La société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED
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La société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED
KF/KAP REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE --------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN -------------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN -------------------RG N° 004/2012 du 22/11/2012 ___________ JUGEMENT CONTRADICTOIRE -----------------Affaire : La société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED (Me FOLQUET LEON) 1) La société ALLIED MARITIME INC 2) La société EVALEND SHIPPING CO SA (Me N’ZI JEAN CLAUDE) 3) La société ARIAN MARITIME SA -----------------------DECISION : Contradictoire Statuant publiquement, contradictoirement en ce qui concerne les sociétés EVALEND SHIPPING CO SA et ARIAN MARITIME et par défaut en ce qui concerne la société ALLIED MARITIME INC ; Se déclare compétent pour connaitre du litige ; Déclare l’action en paiement de la société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED recevable ; Constate la non conciliation des parties ; Dit la société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED bien fondée en son action ; Condamne solidairement les défenderesses à lui payer la somme de 77.996.894,81(soixante dix sept millions neuf cent quatre vingt seize mille huit cent quatre vingt quatorze F CFA quatre vingt et un) ; les défenderesses Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique ordinaire du Jeudi sept Février de l’an deux mil treize tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient : Docteur KOMOIN FRANCOIS, Président du Tribunal ; Madame MATTO JOCELYNE ; Messieurs SILUE DAODA, RENE MAX DELAFOSSE et TALL YACOUBA, Assesseurs ; Avec l’assistance de Maître DOUHO THEMAUBLY DANIELLE, Greffier ; Avons rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre : Contre Condamne dépens. AUDIENCE PUBLIQUE DU 07 FEVRIER 2013 aux La société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED, ayant son siège social The Broadgate Tower Third Floor 20 Primrose Street, London EC2A 2RS, Royaume-Uni ; Demanderesse comparant et concluant par Maître FOLQUET LEON, Avocat près la Cour d’Appel d’Abidjan, sise à Cocody, 1 rue 31 B Danga à Abidjan ; D’une part ; Et 1) La société ALLIED MARITIME INC, société de droit grec à responsabilité limitée, dont le siège social est au 3 Drossini Street, Voula, Athens 16673, Grèce ; 2) La société EVALEND SHIPPING CO SA, société de droit grec dont le siège social est sise au Filellinon 21 & Souri Street, Syntagma, 105 57 Athènes, Grèce ; Défenderesses ; représentés par Maître N’ZI JEAN CLAUDE, Avocat à la Cour ; 1 3) La société ARIAN MARITIME SA, société de droit des Iles Marshall, dont le siège social est sis Trust Company Complex, Ajeltake Road, Ajjeltake Island Majuro, République des Iles Marshall MH 96960 ; D’autre part ; Enrôlée pour l’audience du 22 novembre 2012, l’affaire a été appelée ; La tentative de conciliation initiée par le tribunal s’est soldée par un échec. L’affaire n’étant pas en état de recevoir jugement, une mise en état a été ordonnée, confiée au Juge François KOMOIN. Cette mise en état a fait l’objet de l’ordonnance de clôture N° 269 du 2 2 Janvier 2013 et la cause a été renvoyée à l’audience publique du 31 janvier 2013 pour mise en délibéré pour décision être rendue le 07 février 2013. Advenue cette audience, le Tribunal a vidé son délibéré. LE TRIBUNAL Vu les pièces du dossier ; Ouï le demandeur en ses prétentions ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; FAITS, PROCEDURE ET PRETENTION DES PARTIES Par exploit d’huissier du 14 septembre 2012, la société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED a assigné les sociétés ALLIED MARITIME INC, EVALEND SHIPPING CO SA et ARIAM MARITIME SA à comparaître le 22 novembre 2012 devant le Tribunal de Commerce d’Abidjan en paiement de la somme de 77.996.894,81(soixante dix sept millions neuf cent quatre vingt seize mille huit cent quatre vingt quatorze F CFA quatre vingt et un). Au soutien de son action la société FALMOUTH 2 PETROLEUM LIMITED expose qu’elle exerce l’activité de fournisseur de soutes/carburants aux navires, sous le nom commercial de