La Birmanie :
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La Birmanie : Witness: Mya Thit Sar un État- armé(e) contre ses nations La junte birmane peut-elle se permettre de continuer à ignorer les revendications des minorités ethniques ? interview by Julien Levesque 22 DOSSIER : ROGUE STATES Si l’on regarde la carte des États dits défaillants, classification par le général Ne Win. La junte militaire au pouvoir mène alors une politique ouvertement pro-Bama (ethnie majoritaire), en lançant en 1967 une campagne de « Burmanization ». C’est depuis cette époque, par exemple, que l’enseignement supérieur se fait en birman et non plus en anglais. Suite au coup d’État de 1988 et l’arrivée d’une junte plus autoritaire au pouvoir, le gouvernement mène une politique de cessez-le-feu, orchestrée par le général Khin Nyunt. Cette période des années 1990 voit la soumission de nombreux groupes armés au gouvernement central de Rangoon. Le pays compte une mosaïque de groupes ethniques éparpillés Par endroits, la pacification s’est échangée contre une autonomie – dont les Bama majoritaires – dont les antagonismes se sont de facto. Ainsi, les Wa ont conquis la liberté de cultiver de l’opium accentués avec la construction de l’État moderne. C’est en effet en échange de la paix avec le gouvernement central. dans le cadre de l’Empire britannique des Indes que la mise en place de politiques de discrimination a favorisé les groupes ayant La Birmanie vit des turbulences socio-politiques, auxquelles accepté la christianisation (Karen, Kachin, Chin) au détriment l’armée (la Tatmadaw), institution hypertrophiée, ne sait répondre autrement que par la force. La lutte contre l’ennemi intérieur d’autres groupes communautaires (les bouddhistes majoritaires). qu’elle mène, à travers des opérations anti-guérilla et de maintien L’indépendance fut alors envisagée dans un cadre fédéral pouvant de l’ordre, prend constamment une population opprimée pour assurer la cohésion des peuples au sein de la nouvelle Union de cible. Birmanie. Les Accords de Panglong consacraient l’autonomie totale des nationalités dans l’administration interne et un partage Aujourd’hui, seulement quelques groupes restent véritablement engagés dans une lutte nationaliste : le KNU (Union de la Nation équitable des richesses du pays. Karen), le KNPP (Parti National Progressiste Karenni) et le SSA C’est le non-respect de cet accord qui provoque dès 1948 la rébellion (Armée de l’État Shan), tous les trois avec des objectifs largement de certains groupes. L’État démocratique birman ne parvient pas à défensifs. Au cœur des discours nationalistes de ces groupes faire face à une situation croissante de guerre civile et est renversé demeure le sentiment de trahison envers les Accords de Panglong. faite notamment par la revue américaine Foreign Affairs, on verra sans surprise que plusieurs d’entre eux vivent aujourd’hui des contestations majeures de leur territoire et de leur gouvernement par des groupes dits minoritaires. La Birmanie n’échappe pas à cette catégorisation. Les revendications de ces groupes ethniques sontelles à l’origine, ou bien aggravent-t-elles les difficultés de l’État birman ? Sont-elles à l’inverse le fruit de politiques autoritaires ? THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 2. Quelle place l’opposition démocratique, conduite par Aung San Suu Kyi, accorde-t-elle aux groupes minoritaires ? Ils partagent un ennemi commun : la junte militaire. Mais on pourrait penser que le mouvement démocratique place la démocratie au sommet de ses objectifs, tandis que pour les groupes ethniques, la démocratie est indissociable d’une structure fédérale. La Birmanie est donc le théâtre de deux batailles simultanées et complémentaires : celle pour la démocratisation du pays et celle pour la reconnaissance des droits de ses minorités. Or, le traitement de la question passe moins par la stigmatisation des minorités que par la critique des différentes administrations qui n’ont jamais crée une arène politique compatible avec les demandes de leur population hétérogène. Quels sont les enjeux de ces conflits ethniques à l’échelle régionale et internationale ? Au delà d’être une entrave à la paix et au développement, les conflits armés dans des régions peuplées par des minorités sont sources de graves crises humanitaires, et constituent un risque pour la stabilité régionale d’expansion des conflits, vers l’Inde et la Thaïlande notamment. C’est en partie ce risque qui est redouté par la communauté internationale. La Birmanie a décidé de se cloîtrer dans une paranoïa et une xénophobie contre tout ce qui vient de l’étranger. Tout en étant la cible des sanctions des États-Unis et de l’Union Européenne, aux yeux du gouvernement les relations avec son entourage immédiat sont plus importantes que celles avec l’Occident. C’est pourquoi ses relations diplomatiques se limitent à ses voisins et membres de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ANASE). Enfin, si la Birmanie figure sur la liste des États défaillants c’est moins à cause de sa dangerosité envers la communauté internationale qu’envers ses propres citoyens. Les revendications des groupes minoritaires aggravent l’instabilité politique du pays. Leur prise en compte par les autorités, improbable dans le contexte actuel, est une des clés de stabilisation de l’État birman. As a young adult from Burma studying in Paris, I am aware each time I step into a university classroom that my right to free expression is a privilege denied to most of my compatriots. Life in Burma The lives of Burmese people are subject to rigorous control. Personal mobility, taken-for-granted in other countries, is in Burma a restricted commodity: permission is required both to travel between states and to receive guests. Freedom of press is non-existent, meanwhile. Burma’s only newspaper, the New Light of Myanmar, is a State-sponsored piece of propaganda; progressive media outlets, such as the Democratic Voice of Burma, are forced to air from neighboring countries. According to a friend, unfiltered and up-to-date news is so hard to come by that during the Saffron Revolution of 2007, government troops themselves turned to alternative media sources. Exile Although worsening political and economic conditions are pushing people out of the country, migration and exile are fraught with danger. The line between migrant and refugee is always blurry. Border-crossing is a costly and uncertain process, and those who attempt it risk being thrown into jail or sold into human trafficking, slavery or prostitution. The struggle for democracy > Laura Waisbich, étudiante en 4è année, Master Recherche, Relations Internationales Although not every Burmese abroad is a political activist, exiles and migrants help to keep Burmese society alive, both through the remittances they send back and through political activism. Life outside of Burma is not easy, especially for overseas activists, who continue to face threats from the junta. But for people in Burma, this distant activism is a sign of hope. It keeps resilience alive, and it keeps people believing that Burma will one day be free. THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 2. 23 DOSSIER : ROGUE STATES Creative Commons licence photo credit : El Fotopakismo Face à l’échec des promesses d’autonomie faites aux groupes minoritaires, ceux-ci accusent le gouvernement de maintenir une politique agressive envers les minorités et de creuser d’avantage les antagonismes en refusant la réconciliation nationale.
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