Fiche d`actualité scientifique n°287 ( PDF , 191 Ko)

Transcription

Fiche d`actualité scientifique n°287 ( PDF , 191 Ko)
Fiche n°287 - Février 2008
Un nouveau test de dépistage de la tuberculose
plus efficace pour les victimes du VIH
es dix dernières
années, le VIH est
devenu le principal facteur responsable de la
hausse de l’incidence
de la tuberculose observée en Afrique. Chez
les patients porteurs
du VIH, la sensibilité au
test tuberculinique (TT)
est diminuée, ce qui le
rend peu fiable pour le
diagnostic et le suivi de
l’infection tuberculeuse.
De nouvelles techniques
reposant sur la mesure in
vitro du niveau d’Interféron-γ produit par les lymphocytes T en présence
d’antigènes spécifiques
du bacille de la tuberculose, ont été récemment
développées. Des études
menées principalement
en zone de faible endémie tuberculeuse ont déjà
montré une sensibilité et
une spécificité accrue de
ces tests par rapport au
TT. Une équipe de l’IRD,
en collaboration avec
plusieurs organismes
de recherche1, vient de
publier une étude visant
à comparer la validité
d’un de ces tests, utilisant la méthode ELIspot2,
avec celle du TT chez
des patients infectés par
le VIH. D’après les premiers résultats obtenus,
il apparaît que l’ELIspot
est plus sensible que le
test cutané pour le diagnostic de l’infection
tuberculeuse, permettant
ainsi un meilleur dépistage chez les patients
infectés par le VIH.
©IRD / Nguessan Jean-Pierre
C
Entretien et examen médicaux préalables à l'intégration d’un patient à l’étude clinique.
L’Organisation mondiale de la santé
(OMS) estime à 9 millions le nombre
de nouveaux cas de tuberculose survenant dans le monde chaque année.
Sur le continent africain, la croissance
de cette maladie reste particulièrement
forte du fait de la proportion importante
de patients séropositifs au VIH (près de
13% contre moins de 1%, par exemple,
dans les pays asiatiques). Dans cette
région du monde, le SIDA et la tuberculose, dont la progression conjuguée s’accélère, forment en effet une association
meurtrière car le virus affaiblit le système
immunitaire des individus qui en sont victimes. De ce fait, une personne infectée
par le VIH qui est aussi contaminée par
le bacille de Koch a un risque accru de
développer la tuberculose par rapport
à une personne non infectée. Depuis
plusieurs décennies, le diagnostic de l’infection tuberculeuse s’établit sur la base
de la positivité au test cutané tuberculinique. Celui-ci a cependant une fiabilité
limitée dans les pays à forte endémie
car la présence, dans l’environnement,
de mycobactéries similaires à celle de
la tuberculose et la vaccination, dès la
naissance, par le BCG, peuvent fausser
les résultats. De plus, chez les patients
porteurs du VIH, la sensibilité du test
est fortement diminuée du fait de leur
incapacité à développer une réaction
allergique, sur laquelle repose justement
le test cutané. La tuberculose contribuant
largement à la mortalité par le VIH, il est
cependant primordial de pouvoir diagnostiquer l’infection précocement afin
d’entreprendre un traitement adapté et
prévenir le développement d’une tuberculose maladie.
La mise au point de nouveaux tests
IGRA3 reposant sur la mesure in vitro de
la sécrétion d’Interféron-γ par les cellules
T mises en présence d’antigènes spécifiques de Mycobactérium tuberculosis,
le germe responsable de la tuberculose, permettent aujourd’hui de pallier
les défauts du test cutané. Bien que ces
nouvelles méthodes de diagnostic soient
plus efficaces que le test tuberculinique
(TT) dans un contexte de faible endémicité tuberculeuse, leur validité dans
des populations où le risque d’infection
Institut de recherche pour le développement - 213, rue La Fayette - F-75480 Paris cedex 10 - France - www.ird.fr
Retrouvez les photos de l'IRD concernant cette fiche, libres de droit pour la presse, sur www.ird.fr/indigo
>>
CONTACTS :
CHRISTIAN LIENHARDT
Directeur de recherche
IRD
Adresse :
Union internationale
contre la tuberculose et
les maladies pulmonaires
Division d’essai clinique
68, Boulevard St Michel
75006 Paris
France
Tél : 01 44 32 06 43
[email protected]
RELATIONS AVEC LES
MÉDIAS :
GAËLLE COURCOUX
+33 (0)1 48 03 75 19
[email protected]
INDIGO, PHOTOTHÈQUE
DE L’IRD :
DAINA RECHNER
+33 (0)1 48 03 78 99
[email protected]
www.ird.fr/indigo
RÉFÉRENCE :
KARAM F, MBOW F,
FLETCHER H, SENGHOR
CS, COULIBALY K,
LEFEVRE A, NGOM GUEYE
NF, DIEYE T, SOW PS,
MBOUP S, LIENHARDT C,
Sensitivity of IFN-γ
Release Assay to
detect Latent
Tuberculosis Infection
is retained in HIVinfected Patients but
dependent on HIV/AIDS
Progression, PLOS
One, 3(1) : e1441, 2008
doi : 10.1371/journal.