BUNKER FUELS. Que dans le cadre de cette activité, elle a procédé à la fourniture de soutes au navire « EQUATOR », qui bat pavillon des Iles Marshall et dont le numéro IMO est 9363766. Que le 27 novembre 2011, au port de Falmouth, au Royaume Uni, elle a fourni, via une barge, au navire « EQUATOR », appartenant à la société ARIAN MARITIME SA et/ou à la société EVALEND SHIPPING CO SA (qui s’est présentée comme armateur durant la procédure de saisie du navire à Abidjan), et exploité par la société ALLIED MARITIME INC : - 20,113 tonnes de fuel de type MGO/DMA au prix de 995 USD par tonne ; 150,154 tonnes de produit LSFO/380 au prix de 705 USD par tonne Que la livraison des produits commandés est intervenue en conformité avec ses conditions générales de vente. Que la réception de cette fourniture par le navire est attestée par le bon de livraison, qui a été signé par le bord. Que cette fourniture a fait l’objet d’une facture N° 10741232591, datée du 29 novembre 2011, qu’elle a émise et adressée au navire « EQUATOR » et/ou à ses propriétaires et/ou à ses opérateurs et à la société ALLIED MARITIME INC d’un montant total de 129.871,01 USD. Que le paiement de cette facture devait être fait au plus tard le 27 décembre 2011. Que cependant le prix demeure impayé. Qu’à cette somme en principal, s’ajoutent, conformément à la confirmation de commande, aux Conditions Générales de Vente applicables et selon les termes de la facture, des frais administratifs et des 3 intérêts moratoires au taux de 2% mensuels s’élevant, à la date du 12 Juillet 2012, à la somme de 23.636,52 USD. Qu’estimant titulaire d’une créance maritime certaine, liquide et exigible à l’égard des défenderesses, la requérante est titulaire à l’égard des défenderesses, elle sollicite leur condamnation conjointe et solidaire à lui payer la somme de 153.507,53 USD, hors frais soit 77.996.894,81(soixante dix sept millions neuf cent quatre vingt seize mille huit cent quatre vingt quatorze F CFA quatre vingt et un). Les défendeurs soulèvent l’incompétence du Tribunal de Commerce à connaître du présent litige au motif que le litige ne présente que des éléments d’extranéité (demanderesse, société de droit anglais sont le siège social est au Royaume Uni ; défenderesses, sociétés ayant leur siège social en Grèce ; navire battant pavillon des îles Marshall ; paiement sur un compte bancaire de la société FALMOUTH logé à la banque HSBS de Londres). Elles soulèvent également l’irrecevabilité de l’action initiée par la demanderesse par défaut de qualité et d’intérêt à agir aux motifs que les soutes ont été vendues par la société BUNKER FUELS et non par la société FALMOUTH et qu’aucune action directe ne peut excuser entre la demanderesse et l’armateur et son mandataire. Elles font en outre valoir que l’action de la demanderesse est prescrite du fait de l’extinction du privilège qui fonde son droit d’action, la présente action ayant été introduite plus de 06 mois après la fourniture des soutes et l’émission des factures. Au fond, elles sollicitent la mise hors de cause de la société EVALEND qui n’a été en l’espèce que le mandataire de l’armateur. Sur le droit applicable, elles concluent au mal fondé de l’action de la demanderesse pour défaut de base légale, le fondement sur lequel celle-ci agit en paiement n’étant pas précisé. SUR CE En la forme Sur la compétence du Tribunal de Commerce à connaitre du présent litige 4 Les défenderesses soulèvent in limine litis l’incompétence du Tribunal de céans d’abord en ce qu’il n’existe en la cause que des éléments d’extranéité, et qu’aucun élément ne rattache ainsi ce litige à la Côte d’Ivoire. La demanderesse conclue au rejet de cette exception en ce que sur le fondement de l’article 115 du code de procédure civile, commerciale et administrative aux termes duquel la partie qui se prévaut d’une telle exception « doit à peine d’irrecevabilité indiquer la juridiction qui selon elle est compétente pour connaître du litige ». Les défenderesses ont tenté de paralyser ce moyen en précisant qu’elles ont indiqué lors de l’audience de tentative de conciliation que les tribunaux compétents étaient les tribunaux anglais. Il y a lieu de faire observer que l’exigence légale d’indiquer la juridiction