensuite, Edgar Wright a mis la main à la pâte dans Don’t : celui qui nous a offert le délirant Shaun of the Dead nous prouve une fois de plus qu’on peut faire des choses bien sympathiques et drôles avec le thème des mortsvivants et des maisons hantées… Hmm, ça donnerait bien envie de regarder à nouveau une de ces vieilles perles de Peter Jackson ou Sam Raimi, comme quoi il n’y a pas que Le Seigneur des Anneaux ou Spiderman dans la vie… Et pour finir, il reste Thanksgiving, de Eli Roth, qui trouvait qu’aucun film ne traitait de cette fête ; tourner un faux trailer lui a tellement plu qu’il a désormais le projet de tourner un film entier dédié à ces bandes annonces rétro, qu’il nommera Trailer Trash d’après les premiers échos. Pour ceux qui ne connaissaient pas le genre, nous vous conseillons vivement de vous procurer ces deux films, dont les DVD devraient sortir aux alentours des fêtes de Noël. Enjoy ! Sarah Brucker, TS2 En parlant des prisonniers qui regardent les ombres dans le Mythe de la Caverne (Platon) : « Je traduis, c’est comme celui qui prédit dans le Loft le prochain éliminé ou dans le Bachelor la prochaine jeune fille éliminée… » 15 Culture et loisirs : Cinéma Ton nom est Justine de Franco de Pena Ce film est une coproduction majoritaire entre le Luxembourg et la Pologne et a été tourné en grande partie au Luxembourg où il est sorti le 15 septembre 2006. Il a reçu le prix de la meilleure contribution artistique au Festival des Films du Monde à Montréal et le prix de la meilleure actrice aux festivals de Poznan et Mons. Il a été proposé par le ciné club le lundi 12 novembre 2007 à l’Odyssée. C’était très violent. Tout d’abord la violence des faits : Arthur, un “copain d’enfance”, petit ami probablement récent d’une jeune fille nommée Mariola, l’emmène en “vacances”, chez son père en Allemagne. La jeune fille prévient sa grandmère, avec qui elle vit, de son départ seule avec ce garçon la nuit où elle part par une lettre signée : ta princesse. Elle part malgré les avertissements de sa grand-mère : “Ta mère aussi a fait trop confiance aux hommes.” Arrivés à Cologne, ils vont “faire un pause” chez des “amis” pour repartir le lendemain. Dans l’appartement lugubre où ils se rendent, Arthur vend sa “copine” à un autre proxénète, le même soir elle se fait violer deux fois. Ces scènes sont terrifiantes, les plans resserés sur le visage sanglant et défiguré par les cris de la jeune fille, dans le vide. Ensuite, une des scènes qui m’ont paru les plus brutales est celle où la jeune fille, assise sur une chaise devant la petite table de la pièce déserte et froide, ne sachant pas encore ce qui est en train de lui arriver, se précipite auprès de son “copain” car un des hommes présent vient de lui caresser la joue. Jusqu’ici le spectateur ne se doutait pas, face à la sympathie galante et douce du personnage d’Arthur, de la situation. Et très rapidement tout s’écroule et l’on comprend que Mariola est vraiment coincée. Ce qui est percutant, c’est le changement radical d’Arthur à ce moment là. Son visage se raidit et révèle un aspect effrayant. Il ne prend pas Mariola dans ses bras pour la défendre ou la rassurer comme on aurait pu s’y attendre, il la tient fermement, en lui agrippant les bras, comme un objet. Et puis il y a aussi une comparaison à faire entre la toute première scène et le reste du film. La scène d’ouverture présente un abattoir de cochons dans une ambiance morbide et glauque, avec de la fumée ou de la vapeur... On assiste à une succession saccadée de gros plans sur des porcs, sur leurs chairs roses, sur leur mort. C’est à vomir. Nous sommes en fait dans l’usine la plus productive de jambon d’Europe et trois filles y sont avec d’autres jeunes pour y trouver un travail. Ce sont Mariola et ses deux amies. Le directeur est un personnage sadique et dur. Il appelle une première fille à s’avancer pour couper un morceau de viande mais la fille dégoûtée par sa tâche court vomir au lavabo. Ses deux amies la supplient de revenir : il lui faut ce travail. Elle refuse, elle ne peut pas. Alors Mariola s’avance, coupe la viande et jette le morceau avec les autres. Elle est employée. Ces jeunes filles paraissent faibles et légères entre elles, elles ont absolument besoin d’un travail et sont également des exploitables faciles. Arthur la présentera comme une marchandise à ses “collègues” : il lui ouvre son chemisier devant eux et leur montre un sein. L’un fait un commentaire : “ Elle a de petits seins mais elle a un bon cul”. La fille est terrorisée et impuissante. Malgré tout elle se débat comme elle peut. Sa résistance la mènera bien plus tard dans le film à tuer Arthur avec le couteau qui était en train de lui servir à couper un morceau de viande... A un second plan il y a une vieille forme de violence tue. Des railleries des petites filles qu’étaient Mariola et ses copines envers le petit Arthur qui bégayait. Quand elles se moquent encore de lui, on sent sa susceptibilité cloitrée au bord de l’explosion. Mais il contrôle sa frustration, il est dans un jeu de comédien et sait pourquoi il est là. Coincée au fond d’un trou, sans échappatoire, le pire des murs pour Mariola est la menace. La mamie restée en Pologne à qui elle est forcée de faire croire par lettre que tout va bien, la mamie comme unique famille, prise en photo par le “charmant Arthur”, avec sa petite fille. Cette photo, on lui place sous les yeux pour bien lui faire comprendre qu’elle doit s’exécuter car sinon... Je veux également parler de la révolte que provoque la cruauté d’un homme parmi d’autres, qui demande à “Justine” son vrai prénom, qui la “veut” vraie et naturelle et dont on n’aura plus de signe après le “pacte” : “You help me and I give you all you want ! ” “Ich komme aus Poland ! “. Des hommes aveugles et moches qui se succèdent les uns après les autres. On peut parler de la force de résistance de Mariola sur Justine. De la personne sur sa condition. Elle aurait pu se jeter par la fenêtre : elle aurait pu tuer Mariola pour tuer Justine. Mais elle parle à sa grand-mère en pensée et la pensée la fait survivre. Elle se coupe les cheveux avec un bout de verre pour ne pas ressembler à une “jolie poupée”. A son retour en Pologne par le train elle s’interroge : “ Comment vivre après tant de violence ? “ Puis on la voit poser des fleurs sur la tombe de sa grand-mère. Le visage face à la mer, la caméra derrière sa tête pour donner une impression d’avancer vers l’horizon, elle pense toujours : “Mes amies sont mariées, elles ont l’air heureuse, pourrai-je l’être aussi un jour ?” Et puis en plongée, d’assez haut, on la voit rejoindre en courant sur la plage ses amies qui l’appellent. Juliette Weller, 1L1 Image extraite de : Centre national de l’audioviuel [en ligne]. DCNA, 2007. Disponible à l’adresse : http://www.cna.public.lu/1_FILM/News/oscars_2006/ 16 Culture et loisirs : Cinéma Le Rêve de Cassandre Ou l'éternel retour de Woody Allen... Comme chaque fin d'année, depuis un certain temps, Woody Allen nous fait le coup de l'éternel retour et chaque année on sort du cinéma plus ou moins convaincu. Les amateurs du cinéaste (dont moi) ne pourront s'empêcher de constater que Le Rêve de Cassandre est une grosse déception et qu'il ne pèse pas grand chose à côté des classiques du maître new-yorkais que sont Annie Hall, La Rose Pourpre Du Caire, Stardust Memories ou encore le chef-d'oeuvre mythique Manhattan ! minutes sont ennuyeuses et sans, quasiment, aucun grand intérêt. Que ce soit la folie de Terry pour le jeu ou encore la relation entre Ian et l'actrice Amanda (qui sonne comme une grosse guimauve bien rance), le début du film est bien trop lent. L'histoire ne semble pas vraiment décoller, les dialogues sont en dessous des grands crus alleniens, on a même l'impression, par moments, que Woody Allen essaye de se caricaturer (si c'était le but du film il y est arrivé magnifiquement). Le film commence seulement avec l'arrivée de l'oncle Howard à qui les deux frères Terry et Ian demandent de l'argent pour de nombreuses raisons. L'oncle accepte de les aider à la condition que nos deux inséparables éliminent une personne qui veut faire du tort à leur cher oncle. Le film devient un peu plus intéressant et on sourit même à quelques passages. Mais l'ensemble sonne comme une sorte de sous Match Point, on ressort tous les ingrédients pour faire la même recette, sauf que le plat ne prend pas tellement. Quant à la fin du film, elle est complètement bâclée. On ressort du cinéma totalement déçu, ce qui est dommage car j'aime beaucoup Woody Allen en général, c'est peut-être le fait qu'il tourne à Londres ces dernières années qui le rend moins inspiré! Si c'est le cas il serait temps que Woody Allen retourne dans son bon vieux New York... Depuis 1998 avec le fantastique Harry Dans Tous Ses Etats, Woody Allen est plongé dans une sorte de léthargie artistique l'empêchant de se renouveler dans ses films. Woody Allen ressort les vieilles formules, la magie en moins, laissant place à des films sympathiques sans qu'ils marquent, un seul instant, les esprits. Mais la sortie, en 2005, de Match Point, petit bijou tant attendu depuis si longtemps, nous avait donné de nombreux espoirs sur les films à venir dans la filmographie de ce bon vieux Woody. Le Rêve de Cassandre brise tous ces espoirs en un rien de temps. NB: La version française, avec ses voix stéréotypées aussi expressives que celles des animateurs télé, est une catastrophe et je vous recommande fortement de voir ce film en VOST (comme tous les Woody Allen et les films étrangers et général). Deux frères, ayant chacun des problèmes financiers, s'achètent un voilier qu'ils baptisent le "Rêve de Cassandre". Les quarante premières Mathieu Perez, 2nde1 Opinion Publicité pour Lindt (Novembre 2007) Un tiers de la population aux Etats-Unis est obèse. 40 millions de personnes sont infectées par le sida. Près de 800 millions de personnes souffrent de malnutrition ou de famine dans le monde. Environ 300 à 500 tonnes de déchets dangereux sont générées chaque année dans le monde. La télévision rend les gens inaptes à faire quoi que ce soit, replets et très bêtes. En 2006, la mortalité infantile en Afrique est de 89 %. George W. Bush est toujours président. Mais Lindt peut vous faire oublier tout ce cauchemar. Il vous propose de délicieux pralinés au goût fin et subtil, enrobés de chocolat très lisse et dans lesquels se trouvent d’irrésistibles éclats de noisettes torréfiés, ainsi que du beurre de cacao absolument fantastique. Dans chaque once de chocolat, une tonne de volupté. Lindt, c’est nous qui sommes le plus attachés à promouvoir votre bonheur. Lindt, c’est nous qui contribuons le plus à vous rendre heureux. Lindt, c’est nous qui vous offrons la plénitude parfaite pour 3 euros 99 (seulement !). Matthias Turcaud, 2nde10 Source de l'image : Telemarket [en ligne]. Telemarket, 2007 [consulté le 5 novembre 2007]. Disponible à l'adresse: www.telemarketpro.fr 17 Culture et loisirs : Cinéma Cocktail psychédélique avec un Dujardin en pleine forme : 99 francs de Jan Kounen Jean Dujardin Plusieurs versions cinématographiques du livre polémique et virulent de Frédéric Beigbeder avaient été prévues (dont une d'Antoine de Caunes avec Edouard Baer). C'est finalement à Jan Kounen qu'est revenue la réalisation de cette adaptation; et il faut dire que le cinéaste, déjà auteur du concentré de violence Dobermann et du western mystique Blueberry, a l'air de s'être beaucoup amusé. En effet, le film pullule de trouvailles visuelles et artistiques; une prépondérance de gros plans ingénieux même si parfois maladroits, des insertions de publicités médiocres, une juxtaposition maligne de scènes appartenant à l'histoire racontée par le film et de scènes parlant d'abattoirs, d'animaux maltraités, de famine et de pauvreté (qu'on pourrait qualifier d'images subliminales), une musique quasiment omniprésente, qu'elle soit produite par un orchestre symphonique ou par des bruits électroniques ainsi que l'usage cocasse de la bande-dessinée apparentent le film à un délire cinématographique osé. De plus, si le but du film était de critiquer la publicité, c'est réussi: on sort du film dégoûté à jamais de la publicité. Comme scène qui dénonce vraiment l'aspect dérisoire de ce monde artificiel, je citerais la scène lors de laquelle Octave atterrit sur le plateau de tournage d'une publicité et que les intervenants ne cessent de répéter le même charabia insensé ("Eric a gagné le match ! - J'ai mis trois buts ! - Une belle barre chocolatée pour le grand champion..."). Néanmoins la critique de la publicité n'est, contrairement à ce qu'on aurait pu penser avant de voir 99 Francs, qu'un seul aspect de ce film qui présente trois autres pistes thématiques très larges; sont abordés premièrement la monotonie et la solitude inhérentes aux sociétés capitalistes (un peu comme l'a fait Houellebecq dans ses livres, notamment Extension du domaine de la lutte et Les particules élémentaires), secondement les conséquences liées à l'usage de la drogue et troisièmement la confusion de l'univers du rêve et de la réalité, qui est, on l'a vu dans Blueberry, un des thèmes de prédilection de Jan Kounen. Le film traite donc de ces trois thèmes, parfois de façon inégale, mais globalement très originale. Pourront être relevés dans un scénario ambitieux quelques plaisanteries un peu lourdes et quelques longueurs (notamment le passage dans l'île), cependant le ton déjanté et novateur ainsi que la féerie visuelle ont de quoi remporter l'adhésion. Avant de terminer ma critique, je parlerai encore de la prestation de Jean Dujardin. Après avoir été remarqué uniquement pour son talent comique (la série Un gars, une fille, la comédie juvénile Brice de Nice), il est désormais reconnu comme un comédien audacieux et ambitieux, n'hésitant pas à se lancer dans des projets parfois risqués (OSS 117 - Le Caire, nid d'espions, Il ne faut jurer de rien et 99 francs en tête). On peut aussi juger de son aptitude à changer facilement de physique pour mieux interpréter tel ou tel personnage. Dans 99 francs, sans que sa prestation ne mérite vraiment d'être récompensée par un César d'interprétation, contrairement à OSS 117, elle se révèle être capable de mettre en valeur les quatre thèmes principaux du film, la critique de la publicité, la présentation de la solitude et de la monotonie inhérentes aux sociétés capitalistes, à la fois les conséquences liées à l'usage de la drogue, le mélange de rêve et de réalité. Ainsi, son interprétation ne pourrait être qualifiée par un seul adjectif; il se révèle tour à tour dramatique, comique, émouvant, satirique, déjanté; à l'instar du film d'ailleurs. Jan Kounen signe ici une adaptation réussie de l'autobiographie critique de Frédéric Beigbeder. Malgré quelques défauts et quelques lacunes, elle mérite largement d'être vue. Matthias Turcaud, 2nde10 Source de l'image: 99 francsc In : Comme au cinéma [en ligne]. Comme au cinéma, 2007 [consulté le 4 novembre 2007]. Disponible à l'adresse: www.commeaucinema.com/photos=63808.html « Moi, je vous avoue, j'ai toujours voulu être pape: la papamobile et tout ça, ça me fait rêver. » 18 Culture et loisirs : Cinéma Œuvre viscérale et forte L’ennemi intime de Florent Emilio Siri avec Benoît Magimel et Albert Dupontel (France, 2007) Après avoir réalisé le policier Nid de guêpes et le film à suspense Otage, Florent Emilio Siri confirme son statut de réalisateur affranchi des codes et des conventions cinématographiques contemporains, avec L'ennemi intime, sorti au cinéma au début du mois d'octobre 2007. Bien que quelques journalistes et cinéphiles l'aient comparé à Indigènes, on remarque quand même une différence essentielle entre ces deux films au niveau de l'intrigue et de la thématique choisie. L'intérêt principal d'Indigènes s'avère être de faire un hommage aux soldats maghrébins et africains ayant combattu pour la France pendant la seconde guerre mondiale, tandis que celui de L'ennemi intime réside surtout en un scénario qui insiste sur l'évolution psychologique de deux protagonistes, en rapport avec la guerre et ses horreurs. Dès les premières scènes, Siri donne le ton et l'ambiance que l'on retiendra du film: angoissant et oppressant. Après un errement lent et nocturne dans les hautes montagnes Kabyles, qui seront le théâtre du développement de la folie du lieutenant Terrien, le titre du film est inséré en grandes lettres blanches sur un fond sombre, puis le réalisateur nous montre déjà l'importance qu'il accorde au lieu en question avec un plan assez mémorable, montrant toute l'étendue des montagnes algériennes et leur conférant une dimension singulière. Il est inutile de dire que par le biais de cette présentation et de ce début, l'attention du spectateur est totalement gagnée. Ce ton angoissant est donc gardé, comme je l'ai évoqué précédemment, pendant la durée du film ou à peu près. Cependant, certains ne vont peut-être même pas lui prêter attention, décidés à accorder beaucoup d'importance à d'autres éléments du film. Effectivement, ce film présente beaucoup d'aspects notables. Je vais cependant essayer d'en parler dans un seul paragraphe, ce qui n'est pas si difficile, puisque ces différents éléments se trouvent souvent être en grande symbiose. Les aspects que beaucoup se plairont à remarquer peuvent se résumer dans l'alchimie parfaite qui réside entre une photographie riche et caressante pour les yeux, un scénario hautement approfondi et subtil ainsi qu'une interprétation de Benoît Magimel carrément extraordinaire. Par conséquent, lorsque des gros plans exquisement audacieux viennent souligner la complexité de la psychologie du lieutenant Terrien, qui est d'ailleurs bien mise en relief par le jeu extrêmement juste et tout en nuances de l'interprète masculin principal du Pianiste, c'est un vrai bonheur pour le spectateur qui, devant la réussite d'une telle conjugaison cinématographique, ne peut plus que dire: "C'est du grand cinéma". Et pour ça, rien que pour ça, rien que pour cette impressionnante alchimie ou conjugaison cinématographique, rien que pour ces quelques moments de bonheur cinématographique paroxystique, le film mérite absolument ses quatre étoiles (qui lui ont d'ailleurs été attribuées par les magazines et journaux Télé7 Jours, Ciné Live, Le Journal du Dimanche, Metro, Le Figaro et Le Parisien). Certains critiques (je pense notamment aux Inrocks) ont reproché à L'ennemi intime de ne pas avoir abordé de façon complète le thème de la guerre d'Algérie. Néanmoins, je pense que tel n'était pas l'objectif que s'étaient fixé Florent Emilio Siri et Patrick Rothman. Leur film n'était pas censé être une peinture fidèle de cette guerre d'Algérie. Non, la problématique fixée est beaucoup plus particulière et moins vaste: il s'agit de l'histoire d'un lieutenant (ou d'un soldat), qui va être conscient de son impuissance face à la torture et à la guerre et qui, ne pouvant supporter cette trop violente vérité, va sombrer dans la folie (à ce propos une des scènes les plus impressionnantes du film est peut-être la scène lors de laquelle Terrien prend du plaisir à torturer un captif). La guerre d'Algérie ne sert que de toile de fond. Cela aurait pu très bien être une autre guerre, un autre conflit; l'intrigue principale est en fin de compte universelle, si l'on supprime les habitudes et les moeurs des soldats et le fait que le lieutenant lit L'écume des jours de Boris Vian avant de s'endormir. Par rapport à la mise en scène, je dirais que Siri n'a pas à rougir devant les meilleures mises en scènes des films de guerre, car si certains de ses choix artistiques sont contestables, il a le mérite de prendre des risques. Son travail de mise en scène est d'ailleurs accentué par une photographie de Giovanni Fiore Coltellaci de très haute qualité qui mériterait de se voir saluée par un César. J'ai déjà dit un mot de l'interprétation de Benoît Magimel, j'ajouterais qu'il est bien secondé par un Albert Dupontel en pleine forme, qui sonne très juste pendant toute la durée du film. Il faudrait d'ailleurs insister sur la qualité de son interprétation, dans une période où l'acteur français tourne un peu trop et pas toujours dans des films excellents. Pour finir je dirais que L'ennemi intime s'avère être, ce qui est rare, à la fois un film à valeur pédagogique malgré ses scènes de torture ("VSD" a affirmé qu'il devait être projeté dans toutes les écoles françaises et algériennes) et un film de guerre viscéral et parfaitement viscéral, qui s'impose comme un des meilleurs du genre. Matthias Turcaud, 2nde10 Source de l'image : L’ennemi intime. In : Comme au cinéma [en ligne]. Comme au cinéma, 2007 [consulté le 4 novembre 2007]. Disponible à l'adresse: www.commeaucinema.com/photos=63808.html 19 Culture et loisirs : Cinéma Le deuxième souffle Adaptation cinématographique trop fidèle au roman de Giovanni réalisée par Corneau (France, 2007) Gu, célèbre et dangereux gangster condamné à vie, s'évade de prison. Traqué par la police, il veut s'enfuir à l'étranger avec Manouche, la femme qu'il aime. Ayant besoin d'argent, il accepte de participer à un dernier hold-up. Grâce à lui, le coup est une réussite. Mais, victime d'une machination montée par la police, Gu passe pour un donneur et un traître aux yeux de ses complices. Pour laver son honneur, Gu prendra tous les risques... Le français Alain Corneau, réalisateur d'une adaptation cinématographique du roman autobiographique d'Amélie Nothomb, Stupeur et tremblements, entre autres, signe ici une nouvelle version du livre de José Giovanni. Beaucoup ne comprennent pas pourquoi un remake a vu le jour, gardant en très haute estime le chef-d'oeuvre de Melville, dont ils se remémorent les dialogues mordants de Paul Meurisse et la partition impeccable de Lino Ventura, avec un goût de légère nostalgie. Corneau était probablement désireux de revenir aux sources ; de réaliser un film encore plus fidèle à l'ouvrage de Giovanni, faisant part de tous les thèmes importants, de tous les personnages secondaires majeurs et sous-jacents, de toutes les intrigues principales. Le nouveau Deuxième souffle prouve que la fidélité de l'adaptation cinématographique d'une oeuvre littéraire a ses limites. Ici le spectateur s'égare dans un complexe labyrinthique d'histoires et de personnages, se perd dans les méandres d'un scénario qui, à force d'évoquer les linéanements de telle ou telle intrigue, ne présente pas de cohérence artistique réelle. Les histoires s'emboîtent, les personnages viennent, reviennent et repartent dans un désordre regrettable. Et, à force de ne pas jouer dans la simplicité, le scénario s'avère trop superficiel et trop confus. dans des tons quelquefois ocres et quelquefois brillants, apportant une pointe d'onirisme tout aussi salutaire. Soulignons aussi une reconstitution parfaite des années soixante, à l'aide de costumes et de décors absolument superbes. Le soin qui a été apporté à la réalisation est par conséquent incontestable et a de quoi, à lui seul, faire oublier de temps en temps les défauts du scénario. En outre, une pléiade de bons comédiens s'allient à la qualité de la réalisation pour nous procurer de beaux moments cinématographiques. Parmi une ribambelle d'acteurs plus ou moins connus, je prendrais surtout en compte la prestation de Michel Blanc, magistral dans son personnage du commissaire Blot, celle de Gilbert Melki (rendu très esthétique grâce à un maquillage séduisant), qui, malgré son petit rôle, arrive à transcender son personnage de Joe Ricci ainsi que celle de Nicolas Duchauvelle, en jeune brute courageuse. Le reste de la distribution