Principes généraux du droit anglais des sociétés

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Principes généraux du droit anglais des sociétés
Principes généraux
du droit anglais des sociétés
2004
PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT ANGLAIS DES SOCIÉTÉS
FIELD FISHER WATERHOUSE
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Direction de la société
Les Directors
Le Chairman
Les premiers administrateurs d’une société sont les
personnes nommées comme telles en remplissant un
formulaire (Form 10) remis au Registre des Sociétés
(Companies House) lors de l’immatriculation de la
société. Ils deviendront automatiquement
administrateurs dès l’immatriculation effective de la
société.
Les administrateurs d’une société peuvent décider de
nommer l’un d’entre eux au poste de Président
(Chairman) de la société. Il n’existe toutefois aucune
obligation de le faire - contrairement au droit français –
et par conséquent il est tout à fait envisageable de ne
pas nommer de Chairman et de décider que les
administrateurs nommeront lors de chaque réunion du
Board l’un d’entre eux comme Président de séance.
Durant la vie sociale de la société, les administrateurs
peuvent être nommés soit par une résolution ordinaire
des actionnaires (ordinary resolution) lors de la tenue
d’une assemblée, soit par une résolution du Board,
selon ce qui sera stipulé dans les statuts. Par souci de
simplification, il est préférable de prévoir que tout nouvel
administrateur sera nommé par le Board, étant précisé
toutefois dans cette hypothèse, la durée de son mandat
prendra fin lors de la prochaine assemblée générale de
la société, à charge pour cette dernière de procéder à sa
renomination.
Il peut exister dans une Limited Company (Ltd) de droit
anglais plusieurs types d’administrateurs. Les
administrateurs peuvent en effet nommer un Managing
Director à qui sera donné généralement le pouvoir de
gérer la société au quotidien et qui sera nécessairement
un administrateur de la société (mais pas
nécessairement un actionnaire).
Le pouvoir de le révoquer est de la compétence du
Board et en tout état de cause, sa révocation du mandat
d’administrateur entraîne sa révocation du poste de
Managing Director. Un contrat de services sera conclu
avec lui et le plus souvent avec d’autres membres du
Board (par exemple le Finance Director) qui sont des
Executive Directors dont les termes seront fixés par le
Board. Le Director en question n’a pas le droit de voter
sur son propre contrat.
Par ailleurs, une distinction sera faite entre les
administrateurs selon qu’ils sont ou non impliqués dans
la gestion quotidienne de la société (executive directors /
non executive directors). En principe les administrateurs
qui sont executive directors ne sont pas rémunérés
séparément en tant qu’administrateurs (ils perçoivent
une rémunération seulement dans le cadre de leur
contrat de services). Les non-executive directors
perçoivent souvent une rémunération en leur qualité
d’administrateurs (director fee) fixée par les actionnaires.
Il n’y a pas de système de jetons de présence.
Dans l’hypothèse où un Chairman est nommé par les
administrateurs de la société, il est important de noter
que celui-ci n’aura pas de pouvoir spécial par rapport
aux autres administrateurs, même s’il est possible de
prévoir dans les statuts ou dans un pacte d’actionnaires
qu’en cas d’égalité de vote entre les administrateurs, la
voix du Chairman sera prépondérante (ce que l’on
appelle en droit anglais un casting vote). Les parties
peuvent, par exemple dans le cadre d’une joint venture à
50/50, prévoir qu’en cas de situation de blocage
(deadlock), la voix du Chairman sera prépondérante.
Toutefois, hors les hypothèses où une situation de
deadlock peut surgir, il est peu fréquent dans la pratique
que ce casting vote soit attribué au Chairman et les
statuts peuvent prévoir de supprimer ce privilège ou de
ne l’appliquer que dans certains cas.
Le Chairman a la charge de diriger le Board et les
assemblées générales d’actionnaires et de préserver la
sérénité des débats lors des réunions. Il n’a pas, comme
un Président du conseil d’administration en France, les
pouvoirs les plus larges pour représenter la société vis à
vis des tiers. En droit anglais, il partage ses pouvoirs
avec les autres administrateurs de la société.
Enfin, le Chairman peut être révoqué à tout moment par
les autres administrateurs de la société.
