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Business
Comparateurs d’assurances
Trublions ou facilitateurs ?
Les comparateurs de
produits d’assurance,
acteurs relativement
récents dans la pièce qui
se joue, pourraient-ils
à terme servir l’intérêt
des professionnels
du secteur ?
Plus de 300 000 contrats
par mois
C
omparer les prix (ou tout au moins les
rapports prestation/prix) de chez soi à
partir d’un simple ordinateur personnel :
voilà bien une application dont des
centaines de milliers de consommateurs
auront rêvé avant l’ère d’internet, et ce
quel que soit le produit convoité. Certes, essayer une
moto nécessitera encore longtemps un déplacement
sur le lieu de vente. En revanche, jusqu’à une date
récente, dénicher le meilleur contrat d’assurance
exigeait beaucoup plus de temps qu’il n’en requiert
aujourd’hui. Grâce à qui ? Les sites de comparaison
de produits d’assurance, bien sûr ! La plupart d’entre
eux servent avant tout l’intérêt des automobilistes
Ralph Ruimy, fondateur de
misterassur.com
L’
un des pionniers de la comparaison
de produits d’assurance, Assurland,
entreprise créée au seuil de la décennie
2000 par trois associés et financée au
départ par un fonds de capital-risque,
peut aujourd’hui se féliciter du degré
de notoriété dont il bénéficie. Avec 54
assureurs partenaires inscrits dans son
répertoire, il concentre les offres les plus
représentatives du marché à l’intention
des internautes. Comme l’explique
Stanislas di Vittorio, fondateur et directeur
général d’assurland.com, « Nous ne
vendons rien. En revanche, en quelques
dizaines de secondes, nous pouvons
apporter une information riche au futur
assuré. Bien entendu, tous les critères
possibles entrent en jeu, et le prospect a la possibilité de bien cerner l’offre qui lui est soumise (prix, garanties,
franchises, assistance, protection
juridique, assurance de l’équipement,
etc.). In fine, notre mission consiste à
mettre en relation des assureurs avec
leurs clients potentiels. » De même, tous les canaux de
souscriptions sont généralement
proposés – le rendez-vous en agence,
le téléphone, le courrier papier ou la
souscription en ligne. Avec un tel menu,
rien d’étonnant à ce qu’assurland.com,
qui revendique « 4 millions de visites du
site chaque mois et entre 300 000 et
350 000 polices souscrites » sur le même
laps de temps, s’érige en n° 1 de la mise
en relation du marché national. Quant aux
28 Mm de résultat (pour 25 salariés),
inutile de rappeler qu’ils proviennent des
commissions reversées par les assureurs.
Bref, une affaire qui roule.
L’actionnaire principal d’assurland.com
depuis 2005, le groupe Covea (Maaf,
MMA et GMF), a pourtant l’intention de se
retirer du montage. Le seul commentaire
officiel de l’assureur-actionnaire à ce sujet
(il émane de Thierry Derez, président
de Covea), extrait d’un communiqué de
presse récent, expose qu’ « ­­assurland.com
a rempli tous les espoirs que nous avions
mis dans la société lors de notre
investissement en 2005, en rendant
incontournable le modèle de comparaison
d’assurances et en renforçant son
leadership de l’assurance sur Internet. Au moment où l’assurance en ligne prend
son envol, il nous a paru important de
renforcer assurland.com et de pérenniser
son modèle en ouvrant son capital au
public. » Stanislas di Vittorio estime pour
16 Numéro 3789 P Mai 2011
(et de leurs assureurs, évidemment). Mais dans bien
des cas, la moto apparaît également au menu
proposé. Ils s’appellent assurland.com, lelynx.fr,
assuremieux.com, kelassur.com, comparer-monassurance.com, hyperassur.com ou encore
misterassur.com. Ils sont accessibles en quelques
secondes et inondent l’internaute d’un flot – en
général bien canalisé – d’informations. Pour résumer
leur raison d’être, on pourrait dire que leur action
profite de la tendance – ah, la “comparite” chronique
chez le consommateur ! – en même temps qu’elle en
amplifie les effets – plus le choix s’annonce riche de
propositions, plus l’exigence en matière de choix
s’affirme chez le prospecteur…
sa part qu’il est opportun que son site
reprenne une « totale indépendance vis-à-vis des assureurs. » L’introduction en
bourse d’assurland.com aurait donc
vocation à l’y aider.
Gommer le hiatus ?
M
misterassur.com
se définit comme un
facilitateur, pas un
intermédiaire. Les
commissions perçues par
notre société n’engendrent
aucun surcoût pour les
assurés, mais renvoient à
une baisse de marge
consentie par les
assureurs[...].
Stanislas di Vittorio,
fondateur et directeur
général d’assurland.com
Nous ne vendons rien.