luxueuse du film est satisfaisant, mais ne mérite pas d'être particulièrement loué : Monica Bellucci use une fois encore de ses soupirs lascifs, de son accent italien et de son charme sensuel, sans rien apporter de nouveau, Jacques Dutronc donne lui aussi à voir des aspects connus de son jeu d'acteur (c'est-à-dire sa voix délibérément rauque, son air de croque-mort sinistre et sa sobriété exacerbée), l'interprétation de Daniel Auteuil a la particularité de laisser le spectateur quelque peu indifférent et si le timbre rude de la voix d'Eric Cantona est charmant, celui-ci aurait pu faire plus d'efforts. Néanmoins, le film possède des qualités qu'on ne saurait nier. L'adaptation trop fidèle et pas assez condensée peut être parfois oubliée en raison d'autres aspects plus satisfaisants. Si Corneau déçoit par son travail de scénariste, il convainc beaucoup plus en tant que metteur en scène. Inspiré par les mises en scène asiatiques (Woo et Yimou par exemple), le français nous propose des ralentis quasi poétiques, des changements de prises de vues bien venus et une fluidité d'ensemble, qui constraste étrangement avec le scénario trop superficiel. Une lumière splendide baigne les personnages du film dans une ambiance singulière et la photographie magnifique d'Yves Angelo les sublime Ajoutons que Le deuxième souffle remplit aussi tout à fait les critères du divertissement populaire, il ne saurait donc être considéré comme mauvais. Une distribution globalement bonne, une réalisation soignée et de beaux moments de cinéma compensent les maladresses d'un scénario que je qualifierais selon l'expression de Ciné Live de "long, maniéré et complexe". Dispensable mais intéressant. Source de l'image: Le deuxième souffle. In : Comme au cinéma [en ligne]. Comme au cinéma, 2007. [Consulté le 12 novembre]. Disponible à l'adresse: http://www.commeaucinema.com/photos=61796.html Matthias Turcaud, 2nde10 « Un quasi-modal...des quasi-modaux [rires], si si, je vous assure, ça se dit comme ça. » 20 Culture et loisirs : Musique “Et Justice pour tous” Justice est le duo électro du moment. Déjà qualifié de “nouveau Daft Punk”, Justice représente la nouvelle “French touch”, je me devais d’aller vérifier ça. Au programme de ce jeudi 1er novembre 2007 : Jackson, Busy P et... Justice, récit d’une soirée atypique... “Quoi ? Sérieusement ?”, m’écriaisje au téléphone fin octobre. Pourquoi ? Eh bien parce que les places du concert de Justice (900) ont été vendues depuis bien longtemps par les artefacts et comme par enchantement, l’un des magiciens de la Laiterie me propose au téléphone une place, là comme ça. Je saisis ma chance, okay, let’s go. 20h30 dans la rue du Hohwald, y a foule c’est le moins que l’on puisse dire. Je m’avance vers un vigile : “j’ai des places réservées, je dois les récupérer chez [nom de l’ami], j’ai pas besoin de faire la queue, hein?”, dis-je d’un air feignant d’être convainquant. “Non, tu fais la queue comme tout le monde”, ok monsieur, mais tu me promets que je peux entrer avant la fin du concert... L’instinct de journaliste me prend, ce vigile je l’e******, je me faufile dans le début de la queue, j’ai l’impression d’avoir bafoué la loi de “tuarrivestroptardtupassesendernier”. Entrée et au premier rang à plus de 22h, la première partie assurée par le DJ strasbourgeois Discode est passée totalement inaperçue car presque finie lorsque la foule a pu enfin entrer dans l’enceinte de la Laiterie... Bon, on se décourage pas. C’est au tour d’une sorte de EdBanger Party avec au programme deux heures de set de Jackson (un guest), deux de Busy P et un de ces quatre on pourra voir Justice. Il est 22h30 et Jackson arrive sur scène, en face à un mètre cinquante de moi. Le moins qu’on puisse dire c’est que la première impression reste floue dans mon esprit : chemise rayée noire et blanche, cheveux pleins de brillantine, petite moustache et sourire niais, à peu de choses près il me fait penser à Hitler devant des platines : il est partagé entre l’impression de s’excuser d’être là et il feint d’être en osmose avec le public. Ce jeune homme-là n’est pas à présenter à vos parents, ça c’est clair en cinq minutes (de plus Discode m’a raconté que Jackson s’est lâché sur le sucre en poudre...). Le set de celui-ci se compose d’une vaste mixture de revival des années 80/90 et la new wave EdBangerienne des 00’s, c’est louche car entre Sea, sexe and sun et du SebastiAn, y a un monde. La structure n’est pas cohérente, le mix des morceaux est des fois insupportable, un coup d’oeil à gauche puis à droite je vois des gens qui feignent de s’éclater et d’autres qui n’ont pas peur de montrer qu’ils auraient préféré rester chez eux. Il est minuit et Busy P arrive. Une légende en face de moi car il n’est autre que le patron de EdBanger Records, le label indépendant de musique électronique le plus prolifique et détenteur sans pitié du marché de ces dernières années avec au compteur Uffie, Justice, SebastiAn pour ne citer que les principaux artistes. Busy P c’est aussi le manager de longue date de Daft Punk (un rapport avec le chapeau de l’article?) et un excellent DJ, forcément, il connaît tout. Arborant un cardigan que je dirais venir de chez Emmaüs et des cheveux longs mal coiffés, négligemment passés en mèche sur son visage, Busy P excelle avec un set terriblement cohérent, un mix absolument parfait, ses doigts se balladent sur les platines d’une manière féérique, de la musique électronique qui semblera “hard core” pour les gens venus voir Justice après entendu D.A.N.C.E sur NRJ, mais tout passe en revue : Daft Punk bien entendu, un petit Ready to Uff d’Uffie et un remix énormissime de Feist par Boyz Noise qui me laisse les yeux fermés dans une ivresse intense. Strasbourg n’aura jamais entendu quelque chose de similaire. Ça se réveille dans le public mais vers 1h30 du matin on voit les premiers signes de fatigue dans le public, ça se gratte les yeux, ça baille, se maintient le dos, on dirait presque un bal du troisième âge. Busy P nous annonce que le groupe était aux MTV european music awards à Munich et qu’ils sont en voiture direction Strasbourg. Presque en guise d’excuse il nous narre le récit des deux prix que ses poulains ont rapporté à papa. 2h10, on en a tous un peu marre là, mais après s’être acheté des clopes (j’ai lu sur les lèvres de Busy), ils sont enfin là. Eux les vrais. Le décor se découvre : dix mètres carrés d’amplis de chaque côté de la scène, une caisse géante avec des diodes vertes et rouges qui s’allument et s’éteignent pour enfin finir avec une croix géante, illuminée. C’est du show ça dit donc, mais c’est à se demander s’ils se prennent déjà pour Daft Punk ces deux gaillards. Malheureusement leur décor ne permet pas de les voir, enfin si, leurs cheveux qui bougent de haut en bas. De plus il a été possible d’admirer que le duo n’a fait que passer son album, pas de mix, pas de surprises, la foule est en délire, moi je reste bouche ouverte, terriblement déçue. Au bout de quarante minutes j’en peux plus, je sais qu’il n’y a plus de trams, qu’il fait froid et que j’habite à l’autre bout de Strasbourg, je sors. Ce concert aura été insupportable pour les nerfs mais agréable dans une certaine mesure pour les sens. Christelle Gleitz, TL2 « C’est pas gentil d’être méchant. » 21 Culture et Loisirs : Musique The Klaxons, « le mythe du futur, le must du présent » Une bouffée d’air frais dans l’univers psychédélique nu-rave, The Klaxons sont bien plus qu’une simple hype britannique, comme ils nous l’ont (re)prouvé jeudi 22 novembre 2007, à La Laiterie de Strasbourg. Jeudi 22 novembre, La Laiterie. 19h45, dans la file d’attente sans fin. Un énorme bus est stationné en face du bâtiment, et tous dans la queue se posent la même question : « c’est bien le bus des Klaxons, non ?!! ». Certains le prennent en photo, juste au cas où… Enfin arrivés à l’intérieur, on se décongèle lentement et on se précipite dans la grande salle. d’expérience de ce groupe qui ne parvient pas à toucher le public complètement, et, de temps à autre, la voix du chanteur donne plus l’impression de grincements que de chanson. Cette progression d’excitation dure une heure tout de même, mais ce qui est sûr, c’est que maintenant, tout le monde est impatient. La scène est survoltée et l’excitation est maximale dans la salle quand le groupe joue ses morceaux les plus connus, comme les excellents Two Receivers, Isle of Her (sans doute un de leurs meilleurs morceaux), ou encore It’s Not Over Yet (très probablement leur hymne), même si The Klaxons se perd Une quinzaine de minutes plus tard, les lumières s’éteignent, et tout le monde a les yeux rivés sur la scène. Les projecteurs se rallument, les Klaxons sont sur scène, prêts. Et ils commencent à jouer, débordant d’énergie. Tous les morceaux de leur premier album Myths of the New Future seront joués ce soir. Au bout de quelques minutes seulement, la foule se déchaîne et entre sans difficulté dans l’univers fluo-pop-acidulé des Klaxons. L’enchaînement de titres dansants, la folie de leur morceaux entraînants assurent le bain de foule, entre les déchaînées qui poussent juste pour pousser, ceux et celles qui plongent dans la foule et traversent la scène, et ceux et celles qui tentent simplement de danser, si possible en voyant les musiciens. Le chanteur des Neils Children quelques fois dans ses délires. Malheureusement, toute bonne chose a une fin, et c’est avec regrets que la salle se vide, car le concert s’est terminé beaucoup trop tôt !!! Alors on se contente d’écouter leur CD en boucle chez soi, CD que l’on aime tout à coup beaucoup plus après les avoir vu jouer leurs morceaux pop et acidulés. Aux environs de 20h, le « warm-up band », un trio goth-punk psychédélique, les Neils Children, avance sur scène. On remarque tout de suite l’excès de crayon autour des yeux des trois jeunes imberbes et on s’attend au pire. Mais surprise ! Malgré leurs chansons inconnues de tous, la foule se met rapidement à bouger au rythme de leurs sons étranges. Peut-être parce que la foule se prépare à la vague déferlante qu’est The Klaxons, ou peutêtre plus simplement parce que leurs chansons mettent l’ambiance. En effet, même si on ne comprend pas vraiment ce que chante le« gars » au milieu de la scène, on bouge de plus en plus. On ressent pourtant le manque Natacha Faullimmel, 2nde6 Photographie : Pauline Conroy, 2nde3 Source : The Klaxons : “Myths of the near future”. In : Blogup : a musical blog. [en ligne] Blogup, 2007. [Consulté le 02 décembre 2007.] Disponible à l’adresse http://blogup.canalblog.com/archives /2007/01/30/3844138.html « Quand un arriviste est à ses fins, ce n’est pas un arrivé, mais un parvenu ! » 22 Culture et loisirs : Littérature Ce cher Tintin ! Nous célébrons cette année les cent ans de la naissance du dessinateur Hergé, célèbre créateur du personnage et mythe deTintin. Près de quatre-vingts ans après sa naissance il est toujours là, toujours aussi présent, peut être encore plus qu'avant ! Tintin fait partie du paysage, de la mémoire collective, en plusieurs décennies il s'est placé comme une des figures mythiques du patrimoine culturel et populaire du XXe siècle. Tout le monde connaît Tintin, son succès légendaire est incontestable, c'est une des bandes dessinées les plus vendues au monde (avec Astérix). En 1976 une statue à l'éphigie de Tintin fut construite à Bruxelles et trois ans plus tard un musée qui lui est consacré est inauguré. Produits dérivés, dessins animés et un projet de film pour 2009 dirigé par Steven Spielberg ! Le mythe Tintin est bien réel... physique et psychologique également de Tintin fait que n'importe quel lecteur, et surtout les plus jeunes, peut s'identifier à lui même son créateur ("Tintin est certainement né de mon désir inconscient d'être parfait, d'être un