Le Company Secretary
En droit britannique, toute société doit nommer lors de
sa constitution un Company Secretary dont l’étendue
des activités sera déterminée par les administrateurs. Le
Secretary sera nommé lors de la constitution de la
société à partir du même modèle (Form 10) tel qu’utilisé
pour nommer les administrateurs. Comme pour les
administrateurs, la personne concernée deviendra
automatiquement le Secretary de la société dès
l’immatriculation effective de la société. Il n’est pas
nécessaire que le Secretary soit un administrateur. Dans
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l’hypothèse d’un changement de Secretary en cours de
vie sociale, tout nouveau Secretary sera nommé par le
Board.
Dans l’hypothèse où la société ne compte qu’un seul
administrateur, ce dernier ne pourra cumuler cette
fonction avec celle de Secretary de la société.
Il appartient aux administrateurs de la société de décider
des termes contractuels de la fonction du Secretary au
sein de la société et de fixer sa rémunération.
Généralement, ses fonctions sont limitées à des tâches
administratives et concernent principalement la
rédaction des procès verbaux des réunions du Board ou
des assemblées (auxquelles il doit par conséquent
assister), la mise à jour des registres de la société et il
sert de lien entre la société et les autorités
administratives (et notamment avec la Companies
House).
Il n’a pas d’autorité pour conclure des contrats
commerciaux au nom et pour le compte de la société
mais il peut faire partie de ses attributions de signer des
contrats relatifs à la gestion administrative de la société
(tels que contrats de maintenance par exemple).
Il faut que le Secretary ait les compétences
professionnelles nécessaires pour exercer ses fonctions,
ce que les administrateurs doivent vérifier
préalablement, l’étendue de ses compétences variant en
fonction de la taille de la société.
Le Secretary peut être révoqué à tout moment par les
autres administrateurs de la société, les compensations
financières éventuellement dues au Secretary étant
dépendantes des termes du contrat fixé par les
administrateurs lors de sa nomination.
Responsabilité des dirigeants sociaux
En théorie, sauf en cas de faute grave, les
administrateurs ne peuvent être considérés comme
responsables sur leur biens propres notamment du fait
des pertes que la société a pu subir. Si l’administrateur
est également actionnaire, son risque sera limité au
montant des sommes investies personnellement dans la
société.
Toutefois, en pratique, il existe des situations où les
administrateurs peuvent voir engager leur responsabilité
personnelle. Il est en effet assez fréquent de voir dans la
pratique, les banques exiger que les administrateurs
fournissent des garanties personnelles lors de l’octroi
de prêts.
Par ailleurs, un administrateur pourra voir sa
responsabilité personnelle engagée notamment dans
l’hypothèse où il continuerait d’exercer son mandat
d’administrateur alors qu’une décision de justice le lui a
interdit ; de même si un administrateur agissait au delà
de son autorité réelle ou habituelle et de ses pouvoirs au
sein de la société, cette dernière ne serait pas liée par
les actes passés entre ledit administrateur et tous tiers
et ledit tiers disposerait alors d’un droit d’agir
directement contre ledit administrateur pour violation de
ce que l’on appelle en droit britannique la Warranty of
authority. Ce serait aussi le cas si une société ne
disposait pas d’une telle autorité dans ses statuts.
De plus, un administrateur pourra voir sa responsabilité
pénale engagée en cas de fraudulent trading, c’est à
dire dans l’hypothèse où il existe de la part de
l’administrateur une volonté de fraude vis a vis des
créanciers de la société, notamment lors de la
liquidation judiciaire d’une société. Les sanctions
pénales s’appliqueront que la société soit mise ou non
en redressement ou liquidation judiciaire. S’il est assez
difficile d’apporter la preuve de la responsabilité pénale
d’un administrateur pour fraudulent trading, sa
responsabilité civile pourra être plus facilement engagée
lors de la liquidation d’une société lorsqu’il aura consenti
à des actes commerciaux démesurés par rapport à la
situation financière critique de la société (ce que les
britanniques appellent le wrongful trading).
Enfin, il est à noter que les administrateurs de même
que les officers d’une société sont passibles d’amendes
si les registres de la société ne sont pas tenus
correctement.
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Fonctionnement de la société
Board Meetings
Tout administrateur (Director) d’une Ltd anglaise peut
convoquer une réunion du Board en respectant un délai
raisonnable sans qu’il soit nécessaire qu’une
convocation écrite des administrateurs soit faite. Il n’est
pas nécessaire également d’envoyer une convocation à
un administrateur domicilié hors du territoire du
Royaume Uni pour une réunion du Board.