pone.0001441
MOTS CLÉS :
Tuberculose, test de
dépistage, SIDA
tuberculeuse latente est élevé, doit encore être clairement établie. La publication
récente des résultats d’une étude menée
au Sénégal et coordonnée par l’IRD en
collaboration avec d’autres institutions
scientifiques1 permet d’en savoir plus
sur l’efficacité comparée de la méthode
immunologique et du test tuberculinique
classique. Pour cela, les chercheurs ont
établi deux cohortes de patients résidant
dans la région de Dakar : la première
regroupait des personnes infectées par le
VIH mais ne présentant pas de tuberculose avérée ; la seconde rassemblait des
patients tuberculeux ainsi que les personnes du foyer ayant été en contact avec
eux pendant une période donnée.
Pour la première cohorte, 285 adultes
nouvellement infectés par le VIH et ne présentant aucun signe clinique ou radiologique de tuberculose ont été sélectionnés
au Centre hospitalier national universitaire
de Fann (Dakar) entre 2003 et 2004. Au
début de l’étude, un test ELIspot et un TT
ont été réalisés pour chacun des patients.
Sur la base du TT, 21% (53/247) d’entre
eux présentaient une infection tuberculeuse au moment du test. Cette proportion
atteignait en revanche 51% (125/247)
avec le test ELIspot. Il apparaît donc que
ce dernier est plus sensible que le TT
quel que soit le stade de l’évolution de la
maladie. Les scientifiques ont toutefois
observé que la capacité de réponse du
test ELIspot décroît avec la diminution du
taux de lymphocytes CD4, ce qui semble
indiquer les limites de ce type de test chez
les patients fortement immunodéprimés,
comme peuvent l’être des personnes à un
stade avancé d’une infection par le VIH.
En parallèle, une cohorte de ménages
de 243 patients tuberculeux a été suivie
pendant 2 ans. L’objectif était cette fois
de déterminer la capacité du test ELISpot
à prédire, parmi les personnes vivant au
contact de ces individus, ceux qui encourent le plus de risque de développer la
maladie. Entre janvier 2004 et mars 2005,
3072 contacts ont été identifiés pour l’ensemble des patients tuberculeux. Selon
les résultats préliminaires, la sensibilité
des deux tests était comparable dans
cette cohorte, l’ELIspot disposant toutefois d’une meilleure spécificité puisqu’il
n’est pas influencé par la vaccination
récente par le BCG.
Les données recueillies tout au long
de ces études doivent maintenant être
analysées plus en détail afin de déterminer si les nouveaux tests basés sur la
mesure de la réponse immunitaire à des
antigènes spécifiques de M. tuberculosis
peuvent servir de moyen de diagnostic
fiable de l’infection tuberculeuse dans
les zones géographiques où la maladie
est endémique et bénéficie d’une forte
couverture par le BCG. Ces investigations
devraient également permettre de savoir
si ces tests pourront, à l’avenir, servir de
marqueurs du développement de la maladie au sein d’une population donnée.
Rédaction DIC - Grégory Fléchet
1. Ces travaux coordonnés par l’IRD
ont été menés dans le cadre du projet
A F T B VA C ( D é v e l o p p e m e n t d ’ u n
vaccin anti-tuberculeux en Afrique), en
collaboration avec des chercheurs du
Medical Research Council anglais, de
l’université d’Oxford, de l’Institut Pasteur de
Bruxelles, du Laboratoire de bactériologie
et virologie de l’hôpital Le Dantec
(Sénégal), des services des Maladies
infectieuses et de Pneumologie du Centre
hospitalier national de Fann (Dakar).
2. Le test mesure la libération d’interféronγ (IFN-γ) par les cellules T stimulées par
des antigènes spécifiques du germe de la
tuberculose (Mycobacterium tuberculosis).
Le nombre de cellules T sécrétant l’IFNγ est déterminé en comptant les taches
(“spots”) sur une membrane recouvrant les
puits d’une plaque d’ELISA. Chaque “spot”
représente une cellule T sécrétant l’IFN-γ.
3. Ces tests sont dénommés de manière
générique IGRA (Interferon-γ Release
Assays). Les versions commerciales
disponibles sont le QuantiFERONTB-Gold® et le T-SPOT TB®.
© University of Oxford, Hutchings Claire
Fiche n°287 - Février 2008
Pour en savoir plus
Résultats d’un test IGRA : chaque point violet
ou «spot» correspond à une cellule T
sécrétant l’interféron-γ.
Grégory Fléchet, coordinateur
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33(0)1 48 03 76 07 - fax : +33(0)1 40 36 24 55 - [email protected]