héros"). Cette particularité donne une authenticité saisissante à l'oeuvre de Hergé. Une autre raison du succès de Tintin est l'humour que l'on retrouve un peu partout au fil des albums. Que ce soit l'éthylisme ou les jurons du capitaine Haddock, l'incompétence parfois perturbante des Dupond et Dupont ou encore des problèmes auditifs et du côté distrait du professeur Tryphon Tournesol, le rire est présent chez Tintin et il n'est ni mièvre, ni grossier, il est intelligent et de qualité ! La diversité des histoires est aussi une des richesses de l'oeuvre, 23 albums (dont 17 sont de véritables chefs-d'oeuvre) différents les uns des autres. En 54 ans d'activité, Tintin aura arrêté la bande à Al Capone, sauvé le royaume de Syldavie, lutté contre les trafiquants d'opium, découvert un métal nouveau (le calysthème dans L'Etoile Mystérieuse), trouvé le trésor de Rackham le Rouge, percé le secret de la malédiction de la momie de Rascar Capac, vu l'abominable homme des neiges ou encore marché sur la lune quinze ans avant les Américains ! Tintin n'aura cessé de partir à l'aventure avec nous jusqu'au 3 mars 1983 où Hergé est emporté par une leucémie à l'âge de 76 ans laissant son oeuvre finale L'Alph-Art inachevée. L'album s'arrête brusquement à la page 42, avec Tintin prisonnier qui est emmené, pistolet dans le dos, par un trafiquant d'art, laissant à jamais le lecteur dans le doute... Pour certains cette fin brusque marque également la mort de Tintin, quant aux âmes les plus sensibles elles penseront que Tintin s'en est sorti une fois de plus. A partir de ce moment là, Tintin s'échappe des mains de son créateur Hergé pour appartenir à tout le monde, à tous ses lecteurs et à tous ces tintinophiles, c'est une preuve indéniable de la force de cette bande dessinée qui se place parmi les grands moments de la littérature du XXe siècle. Tintin restera éternel... Le 10 janvier 1929 dans un journal catholique pour la jeunesse intitulé Le Petit Vingtième paraissent, pour la première fois, les premières aventures de Tintin reporter et de son chien Milou : Tintin Au Pays des Soviets (profondément anticommuniste selon les exigences du journal). L'album installa une polémique à cause de son contenu, l'année suivante de nombreuses associations accusèrent Hergé de racisme à propos des aventures de Tintin Au Congo. Mais malgré ça, malgré tous les détracteurs du reporter blondinet (les accusations à propos de Tintin sont souvent des réactions excessives plus navrantes qu'autre chose), Tintin connut en l'espace d'une dizaine d'années un succès énorme à travers l'Europe et les Etats-Unis. Mais pourquoi Tintin fonctionne ? Les raisons sont nombreuses : Les histoires sont construites et structurées intelligemment, le dessin est conçu à partir d'un savoureux mélange entre de la simplicité et de la fraîcheur mais aussi de la complexité et du réalisme. C'est une partie du génie de Hergé, il a construit un monde d'une réalité et d'une précision stupéfiantes (bâtiments, véhicules, décors, etc...) dans lequel le héros (Tintin) avait deux points noirs en guise d'yeux, la simplicité Mathieu Perez, 2nde1 Sources: Daubert, Michel. Nous Tintin. Editions Moulinsart, 2004. 97 p. Maricq, Dominique. Hergé par lui-même. Librio, 2007. 63 p. Illustrations: Images extraites de : Belloncle, Guillaume. Le Monde de Tintin [en ligne]. Guillaume Belloncle, 2007. Disponible à l'adresse: http://www.tintin.free.fr 23 Culture et loisirs : Littérature Le nouveau livre de Philippe Claudel conjugue talent d’écriture et thèmes importants Le romancier français Philippe Claudel, à qui on doit notamment le policier Les âmes grises (prix Renaudot 2003) renoue ici avec ses thèmes de prédilection, c'est-à-dire la guerre, la tolérance et le devoir de mémoire, pour notre plus grand bonheur. commune du protagoniste, Brodeck, qui éprouve si peu de rancune pour ceux qui l'ont poussé dans l'enfer et qui va jusqu'à perdre sa dignité humaine pour continuer à vivre. Incitant à la réflexion, s'apparentant à un puzzle, comblant les lecteurs férus d'énigmes et de mystère, Le rapport de Brodeck s'impose par conséquent comme un livre largement recommandable. Le rapport de Brodeck s'avère en effet d'une grande richesse et d'un intérêt considérable. Ecrit dans une langue déconcertante de fluidité et de simplicité, dans laquelle les phrases se répondent et se complètent de façon poétique et musicale, le livre se distingue à la fois par ses choix d'écriture originaux et par son ambiance particulièrement oppressante. Pour les choix d'écriture originaux, je citerais surtout le manque de repères spatio-temporels, l'emploi d'un dialecte germanique et les événements non racontés dans l'ordre chronologique (entraînant l'accumulation de retours en arrière). Pourtant, si étonnant que cela puisse paraître, l'ensemble n'est ni confus ni organisé ; il semble que l'auteur ait longtemps médité sur l'ordre dans lequel il aborderait des thèmes tels que l'arrivée de l'Anderer (personnage différent des autres villageois, de par ses manières, ses rites et ses habitudes), l'expérience de Brodeck dans les camps de concentration ou encore ses études dans une ville du nom de « la Capitale ». Et si certains lecteurs resteront perplexes face à un tel bouleversement chronologique, ils ne pourront pas ne pas admirer la force peu A noter que l'ouvrage était sur la deuxième sélection du jury du Prix Goncourt, notamment aux côtés de A l'abri de rien d'Olivier Adam, de Tom est mort de Marie Darrieusecq et de Ni d'Eve ni d'Adam d'Amélie Nothomb et qu’il a remporté le Prix Goncourt des lycéens. Pour ceux qui seraient intéressés par le livre, sachez que vous pouvez l’emprunter au C.D.I. Matthias Turcaud, 2nde10 Illustration : Le Rapport de Brodeck de Philippe Claudel. In Arguedas, Pascal. Calou, l’ivre de lecture [en ligne]. Pascal Arguedas, 2007. Disponible à l’adresse : http://perso.orange.fr/calounet/resumes_livres/claudel_resume/claudel_brodeck.htm Un livre tout simplement poignant et surprenant ! L’Attentat de Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul, nous emmène au Moyen-Orient où un conflit fait rage depuis bientôt soixante ans…en Israël. L’auteur nous raconte l’histoire d’un brillant chirurgien, d’origine palestinienne, naturalisé Israëlien, dont la vie bascule sans qu’il ne comprenne pourquoi. Sa femme, Sihem, d’origine palestinienne aussi, vient de décéder dans un attentat meurtrier à Tel-Aviv. Ce qu’Amine ne sait pas encore, c’est que sa femme n’est pas la simple victime d’un attentat…. A partir de cet instant, tout bascule, les repères s’effacent, la notoriété, le respect de ses voisins, tout s’en va, c’est l’incompréhensible qui s’installe. Pourquoi ? Elle, sa femme, une kamikase ? Il ne peut l’accepter, comment le pourrait-il ? Sihem aimait la vie, elle l’aimait, alors comment ? C’est ce qu’Amine veut comprendre, entouré de son amie et collègue Kim il va essayer de trouver des éléments de réponse en allant là où sa femme découvre l’essence même du mot « martyr ». Khadra nous transporte dans un monde inconnu qu’est celui de la guérilla palestinienne où la mort pour la « cause » n’est que louable, où la mort de quelques-uns n’est rien, comparée à l’injustice que subissent les Palestiniens… Mais Amine ne peut se résoudre à cette rhétorique trop bien rodée que lui tiennent les combattants palestiniens, cela va à l’encontre de ses valeurs. Son métier est de sauver des vies et non de les détruire, un tel discours est inacceptable à ses yeux. Malheureusement, son amour pour l’être humain finit par le perdre… Est-ce là le message de l’auteur ; celui de dire qu’il est temps d’en finir avec tout ce gâchis de vies humaines mais qu’il ne reste plus que les rêves pour espérer à un avenir meilleur pour ces deux peuples si proches, mais si loin en même temps… Simon Bénard, TES1 Khadra, Yasmina. L’attentat. Pocket, 2006. 246 p. Image extraite de : Pocket. [En ligne]. Editions Pocket, 2006 [consulté le 4 novembre 2007]. Disponible à l’adresse : http://www.pocket.fr 24 Culture et loisirs : Littérature À l’abri de rien d’Olivier Adam : une femme esseulée et perdue (France, 2007) Après Je vais bien, ne t’en fais pas et Falaises (entre autres), le romancier français Olivier Adam publie son nouveau roman, un ouvrage particulièrement marquant, qui incite à la réflexion. Le livre narre l’histoire de Marie, une femme au foyer, lasse de la solitude et de la monotonie inhérentes à nos sociétés capitalistes. Entre les tâches ménagères à effectuer, les enfants à chercher à l’école et les courses à faire, le personnage se sent perdu, mal à l’aise et gagné par l’ennui croissant (« Je ne sais pas pourquoi je raconte tout ça. Sûrement parce que c’était ma vie. Ça et rien d’autre : l’ANPE et les annonces une fois par semaine, les Assedic au début du mois, les gamins le bain les devoirs les repas la vaisselle, le linge et le ménage, les courses chez Ed, ou au Carrefour quand ça me déprimait trop, qu’il restait un peu d’argent mais c’était de plus en plus rare le cinéma une fois tous les six mois, la télé tous les soirs et basta, à quoi ça sert de se mentir, la vie c’est ça et pas grand-chose de plus pour la plupart d’entre nous. »). Sur ce, Marie prend la décision de porter secours aux « Kosovars », des réfugiés qui subissent l’indifférence de tout le monde et qui errent aux confins de la ville, vivant dans le plus grand dénuement. Mais s’agit-il vraiment d’une décision consciente et dépendant seulement de sa propre volonté ? Je ne le crois pas. Effectivement, c’est par le plus grand des hasards qu’elle se retrouve dans le centre qui offre des aides bénéfiques aux immigrés. Ce qui est particulièrement intéressant, c’est que des actions en apparence humanitaires et généreuses sont présentées comme des mécanismes sempiternellement invariables, des gestes automatiques qu’une machine sans âme serait capable d’exécuter (c’est-à-dire mettre de la soupe dans des assiettes creuses, remplir des tasses et des verres, tendre les plats aux immigrés, et ainsi de suite). Au fur et à mesure, Marie aide de plus en plus les « Kosovars », sacrifiant la majorité de son temps libre pour venir à leur secours, n’hésitant pas à faire le tour de la ville pour distribuer de la nourriture et des couvertures, prenant mille euros sur son compte en banque pour financer le voyage de l’un d’entre eux, un dénommé Béchir. L’attendent au final la folie, la maladie et la tristesse. Pour mettre en scène cette tragédie contemporaine, Adam utilise des procédés de style nouveaux, s’affranchissant par exemple des règles de ponctuation traditionnelles lors des énumérations (comme on peut le voir dans l’extrait cité ci-dessus). Même si le livre aurait pu être quelque peu raccourci (il aurait ainsi fait plus d’effet), il n’en demeure pas moins un texte bouleversant, disposant de beaucoup de qualités. Les descriptions des immigrés, particulièrement marquantes, ne sont pas sans rappeler certains débats politiques récents. Matthias Turcaud, 2nde10 Source de l'image: A l'abri de rien (en ligne). In : Evene [en ligne]. Evene, 2007 [consulté le 30 octobre 2007]. Disponible à l'adresse: www.evene.fr/livres/livre/olivier-adam-a-l-abri-de-rien-29227.php Humour Vive l'Alsace ! Dans le cadre de fouilles dans le sous-sol russe jusqu'à 100m de profondeur, les scientifiques russes ont trouvé des vestiges de fil de cuivre datant d'environ 1000 ans. Les Russes en ont conclu que leurs ancêtres disposaient déjà il y a 1000 ans d'un réseau de fil de cuivre. Les Américains, pour faire bonne mesure, ont également procédé à des fouilles dans leur sous-sol jusqu'à 200m. Ils y ont trouvé des restes de fibre de verre. Il s'est avéré qu'elles avaient environ 2000 ans. Les Américains en ont conclu que leurs ancêtres disposaient déjà il y a 2000 ans d'un réseau de fibres de verre numérique. Et cela, 1000 ans avant les Russes ! Une semaine plus tard, en Alsace, on publiait le communiqué suivant: "Suite à des fouilles dans le sous-sol de la vallée de la Thur jusqu'à une profondeur de 500m, les scientifiques alsaciens n'ont rien trouvé du tout. Ils en concluent que les Anciens alsaciens disposaient déjà il y a 5000 ans d'un réseau Wifi." Tout le monde devrait être Alsacien ! 