La notion de “délai raisonnable” peut varier selon
l’importance des problèmes à discuter lors de la réunion
et selon la présence ou non dans la société de tous les
administrateurs (executive directors). Par exemple, dans
l’hypothèse où le Board a un problème de moindre
importance à discuter et que tous les administrateurs
dans la société sont des executive directors, un délai de
5 minutes entre la convocation et la tenue d’une réunion
du Board pourra être considéré comme “raisonnable”. A
contrario, le délai sera plus long (jusqu’à 2 ou 3 jours) s’il
existe des non executive directors au sein de la société
et/ou s’il s’agit de débattre de points importants.
Un procès verbal doit être rédigé après la tenue de
chaque réunion du Board (généralement par le
Secretary ou le Chairman) et signé par le Chairman
comme étant conforme à ce qui a été débattu lors de la
réunion. Toutefois, le droit britannique permet aux
administrateurs d’une société, dans l’hypothèse où ceuxci seraient unanimement d’accord pour approuver telle
ou telle résolution proposée par l’un d’entre eux, de faire
approuver ladite résolution par l’ensemble des
administrateurs en envoyant à chacun des
administrateurs la résolution écrite pour signature et ce,
sans qu’il ne soit nécessaire de réunir un Board.
Board ne se soit réuni. Il est indispensable toutefois de
prévoir un article spécifique dans les statuts de la
société pour permettre la tenue des réunions du Board
par téléphone ou visioconférence.
General Meetings
Le pouvoir de convoquer les assemblées générales
revient normalement aux administrateurs et le Board
peut décider de convoquer une assemblée générale à
tout moment et pour quelque raison que ce soit. Tous
les actionnaires d’une société sont en droit d’assister
aux assemblées et d’y prendre la parole, de même pour
les administrateurs, étant précisé toutefois que ces
derniers ne peuvent prendre part au vote lors
d’assemblées qu’à la condition d’être actionnaire de la
société.
Chaque année se tient une assemblée générale
annuelle (Annual General Meeting ou AGM) qui doit être
convoquée une fois par année calendaire par les
administrateurs, un délai de plus de 15 mois entre deux
AGM constituant un maximum autorisé. Une règle
particulière existe toutefois pour les sociétés venant
d’être immatriculées qui permet à ces dernières de ne
pas tenir leur première AGM l’année de leur
immatriculation, ni l’année suivante sous réserve
toutefois que cette première AGM intervienne au plus
tard dans les 18 mois suivant leur immatriculation.
L’objet principal de l’AGM est de discuter des comptes
annuels de la société et de permettre, notamment aux
actionnaires qui ne sont pas membres du Board,
d’obtenir des éclaircissements auprès des
administrateurs sur les finances de la société.
Chaque administrateur dispose d’un vote. Le Chairman
peut avoir un vote prépondérant mais ce n’est pas
obligatoire.
Toute autre assemblée générale de la société sera
considérée comme une assemblée générale
extraordinaire (Extraordinary General Meeting ou EGM).
Lors du premier Board de la société nouvellement
immatriculée, il sera procédé notamment à la nomination
des commissaires aux comptes de la société (ou le cas
échéant il sera indiqué que la société se dispense de la
nomination d’ un commissaire aux comptes) et la
période annuelle d’exercice fiscal de la société sera
déterminée.
Pour une AGM, le délai de convocation est de 21 jours
avant la tenue de ladite assemblée sauf si la totalité des
actionnaires décide de raccourcir le délai (décision
unanime requise). Pour une EGM, le délai de
convocation varie selon le type de décision à prendre.
Ce délai sera de 14 jours s’il n’y a que des résolutions
ordinaires et extraordinaires à l’ordre du jour de
l’assemblée et que celles-ci ne concernent pas la
nomination ou la révocation d’un administrateur; sinon le
délai de convocation sera porté à 21 jours.