En revanche, en quelques
dizaines de secondes,
nous pouvons apporter une
information riche au futur
assuré. [...] In fine, notre
mission consiste à mettre
en relation des assureurs
avec leurs clients
potentiels.
ais quelle que soit l’assise du site et le
profil de ses actionnaires, sa vocation
même, sur le terrain du deux-roues
motorisé, ne saurait l’imposer comme un
incontournable aux yeux des internautes
casqués. Stanislas di Vittorio le reconnaît
lorsqu’il rappelle que la moto ne
représente qu’environ 10 % de son
marché, derrière l’automobile, la santé
et l’habitation. En outre, l’intérêt du
professionnel à consulter assurland.com
ne paraît pas évident, sauf à vouloir
faciliter la vie d’un client en panne
d’assurance ce qui, en soi, ne doit pas
être négligé.
En fait, dans le schéma actuel, puisque
assurland.com se présente lui-même
comme un indicateur d’assurance (et non
un intermédiaire), le revendeur de motos
n’a a priori aucun bénéfice à tirer d’une
mise en relation entre son client et
l’indicateur – il ne sera pas rémunéré pour
sa brillante initiative. Mais il y a pire. Dans
le cas de concessionnaires censés vanter
le partenaire de leur concédant à la
première occasion – prenons l’exemple
d’AMV, maître-d’œuvre (entre autres)
de Yamaha Assurances –, on imagine
mal que le client final se jette dans les
bras d’AMV via assurland.com grâce
à son concessionnaire Yamaha sans
passer par la case… Yamaha Assurances.
Et la remarque vaut tout aussi bien pour
les partenariats Honda-FMA, TriumphAMV ou Peugeot Motocycles-AMT,
pour ne citer que ceux-là.
Pour gommer le hiatus, il s’agirait, pour
assurland.com, de créer un outil dédié
aux concessionnaires. « Nous pourrions
le faire », affirme Stanislas di Vittorio, sans
plus s’aventurer dans l’hypothèse. Mais
compte tenu du faible poids de
la moto dans son portefeuille, de la
complexité du dispositif informatique
qu’il s’agirait de mettre en place et du
nécessaire “bétonnage” juridique auquel
il faudrait s’atteler, la perspective de voir
émerger un système taillé sur mesure
pour les revendeurs de la branche
deux-roues semble lointaine.
Bien sûr, une structure de moindre
envergure, plus légère qu’assurland.com
en charges fixes et encline à se
spécialiser, pourrait s’y intéresser,
en estimant que cette niche du deuxroues motorisé pourrait lui permettre de
consolider sa rentabilité, et d’ancrer
solidement son nom. Or cette structure
existe peut-être. Créé en 2009 par l’ancien
patron du site empruntis.com (des offres
de crédit sur internet, outil racheté
depuis par Covea), misterassur.com
ne revendique certes pas une position
dominante sur son marché.
Mais Ralph Ruimy, son fondateur et
unique actionnaire, se dit prêt à miser
sur la moto.
Tout le monde
au même niveau
A
u début de l’année 2011, avec une
trentaine d’assureurs connectés à son
site via des passerelles techniques (dont
huit spécialistes du 2RM), il déclare
quelque 33 % de son trafic imputables
à la moto. Mieux : 45 % des dossiers
effectivement envoyés à des assureurs
concernent le deux-roues motorisé.
À l’instar d’assurland.com, misterassur.com
se définit comme un « facilitateur, pas un intermédiaire », précise Ralph Ruimy,
qui ajoute que les commissions perçues
par sa société « n’engendrent aucun
surcoût pour les assurés, mais renvoient à une baisse de marge
consentie par les assureurs, même si lesdites marges ne sont déjà pas
énormes ». Les tarifs proposés, en
principe, y restent donc compétitifs.
Est-ce aussi vrai pour les prestations
proposées par les partenaires de
marques ? « Des sociétés comme AMV
ou FMA animent des réseaux, visitent les concessions moto qui leur envoient
des clients. Or cela a un coût », rappelle
le patron de misterassur.com. Et de
souligner que « Les commerciaux de
sociétés de courtage ne se déplacent pas vers un client qui ne génère que cinq
ou six polices par an ». Bref, un site de
comparateur « permet de mettre tout le
monde au même niveau », assène Ralph
Ruimy. Les courtiers apprécieront sans
doute. Et les revendeurs, dans tout ça ?
« J’ai quelques idées sur la façon dont il
faudrait les aider, leur faciliter la tâche »,
affirme Ralph Ruimy. Soucieux de mûrir
les formules aujourd’hui à l’étude, le
patron de misterassur.com n’en dévoilera
pas plus, ou à peine : « Je dispose d’une
technologie souple, et cela ne coûtera rien de la déployer dans les réseaux ».
Pour l’heure, il faudra se contenter de
cette bribe d’explication… ■