25 Culture et loisirs : Théâtre Sivadier adapte Shakespeare : regard moderne sur une pièce à dimension intemporelle Après avoir renié Cordélia, celle de ses trois filles qu’il chérissait pourtant le plus, le roi Lear sombre au fur et à mesure dans la folie… Après avoir notamment mis en scène La vie de Galilée de Brecht en 2002 et La mort de Danton de Büchner en 2005, Sivadier et son équipe se sont cette fois attachés à réaliser une adaptation théâtrale du Roi Lear de Shakespeare. Formé comme comédien au Centre théâtral du Maine et puis au Théâtre national de Strasbourg, Jean-François Sivadier est ensuite devenu metteur en scène. Toutefois, même si on a tendance à considérer un metteur en scène comme un artiste qui se place audessus d’autres pour concevoir un projet, Sivadier affirme le contraire, le théâtre serait pour lui avant tout « une œuvre collective ». Il affirme également qu’il incombe à un metteur en scène comme lui de réunir un groupe d’acteurs et d’artistes, « pour aller vers les spectateurs dans un moment de temps suspendu où tout est possible ». Selon lui, une des fonctions principales du théâtre serait de s’approprier des œuvres dramatiques et de le faire découvrir au public. On aura ainsi remarqué pendant la représentation du Roi Lear la volonté d’impliquer le public, d’où par exemple l’affranchissement des règles traditionnelles de l’espace théâtral (les acteurs se trouvent parfois parmi le public). D’ailleurs, la réalisation du spectacle (mise en scène et choix artistiques) est un des aspects qui devrait le plus retenir l’attention des spectateurs. Le retentissement du thème musical de Peer Gynt écrit par Edvard Grieg (1843-1907), compositeur norvégien de la période romantique, les jeux d’ombre et de lumière qui accentuent les moments particulièrement tragiques, le matelas rouge qui sert de décor initial, la grande muraille imposante qui sert de toile de fond, le choix d’un homme pour interpréter Régane ainsi que l’emploi d’une tour lors de la péripétie finale sont des éléments effectivement marquants. Dans ce contexte original qui tente d’évoquer Shakespeare tout en apportant un souffle nouveau, Nicolas Bouchaud et Norah Krief, respectivement dans les rôles de Lear et du fou, arrivent aussi à se distinguer par la qualité indéniable de leur jeu. Les deux comédiens disposent d’ailleurs de quelques scènes à deux tout simplement savoureuses. Le premier avait été notamment remarqué dans La mort de Danton (voir ci-dessus), lauréat du « Grand prix spécial du jury théâtre privé » lors des Molières 2006. Le seconde avait reçu le prix du meilleur interprète féminin dans un second rôle lors des Molières 2005, pour la pièce Hedda Gabler. De fait, Nicolas Bouchaud, tout en nuances, met bien en relief l’évolution du personnage de Lear (en dépit de son âge relativement jeune pour interpréter ce personnage qu’on aurait tendance à imaginer comme un vieillard doté d’une longue barbe majestueuse) et Norah Krief a réussi à interpréter le personnage du fou en ne tombant jamais dans la simplicité. La seule critique qu’il serait éventuellement possible de formuler est le rajout ou plutôt la mise en évidence du registre comique (les rires sont fréquents dans la salle), ce qui rend peut-être la pièce accessible à tous, mais réduit terriblement le potentiel tragique de l’ensemble. Ainsi, malgré l’excellente distribution et la mise en scène inventive, le spectateur peut rester quelques fois pantois face au mélange lassant de rires et de larmes. Bref, même si un défaut majeur a été relevé (le mélange constant et lassant de la comédie et de la tragédie), il s’agit d’un spectacle très recommandable, qui tout en faisant découvrir ou redécouvrir la fameuse pièce de Shakespeare, offre de fabuleux moments d’art théâtral. Matthias Turcaud, 2nde10 Source de l'image: Festival d'Avignon [en ligne]. Burau du festival d’Avignon, 2007 [consulté le 15 novembre 2007]. Disponible à l'adresse: www.festival-avignon.com « Frappons a dû être Platé... non, Platon a dû être frappé. » 26 Culture et loisirs : Art Un anniversaire mémorable Cette année, la Fondation Beyeler, galerie d’art moderne et contemporain, située à Riehen près de Bâle, fête les dix ans de son inauguration. À cette occasion, elle présente une exposition impressionnante, « L’autre collection», comprenant 130 pièces (toiles, sculptures et travaux sur papier), réunis en hommage au couple formé par Hildy et Ernst Beyeler. Picasso… Klee… Bonnard, Braque, Léger… Mirò Matisse Kandinsky Cézanne Van Gogh Gauguin… Difficile de contenir sa joie, son enthousiasme, son extase. Si Oliver Wick, curateur de l’exposition, affirme qu’il ne s’agit pas d’ « un hitparade des meilleures œuvres », il s’avère finalement que les peintres les plus considérables et les plus fameux du vingtième siècle sont réunis. Mais les trésors contenus ne sont pas vulgairement étalés, tels des trophées de guerre misérablement spoliés. Même si les organisateurs ne les ont pas mis en relief parmi des œuvres d’artistes moins célèbres (il n’y en a presque pas), ils ont utilisé avec grâce l’espace mis à leur disposition et ont répandu leurs bijoux sur des murs d’une blancheur apaisante. Ajoutons que ce rassemblement de peintres et de sculpteurs si significatifs est en partie l’œuvre de toute une vie (en l’occurrence celle de Hildy et Ernst Beyeler), ce qui confère en fin de compte une dimension assez émouvante à cette exposition et à cet anniversaire. Le travail de Paul Klee (1879-1940), suisse, semble être une recherche perpétuelle de formes et de couleurs. Ce peintre pourrait aussi être apprécié par les visiteurs les plus jeunes, en raison de la profonde harmonie qui émane de ses tableaux. Dans Le Jardin de Roses, les roses peintes rythment l’espace imaginatif d’un jardin dans lequel nature et architecture paraissent s’interpénétrer et dans Danseuse la danseuse est en parfaite osmose avec le décor qui l’environne, jusqu’à adopter les couleurs de celui-ci. Fondation Beyeler Comme sont le plus souvent présentés plusieurs tableaux d’un même peintre, il est donné au visiteur lambda de se familiariser un peu mieux avec ces grands créateurs, qu’il dit connaître sur le bout des doigts mais dont il ne sait en fait que bafouiller confusément les noms et prénoms. Une grande place dans l’exposition est accordée à Pablo Picasso (1881-1973), espagnol, qui fait quelque peu office de centre de gravité. Il était, bien entendu, impossible de rendre compte de toute la diversité des créations d’un artiste aussi prolifique. Sont ici représentées ses inspirations africaines (la comparaison est d’autant plus évidente que sont juxtaposés des tableaux de Picasso répondant à ce critère, et des masques africains) ainsi que sa période cubiste, pour lequel il est certes particulièrement reconnu. Picasso apparaît ici comme un peintre désireux d’explorer les formes ainsi que de faire fi des conventions. Femme couchée jouant avec un chat reprend un motif qui était cher à Picasso dans les années 60 : sa femme Jacqueline, allongée, se distrait avec un chaton, leitmotiv charmant qui contraste étrangement avec la noirceur des couleurs employées. Le sauvetage, quant à lui, a la particularité d’évoquer deux instants différents, celui de la noyade d’une femme et celui de son sauvetage. Le Sauvetage Le Français Pierre Bonnard (1867-1947) se place, dans Nu à la baignoire (Sortie du bain) et La grande baignoire (Nu), en tant qu’observateur invisible, autorisé à entrevoir l’intimité de la scène. Ne s’en tenant pas rigoureusement aux règles de la perspective, Bonnard s’intéresse plus à la lumière et au coloris. Ainsi, le spectateur se trouve quelque peu égaré face à ce manque de repère spatial et plongé dans une atmosphère particulière. L’espagnol Joan Mirò (1893-1983) est considéré comme un des représentants majeurs du mouvement surréaliste (« le plus surréaliste d’entre nous » déclarait André Breton). Sa Métamorphose, qui traite d’un thème récurrent dans l’art surréaliste est un collage d’images ayant probablement été collées dans des albums de poésie pour enfants et intégré dans une peinture à la gouache. L’ensemble du tableau fait allusion à la Création (d’où la référence aux éléments essentiels, à la terre, à l’eau, ainsi qu’au monde animal et végétal) mais 27 Culture et loisirs : Art peut également inciter à une réflexion sur l’art ou les origines de la création artistique. Mirò revient effectivement aux outils artistiques les plus accessibles (gouache, albums pour enfants) et ceux qui sont usuellement utilisés en premier pour servir d’intermédiaires entre l’Art et les enfants. Le Français Fernand Léger (1881-1955) s’est clairement imposé comme véritable « pionnier du cubisme ». Son Soldat à la pipe exprime par des formes cylindriques et métalliques grises l’inhumanité de la guerre, qu’il a lui-même endurée, en tant que soldat. Le tableau entier est composé de formes géométriques peintes en gris, à l’exception d’une partie du visage du protagoniste, en rouge, ce qui symbolise l’irrépressible fougue dont celui-ci fait preuve pour survivre. Sont également exposées les œuvres tardives du Français Henri Matisse (1869-1954), qui correspondent à l’aboutissement des nombreux efforts que Matisse a déployés pendant sa carrière pour acquérir une sorte « d’harmonie parfaite ». À l’instar de la Métamorphose de Mirò, il associe dans son tableau La perruche et la sirène l’art de la sculpture et celui de la peinture, utilisant la gouache et le découpage de formes de papier. Dans ce tableau de grand format (il occupe à lui tout seul un mur entier) la sirène et la perruche, clairement identifiables, sont séparées par de multiples feuillets colorés, créant un effet de distance à parcourir. Remarquons que, si la forme de la sirène reste indécise, la forme du perroquet se révèle particulièrement homogène. Probablement, parce que la sirène, personnage de rêves et de conte de fées ne possède pas une physionomie strictement invariable, contrairement au perroquet, puisque celui-ci existe vraiment. Comme on peut le constater à travers les tableaux de « L’autre collection », l’art de Matisse ne correspond pas à un seul style de peinture officiel. Il s’agit toutefois le plus souvent d’une recherche d’équilibre entre la forme et la couleur (ce qui rappelle Klee). La mère de l’artiste Après la visite, une promenade dans le petit parc qui se trouve à côté du musée s’impose ; il faut en effet d’abord digérer cette rencontre avec ces grands noms du monde artistique. La promenade dans le petit parc peut même s’avérer favorable à une réflexion sur les liens qui résident entre les différents artistes représentés (Klee et Matisse, Léger et Picasso, etc) ou à l’association de forme et de couleur dans les tableaux du vingtième siècle. Les prix sont de 23 francs suisses (c’est-à-dire 15 euros) pour les adultes et de 12 francs suisses pour les étudiants (soit 8 euros). Existent également des « Family Pass » à 46 euros pour deux adultes et au moins un enfant. Le musée est ouvert tous les jours (y compris les dimanches et les jours fériés) de 10h à 18h, et le mercredi jusqu’à 20h. Pour s’y rendre par les transports en commun, il faut, une fois arrivé à la gare de Bâles CFF (SBB en allemand), prendre le tram 2 jusqu’à l’arrêt Messerplatz, puis prendre le tram 6 jusqu’à l’arrêt Fondation Beyeler. Une autre possibilité est de ne pas utiliser le tram, de prendre le train jusqu’à Riehen (depuis Bâle) et ensuite de marcher jusqu’à la fameuse Fondation. Cette exposition dure jusqu’au 8 janvier 2008 ; notons toutefois que le musée organise régulièrement des expositions temporaires (Mirò en 2004, Magritte et Picasso en 2005, Matisse en 2006 pour ne citer que les plus récentes) et qui durent au moins trois mois chacune. Et si « L’autre collection » est particulièrement digne d’être vue, d’autres sont également largement recommandables. Évoquons aussi la peinture qui sert de symbole à cette exposition, La mère de l’artiste du Français Paul Gauguin (1848-1903), postimpressionniste qui a profondément inspiré des peintres du vingtième siècle (notamment les expressionnistes allemands et les cubistes). Peinte vers 1893, la toile représente la mère de Gauguin, plus de 25 ans après le décès de celle-ci, dans des tons lumineux et avec des traits juvéniles, exprimant toute la tendresse que le peintre éprouvait pour sa génitrice. Évidemment, il est impossible d’apprécier tous les peintres présentés (on peut par exemple demeurer réticent face aux couleurs criardes de Francis Bacon), mais la valeur didactique de l’exposition est vraiment impressionnante et indéniable, puisque, comme mentionné précédemment, elle permet de mieux connaître tel ou tel grand peintre du vingtième siècle. Matthias Turcaud, 2nde10 Sources : Fondation Beyeler. In : Beyeler [en ligne]. Beyeler, 2007 [consulté le 5 et 6 novembre 2007]. Disponible à l’adresse : www.beyeler.com/fondation. Petit Robert des Noms Propres Feuille de l’exposition, disponible à la Fondation Beyeler. 