En conclusion, s’il est tout à fait envisageable de réunir
les administrateurs par téléphone ou visioconférence, il
n’en demeure pas moins qu’un document écrit devra
être préparé et signé par le Chairman ou le président de
séance ou par l’ensemble des administrateurs dans
l’hypothèse d’une résolution approuvée sans que le
Les convocations aux assemblées générales doivent
impérativement être faites par écrit et envoyées (ou
remises en main propre) à tous les actionnaires (ou
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leurs représentants le cas échéant), les administrateurs
et les commissaires aux comptes de la société. La loi
prévoit également d’effectuer la convocation aux AGM
par un courrier électronique, adressé à la société à une
adresse indiquée par cette dernière ou par un
actionnaire. Cette convocation ne sera valable que si la
société a formellement accepté l’utilisation des
communications électroniques à cette fin et doit
comporter les mêmes indications qu’une convocation
écrite. Il existe un certain formalisme sur les éléments à
mentionner dans la convocation , cette dernière devant
indiquer en effet la date, l’heure et le lieu de la réunion
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Par ailleurs, en droit britannique, pour qu’une assemblée
d’actionnaires puisse se tenir, il faut que deux
personnes soient “physiquement” présentes dans la
même salle. Il est par conséquent difficile à ce jour de
pouvoir tenir et adopter des résolutions lors
d’assemblées d’actionnaires par téléconférence ou
électroniquement.
Directors et capital
En droit anglais, il existe une distinction entre le capital
émis (issued share capital) et le capital non souscrit
(authorised share capital) qui peut être distribué sans
avoir à effectuer une augmentation de capital.
En principe, les administrateurs n’ont pas le pouvoir de
céder des actions, de conférer des options pour
souscrire à des actions, ou d’émettre quelque autre titre
portant un droit de conversion sans l’autorisation des
actionnaires. Les administrateurs peuvent cependant
avoir un pouvoir général, contenu dans les statuts ou
dans une ordinary resolution, de distribuer le capital
autorisé mais non émis de la société aux actionnaires
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mais aussi le nom de la société et un certain nombre de
précisions sur les résolutions qui vont être soumises aux
actionnaires.
existants ou à des tiers. Ce pouvoir peut, dans certains
cas, être limité à une seule distribution d’actions. Si ce
pouvoir est général, les statuts ou la résolution doivent
spécifier le nombre maximum d’actions qui peuvent être
émises dans le cadre de ce pouvoir. Ce pouvoir ne peut
être conféré pour une période de plus de 5 ans.
Ce pouvoir général peut être révoqué ou modifié par une
ordinary resolution des actionnaires, nonobstant le fait
que ceci entraînera une modification des statuts (pour
laquelle une special resolution est normalement
requise).
Le Board et ses compétences
dans le cadre d’une OPA
Le devoir qu’a un director d’agir dans l’intérêt de la
société dans le cadre d’une OPA peut entraîner celui-ci
à prendre une position différente de celle d’un
actionnaire. Les administrateurs peuvent d’une manière
légitime considérer que malgré un prix attrayant pour la
société, un changement de contrôle pourrait causer un
préjudice à la société et donc ne pas être dans son
intérêt. D’une manière générale, les administrateurs ne
doivent pas prendre en compte leurs positions
personnelles au sein de la société, par le biais d’un
contrat de travail par exemple. De même, un acquéreur
d’une société désire souvent la continuité du
management et donc que de nouveaux contrats de
travail soient conclus avec certains administrateurs.
Dans le cas d’un Management Buy-Out (MBO), un
administrateur-dirigeant sur le point d’acquérir une
société qu’il administre doit pouvoir justifier de l’intérêt
pour la société d’une telle opération. S’il est déjà
membre de l’équipe dirigeante, il doit se poser la
question de savoir comment la rentabilité de la société
sera vraiment améliorée par le MBO.
Lorsqu’une société est amenée à verser un paiement à
un administrateur lié à la perte de son mandat dans le
cadre d’une O.P.A., ce paiement ne peut être fait qu’à
condition que la proposition ait été approuvée par une
Ordinary Resolution de la société en assemblée
générale.
Il incombe alors au director de s’assurer que tous les
détails du paiement sont inclus dans tous les documents
(et convocations aux actionnaires) concernant l’offre.
Néanmoins, les paiements à un administrateur à titre de
dommages et intérêts pour résiliation de contrat ou une
retraite conférée pour des services rendus ne sont pas
soumis à la règle générale ci-dessus.
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Contact
Pour plus de renseignements, veuillez contacter
Marie-Caroline Frochot
t: +44 (0)20 7861 4164
e: [email protected]
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