compétente vise à permettre la saisine de la juridiction appropriée selon celui qui excipe de l’exception d’incompétence. Il doit dans ce cas s’agir d’une indication précise, d’où l’utilisation par le législateur de l’article défini « la », au singulier. En l’espèce l’indication de la compétence des tribunaux anglais sans plus est vague, ce pays ayant plusieurs types de juridictions. Il y a lieu dès lors, en application de l’article 115 susmentionné, de déclarer l’exception d’incompétence irrecevable. Les défenderesses soulèvent également l’incompétence de la juridiction de céans en ce qu’aucun des cas visés par l’article 13 du code de procédure civile, commerciale et administrative n’existe en l’espèce ; ce à quoi s’oppose la demanderesse qui considère que la compétence du Tribunal de Commerce d’Abidjan vient d’une part de ce qu’il est le tribunal du domicile des défenderesses, et d’autre part de ce qu’il est le tribunal dans le ressort duquel le paiement devait être fait. L’article 13 du code de procédure civile, commerciale et administrative est ainsi libellé : « Le Tribunal territorialement compétent en matière commerciale est, au choix du demandeur : - Celui du domicile réel ou élu du défendeur et en l’absence de domicile, celui de sa résidence ; - Celui dans le ressort duquel la promesse a été 5 - faite et la marchandise a été ou devait être livrée ; Celui dans le ressort duquel le paiement a été ou devait être effectué. Sont également applicables les dispositions des alinéas 2, 3 et 4 de l’article 12. » Les défenderesses contestent avoir élu domicile à Abidjan car selon elles, l’élection du domicile est une nécessité légale pour les étrangers, et l’on ne peut prétendre que la constitution d’un avocat ivoirien dans un litige antérieur suffit à fonder la compétence du Tribunal de Commerce dans le litige actuel. Il y a lieu de rappeler que l’élection du domicile est une déclaration par laquelle un plaideur se domicilie en un lieu autre que son domicile réel et grâce à laquelle les actes de procédure sont valablement notifiés au domicile élu. A cet égard il importe d’indiquer que l’élection du domicile n’intervient qu’une fois le litige né. Il ne peut donc être raisonnablement prétendu que l’appréciation de celle-ci doit s’appuyer sur des éléments antérieurs à la naissance du litige, aucun plaideur, dans ce cas, n’ayant intérêt à procéder à une telle élection, le litige n’étant pas encore né. En l’espèce, lors de l’instance en main levée de la saisie du navire EQUATOR à qui les soutes ont été fournies, les défenderesses ont élu domicile chez Maître N’ZI JEAN CLAUDE, avocat à la cour. Dans l’instance présente, qui en réalité n’est que le prolongement de la précédente instance, elles ont encore élu domicile chez le même avocat. Le cabinet de celui-ci se trouvant dans le ressort territorial du Tribunal de Commerce d’Abidjan, il y a lieu de rejeter l’exception d’incompétence tiré de ce chef. Au total, le Tribunal de Commerce d’Abidjan se déclare compétent pour connaître du présent litige. Sur le caractère de la décision Les sociétés EVALEND SHOPPING CO SA et ARIANE MARITIME ont été représentées et ont fait valoir leurs moyens. 6 Il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard. La société ALLIED MARITIME a été assignée à Parquet. Elle n’a ni comparu ni conclu. Il y a lieu de statuer par défaut à son égard. Sur la recevabilité de l’action de la société FALMOUTH PETROLEUM Les défenderesses soulèvent l’irrecevabilité de l’action dirigée contre elle d’abord pour défaut de qualité et d’intérêt à agir en ce que d’une part le vendeur réel des soutes est la société BUNKER FUELS et non la société FALMOUTH PETROLEUM, et d’autre part en ce qu’elles sont tiers au contrat de fourniture de soutes de sorte qu’aucune action directe n’existe à leur encontre au profit de la demanderesse. Relativement à la première branche du moyen, le Tribunal constate que la société FALMOUTH PETROLEUM verse au dossier diverses pièces desquelles il ressort avec clarté que BUNKER FUELS n’est qu’une division de la société FALMOUTH PETROLEUM, vendeur et fournisseur de soutes de sorte que cette branche du moyen, jugée non pertinent, doit être rejetée. Relativement à la seconde branche