28 Culture et loisirs : Sport Les lauriers de la désillusion Pour la première fois de son histoire, la France a accueilli la Coupe du monde de rugby. La compétition a permis de promouvoir ce sport d’origine anglaise, tandis que le XV de France a connu de cruelles déceptions. Cette coupe du monde 2007 a mis en évidence des rapports non négligeables entre le pouvoir politique et le monde sportif. Elle a aussi été une première pour sa diffusion à la télévision, puisque TF1 a décroché les droits devant France 2. L’hémisphère nord dans la tourmente et l’écrasante domination de l’hémisphère sud Alors que les All-Blacks s’en donnent à cœur joie dans un groupe C, où ni l’Ecosse, ni l’Italie, ni le novice Portugal ne peuvent rivaliser, les Bleus échouent en match d’ouverture face à l’Argentine, dur pour une première rencontre de leur coupe du monde. Mais nos « petits » se reprennent et terrassent la modeste Namibie avec en prime le point de bonus ! En effet, les coéquipiers du capitaine Jean-Baptiste Elissalde jouent à Toulouse devant un public déjà acquis et marquent pas moins de treize essais, dont trois du toulousain Vincent Clerc, et deux de la nouvelle coqueluche nationale, Sébastien Chabal ! Quelques jours plus tard, les bleus retrouvent le Stade de France et les Irlandais, qui n’ont guère brillé face à la Namibie et à la Géorgie. Le numéro 14 du XV de France, Vincent Clerc déjoue par deux fois la défense irlandaise dans un duo étincelant avec Frédéric Michalak, et permet ainsi à la France, avec les pénalités d’Elissalde, de l’emporter 25 à 3. Le dimanche 30 septembre, les Français jouent leur dernier match de poule face à la Géorgie au stade Vélodrome de Marseille. Cette rencontre peut s’avérer cruciale pour la suite de la compétition, mais les coéquipiers de Sébastien Chabal, nouvel emblème du rugby français, se qualifient sans encombre en marquant neuf essais (64-7). Ils n’atteignent cependant que la 2e place du groupe, puisque l’Argentine n’a subi aucune défaite, contrairement aux bleus. L’essentiel – se qualifier pour les quarts de finale – est certes assuré, mais la France n’est pas rassurée, ça non. Non seulement, les Bleus vont aller jouer à Cardiff, mais ils vont en plus devoir créer l’exploit s’ils veulent accéder aux demi-finales, car les All-Blacks se dressent sur leur route. Les Néo-Zélandais, considérés d’ailleurs comme la meilleure équipe du monde, se placent bien entendu parmi les favoris, où figurent notamment l’Australie, vice-championne du monde en 2003 et l’Afrique du Sud. Ces trois nations se sont ainsi qualifiées pour les quarts sans se faire accrocher, les Springboks (Afrique du Sud) ont même humilié les Anglais : 36-0 ! Le XV de la Rose a en effet eu plus de mal à se qualifier. Ne décrochant que la deuxième place – assez décevant pour le tenant du titre – de la poule A, l’Angleterre doit, elle aussi, créer l’exploit, elle affronte en quart de finale l’Australie, archi-dominatrice dans la poule B. Alors que les nations de l’hémisphère sud savourent un début de mondial relativement tranquille et rêvent à la reconquête du trophée, celles du nord doutent et voient leurs chances de victoires s’amenuiser. Retournements de situation La plupart des gens pensaient déjà à la demi-finale Australie - Nouvelle-Zélande, mais la France et l’Angleterre en ont décidé autrement. Le XV de la Rose a ainsi ouvert le bal des quarts de finale face à son dauphin de 2003, l’Australie, qui, en tant que favorite, ne pouvait « que » gagner contre une équipe anglaise assez moribonde depuis le début du tournoi. Mais ce sont finalement les blancs et rouges qui sont parvenus à tirer leur épingle du jeu en dominant les Wallabies en défense, comme en attaque. Outre un sursaut collectif, le match a aussi permis le retour de Monsieur Jonny Wilkinson, qui a marqué tous les points de son équipe. Cette victoire européenne sur un géant de l’Océanie allait-elle être de bon augure pour les bleus, qui jouaient quelques heures plus tard à Cardiff ? Les Français redoutaient beaucoup cet exil forcé dans la capitale galloise, surtout pour un quart de finale face aux terribles AllBlacks, la meilleure équipe du monde. FranceNouvelle-Zélande au rugby, c’est un peu comme un France-Brésil en foot ; les bleus, toujours outsiders face à un adversaire archifavori de la compétition. Autant dire que le XV de France est condamné à l’exploit s’il veut continuer à faire rêver ses supporters, toujours plus nombreux depuis le début du mondial. La ferveur populaire est d’ailleurs en train de monter dans le pays, le parfum d’un certain été 1998 ressurgit, les drapeaux fleurissent, et même à Cardiff, on trouve quelques irréductibles Gaulois chantant la Marseillaise. Les supporters des All-Blacks sont là aussi et quoiqu’il arrive durant le match, tous, ensuite, feront la fête ensemble, parce que c’est ça aussi le rugby, une fête populaire. Cependant, les Néo-Zélandais partent bel et bien favoris, surtout que la France ne les a plus battus depuis le 18 novembre 2000 (42-33). On se souvient également de l’effroyable débâcle française lors du match pour la 3e place en 2003 (40-13), sans oublier, que les Blacks n’ont jamais perdu à ce stade de la compétition. Non, vraiment rien de bon. Mais, les All-Blacks jouent en gris, alors que les Français conservent leur maillot bleu, un signe du destin ? Après les hymnes, les NéoZélandais entament leur traditionnel Haka, pendant que les bleus se mettent à quelques centimètres à peine et les fixent dans les yeux. Bien que les Blacks mènent 13-3 à la pause, les hommes de Bernard Laporte peuvent encore y croire. L’entame de la seconde mitemps est encore une fois en faveur des Blacks. Les Français ne se laissent pourtant pas abattre et prennent enfin l’avantage sur un « Chez un élève de Terminale, c’est pas chou, c’est profondément déprimant ! » 29 Culture et loisirs : Sport essai de Jauzion transformé par Elissalde (18-20). Il reste alors dix minutes de jeu et seulement deux points d’avance pour les Bleus. Puis, l’arbitre siffle la fin de la rencontre, le soulagement est complet pour la France. Les « petits » ont su créer l’exploit, rééditer celui de 1999. La joie parcourt tout l’hexagone, et les rues de Cardiff résonnent au son des chants des supporters français. Le lendemain, les DNA rejoignent l’ensemble de la presse française, dithyrambique, avec le titre « Ils ont renversé la montagne », alors qu’en Nouvelle-Zélande, c’est un nouveau désenchantement, le pays est abasourdi par la défaite de leurs héros. Retrouvailles entre hémisphères La France fait donc partie du dernier carré avec l’Angleterre, l’Argentine et l’Afrique du Sud. Elle joue d’ailleurs sa demi-finale face à son meilleur ennemi, le XV de la Rose. Mais les bleus ne parviennent pas à transpercer la défense des blancs et rouges, et le malheur du XV de France ne s’arrête pas là, puisque Jonny Wilkinson marque pas moins de 9 points (fin du match 14-9). Les coéquipiers de Sébastien Chabal ne joueront pas la finale tant rêvée au Stade de France, ils devront se contenter de la petite finale. Enfin, c’est sans compter sur les Pumas argentins, qui, malgré leur défaite face à l’Afrique du Sud (37-13), écrasent les Français (34-10). Les bleus quittent le mondial par la petite porte, fin cruelle, mais victoire amplement méritée des Argentins, qui ont fait un très bon mondial. Du côté de la finale Angleterre - Afrique du Sud, ce sont les Springboks qui remportent le trophée et qui rejoignent ainsi l’Australie au tableau des double-vainqueurs. Certes, la coupe du monde, qui s’est investie dans la lutte contre le réchauffement climatique, a été une réussite économique pour la France. Mais les lauriers financiers ne sont pas tout, les supporters sont passés de la crainte à l’espoir, pour finir dans la désillusion. Audience ne rime pas avec qualité Pour la première fois, ce n’était pas France Télévision, mais TF1 qui diffusait la compétition. Oui, TF1, la chaîne qui d’habitude retransmet des matchs de football ou encore des courses de F1, et qui depuis la fin du mondial n’a diffusé aucun match de rugby. Alors pourquoi choisir de payer les droits de retransmission de la coupe du monde ? Pour faire de l’audience évidemment ! La chaîne a en effet enregistré plusieurs records du nombre de téléspectateurs. Mais, malheureusement, la qualité des commentaires n’a pas vraiment été au rendezvous, tandis que sur d’autres chaînes, des spécialistes de l’ovalie analysent les matchs depuis des années. On peut donc se demander si l’argent (et la médiocrité) ne prévaut pas sur la qualité. Chez certains, il semblerait que oui. Le sport et la politique ne font pas bon ménage La plupart des gens savent que Nicolas Sarkozy apprécie beaucoup le rugby, il est donc normal qu’il aille voir quelques matchs, mais de là à se rendre dans les vestiaires après la rencontre, il y a quand même des limites. D’ailleurs, quelques joueurs du XV de France ont contesté cette trop grande utilisation du rugby à des fins politiciennes. Il ne faut pas oublier non plus que bien avant le début de la compétition, Bernard Laporte avait annoncé qu’il quitterait son poste d’entraîneur pour devenir Secrétaire d’État au sport. Mais, à son amitié clairement affichée avec le président s’ajoute également son sens des affaires, puisqu’il faut savoir que Bernard Laporte n’est pas seulement coach, il possède aussi une chaîne de restaurants - boîtes de nuit et il a récemment fait l’objet d’une enquête fiscale. On est donc en droit de s’interroger sur ses motivations rugbystiques. Un entraîneur d’une équipe nationale ne doit-il pas se consacrer entièrement (ou presque) à celleci ? Comment gagner une compétition si on fait des erreurs tactiques et si on a déjà la tête ailleurs (au gouvernement) ? Toutes ces questions auraient dû interpeller Bernard Laporte, mais non. Ses erreurs ont très certainement pesé dans les trois défaites françaises. Il aura donc fini sa carrière d’entraîneur en décevant bon nombre d’amoureux du ballon ovale. Julie Ranslant, TL2 Source : L’Equipe.fr [En ligne]. L’Equipe 24/24, 2007 [consulté le 24 novembre 2007]. Disponible à l’adresse suivante : http://www.lequipe.fr/ Illustration : Carlo Fasino, TES1 30 Culture et loisirs : Sport Le Badminton Trop souvent méconnu bien que pratiqué régulièrement au collège ou dans des stages quelconques, le badminton est cependant un sport passionnant qui mérite largement qu’on s’y intéresse, malgré l’engouement relativement faible qu’il provoque... Dimanche 4 Novembre 2007. Fin des Super Series à Paris (équivalent des championnats du monde). Sur les 32 gagnants, toutes catégories confondues, il y a 17 Chinois, 1 Française (d’origine chinoise), 4 Polonais, 2 Danois, 2 Coréens, 2 Japonais et 4 Malaisiens. A quoi est due cette large plus-value asiatique ? Ce sport vient de là-bas, diront certains. Ils n’auront pas tout à fait tort car ce sport provient effectivement de cette partie du globe. Cependant, cela n’est pas la raison majeure. En effet, la différence découle du fait que lorsqu’une nation entière décide de « mettre le paquet » sur un sport, on a généralement des résultats assez rapidement ; tout l’inverse de la situation actuelle en France. Malgré les 120 000 licenciés dont peut s’enorgueillir la FFBA, on est loin de la somme énorme de jeunes Chinois qui se passionnent pour ce sport. A tel point que le badminton est le troisième sport le plus pratiqué au monde (je vous laisse deviner après lesquels…). Notre faiblesse et notre non présence dans les tableaux de finale à l’échelle mondiale résident donc dans notre incapacibilité à augmenter notre potentiel badmintonesque. Comment cela se fait-il ? la réussite) de l’échange, ce qui, contre un adversaire d’un niveau égal, peut arriver toutes les minutes. Enfin, bien qu’à faible niveau on ne ressente pas la différence, la vitesse du volant rivalise avec celle de la balle de tennis : le smash à ce jour le plus rapide, a été mesuré à 332 km/h, alors qu’au tennis, il est détenu par Andy Roddick, à 246,2 km/h. De plus, le terrain étant au badminton plus petit, le volant arrive le plus souvent plus rapidement, et oblige le joueur à réagir plus vivement. Combien de fois n’ai-je pas entendu cette expression qui résonne à chaque fois dans mes oreilles tel un tambour et qui résulte d’une ignorance complète en la question : « Le Badminton c’est un sport de filles ! » Etant donné que je ne pourrai pas vous donner une description des auteurs de cette phrase odieuse – la censure de ce journal m’empêchant d’en faire un portrait très objectif – je me contenterai de vérifier la véracité de cette affirmation. Tout d’abord, commençons par comparer cette activité à une autre, relativement pratiquée, il s’agit du tennis. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le badminton est plus fatiguant que ce dernier ; en effet, lors d’un match de tennis, bien qu’il dure plus longtemps, les joueurs ne jouent réellement que 20 à 25 minutes, et cela ponctué de pauses entre les échanges ainsi qu’entre les sets. Tandis que pour l’autre, le match dure 40-45 minutes (parfois plus), pour une durée de jeu quasiéquivalente. Ainsi, le sportif brûle plus de calories donc dépense plus d’énergie. On pourra également avancer, mais cela n’est affaire que de goût, qu’à haut niveau bien sûr, les matches sont plus passionnants et moins ennuyeux qu’au tennis (sport contre lequel je n’ai absolument rien mais qui se présentait là par hasard), de telle sorte que l’on puisse qualifier de « virtuoses » ces joueurs exceptionnels. Malheureusement, à moins d’être abonné aux chaînes chinoises ou de posséder un bouquet satellite regroupant toutes les chaînes de sport européennes, il y a peu de chance de pouvoir accéder à des matches quelconques, aussi importants soient-ils. Tout cela n’est évidemment et je le répète qu’affaire de goût. Cependant il est toujours avantageux d’apprendre à connaître d’autres sports du moment qu’ils présentent un certain intérêt (par respect pour les pratiquants de curling, je me forcerais à ne pas faire de commentaire sur cette activité…). J’espère donc que mon article aura eu pour effet de provoquer en vous une curiosité envers le Badminton, qui ne sera à coup sûr, pas déçu… Le badminton est également, car il faut le dire, très mauvais pour le rythme cardiaque (dans le même genre que le squash). La possibilité de reprendre son souffle n’intervient qu’au moment de la perte (ou de Carl Glessgen, 2nde10 Sources : Geocities, [en ligne]. Geocities, 2007. [consulté le 21 novembre 2007]. Disponible à l’adresse : www.goecities.com « Vous étiez les deux seuls jeunes dans la salle, les autres étaient du troisième âge ? – Non. – Du quatrième ? » 31 Cuisine Enfin Noël ! C’est la période de l’année que l’on attend le plus, le mois de décembre, les effluves de bredele, de crème de marrons, le pain d’épices et le vin chaud. Vers Noël, les traditions alsaciennes permettent mille et une découvertes culinaires. De surprise en surprise, les ingrédients classiques que l’on retrouve toujours mais auxquels s’ajoutent cette année des recettes inattendues... Feuilleté aux clémentines et pain d’épices: Pour 4 personnes: Ingrédients: - 200g de pain d’épices - 2 clémentines - une pâte feuilletée rectangulaire - 20cl de vin aux épices - 20g de beurre - de la cannelle Préchauffer le four à 200°. Couper le pain d’épices en cubes de 1cm² et les faire tremper dans le vin. Disposer les cubes sur du papier cuisson beurré et les mettre au four dix minutes de chaque côté (veiller à ce que le papier reste beurré). Les sortir et les laisser refroidir. Disposer la pâte feuilletée sur une plaque recouverte de papier cuisson. Couper la pâte en quatre lamelles de largeur identiques. Eplucher les clémentines. Disposer sur chaque moitié de lamelle les quarts d’une moitié de clémentine. Disposer ensuite des cubes de pain d’épice de manière égale. Replier la deuxième moitié du feuilleté et presser les dents d’une fourchette sur les côtés du feuilleté. Avec un couteau tracer le légères incisions diagonales sur le feuilleté. Badigeonner de beurre les deux côtés puis saupoudrer avec une peu de cannelle. Mettre au four vingt minutes. A déguster froid. Palets blancs aux fruits confits Ingrédients : - 50cl de crème fraiche - 500g de sucre - 100g de fruits confits - 5cl de liqueur de prune Préchauffer le four à 180°. Dans un récipient, mélanger la crème, le sucre, puis les fruits et la liqueur. Sur une plaque couvert de papier cuisson, disposer à la petite cuillère de manière espacée la pâte, puis mettre entre dix et quinze minutes au four (les palets ne doivent pas trop brunir). Une fois cuits (il vous faudra plusieurs fournées), les laissez refroidir avant de les décoller du papier, savourez. Christelle Gleitz, TL2 « Si vous ne connaissez pas le principe d’Archimède, vous aurez beau avoir toute la culture littéraire possible, vous serez des crétins ! » 32 Créations C’est pas compliqué Je m’appelle Roger. Je vais au lycée depuis septembre. Tout est allé très vite. « Bonjour bonjour asseyez-vous perdons pas de temps n’ayez pas peur c’est pas compliqué suffit d’apprendre mon nom c’est révisez bien tu t’appelles comment et on y va silence bavardez pas chromosomes équations voltaire vitesse de la lumière regardez le tableau leslivreslescahierslesclasseurs soyez efficaces raisonnez faites preuve de bonne volonté t’as entendu la France métabolisme hétérotrophe learn and live vocabulaire chapitre 3 tu manges où x et y cherchez-moi des craies discutez-pas travaillez en silence vous savez pas ce que c’est le naturalisme si un angle au centre intercepte Aristote dans les rangs le rugby les savants pasdebruitpasunmotpasungeste je sais pas lisez les consignes j’ai pas d’argent prenez le tram pour aller il faut vous entraîner je suis ravi de faire ta apprenez-moi ça écrivez bien la poésie et le théâtre soyez poli et pas en retard i don’t know c’est qui qui a écrit les Misérables parallaxe vous êtes tous nuls et incapables c’est pourtant pas compliqué les exercices repas de classe participez soyez gentils et aimables mais faut travailler le principal c’est de TRAVAILLER y a des activités y a le club tibet Goethe Schiller c’est pas compliqué baissez pas les bras répondez à ce qui vous est demandé mamontremonkebabmontest le microscope l’histoire de la France géopolitique de la cantine y a beaucoup de monde tu veux faire quoi population dissertation théorème frites mangez équilibré ZolaKantLeibniz prenez un bon petit-déjeuner couchez-vous pas trop tard mais le principal c’est de TRAVAILLER TRAVAILLER TRAVAILLER regardez autour de vous tout le monde travaille faites du sport pensez au bac et à l’avenir apprenez-moi cette listedevocabulaire pour demain et plus vite plus efficacement soyez rapides soyez subtils soyez intelligents démontrez-moi ça démontrez-moi ci c’est les vacances mais faut travailler et Spinosa et Vicor Hugo faut tout le temps travailler travailler travailler ne vous plaignez pas vous travaillez dans des conditions plutôt agréables regardez l’heure de la sauce blanche sur mon kebab et du ketchup sur mes frites je suis perdu c’est dans quelle salle je suis perdu faut pas se perdre tu vas être puni vous êtes au lycée c’est pas compliqué comprenez faites des exposés ayez des bonnes notes de très bonnes notes à l’oral à l’écrit dans toutes les matières sans exception enchimie enfraçais enphysiquesenalgèbre et en anglais et en allemand et en géo et en sport partout faut que vous ayez des travaillez comprenez examinez écrivez lisez informez-vous chaque soir révisez la leçon on vous a dit c’est pas compliqué et c’est vrai c’est pas compliqué de toute façon si vous avez pas des bonnes notes on vous mangera t’as révisé pour le test qu’est-ce que tu crois il le faut chapitre 4 et 5 écoute ce que je dis laissez pas traîner des choses par terre j’ai mal à la tête travaillez travaillez travaillez à la maison dans votre chambre dans la cuisine sur le lit sur le divan sur le sol sur la terrasse pensez au bac l’objectif c’est le bac travaillez vous voulez devenir quelqu’un de bien dans la vie la géométrie montaigne disait ceci et montesquieu disait cela lisez des livres informez-vous tu manges où ce midi j’ai pas envie de manger j’ai eu une note de merde faut pas baisser les bras on vous a dit apprenez à vous exprimer correctement tenez-vous droit c’est pas compliqué paroxysme latitude prouver que l’inéquation est pour mardi j’ai un paragraphe argumenté à écrire sur c’est pas le temps de s’amuser et ne vous plaignez pas vous avez de la chance de ne pas vivre en Afrique faut pas arriver en retard sinon on va sévir donnez-moi le nominatif you speak english j’y comprends rien du tout c’est pourtant pas compliqué arrêtez de m’embêter on t’embête pas c’est pour ton bien arrête d’être insolent travaille pense pas aux filles pense aux équations à la dissertation c’est pour lundi je crois j’ai le temps je vais la faire dimanche mais non pas juste la veille tu es fou complètement x et y les cellules végétales le principe c’est de travailler le concept c’est de travailler c’est simple clair et net travailler travailler travailler c’est pourtant pas compliqué » Le 25 novembre 2007, l'élève Roger Vasson, inscrit au collège Y. de la ville X., s'est suicidé à l'aide de son critérium et de son compas, alors qu'il était en train de faire ses devoirs de maths. Matthias Turcaud, 2nde10 La fête Je suis là au milieu d’une foule. Au début, je confonds tout ; les couleurs chatoyantes des costumes et des robes, le tintement des verres à champagne, l’odeur des mets, des plats, des rôtis et des viandes badigeonnées dans quelques sauces huileuses, la musique envahissante, les mouvements frénétiques d’alcooliques perturbateurs, les rires et les cris, les bruits et les silences, la joie et la tristesse, la mélancolie et l’allégresse, le désespoir et la liesse. Je ne perçois qu’un amalgame indigeste de sensations et de constatations. Cependant, je crois connaître la raison de