du moyen, la défenderesse conclue à son irrecevabilité en ce qu’elle a été présentée après les arguments de fond alors qu’elle aurait dû l’être avant ceux-ci, comme l’exige l’article 125 du code de procédure civile, commerciale et administrative. Ledit article 125 est ainsi libellé : « Les exceptions, dès lors qu’elles ne sont pas d’ordre public, ne sont recevables que si elles sont présentées simultanément avant toutes défenses au fond et aucune ne sera reçue après qu’il aura été statué sur l’une d’elles. Il en est de même des fins de non recevoir lorsque celles-ci ne constituent pas par elles-mêmes de véritables défenses au fond. » Les défenderesses prétendent que le défaut de qualité pour agir est une fin de non recevoir d’ordre public, qui peut être, pour cela, présenté en tout état de cause. Le tribunal constate toutefois qu’en l’espèce la demanderesse fonde son action sur le droit américain, 7 applicable en vertu des conditions générales de ventes, qui lui donne le droit d’agir directement contre les propriétaires et/ou opérateurs du navire EQUATOR ; Le défaut d’intérêt à agir contre les défenderesses qui leur est opposé doit par conséquent être rejeté. Les défenderesses soulèvent en outre l’irrecevabilité de l’action de la société FALMOUTH PETROLEUM aux motifs que celle-ci est prescrite, prescription tirée de l’extinction du privilège affectant la créance. Il y a lieu d’observer qu’en droit commun un privilège est un droit que la loi reconnait à un créancier en raison de la qualité de la créance d’être préféré aux autres créanciers sur l’ensemble des biens de son débiteur ou sur certains d’entre eux seulement. En droit maritime, le privilège est un droit que la loi accorde à certains créanciers d’être payés avant les autres sur le prix de vente en justice du navire. Le privilège maritime confère aux créanciers maritimes des droits considérables que sont le droit de préférence et le droit de suite. Il a un caractère fugitif du fait de la brièveté de son existence temporelle. En l’espèce, les défenderesses estiment que le privilège de la société FALMOUTH PETROLEUM est éteint, de sorte que le droit d’agir de celle-ci à leur égard est prescrit. Ce qui revient alors à dire que l’extinction du privilège emporte celle du droit d’agir en paiement de la créance qu’il affectait. Il importe toujours d’observer qu’il est acquis en droit maritime que la conséquence de l’extinction du privilège, c’est la perte du droit de préférence et du droit de suite, laissant sauve la créance elle-même, permettant ainsi d’agir en paiement tant qu’elle n’est pas elle même prescrite. Décider autrement reviendrait à admettre que c’est le privilège qui fonde la créance, alors que c’est bien la créance, et singulièrement la nature de celle-ci, qui fonde le privilège. Il y a lieu au regard de ce qui précède de rejeter également cette exception d’irrecevabilité et de déclarer l’action en paiement initiée par la société FALMOUTH PETROLEUM recevable. Au fond 8 Sur la loi applicable au litige Sa détermination s’impose du fait que la créance dont le paiement est sollicité, est né en dehors de la CÔTE D’IVOIRE entre des personnes d’origine étrangère. Il est constant que la fourniture des soutes a fait l’objet des contrats, et donc d’un acte juridique. La règle de conflit pour ce type d’acte, selon les règles de droit international privé, sont, pour la forme du contrat, la loi du lieu de la conclusion du contrat, et pour le fond, soit la loi du lieu où le contrat a été conclu soit la loi qui régit le contrat au fond. L’analyse des pièces du dossier et notamment des conditions générales de vente, révèle que les parties ont indiqué la loi applicable à leur contrat, qui est la « Général Maritime Law » des Etats Unis d’Amérique, et, en cas de silence de celle-ci, la loi de l’Etat de Floride. Le contenu de cette loi étrangère, considérée en droit international privé comme un fait, doit être prouvé par la partie qui s’en prévaut. A cet égard, le demandeur produit un certificat de coutume établi le 03 janvier 2012. Il est vrai que le certificat de coutume, attestation émise par une autorité locale ou un particulier à la demande d’une partie sur la teneur de la loi étrangère et la régie de