ceci : enivré par la vue de la peau chaude et humide de certaines cavalières, conduit par l’unique besoin de satisfaire mes sens, consumé par le tintamarre qui règne, mon envie incoercible de me rapprocher moins de l’homme que de l’animal ayant atteint son paroxysme, j’ai sans doute oublié pendant quelques temps les principes de la pudeur, de la discrétion et de la responsabilité que mes parents m’avaient inculqués. Tout à coup, moins galvanisé par le bruit, j’arrive à discerner un petit tabouret en bois, tapi dans l’ombre, dans un des coins de la salle. Sentant la sueur couler sur mes joues et ayant les membres épuisés, je me fixe l’objectif d’atteindre ce tabouret. Alors que je commence à m’aventurer dans cette direction, la musique retentit de plus en plus fort pour finalement conquérir à nouveau mon corps tout entier et faire en sorte que j’oublie mon dessein. Ô ineffable destinée ! Ô fatalité indéniable ! Dieu ne cesse de m’envoyer des tentations auxquelles il sait que je ne pourrais pas résister, et pourtant il le fait ! Et me voilà à nouveau pris dans l’orgie. Les corps s’entremêlent, s’entrechoquent, se touchent, se caressent et se mordent pour former une chimère imposante. Et moi, portant le joug de la passivité, esclave de l’inexorable, je perds le tabouret de vue et il me semble que je suis incapable d’examiner ou de regarder quoi que ce soit. J’ai l’impression d’être l’un des acteurs d’une pièce de théâtre, et le contenu de la scène dans laquelle je joue me paraît 33 incompréhensible. Fais-je partie d’un chœur ? D’un coryphée ? Tous les participants font les mêmes gestes en même temps. Non ! Il y en a un qui se libère du lien qui attachait son corps aux nôtres, qui avance et recule à son grès son dynamisme et son énergie palliant sa gaucherie. Remarquant qu’il a du plaisir à agir comme il le fait, je décide d’essayer de l’imiter. J’avance d’un cran, mais aussitôt on me ramène violemment. Comme « l’autre » est pour l’instant hors de contrôle, ils font tout pour garder le reste de leur horde. Je tombe par terre ou plutôt non, je m’affale sur le sol. La horde n’a pas aperçu ma chute et j’ai l’occasion inespérée de la voir, de la juger, de la condamner. Que fut ma stupeur en repérant dans le groupe des connaissances, des compères, des amis, des proches ! Il y avait, doux Jésus, mon frère aîné, Arthur, en guise de chef ! Comment ? Comment ! Il était bien là, en chair en os, la moustache courte, dépourvu de favoris, le gilet d’un gris uniforme, une paire de bottines aux pieds. Autour du bras droit, il avait un ruban ou une espèce de ruban rouge représentant une croix asiatique avec des pointes menaçantes. Son patriotisme exagéré, son envie d’améliorer la situation économique du pays de Voltaire et d’Hugo, sa haine des religions juives, musulmanes et bouddhistes l’avaient donc mené à ce statut effroyable ! Je ne comprends rien. La fête, où est-elle allée ? Où sont les cavalières ? Il n’y a plus de femmes. Les repas et les mets se sont évaporés. La transformation s’est faite rapidement, comme si tout était déjà prévu. Aucune trace de festivité quelconque. La fête désordonnée riche en sensations de toutes sortes s’est mue en procession guerrière rangée où tout a sa place. Je me rapproche d’Arthur. Il est totalement méconnaissable : il agite d’un air autoritaire son auriculaire de la main droite au-dessus de sa tête et chacun se sent interpellé ; il fend l’air d’une rapière tranchante et tout le monde a peur pour sa peau. Comment avait-il pu devenir si sûr de lui, si autoritaire, si terrible ? Lui, que tout le monde trouvait si timide, si peureux, si paisible ! C’est tout simplement inexplicable, du moins par une raison rationnelle. Et devant cette incapacité à expliquer ce qui se passe devant mes yeux, je me mets à geindre, à gémir, à gueuler. Je ne sais pourquoi personne ne fait attention à moi. La « chimère » constitue à présent un défilé et s’apprête à quitter la salle. Ayant oublié ses gants, Arthur passe devant moi mais ne me fait pas la grâce d’un seul coup d’œil. Un homme que la nature a rendu gros et trapu (dont le nom commence par la syllabe « Göb » je crois) a l’air de trouver mes pleurs importuns. C’est alors qu’il me donne un coup de poing vigoureux dans le ventre. Je perds l’équilibre. Quand je reviens à moi, Arthur, le gros homme trapu et le défilé ont disparu. Près de moi, le corps ensanglanté d’un être humain gît par terre. D’abord, il ne m’évoque rien, mais lorsque je m’approche un peu plus de lui, je découvre qu’il s’agit de l’homme qui s’était libéré de la foule et qui avait tenté de se révolter face à ce système dictatorial. On l’aura probablement exécuté. Tout cela n’était cependant que le début d’une période sombre où fascisme et pauvreté se conjuguent et où la misère de certains hommes est confrontée à la vanité des autres. Matthias Turcaud, 2nde10 En ouvrant ma fenêtre En ouvrant ma fenêtre dans un grincement Je me demande où est passée ma maman Mais pour l'instant ça ne m'intéresse pas trop Car je bois une tasse de chocolat chaud. J'entends les gouttes de pluie plic ploc sur les feuilles De l'arbre devant ma fenêtre le fauteuil Des voisins fait crac et les oiseaux chantent bien Ma sœur joue avec un stylo, mais c'est le mien. Sous la fenêtre, les voitures font vroum vroum Quand soudain retentit un assourdissant boum Dans un mouvement brusque je lève ma tête Zut, j'ai un torticolis, je suis vraiment bête. Et dans ce grand moment de souffrance totale Je vois s'élever derrière la cathédrale Un nuage noir en forme de champignon Je pense à mon petit ami si mignon. Ma vie se termine à ce triste instant Il n'y a sur terre plus rien d'important Lorsque je m'effondre je perçois un grand cri, De la ville de Strasbourg, le cri d'agonie… 34 Clara Burgard 1S4 (avec l’aimable coopération de Lena Burgard) Créations La jalousie Assis sur une plage de sable fin, j’écoutais le doux friselis de l’écume et les agitations agréables de la mer. Le soleil brillait, le vent envoyait quelques fois un souffle propice et le ciel présentait un tableau séduisant, dans lequel les nuages paraissaient peints au pastel. Tout semblait être là pour me plaire, pour me réjouir, pour me satisfaire. Et pourtant je ne pensais qu’à elle, qu’à Valentine, qu’à la personne chérie de mon âme, qu’à ce parangon béni de beauté et de charme. Elle aurait dû être là, ma déesse consolatrice, ma petite Valentine, elle aurait dû se trouver près de moi, lorsque, assis sur une plage de sable fin, j’écoutais le doux friselis de l’écume. Nous nous étions fixés rendez-vous. Elle aurait dû être là. J’inventais alors les histoires les plus incroyables, les imbroglios les plus improbables, gorgés de rebondissements les uns les plus rocambolesques que les autres, simplement pour l’excuser de son absence. Peut-être avait-elle croisé une amie d’enfance, oublié son sac à main chez elle ou voulu me faire une surprise. Quand m’apparut soudain l’effroyable mais ineffable vérité. Elle me trompait. Je serrais les poings. Avec qui pouvait-elle donc bien me tromper ? Un de ces garçons de cuisine si candides et si stupides ? Un de ces jeunes bourgeois orgueilleux et fanfarons ? Un de ces misérables romantiques qui lui aurait récité un poème de Lamartine pour l’impressionner ? Non, la vérité devait être plus terrible encore. C’était avec mon plus fidèle ami qu’elle me trompait, avec mon Achate, mon Pirithoos, mon Pylade. Elle me trompait avec Victor. Victor, je ne pouvais le croire, Victor, c’était avec lui que j’avais fait mes premiers tours en bicyclette, c’était avec lui que j’avais appris à lire et à compter, c’était avec lui que j’avais essayé de brûlé le collège du village – nous étions liés, nous étions frères. La sueur coulait de mon front et mes idées s’embrouillaient. J’enrageais. « Où est Valentine ? » demandai-je au boucher Farangol, un gros commerçant illettré, incapable de faire quoi que ce soit, si ce n’est couper des morceaux de viande. « Où est cette garce de Valentine ? » m’écriai-je dans la boulangerie, tenue par une méprisable femme, qui paraissait être enceinte trois fois en même temps, tellement elle était grosse. « Où est cette vilaine garce de Valentine ? « hurlai-je dans le bar de La Bonne Humeur, où venaient se rencontrent tous les alcooliques du coin, tous les jeudis, à dix-huit heures. Chaque fois que j’entrais dans une nouvelle boutique, un nouveau magasin, un nouveau cabaret, j’ajoutai un mot à ma liste d’insultes. Je me retrouvais ainsi chez la dentellière avec vingt mots. « Où est cette ignoble répugnante scélérate traîtresse cette fourbe inconstante insolente cette ignoble sorcière vénéneuse cette vilaine garce de Valentine ? ». Parmi ce flot d’insultes insupportable, aucune n’était réellement justifiée ; mais j’avais atteint un tel degré de folie que j’imaginais des choses inimaginables. J’imaginais les soupirs et susurrements lascifs de ces amants maudits, je les voyais en train de s’embrasser, de s’enlacer, de se manifester les marques les plus évidentes d’une tendresse réciproque. Ah ! J’étais prêt à leur enfoncer un couteau très profondément dans le cœur, à cette perfide de Valentine et à ce félon de Victor, pour leur montrer combien j’étais malheureux. C’est alors que je la vis. Valentine. Là. Debout. Près de moi. Belle. Sa beauté était telle qu’elle aurait dû m’empêcher de parler, qu’elle aurait dû me réduire au silence. Mais moi, crétin que j’étais et que je suis encore, je lui criai au visage : « Tu m’as trompé, vilaine ! ». Et voyant que se tenait derrière elle, Lise, son amie, je m’avançai vers celle-ci, la prit violemment par la taille et l’embrassai. Mais ce n’était pas un baiser d’amour. C’était un baiser cruel et impétueux, énergique et violent. C’était un baiser abject et affreux. C’était un baiser de haine. Et Valentine dans sa belle robe de lin, Valentine avec ses cheveux d’un châtain magnifique, Valentine avec son visage si parfaitement ovale, Valentine pleurait. Je ne pouvais regarder plus d’un instant les perles aqueuses descendre sur ses joues et atterrir sur son cou. Je compris avec difficulté qu’elle était allée à la ville pour m’acheter des pralinés au chocolat – « tu les aimes tellement » m’avait-elle dit – et, s’apercevant qu’elle n’avait plus d’argent elle avait… Le reste, à vrai dire, je ne m’en souviens plus. J’étais ému par la sincérité avec laquelle elle parlait et les efforts qu’elle déployait pour chasser les pleurs de son visage. Le lendemain matin, Valentine partit et nous laissa seuls, moi, mes insultes et ma jalousie. Tout seuls. Matthias Turcaud, 2nde10 « C’est pas parce que beaucoup de gens croient à des conneries, que vous devez y croire aussi ! » 35 Créations : Photographie Lyon, le palier d’une chambre d’étudiant. Je souhaitais saisir le sombre de ces beaux couloirs. Le crépuscule lyonnais mourant dans ces mansardes. Echantillon de disctinction. La balançoire aux grenouilles, Toscane. Charlotte Wischuf, 1L2 36 Pontonews Rédaction et Administration : Lycée International des Pontonniers 1, rue des Pontonniers 67 081 Strasbourg Cédex mail : [email protected] Directrices de publication : Mesdames Corbin, Martineau, Rouve Maquette, mise en page: Natalia Lora lllustrations de couverture : Carlo Fasino, Monique Kalsi Ont réalisé ce numéro : Marie Turcan, Matthias Turcaud, Clara Burgard, Elise Jost, Enzo Dauphinot, Lucien Dethurens, Sarah Brucker, Juliette Weller, Mathieu Perez, Christelle Gleitz, Natacha Faullimmel, Simon Bénard, Julie Ranslant, Carlo Fasino, Carl Glessgen, Charlotte Wischuf. Le Pontonews est en téléchargement gratuit (et en couleurs !) sur le site Web du C.D.I. à l’adresse : http://www.lyc-sections-internationales-strasbourg.ac-strasbourg.fr/cdi. Vous y trouverez le dernier numéro et les archives du journal depuis septembre 2005. 37