conflit, admise comme l’un des moyens de preuve de la loi étrangère, ne lie pas le juge. Toutefois celui-ci peut en tenir compte lorsque les circonstances de son établissement le rendent crédible. En l’espèce, le certificat de coutume a été établi par un avocat dont les déclarations ont été consignées dans un acte notarié ; ce qui lui confère de la crédibilité, autorisant le Tribunal de céans à y adosser sa décision. Sur le bien fondé de la demande en paiement dirigée contre les défenderesses Les défenderesses notamment les sociétés EVALEND SHIPPING et ARIANE MARITIME considèrent que l’action de paiement dirigée contre elles n’est pas fondée car elles sont toutes les deux étrangères à la convention de fourniture de soutes conclue entre la demanderesse et la société ALLIED MARITIME, affréteur du navire, et que s’il devait y avoir une action contre elles, celle-ci ne 9 viendrait que du privilège maritime dont dispose la demanderesse, lequel, du reste, est prescrit en l’espèce. Il résulte cependant des pièces du dossier que la confirmation de la commande a été adressée à la société ALLIED MARITIME, au navire EQUATOR, au propriétaire de celui-ci et aux autres opérateurs de ce navire ; que la facture de la fourniture de soute du 29 novembre a été adressée au navire, et/ou propriétaire et opérateur et à la société ALLIED MARITIME ; que l’article 8 des conditions générales de vente indiquent que les soutes ont été commandées pour le compte de l’armateur immatriculé. Par ailleurs, selon la loi américaine, applicable en l’espèce, les personnes qui ont autorité pour obtenir fourniture à un navire sont l’armateur, le capitaine ou un agent désigné par l’armateur ou l’affréteur. Il est vain pour les défenderesses d’avancer le contrat d’affrètement avec distinction de la gestion nautique et de la gestion commerciale, dès lors que selon la loi américaine applicable en l’espèce le droit du créancier à poursuivre l’armateur, l’opérateur et l’affréteur est « un droit basé sur la fiction légale que le navire est le malfaiteur et qu’il a luimême causé la perte et peut être appelé à la barre pour rembourser la perte », cette loi, du reste, maintenant au profit de la demanderesse son privilège maritime. En application de cette loi, la décision en paiement initiée par la société FALMOUTH PETROLEUM contre les défenderesses est fondée, sauf s’il y a fraude à la loi ou atteinte à l’ordre public ivoirien. En l’espèce, il n’y a pas fraude à la loi car les pièces du dossier n’établissent pas l’utilisation d’un moyen efficace pour se soustraire à l’application d’une loi ayant vocation à régir la situation initiale. Concernant l’exception d’ordre public, il y a lieu d’indiquer qu’elle est opposée à la loi étrangère soit lorsque celle-ci est incompatible avec les principes du droit ivoirien considérés comme essentiels, soit lorsque cette loi étrangère se heurte à une loi de police ivoirienne. En l’espèce, la preuve n’est pas rapportée que la loi américaine applicable heurte une loi de police ivoirienne ou les principes essentiels du droit ivoirien, qui connait, du reste, les mécanismes de l’action directe et de la solidarité contenus dans la loi américaine. Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu de faire 10 droit à la demande de la société FALMOUTH PETROLEUM et de condamner solidairement les défenderesses à lui payer la somme de 77.996.894,81 F CFA. Sur les dépens Les défenderesses succombant en l’instance, elles doivent en supporter les dépens. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement en ce qui concerne les sociétés EVALEND SHIPPING CO SA et ARIAN MARITIME, et par défaut en ce qui concerne la société ALLIED MARITIME INC ; Se déclare compétent pour connaitre du litige ; Déclare l’action en paiement de la société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED recevable ; Constate la non conciliation des parties ; Dit la société FALMOUTH PETROLEUM LIMITED bien fondée en son action ; Condamne solidairement les défenderesses à lui payer la somme de 77.996.894,81(soixante dix sept millions neuf cent quatre vingt seize mille huit cent quatre vingt quatorze F CFA quatre vingt et un) ; Condamne les défenderesses aux dépens. Et avons signé avec le Greffier. / . 11 12